Déversements pétroliers en eau douce: aspects chimiques et effets sur la flore et la faune aquatique

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1 40 ème Congres de l ABQ, Orford (Qc) 5-6 novembre 2015 Déversements pétroliers en eau douce: aspects chimiques et effets sur la flore et la faune aquatique Émilien Pelletier Professeur associé Institut des sciences de la mer de Rimouski (ISMER/UQAR)

2 Sommaire de la présentation Chimie 101 du pétrole Les processus naturels en action Effets à court terme sur la faune et la flore Effets à long terme sur le milieu dulcicole Le cas de la rivière Kalamazoo Le suivi à court et long terme

3 Nature des hydrocarbures déversés Les produits raffinés Les pétroles bruts conventionnels Les bitumes dilués Les mazouts et autres résidus lourds

4 Les produits raffinés Distillats légers à la base des solvants Plusieurs types d essence Diésel et huile à chauffage Tous des mélanges légers avec une forte perte par évaporation dans les heures suivants un déversement. Faible teneur en soufre et en métaux, Résidus noirâtres et flottants, riches en aromatiques substitués et alcanes moyens.

5 Les pétroles bruts Très grande variation de la composition et des propriétés physico-chimiques des pétroles bruts conventionnels selon leur origine: Mer du nord; Afrique du nord (Lybie, Algérie), péninsule arabique et Iran; Afrique de l ouest Amérique du sud (Venezuela, Brésil) Amérique du nord (golfe du Mexique et Texas) Formation étanche de Bakken.

6 Les pétroles bruts conventionnels Hydrocarbures Moyenne Variation Paraffines 30% 15 to 60% Naphthènes 49% 30 to 60% Aromatiques 15% 3 to 30% Asphaltènes 6% Le reste Paraffines Alcanes linéaires de C5 à C40+ Naphthènes: Cycloalcanes Aromatiques: composés mono- et polycycliques Asphaltènes: composés polycycliques lourds Le pétrole contient aussi quelques métaux lourds et du soufre.

7 Les bitumes dilués (dilbits) Le bitume extrait des sables et schistes bitumineux est un mélange très visqueux à température ambiante et de densité supérieure à celle de l eau douce. Les bitumes sont riches en soufre et quelques métaux. Les bitumes dilués (dilbit, synbit, dilsynbit) sont composés de 50 à 80% de bitume et d un diluant léger (condensat) formé d alcanes de courtes chaines (C5 à C8).

8 Composition moyenne des dilbits Saturés: 15-20% Aromatiques: 10-15% Résines: 30-35% Asphaltènes: 35-45% Tous les dilbits canadiens ont des teneurs en BTX <1% volume.

9 Mazouts industriels Fuels industriels et marins utilisés dans l industrie lourde (métallurgie, pâtes et papier, cimenterie, chauffage industriel, moteurs marins, ) composés de paraffines et naphthènes lourds ainsi que des proportions variables de résines et d asphaltènes. Mélanges visqueux avec une densité proche de celle de l eau. Exemples: IFO 180, bunker C, HFO 6303

10 Les processus naturels en action

11 Évaporation Une portion importante (entre 20 et 60%) du pétrole brut déversé est perdue par évaporation des fractions légères des hydrocarbures. Selon la température de l eau et les conditions de la météo (vent, pluie, neige, ). Surtout au début du déversement, avant la formation des émulsions et la dispersion.

12 Dispersion et émulsification L action physique de l eau (vagues, courants, cascades, obstacles divers, ) sur la couche d hydrocarbures provoque des changements physicochimiques dont une augmentation de l interface eau/pétrole et une structuration chimique de cet interface; Processus devenant irréversible avec le temps.

13 Biodégradation Attaque de la communauté bactérienne naturelle sur les gouttelettes de pétrole dans les jours suivant le déversement. Surtout fonction de la température et de la dispersion. La dispersion augmente la surface d attaque bactérienne et donc augmente la biodégradation.

14 Sédimentation Le pétrole brut est moins dense que l eau mais la capture de grains de sable et autre matière dense augmente la densité des émulsions et peut provoquer la sédimentation du pétrole. Formation de boulettes de goudron qui flottent sous la surface de l eau et qui sédimentent après plusieurs jours ou semaines. Les dilbits et mazouts lourds sédimentent en quelques heures après la perte de leur fraction légère.

15 Effets à court terme sur les organismes Oiseaux et petits mammifères Poissons Crustacés et invertébrés benthiques Herbiers et marais

16 Oiseaux et mammifères Perte considérable des oiseaux marins Exxon Valdez: morts et 90 espèces Perte réel estimée entre et Les mammifères à fourrure sont les plus touchés: Les loutres, les visons, les rats-musqués,...

17 Les poissons Souvent très difficile d observer directement les effets sur les poissons à cause de leur mobilité. Mortalité massive rarement observée. Les effets sur les larves et juvéniles clairement démontrés en laboratoire et en terrain. Aucun cas bien documenté en eau douce.

18 Crustacés et autres invertébrés Effets évidents de la dispersion du pétrole sur les espèces planctoniques; Bioaccumulation chez tous les bivalves filtreurs et perte des élevages aquicoles; Perte des batraciens et reptiles (tortues); Effets sur le développement et la défense immunitaire chez les premiers stades pélagiques de toutes les espèces.

19 Herbiers et marécages Effets rapides et visibles sur les herbiers et marécages: réduction de la photosynthèse et de la transpiration; mortalité complète selon le type de pétrole et le niveau d exposition; pénétration de l huile dans le sol et érosion de la marge exposée à l action des vagues; Atteinte majeure aux écosystèmes associés aux marécages et herbiers;

20 Effets à long terme sur les espèces d eau douce Effets à long terme sur la reproduction et la défense immunitaire de toutes les espèces: Les oiseaux migrateurs: les palmipèdes et les rapaces. Les poissons anadromes: le cas du saumon Les batraciens et reptiles

21 L accident de la rivière Kalamazoo Rupture d un oléoduc de 30 po le 26 juillet 2010 sur le ruisseau Talmadge Creek, un tributaire de la rivière Kalamazoo (Calhoun County, Michigan). Déversement de 3,2 millions de litres de «crude oil-like dilbit» pendant environ 17h avant intervention. Contamination de la rivière Kalamazoo sur environ 40 km Coût du nettoyage: > 1 milliard US$ sur 4 années.

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27 Méthodes d intervention Atténuation naturelle dégradation in-situ; Augmentation de la sédimentation suivie d un dragage; Agitation des eaux et du sédiment superficiel dans un enclos; Pousser/balayer vers des trappes à sédiment; Grattage des surfaces nues ou peu végétées; Éponger le «sheen» de surface. Solution ultime: dragage mécanique et par succion;

28 Dragage du pétrole submergé

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30 Lac Mégantic et rivière Saint-Charles Déversement total estimé à litres

31 Évaluation du risque écotoxicologique dans les sols et sédiments 1. Établir le niveau de contamination du milieu; 2. Établir un indice du risque par rapport aux niveaux de références; 3. Évaluer les effets sur les récepteurs écologiques; 1. Tests de toxicité chronique en laboratoire. 2. Étude des communautés benthiques dans les sites «positifs».

32 Suivi à moyen et long terme Effets chroniques et subtils à long terme des hydrocarbures maintenant bien établis pour plusieurs espèces aquatiques. Un suivi annuel sur une décennie est recommandé pour les communautés benthiques et ichtyologiques les plus directement touchés par la sédimentation du pétrole. Mise en place d un modèle de risques relatifs pour les principales rivières du Québec.

33 En conclusion Beaucoup de petits incidents, mais rarement des accidents majeurs; Difficultés d accès le long des cours d eau impactés; Dommages considérables aux propriétés et aux infrastructures; Impacts à moyen terme sur les espèces benthiques probables mais encore peu connus. Recommandation: Identifier les zones à risques et les moyens d intervention rapide.

34 Le cas du saumon rose Accident de l Exxon Valdez au printemps 1989; Contamination de l embouchure des rivières à saumon du Prince William Sound; Déclin des populations de saumon et de hareng à long terme; Intense controverse chez les scientifiques et gestionnaires sur les causes réelles du déclin.