Enjeux et apports de l éditorialisation dans les sites de VOD français

Transcription

1 CONSERVATOIRE NATIONAL DES ARTS ET METIERS INSTITUT NATIONAL DES TECHNIQUES DE LA DOCUMENTATION MEMOIRE pour obtenir le Titre professionnel "Chef de projet en ingénierie documentaire" INTD niveau I présenté et soutenu par Valérie Dhiver le 3 décembre 2008 Jury : Claire Scopsi Xavier Lemarchand Enjeux et apports de l éditorialisation dans les sites de VOD français Cycle supérieur Promotion XXXVII

2 A Michel pour son soutien sans faille, à Alice et Adèle 2

3 Remerciements Je remercie Xavier Lemarchand et toute l équipe du studio Hypermedia de l INA pour leur accueil, et leurs conseils tout au long de mon stage. Je remercie Claire Scopsi pour sa disponibilité, son soutien et ses conseils qui m ont permis de progresser dans ma réflexion. Je souhaite également remercier toutes les personnes qui ont accepté de m accorder un entretien dans le cadre de ce mémoire. Et enfin, un grand merci à ma famille, à Katell et Fred pour leur aide et leurs conseils au moment de la relecture, et à mes collègues de l INTD pour leur solidarité tout au long de ces deux années de formation. 3

4 Notice. Mémoire titre professionnel de niveau 1, INTD, VOD ; COMMERCE ELECTRONIQUE ; SITE WEB ; FOURNISSEUR D ACCES ; IMAGE ANIMEE ; FILM ; AUDIOVISUEL ; CINEMA ; VALORISATION ; VALEUR AJOUTEE ; EDITORIALISATION Dans quelle mesure l éditorialisation peut-elle contribuer au succès de la VOD? Après avoir rappelé la définition de la VOD et fait un état des lieux du marché et des nombreuses problématiques juridiques, ce mémoire s interroge sur les enjeux et les apports de l éditorialisation dans les sites de VOD. Il s appuie sur une étude comparative d un panel de plates-formes Internet françaises de VOD pour montrer les différentes techniques d éditorialisation. 4

5 Table des matières INTRODUCTION... 9 PREMIERE PARTIE CONTEXTE ET ENJEUX DU MARCHE FRANÇAIS DE LA VOD QU EST-CE QUE LA VOD? UNE DEFINITION DE LA VOD QUI PEUT ETRE AMBIGUË DEFINITION TECHNIQUE DE LA VOD LE MARCHE DE LA VOD UN MARCHE EN PLEINE CROISSANCE MAIS ENCORE MARGINAL PAR RAPPORT AUX AUTRES MODES DE DIFFUSION DES ŒUVRES AUDIOVISUELLES DES ACTEURS DE PLUS EN PLUS NOMBREUX PRATIQUES DE CONSOMMATION DE LA VOD LES CONTRAINTES JURIDIQUES LA LIQUIDATION DES DROITS DE MISE EN LIGNE ET LE PROBLEME DES ŒUVRES ORPHELINES UNE CHRONOLOGIE DES MEDIAS EN COURS DE DISCUSSION LE PROBLEME DES DRM LES ENJEUX DE LA VOD UN CONSOMMATEUR DE PLUS EN PLUS SELECTIF VIS-A-VIS DES OFFRES PAYANTES LES CRITERES DETERMINANTS DU SUCCES DES SITES VOD La notoriété et l accessibilité des services de VOD La proposition d offres fidélisantes Nature des catalogues en ligne en termes de volume, de qualité et de diversité : L ergonomie des plates-formes et la qualité d accompagnement du choix des visiteurs 27 5 LES CONCEPTS «D EDITORIALISATION» ET DE «VALEUR AJOUTEE DOCUMENTAIRE» DEUXIEME PARTIE ETUDE COMPARATIVE DES INTERFACES DE PLATES-FORMES VOD SUR LE WEB METHODOLOGIE PREPARATION D UNE GRILLE D ANALYSE STRUCTUREE DES SITES DE VOD SELECTION DES SITES A ANALYSER

6 1.3 LIMITES DE CETTE METHODE ETUDE COMPARATIVE OFFRE CINEPHILE DE SITES VOD Présentation de chaque site Etude comparative des fonctionnalités Accès au catalogue Fonction recherche : Mise en avant d une partie du catalogue Sélections éditoriales Métadonnées et offre de contenus complémentaires Fonctionnalités du web communautaire OFFRE SPECIALISEE ET THEMATIQUE VOD Mania nema.com Vodeo L Europe des cultures OFFRE CINEMA GRAND PUBLIC Présentation de chaque site Etude comparative des fonctionnalités Accès au catalogue Fonction recherche Mise en avant d une partie du catalogue sélection éditoriale Métadonnées et offre de contenus complémentaires Fonctionnalités du web communautaire OFFRE VOD DES PLATES-FORMES EDITEES PAR LES CHAINES DE TELEVISION Présentation de chaque site Analyse comparative des fonctionnalités Accès au catalogue Fonction recherche : Mise en avant d une partie du catalogue sélection éditoriale Métadonnées et offre de contenus complémentaires Fonctionnalités du web communautaire TROISIEME PARTIE L EDITORIALISATION DANS L OFFRE VOD : APPORTS ET MOYENS MIS EN OEUVRE DEUX TYPES DE STRATEGIES DE L OFFRE SYNTHESE DES DIFFERENTES TECHNIQUES DE VALORISATION DES FILMS EN LIGNE UNE STRUCTURATION DU SITE AU SERVICE DE LA CLARTE MAXIMALE DE L OFFRE LA NECESSITE D UN MOTEUR DE RECHERCHE PLEIN TEXTE PERTINENT ET INTUITIF

7 2.3 PRIORITE AUX NOUVEAUTES ET MEILLEURES VENTES UN BESOIN CROISSANT D EDITORIALISATION Fiche descriptive des films et compléments proposés La mise en avant des films par un accompagnement éditorial adéquat Des fonctionnalités du marketing communautaires encore peu exploitées Des services pour fidéliser le visiteur LES APPORTS ET LES LIMITES DE L EDITORIALISATION LES MOYENS HUMAINS ET TECHNIQUES AU SERVICE DE L EDITORIALISATION LE SERVICE EDITORIAL : UN SERVICE TRANSVERSAL AU CŒUR DE L ACTIVITE DES PLATES- FORMES DE VOD DES TECHNIQUES DOCUMENTAIRES SIMPLIFIEES UNE PLACE A PRENDRE POUR LES SPECIALISTES DE L INFORMATION CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE SITOGRAPHIE ANNEXES ANNEXE 1 GLOSSAIRE VOD ANNEXE 2 LISTE DES PLATES-FORMES VOD SUR INTERNET PAR TYPES DE CONTENUS ANNEXE 3 LISTE DES AUTRES PLATES-FORMES VOD (TVIP «CATCH UP TV» CONSOLES DE JEUX ET BALADEURS) ANNEXE 4 GRILLE D ANALYSE STRUCTUREE DES SITES DE VOD ANNEXE 5 GUIDE D ENTRETIEN

8 Liste des tableaux Tableau n 1 : Chiffre d'affaires de la VOD en France 16 Tableau n 2 : Structure de la consommation de VOD par type de contenus en 2007 (%) 17 Tableau n 3 : Chronologie des médias français depuis décembre Tableau n 4 : Composition de l offre de films en VOD en fonction de la date de sortie en salles (mai 2008) 27 8

9 Introduction 9

10 Grâce à la numérisation des œuvres audiovisuelles, la généralisation du haut débit et le succès des offres «triple play» des fournisseurs d accès Internet en France, les services de Vidéo à la Demande (VOD) sont actuellement en plein développement et de plus en plus d acteurs proposent leurs services. Après un départ un peu lent, la VOD devient enfin connue du grand public. La VOD est considérée par les acteurs de l industrie comme un nouveau moyen de valorisation des œuvres audiovisuelles et notamment de celles qui ont du mal à exister sur les autres réseaux de diffusion. Les professionnels de l audiovisuel et les institutionnels poussent également au développement de la VOD pour lutter contre les pratiques de piratage qui sont de plus en plus courantes. Mais comment faire en sorte que les gens acceptent de payer pour un service qu ils estiment pouvoir avoir gratuitement? Quels sont les critères qui favorisent l utilisation de la VOD? On parle de plus en plus «d éditorialisation» des contenus. Que signifie ce terme et dans quelle mesure peut-il contribuer au succès de la VOD? Après avoir défini ce qu on entend par «VOD», nous ferons dans une première partie un état des lieux du marché et des nombreuses problématiques juridiques posées par la VOD. Nous montrerons les différents enjeux de ce secteur et tenterons de définir les concepts «d éditorialisation» et de «valeur ajoutée documentaire». Une seconde partie sera consacrée à une étude comparative d un panel de plates-formes VOD sur le web. Nous nous intéresserons aux modes de navigation et d éditorialisation proposés par différents types de sites de VOD. Enfin, dans une troisième partie, nous ferons une synthèse des différentes techniques de valorisation que nous avons pu observer et nous interrogerons sur les apports et les limites de cette éditorialisation. Nous aborderons également les moyens humains et techniques qui lui sont consacrés et réfléchirons à la contribution que peuvent apporter les spécialistes de l information. Afin de faciliter la lecture de ce mémoire, nous avons adopté les conventions suivantes : Les chiffres entre crochets renvoient aux références de la bibliographie analytique qui est à la fin de ce mémoire. Les notes de bas de page concernent les références des citations qui ne sont pas indiquées dans la bibliographie (essentiellement des articles de presse). 10

11 Première partie Contexte et enjeux du marché français de la VOD 11

12 1 Qu est-ce que la VOD? 1.1 Une définition de la VOD qui peut être ambiguë La définition la plus simple et la plus parlante de la «vidéo à la demande», plus souvent abrégée en VOD (de l anglais Video on Demand) est celle proposée par Vodeo, un site de VOD consacrée au documentaire : «La VOD, c est quoi? Tout simplement la possibilité de voir ce que vous voulez, quand vous le voulez, où vous le voulez et comme vous le voulez. Et ce, directement via Internet.» 1 Ainsi, la VOD «regroupe un large ensemble de technologies dont le but commun est de permettre de choisir un contenu vidéo et de le louer, ou de l acheter à distance sous forme dématérialisée, afin de le visionner immédiatement ou de manière différée sur plusieurs types de supports (ordinateur, téléviseur, téléphone, lecteur portable ) dans un délai limité ou illimité.» [8, Observatoire européen de l audiovisuel] C est donc un nouveau mode de diffusion qui s apparente à la location de programmes audiovisuels, à mi-chemin entre la vidéo et la télévision payante et présente de nombreux avantages : cette offre de programmes dématérialisée et non linéaire permet une interactivité, une disponibilité permanente et quasi immédiate des titres, et une accessibilité des services 24 heures sur 24 à domicile. Contrairement aux services du pay per view (paiement à la séance) diffusés à heure fixe, «les contenus peuvent être consommés indépendamment d un programme, au moment choisi par le consommateur.» comme le souligne la Commission Européenne. [1, BOMSEL] En général, le terme de VOD est entendu comme un service payant, soit à la location, soit à l achat. Néanmoins, dans son étude sur l économie des services de VOD, le CNC distingue actuellement quatre principaux modèles économiques de la VOD : [3, CNC] La location via le «streaming» ou le téléchargement progressif permettant le visionnage unique d une œuvre sur une durée limitée. La vente via le téléchargement définitif d un fichier pour un usage illimité : c est le modèle le plus attractif en terme de rémunération pour les éditeurs et les ayants 1 Vodeo [en ligne] [consulté le 20/10/2008] 12

13 droit. Ce modèle devrait être privilégié par les éditeurs de DVD pour pallier la chute du marché du DVD. La formule par abonnement «S-VOD» (Subscription Video on Demand) qui permet au téléspectateur de souscrire à un forfait mensuel qui lui donne accès sans limites à un catalogue. La diffusion gratuite financée par la publicité (FVOD ou Free-ad VOD) Le marché de la VOD en France s appuie pour le moment sur le modèle de la location et du paiement à l acte : celui-ci constituait plus de 95% des recettes de VOD en [2, CNC] Néanmoins, d après le cabinet américain Forrester Research, ce modèle devrait décliner rapidement à partir de 2008, et la VOD devrait s orienter vers de nouveaux modèles [5, CCIP] : La VOD gratuite (FVOD) avec notamment le développement des services de «catch up TV» (télévision de rattrapage) proposés par les chaînes de télévision. Le développement des formules d abonnement (SVOD) pour l offre de films : ce modèle est prôné par les opérateurs de télécommunications et les fournisseurs d accès à Internet. Sur la première moitié de l année 2008, près de abonnements ont été commercialisés par mois. 2 Contrairement à ce que réclament certaines chaînes comme Canal +, les services de «catch up TV» sont donc considérés par le CNC comme de la VOD alors qu ils sont liés directement à une diffusion télévisée. Cette prise de position a des incidences sur la rémunération des ayants droit qui devront être rémunérés en plus pour cette diffusion, et sur les règles de la chronologie des médias comme nous le verrons ultérieurement. Par ailleurs, qu en est-il des sites institutionnels ou de valorisation du patrimoine comme les cinémathèques qui proposent ou proposeront bientôt le visionnage de leurs archives audiovisuelles? A titre d exemple, le site Europa Film Treasures qui a été lancé en juillet 2008 et qui présente les trésors cachés de cinémathèques européennes gratuitement en streaming 3 est également considéré comme un service de VOD. Actuellement, il n existe pas de définition unique des services de VOD. Leur description diffère d un contrat à l autre. Ces ambiguïtés montrent que l industrie de la VOD, comme 2 ZDNet.fr. VOD. Vers un doublement du marché en 2008 [en ligne]. ZDNet.fr 22/09/2008 [consulté le 25/11/2008] 3 Europa Film Treasures [en ligne] [consulté le 18/11/2008] 13

14 beaucoup d activités liées à l économique numérique et à Internet, n en est encore qu à ses débuts, et que ses modèles économiques ne sont pas complètement définis. Dans cette étude, nous nous concentrerons essentiellement sur des sites de VOD payants (location et/ou achat). 1.2 Définition technique de la VOD D un point de vue technique, la «Vidéo à la Demande» est la «mise à disposition des programmes au consommateur final par tout réseau de communication électronique (via Internet, par voie hertzienne terrestre, par câble, par satellite), par tous procédés de diffusion cryptée, tels que le «streaming» (diffusion linéaire) ou le «downloading» (téléchargement), pour visualisation sur tout matériel de réception, par tout mode de sécurisation et selon les fonctionnalités des systèmes d accès conditionnel utilisés, et ce après paiement d un prix, pour une représentation dans le cadre du «cercle de famille». [2, CNC] Les services de VOD peuvent être accessibles via divers types de réseaux de communication tels que le câble, le satellite, la TNT. Actuellement, les deux principaux supports de distribution sont : L'IPTV (Internet Protocol TV) : soit la télévision par ADSL, protocole dédié au transfert des flux télévisuels à travers un réseau IP comme l Internet. La VOD est ainsi proposée par les fournisseurs d accès à Internet (FAI) comme un service additionnel lié à l offre de télévision sur ADSL. Ce service est réservé aux abonnés du FAI. La visualisation des programmes se fait sur téléviseur. En terme de volume, c est l IPTV qui engendre le plus de transactions payantes de VOD en France (85% en 2007) [2, CNC]. Le réseau Internet : L accès aux services de VOD et la réception des programmes se fait via l ordinateur. Des plates-formes de VOD proposent l accès à leur catalogue de vidéos stockées en ligne. Théoriquement, ces services de VOD sont accessibles à tous les internautes, mais comme nous le verrons ultérieurement, les utilisateurs d ordinateurs Apple et Linux sont souvent pénalisés en raison du format de DRM choisi par la plupart des sites de VOD. En France, c est sur Internet que le nombre de services de VOD est le plus important. Des services de VOD accessibles sur baladeur multimédia, console de jeux vidéo et téléphone portable commencent également à se développer. 14

15 Concernant les méthodes de diffusion, on distingue deux principaux modes de fonctionnement : Le «streaming» (diffusion en mode continu) qui permet la lecture d'un flux vidéo à mesure qu'il est diffusé. Le «téléchargement définitif» qui permet à l utilisateur de conserver le fichier téléchargé sur son PC et de pouvoir y accéder autant de fois qu'il le souhaite sans condition de durée. 2 Le marché de la VOD 2.1 Un marché en pleine croissance mais encore marginal par rapport aux autres modes de diffusion des œuvres audiovisuelles La vidéo à la demande se développe depuis le début des années 2000 suite à l'explosion des services d accès très haut débit, proposés aux particuliers. Malgré des revenus encore modestes, le marché de la VOD progresse d année en année et son développement s accélère depuis En France, son chiffre d affaires est passé de 16,5 millions d euros en 2006 à près de 30 millions d euros en 2007 pour 5,8 millions de visionnages payants. [5, CCIP] En 2008, la croissance de la VOD s est encore accélérée : selon le baromètre GfK - NPA, il y a eu près de 6 millions de téléchargements sur le premier semestre Le cabinet de conseil Olivier Wyman prévoyait dans une étude réalisée en mai 2007 que le marché français de la VOD engendrerait entre 310 et 500 millions d euros en 2012 «en fonction des progrès réalisés par les acteurs du marché en terme d ergonomie et de navigation sur l écran de télévision.» 5 Notons néanmoins que ces chiffres restent encore marginaux par rapport au chiffre d affaires du DVD : en 2007, la VOD ne représentait que 1,7% de celui du marché du DVD. [2, CNC] 4 4 ZDNet.fr. VOD. Vers un doublement du marché en 2008 [en ligne]. ZDNet.fr 22/09/2008 [consulté le 25/11/2008] 15

16 Tableau n 1 : Chiffre d'affaires de la VOD en France Chiffre d affaires du DVD 1 milliard 700 1milliard 658 Chiffre d'affaires de la VOD 29,2 millions (1,7% du CA du DVD) Paiement à l'acte 95,7 % du CA Abonnement 4,3 % du CA Source : CNC - GFK 16,5 millions (0,9% du CA du DVD) 2.2 Des acteurs de plus en plus nombreux La France est à la première place européenne en terme de nombre d offres proposées. Au dernier recensement début 2008, elle comptait 45 plates-formes de VOD payantes tous réseaux confondus [2, CNC], mais nous estimons que le nombre réel est beaucoup plus important car de nouveaux services apparaissent actuellement tous les mois. [Voir listes en annexes 2 et 3] Ce marché très compétitif regroupe de nombreux acteurs : fournisseurs d accès Internet (Free, Alice, Orange), chaînes de télévision (Canal +, France Télévision, TF1, ARTE), producteurs et distributeurs indépendants (Univerciné, MK2VOD), acteurs du secteur de la vidéo/dvd (Glowria, Montparnasse Editions), distributeurs de produits culturels (Fnac, VirginMega), équipementiers (Apple, Microsoft) ou acteurs de l Internet (Google). Ces différentes plates-formes peuvent être classées en trois catégories, en fonction de l activité de leur éditeur et du volume de leur catalogue : [7, Media Consulting Group] Les services proposés par un éditeur de DVD ou d un détenteur de droits isolé. Leur offre de titres est réduite au catalogue de l éditeur et comprend généralement moins de 100 titres. (exemples : Editions Montparnasse, Blaq Out avec le site Dissidenz.com) Les services généralistes ou thématiques proposés par des sociétés indépendantes ou des agrégations de producteurs/distributeurs. Le catalogue varie entre 300 et 800 titres. (exemples : MK2, UniversCiné, Vodeo, Glowria) 5 ZDNet France. VOD: la France numéro un du secteur en Europe [en ligne] 07/05/07 - [consulté le 1/11/2008] 16

17 Les services généralistes proposés par des filiales de groupes de communication, des opérateurs de télécommunications ou des FAI. Les catalogues dépassent généralement les 1000 titres. (TF1 Vision, CanalPlay, Arte VOD, Orange ) 2.3 Pratiques de consommation de la VOD Selon une enquête publiée par le CNC et Harris Interactive en 2007 [2, CNC], les habitudes de consommation de la VOD se caractérisent par : Une population masculine et technophile Les utilisateurs de VOD sont majoritairement des hommes âgés de 25 à 34 ans appartenant aux catégories CSP +. C est une population urbaine et technophile. Le cinéma, produit n 1 de la VOD Les consommateurs de VOD sont également consommateurs de films en salles et en vidéo. Par ailleurs, les films représentent 67% des programmes visionnés en VOD. Le cinéma est donc la pierre angulaire de l offre VOD et l enrichissement des catalogues de films est vital pour les sites de VOD [5, CCIP]. Tableau n 2 : Structure de la consommation de VOD par type de contenus en 2007 (%) Films 66,7 % (dont 35,3 % de films américains et 27,8 % films français) Séries télévisées 11,2% (dont 8,3 % de séries américaines) Programmes jeunesse, mangas...) 8,1% Films pour adultes 5,3 % Documentaires 4,6 % Concerts/spectacles 4 % Source : CNC Harris Interactive Après le cinéma, ce sont les séries télévisées et les films pour adultes qui sont les plus prisés par les consommateurs de VOD. Domination de la VOD sur IPTV par rapport aux services sur Internet. Le téléviseur reste le support de visionnage le plus naturel pour visionner des programmes en ligne. Plus confortable qu un écran d ordinateur, il permet de visionner un film en famille. Dans la mesure où les services de VOD sur téléviseur sont proposés par des FAI, le paiement est reporté à la fin du mois sur la facture du 17

18 FAI : il est donc dématérialisé et indolore lors de la commande comparé aux services de VOD sur Internet pour lesquels le paiement se fait par carte bancaire et souvent à l acte. Il faut néanmoins noter que l ergonomie et les fonctionnalités de navigation sur l interface IPTV sont beaucoup plus limitées que sur celle des sites Web de VOD, car elles sont dépendantes de la télécommande. 3 Les contraintes juridiques La mise à disposition de films sur Internet crée de nouveaux enjeux juridiques : il faut tout d abord acquérir les droits pour leur diffusion en ligne, ce qui s avère difficile pour les vieux films. Par ailleurs, la mise en ligne des œuvres audiovisuelles remet en cause les autres modes de diffusion et pose des problèmes délicats au niveau de son insertion dans la chronologie des médias. Il y a enfin des risques de contrefaçon inhérents à la numérisation des œuvres et leur diffusion en ligne, contre lesquels les ayants droit tentent de se protéger en adoptant des systèmes de protection, les DRM. Néanmoins, ces dispositifs vont parfois à l encontre des intérêts de la VOD. 3.1 La liquidation des droits de mise en ligne et le problème des œuvres orphelines En Europe, en vertu du concept juridique «d œuvre de collaboration», les droits d une œuvre audiovisuelle sont conjointement détenus par tous ceux qui ont contribué à sa réalisation. Le producteur d un film doit donc conclure un accord avec tous les détenteurs des droits d auteur et droits voisins avant de le diffuser en ligne. Ainsi, le refus d un des ayants droit ou l impossibilité à le retrouver peut empêcher sa mise en ligne. La liquidation des droits ne pose pas trop de problèmes pour les œuvres récentes car les droits de diffusion en ligne peuvent être prévus par des accords contractuels entre le producteur et les différents ayants droit impliqués dans la production ou les sociétés de gestion collectives qui les représentent. Néanmoins, les droits de mise en ligne sur Internet n appartiennent pas toujours aux mêmes ayants droit que les autres droits et cette fragmentation entraîne donc des complications pour les opérateurs de VOD. Ainsi, le site 18

19 Glowria, n 1 de la location de DVD en ligne, dispose dans son catalogue de titres en location de DVD mais seulement 2000 en VOD. 6 Le problème est encore plus aigu pour les films plus anciens pour lesquels il est difficile de retrouver tous les ayants droit. C est ce qu on appelle le problème des «œuvres orphelines». Selon une étude de 2002 sur la diffusion du patrimoine culturel français par le biais du numérique, 30 à 40% des films détenus par le Service des Archives du film sont orphelins. «Leur société productrice a disparu et on ne sait pas qui a récupéré les droits». [19, Ory-Lavolée] 3.2 Une chronologie des médias en cours de discussion La chronologie des médias définit l ordre et les délais qui doivent être respectés pour l exploitation d une œuvre cinématographique, depuis sa sortie en salles jusqu à sa diffusion sur une chaîne de télévision non cryptée gratuite. Elle a été instaurée pour protéger les exploitants de salles de cinéma face à la concurrence de plus en plus vive de la télévision et de la vente de vidéocassettes. C est aussi un outil de rémunération des ayants droit dont l objectif est d optimiser les recettes, en donnant la priorité aux modes de diffusion les plus rémunérateurs. Au niveau européen, le Conseil de l'europe tout comme les directives «télévision sans frontières» dont la dernière version date du 30 juin 1997 préconisent que la chronologie des médias doit être décidée contractuellement entre les ayants droit et les diffuseurs. En France, la chronologie des médias est régie par des accords entre les radiodiffuseurs et les organisations professionnelles. Ces accords ont la priorité sur d éventuels règlements individuels. Les règles concernant le délai pour la fenêtre de la VOD ont été établies pour la première fois en décembre 2005 en vertu d une charte signée entre les FAI et le monde du cinéma : la diffusion des films par VOD a été fixée à sept mois et demi (33 semaines) après leur sortie au cinéma, alors que le délai est de six mois pour la vente et la location de supports vidéographiques (VHS DVD). 6 Glowria [en ligne] [consulté le 20/11/2008] 19

20 Tableau n 3 : Chronologie des médias français depuis décembre 2007 Délai pour la première exploitation Dès l'obtention du visa d'exploitation Délai accordé à titre dérogatoire mode d'exploitation - exploitation en salle 6 mois - vente et location de supports vidéographiques 33 semaines - vidéo à la demande 9 mois - télévision payante à la séance ou "pay per view" 12 mois - télévision cryptée par abonnement 24 mois 18 mois télévision non cryptée gratuite coproductrice du film 36 mois - télévision non cryptée gratuite Source : Wikipedia Cette charte qui avait été établie pour une durée limitée d un an devait être renégociée mais pour le moment, aucun accord n a abouti. Les FAI souhaitent voir s aligner le délai de la VOD sur celui de la vente et location de DVD, c est-à-dire six mois après sa sortie sur le grand écran. Certains acteurs de l industrie audiovisuelle s y opposent, notamment Canal+ qui souhaite conserver le délai initial de 33 semaines afin de protéger ses propres intérêts financiers. Dans le cadre du projet de loi Création et Internet (Hadopi) qui vient d être adopté par le Sénat en octobre dernier, les représentants du cinéma, de la vidéo et les chaînes de télévision comme les opérateurs de télécommunication ont pour obligation de s entendre sur une nouvelle chronologie des médias pour la VOD avant mars La fenêtre VOD devrait être ramené à six mois, comme le préconisait le rapport Olivennes afin de proposer une offre légale la plus attractive possible pour lutter contre le téléchargement illégal. [18, Olivennes] En attendant, certains ayants droit bousculent déjà les règles en vigueur. Ainsi, Canal + a décidé de sortir la comédie française Disco de Fabien Onteniente le même jour en DVD et en VOD. 8 7 DUMONT Estelle. Les sénateurs valident la riposte graduée et mettre la pression sur les producteurs. ZDNet.fr [en ligne] 31/10/2008 [consulté le 21/11/2008] 8 DUMONT Estelle. Le film Disco distribué simultanément en DVD et VOD par Canal +. ZDNet.fr [en ligne], 19/09/2008 [consulté le 28/10/2008] 20

21 L émergence de la «catch up TV» bouscule également les règles actuelles car ce service s inscrit dans le cadre de la fenêtre de diffusion télévisuelle puisqu il permet aux téléspectateurs de visionner gratuitement des programmes qu ils n ont pas pu voir à la télévision pendant une certaine durée après leur diffusion. Pour l instant, ce type de services porte essentiellement sur des œuvres audiovisuelles et non cinématographiques, mais les chaînes commencent à proposer des services spécifiques concernant le cinéma. Ainsi Canal + a lancé en mars 2008 son service de Catch up TV "Canal+ à la demande", qui donne accès à l'ensemble des programmes proposés sur son offre multi chaînes, dont les films. "pendant leur période de multi diffusion sur Canal+, soit en général jusqu'à un mois après la première diffusion sur les chaînes». Ce service est réservé aux abonnés de Canal+ Le Bouquet. 9 Le développement de la VOD et l apparition de nouveaux modèles économiques remettent donc en question permanente la chronologie des médias existante, et les problèmes sont loin d être réglés. A court terme, la fenêtre VOD devrait s aligner sur celle du DVD, ce qui permettra d enrichir l offre en ligne avec des nouveautés, mais risque de bouleverser profondément les autres modes de diffusion : sorties en salles et surtout ventes et location de DVD. 3.3 Le problème des DRM Pour lutter contre le piratage et protéger les auteurs, l industrie audiovisuelle a mis en place un système de gestion des droits numériques appelé communément «DRM» (Digital Right Management). Ces systèmes de sécurité permettent aux titulaires des droits de contrôler l accès et l utilisation de leur contenu via des mesures technologiques. Cette technique prévoit par exemple de rendre impossible le transfert des œuvres d'un appareil à l'autre ou de contrôler la durée pendant laquelle le visionnage de la vidéo est possible (48h par exemple). Les DRM n'empêchent donc pas de visionner la vidéo achetée ou louée mais contrôle la durée et interdit la copie ou le transfert. 9 CHAMPEAU Guillaume. M6 et Canal+ lancent la Catch-up TV pour s'affranchir de l'horloge. Numerama [en ligne] 11/03/2008 [consulté le 24/11/2008] TV-pour-s-affranchir-de-l-horloge.html 21

22 Ainsi, l'utilisation de DRM n'octroie pas à son utilisateur la possession du bien mais une licence d'utilisation stockée sur le logiciel client ou le fichier. Cette licence reste sous le contrôle permanent du producteur de fichiers par l'intermédiaire de l'hébergeur du serveur DRM. Il n y a pas de norme unique de DRM. Plusieurs technologies concurrentes sont proposées, notamment par Microsoft, Apple et Sony. En ce qui concerne la VOD, la plupart des platesformes choisissent de crypter leurs vidéos avec Microsoft DRM qui est uniquement compatible sur le lecteur Windows Media Player DRM ; d autres ont choisi le format DivX qui offre une meilleure interopérabilité. Si le système des DRM est considéré par les ayants droit comme un moyen de contrôler la diffusion de leurs œuvres mises en ligne, il est remis en cause par certains, notamment lors du débat sur le projet de la loi DADVSI et par le rapport Olivennes sur le développement et la protection des oeuvres culturelles sur les nouveaux réseaux. [18, Olivennes] L efficacité de ce système pour protéger les œuvres soumises à droit d auteur est remise en question. «En effet, jusqu à présent, ces mesures n ont pas arrêté le piratage P2P et certains experts estiment même qu elles ne seront jamais efficaces dans un environnement en ligne.» [10, Cabrera Blasquez] Un algorithme de décodage finit tôt ou tard par être connu. Par ailleurs, on peut considérer que les DRM desservent le développement de la VOD pour les raisons suivantes : Il y a un problème d interopérabilité dans la mesure où la DRM Microsoft qui est la plus courante est incompatible avec les systèmes d exploitation Apple et Linux, ce qui représente un manque à gagner pour les opérateurs VOD puisque cela revient à exclure des clients potentiels à la location comme à la vente. Les DRM empêchent l utilisateur de visionner le film qu il a téléchargé dans les conditions qu il souhaite, par exemple sur son téléviseur. Leur durée de vie est limitée dans le temps. Il n est pas certain que les DRM soient lisibles plus de quelques années, ce qui ne favorise pas le développement des services de téléchargement définitif. En effet, en pratique, ce dispositif correspond plus à une location ou un droit d usage provisoire techniquement surveillé qu à une vente. Ainsi, de plus en plus d initiatives tendent à abandonner les DRM dans l industrie musicale mais aussi dans la VOD : c est notamment le cas des plates-formes Vodeo et Cinezime qui ont mis en ligne une partie de leur catalogue sans DRM. 22

23 Parallèlement, des alternatives techniques aux DRM émergent telles que le «watermarking» (tatouage numérique), dispositif qui permet d attacher à un fichier audiovisuel des données d authentification invisibles à l œil nu. L INA a également mis au point la technologie «Signature», fichier de données indépendant du document audiovisuel et géré par une base de données qui permet «de suivre et de contrôler l usage qui en est fait Ainsi, les détenteurs de contenus vidéo ont désormais la possibilité de protéger leurs œuvres. Et les plates-formes vidéo comme les fournisseurs d accès à Internet sont, eux, en mesure de détecter et de rejeter les tentatives de mises en ligne de contenus piratés.» [15, INA]. L INA et Canal + utilisent cette technologie pour protéger leurs contenus et un accord a été signé avec Dailymotion en octobre La tendance est donc vers un abandon des DRM et le développement de nouvelles technologies qui permettent de protéger les œuvres audiovisuelles contre le piratage tout en assurant aux utilisateurs une plus grande liberté d utilisation et une meilleure interopérabilité. L alignement prévu de la fenêtre VOD sur celle du DVD et les évolutions technologiques pour protéger les œuvres en ligne devraient donc aller en faveur de la VOD. Quels sont les autres facteurs qui feront en sorte que cette offre légale de contenus audiovisuels soit un moyen de lutte efficace contre le piratage comme la préconise le rapport Olivennes? [18, Olivennes] 4 Les enjeux de la VOD Contrairement à la location physique de DVD, les plates-formes de VOD proposent un service dématérialisé et ne sont donc par essence pas limitées par des problèmes de place ni de stockage. Dans l absolu, elles ont donc la possibilité d avoir un catalogue à la fois volumineux, éclectique et pointu. Selon le principe de la «Longue Traîne» développé par Chris Anderson dans un article publié en 2004 par le magazine Wired, la vente en ligne permet un glissement des marchés de masse aux marchés de niches en rendant profitables des ventes en toutes petites quantités qui jusqu à présent ne l étaient pas. [22, Anderson] 10 DUMOUT Estelle. Après Canal +, Dailymotion utilise la technologie de protection de l INA pour filtrer les contenus. ZDNet.fr [en ligne], 08/10/2007 [consulté le 10/11/2008],

24 Par ailleurs, la VOD est une offre non linéaire de programmes, soit une offre «qui permet d accéder à des programmes indépendamment d un flux de programmation» comme le définit Bernard Stiegler. [36, Stiegler] Ainsi, l utilisateur peut choisir le programme qu il veut quand il veut, et n est plus tributaire d une grille de programmation de télévision ou de sorties en salles. Comparativement aux autres modes de diffusion, la VOD présente des avantages non négligeables pour le consommateur. Celui-ci est malgré tout très sélectif vis-à-vis des offres payantes car l accès aux contenus gratuits se généralise. 4.1 Un consommateur de plus en plus sélectif vis-à-vis des offres payantes Le piratage audiovisuel s est fortement accentué avec la montée des débits et la sophistication des outils de stockage et de transfert. Selon le CNC, près de 94% des films sont piratés avant leur sortie vidéo en France. [5, CCIP] Par ailleurs, l accès à la vidéo gratuite est de plus en plus facile avec notamment le développement des offres gratuites de la TNT et des services de «catch up TV» offerts par les chaînes de télévision. Celles-ci sont complétées par les sites de partages de vidéos (Dailymotion, YouTube) qui sont très fréquentés. L essentiel de l effort consenti par les gens concerne donc le matériel et les équipements d accès à la vidéo, et beaucoup moins les contenus en eux-mêmes comme l indique l enquête du CNC sur les nouvelles formes de consommation des images. [4, CNC/QualiQuanti] Dans ce contexte, comment faire en sorte pour que les gens acceptent de payer pour quelque chose qu ils estiment pouvoir avoir gratuitement? Cela nous amène à nous interroger sur la «valeur» et «l utilité» des services de VOD telles qu elles sont perçues par le consommateur. 4.2 Les critères déterminants du succès des sites VOD La perception de valeur par le client est définie par Patrick Barwise et Sean Meehan, professeurs de marketing, comme «l'appréciation qu'aura le client de l'ensemble des avantages retirés d'un produit ou d'un service par rapport au coût total représenté par son prix d'achat ou sa jouissance.» [23, Barwise/Meehan] Olivier Bomsel parle lui de la notion «d utilité des biens culturels», qu il définit comme «la valeur qu un consommateur dérive d un bien, laquelle, pour que l achat ait lieu, doit être 24

25 supérieure à son prix. Le consentement à payer d un consommateur pour un bien correspond au maximum de l utilité que celui-ci en attend.» [25, Bomsel] En ce qui concerne la VOD, il nous semble que c est en fonction des critères suivants que le consommateur estimera la valeur des services d une plate-forme : l accessibilité et la notoriété la compétitivité des prix proposés le volume et la qualité du catalogue proposé la qualité d accompagnement du choix du visiteur La notoriété et l accessibilité des services de VOD Encore méconnus des Français il y a un an, les services de VOD commencent enfin à faire parler d eux, notamment grâce au développement de l IPTV dans les offres des FAI. D après les derniers résultats du baromètre réalisé par l institut Harris Interactive pour le CNC, le taux de notoriété de la VOD continue donc de croître régulièrement : en mai 2008, près de 80% des internautes connaissaient la VOD contre 70% en décembre Les services de VOD sur Internet restent néanmoins méconnus, à la fois occultés par le piratage et confondus avec la «catch up TV». Pour accroître leur visibilité et leur accessibilité, les plates-formes Web de VOD doivent donc d une part avoir une politique de référencement très efficace afin d être repérées le plus possible par les moteurs de recherche par rapport à des requêtes faites par les internautes. D autres part, elles développent des partenariats avec les grosses plates-formes généralistes de VOD sur Internet, mais surtout les fournisseurs d accès sur IPTV, et opèrent sous leur nom ou en «marque blanche» (c est-à-dire sans mention de leur propre nom) : ainsi Vodeo, site de VOD qui s est imposé comme LA référence dans le documentaire a un site vitrine en ligne mais distribue également son catalogue sous son appellation via les platesformes de Virgin Mega, la Fnac, ainsi que les services IPTV de Free, Neuf Cegetel et Orange. C est également le cas du catalogue d Univerciné qui a passé des accords de distribution avec les plates-formes Virgin Mega et Fnac.com et l opérateur IPTV Neuf Cegetel. La plupart des sites de VOD tentent aujourd hui d accroître leur visibilité de cette manière. 11 CNC. Lettre #56 [en ligne] juillet août 2008 [Consulté le 21/11/2008] 25

26 4.2.2 La proposition d offres fidélisantes La question du prix reste en effet une barrière importante. Pour la location, il faut compter entre 1,99 pour un film de plus d un an et 4,99 pour une nouveauté, ce qui paraît beaucoup trop cher, par rapport aux tarifs moyens de location physique qui est de 3 pour une nouveauté 12 (et surtout pour les internautes habitués à pirater.) Dans ce contexte, les plates-formes de VOD sur Internet et les opérateurs FAI développent des offres d abonnement et des forfaits prépayés plus intéressants que l achat à l acte unique, ce qui en plus permet de fidéliser les visiteurs. Ces abonnements seront d autant plus attractifs que les catalogues sont exclusifs et diversifiés Nature des catalogues en ligne en termes de volume, de qualité et de diversité : L offre cinéma disponible en VOD est limitée par deux types de contraintes : Des frais techniques pour la numérisation et l encodage des films : «Le fichier pivot», format de référence pour la VOD est habituellement du MPEG 2. S il existe une version numérique des nouveaux films, les frais de numérisation et parfois de restauration des films de patrimoine représentent un investissement important. Des contraintes juridiques : Comme évoqué précédemment, la difficulté à retrouver tous les ayants droit pour obtenir les droits d exploitation en VOD empêche la diffusion des films de patrimoine. L accès aux nouveautés est limité par les règles actuelles de chronologie des médias (délai de 33 semaines après la sortie des films en salles). Mais ce n est pas tout : l accord interprofessionnel du 20 décembre 2005 prévoit également une suspension de la fenêtre VOD pendant l exploitation de l œuvre sur un service de télévision ayant participé à son financement. Autrement dit, la diffusion en VOD est à nouveau compromise pour les films entre 9 et 36 mois après leur sortie salles. Selon les données diffusées par le CNC lors de l observatoire de la VOD, 3234 films hors adulte étaient disponibles fin mai 2008 sur les huit plates-formes analysées (Orange, 26

27 Canalplay, TF1 Vision, France Télévision VOD, Virgin Mega, Arte VOD, Club Internet, Univerciné). 13 Pour les raisons évoquées ci-dessus, les films dits de catalogue (sortis en salles depuis plus de trois ans) représentaient plus de 85% de l offre de films en VOD. 14 Tableau n 4 : Composition de l offre de films en VOD en fonction de la date de sortie en salles (Mai 2008) Typologie des films en fonction de la Pourcentage de l offre globale de films date de sortie en salles en VOD (hors adulte) «Nouveautés» (sortis en salles depuis 2,8% (92 films) moins de 12 mois) Films entre 12 à 36 mois depuis leur sortie 12% salles «Films de catalogue» (sortis en salles 85,2% depuis plus de 36 mois) Source : CNC - Observatoire de la VOD Nous analyserons ultérieurement les différentes stratégies des acteurs de VOD dans ce contexte L ergonomie des plates-formes et la qualité d accompagnement du choix des visiteurs Comme l explique le site ABC netmarketing, «le mode d accès en ligne n a rien à voir avec celui des rayons traditionnels [d un magasin] dans le sens où l utilisateur dispose de classifications, de listes ou autres moteurs de recherche interne lui permettant de trouver un même produit au sein de plusieurs rayons différents ( ). L organisation d un site par univers et la multiplication des points d entrée sur un seul et même produit se trouvent grandement facilités par le média Internet». [21, abc-netmarketing.com] Il faut donc d une part développer des outils de navigation et des moteurs de recherche pour aider l utilisateur à trouver ce qu il cherche, mais aussi proposer divers accès au catalogue de titres afin de mettre en avant ses différentes facettes et donner des idées de visionnage au visiteur. Pour le convaincre de «passer à l acte d achat ou de location», il faut également lui fournir des informations adéquates. Enfin, il faut soigner l ergonomie afin de simplifier au maximum 12 Information obtenue auprès du Syndicat de l Edition Vidéo 13 CNC. Lettre #56 [en ligne] juillet août 2008 [Consulté le 21/11/2008] 27

28 la navigation du visiteur, et tenir compte notamment des contraintes d affichage imposées par le web. Tous ces aspects peuvent être regroupés dans ce qu on appelle la «valeur ajoutée documentaire» ou «l éditorialisation». 5 Les concepts «d éditorialisation» et de «valeur ajoutée documentaire» Pour démontrer la qualité de leurs services, Les acteurs de la VOD parlent de plus en plus «d éditorialisation». A titre d exemple, voici les propos du PDG de Vodeo, Frédéric Pie : «Chez Vodeo.tv, notre valeur ajoutée sera en tout cas d'agréger et d'éditorialiser les meilleurs contenus afin de les rendre accessibles au plus grand nombre, quel que soit l'écran ou l'opérateur.» 15 Depuis le second semestre 2008, Le CNC vient de lancer un programme d aide à la VOD pour soutenir notamment l enrichissement éditorial des services de VOD. 16 Par «éditorialisation», le CNC entend : La qualité du contenu des fiches films et des compléments proposés, La proposition d outils de recommandation et l animation du site au quotidien en proposant des films en rapport avec l actualité, des cycles originaux et des programmes adaptés à des publics spécifiques, La proposition de diverses fonctionnalités et modes d accès aux catalogues. L éditorialisation est donc proche du concept de «valeur ajoutée documentaire» développée par Jacques Chaumier et Eric Sutter qui définissent l information à valeur ajoutée comme «une information présélectionnée, évaluée, qualifiée, contextualisée, mise en forme et mise en perspective.» Selon eux, «la valeur ajoutée par le documentaliste se traduit également lorsqu il intervient en tant que médiateur entre ressources informationnelles et utilisateur final» [27, Chaumier/Sutter] Au niveau du processus informationnel, ils distinguent deux niveaux de valeur ajoutée : 14 ibid 15 BOUTEILLER Jérôme. Frédéric PIE : "La valeur ajoutée de Vodeo.tv est d'éditorialiser les contenus". NetEco [en ligne]. 12/02/2007 [consulté le 21/11/2008] 16 CNC. Aide à l'exploitation d'oeuvres françaises et européennes en vidéo à la demande [en ligne] [consulté le 21/11/2008] 28

29 Entre la donnée brute et la «ressource informationnelle» : indexation, ajout de métadonnées. Entre la «ressource informationnelle» et l utilisateur final : médiation humaine (orientation, commentaires, synthèse.» [27, Chaumier/Sutter] Quels sont le niveau d éditorialisation et la part de valeur ajoutée documentaire proposés par les sites de VOD français? Pour répondre à cette question, nous allons commencer par faire une étude comparative des services disponibles sur les interfaces Web d un panel de platesformes de VOD. 29

30 Deuxième partie Etude comparative des interfaces de plates-formes VOD sur le Web 30

31 1 Méthodologie 1.1 Préparation d une grille d analyse structurée des sites de VOD Que proposent les sites de VOD français en terme de contenu et à destination de quel public? Comment cette offre est-elle présentée sur leur site de VOD et par quels moyens? Tous les sites de VOD proposent-ils le même type de services? Pour répondre à ces questions, nous avons commencé par faire une analyse comparative des interfaces de plusieurs sites de VOD français d après une grille d analyse structurée [annexe 4] qui couvrent les points suivants : - Fiche d identité : nom de l éditeur et date de lancement du site, contenu du catalogue d un point de vue quantitatif et qualitatif, modalités de l offre (achat ou location, tarifs), et spécificités de chaque site. - Modes de navigation dans le catalogue : type de fonction recherche proposé, modes d accès au catalogue, rubriques mettant en avant une partie du catalogue et sélections éditoriales proposées. - Affichage des résultats et présentation des fiches descriptives : comment les résultats à une requête sont-ils présentés? Que contiennent les notices descriptives de chaque film et comment sont-elles présentées? Des documents textuels et visuels annexes sont-ils proposés? Des films en affinité conjointe sont-ils suggérés? - Interactivité avec les internautes : le visiteur peut-il noter et ajouter des commentaires? Envoyer la fiche descriptive à un ami? - Quels sont les moyens mis en œuvre pour garder le contact avec les visiteurs et les informer des nouveautés du site (Flux RSS, messages d alerte, etc.)? 1.2 Sélection des sites à analyser Comme nous l avons vu précédemment, la France compte plus de 45 plates-formes de VOD et de nouveaux sites sont créés chaque mois. Il aurait été impossible de tous les analyser. Bien que la VOD via le réseau IPTV soit dominante, nous avons choisi de limiter notre observation aux sites de VOD sur Internet pour les raisons suivantes : D une part, comme mentionné précédemment, l ergonomie et les fonctionnalités de navigation sont actuellement beaucoup plus développées sur les sites Web de VOD que sur IPTV pour des raisons techniques. Il nous a donc semblé plus intéressant 31

32 d étudier les différentes fonctionnalités offertes par les sites Web, qui pourront par la suite être adaptées en IPTV quand ce sera techniquement possible. Par ailleurs, les services de VOD sur IPTV sont réservés aux abonnés, d où la difficulté d y accéder pour opérer une veille. Nous nous sommes donc concentrés sur les plates-formes Internet payantes de VOD à destination du grand public. Pour avoir une vision globale, nous avons commencé par visiter l ensemble des sites cités en annexe 2 et nous les avons classifiés en fonction de deux critères : Le contenu de leur catalogue et le public auquel il s adresse Le type d acteur qui est propriétaire du site. Ces critères jouent en effet un rôle déterminant par rapport aux types de services offerts. Ainsi, nous avons identifié six grandes catégories de sites : L offre cinéphile L offre spécialisée (courts métrages, documentaires, sites thématiques) L offre cinéma grand public L offre des chaînes de télévision L offre des FAI Dans chaque catégorie (hormis celles des FAI qui en général ne sont accessibles que sur IPTV et par abonnement), nous avons sélectionné quelques sites représentatifs pour notre analyse, en fonction des critères suivants : Qualité et originalité des services offerts Notoriété du site Les résultats de cette étude ont été complétés par des entretiens avec les responsables de sites [voir guide d entretien en annexe 5] et une veille active sur l actualité du marché de la VOD. 1.3 Limites de cette méthode Cette étude repose essentiellement sur l observation des sites de VOD en ligne, en d autres termes «le front office». Nous avons étoffé ces observations par des entretiens avec les responsables de quelques plates-formes (essentiellement des sites d offres spécialisées ou pour cinéphiles). Ceci nous a permis d avoir une meilleure appréhension du back office et de la réalité économique de ce secteur. 32