Recommandations pour les aspirations endotrachéales chez un patient intubé
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- Carole Moreau
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1 Soins intensifs Département APSI Groupe Respiratoire Octobre 2006 Recommandations pour les aspirations endotrachéales chez un patient intubé Origine : Groupe Respiration Rédaction : Marie-José Roulin Aspiration endotrachéale Page 1
2 1. Buts et indications Buts L aspiration endotrachéale a pour but de suppléer à l incapacité de dégager les voies respiratoires des obstructions qui entravent le libre passage de l air. Elle s effectue à l aide d une sonde souple introduite dans le tube endotrachéal et reliée à une source d aspiration Indication Les aspirations endotrachéales s effectuent lorsque la personne soignée est «incapable de libérer les voies respiratoires des obstructions qui entravent le libre passage de l air» (ANADI, 1998) et manifeste des signes d encombrement. Le dégagement des voies aériennes est un phénomène complexe qui intègre la production de sécrétions, la nature du mucus (viscosité, élasticité, filance et adhésivité), le mouvement ciliaire et la toux (Roeseler, 2000). Ces signes peuvent varier en intensité et nature en fonction du patient, mais ils ont été identifiés par des experts du domaine comme étant ( Carlson-Catalano et al., 1998 ; Chulay, 2001 ; Roeseler, 2000 ; Simmons, 1997) : - une auscultation pulmonaire avec des crépitants ou montrant des zones mal ventilées, - une augmentation de la fréquence respiratoire, une utilisation des muscles respiratoires accessoires, - une augmentation des bruits respiratoires, - une diminution des volumes inspirés, - une augmentation de la pression intratrachéale et de la toux, - un changement dans le volume minute, - une aggravation des échanges gazeux ou l apparition d une baisse de la saturation, - une modification de l aspect des courbes de pression, débit, volume sur le ventilateur, - une apparition de signes radiologiques évoquant une atélectasie, - des sueurs, - une élévation de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque, - une agitation. Plusieurs facteurs favorisent l apparition d un encombrement bronchique et peuvent résulter dans un dégagement inefficace des voies respiratoires. Il s agit de : - une baisse d énergie et de la fatigue, - une oxygénation trop importante (une diminution du - une toux inefficace ou inexistante, transport muco-ciliaire apparaît déjà chez un sujet sain après - une infection, une obstruction 3h à une FiO2 à 100%), ou des sécrétions trachéobronchiques, - des pathologies pulmonaires préexistantes (asthme, - un déficit cognitif ou des troubles de la perception, bronchite chronique, emphysème,..) - un traumatisme, - une humidification inadéquate - des agents pharmacologiques : curares, sédatifs,.. des gaz respiratoires. Aspiration endotrachéale Page 2
3 2. Risques liés à ce soin 2.1. Les risques liés à l aspiration endotrachéale 1 L aspiration endotrachéale est un geste à risque et de nombreuses complications ont été décrites (Blackwood, 1999 ; Carlson-Catalano, 1998 ; Chulay, 2001; Maggiore 2000 ; Roesler, 2000 ; Simmons, 1997) : - des lésions de la muqueuse trachéale et des bronches souches provoquées par la succion de la sonde d aspiration et de son contact avec la muqueuse, - une augmentation des sécrétions par un mécanisme irritatif, - une toux excessive, - une hypoxémie, - une désynchronisation entre le patient et le ventilateur, - un bronchospasme, - une augmentation de la pression artérielle moyenne, - une bradycardie vagale ou autres arythmies cardiaques, - une diminution du débit cardiaque, - une augmentation de la pression intra-crânienne, - une bronchoaspiration de liquide gastrique, - une augmentation du risque infectieux, - de la douleur et de l anxiété. Ces complications sont souvent secondaires à la stimulation nociceptive majeure que provoque la sonde d aspiration en contact avec la trachée. D autre part, plusieurs chercheurs se sont intéressés à l inconfort des patients lors d une aspiration endotrachéale. Dans une étude réalisée aux Pays-Bas (Leur et al., 2003) auprès de 113 patients, la douleur moyenne était de 5.9 sur une échelle visuelle analogique. Dans une recherche multicentrique (Puntillo et al., 2001) auprès de 6021 patients, la douleur moyenne liée aux aspirations endotrachéales était évaluée à 3.94 sur une échelle visuelle analogique, et le désarroi à Seule la mobilisation des patients pour le nursing obtenait un score supérieur. Les patients décrivent leurs sensations lors des aspirations avec des termes terrifiants. «J avais le sentiment de me noyer.», «J avais l impression que l on m enlevait l air pour respirer.», «Les aspirations m épuisaient.». Certaines complications, liées aux aspirations endotrachéales, peuvent être majorées dans certaines pathologies telles que : - le risque de bronchospasme chez le BPCO et les asthmatiques, - l élévation de la pression intra-crânienne chez les patients neurologiques. - le risque d hypoxémie sévère et prolongée chez les patients avec un ARDS par le dérecrutement de certains territoires alvéolaires dû à la pression négative exercée par l aspiration Les risques liés à un dégagement insuffisant des voies respiratoires Si les aspirations endotrachéales sont potentiellement iatrogènes, un dégagement inefficace ou insuffisant des sécrétions peut aussi être une source de complications. On a, par exemple, observé (Glass & Grap, 1995 ; Simmons, 1997 ; Ullrich & Lamers-Abdella, 1997) : - une augmentation des pressions intratrachéales, - une hypoxémie, - une augmentation - une augmentation de la PCO 2, - une augmentation du travail respiratoire, Aspiration endotrachéale Page 3
4 - des anomalies du rapport ventilation / perfusion, - des obstructions des tubes endotrachéaux, - des atélectasies, - une augmentation de l inconfort du patient lié à une toux excessive, - de l anxiété. Face à la nécessité de dégager les voies aériennes et les effets potentiellement délétères de cette procédure, un équilibre doit être trouvé Fréquence des aspirations endotrachéales. Il n existe pas à notre connaissance d études mettant en évidence une fréquence idéale des aspirations. Les auteurs s accordent pour dire que les aspirations ne devraient pas être réalisées de routines, mais motivées par une indication clinique (Chulay, 2001 ; Ullrich & Lamers-Abdella, 1997 ; Wood, 1998). Une petite étude (Wood, 1998) a comparé les aspirations routinières aux 2 heures et les aspirations réalisées en fonction du besoin, après que l infirmière ai réalisé une évaluation de l état clinique du patient. Le groupe de patients aspirés en fonction du besoin avait moins de variations au niveau des changements de pression intratrachéale, de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle moyenne. D autres auteurs (Copnell & Fergussion, 1995), on montré une augmentation des tubes endotrachéaux bouchés et d atélectasies suite à l introduction de l aspiration endotrachéale adaptée à la clinique du patient. Les infirmières de leur service avaient de bonnes connaissances des signes d encombrement bronchique, mais une évaluation clinique inadéquate. Les résultats de ce travail illustrent les complications possibles liées à une évaluation clinique déficiente et le danger de n effectuer des aspirations qu en fonction de l évaluation clinique du patient. 2.4 Consensus adopté Une aspiration endotrachéale doit avoir lieu au moins une fois par équipe (soit environ toutes les 8 heures). Elle doit être plus fréquente, si la clinique le nécessite, et différée si le patient ne la tolère pas. Chez les patients avec une mesure continue de la pression intra-crânienne, elle ne s effectue que sur prescription médicale. 3. L instillation de NaCl 0,9% Divers travaux de recherche mettent en évidence les effets délétères des instillations de NaCl 0,9% dans les tubes endotrachéaux Instillation de NaCl 0,9% comme agent facilitant l aspiration des sécrétions La croyance en l effet fluidifiant du NaCl 0,9% sur les sécrétions n est basée sur aucune donnée physiologique. Si on mélange du NaCl 0,9% dans un tube avec des sécrétions, il n y a pas de mélange car le mucus a une surface gélatineuse qui est hydrophobe (Blackwood, 1999). De plus, la majorité du NaCl 0,9% instillé est drainée au niveau pulmonaire dans le lobe inférieur droit et reste dans les grosses bronches lobaires et segmentaires (Klockare et al., 2006). L effet humidifiant du NaCl 0,9% est donc nul. Diverses études randomisées se sont intéressées au volume des sécrétions aspirées avec et sans l utilisation de NaCl 0,9% (Bostick & Wendelgass, 1987 ; Gray et al., 1990). Elles ont Aspiration endotrachéale Page 4
5 pesé les sécrétions aspirées avec ou sans instillation. La différence de poids est minime (0,5 à 1,3 microgrammes), mais significatives. Malheureusement, les auteurs de ces travaux ont pesé les aspirations sans soustraire le poids du NaCl 0,9% instillé. La validité de ces résultats est donc mise en question. Certains centres utilisent de façon empirique du bicarbonate isotonique 1,4% pour fluidifier les sécrétions. On peut en effet constaté que lorsque l on mélange des sécrétions bronchiques. Cette pratique est actuellement peu documentée et n a fait l objet d aucune évaluation sérieuse. C est pourquoi l instillation de bicarbonate isotonique se doit d être prudente et ne doit pas devenir routinière Effets des instillations sur l oxygénénation Plusieurs travaux se sont intéressés à l effet de l instillation sur l oxygénation. Ackerman (1993) a étudié les effets des instillations de NaCl 0,9% sur la saturation en oxygène auprès de 40 homes en ventilation mécanique. La saturation en oxygène à 2,3,4 et 5 minutes après l aspiration était abaissée. Dans une recherche ultérieure (Ackerman et Mick, 1998), les effets des instillations de NaCl 0,9% ont été étudiés chez des patients avec une infection pulmonaire en ventilation mécanique. Les patients (n=29) ont été randomisés en deux groupes : un groupe avec une instillation de 5ml de NaCl 0,9% et un groupe contrôle sans. Des différences significatives entre les deux groupes ont été mesurées à 4,5 et 10 minutes après les aspirations. Dans le groupe contrôle la saturation en oxygène diminuait juste après l aspiration, mais était supérieure à la saturation de base après 10. L utilisation de NaCl 0,9% abaissait la saturation en oxygène de façon plus marquée et ce phénomène s accentuait avec le temps. Kinloch (1999) a mesuré les effets des instillations de NaCl 0,9% sur la saturation veineuse mêlée. Son travail a été réalisé auprès de 35 patients en ventilation mécanique après un pontage coronarien. Deux groupes ont été constitué : le groupe contrôle sans instillation et un groupe avec une instillation de 5ml de NaCl 0,9%. Le groupe avec une instillation de NaCl 0,9% a mis 7 minutes à récupérer sa saturation veineuse mêlée de base contre 3 minutes pour le groupe contrôle Instillation et risque infectieux Une petite étude (n=10) effectuée par Hagler et Traver (1994) suggère que l instillation augmente le risque de surinfection. Ils ont étudié les effets des aspirations avec ou sans instillation sur 10 tubes endotrachéaux après leur retrait. L instillation avant une aspiration mobilise cinq fois plus les bactéries colonisant le tube endotrachéal et les transporte distalement. Ces auteurs pensent que ce phénomène est probablement accentué en clinique. En effet après l instillation les patients toussent et reventilé pour quelques inspirations afin que «le liquide se disperse bien dans l arbre bronchique» ; dans ce cas le flux d air transporte les sécrétions plus bas dans l arbre bronchique. D autre part, l essentiel du liquide instillé s écoule dans le lobe inférieur droit (Klockare et al., 2006). Ceci est d autant plus vrai que le patient a une toux inefficace ou inexistante comme par exemple : les personnes curarisées, paralysées ou fortement sédatées ( score SAS 2) Le consensus adopté La première aspiration endotrachéale s effectue toujours à «sec» et dans bien des cas elle suffira à stimuler la toux. Lors de sécrétion très épaisse et sur prescription médicale uniquement, une instillation de 2ml de bicarbonate isotonique peut être réalisée. Elle doit être systématiquement documentée dans le dossier du patient : quels sont les indications et les résultats. Aspiration endotrachéale Page 5
6 4. La préoxygénation 4.1. Préoxygénation ou hyperinsufflation De façon générale, la préoxygénation consiste à administrer de l oxygène à une FiO 2 supérieure à celle que reçoit habituellement le patient avant d effectuer une aspiration endotrachéale. L hyperinsufflation consiste à insuffler dans les poumons un volume supérieur à celui du volume courant soit à l aide d un ballon plat ou du ventilateur. Les aspirations endotrachéales provoquent une hypoxémie transitoire aggravée par une chute du débit cardiaque due à l augmentation de la pression artérielle moyenne et favorisant les arythmies cardiaques. Pour minimiser ces effets, il est recommandé de préoxygéner le patient juste avant une aspiration. Il s agit d une recommandation basée sur des recherches cliniques réalisées dans plusieurs centres de soins intensifs et auprès de patients avec des pathologies diverses (American Association of Respiratory Care, 1993 ; Clark et al., 1990 ; Glass et al., 1993 ; Grap et al., 1999 ; Hyunsoo & Whasook, 2003). Pour certains, la préoxygénation se doit d être associée à des manœuvres d hyperinsufflation ce qui n est pas sans poser des problèmes pratiques en clinique. L hyperinsufflation à l aide d un ballon plat est difficile à moduler. Une recherche (Glass et al., 1993) réalisée auprès de 100 infirmières a montré une grande variation dans la ventilation manuelle lors des aspirations endotrachéales. Le pourcentage d oxygène délivré variait de 27% à 97%, le volume de 66ml à 1656ml et la fréquence des ventilations de 12 à 52 fois par minutes. Grap et al. (1996) ont comparé, chez 29 patients, les effets de la préoxygénation avec une FiO2 à 100% de 3 minutes et la ventilation manuelle avec un ballon plat. Les deux méthodes provoquent une élévation des taux d oxygène, mas la PaO 2 et la SaO 2 sont significativement plus élevées avec une préoxygénation réalisée avec le ventilateur. Les pics de pression inspiratoires sont plus importants avec la méthode manuelle. Finalement, dans une méta-analyse sur les effets de l hyperinsufflation et de la préoxygénation dans la prévention des hypoxémies dues aux aspirations endotrachéales (Hyunsoo & Whasook, 2003) : la préoxygénation associée à une postoxygénation de quelques minutes se révèle la méthode de choix pour prévenir les hypoxémies. Pour conclure, il n est donc pas recommandé de ventiler un patient avec un ballon plat pour le préoxygéner. En effet, il est difficile de délivrer une FiO 2 précise et la ventilation manuelle peut représenter un risque de ventilation inadéquate (car il est difficile de contrôler les volumes et les pressions) Les inconvénients de la préoxygénation La préoxygénation a une influence sur l apparition des atélectasies et ceci très rapidement. Une étude effectuée auprès de patients sous anesthésie générale (Reber et al., 1996) a mis en évidence une augmentation des atélectasies lorsque les patients recevaient une FiO2 de 100% pendant 4-5 minutes avant ou après l induction de l anesthésie générale. Ces résultats suggèrent que l hyperoxygénation doit être effectuée prudemment Comment préoxygéner? Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour préoxygèner : 1. l utilisation sur le ventilateur de réanimation d une fonction préoxygénation lors des aspirations endotrachéales. 2. l augmentation transitoire de la FiO 2 administrée au patient. Aspiration endotrachéale Page 6
7 1. Les ventilateurs de réanimation sont équipés d une fonction d oxygénation rapide qui peut être activée avant toute aspiration endotrachéale. Cette méthode permet de délivrer de l oxygène à 100% entre 120 et 180 secondes (variable selon les modèles de ventilateur) avant et après l aspiration endotrachéale. Il suffit d activer cette fonction pour que la machine délivre une FiO 2 de 100% pendant quelques minutes. Lors de la déconnection de la machine pour l aspiration endotrachéale ; la ventilation est interrompue (mais la machine continue de délivrer un débit continu à 100% d O 2 ) et les alarmes sont inhibées. Après le rebranchement, le ventilateur fonctionne à nouveau sur le mode ventilatoire préalable et délivre une FiO 2 à 100% pendant 2 minutes. Les alarmes de volume minute sont inactives pendant cette période de réoxygénation. Cette méthode doit impérativement être utilisée lors que le patient est en sevrage avec le module «Smart-Care» ou ventilé avec un «Autoflow». 2. Le soignant augmente manuellement la FiO 2 de 20% au début du soin. Il réalise la totalité du soin, puis il règle la FiO 2 du patient à la valeur de base. En pratique, il existe un risque d oublier de baisser la FiO 2 après avoir réalisé le soin. D autre part, il n y a aucune inhibition des alarmes automatiques lors de ce soin et l opérateur doit les inhiber manuellement Consensus adopté La préoxygénation est effectuée auprès de tous les patients intubés. - Chez les patients non-ventilés, l oxygène est transitoirement augmenté ou administré de façon à obtenir une augmentation de la SpO 2 de 3 à 5%. - Chez les patients ventilés, la préoxygénation s effectue à l aide de la fonction oxygénation rapide disponible sur les ventilateurs. 5. L aspiration et la manipulation de la sonde 5.1. La force de succion La pression négative provoquée par la force d aspiration favorise l hypoxémie, le dérecrutement alvéolaire, ainsi que les lésions de la muqueuse trachéale. Dans une étude française réalisée par Maggiore (2000) recensant les complications liées à l aspiration endotrachéale auprès de 79 patients (4119 épisodes d aspiration en endotrachéales), la désaturation et les sécrétions hémorragiques étaient les incidents les plus fréquents. La désaturation est apparue dans 5% des épisodes d aspiration chez 35 patients, alors que les sécrétions hémorragiques sont apparues dans 4% des aspirations chez 23 patients. Il faut préciser que dans cette étude, les patients n étaient pas systématiquement préoxygénés et l aspiration effectuée par débranchement du ventilateur. Parmi les méthodes recommandées pour prévenir ces complications, la limitation de la force de succion est préconisée. En fonction des auteurs ( Day et al., 2001 ; Donald et al., 2000 ; Maggiore, 2000), la force de dépression maximale à appliquer varie entre 0,15 et 0,2 bars (soit 150 à 200 cmh 2 O). Lorsque les sécrétions sont épaisses et collantes, il est plus efficace de choisir une sonde d aspiration de gros diamètre que d augmenter la force de succion (Morrow et al., 2004), par contre le risque de traumatisme de la muqueuse est plus important. La durée idéale d une aspiration se situe entre 10 et 15 secondes (Day et al., 2001). Pratiquement on peut suggérer que le soignant retienne son souffle lorsqu il effectue le geste, ainsi il évitera des aspirations endotrachéales d une durée excessive Les particularités du geste Le contact de la sonde d aspiration avec la muqueuse trachéale est une source nociceptive importante qui peut provoquer une stimulation du nerf vague. D autre part, les lésions de la Aspiration endotrachéale Page 7
8 muqueuse sont une complication fréquente et peuvent être liées à la technique utilisée. Pour diminuer le risque de lésions traumatiques de la muqueuse, le diamètre de la sonde d aspiration ne devrait pas être supérieur à la moitié du diamètre interne du tube endotrachéal. Concrètement, des sondes de 12 French (embout blanc) devraient être systématiquement utilisées chez des patients avec un tube endotrachéal dont le diamètre est plus petit que le n 8. De plus, la sonde d aspiration ne devrait pas être enfoncée trop loin. Actuellement, les experts (Chulay, 2001 ; Ashurst, 1992) suggèrent les éléments suivants : - si le patient tousse efficacement, il suffit d enfoncer la sonde jusqu à l extrémité du tube endotrachéal. - si le patient est sédaté, curarisé ou incapable de tousser efficacement, il peut être nécessaire de pousser la sonde plus loin (2cm après l extrémité du tube), mais il faut la retirer de 1cm si elle bute avant de débuter la succion. - si le patient a une crase perturbée, il ne faut pas dépasser l extrémité du tube endotrachéal. Il est difficile d évaluer le niveau d enfoncement de la sonde dans un tube endotrachéal. Pour mémoire, la longueur standard des tubes endotrachéaux est de 36 cm. Il est donc théoriquement possible de mesurer la longueur de la sonde d aspiration à enfoncer. Sur les systèmes d aspiration clos, la sonde est graduée en centimètre, ceci permet de positionner précisement la sonde jusqu au niveau souhaité. L aspiration se doit d être continue, car l aspiration intermittente génère des pressions négatives plus importantes et représente donc un risque accru de traumatisme de la muqueuse. En effet, Stenqvist (2001) a mesuré en laboratoire des flux d aspiration plus important pendant les 2 à 4 premières secondes qui font suite à l obturation du raccord en Y (ou la valve de contrôle d aspiration) que par la suite. Finalement, les mouvements de va-et-vient, ainsi que la rotation de la sonde favoriseraient les lésions trachéales (Day et al., 2001) Le consensus adopté L aspiration s effectue sans mouvement de rotation ou de va-et-vient avec une sonde dont le calibre est inférieur à la moitié du diamètre interne du tube endotrachéal. La sonde est enfoncée jusqu au bout du tube endotrachéal. Chez les patients sans toux efficace, elle peut être enfoncée 2cm plus bas, mais si le soignant rencontre une résistance il doit impérativement retirer la sonde avant de débuter la succion. 6. La prévention des infections nosocomiales Chez les patients intubés et ventilés la contamination des voies respiratoires inférieures se produit : 1. par bronchoaspiration des sécrétions à partir de l oropharynx que des microorganismes, potentiellement pathogènes, colonisent, 2. par un contact avec du matériel contaminé tels que la sonde d intubation, les sondes d aspirations, les circuits des respirateurs, les ambus ou des liquides contaminés, 3. par inhalation d air ou d aérosols, 4. par dissémination hématogène à partir de foyers infectieux non pulmonaires. Pour prévenir efficacement les pneumonies nosocomiales, le personnel de santé doit être bien formé et sensibilisé à la problématique. De plus, la pratique routinière de cultures Aspiration endotrachéale Page 8
9 trachéales pour détecter une pneumonie nosocomiale ou de contrôle de l infection, ne se justifie pas (CDC, 2004) Les principes de prévention des contaminations exogènes Les aspirations endotrachéales sont considérées comme un geste à risque pour la personne soignée. Il y a un risque de contamination par manuportage, via du matériel contaminé ou par une inhalation. Les recommandations du Center for Disease Control (CDC, 2004) sont les suivantes : 1. le personnel, en contact avec les sécrétions respiratoires, les circuits des ventilateurs et les tubes endotrachéaux doit porter des gants lors des manipulations, ainsi que se désinfecter les mains avant et après l ablation des gants. 2. l utilisation d une sonde d aspiration à usage unique et une technique d aspiration aseptique instrumentée ou avec un gant stérile. 3. L utilisation d eau stérile pour rincer la sonde entre chaque passage. De plus, le matériel de nébulisation se doit d être stérile ou bénéficier d une désinfection de haut niveau (voir les procédures d entretien du matériel respiratoire). Les tuyaux à usage unique des ventilateurs doivent être changés tous les 7 jours et les filtres échangeurs de chaleur et d humidité toutes les 24h (recommandation du fabricant). Pour les soignants, il y a un risque de contamination par des projections ou un contact avec les sécrétions respiratoires. C est pourquoi, le CDC préconise le port de gants, d un masque, de lunettes et d une surblouse ou d un tablier. Il n existe aucune donnée dans la littérature concernant l utilisation des raccords à rotule (raccord de swivel) pour diminuer les pneumonies nosocomiales lors des aspirations endotrachéales. Empiriquement, cette pratique a pour avantage de garder le patient ventilé lors de la manœuvre d aspiration et ainsi diminuer les risques liés à ce geste. Par contre, cette méthode demande une bonne habitude pour ne pas déstériliser le capuchon et insérer la sonde dans le tube (le diamètre fin et la pression positive dans le circuit respiratoire exigent des gestes précis). La désinfection de l embout est empiriquement bénéfique lors de l utilisation d un raccord de bronchoscopie. Les aspirations endotrachéales peuvent aussi se réaliser en désadaptant le tube endotrachéal du circuit du ventilateur. Dans ce cas de figure, il s agit d être attentif à déposer l extrémité du tuyau sur une surface stérile (par exemple la face interne de l emballage des gants stériles) Les principes de prévention des contaminations endogènes La contamination endogène serait à l origine de la majorité des pneumonies nosocomiales. Elle est favorisée par la colonisation gastrique et oropharyngée. En effet, les sécrétions accumulées au-dessus du ballonnet s infiltrent dans les voies respiratoires inférieures et les régurgitations de liquide gastrique augmentent le risque de colonisation de l oropharynx, donc la contamination de l arbre bronchique. D autre part, la colonisation de la plaque dentaire augmente chez les patients intubés au cours de leur séjour. Il existe une corrélation positive entre ce phénomène et la survenue d une pneumonie nosocomiale (Fourrier et al., 1998). Afin de minimiser ces risques, les recommandations des experts sont les suivantes : 1. Installer les patients en position semi-assise à 45 (Drakulovic et al., 1999). Il est intéressant de savoir que l installation des patients en position semi-assises à 30 n est pas suffisante pour prévenir les pneumonies nosocomiales (van Nieuwenhoven et al., 2006). 2. Contrôler régulièrement la perméabilité et l emplacement de la sonde gastrique (CDC, 2004). Aspiration endotrachéale Page 9
10 3. Aspirer régulièrement les sécrétions se trouvant au-dessus du ballonnet, notamment avant chaque dégonflement du ballonnet et avant l extubation (CDC, 2004). 4. Maintenir une pression du ballonnet de 25 cmh 2 O. 5. Effectuer des soins bucco-dentaires réguliers. Ces derniers doivent être essentiellement mécanique avec un brossage des dents (Fitch et al., 1999 ; Mori et al., 2006 ) et chimique avec un produit désinfectant (De Riso, 1996 ; Genuit et al., 2001) Le consensus adopté Les aspirations endotrachéales doivent s effectuer avec une technique aseptique. Les patients doivent être installés en position semi-assise, sauf prescription médicale contraire. La pression du ballonnet doit être à 25 cmh2o. Elle doit être vérifiée une fois par 8h. au moins et avant chaque soin de bouche impliquant une irrigation de la cavité buccale. Des bucco-dentaires complets doivent être réalisés 3 fois par jour. Ils comprennent un brossage des dents ; le frottement à l aide d un tampon mouillé des gencives, du palais et de la langue ; ainsi qu un rinçage avec une solution désinfectante. La cavité buccale est maintenue humide par des rinçages réguliers à l eau minérale. Les tuyaux des ventilateurs sont changés uniquement entre chaque patient, les filtres échangeurs de chaleur et d humidité toutes les 72 heures et le matériel de nébulisation bénéficie d une désinfection de haut niveau entre chaque utilisation. Finalement, les cultures des aspirations endotrachéales ne se réalisent que sur prescription médicale. 7. Références Ackerman, M. H. 1993, "The effect of saline lavage prior to suctioning", American Journal of Critical Care, vol. 2, pp Ackerman, M. H. & Mick, D. 1998, "Instillation of normal saline before suctioning in patients with pulmonary infections: a prospective randomized controlled trial", American Journal of Critical Care, vol. 7, pp American Association of Respiratory Care 1993, "Clinical practice guideline : Endotracheal suctioning of mechanically ventilated adults and children with artificial airways", Respiratory Care Clinic of North America, vol. 38, pp ANADI 1998, Diagnostics infirmiers: définitions et classifications InterEditions Masson, Paris. Ashurst, S. 1992, "Suction therapy in the critically ill patient", British Journal of Nursing, vol. 1, pp Blackwood, B. 1999, "Normal saline instillation with endotracheal suctioning: primum non nocere (first do not harm)", Journal of Advanced Nursing, vol. 29, no. 4, pp Bostick, J. & Wendelgass, S. T. 1987, "Normal saline instillation as part of the suctioning procedure: effects on PaO2 and amount of secretions", Heart and Lung, vol. 16, no. 5, pp Aspiration endotrachéale Page 10
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