Physiopathologie des ISO Moyens diagnostiques. Dr Nicole DESPLACES GH Diaconesses Croix saint Simon - Paris

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1 Physiopathologie des ISO Moyens diagnostiques Dr Nicole DESPLACES GH Diaconesses Croix saint Simon - Paris

2 INCISO 2008 C-CLIN C CLIN Paris Nord 7 millions d'interventions chirurgicales par an en France ISO/an 14% des infections nosocomiales dont la moitié serait évitable ISO = 3 ème cause d'infections nosocomiales Risque global d'iso : 1,2 patient sur 100 En fait, incidence variable : 0,9% si NNIS =0 13% si NNIS = 3 50% des ISO sont profondes et nécessitent une reprise chirugicale Prolongation du séjour (7-10 j en moyenne), voire un séjour en réanimation, décès parfois Arrêts de travail prolongés, invalidité Coût +++ Problème de santé publique

3 Infection du Site Opératoire (ISO) Complication redoutée de tout temps Nombreuses techniques chirurgicales à travers l'histoire des civilisations pour tenter de prévenir sa survenue Depuis 15 ans, diminution considérable du nombre d'infections postopératoires ( - 55% entre 98 et 2003) ISO reste encore trop importante Objet d'une surveillance étroite (SURVISO/Tb de Bord IN) ISO est considérée comme un marqueur direct de la qualité d'une prestation médicale pour une spécialité et dans une institution donnée Physiopathologie des ISO reste difficile à appréhender car multifactorielle

4 Définition d'une ISO Infection superficielle Délai de survenue < à 30 jours en l'absence de prothèse 1 an en cas de pose de matériel étranger (prothèses en particulier) Infection profonde A étudier au cas par cas en fonction de la durée d'incubation du pathogène retrouvé.

5 Définition d'une ISO Infection superficielle de l'incision 1 - Écoulement purulent de l'incision Survenant dans les 30 jours post op 2 - PNN et microorganisme dans un prélèvement de liquide produit par l'incision et obtenu de façon aseptique ou dans un prélèvement tissulaire 3 - ouverture de l'incision par le chirurgien et signes infectieux et microorganisme isolé si prélèvement effectué 4 - Diagnostic d'infection établi par le chirurgien Infection profonde de l'incision ou de l'organe Survenant dans les 30 jours post op ou dans l'année si pose d'un implant 1 - Écoulement purulent par un drain sous aponévrotique ou placé dans l'organe ou le site l'organe (espace) 2 - déhiscence spontanée ou ouverture par le chirurgien associé à fièvre <38, douleur et micro-organisme isolé dans un prélèvement profond obtenu de façon aseptique 3 - diagnostic d'infection effectué en per-opératoire, ou après ex anapath, ou imagerie Définitions des IN - DGS/DHOS, CTINLS 2007

6 Pourquoi ISO? Contamination bactérienne du site opératoire Colonisation bactérienne Multiplication bactérienne rapide ou non Moyens de résistance r de l'hôte à l'infection débordd bordée

7 1 ère étape : La contamination bactérienne du site opératoire

8 La contamination du site opératoire Type de chirurgie (classiffication d'altemeier) I - Chirurgie propre, de 2 à 5% d'iso Sans ouverture de viscères creux, sans traumatisme ou inflammation locale Sans faute d'asepsie II - Chirurgie propre contaminée, Ouverture minime d'un viscère creux, contamination minime, Rupture d'asepsie minime III - Chirurgie contaminée, 20% d'iso Contamination importante, rupture d'asepsie franche Plaie traumatique de moins de 4 heures Appareil génito-urinaire ou biliaire ouvert avec bile/urine infectée IV - Chirurgie sale Plaie traumatique depuis de 4h avec ou sans tissus dévitalisés Contamination fécale, viscère perforé Inflammation bactérienne aiguë, Infection avec pus

9 La contamination du site opératoire Inévitable 90% des sites opératoires sont contaminés à la fin de l'intervention (de façon plus ou moins importante) Quelles que soient les précautions prises Préparation cutanée Antibioprophylaxie Intervention sous flux laminaire Il faut arriver à obtenir une contamination per-opératoire la plus basse possible

10 La flore bactérienne du patient Le patient est le réservoir r de bactéries le plus important Revêtement cutané constitué de bactéries résidentes commensales et de bactéries transitoires pathogènes (staph doré, strepto béta) Tube digestif contenant des millions de milliards de bactéries (dont la plupart nous sont inconnues) Muqueuses génitales, respiratoires, ORL Cette flore ne peut jamais être totalement supprimée, elle peut seulement être diminuée e et temporairement.

11 Staphylococcus epidermidis à la surface de la peau humaine. Très nombreuses espèces bactériennes. (Photo en microscopie électronique David Scharf/Photo Researchers, Inc.)

12 Pénétration de la flore bactérienne du patient dans le site opératoire Par le geste chirurgical Bactéries cutanées, Bactéries d'un organe creux A la suite d'une bactériémie Connue ou non Induite par l'intervention, (infection à distance, hypotension, choc...)

13 Pénétration de bactéries "exogènes" de l'environnement de la salle d'opération dans le site opératoire Moins fréquent Véhiculées par les mains de l'équipe chirurgicale (lavage des mains, gants perforés) Le matériel chirurgical (pb de stérilisation, de contamination ) L'air : traitement de l'air, concentration des micro-organismes en suspension proportionnelle à l'activité et au nombre de personnes en salle L'eau : plus rare (M xenopi par exemple) Assurance-Qualité : Surveillance microbiologique de l'environnement du bloc opératoire Traçabilité des mesures de lutte contre les IN mises en place

14 2 ème étape : La colonisation bactérienne du site opératoire

15 La colonisation Adhérence des bactéries par des structures protéiques (adhésines : pili, fimbriae) sur des récepteurs spécifiques des cellules de l'hôte (glycolipides ou des glycoproteines) ce qui autorise leur pénétration intracellulaire ou sur le matériel recouvert de protéines extra cellulaires (fibronectine, collagène, plasminogène ) Échapper aux mécanismes de défense innés, déclenchés par les facteurs de virulence bactériens (LPS, LTA, Peptidoglycan, lipopeptides, flagellines ) Se multiplier et disséminer le plus vite possible Échapper aux mécanismes d'élimination induits par le système immunitaire acquis Internalisation dans les cellules de l'hôte (S.aureus, strepto A) : cellules endothéliales, ostéoblastes, fibroblastes cutanés..

16 Les étapes de la colonisation du matériel par du staphylocoque à coagulase négative 2 h Fixation des staph sur des irrégularités à la surface du matériel 4 h Début de fabrication du "slime " 8 h La surface du matériel est recouverte par une couche épaisse de "slime" 24 h Des bactéries émergent du biofilm, libres et prêtes à se fixer ailleurs Microphotographies Olson, Ruseska, Costerton J. Biomed Mater Res 1988

17 3 ème étape : La multiplication bactérienne et l'infection du site opératoire

18 Multiplication bactérienne Selon la bactérie en cause (S. aureus, strepto béta, E coli, Clostridium) Rapide dans hématome, lésions tissulaires, collection Production de facteurs de virulence, de toxines, d'enzymes (hyaluronidase, collagenase, kinase, hémolysine, de superantigènes (TSST-1, PVL) responsables de destruction tissulaire, d'extension rapide de l'infection, Activation de récepteurs à la surface des cellules chargées de la défense de l'organisme, production de cytokines pro-inflammatoires Cascade de réactions aboutissant à l'infection et parfois à une activation de la coagulation (CIVD) et à une défaillance multiviscérale Le matériel étranger potentialise le pouvoir infectant des bactéries

19 J10 d'une PTH : Infection à Strepto B (PV positif strepto B)

20 Multiplication bactérienne Lente (staph à coag (-), corynébactéries) Adhérence bactérienne, biofilm protecteur vis à vis des phagocytes et des antibiotiques, communication bactérienne (Quorum sensing) Survie prolongée dans le biofilm, dans des cellules hôtes Réveil tardif de l'infection Le matériel étranger potentialise le pouvoir infectant des bactéries

21 Bactéries responsables des ISO % Staph aureus 30 E. Coli 17 Enterococcus spp. 9,5 SCN 7,1 Autres BGN Entérobactéries 20 P. aeruginosa 5,4 Autres Cocci + Strepto Béta B, C, 2 GStrepto spp 4,5 ANAEROBIES 4 Levures 0,5 53% Cocci + 43% BGN 5% Autres

22 Infections chroniques sur PTA Staph epidermidis

23 Fracture ouverte stade II Fracture fermée, ostéosynthèse, suppuration chronique

24

25 La survenue d'une ISO est "régie" par l'équation d'altemeier

26 Résistance de l'hôte à l'infection Difficilement modulable Nombreux facteurs de risques connus ou supposés Diabète (contrôle glycémique surtout postopératoire) Tabagisme (arrêt avant l'intervention) Obésité Dépistage des carences nutritionnelles (dosage d'albumine) Infection à distance (infection urinaire, escarre, ulcère, ongle incarné..) Immunodépression (traitement, cancer sous-jacent, ) Cicatrices multiples Hospitalisation >2 jours avant l'intervention Chirurgie en urgence, trauma,

27 Comment réduire r les ISO? Connaître les facteurs de risque d'infections propres au patient, propres à l'intervention

28 Améliorer la prise en charge des patients Pré-op opératoire Information du patient sur les risques infectieux liés à l'opération +++ Préparation générale du patient à l'intervention (diabète, tabac, recherche d'une infection urinaire, dentaire, digestive, génitale, renutrition si besoin ) Recherche d'un portage nasal de Staph aureus? (++ Chir cardiaque) Recheche des BMR chez certains patients Mesures d'hygiène Obtenir une décontamination superficielle optimale en 2 temps, douche antiseptique, rasage proscrit, tonte probablement pas indispensable Lavage des dents (hygiène de base), bains de bouche avec chlorexidine 0,12% diminue les ISO après chir cardiaque, chir digestive; Traçabilité de cette préparation (fiche de liaison)

29 Facteurs propres à l'intervention Risques liés à l'environnement du bloc opératoire /Assurance-Qualité Qualité de l'hygiène des locaux (protocoles, traçabilité) Surveillance des installations techniques (air, eaux), Désinfection des surfaces Risques liés s aux personnels : Hygiène corporelle, tenue de bloc, comportements Préparation cutanée de l'équipe chirurgicale Traçabilité de la stérilisation du matériel chirurgical utilisé Qualité du geste chirurgical (durée de l'intervention, expérience du chirurgien, hémostase soigneuse ) Perte sanguine, importance de la transfusion L'antibioprophylaxie administrée avec la bonne molécule et <1h avant l'incision (INCISO 2008 conforme au référentiel r rentiel SFAR : 65% )

30 Facteurs propres à l'intervention Post-op opératoire Soins de la plaie Contrôle de la glycémie Normothermie Hématome post-opératoire Lâchage de suture Infections superficielles Reprises chirurgicales Réinterventions précoces/ nouvelle ABP selon l'écologie du service

31 Conclusions Importance du retentissement personnel, familial, socioéconomique des ISO dont la moitié pourrait être évitée. Traçabilité des actes, de l'antibioprophylaxie, de la stérilisation, des moyens mis en place pour lutter contre les IN et les ISO Intérêt d'une check-list pré-opératoire Mise en place d'un système qualité pour responsabiliser les intervenants et justifier si besoin de l'existence de moyens pour lutter contre les IN.

32 Moyens diagnostiques Diagnostic clinique Évident : fièvre, hyperleucocytose, infection locale, écoulement purulent par la cicatrice, drainage purulent, hématome infecté Suspecté : pas de fièvre, pas d'hyperleucocytose mais douleur et imagerie positive (échographie, tomodensitométrie) Marqueurs biologiques : inconstants GB, Procalcitonine, CRP sans valeur en postopératoire pendant 15 j

33 Examens bactériologiques Moyens diagnostiques Prélèvement de pus obtenu par ponction franche en zone saine, d'une collection, d'un abcès, d'une infection profonde qui contient des polynucléaires neutrophiles à l'examen direct et des bactéries à l'examen direct ou en culture sur milieux gélosés enrichis en aérobie, sous CO2 et en anaérobie ou en milieux d'enrichissement contenant ou non des résines ou du charbon inhibant les antibiotiques Prélèvements tissulaires per-opératoires Hémocultures positives Recherche d'une porte d'entrée systématique dans les ISO aiguës Dans les infections chroniques en présence de matériel, laissez le temps aux bactéries de croissance lente d'apparaître sur les milieux de culture (culture prolongée e parfois 15 jours).