Optimiser le financement des MILD Document d information pour les pays

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1 Optimiser le financement des MILD Document d information pour les pays 23 Mai, 2012

2 Optimiser le financement des MILD D après les estimations, le paludisme reste la cause, chaque année, de quelque 655 mille morts inutiles. Les moustiquaires imprégnées d insecticide longue durée (MILD) ou, plus simplement, les «moustiquaires», ont joué un rôle capital dans le renversement de la tendance et contribué à un déclin de 25 % de la mortalité imputable au paludisme ces 10 dernières années, en assurant notamment la prévention de plus de 840 mille morts d enfants. 1,2 La distribution annuelle de moustiquaires en Afrique, où l on dénombre plus de 90 % des cas de décès liés au paludisme, 3 a enregistré une croissance exponentielle allant de 5 millions de moustiquaires en 2004 à 92 millions 4 en 2011, cela sous l effet d une campagne concertée pour atteindre la couverture universelle. La scène mondiale de la MILD se trouve aujourd hui à un carrefour fondamental, face aux insuffisances financières et à la montée des profils de résistance. D après le cycle de vie actuel des MILD, on estime à 560 millions le nombre de moustiquaires 5 qui seront nécessaires, à un coût de 2,4 milliards de dollars US, 6 d ici la fin 2015 pour maintenir la couverture universelle. Compte tenu des contraintes des donateurs, il existe actuellement un écart estimé à 40 % entre le financement projeté et le besoin jusqu à fin Il est impératif de conserver les gains de couverture universelle acquis si l on veut éviter les épidémies et recrudescences qui surviendraient si les personnes jusquelà protégées ne l étaient plus. investissement urgent en recherche et développement dans le but de développer de nouvelles technologies aptes à résoudre les problèmes de résistance aux insecticides, et de permettre ainsi aux MILD de rester un outil efficace dans la lutte mondiale contre le paludisme. Certains pays d Afrique sujets à un paludisme endémique se sont associés à l institut Results for Development (R4D) et à l alliance ALMA pour mettre au point une stratégie susceptible d assurer une économie de 630 millions de dollars 8 sur les cinq prochaines années moyennant l achat des MILD les plus rentables et la création de mesures de soutien à l innovation et l amélioration des moustiquaires. Une économie mondiale de 630 millions de dollars permettrait l achat de 150 millions de moustiquaires, soit l offre d une protection antipaludique à 300 millions de personnes supplémentaires tout en aidant à combler les insuffisances financières. L effort a bénéficié d un solide engagement avec plus de 140 intervenants, y compris les ministères de la Santé (MdS) et les partenaires clés de cinq pays à forte charge paludique, les donateurs, les autorités de réglementation, les partenaires de mise en œuvre et les 10 fournisseurs recommandés par le programme OMS d évaluation des pesticides (WHOPES). À cet engagement s est ajoutée une analyse rigoureuse des approvisionnements mondiaux en moustiquaires et des données de distribution. Venant redoubler le défi, la menace posée par la résistance des moustiques aux insecticides actuels des MILD gagne rapidement toute l Afrique. La situation exige un 2 Optimiser le financement des MILD

3 Principales recommandations I. Définir les directives et les politiques aptes à procurer les moustiquaires les plus rentables Les experts mondiaux et les utilisateurs nationaux reconnaissent de plus en plus qu il existe d importantes différences de durabilité entre les moustiquaires utilisées sur le terrain, 9 facteur crucial de performance. Il n existe pourtant actuellement aucune directive internationalement reconnue sur la performance des moustiquaires, pas plus qu il n y a de systèmes d incitation en place par lesquels les donateurs encourageraient les pays à se procurer les moustiquaires les plus rentables. Le résultat en est un effort d achat axé sur les prix les plus faibles. Cette approche basée sur le prix réduit l optimisation globale des ressources et a un effet dissuasif sur les investissements et l amélioration des performances des moustiquaires. Recibler les adjudications de MILD sur la base du «coût par année de vie de la moustiquaire» permettrait d économiser jusqu à 340 millions de dollars 10 durant les cinq prochaines années tout en suscitant chez les fournisseurs un intérêt financier à développer des moustiquaires plus durables. Au Kenya, les responsables et experts techniques de la division antipaludique (DOMC) ont constaté de nettes différentes de durabilité entre les moustiquaires recommandées par WHOPES. Plutôt que de procéder aux achats sur la seule base du moindre prix, la DOMC voulait incorporer le facteur de durabilité dans la décision d achat pour un résultat plus rentable. Comme l a déclaré un responsable de la DOMC : «Au Kenya, nous voulons des moustiquaires qui durent aussi longtemps que possible, pour optimiser au maximum les ressources et réduire la fréquence du remplacement.» Toutefois, faute de directives internationalement acceptées sur la performance des moustiquaires de la part de l OMS, le Kenya n a pas pu incorporer la durabilité dans les critères de décision de ses adjudications. La DOMC kenyane souhaite voir l OMS définir de toute urgence une directive sur la durabilité des moustiquaires comme support à la décision d achat. Recommendations: Les pays sont appelés à soutenir de toute urgence l élaboration d une directive concernant les performances des moustiquaires et à adopter des politiques d achat de MILD sur la base du moindre coût par année de vie de la moustiquaire. Le Programme de lutte antipaludique de l OMS a entrepris, en collaboration étroite avec R4D et un consortium de grands partenaires textiles et de terrain, une approche de développement de directives à très court terme. Parallèlement au soutien de ces directives, les donateurs et les pays doivent adopter des politiques d achat axées uniformément sur le coût par année de vie de la moustiquaire, privilégiant ainsi à la fois le prix et la performance. Les politiques des donateurs doivent aussi permettre aux pays de produire une analyse locale rigoureuse de performance des moustiquaires (afin de déterminer le dénominateur de vie) en tant que base à ses décisions d achat. II. Rationaliser la fragmentation des spécifications pour optimiser les ressources Il existe actuellement un haut degré de fragmentation des spécifications des moustiquaires (plus de 200 offres de fournisseurs listées concernant les dimensions, la forme et la couleur, avec environ 25 variantes achetées couramment). Certains produits marginaux, notamment les moustiquaires de dimensions irrégulières ou extrahautes et les emballages hautement spécialisés, génèrent une hausse significative des coûts et des délais de livraison sans offrir d avantages correspondants à l usage. Une moindre fragmentation de ces spécifications ciblées permettrait d économiser jusqu à 290 millions de dollars 11 durant les cinq prochaines années. En 2012, l Ouganda prévoit l achat de 10 millions de MILD dans le cadre de sa campagne de couverture universelle. Historiquement, l Ouganda a acheté des moustiquaires non standard à dimensions de 180x160x210 cm. Il est cependant sur la base d approvisionnement historique, ce sera ajouter près de 1,25 dollars (ou 25 % du coût/ moustiquaire) de plus par unité achetée, par rapport aux dimensions standard. Rien n indique par ailleurs que l achat de ces modèles non standard ait donné lieu à une adoption ou à un usage accrus parmi la population. Faute d avantages documentés de cet achat de moustiquaires plus longues et étant donné la nécessité d optimiser les ressources, le PNLP ougandais a choisi d acheter le format 180x160x170 cm. Il en a résulté une économie totale de 12 millions dollars sur une seule commande, ce montant pouvant dès lors servir à l achat de 3 millions moustiquaires supplémentaires ou à la réponse à d autres besoins de prévention et de traitement du paludisme au sein de la population. Recommendations: Les donateurs et les pays doivent adopter des politiques d achat basées sur les spécifications de produit les plus rentables tout en continuant à proposer une vaste sélection dans les pays. NetWorks (financé par USAID sous la conduite de la Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health) a formé un partenariat étroit avec R4D en vue de l élaboration d une directive en matière de spécifications des MILD pour assurer l optimisation des ressources (Value for Money (VFM) in LLIN Specifications Guidance). L approche a recours à une analyse rigoureuse dans le but d identifier quelque 70 choix de produits représentant un équilibre optimal d avantages de coût et d usage. Cette directive inclura aussi, au niveau du pays, des directives de développement de données locales rigoureuses sur les avantages d usage. Les politiques des donateurs doivent permettre aux pays Optimiser le financement des MILD 3

4 de produire ces données pour justifier leurs commandes de spécifications diverses. III. Renforcer de toute urgence les capacités nationales de suivi et de décision pour faire face à la menace de résistance La résistance des moustiques aux pyréthroïdes (la classe d insecticides utilisée dans tous les MILD disponibles aujourd hui) émerge rapidement dans toute l Afrique. La communauté mondiale doit impérativement assurer l accès à des produits efficaces de gestion de la résistance aux insecticides (IRM). Recommendations: La communauté mondiale, y compris l OMS, les pays et les donateurs, doit chercher à ouvrir de toute urgence une voie de commercialisation claire au soutien des investissements des fournisseurs dans la recherche et le développement de MILD IRM. Les pays, en particulier, doivent continuer à renforcer leurs capacités de collecte de données de résistance et disposer d un organisme décisionnel concernant la gestion IRM, comme énoncé récemment par l OMS dans son plan mondial de gestion de la résistance des vecteurs du paludisme aux insecticides. Recommandations secondaires IV. User de «pratiques d approvisionnement stratégique» propices au maintien d une offre de MILD concurrentielle et qui permettent d éviter les problèmes de prix et de disponibilité Afin d assurer le maintien d une offre concurrentielle durable de MILD, il est essentiel que les acheteurs, y compris les agents d approvisionnement nationaux, adoptent régulièrement des pratiques d approvisionnement stratégique. Ces pratiques incluent le partage des adjudications entre plusieurs fournisseurs dans le cas des commandes importantes, l élaboration de prévisions annuelles et pluriannuelles de qualité pour assurer la visibilité de la demande, ainsi que la rationalisation et l accélération du processus d homologation des produits pour assurer l accès aux nouveaux produits (MILD IRM, par exemple) en temps opportun tout en facilitant un processus d adjudication concurrentiel. L absence de pratiques d approvisionnement stratégique, concernant les acheteurs de volume surtout, limite la capacité des fournisseurs à planifier efficacement leur production et a historiquement donné lieu à des hausses soudaines des prix des MILD (jusqu à 15 %) et à des délais de livraison prolongés. En 2010, ALMA a passé une commande de 20 millions de moustiquaires destinées à plusieurs pays (Sierra Leone, RDC, Kenya et Zambie), afin de bénéficier d économies de volume et de délais de livraison rapides. ALMA a formé un partenariat étroit avec l UNICEF pour la gestion du processus d achat, tirant parti de l expérience de cette organisation et de sa capacité à appliquer les meilleures pratiques dans le domaine de l achat de MILD, comme le partage avec les fournisseurs des prévisions globales des pays et la conclusion de contrats à long terme pour améliorer la visibilité de la demande et la planification de la production. Recommendations: Les acheteurs doivent renforcer leurs pratiques d approvisionnement stratégique afin de soutenir le fonctionnement efficace du marché et de minimiser les problèmes de prix et de disponibilité. En particulier, les pays requérant de grandes quantités de produits doivent chercher à diviser leurs adjudications de commandes importantes et tous doivent poursuivre l élaboration de prévisions de qualité et la rationalisation des efforts d homologation des nouveaux MILD dès leur introduction sur le marché. 4 Optimiser le financement des MILD

5 V. Établir une base factuelle nationale pour évaluer les facteurs d utilisation des moustiquaires L utilisation des moustiquaires (définie en tant que telle lorsqu une moustiquaire est disponible dans un ménage) n est actuellement pas évaluée au titre d indicateur central des enquêtes MHS et EDS, bien qu elle puisse être calculée sur la base de données d enquête de ménage composites. Il existe une correspondance directe entre les taux d utilisation des moustiquaires, les résultats de santé et l optimisation des ressources. Les observations récentes du Rapport 2011 de l OMS sur le paludisme font état d un taux d utilisation approximatif de 96 %, bien qu il soit nécessaire de reproduire ces résultats et de procéder à l analyse sur un ensemble plus vaste de pays. Une solide base factuelle doit de plus être établie concernant les facteurs spécifiques (facteurs sociaux, confort personnel, préférence, etc.) qui régissent l utilisation ou non au niveau du pays. Cette analyse peut assurer, lors des décisions programmatiques et d achat, l optimisation des résultats de santé et de l affectation générale des ressources. Recommendations: Le groupe de suivi et d évaluation (MERG) de Roll Back Malaria (RBM) entend publier dans les prochains mois une nouvelle directive, couvrant notamment les indicateurs d évaluation de l utilisation des moustiquaires, pour permettre aux pays de suivre cette information cruciale dans leurs enquêtes ordinaires. Les pays doivent continuer à renforcer leur base factuelle concernant les facteurs spécifiques qui régissent l utilisation des moustiquaires, là où les données révèlent des taux d utilisation sous-optimaux surtout. Les données doivent aussi servir à l appui d itérations futures de l optimisation des ressources dans la directive en matière de spécifications des MILD, afin d assurer que les décisions programmatiques et d achat optimisent les résultats de santé et de l affectation générale des ressources. En 2003, Sumitomo Chemical a donné, gratuitement, sa technologie Olyset Net au fabricant tanzanien de moustiquaires A to Z Textile Mills Limited (A to Z), inaugurant ainsi la production locale de MILD en Afrique. En 2011, la capacité de production a atteint 30 millions de MILD par an, créant plus de sept mille emplois. En juin 2012, de nouvelles installations de recherche et développement ouvriront leurs portes à Arusha, pour la recherche de produits vectoriels innovants. Aux avantages économiques de cette approche s ajoutent les économies réalisées sur les coûts du transport et l amoindrissement des délais de livraison. Par exemple, lors de sa commande de 800 mille MILD en 2010, la Zambie a économisé une somme estimée à 190 mille dollars de frais d expédition, gagnant du reste 42 jours sur les délais de livraison en s adressant à la Tanzanie plutôt qu à la Chine. Recommendations: La fabrication locale de MILD en Afrique assure un produit de santé publique vital en même temps qu elle stimule le développement économique, laissant entrevoir une activité autonome au service de la santé publique. Les pays doivent demander de l Union africaine qu elle inclue les produits non pharmaceutiques dans le Plan de fabrication accéléré de produits pharmaceutiques pour l Afrique. VI. Promouvoir la fabrication locale des MILD En 2007, l Union africaine a avalisé le Plan de fabrication de produits pharmaceutiques pour l Afrique, étant donné les avantages potentiels d une fabrication locale accrue des médicaments utilisés dans les pays en développement, en termes de santé publique aussi bien que de développement économique. Selon une étude réalisée en 2011 par la School of Oriental and African Studies de l University of London, la fabrication locale de MILD peut offrir des avantages économiques locaux similaires. Optimiser le financement des MILD 5

6 Notes 1 OMS, Rapport 2011 sur le paludisme. 2 Eisele et al, Estimates of child deaths prevented from malaria prevention scale-up in Africa , Malaria Journal, Avril OMS, Rapport 2011 sur le paludisme. 4 Données du Net Mapping Project ; distribution en Afrique subsaharienne. 5 John Milliner, présentation «Achieving Universal Coverage» (Atteindre la couverture universelle), novembre Prévisions basées sur les données de Net Mapping Project, les «feuilles de route» des pays de Roll Back Malaria (RBM) et des hypothèses de taux de perte d Albert Kilian. 6 R4D, Expanding Access to LLINs: A Global Market Dynamics Approach, 7 Analyse ALMA (Alliance des dirigeants africains contre le paludisme - African Leaders Malaria Alliance) de l insuffisance financière pour la période , compte tenu des fonds promis et du financement attendu du Fonds mondial, de l initiative PMI, de DFID, de la Banque mondiale, du financement national et d autres sources. Cette analyse n inclut cependant pas la filière TFM (mécanisme de financement transitoire) du Fonds mondial, les décisions de financement n ayant pas encore été prises à la date de cette publication. 8 R4D, Expanding Access to LLINs: A Global Market Dynamics Approach, 9 Parmi les 12 moustiquaires recommandées par le programme OMS d évaluation des pesticides (WHOPES). 10 R4D, Expanding Access to LLINs: A Global Market Dynamics Approach, Sur R4D Results for Development Institute (R4D) est un organisme à but non lucratif dont la mission est de débloquer des solutions aux défis du développement qui empêchent les gens dans les pays à faible et moyen revenu de réaliser leur plein potentiel. En utilisant des approches multiples dans de multiples secteurs, y compris l éducation globale, de la santé mondiale, la gouvernance et la dynamique du marché, prend en charge R4D la découverte et la mise en œuvre de nouvelles idées pour réduire la pauvreté et améliorer la vie partout dans le monde. Sur ALMA ALMA est une alliance de chefs d Etat et de gouvernement de travailler pour mettre fin à décès liés au paludisme. Cet organisme a été fondé par les chefs d Etat africains à utiliser leur pouvoir individuel et collectif à travers les frontières nationales et régionales. Photo de couverture: Maggie Hallahan/Sumitomo Chemical. 11 R4D, Expanding Access to LLINs: A Global Market Dynamics Approach, 6 Optimiser le financement des MILD