Rem KOOLHAAS et Elias ZENGHELIS

Transcription

1 Rem KOOLHAAS et Elias ZENGHELIS Architecture d Aujourd hui, Avril 1985 Solenne Plet--Servant Adélie Thollot Jérémie Trelcat--Scherle

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3 Projet d Archigram pour le concours des nouveaux de la AA school

4 De la AA school à la reconnaissance internationale «Ne vous souciez pas de l architecture, vous êtes là pour ouvrir votre esprit!», tels furent les premiers mots que Koolhaas entendit en intégrant la AA School of London. Cette école par son enseignement particulier, semble avoir marqué profondément le parcours des fondateurs de l OMA. Si le petit collectif fondé en 1975 est aujourd hui devenu une agence à l envergure internationale, il semble que l enseignement que les deux architectes ont reçu à la AA y est pour quelque chose. L école de Londres était connue pour encourager les étudiants à s intéresser à d autres domaines que l architecture, à s ouvrir à d autres cultures, dans lesquelles ils pourraient puiser de nouvelles ressources. Cet enseignement fût pourtant, dans un premier temps, d une grande difficulté pour Koolhaas. A tel point, qu au début de chaque semestre, les enseignants de l école l informaient qu il existait à Londres «des écoles plus normales, moins originales». Parce qu il voulait apprendre à faire des projets, utiliser des outils, Koolhaas fût catégorisé de «fasciste ennuyeux» par Peter Cook et Zenghelis. Il haïssait ses camarades qui ne s intéressaient qu à ce qui ne paraissait n avoir rien à faire avec l architecture. Dès les années 1950, à l époque où les anglais étaient en pleine euphorie, la AA flirtait avec la pop-culture, sous l action de Cedric Price et d Archigram dont les membres ont influencé le corps enseignant de l école : «la AA a été révolutionnée par le groupe Archigram... avec la couleur, l audace et le mépris joyeux de l histoire, des traditions et des bonnes mœurs anglaises» 1. Koolhaas reconnaît aujourd hui qu il y a beaucoup appris, «on profite mieux d un enseignement avec lequel on est pas en sympathie» commente-t-il. Mais c est aussi l atmosphère très libre de l école qui lui permis de s ouvrir à d autres cultures, notamment en introduisant Superstudio à la AA et en organisant des conférences avec Natalini mais aussi en lui permettant d aller étudier aux Etats-Unis. La AA semble avoir ouvert Koolhaas et Zenghelis à une autre approche de l architecture, Zenghelis dit d ailleurs aujourd hui que ce qu il retient de son enseignement c est que l architecture est une idée, une idée de la culture, de la civilisation. Il n est dès lors pas étonnant de voir la multiplicité du travail de l OMA : archtecture, urbanisme, design, mode, publications, enseignement, magazines... C est aujourd hui une véritable marque qui nait sur les banc de la AA School. 1 Andrew Higgott

5 La AA school (Londres, ) L Architecture Association est fondée en 1847 par deux jeunes architectes, Robert Kerr et Charles Grey. Cette école avait pour but de proposer une pédagogie différente de celle habituellement mise en oeuvre au Royaume Uni. Depuis sa création, la AA a eu dans un plus large objectif de réunir tout le corps étudiant, lors de soirées, où la jeunesse pouvait échanger. Ces rencontres engendraient une émulation d idées, des critiques mutuelles et ouvraient les étudiants à une culture plus large. Ces rendez vous fonctionnaient comme des forums ou des débats. C est à une de ces occasions que le RIBA fut créé (1862). D autre part, la AA acquière un niveau accru d organisation et de professionnalisme en instaurant, pour la première fois à cette époque, le concept d examen dans sa pédagogie. Avec les publications annuelles du Brown Book et la formation d un libraire au sein de l Etablissement, le nombre d étudiants participants à la vie social de l école augmenta considérablement en 1859, le soirée dure donc se «rationnalisées» et devinrent des évènement clefs de l année scolaire, lieux de rencontre interprofessions, source de critiques, d inspiration ainsi que d ouverture d esprit.

6 Archigram ( , Londres) Archigram est un mouvement anglais devellopant une architecture sans fondation purement théorique, se concrétisant principalement par la parution d une revue d architecture. Celle ci servira les média de 1961 à Ce sont les premiers après les brutalistes, à réagir à l ère de consommation. lls associent comme les Situationnistes ou les Métabolistes les principes d indétermination et de mobilité et reprennent à leur compte les mégastructures mais avec une vision poétique, ironique ou provocatrice. Ils développent ainsi l idée d une circulation dans laquelle vient se greffer des cellules. La ville est itinérante et elle suit les flux de l évènement et de la circulation de l information. Cedric Price (Angleterre, ) Cedric Price, fils de l architecte A.J. Price, étudie à l Université de Cambridge de 1952 à 1955, puis à l Architectural Association School of Architecture de Londres de 1955 à 1957, où il est l élève de Arthur Korn1. Il débute en 1956 auprès de Ernö Goldfinger sur l exposition This is Tomorrow à la Whitechapel Art Gallery. Il y rencontre Frank Newby, Alison et Peter Smithson, mais aussi Reyner Banham, qui devient son ami. En 1958, il devient professeur à la AA School de Londres, où il enseigne pendant 6 ans, et travaille également dans l agence Fry, Drew & Partners. En 1959, il rencontre et se lie d amitié avec l architecte américain Richard Buckminster Fuller, dont les recherches inspireront ses travaux. Il fonde sa propre agence nommée Cedric Price Architects en 1960

7 Couverture du livre Delirious New York

8 Le language comme modèle dominant? I think I can do architecture as a journalist, and one of the most interesting things about journalism is only a regime of curiosities, applicable to any subject, and I would say this is still a very important driving factor in my architecture. Avant de devenir architecte Rem Koolhaas suivit les pas de son père et s orienta vers une carrière de journaliste, couvrant les excès de l european counterculture des années 60, puis de scénariste. Il n est dès lors pas surprenant que Koolhaas est choisi de lancer sa carrière en écrivant et non en construisant, comme si les mots devenaient le site, le terrain de jeu de son architecture. Son premier livre, New York Délire, publié en 1978, semble être le véritable déclencheur de sa carrière d architecte. Preuve en est la recrudescence de demandes qui fleurirent après la parution du livre. Quel hollandais pouvait bien avoir une colonne entière dans le NY times book review se demande d ailleurs un compatriote hollandais. C est grâce à New York Délire que la mairie de Rotterdam le contacta, comme dans un rêve d enfant, ils m ont reçu, assis devant la carte de Rotterdam, et m ont demandé de choisir le site qui m intéressait!, raconte Koolhaas. A la lecture de mon livre, ils s étaient enthousiasmés à l idée de construire autrement. C est ce même livre qui l amena à participer au concours pour le plan d Amsterdam Nord, alors même que sa pensée architecturale allez à l encontre de celle en vogue à cette époque aux Pays-Bas. Koolhaas intrigue, et, s il a marqué le paysage architectural actuel, c est avant tout par l élaboration de ce nouveau langage architectural, à mi chemin entre la théorie et la pratique, le scénario et la réalisation. Collecter, manipuler et projeter, tel semble être le leit motiv de l architecte qui semble nous dire que journalisme et architecture sont étroitement liés. Le langage serait-il le modèle dominant dans production de Rem Koolhaas? Ecrire ne serait pas tant une activité mais plus une façon de critiquer et reinventer l architecture. L action d écrire est peut être, pour Koolhaas moins important que le fait que l architecture soit reconnue et comprise à travers le langage.

9 New York Délire (NYC, 1978) The writing Delirious New York was famous before Rem s architecture, and it was better than his architecture Charles Jencks. C est à Ithaca que Koolhaas commence à collectioner, avec sa femme Madelon Vriesendorp, de vieilles cartes postales de New York, s inscrivant même au Metropolitan Post- Card Collector s Club. Accumulant toutes sortes de données, Koolhaas met en page un manifeste rétroactif de la métropole. Accompagné de dessins et peintures de sa femme, New York Délire est un livre qui a marqué autant par sa forme que par son contenu.cet ouvrage nous montre une philosophie propre à Rem Koolhaas : la présentation des projets joue un rôle capital, même au niveau théorique. Les dessins flous, comiques et quasi romantiques avait pour but de séduire une audience plus large en faisant passer la théorie au second plan.

10 New York City Si New York n avait pas existé, Koolhaas aurait dû l inventer. New York a toujours fasciné Koolhaas, mais, c est seulement lorsque Kenneth Frampton lui conseille d aller à l Institute for Architecture et Urban Studies que Koolhaas s installe dans un appartement en face de l Empire State Building. C est à New York qu il rencontre, de l autre côté de l étage, Peter Eisernman, figure majeure de la déconstruction architecturale, qui inspira beaucoup Rem Koolhaas.

11 Bill Ellis, Rick Wolkowitz, Peter Eisenman, Liz Eisenman, mario Grandelsonas, Madelon Vrisendorp, Rem Koolhaas, Julia Bloomfield, Randall Korman, Stuart Wrede, Andrew Macnair, Anthony Vidler, Richard Meier, Unidentified woman, Kenneth Frampton, Diana Agrest, Caroline Coty Sidnam, Jane Ellis, Suzanne Frank, and Alexander Gorlin.

12 Koolhaas, un collectif à lui tout seul? Si l OMA, crée en 1975 par est l agence à proprement parler dans laquelle Rem Koolhaas travaille, il semble que l architecte se détache de l entité. Koolhaas estil un collectif à lui tout seul? Il en est certainement un par tous les échanges et rencontres qu il à eu durant son parcours. Il y a d abord eu Elia Zenghelis qu il rencontre en deuxième année à la AA School, ainsi que Peter Cook, qui, deux semaines après l arrivée de Koolhaas l avait déjà qualifié de fasciste ennuyeux. Entre le fondateur d Archigram et Rem Koolhaas la relation ne se fait pas sans heurts, mais c est le débat qui fait le dialogue, on profite mieux d un enseignement avec lequel on est pas en sympathie. C est également à la AA que Koolhaas introduit Superstudio et par ce biais rencontre Natalini, mais aussi Alvin Boyarski, directeur de l école qui fût l étudiant de Rowe a Cornell et qui a produit son propre manifeste sur Chicago entièrement illustré par des cartes postales, Koolhaas reconnaît facilement l influence qu a eut cette ouvrage sur lui. Puis vint le temps d Ithaca, où il ne restera qu un an, mais un an plein d enseignement. En 1972, dans le cadre de son projet sur le mur de Berlin, il part en Allemagne et découvre le travail de Ungers qu il décide de rejoindre à Ithaca où il dirigeait le département d architecture de l université de Cornell, mais où se trouvait aussi Colin Rowe. Malgré la tension palpable qui existait à l époque entre Ungers et Rowe (néorationaliste contre contextualiste) Koolhaas avoue que tous deux m ont beaucoup appris volontairement et involontairement.... Après un an, il rejoint New York et l Institute Of Urban Studies dirigé par Peter Eisenman : J ai beaucoup profité de l observation des tactiques qu il avait développées. Il finit Exodus, publie ces premiers textes dans la revue de l Instititut, notamment sur Leonidov, travaille au près d Ungers, et crée l OMA. dont le sigle à tout avoir avec OMU (Oscar Matthias Ungers) avec qui à l époque Rem projette de s associer. Toutes ses rencontres ont indéniablement marqué et structuré sa pensée. Koolhaas semble s être nourris de tous ces voyages et rencontres, chaque personnalités à marqué son travail d une façon ou d une autre.

13 Oscar Mathias Ungers (Allemagne, ) Colin Rowe (USA, ) Oscar Ungers, obtient son diplôme d architecture en 1950 à l université de Karlsruhe. En 1968 il est appelé par Colin Rowe afin de venir enseigner avec lui à l univeristé de Cornell dans la ville d Ithaca. Il est à l époque l étoile montante de l architecture allemande, et partage beaucoup de références avec Colin Rowe. Il accepte l invitation de Rowe. Le premier projet qu il réalise à Ithaca et du style de ce qu il réalisé à Berlin : de gigantesques méga structures. Colin Rowe, le contextualiste, a du mal à comprendre. Débute alors une longue bataille entre les deux architectes. Théoricien, Colin Rowe enseigne à l université de Cornell à Ithaca. En 1978, Colin Rowe, en collaboration avec Fred Koetter publie un livre intitulé Collage City. Cet ouvrage questionne les principes urbanistiques du Mouvement Moderne en dénonçant l utopie de la Charte d Athènes de Le Corbusier en milieu urbain. De tout temps, la Ville s est constituée par strates successives, par assemblage d éléments divers, que les deux auteurs ne peuvent accepter de voir disparaître et qui les conduisent à remettre en question le rôle de l architecte-urbaniste dans un contexte urbain.

14 Elia Zenghelis Athènes, ) Zenghelis est un architecte d origine grec qui étudia à la AA school de Londres où il devint professeur. C est d ailleurs à cette occasion qu il rencontre Rem koolhaas dont il est l enseignant. Ils commencèrent à travailler ensemble au début des années 1970 sur un projet utopique : Exodus, ou les prisonniers volontaires de l architecture. En 1978, Rem Koolhaas, Elia Zenghelis et sa femme, ainsi que Madelon Vriesendorp fondent leur agence : l OMA. Grâce à la AA j ai été envoyé à l Ulm et, avec le soutient de l école nous avont été capable d inviter à Londres de nouveaux architectes radicaux comme COOP, HIimmelbau et Adolfo Natalini de Superstudio. Dès la fin des années 1960, la AA était devenue un terrain fertile pour le développement des idées radicales, même avant que je rencontre rem Koolhaas. En 2000, Elia Zenghelis gagne le prix RIBBA récompasant sa carrière d enseignant.

15 Manifestes situés Exposé théorique par lequel des écrivains, des artistes lancent un nouveau mouvement, expose une idée Les années 70 voit l explosion de ce genre particulier qu on pourrait appeler le manifeste situé. Dans son texte un architecte choisi une certaine ville, ou territoire, comme emblématique d une leçon ou d une stratégie plus générale. A la fin de la décennie on compte trois manifestes, qui sont pour ainsi dire tous nés à Ithaca. D abord Collage City, de Colin Rowe, publié en 1978, est un manifeste du conceptualisme, prenant Rome comme ville modèle. Pour Rowe, la ville-collage peut «s adapter à toute une gamme d utopies en miniature. Le collage nous permet d accepter l utopie en fragments». D autre part le manifeste The City in the City Berlin : a green archipelago de Ungers qui prend Berlin comme ville clef. Et enfin Koolhaas avec New York Délire, un manifeste du sub urbanisme qui utilise Manhattan comme terrain d étude. Ces trois livres ont beaucoup de points communs. D une part ils proposent tous une matrice urbaine. D autre part il est intéressant de noter la façon dont chacun de ces manifestes va chercher un artiste clé pour représenter une pensée : collages et télescopages de Picasso pour Rowe, déplacements de Magritte pour Ungers et collage à la manière de Dali pour Koolhaas.

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17 Digestion Processus au cours duquel un organisme vivant reçoit du milieu extérieur des éléments, les modifie et, sélectionne les éléments assimilables ou non. Koolhaas ingère tout ce qui l'entoure : rencontres, projets, images, voyages, livres... que ces informations concernent l'architecture ou non. Il trouve l'inspiration partout et surtout là elle n'est pas sensée se trouver. En effet, l'architecte intègre, assimile et reformule tout ce qui l'a put rencontrer au fil de son parcours. Il est une sorte de synthèse de toutes les rencontres qu il a pu effectuer durant sa carrière : Eisenman, Frampton, Ungers ou encore Rowe. Autant de personnages qui ont marqué son parcours, de façon consciente ou non. Avant de travailler avec Ungers, il l'a beaucoup observé et de ce fait compris, ce qui leur permettait de travailler presque de manière télépathique. Koolhaas analyse tout et s'en sert dans ses collaborations et dans ses productions. C'est également un homme extrêmement mobile qui voyage en permanence et se nourrit des cultures qu'ils découvrent. Il a cette capacité à synthétiser ce qui l entoure, les personnes, les lieux, les publications et à en tirer le meilleur, ou tout du moins le plus bénéfique pour lui.

18 ALVIN BOYARSKY ROCKEFELLER CENTER BERLIN MOSCOU COLIN ROWE OSCAR MATHIAS UNGERS ARCHIGRAM ZENGHELIS ITHACA ROTTERDAM

19 Gravitation Action d'apprendre autours de quelqu' un, de quelque chose, de puiser des connaissances par le contact. Au fil de son parcours Rem Koolhaas a toujours su s'entourer de personnages qui lui on appris. Des personnages de milieux divers autour desquels il a gravité, de Londres à Berlin en passant par New York, Moscou et Ithaca. Il a appris des autres autant qu'aujourd'hui les autres apprennent de lui. Koolhaas semble cultiver ce côté gravitationnelle de l'architecture : les gens bougent autant que les idées, il est dès lors important et essentiel de garder un flux continue de gens entrant et sortant. On pourrait parler de la «Koolhaas school», une gigantesque fourmilière ou Koolhaas enseigne autant qu'il apprend. «Travailler pour n'importe quel architecte renommé est une bonne manière d'avancer mais travailler pour Rem Koolhaas est une garantie.».

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