Le rêve américain. LE MONDE à 19h19 Mis à jour le à 19h38. Par Julie Pêcheur

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1 Le rêve américain LE MONDE à 19h19 Mis à jour le à 19h38 Par Julie Pêcheur Le rêve américain LE MONDE à 19h19 Mis à jour le à 19h38 Par Julie Pêcheur Joseph Altuzarra. SIMON CAVE JOSEPH ALTUZARRA, LE PRAGMATIQUE JOSEPH ALTUZARRA, LE PRAGMATIQUE Ce n'était pas évident de se lancer, à 25 ans, au beau milieu de la crise financière de Mais Joseph Altuzarra avait choisi de créer sa marque à New York : "J'y aime l'énergie, la vitalité et ce sentiment de liberté totale." Il comptait aussi sur le soutien que la communauté de la mode y apporte aux jeunes designers. Et il ne s'est pas trompé. Au cours de la première saison, c'est Anna Wintour elle-même, la rédactrice en chef de Vogue, qui a décroché son téléphone pour suggérer au grand magasin Barneys d'acheter sa collection. Ce n'était pas évident de se lancer, à 25 ans, au beau milieu de la crise financière de Mais Joseph Altuzarra avait choisi de créer sa marque à New York : "J'y aime l'énergie, la vitalité et ce sentiment de liberté totale." Il comptait aussi sur le soutien que la communauté de la mode y apporte aux jeunes designers. Et il ne s'est pas trompé. Au cours de la première saison, c'est Anna Wintour elle-même, la rédactrice en chef de Vogue, qui a décroché son téléphone pour suggérer au grand Depuis, l'ancien premier assistant de Riccardo Tisci chez Givenchy accumule éloges et distinctions : en 2011, il était le lauréat du prix CFDA/Vogue Fashion Fund du meilleur créateur, empochant ainsi dollars (environ euros). Altuzarra habille aujourd'hui Madonna ou l'actrice Jessica Chastain. Ses magasin Barneys d'acheter sa collection. modèles sont diffusés dans quelque 70 points de vente à travers le monde. De ses racines américaines - son père est français, sa mère sino-américaine et il a étudié en Pennsylvanie -, il a hérité un certain pragmatisme : "A New York, il y a un véritable échange entre créateurs et commerçants. Il s'agit d'un réseau de soutien merveilleux. La mode est une fusion de ces deux mondes, c'est génial d'être capable de les mêler." Ce mois-ci, le groupe Kering (Saint Laurent, Gucci, Depuis, l'ancien premier assistant de Riccardo Tisci chez Givenchy accumule éloges et distinctions : en 2011, il était le lauréat du prix CFDA/Vogue Fashion Fund du meilleur créateur, empochant ainsi dollars (environ euros). Altuzarra habille aujourd'hui Page 1 of 7

2 Madonna ou l'actrice Jessica Chastain. Ses modèles sont diffusés dans quelque 70 points de vente à travers le monde. De ses racines américaines - son père est français, sa mère sino-américaine et il a étudié en Pennsylvanie -, il a hérité un certain pragmatisme : "A New York, il y Stella McCartney...) est devenu actionnaire minoritaire de la marque. De quoi permettre au créateur de poursuivre... L accès à la totalité de l article est protégé Déjà abonné? a un véritable échange entre créateurs et commerçants. Il s'agit d'un réseau de soutien merveilleux. La mode est une fusion de ces deux Achetez cet article 2 mondes, c'est génial d'être capable de les mêler." Ce mois-ci, le groupe Abonnez-vous à partir de 1 Kering (Saint Laurent, Gucci, Stella McCartney...) est devenu actionnaire Découvrez l édition abonnés minoritaire de la marque. De quoi permettre au créateur de poursuivre son ascension. SOPHIE THÉALLET, LA PERFECTIONNISTE Le public américain l'a découverte en 2009, lorsque Michelle Obama est apparue avec l'une de ses robes. La même année, Sophie Théallet est la première Française à recevoir le prestigieux prix CFDA/Vogue Fashion Fund du meilleur créateur. Une aubaine pour celle qui a lancé sa marque à New York deux ans plus tôt. "Ce n'est pas une marque française, précise-t-elle. Je suis une citoyenne du monde, avec un savoir-faire français et une marque américaine." Théallet a posé ses valises au Chelsea Hotel, où réside alors son futur mari et associé. D'abord free-lance, elle est vite nostalgique des dix années passées auprès du couturier Azzedine Alaïa comme première Page 2 of 7

3 assistante à Paris : "A l'époque, les studios de création américains étaient très différents. Je ne retrouvais pas le métier que j'avais appris en France : l'éducation de la couture, le respect du vêtement, la recherche de la coupe parfaite..." Son perfectionnisme, allié à l'énergie de la ville, la pousse à monter sa société : "Quand on se déracine, on trouve une nouvelle liberté, on voit les choses différemment. On change pour le meilleur." Grâce à la dotation de l'époque ( dollars), elle a pu libérer son appartement de Brooklyn Heights et installer son atelier sur la 37 e Rue, au coeur du Fashion District. "Les usines se trouvent à quelques pâtés de maisons. Ça n'a pas de prix : je peux vérifier la production de très près." PIERRE ROUGIER, L'HOMME DE POUVOIR "L'homme qui a le pouvoir de dire non" : c'est ainsi que le New York Times présentait Pierre Rougier en A la tête de l'un des trois bureaux de presse les plus prestigieux des Etats-Unis, l'homme est craint et respecté tant des journalistes - qui cherchent à approcher ses couturiers - que des personnalités - qui veulent une place au premier rang des défilés. Débarqué dans le West Village de Manhattan en 1993, après s'être occupé des relations presse d'hermès, de Maison Martin Margiela et de Yohji Yamamoto, Pierre Rougier fonde PR Consulting en "On se sent très encouragé ici quand on veut monter une entreprise. Les gens soutiennent l'esprit d'initiative. Si on se trompe, on ferme et on recommence." Page 3 of 7

4 Ce ne sera pas son cas. Deux ans plus tard, alors qu'il travaille toujours depuis son salon, Rougier reçoit un appel de la multinationale Procter & Gamble, qui souhaite relancer sa marque de produits coiffants Vidal Sassoon. "Je suis parti avec ma petite valise à Cincinnati [le siège de Procter & Gamble dans l'ohio] faire une présentation chez les rois du marketing", s'amuse-t-il. PR Consulting, qui aujourd'hui possède aussi un bureau à Paris, prend alors son envol, puisant de chaque côté de l'atlantique les ingrédients du succès : "On venait d'une approche très française, très "créateur", dans notre façon de représenter une marque. On s'est aussi plié à la manière dont les Américains font les choses, avec une vision plus stratégique, davantage marketing." LAURE HÉRIARD-DUBREUIL, L'ACHETEUSE PIONNIÈRE Le jour où elle a surpris Alber Elbaz, directeur artistique de la maison Lanvin, en train d'ajuster un foulard sur l'une des silhouettes de sa boutique, Laure Hériard-Dubreuil s'est dit que ses efforts avaient payé. Avant d'inaugurer le Webster Miami, en 2009, un espace multimarque de mètres carrés, elle a dû superviser la fastidieuse rénovation de l'immeuble Art déco emblématique du quartier de South Beach, dans lequel elle et ses associés ont choisi d'installer son concept store. Page 4 of 7

5 Miami, eldorado inattendu de la mode? La Française a fait preuve d'intuition. La ville attire Sud-Américains en transit, New-Yorkais en mal de chaleur, Russes avec maisons secondaires, la faune hautement stylée qui fréquente la déclinaison floridienne de la foire d'art contemporain Art Basel... Mais, surtout, Laure Hériard-Dubreuil a été portée par "l'accueil extrêmement positif" : presse, maisons de luxe, clients (notamment des joueurs de basket-ball et des chanteurs de hiphop), tous l'ont soutenue. Même la chaîne de supermarchés Target lui a proposé une collaboration pour le lancement d'une ligne de vêtements, sortie en "C'est le bon côté des Etats-Unis : cet optimisme, cette énergie, ce dynamisme... Tout le monde a une chance de réussir, mais il faut travailler très dur." Et la jeune femme ne compte pas s'arrêter en si bon chemin : "Ce pays est tellement grand : Miami, c'est une toute petite fraction. Il y a un potentiel de développement énorme..." CATHERINE MALANDRINO, L'ÉMERVEILLÉE New York, Catherine Malandrino l'a découverte en hélicoptère. Directrice artistique de la marque Et vous, elle s'était envolée en 1997 avec Bernard Aidan, directeur du label aux Etats-Unis : "Je suis tombée amoureuse de la ville et de l'homme." Elle déménage, fait un bébé et rejoint Diane von Furstenberg, qui relance sa célèbre robe portefeuille. Page 5 of 7

6 La nuit, Catherine Malandrino dessine sa première collection. Ses robes Flag, hommage "amoureux et critique" à la bannière étoilée, sont présentées le 9 septembre Prémonition troublante. Son succès est fulgurant. Madonna commande une robe, et les propositions affluent. "On vous propose un contrat de 1 million de dollars pour faire du consulting et on vous envoie un jet privé à 35 ans à peine! Ces choses-là ne peuvent pas arriver en France, question d'échelle!" Elle avoue volontiers que la tête lui a tourné. "Mais j'ai su garder les pieds sur terre. Peut-être grâce à mes origines montagnardes", précise-t-elle. Aujourd'hui, la Grenobloise, qui compte trois boutiques aux Etats-Unis et quatre au Moyen-Orient, attend les résultats d'un second tour de table pour ses projets : Chine, Russie, Canada, Paris... Avec circonspection. "La violence est extrême dans les échecs et les réussites. On vous fait des propositions mirobolantes et on vous retire tout d'un coup. Mais, même dans les moments difficiles, on vous écoute." L'écoute et la bienveillance sont pour elle la quintessence de l'amérique. "Ici, on a accès aux grands patrons de la mode. Ils sont prêts à échanger avec vous, car ils ne présument pas de ce que vous allez devenir : un chauffeur peut finir à la tête de la plus grosse entreprise de taxis du pays." PASCAL DANGIN, LE DOMPTEUR D'IMAGES Page 6 of 7

7 Il travaille dans l'ombre des plus grands photographes, et la liste des marques et des magazines qui font appel à ses services est sans fin. Pascal Dangin est maître retoucheur comme d'autres sont maîtres tailleurs. Un portrait de lui dans le New Yorker en 2008 attribuait son succès à "sa capacité à associer prouesse technique et sensibilité esthétique". Garçon coiffeur à 16 ans à Paris, il dirige aujourd'hui un studio de retouche photo de 95 personnes dans le Meatpacking District de Manhattan. "Etant européen, j'ai toujours donné une couverture médicale à mes employés", précise-t-il dans un français mâtiné d'anglicismes. Quand il découvre New York en 1989, c'est le coup de foudre : "Tout avait l'air parfait. Je me suis dit que j'étais né au mauvais endroit. Espace de liberté, culture de l'opportunité... Le système est fait pour que l'individu puisse devenir ce qu'il veut, boulanger ou président." A condition de s'en donner les moyens. "Pendant quatre ans, j'ai mené deux carrières, coiffeur le jour, devant l'ordinateur la nuit. Quand on s'expatrie, on pense que le fait d'être français ou espagnol est un avantage. Mais ce n'est pas ça qui compte. Au final, c'est le travail." Page 7 of 7