Objet : Changement de format de CKLX-FM Montréal (demande # ), Intervention de l ADISQ

Transcription

1 Montréal, le 13 février 2012 Monsieur John Traversy Secrétaire général CRTC Ottawa (Ontario) K1A 0N2 PAR LE FORMULAIRE DU CRTC PAR COURRIEL : rbriere@rncmedia.ca Objet : Changement de format de CKLX-FM Montréal (demande # ), Intervention de l ADISQ Monsieur le Secrétaire général, 1. L ADISQ, qui représente les producteurs de disques, de spectacles, et de vidéos et dont les membres sont responsables de plus de 95 % de la production de disques, de spectacles et de vidéoclips d artistes canadiens d expression francophone, souhaite par la présente se prononcer sur la demande mentionnée en rubrique. 2. L ADISQ a pris connaissance du dossier public relatif à la demande de modification de licence de la station CKLX-FM Montréal (Planète Jazz). Cette demande de modification de licence vise à ce que RNC Média puisse exploiter la station CKLX- FM sous une formule spécialisée, consacrant ainsi plus de 50 % de sa programmation à des créations orales plutôt que sous la formule spécialisée jazz qu elle exploite actuellement. 3. L ADISQ s oppose à cette demande de RNC Média pour les raisons exposées ci-dessous. Analyse de la demande 4. Dans sa demande, RNC Média propose que la station CKLX-FM, actuellement exploitée selon une formule spécialisée jazz et blues dans le marché de Montréal, voie sa licence modifiée afin que cette station puisse dorénavant consacrer plus de 50 % de la semaine de radiodiffusion à des créations orales. 5. Le principal argument invoqué par RNC Média pour justifier cette demande de modification de licence concerne les difficultés financières de la station, qui aurait

2 généré un «manque à gagner au niveau du bénéfice net de presque 6 millions de dollars» CKLX-FM n aurait pas trouvé son public. La station obtient des parts d écoute légèrement supérieures à 1 %. 7. Afin d expliquer ces difficultés, RNC Média évoque différents facteurs : la présence de stations de jazz sur Internet et sur la radio satellite, l absence de créations originales de type «smooth jazz», le développement de technologies alternatives telles que le ipod, etc. 8. En s appuyant sur quatre cas de stations de radio ayant exploité une formule spécialisée jazz avant de l abandonner au cours des dernières années, la titulaire affirme que ce type de radio ne saurait être viable au pays. 9. Pour soutenir sa proposition de transformer CKLX-FM en radio parlée, RNC Média a commandé une étude de marché à la firme DeepBlue. 10. Selon cette étude, le marché francophone de Montréal contiendrait moins de stations de radio à prépondérance verbale que tous les autres marchés au Canada alors que la radio parlée constituerait pourtant le deuxième format le plus écouté au Québec. 11. L étude postule de plus que la conversion de Planète Jazz en CHOI n affecterait que peu la rentabilité des autres stations du marché. Position de l ADISQ 1. Mise en contexte 12. Avant d exposer sa position, l ADISQ souhaite rappeler le rôle de premier plan que joue la radio en ce qui concerne l épanouissement de l industrie musicale locale et la préservation de la diversité musicale sur les ondes d ici. 13. Alors que plusieurs technologies alternatives permettant de découvrir et consommer de la musique se développent, comme le note RNC Média dans son mémoire supplémentaire, il semble tentant pour certains acteurs d affirmer que les outils traditionnels de découverte et de consommation seraient devenus désuets. 14. Or, l ADISQ, appuyée par plusieurs études, n adhère pas à cette idée. Les médias traditionnels et tout particulièrement la radio demeure à ce jour un outil privilégié et essentiel de promotion musicale. 15. Une étude 2 menée conjointement par la NARM (National Association of Recording Merchandisers) et par la firme de recherche NPD Group et dont les résultats ont été dévoilés en novembre 2011, en témoigne éloquemment. 1 Mémoire supplémentaire Changement de format de CKLX-FM Montréal, déposé par RNC Média, 20 décembre 2011, p. 2. 2

3 16. En effet, l étude montre que parmi des amateurs de musique considérés comme étant de «fervents amateurs de musique 3», la radio a été mentionnée par plus de 50 % des répondants comme ayant une influence sur leurs achats. La radio occupe donc le premier rang des sources ayant une influence sur les achats de ces amateurs, devant les recommandations des pairs, les sites Internet de «streaming» et les webradios gratuites. 17. Le pourcentage de répondants attribuant à la radio une grande influence sur leurs achats musicaux est encore plus grand parmi les acheteurs plus modérés de musique. 18. La radio constitue toujours aujourd hui l outil numéro un de promotion et de découverte musicale. 2. Un revirement subit 19. Comme mentionné précédemment, l ADISQ s oppose à la demande de modification de licence de CKLX-FM pour les raisons exposées ci-après. 20. D abord, l ADISQ constate que la licence de CKLX-FM a été renouvelée par le CRTC très récemment, soit le 17 août La requérante n avait alors pas demandé à voir sa licence modifiée. Ce revirement subit de la part de RNC Média étonne l ADISQ. 21. Lors de son renouvellement de licence, RNC Média avait par contre déjà longuement insisté sur les difficultés financières rencontrées par sa station afin d obtenir un assouplissement en ce qui concerne les DCC qu elle était tenue de verser. 22. L ADISQ croit qu il est à-propos de rappeler que CKLX-FM exploite un format musical spécialisé et qu il est par conséquent normal qu un tel service engendre des profits qui ne se comparent pas à ceux d une radio commerciale non spécialisée. 23. D ailleurs, RNC Média le reconnaît puisque dans l étude de marché qu elle a soumise au CRTC, il est écrit que «[l]es stations spécialisées en musique classique ou musique jazz, par la nature de leur contenu, ont un public plus limité. 4» 24. Le rôle joué par une station telle que Planète Jazz auprès de ce public spécialisé n en demeure pas moins essentiel. 2 Narm and the NPD Group unveil results of research report on consumers and music discovery ; Study : FM is still the biggest source for music discovery, Digital Music News, 3 Il s agit de consommateurs de musique dépensant en moyenne 267 $ annuellement pour des enregistrements sonores en plus de 139 $ pour des spectacles. 4 La conversion de Planète Jazz Montréal en radio parlée, DeepBlue, 18 novembre 2011, p

4 3. Montréal : ville de jazz 25. L ADISQ, bien qu elle n ait pas accès aux données financières de la station, concède à RNC Média que cette dernière semble connaître des difficultés financières importantes. 26. Par contre, elle ne peut que s étonner devant certains des arguments invoqués par la titulaire pour les justifier et tout particulièrement devant celui voulant qu il y ait une «absence de nouvelles créations originales de type "smooth jazz" 5». 27. En vertu de son format spécialisé, la titulaire a la possibilité de puiser dans le répertoire jazz mondial. Au Québec seulement, on recense une production annuelle importante d albums jazz. 28. Plus encore, l ADISQ est surprise de lire un tel argument de la part d une radio spécialisée en jazz qui opère dans une ville reconnue internationalement pour son Festival de Jazz, lequel permet chaque année aux Montréalais et aux spectateurs venus du monde entier de voir se produire sur scène plus de 3000 artistes jazz provenant de 30 pays différents L événement propose en plus une programmation à l année, permettant au public d ici d assister à des concerts jazz semaine après semaine. 30. Il semble donc difficilement concevable qu une programmation de spectacles aussi vaste connaisse un succès retentissant d un côté et que l on constate de l autre côté que le répertoire à diffuser sur les ondes radiophoniques manque. 31. En outre, le Festival de Jazz de Montréal a été consacré par le Guinness World Records comme le festival de jazz le plus important de la planète : les Montréalais entretiennent forcément une relation privilégiée avec la musique jazz, se distinguant en cela des habitants de toutes les autres villes canadiennes. 32. RNC Média, d ailleurs, en convenait lorsqu elle a présenté au CRTC, en 2003, sa demande pour l obtention d une licence lui permettant d exploiter une formule spécialisée jazz. 33. Dans l étude de marché qu elle avait alors soumise au CRTC pour soutenir sa demande, RNC Média affirmait notamment que «le jazz est beaucoup plus populaire dans le marché francophone de Montréal que dans le reste du Québec ou du Canada» 7. 5 Mémoire supplémentaire Changement de format de CKLX-FM Montréal, déposé par RNC Média, 20 décembre 2011, p Site Internet du Festival de Jazz de Montréal, consulté le 13 février 2012 : 7 Étude de marché Couleur Jazz FM, Dans le cadre d une demande de licence d exploitation d une station radiophonique de langue française dans le marché de Montréal, Carat Expert pour Radio Nord Communications, 16 avril 2002, p.7 4

5 34. L ADISQ voit mal en quoi cette situation aurait changé au cours des dernières années, bien au contraire, le Festival continuant d attirer les foules. 4. Le marché francophone de Montréal : un nombre de stations musicales limité 35. Dans son étude de marché, RNC Média tente de convaincre qu il y aurait dans le marché radiophonique francophone de Montréal «de la place» pour une station de radio parlée. Or, cet argumentaire semble faire fi du fait que pour ajouter une station à prépondérance verbale dans ce marché, il faudra du coup faire disparaître une station musicale. 36. L ADISQ considère qu en regard de sa taille, le marché radiophonique musical francophone de Montréal possède un nombre de stations limité. Éliminer une voix musicale de ce marché produirait un impact néfaste majeur sur sa diversité musicale. 37. Les tableaux suivants, qui dressent les portraits de trois marchés différents, soit Montréal, Québec et Gatineau, illustrent ce point. 38. L ADISQ souhaite comparer ces différents marchés afin de démontrer que celui de Montréal, bien qu il soit nettement plus populeux que Québec ou Gatineau, compte moins de stations musicales que tous ces marchés. Tableau 1 : Marché francophone de Montréal, stations de radio commerciales et publiques Station Nom Format Propriétaire CITE-FM Rouge FM Adulte contemporain Astral Media CKMF-FM NRJ Succès populaire / Palmarès Astral Media CFGL-FM Rythme FM Adulte contemporain Cogeco CKOI-FM CKOI Grands succès contemporains Cogeco CJPX-FM Radio Classique 99,5 Spécialisée musique classique Radio Classique CKLX-FM Planète Jazz Spécialisée musique jazz RNC Média CBF-FM Espace Musique Musique multigenre SRC CHMP-FM 98,5 fm Montréal Parlée Cogeco CKAC-AM Radio circulation 730 AM Parlée Cogeco CBFX-FM Première Chaîne Parlée SRC Source : CRTC, Diversité des voix : 5

6 Tableau 2 : Marché de Québec, stations de radio commerciales et publiques Station Nom Format Propriétaire CITF-FM Rouge FM Adulte contemporain Astral Media CHIK-FM NRJ Succès populaire / Palmarès Astral Média CJEC-FM Rythme FM Adulte contemporain Cogeco CFEL-FM CKOI Adulte contemporain Leclerc Communication CFOM-FM 102,9 CFOM Souvenirs garantis Cogeco CHXX -FM X2 Rock 100,9 Rock alternatif RNC Média CJSQ-FM Radio-Classique Québec 92,7 Classique Radio-Classique CBVX-FM Espace Musique Musique multigenre SRC CJMF-FM FM93 Parlée ou musicale? En attente de décision Cogeco CHRC AM CHRC 80 / Info 800 Parlée Remparts de Québec CHOI-FM CHOI 98,1 Radio X Parlée RNC Média CBV-FM Première Chaîne Parlée SRC Source : CRTC, Diversité des voix : Tableau 3 : Marché francophone d Ottawa/Gatineau, stations de radio commerciales et publiques Station Nom Format Propriétaire CIMF-FM Rouge FM Adulte contemporain Astral Media CKTF-FM NRJ Succès populaire / Palmarès Astral Média CKOF-FM CKOI Adulte contemporain Cogeco CFTX-FM Capitale Rock Rock RNC Média CHLX-FM Planète 97,1 Succès et nostalgie RNC Média CBOX-FM Espace Musique Musique multigenre SRC CBOF-FM Première Chaîne Parlée SRC Source : CRTC, Diversité des voix : Le tableau suivant synthétise ces données en illustrant combien de stations musicales et combien de stations verbales existent dans chacun de ces marchés : Tableau 4 : Nombre de stations musicales et parlées, commerciales et publiques, par marché Montréal francophone Montréal francophone si la Gatineau/ Ottawa Québec francophone actuellement demande était acceptée francophone Population Nombre de stations musicales ou 9 6 Nombre de stations parlées ou 4 1 Sources : CRTC, Diversité des voix : et Sondages BBM, _montreal_franco_ pdf 6

7 40. Parmi les trois marchés à l étude dans ce tableau, celui de Montréal, avec sa population francophone estimée à habitants 8 par BBM, est, et de loin, le plus grand. Pourtant, c est le marché de Québec, estimé à habitants 9, qui bénéficie de la plus grande diversité musicale, avec ses huit ou neuf stations de radio musicales francophones 10. Au total, Montréal compte deux ou trois stations (selon la décision que rendra le CRTC dans le cas de CJMF-FM) de radio musicales de moins que Québec. 41. En comparaison, Montréal ne compte actuellement que sept stations musicales et ce nombre diminuerait à six si le Conseil acceptait que Planète Jazz abandonne complètement sa mission musicale et devienne une radio parlée. 42. Montréal compterait ainsi le même nombre de stations musicales francophones que Ottawa-Gatineau, qui ne compte que habitants Le tableau suivant montre bien que Montréal compte le plus petit nombre de stations de radio musicales par habitant, non seulement au Québec, mais aussi au Canada : 8 Source : Sondages BBM, _montreal_franco_ pdf 9 Source : Sondages BBM, _2011.pdf 10 Le CRTC étudie actuellement une demande de modification de licence effectuée par Cogeco pour la station CJMF-FM, qui souhaite renoncer à son format musical pour devenir une radio à prépondérance verbale. 11 Source : Sondages BBM, _2011.pdf 7

8 Tableau 5 : Nombre d habitants par station de radio musicale (commerciale et publique) dans différents marchés canadiens Nombre d'habitants / Villes Nombre de Nombre d'habitants stations musicales Station de radio musicale Montréal fr Toronto Vancouver Montréal ang Hamilton Edmonton Calgary Québec Winnipeg Ott-Gat ang Ott-Gat fr Sources :Sondages BBM, CRTC, Diversité des voix : D emblée, le fait qu il y ait moins de stations de radio parlées par habitant dans le marché montréalais francophone que dans les autres marchés canadiens paraît moins surprenant et bien peu significatif. 45. En effet, RNC Média cite dans son étude de marché le nombre de stations de radio parlée existant dans d autres marchés canadiens. Or, ce calcul, pour être juste, doit absolument être mis en parallèle avec le nombre de stations musicales. 46. À la lumière des données présentées au tableau 5, force est donc de constater que le marché francophone de Montréal présente une particularité : le nombre de stations de radio commerciales et publiques, qu elles soient musicales ou parlées, y est limité par rapport à sa population. 47. Pour RNC Média, il n y a pas assez de stations à prépondérance verbale par habitant dans le marché de Montréal si on les compare aux autres marchés. 48. Or, l ADISQ fait valoir que cette même comparaison démontre clairement qu il n y a pas non plus suffisamment de stations musicales. 49. Au contraire, le marché francophone musical de Montréal souffre de sousreprésentation par rapport aux autres marchés, une sous-représentation qui serait aggravée si le Conseil décidait d accepter cette demande de modification de licence. 50. L ADISQ tient d ailleurs à rappeler que le nombre de propriétaires de radios commerciales musicales dans le marché montréalais est très limité depuis que Cogeco a acquis les stations de Corus. 8

9 51. Si RNC Média renonce à ce créneau, la concentration de la propriété des stations musicales sera encore plus grande et la diversité musicale s en trouvera nécessairement encore davantage menacée. 5. Le cas des autres stations spécialisées jazz au Canada 52. L ADISQ souhaite maintenant se pencher sur le cas des quatre stations canadiennes de jazz qui ont abandonné leur format spécialisé depuis 2007 et que RNC Média cite dans son mémoire supplémentaire dans le but de démontrer la non-viabilité de ce format au Canada. 53. Il s agit des stations CIWV-FM Hamilton, CIQX-FM Calgary, CHMC-FM Edmonton et CJGV-FM Winnipeg. 54. L ADISQ s attardera à chacune d elles, mais souhaite d entrée de jeu faire remarquer que s il est vrai qu elles ont toutes abandonné le format spécialisé jazz plus ou moins récemment, aucune d elle n a abandonné le format musical et la plupart ont continué d accorder une certaine place au jazz dans leur programmation. a. CIWV-FM Hamilton 55. En premier lieu, l ADISQ souhaite s intéresser au cas de la station CIWV-FM Hamilton puisqu il présente une particularité par rapport aux trois autres stations mentionnées par RNC-Média. 56. En effet, bien qu elle se soit de toute évidence spécialisée 12 pendant plusieurs années dans le format «smooth jazz», cette station n a jamais obtenu de licence spécialisée de la part du Conseil, de sorte que, comme le mentionne RNC Média dans son mémoire supplémentaire, Durham Radio a pu renoncer à ce format «smooth jazz» sans consulter le CRTC. 57. Comme le relève aussi à juste titre la requérante, la station a tout de même continué d opérer une station musicale, se consacrant dorénavant au country. 58. La modification a été effectuée au courant de l été 2011, il est donc trop tôt pour mesurer l impact de ce changement sur les parts d écoute de la station. b. CIQX-FM Calgary 59. Comme le relève RNC Média dans son mémoire supplémentaire, dans la décision , le Conseil a approuvé la demande de Newcap de modifier la licence de 12 Lors du processus précédant le renouvellement de la licence de la station en 2007, le CRTC s est interrogé sur le caractère spécialisé de la programmation de cette station. Après avoir longuement scruté sa programmation, le CRTC avait conclu que la titulaire pouvait continuer d exploiter sa station comme une station traditionnelle non spécialisée, mais considérait que sa programmation se rapprochait grandement de la programmation d une station spécialisée. Source : Décision CRTC , 3 août

10 CIQX-FM Calgary en supprimant les conditions de licence liées à l exploitation de la formule FM spécialisée («smooth jazz»). 60. Pour appuyer cette décision, le Conseil note que Newcap s est engagée à «offrir au marché radiophonique de Calgary une diversité durable; elle continuera notamment, si on lui permet d'exploiter CIQX-FM comme une station FM traditionnelle non spécialisée, à présenter des artistes de Smooth Jazz aux auditeurs de Calgary. La titulaire ajoute qu'elle cherche à assouplir sa programmation afin d'accroître sa part d'auditoire et de concurrencer de façon juste et équitable les autres radiodiffuseurs de Calgary, et ainsi augmenter la visibilité de ces artistes. Elle propose d'exploiter une formule Adulte contemporain/smooth Jazz [ ].» 61. Ainsi, cette demande de modification de licence consistait en quelque sorte en une demande d assouplissement. La titulaire souhaitait continuer d exploiter une station musicale et s est engagée à continuer d offrir une vitrine au jazz. 62. D ailleurs, cette transition a porté ses fruits. Comme le montre le tableau suivant, après qu elle eut effectué ce changement modéré de format, la station devenue CFLX-FM en 2008 (S3 2008) a vu ses parts d écoute à partir de ce moment augmenter substantiellement : 10

11 Graphique 1 : Parts d écoute de la station CIQX-FM, devenue CFXL-FM, de 2006 à 2011, marché de Calgary 12 Parts d'écoute 10 8 Formule spécialisée Jazz 9,7 Formule musicale non spécialisée 9,8 9,3 8,8 8, ,2 8,4 8,8 9 9,48,9 9,19,5 8,3 9,9 10 9,89,4 8, ,6 2,1 3,1 2,6 2,4 2,6 2,5 2,8 1,4 1,7 3,6 1,6 6,5 5,1 5,5 4,6 4,3 6,5 0 S S S S S S S S S S S S S CFXL S S S S au au au au au au au au au au au au au au au au au au au au au au au Sources : Données BBM et PPM, 2005 à 2011 : Entre 2005 et 2008, les parts d écoute ont varié entre 1,4 % et 3,6 %. Dès la mise en ondes de sa nouvelle station CFLX-FM, la titulaire a vu augmenter ses parts d écoute à 4,3 %. 64. Depuis l adoption par la titulaire de ce format musical non spécialisé dans lequel une place est toujours accordée au jazz, les parts d écoute de CFLX-FM ont toujours été nettement supérieures à celles obtenues auparavant, atteignant jusqu à 10 % et permettant par moments à la station d être au premier rang des radios les plus écoutées dans le marché de Calgary. 65. Il appert à l ADISQ que cette conversion d une station musicale spécialisée en une station traditionnelle non spécialisée, mais tout de même engagée envers un genre musical plus pointu, sert très bien la diversité musicale dans le marché de Calgary tout en permettant à la station d atteindre des parts d écoute enviables. 11

12 c. CHMC-FM Edmonton 66. Rawlco Communications a exploité de décembre 2005 à octobre 2010 une radio jazz connue sous les lettres d appellation CHMC-FM. 67. Invoquant ses difficultés financières, la titulaire a demandé au CRTC au cours de l année 2010 de pouvoir abandonner sa formule spécialisée Jazz afin d exploiter une radio traditionnelle axée sur la musique de type «"middle of the road" qui associerait au "smooth jazz" des pièces musicales compatibles provenant d autres genres» Le CRTC a accepté cette demande de modification, tout en imposant une condition de licence stipulant que «la titulaire doit diffuser une émission de deux heures de musique spécialisée "smooth jazz" au cours de chaque semaine de radiodiffusion» À nouveau, l ADISQ constate que la demande de modification de licence qu a acceptée le CRTC consistait en une demande d assouplissement des règles auxquelles devait se soumettre la station, et non en une demande de changement radical. 70. CHMC-FM, devenue CIUP-FM, est demeurée une station musicale, de surcroît engagée envers le style qui lui avait au préalable permis d obtenir sa licence, soit le jazz. 71. D ailleurs, l ADISQ constate une fois de plus que cette modification a bien servi à la fois la titulaire et la diversité musicale puisque les parts d écoute de la station ont connu une augmentation importante dès que le changement a été effectué, comme le montre ce graphique : 13 Décision de radiodiffusion CRTC , 31 août Idem. 12

13 Graphique 2 : Parts d écoute de la station CHMC-FM, devenue CIUP-FM, de 2006 à 2011, marché d Edmonton ,9 3,4 3,3 4,1 2,8 3,7 3 2,8 2,7 2 Formule spécialisée jazz 2,1 1,7 2,9 1,9 1,6 Parts d'écoute 1,7 1,6 1,4 1,3 1,2 1,3 1,4 1,5 1,5 1,3 1,2 1,1 Formule musicale non spécialisée jazz 6,7 7,9 2,5 3,7 4,7 5,3 8,2 7,5 7,2 7,3 6,2 S S S S S S S S S S S S S S S au au au au au au au au au au au au au au au au au au au au au au au Sources : Données BBM et PPM, 2005 à Malgré des débuts qui s annonçaient encourageants, le graphique montre bien que les parts d écoute de la station ont connu une baisse au fil des ans, lorsque la station était exploitée sous une formule spécialisée jazz. 73. Par contre, à partir du moment où la station a renoncé à ce format afin de s ouvrir à un répertoire musical plus vaste tout en continuant d offrir une vitrine au jazz, les parts d écoute de la station ont connu une ascension importante. d. CJGV-FM Winnipeg 74. Le dernier cas cité par RNC Média pour appuyer sa demande est celui de la station CJGV-FM Winnipeg. 75. Le CRTC a effectivement permis à cette station de renoncer à sa formule spécialisée jazz en novembre Cependant, l ADISQ remarque que, à l instar de CIQX-FM Calgary et de CHMC-FM Hamilton, la titulaire de CJGV-FM s est engagée à maintenir un certain niveau de «smooth jazz» dans sa programmation. 77. Le Conseil a par ailleurs formulé une attente claire dans sa décision : «Le Conseil s attend à ce que le titulaire diffuse, au cours de chaque semaine de radiodiffusion, une émission spécialisée de deux heures consacrée entièrement au "smooth jazz". 15» 15 Décision de radiodiffusion CRTC , 30 novembre

14 78. Ce changement étant aussi survenu très récemment, il est trop tôt pour en mesurer l impact. 79. En somme, le constat est clair : une radio qui œuvrait dans le créneau jazz sans détenir de licence spécialisée a renoncé à ce genre musical pour se lancer dans un autre genre musical : le country. Les trois radios à qui le Conseil a permis d abandonner le format spécialisé jazz au cours des dernières années sont quant à elles demeurées musicales et se sont engagées à continuer de soutenir le jazz. Cet engagement a de surcroît été dans certains cas renforcé par le Conseil, qui a émis des conditions de licence ou des attentes. 6. Un projet peu défini 80. L ADISQ souhaite maintenant s attarder au projet déposé par la titulaire. 81. Dans son mémoire supplémentaire, RNC Média ne propose aucune description de la station parlée qu il aimerait dorénavant exploiter en remplacement de Planète-Jazz, si ce n est qu elle présenterait une parenté certaine avec la station CHOI-FM que la titulaire exploite déjà dans le marché de Québec. 82. Il faut se référer à son étude de marché pour en apprendre davantage. L information fournie demeure toutefois très sommaire. 83. Il s agirait d «une radio à contenu verbal orientée sur les hommes ans du 450. Elle couvrira autant l actualité locale, nationale qu internationale par la voix de commentaires, d analyses, de critiques que de débats. La politique, les sports et l industrie du spectacle seront également traités au même titre que l actualité générale» Le changement de format que propose RNC Média est majeur. 85. L ADISQ s étonne donc de constater que le Conseil doive se référer à une description aussi maigre du nouveau projet de la titulaire afin de rendre sa décision. 86. La requérante ne définit pas une seule émission projetée. De quoi serait réellement composée cette programmation? Y aurait-il des journalistes et animateurs d expérience au sein de cette équipe? Y aurait-il certaines plages horaires qui seraient consacrées à la musique et à l actualité culturelle et de quelle façon? 87. L étude s affaire à montrer que le marché de Montréal est prêt à recevoir une radio verbale. Encore faudrait-il pouvoir avoir une idée de ce dont il sera question sur les ondes pour pouvoir juger de l intérêt réel et de la viabilité de ce nouveau projet. 16 La conversion de Planète Jazz Montréal en radio parlée, DeepBlue, 18 novembre 2011, p

15 88. En somme, bien que l ADISQ soit sensible aux arguments financiers et de parts d écoute soulevés par RNC Média, elle considère que le projet proposé par cette dernière n est pas suffisamment étoffé pour que le CRTC lui accorde sa confiance. 7. Conclusion 89. Enfin, l ADISQ souhaite réitérer les craintes et interrogations que suscite pour elle ce projet. 90. Si le Conseil acceptait de modifier la licence de la station CKLX-FM afin qu elle devienne une station à prépondérance verbale, il s agirait d un changement majeur, voire radical, qui modifierait de façon importante le paysage radiophonique montréalais. 91. Un tel changement minerait incontestablement la diversité musicale du marché montréalais francophone, une diversité déjà très limitée en regard de la taille de ce marché. 92. De plus, l ADISQ espère que le Conseil tiendra compte du fait que les stations spécialisées en jazz qui ont abandonné leur format ailleurs au Canada sont demeurées musicales et se sont engagées à continuer à accorder une certaine place au jazz. 93. Il serait paradoxal que Montréal, ville de jazz s il en est, soit la première à abandonner complètement le genre. 94. Par ailleurs, l étude soumise par RNC Média affirme que les hommes jeunes, soit le public visé par la titulaire, sont «ouverts à différents formats de station. Leur écoute radio est diversifiée, composée de stations musicales et parlées au palmarès» L ADISQ est persuadée que RNC Média pourrait proposer à ce public ouvert un projet aussi plus ouvert, qui n évacuerait pas tout bonnement la musique. 96. L ADISQ remarque d ailleurs que RNC Média en a certainement la capacité, puisqu elle a lancé en 2008 la station CHXX-FM à Québec, une station qui diffuse de la musique appartenant à la catégorie rock alternatif. Il s agit assurément d un exemple positif de projet innovant et contribuant à la diversité musicale. 97. Pour toutes ces raisons, l ADISQ est d avis que le CRTC devrait refuser la demande de modification de licence de CJMF-FM et exiger de RNC Média qu elle continue de s engager à contribuer à la diversité musicale dans le paysage radiophonique montréalais francophone et plus particulièrement, qu elle continue d offrir au jazz une vitrine. 17 La conversion de Planète Jazz Montréal en radio parlée, DeepBlue, 18 novembre 2011, p

16 98. Le Conseil pourrait à cet égard, par exemple, inviter la titulaire à lui soumettre un nouveau projet de modification de licence qui lui permettrait de renoncer à son format spécialisé tout en préservant son format musical et qui contiendrait un certain type d engagement envers le jazz. L ADISQ serait certainement ouverte à l étude d un tel projet. 99. Un exemplaire de la présente intervention a été transmis à la requérante Toute correspondance peut être acheminée par courriel à l adresse mjdesrochers@adisq.com ou par télécopieur au Nous vous remercions de l'attention que vous porterez à cette intervention, veuillez recevoir, Monsieur le Secrétaire général, l'expression de nos sentiments distingués. La vice-présidente aux affaires publiques et directrice générale, Solange Drouin ***Fin du document*** 16