Jeunesse en région / Colloque de l ARF / Arcachon le 8 décembre 2011
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- Germain Martin
- il y a 8 ans
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1 Jeunesse en région / Colloque de l ARF / Arcachon le 8 décembre 2011 Intervention Jean-Claude Richez, coordonnateur de la mission observation : évaluation de l Injep. Mon propos sera double, c est ce qui m a été demandé: revenir sur les enjeux tels qu ils viennent d être décrits par mes collègues à travers les expériences dans le champ dans les régions, leurs pratiques et interpeller en amont le travail qui vous allez engager cet après-midi dans le cadre de vos ateliers. Je vais essayer de m y tenir. Je voudrais cependant auparavant récapituler ce qui vient de nous être dit savamment par mes collégues. Les quatre piliers d une politique de jeunesse Je retiendrais quatre axes de réflexion à partir desquelles nous pouvons examiner ce que les pratiques de régions peuvent avoir d innovantes aujourd hui : 1) Les modalités de socialisation des jeunes se sont profondément modifiées. Leur socialisation ne se fait plus de façon privilégiée dans le cadre d institutions mais à travers la munltiplication d expériences, Régis Cortesero parle même, reprenant des auteurs anglo-saxons d auto-socialisation. Le jeune est acteur de sa socialisation, ce qui appelle son autonomie. La responsabilité des pouvoirs publics est de sécuriser leurs parcours. Sécuriser le parcours des jeunes de la formation vers l emploi est l ojectif majeur affiché par le Conseil régional qui nous accueille. 2) Investir dans la jeunesse dans le sens proposé aujourd'hui rappelé par Francine Labadie. Investir dans la jeunesse est un pilier du développement, de l inclusion sociale et de la cohésion sociale fondée sur la connaissance. Cet investissement passe par la prise en compte de l éducation comme enjeu stratégique. L investissement dans le capital humain est une condition essentielle pour obtenir une croissance inclusive et soutenable avec des hauts niveaux de production (Francine Labadie). 3) Sortir des logiques politiques verticales, descendantes, hérarchisées pour développer des logiques de gouvernance à savoir de coordination et de coproduction des politiques de jeunesse dans le sens donné à ce mot par la commission générale de terminologie (22 avril 2009) qui rappelle que la gouvernance s apprécie surtout d après des critéres tels que la transparence, la participation et le partage des responsabilités. 4) Fonder ses politiques sur le principe d équité, d un traitement juste, d une répartition équitable basée sur la juste mesure. Les logiques d équité prennent en compte les inégalités d opportunités. Notons pour mémoire que ce principe entre en résonnance immédiate avec ce que l on a pu appeler avec le tryptique respect, égalité, solidarité que mettent en évidence la plupart des sondages autour des valeurs des jeunes. Le principe d équité s inscrit dans une logique d Etat social. Celui-ci cherche à prévenir et à fournir aux individus toutes les ressources les capabilités- qui leur permettent de faire leurs choix de vie et de construire leurs parcours (Francine Labadie).
2 Le rôle stratégique des régions Dans la plupart des grands pays d Europe les régions aujourd hui jouent un rôle central dans la conception et la mise en oeuvre des politiques de jeunesse. La compétence jeunesse reléve au Royaume-Uni des parlements régionaux ; dans le cadre de la dévolution, en Allemagne des Länder sur la base du principe de subsidiarité ; aux régions autonomes en Espagne ; des communautés flamandes et wallonnes en Belgique ; des régions en Italie La France est l un des rares pays qui a conservé, jusqu à il y a encore peu de temps, un régime très centralisé des politiques de jeunesse. Aujourd hui, les politiques nationales demeurent centralisées dans les champ de l éducation et de l emploi, les autres politiques relèvent de compétences partagées avec les collectivités territoriales. Il y a de ce point de vue une véritable exception française. Les Conseils régionaux ont cependant été amenés depuis quelques années à se saisir des questions de jeunesse parce qu elles sont au coeur des dynamiques territoriales dont elles ont la responsabilité. Comme le souligne le Conseil régional Midi Pyrénées: La trajectoire du lycée à l emploi regarde l essentiel des compétences de la région. Outre celle des lycées les questions de jeunesse font appel à au moins quatre des grandes compétences des régions telles qu elles sont arrêtées aujourd hui: celle du développement économique, celle de l aménagement du territoire, celle des transports et celle de la formation. A détailler cette liste ne manquent à la région que les compétences en matière de logement et d orientation pour que soit couvert effectivement l ensemble du parcours d un jeune du lycée à lemploi. Un certain nombre de régions d ailleurs n ont pas attendu pour prendre en compte les questions de logement des jeunes dont le Président Rousset vient de rappeller qu il pensait qu elle devrait être une compétence des régions. Aujourd hui la plupart des Conseils régionaux font de la jeunesse l une de leurs priorités. Celles-ci naturellement se déclinent de façon très différentes, conditionnées à des degrés divers par la prégnance -quant à leur conception- des modéles anciens, nombre de politiques régionales restent encore prisonniéres de politiques pensées d abord en terme de dispositifs. Elles sont aussi largement déterminées par le contexte social, culturel, historique de chaque région. Nous prendrons quatre exemples. Pour la Bretagne joue sans aucun doute une forte identité culturelle qui, de longue date, a généré des logiques de coopération entre acteurs. Rhône-Alpes est fortement porté par une forte culture industrielle très tournée vers l innovation qui nécessite une main d oeuvre hautement qualifiée et en permanence à niveau pour nombre de secteurs. Sur la Lorraine continue à peser le traumatisme de la fin des industries minières et sidérurgiques ou encore textile pour les vallées vosgiennes qui ont longtemps été la marque d une grande partie du pays générant une véritable culture de l insertion économique des jeunes dont le lorrain Bertrand Schwartz, inventeur des missions locales est le produit. Dans une région comme l Auvergne, très enclavée, les problématiques de mobilité et de contention du déclin démographique- apparaissent comme centrales. Le nouveau régime de socialisation Le nouveau régime de socialisation confére la responsabilité aux politiques de sécuriser le parcours d autonomie des jeunes. C est à cette condition que les initiatives pack autonomie des jeune font véritablement sens. Elles impliquent également qu elles prennent en compte le
3 jeunes sous tous ses aspects. Ainsi le Pack autonomie pour les jeunes du Conseil régional du Pays de Loire décline un panel relativement large comprenant accès au logement, à la culture, aux loisirs, au permis de conduire, à la première mutuelle. De même le Pack autonomie en Bourgogne décline mobilité (aide au permis de conduire) / logement / santé). Le Sas-orientation active pour l emploi des jeunes s inscrit également dans cette logique en visant un accompagnement renforcé et sécurisé vers l insertion professionnelle pour les ans comprenant un Pack autonomie (à hauteur de 300 euros) et une allocation d orientation (à hauteur de 1020 euros). Dans une logique d autonomie l accès au logement joue un rôle essentiel, il permet à la fois la dé-cohabitation avec les parents et est une des conditions de la mobilité. Même si celle-ci n est pas de la compétence des régions nombre d entre-eux ont pris à bras le corps cette question du logement jeune. Le nouveau régime de socialisation implique que l on prenne en compte le jeune comme capable, comme acteur ce qui donne sens aux politiques de participation. La plupart des régions ont dans un premier temps, pour certaine déjà depuis plusieurs mandatures des Conseils régionaux de jeunes. Ils n ont parfois pas répondu aux attentes le plus souvent pour avoir oublié que la démocratie participative dont relévent les Conseils de jeune, ne se met en oeuvre de façon spontanée et que tout autant que la démocratie représentative elle a besoin d être outillée, dotée d un appareil technique. Le développement de politiques de participation ne sauraient être par ailleurs réduite aux Conseils même si elles en sont pour nous une forme par excellence. Dans le prolongement d expériences de Conseil de jeune parallélement ou de façon alternative des régions se sont engagées dans des expériences de participation autrement comme les Forum jeunes en Rhône-Alpes, la Conférence régionale de la jeunesse en région Centre ou encore un processus complexe de consultaion autour du pack autonomie en Pays de Loire. Une politique de partcipation passe nécessairement, et c est quelque part ce qui en assoie la légitimité, par la multiplication dans toutes les institutions d espace de participation des jeunes. De même que le Conseil régional de Poitou Charente impose en quelque sorte une clause emploi jeunesse dans Investir dans la jeunesse et dans l éducation Plusieurs régions se sont engagés, au delà des politiques de dispositifs, dans l élaboration de véritables plans d investissement dans la jeunesse. Nous retiendrons ici deux exemples: le Pacte pour l emploi des jeunes en Poitou-Charentes, le Plan régional pour la jeunesse en Bourgogne. Le Pacte pour l emploi des jeunes en Poitou-Charentes s organise autour de quatre axes: l emploi, la formation, l apprentissage et le service civique: - Emploi, pas d aide publique de la région sans contrepartie en terme d emplois qui introduit par là une sorte de clause jeunesse - Formation qui se décline en engagements première chance, ouvertures de places supplémentaires en formation professionnelle - Apprentissage, objectif chiffré de 2000 apprentis supplémentaires d ici 2014, 3000 ayant été ouverts depuis 2005
4 - service civique, aide à la mobilité, prime de civisme et inscrption dur le pass formation régional Le Plan régional pour la jeunesse s organise autour de quatre volets: l orientation, la formation, l emploi et le logement. A travers ce plan La région poursuit un double objectif: soutenir le développement de tous les jeunes dans les domaines fondamentaux de l orientation, de la formation, de l emploi, du logement; ouvrir les politiques régionales aux jeunes les plus fragiles, tant dans le secteur rural, qu urbain. Le Limousin avec sa Charte d engagement en faveur de la jeunesse adoptée en 2010, le Conseil régional de Bretagne avec la Charte d engagement pour les jeunes (2011), l Alsace avec le Projet régional pour la jeunesse d Alsace (2011) sont engagés dans des démarches similaires d une approche élargie et globalisée des questions de jeunesse prenant également en compte aussi bien en compte les questions d emploi, d insertion, de formation. Il est dommage qu elles ne soient le plus souvent pas articulées fortement avec les questions de mobilté et surtout d éducation. Celle-ci reste le plus souvent cantonnée à des approches essentiellement scolaires et de formation initiale. De ce point de vue la région innove fortement en mettant en inscrivant à l agenda politique la question de la formation et de l éducation tout au long de la vie en créant une viceprésidence qui lui est tout spécialement dédiée, en s engageant dans la mise en place d un service régional de la formation avec comme objectif le développement prsonnel et collectif. Substituer aux logiques de gouvernement des logiques de gouvernance Nous retiendrons ici deux expériences qui s inscrivent tout à fait dans une logique de bonne gouvernance : LOR Jeune, l observatoire lorrain de la jeunesse, le B15 jeunesse du Conseil régional de Bretagne et l Agence régionale jeunesse en Alsace LOR Jeune se définit comme un laboratoire d idées, un lieu d observation régional et un réseau d acteurs (...) outil d aide à la décision et de prospective au service de la région, de ses partenaires et de tous les jeunes lorrains. Le laboratoire n est pas seulement comme collecteur de données statistiques mais comme un véritable espace de mutualisation entre l ensemble des acteurs, outil d intelligence collective au service de l ensemble des acteurs. D autres régions se sont également engagés dans cette voie, notamment la région Languedoc- Rousillon. Elle est aussi en discussion d autres régions. Ce type d initiative ne prend cependant tout son sens que si il est effectivement conçu comme outil de mise en commun et de coproduction entre l ensemble des acteurs jeunesse du territoire. Le B 15 jeunesse (B pour Bretagne), créé en 2010, rassemble autour de la table le Conseil régional, les quatre départements bretons et dix agglomérations. Il vient prendre place dans une forte dynamique territoriale régionale s enracinant certes dans l histoire, mais fortement impulsé politiquement à partir de 2004 avec les Assises régionales des territoires et du Contrat pour la Bretagne. Il est conçu comme un Lieu de convergence et dans certains cas de coordination des politiques de jeunesse. Afin de mieux impulser une politique transversale jeunesse l Alsace a créé une Agence régionale jeunesse. L Agence réunit douze personnes en équipes-projet, des agents en
5 charge du programme jeunesse qui sont nommés dans les directions régionales et y restent rattachés (avec le projet régionalpour la jeunesse comme mission principale). Le projet est doté en propre d une enveloppe de 3M d euros, de budgets rattachés à chaque direction spécifique (global 9 M d euros) et de financements européens (PEJA)3. Le projet s articule autour de trois axes: les jeunes acteurs de leur devenir, l accès à la citoyenneté et le soutien des talents. Le Conseil régional Midi Pyrénées a de son côté mis l accent sur la coordination des politiques tant en interne qu en externe. Est confié au vice-président en charge de la jeunesse d assurer la coordination entre tous les vice-présidents concernés par les politiques de jeunesse mais aussi d assurer la coordination avec les partenaires extérieurs. C est une voie similaire qui est suivi par le Conseil régional de Picardie quand il se fixe pour objectif de fédérer l ensemble des compétences jeunesse dans la région pour une prise en charge des 0 / 25 ans et engage une vaste démarce de concertation transversale : La concertation est pilotée directement par le président de la région qui a constitué un comité de pilotage politique. La DGA chargée du pôle service à la population intervient comme directrice de projet et ont été organisés 9 ateliers autour des grands axes retenus avec 9 animateurs internes, nommés parmi les grandes directions et 9 animateurs externes pour ouvrir le champ de la concertation à tous les acteurs du territoire: associations,communes, conseils régionaux.... Nous avons souligné que la transparence est un principe constitutif de la gouvernance. Elle appelle notamment l explicitation des objectifs des politiques mise en oeuvre et la mise en débat. Dans ce sens il est essentiel que l ensemble de la politique de jeunesse fasse l objet d un document de référence et qu il soit débattu tant par l éxécutif que par l assemblée délibérante. C est ce qu a fait le Conseil régional du Limousn en 2010 avec sa Charte d engagement en faveur de la jeunesse en 2010 et le Conseil régional de Bretagne avec la Charte d engagement pour la jeunesse en Quatre questions pour une grille de travail En conclusion je voudrais proposer quatre questions pour les ateliers de cet après-midi qui de façon plus large peuvent servir de grille de lectures des politiques de jeunesse en région. 1) En quoi et comment ma politique de jeunesse prend t-elle en compte le nouveau régime de socialisation des jeunes, fait place et prend en compte leurs initiatives, encourage leur participation, favorise leur autonomie, sécurise leurs parcours? 2) En quoi et comment ma politique de jeunesse prend t-elle en charge de façon globale, articulée et fonctionelle l ensemble du parcours du jeune du lycée à l emploi sous tous ses aspects, investi effectivement dans l éducation dans sa dimension formelle mais aussi non formelle et informelle, favorise les allers retour entre l emploi et l école dans une logique d éducation tot au long de la vie, la prise en compte des savoirs et compétences développées hors du cadre scolaire? 3) En quoi et comment ma politique de jeunesse s inscrit dans une logique de coopération et de de coproduction entre l ensemble des acteurs, différents échelons des collectivités territoriales mais aussi les associations, les entreprises, les jeunes la société civile- mais aussi l Etat et met en oeuvre pas seulement des critéres d organisation et d efficience mais aussi et
6 surtout de transparence, de participation et de responsabilité? 4) En quoi et comment ma politique de jeunesse met-elle en oeuvre le principe d équité, estelle juste? Quelques éléments en conclusion A partir des pratiques dans lesquelles sont engagées les différentes régions et différentes prises de positions de l Association des régions de France quelques pistes peuvent être dégagées pour avancer. Tout d abord, sans que cela remette en cause le cadre actuel, dans un souci de plus grande cohérence s impose la revendication d une compétence Orientation, formation et emploi ainsi ue celle du logement jeune qui est inséparable dans une logique d autonomie.. L intérêt est certes, à cadre institutionnel inchangé, de se donner les moyens de la maîtrise d un ensemble cohérent d enjeux qui convergent tous vers la construction de parcours professionnels mieux sécurisés. On peut dire qu il s agit d une première forme de transversalisation ( mais qui reste d essence sectorielle). Une telle approche appelle cependant un certain nombre de remarques. On passe d un monopole à l autre, celui hier exercé par l Etat à celui qui serait exercé par la région (translation vers le bas, certes au plus près des activités économiques et de la vie des personnes). Surtout on reste dans une logique gestionnaire ou bureaucratique avec des préoccupations organisationnelles avant tout et une approche descendante de l action publique, dont on a vu dans exposé de Francine Labadie qu elle n était pas pertinente au regard de l enjeu de la place des jeunes dans la société qui appelle une approche vraiment transversale et politique. Par ailleurs sortir de la logique de guichet comme le propose Philippe Meirieu suppose de sortir de la logique de dispositifs qui domine aujourd hui dans les régions, elle n est pas seulement le fait de l Etat. Positionner enfin les régions comme ensemblier : on ne peut qu être d accord si c est la première marche d une approche politique mais attention à ne pas développer des logiques hégémoniques de la région sur les autres collectivités. On doit rester dans la perspective «on est plus intelligent à plusieurs que tout seul et on met en cohérence nos stratégies dans une perspective d action collective où chacun dans la partition a une note à jouer».
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