Document préparatoire (Eléments de contexte, analyse du projet de charte, contributions des juridictions du ressort)

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1 Cour d appel de Lyon Conseil régional des notaires de la cour d appel de Lyon Projet de charte relative à la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux dans les procédures de divorce autres que par consentement mutuel Document préparatoire (Eléments de contexte, analyse du projet de charte, contributions des juridictions du ressort) 1. Eléments de contexte (Cadre législatif et pratiques procédurales) 1.1. Nomination du notaire au stade des mesures provisoires Après avoir entendu chacun des époux sur le principe de la rupture et constaté que le demandeur maintenait sa demande en divorce, le juge aux affaires familiales peut, en application de l article 1111 alinéa 2 du code de procédure civile, ordonner tout ou partie des mesures provisoires prévues notamment à l article 255 du code civil. Ainsi, il peut, au stade de la tentative de conciliation, désigner un notaire : - soit en qualité de professionnel qualifié en vue de dresser un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux (art ) - soit en vue d élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager (art ). Ultérieurement, après introduction de l instance en divorce, le juge aux affaires familiales peut aussi, en sa qualité de juge de la mise en état (art al.1 cpc), modifier ou compléter, conformément à l article 1118 du code de procédure civile, les mesures provisoires prises par le juge conciliateur et par voie de conséquence, en cas de survenance d un fait nouveau, par exemple en cas de critique par le défendeur de la proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux faite par le demandeur (lire J. Casey, J. Exshaw, L intervention du notaire à l occasion du divorce : aspects de procédure et de fond, Gaz. Pal. 6-7 nov. 2009), désigner à son tour un notaire sur l un de ces fondements Nomination sur le fondement de l article (professionnel qualifié) Mission Dresser un inventaire estimatif ou faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux (lire S. David L expertise judiciaire AJ famille novembre 2009, p. 430, qui rappelle qu il est communément admis que la mission confiée au professionnel qualifié est large et comprend l élaboration à la fois d un inventaire estimatif et de propositions de règlement des conséquences pécuniaires du divorce). Il s agit de dresser un inventaire certes estimatif mais complet des patrimoines des époux afin de permettre au juge de disposer des éléments d appréciation nécessaires pour statuer, dès le stade du divorce, tant sur les attributions préférentielles ou la liquidation partielle du régime matrimonial que sur la prestation compensatoire. CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 1

2 Statut Les modalités de désignation et de rémunération ainsi que le déroulement de sa mission sont soumis à l ensemble des règles applicables en matière d expertise (art cpc). Rémunération Le professionnel qualifié perçoit des honoraires fixés par le juge en fonction des diligences accomplies, du respect des délais impartis et de la qualité du travail fourni (art. 248 cpc). Ces honoraires lui seront définitivement acquis et ne s imputeront pas ultérieurement sur le coût d un éventuel acte tarifé Nomination sur le fondement de l article Mission Elaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager. Plus restreinte que celle dévolue au professionnel qualifié, la mission du notaire suppose aussi néanmoins un examen du patrimoine de chacun des époux et peut aboutir, en cas de conciliation, à l élaboration d un projet liquidatif que les parties soumettront à l homologation du juge du divorce. Statut A la différence du professionnel qualifié, le statut du notaire désigné sur le fondement de l article relève pour partie seulement de celui de l expert judiciaire dans la mesure où l article du code de procédure civile énumère limitativement les dispositions du même code auxquelles il sera soumis : - art. 233 à 237 : le notaire désigné doit accomplir personnellement sa mission, il peut être récusé pour les mêmes causes que les juges et doit accomplir sa mission avec conscience, objectivité et impartialité Lire S. David, op.cit., p.433, qui estime que dans la mesure où il ne doit exister aucun lien entre le notaire et les époux, le juge ne saurait désigner le notaire de l un et (ou) de l autre des conjoints. A noter qu à la différence du professionnel qualifié n a pas été visée l interdiction, prévue à l article 238, de porter des appréciations d ordre juridique. - art. 239 : il doit respecter les délais qui lui sont impartis - art. 245 : il peut à tout moment demander au juge de l entendre et ce dernier peut toujours l inviter à compléter, préciser ou expliquer ses constatations ou ses conclusions - art. 264 à 267 : plusieurs notaires peuvent être désignés si besoin. Dès le prononcé de la décision nommant l expert, copie est notifiée par tout moyen au notaire qui fait connaître sans délai au juge son acceptation, à charge de commencer ses opérations dès qu il aura été averti de la consignation de la provision mise à la charge des parties - art. 273 : le notaire doit avertir le juge de l avancement de ses opérations et des diligences qu il a accomplies - art. 275 : les parties doivent remettre sans délai au notaire les documents que celui-ci estime nécessaires à l accomplissement de sa mission, si besoin sous astreinte prononcée par le juge - art. 276 : le notaire doit faire mention, dans son avis, de la suite qu il aura donnée aux observations ou réclamations des parties - art. 278 à 280 : le notaire peut prendre l initiative de recueillir l avis d un technicien d une spécialité distincte de la sienne, se faire assister par la personne de son choix, demander au juge de proroger le délai dans lequel CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 2

3 il doit donner son avis en cas de difficultés ou d extension de sa mission, être autorisé à prélever un acompte sur la somme consignée en cas de complexité de l affaire et demander au juge le versement d une provision complémentaire. A noter que l article ne renvoie pas aux dispositions des articles 269 à 271 du code de procédure civile relatives à la consignation préalable en matière d expertise. Ce renvoi résulte de l article 5-1 alinéa 1 du décret n du 8 mars 1978 portant fixation du tarif des notaires, dans sa rédaction issue du décret n du 16 mai 2006, dont il ressort que le versement de la consignation et la perception de la rémunération du notaire désigné en application du 10 de l article 255 du code civil sont également soumis aux règles applicables en matière d expertise. Rémunération En application de l article 2 du décret du 16 mai 2006, le notaire chargé de la mission prévue au 10 de l article 255 du code civil perçoit un émolument (rubrique 63 E du tableau I du tarif des notaires) dégressif déterminé sur l assiette de la valeur brute totale des biens communs ou indivis à partager qui figurent dans le projet (barème actuellement fixé par le décret n du 21 mars 2007). Le rôle du juge se limite alors à vérifier la conformité de la demande de rémunération au tarif applicable. Si le notaire est ensuite chargé d établir l état liquidatif, cet émolument s imputera sur celui qu il percevra au titre de la rédaction de l acte de partage (art. 5-1 al. 2 du décret du 8 mars 1978 ci-dessus visé). A l inverse, si les époux font le choix d un autre notaire, l émolument versé au titre de l article sera perdu pour celui ou ceux qui l auront versé sans imputation possible avec l émolument dû au titre de l acte de partage Prononcé du divorce et instance en partage La phase séparant le prononcé du divorce de l introduction d une éventuelle instance en partage a été profondément modifiée ensuite de l entrée en vigueur, le 1 er janvier 2010, de la loi du 12 mai 2009 (loi n de simplification et de clarification du droit et d allégement des procédures) et de son décret d application du 17 décembre 2009 (décret n relatif à la procédure devant le juge aux affaires familiales en matière de régimes matrimoniaux et d indivisions) Droit et pratiques antérieures Le droit antérieur (article ancien du code civil issu de la loi du 26 mai 2004 relative au divorce) prévoyait en effet, dans le cas où les opérations de liquidation et de partage n avaient pas été achevées dans le délai d un an après que le jugement de divorce eut acquis force de chose jugée: - la transmission par le notaire au tribunal d un procès-verbal de difficultés reprenant les déclarations respectives des parties - la possibilité pour le tribunal d accorder, au vu de celui-ci, un délai supplémentaire d une durée maximale de six mois (délais dépourvus de sanction). Il prévoyait encore, dans l hypothèse où, à l expiration de ce délai, les opérations n étaient toujours pas achevées, que : - le notaire en informait le tribunal - le notaire établissait, si les changements intervenus le rendaient nécessaire, un nouveau procès-verbal - le tribunal statuait enfin sur les contestations subsistant entre les parties et renvoyait ces dernières devant le notaire afin d établir l état liquidatif. Alors que le jugement ayant prononcé le divorce aurait dû entraîner le dessaisissement de la juridiction, la pratique y avait ajouté par analogie la faculté, prévue à l article 1364 du code de procédure civile en matière de partage lorsque la complexité de l affaire le justifie, de désigner dans la décision même du divorce un CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 3

4 notaire pour procéder aux opérations de partage (désignation d un notaire en particulier ou, plus généralement, désignation du président de la chambre des notaires avec faculté de délégation) et de commettre un juge pour surveiller ses opérations. Inconvénients : - pareille désignation ne pouvait être assimilée à une mesure d instruction dès lors que, le juge ayant vidé sa saisine, l instance se trouvait éteinte (le juge qui prononce le divorce se borne, aux termes de l article 267 du code civil, à ordonner la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux) - aucun texte n attribuait compétence au juge commis pour statuer sur une éventuelle contestation (seule était prévue par l article la transmission au tribunal d un procèsverbal de difficultés), ne déterminait la procédure à suivre devant celui-ci et ne prévoyait de recours contre ses décisions (lire C. Roth, Du jugement de divorce à l introduction de l instance en partage: clarifications sur un entre-deux parajudiciaire, AJ famille avril 2010, 154). La pratique généralement suivie par les tribunaux aboutissait enfin à considérer que le procès-verbal de difficultés dressé par le notaire valait saisine du tribunal sans qu il fut nécessaire de délivrer une assignation en partage (lire C. Roth, op.cit., qui assimile ce procédé à une saisine d office). S en suivait une convocation des parties à comparaître en personne devant le juge aux fins de conciliation Droit actuel L article nouveau du code civil, issu de la réforme du 12 mai 2009 ayant attribué compétence au juge aux affaires familiales pour connaître notamment de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux après leur divorce lorsque cette liquidation n aura pu être opérée conventionnellement dans le cadre de la séparation (art. L du code de l organisation judiciaire), dispose désormais que les opérations de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux des époux se déroulent suivant les règles fixées par le code de procédure civile. Extraits du rapport n 209 déposé le 11 février 2009 au Sénat par Monsieur Bernard Saugey, au nom de la commission des lois Le 2 modifie l'article afin de laisser au code de procédure civile le soin de fixer les règles suivant lesquelles les opérations de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux des époux se déroulent. En effet, et comme l'a observé le rapport sur la répartition des contentieux, cet article ne contient que des dispositions de procédure, difficiles à articuler avec les articles 1359 et suivants du code de procédure civile relatifs au partage judiciaire et auxquels renvoie l'article du même code pour le partage des intérêts patrimoniaux des époux. A titre d'illustration, les juges, les avocats et les notaires ne parviennent pas à déterminer selon quel mode le tribunal est saisi : assignation ou procès-verbal de difficulté du notaire. La rédaction de l'article du code civil pourrait laisser entendre que le procès-verbal de difficulté du notaire saisit le tribunal. Or ce n'est pas souhaitable. L'expérience montre également que certains juges aux affaires familiales, après avoir prononcé le divorce effectuent des actes relatifs à la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux en dehors de toute saisine et alors qu'à ce jour seul le tribunal de grande instance est compétent pour connaître de la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux. Bref, une clarification s'impose et il paraît souhaitable d'unifier les règles de procédure applicables à la liquidation et aux partages des indivisions qui peuvent être renvoyées au code de procédure civile qui relève du pouvoir réglementaire Page 4

5 Ainsi l article nouveau du code de procédure civile, issu du décret du 17 décembre 2009, rend applicable au partage des intérêts patrimoniaux des époux (sous réserve des dispositions de l article 267 du code civil concernant la possibilité pour le juge aux affaires familiales de statuer dès le prononcé du divorce - voir infra n ) l ensemble des dispositions du décret du décret du 23 décembre 2006 relatif à la procédure en matière successorale, à savoir notamment : - demande présentée par assignation devant comporter, à peine d irrecevabilité, un descriptif sommaire du patrimoine à partager, les intentions du demandeur quant à la répartition des biens et l exposé des diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable (art cpc) - possibilité pour le juge, dans les situations les plus simples, d ordonner le partage et de désigner un notaire chargé de dresser l acte le constatant, d ordonner aussi la vente par licitation (art cpc) et de désigner un expert pour procéder à l estimation des biens ou proposer la composition des lots à répartir (art cpc) (circuit court) - possibilité, en cas de complexité des opérations, de désigner un notaire pour procéder au partage et de commettre un juge pour surveiller celui-ci (art cpc), à charge alors pour le notaire de dresser un état liquidatif dans un délai d un an à compter de sa désignation (sauf suspension ou prorogation du délai - art à 1370 cpc), avec faculté notamment de s adjoindre un expert (art. 1365) et de demander au juge commis de convoquer les parties en sa présence pour tenter une conciliation (art cpc) : ** en cas de partage amiable, le notaire en informe le juge qui constate la clôture de la procédure (art cpc) ** en cas de désaccord des copartageants sur le projet d état liquidatif dressé par le notaire, ce dernier transmet un procès-verbal reprenant le projet et les dires des parties au juge commis qui, les parties non représentées ayant été invitées par le greffe à constituer avocat, peut tenter une conciliation avant de faire rapport sur les points de désaccord subsistant et de statuer (art cpc) (circuit long) (Pour une étude du champ d application et des modalités de mise en oeuvre des deux types de circuits, lire E. Buat-Ménard Le partage du régime matrimonial devant le juge aux affaires familiales : état des lieux au lendemain d une réforme AJ famille avril 2010 p. 157, spéc. p. 161 et 162; P-J. Claux, Le règlement du régime matrimonial par le notaire désigné à la suite d une demande en justice AJ famille mars 2008, p.104 ) Enfin l article nouveau du même code dispose que les demandes obéissent aux règles de la procédure en matière contentieuse applicable devant le tribunal de grande instance et ajoute que les débats (sauf décision contraire du juge en application de l article 435 du code de procédure civile) ainsi que le prononcé de la décision sont publics. En conclusion : - l instance en divorce et l instance en partage judiciaire sont des instances distinctes - le juge du divorce ne peut plus désormais désigner un notaire pour procéder à la liquidation et au partage du régime matrimonial, ni commettre un juge pour suivre ces opérations - à la différence du notaire désigné dans le cadre des mesures provisoires ou dans celui du partage judiciaire, le notaire choisi par les époux durant la phase séparant le prononcé du divorce de l introduction de l instance en partage n a pas pour interlocuteur le juge du divorce (qui a vidé sa saisine) - en cas de carence de l un des époux aux opérations de liquidation, trois mois après une mise en demeure restée infructueuse, l autre époux peut demander au président du tribunal de grande instance ou son délégué la désignation d un notaire ou de toute autre personne qualifiée afin de le représenter et, le cas échéant, pour signer à sa place l acte liquidatif (art. 837 c.civ., 1379 et 1358 c.p.c.) - l introduction de l instance en partage nécessite une assignation (ou une requête conjointe) - préalablement à cette assignation, le procès-verbal de difficultés n est plus obligatoire et le délai d un an est supprimé - le ministère d avocat est obligatoire CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 5

6 - l affaire emprunte le circuit ordinaire de la mise en état, au besoin avec convocation des parties devant le juge de la mise en état aux fins de tentative de conciliation (C. Roth, op. cit.) Par exception, hypothèses dans lesquelles le juge du divorce est aussi juge du partage (lire à ce sujet : E. Buat-Ménard Le partage du régime matrimonial devant le juge aux affaires familiales : état des lieux au lendemain d une réforme op. cit., spéc. p. 160) Le nouvel article du code de procédure civile renvoie aux dispositions du même code régissant le partage des successions, sous réserve des dispositions des alinéas 2 et 3 de l article 267 du code civil aux termes desquelles le juge aux affaires familiales peut statuer dès le stade du jugement du divorce sur certaines demandes afférentes à la liquidation et au partage du régime matrimonial : - maintien en indivision - attribution préférentielle d un bien indivis - avance sur sa part de communauté ou de bien indivis voire statuer sur les désaccords persistants entre époux à la condition que le projet de liquidation du régime matrimonial à la condition expresse qu un notaire ait été désigné, au stade de la tentative de conciliation dans le cadre des mesures provisoires (art ), et que le projet de liquidation qu il a établi contienne des éléments d information suffisants. Une procédure de partage simplifié pourrait ainsi être conçue (lire E. Buat-Ménard, op. cit.) : 1/ requête en divorce 2/ tentative de conciliation 3/ ordonnance de non-conciliation avec désignation, au titre des mesures provisoires, d un notaire en vue d élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager 4/ assignation en divorce 5/ production d un projet de liquidation-partage du régime matrimonial établi par le notaire précisant les désaccords subsistant entre les parties 6/ jugement de divorce statuant sur ces désaccords et renvoyant les parties devant le notaire aux fins qu il établisse l acte constatant le partage. 2. Analyse du projet de charte Le projet de charte proposé par le conseil régional des notaires est la reproduction de la charte adoptée le 17 juin 2010 en Gironde (à laquelle avaient été annexés un guide pratique de la liquidation, des schémas procéduraux, des trames et des courriers type) (pour un commentaire, lire L. Gebler, Commentaire de la charte de la Gironde du 16 juin 2010 relative à la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux AJ famille septembre 2010, p.381) A titre liminaire, le projet prend acte de la volonté du législateur (loi du 26 mai 2004 sur le divorce) de : 1/ améliorer la connaissance, par le juge, de la situation patrimoniale des époux 2/ accélérer les opérations de liquidation du régime matrimonial. Le projet s articule autour de deux chapitres consacrés : - l un aux mesures d instruction ( désignation du notaire au titre des mesures provisoires) - désignation du notaire (art. 1 et 2) - mission du notaire (art. 3 et 4) - déroulement des opérations (art. 5 et 6) - rémunération du notaire (art. 7 et 8) - prononcé du divorce (art. 9) CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 6

7 - l autre aux opérations de liquidation (instance en partage postérieure au prononcé du divorce) - opérations de liquidation amiable (art 10 à 12) - opérations de liquidation judiciaire (art. 13) - régime transitoire (art. 14) Chapitre 1 - Les mesures d instruction Sont envisagées successivement l hypothèse où le notaire est désigné, sur le fondement de l article du code civil, en vue d élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial (articles 1,3,5,7,9 du projet de charte) et celle où le notaire est commis, sur le fondement de l article du même code, en tant que professionnel qualifié à l effet de dresser un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux (articles 2,4,8,9 du projet de charte). Dans l une et l autre hypothèses, ont été tirées les conséquences du décret n du 23 décembre 2006 relatif à la procédure en matière successorale, ayant assimilé en tout ou partie le notaire désigné à un expert judiciaire Désignation du notaire article 1 er Traite de la désignation d un notaire, à l issue de la tentative de conciliation, en vue d élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager (art c.civ). Tend à systématiser (dans deux hypothèses) l examen de la désignation du notaire, à charge pour le juge de l introduire dans le débat lorsque les parties n en ont pas pris l initiative. Deux situations évoquées : - lorsqu un accord est en vue - lorsqu au contraire apparaissent des difficultés liquidatives susceptibles d être tranchées par le juge du divorce. Traite du choix du notaire qui appartient au juge, après avoir recueilli l avis des époux et de leurs conseils. Désignation nominative, à l exclusion de toute société civile professionnelle. Traite de la notification par le greffe de l ONC au notaire commis (mais aucune précision quant aux modalités de cette notification - rappel : art. 267 cpc : Dès le prononcé de la décision nommant l expert, le secrétaire de la juridiction lui en notifie copie par tout moyen ) et de la nécessité pour le notaire d informer immédiatement le greffe en cas de refus de sa saisine (aucune précision quant aux motifs de refus). Aucune mention concernant l acceptation par le notaire de sa mission alors que l article 267 alinéa 2 du code de procédure civile (applicable au notaire désigné sur le fondement de l article du code civil en vertu de l article du code de procédure civile) fait obligation au notaire de faire connaître sans délai au juge son acceptation. article 2 Traite de la désignation d un notaire, en tant que professionnel qualifié, à l effet de dresser un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux (prestation compensatoire, contribution à l entretien des enfants, dommages et intérêts*) (art ) et /ou lorsque la séparation des époux ne justifie pas l élaboration d un projet d acte liquidatif sur le fondement de l article A la différence de l article 1 er, aucune précision quant à l initiative de cette désignation, le choix du notaire, la notification de la décision le désignant et son éventuel refus. CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 7

8 Mission du notaire article 3 Définit la mission impartie au notaire désigné pour élaborer un projet liquidatif (art ) A partir des éléments fournis par les époux et de ses propres investigations : - matérialisation des points d accord et de désaccord des époux - indication précise des points de réticence des époux, des renseignements faisant défaut, des points de discussion possibles - fournir au juge tous éléments lui permettant d avoir une vue globale de la situation patrimoniale et de statuer sur les différends subsistants - possibilité de présenter plusieurs projets distincts en cas de divergence sur des questions d ordre juridique article 4 Définit la mission impartie au notaire désigné, en tant que professionnel qualifié (art ), en dehors de toute liquidation du régime matrimonial, en vue de dresser un inventaire estimatif du patrimoine propre et commun des époux ou de faire des propositions quant au règlement de leurs intérêts pécuniaires. Fournir au juge, en proposant une solution, les éléments nécessaires pour lui permettre, le cas échéant, de statuer dans le jugement de divorce sur la prestation compensatoire ou les attributions préférentielles * Lire S. David, op. cit., p.431, qui considère qu il ne saurait être demandé au professionnel qualifié de faire une quelconque proposition au sujet de la contribution à l entretien des enfants et des dommages et intérêts s agissant de questions de droit qui relèvent de la seule compétence du magistrat de sorte que la mission à confier au notaire consisterait plus justement à faire des propositions quant à la prestation compensatoire (dont le principe même découlerait de la seule existence ou non, reposant sur des données de fait, d une disparité dans les conditions de vie respectives des époux) Déroulement des opérations article 5 Traite du déroulement des opérations en cas de désignation du notaire sur le fondement de l article (pour élaboration d un projet liquidatif) Rappel qu à la différence de l expert (et par voie de conséquence du professionnel qualifié), il peut porter des appréciations d ordre juridique. Respect du contradictoire : - rappel, dans le projet remis au juge, des conditions et modalités de convocation des époux et de leurs conseils - communication préalable du projet aux époux et à leurs avocats, réponse aux éventuels dires - investigations du notaire au besoin par consultation du fichier FICOBA ou en demandant au juge de délivrer toute injonction nécessaire. Délai à respecter : - délai de 6 mois avec possibilité de prorogation sur demande du notaire - sanction : remplacement du notaire Faculté pour le notaire de se faire assister de tout sapiteur de son choix et de demander au juge, à l instar des avocats des parties, la désignation d un expert en cas de difficultés exceptionnelles. CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 8

9 article 6 Traite du déroulement des opérations en cas de désignation du notaire en tant que professionnel qualifié (art ). Rappel que celui-ci est soumis à l ensemble des règles relatives à l expertise (art. 232 à 248, 264 à cpc), notamment : - mission définie précisément par le juge - fixation d un délai précis en vue du dépôt de son rapport avec possibilité de prorogation - fixation d une consignation (ou frais avancés par le Trésor au cas où l une ou l autre des parties bénéficie de l aide juridictionnelle) + renvoi à l article La rémunération du notaire article 7 En cas de désignation du notaire sur le fondement de l article : consignation* de euros à valoir sur les frais et émoluments du notaire à charge de l un des époux ou à partager par moitié entre eux (1 000 euros chacun), sauf bénéfice de l AJ à verser à la régie du TGI ou, à la demande conjointe des parties, sur un compte CARPA dans un délai d un mois à compter de l ordonnance (décision exécutoire par provision - art. 514 cpc) *alors que l article 1121 du code de procédure civile ne renvoie pas aux dispositions des articles 269 à 271 du même code relatifs à la consignation en matière d expertise, celles-ci sont applicables à l expert nommé en tant que personne qualifié par l effet de l article 5-1 alinéa 1 du décret n du 8 mars 1978 portant fixation du tarif des notaires, dans sa rédaction issue du décret n du 16 mai 2006, dont il ressort que le versement de la consignation et la perception de la rémunération du notaire désigné en application du 10 de l article 255 du code civil sont également soumis aux règles applicables en matière d expertise (lire supra n ) Est systématisé le fait pour le notaire de demander au juge une consignation complémentaire ( demande de provision de taxe complémentaire?) lorsqu il dispose des éléments lui permettant de calculer précisément le montant de ses frais et émoluments. article 8 En cas de désignation en tant que professionnel qualifié (art ) Honoraires libres taxés par le juge qui sont définitivement acquis au notaire et ne s imputent pas sur le coût d un éventuel acte tarifé ultérieur. Minimum de euros à consigner à la régie (montant supérieur lorsque le patrimoine des époux ou la complexité de l affaire le justifie) Rémunération exprimée en vacations horaires forfaitaires de 120 euros TTC auxquelles s ajoueront les débours justifiés. En fin de mission, demande de taxe présentée au juge, jointe au rapport Le prononcé du divorce article 9 Précision que le juge prononce le divorce après réception du projet d état liquidatif du notaire ou du rapport établi par ce dernier lorsqu il a été désigné en tant que professionnel qualifié. CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 9

10 2.2. Chapitre 2 - Les opérations de liquidation Les opérations de liquidation amiable Le projet de charte tire les conséquences des modifications intervenues depuis le 1 er janvier 2010 ensuite de l entrée en vigueur de la loi du 12 mai 2009 et de son décret d application du 17 décembre 2009 (lire supra n ). article 10 Rappel que le jugement de divorce qui ordonne la liquidation et le partage des biens dépendant du régime matrimonial * des époux renvoie la partie la plus diligente à saisir le notaire de son choix pour y procéder. * l article 267 du code civil évoque la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux Renvoi aux règles de déontologie notariale pour la désignation du notaire instrumentaire lorsque chaque partie souhaite être assistée de son notaire. Rappel aux parties que les émoluments versés au titre du projet de liquidation établi en application de l article du code civil ne peuvent s imputer sur ceux qui seront dus au titre de la liquidation définitive que s il s agit du même notaire (à défaut ils lui sont définitivement acquis). Aucune mention de l éventuelle défaillance de l un des ex-époux dans les opérations de liquidation et de la possibilité, peu utilisée en pratique, de lui faire désigner un représentant (supra n 1.2.2). article 11 Délai raisonnable d un an imparti au notaire pour procéder aux opérations de liquidation et de partage. A l issue de ce délai, le notaire établit un procès-verbal de difficultés ou un rapport exposant le déroulement des opérations, les obstacles rencontrés et les points de litige subsistants afin d être joint à l assignation (ou requête conjointe) en partage judiciaire. Rappel que l assignation doit aussi comporter, à peine d irrecevabilité, une description sommaire du patrimoine à partager, les intentions du demandeur quant à la répartition des biens et l exposé des diligences entreprises en vue de parvenir au partage amiable (art cpc) article 12 Rappel que, contrairement à la pratique ancienne, le jugement de divorce ne commet aucun juge pour surveiller les opérations de liquidation Les opérations de liquidation judiciaire article 13 Rappel que, conformément aux modification intervenues depuis le 1 er janvier 2010 (lire supra n ) : - la demande en partage judiciaire est présentée devant le juge aux affaires familiales par assignation ou requête conjointe - l affaire est instruite dans le cadre de la mise en état CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 10

11 - le jugement par lequel le juge statue sur les différends subsistants et renvoie les parties devant un notaire qu il désigne aux fins d établissement de l acte de partage entraîne son dessaisissement - en cas de complexité des opérations, ou lorsqu aucun projet liquidatif n a été établi en amont, le juge aux affaires familiales peut aussi, en sa qualité de juge de la mise en état (?), désigner un notaire avec mission d établir un projet liquidatif dans un délai maximal d un an (aucune mention des possibilités de suspension de ce délai prévues à l article 1369 du code de procédure civile ni des possibilités offertes au notaire lorsqu il rencontre une difficulté [désignation expert, représentant en cas d inertie d une partie, tentative de conciliation par le juge commis] ) et commettre un juge (lui-même?) afin de surveiller ces opérations. En cas d accord, le juge, après avoir été informé par le notaire de la signature de l acte liquidatif, constate l extinction de l instance(l article 1372 emploie l expression clôture de la procédure ) (+ faculté pour les parties de faire homologuer leur accord par le juge). En cas de désaccord, le juge commis établit un rapport recensant les points en litige (il n est pas mentionné que ce rapport est établi au vu d un procès-verbal reprenant les dires respectifs des parties et d un projet d état liquidatif transmis par le notaire - art cpc), les parties ne pouvant développer dans leurs conclusions ultérieures de nouvelles contestations (art.1374 cpc). Le jugement qui statue sur les points de désaccord (art.1375 al.1 cpc) renvoie les parties devant le notaire aux fins d établissement de l acte liquidatif (il n est pas mentionné la possibilité pour le juge d homologuer l état liquidatif - art al.2 cpc). Il a été prévu la possibilité, en cas de refus de l un des époux (ex-époux?) de signer l acte liquidatif, d assigner l autre devant le juge aux affaires familiales aux fins d homologation. Il n a pas été mentionné la possibilité pour le juge d ordonner, s il ya lieu, le tirage au sort des lots soit devant lui-même soit devant le notaire désigné (art al.3 et 1376 cpc). article 14 Rappel que, les dispositions issues de la loi du 12 mai 2009 et de son décret d application du 17 décembre 2009 étant applicables aux demandes en justice formées à compter du 1 er janvier 2010, les procédures en cours devant le tribunal de grande instance à cette date demeurent de sa compétence. A l inverse, les assignations en partage postérieures au 1 er janvier 2010 relèvent de la compétence exclusive du juge aux affaires familiales, même si le jugement de divorce a été prononcé antérieurement à cette date. Le projet de charte prévoit enfin l hypothèse où un jugement de divorce prononcé avant son entrée en vigueur aurait prévu, ainsi qu il était parfois pratiqué (supra n 1.2.1), la désignation d un notaire ou du président de la chambre départementale des notaires et commis un juge pour suivre les opérations de liquidations. Il est préconisé de procéder ainsi : - le notaire désigné poursuit ses opérations en s inscrivant dans le cadre de la procédure de liquidation mais sans recours possible au juge - le juge commis ne peut être saisi - en cas de difficulté (carence du notaire ou défaillance des parties), soit : * assignation en référé devant le président du TGI ou son délégué aux fins de désignation d un autre notaire ** assignation en référé devant le président du tribunal de grande ou son délégué aux fins de désignation d un représentant (en cas de carence d une partie) (alors que l article 1358 du code de procédure civile prévoit la saisine du président du TGI par simple requête) *** établissement d un PV de déclaration des parties valant PV de difficulté, puis assignation devant le juge aux affaires familiales aux fins de liquidation judiciaire (en justifiant de l accomplissement de démarches amiables préalables). CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 11

12 3. Contributions des juridictions 3.1. Cour d appel de Lyon (contribution du greffe) (14 avril 2011) - Sur la désignation du notaire au titre des mesures d instruction Pour le greffe, la désignation d un notaire sera suivie sans difficulté au même titre que toute mesure d instruction. Nécessité de veiller, en cas d admission d un époux au bénéfice de l aide juridictionnelle, à ce que la formule de condamnation aux dépens utilisée ne fasse pas obstacle au recouvrement par le Trésor public des frais avancés par l Etat au titre de cette aide (formule Dit que les dépens seront tirés en frais privilégiés du partage à proscrire). - Sur la désignation du notaire chargé de dresser l état liquidatif Ne pas ordonner, ainsi qu il a parfois été fait, le versement d une consignation dès lors qu il ne s agit pas d une mesure d instruction Tribunal de grande instance de Lyon (contribution du 25 mai 2011) Il est important que les avocats soient associés à la réflexion et deviennent partie à la charte afin d assurer sa mise en oeuvre. Le projet présenté mériterait d évoluer par rapport au texte adopté en Gironde dont il est la fidèle reproduction, afin de corriger certaines dispositions non compatibles avec les règles de procédure, notamment celles tenant à la rémunération forfaitaire des notaires. La constitution, sous l égide de la première présidence, d un groupe pluridisciplinaire en vue de l élaboration d un guide de bonnes pratiques ou d un vade mecum suscite l adhésion. Il est temps en effet d engager une réflexion de fond sur l application de la nouvelle loi. Les magistrats doivent acquérir une culture des actes préparatoires, les avocats doivent se former à la nouvelle pratique du partage amiable et les notaires doivent s adapter à leurs nouvelles missions Tribunal de grande instance de Saint-Etienne (contribution du 1 er juin 2011) - Au stade de la tentative de conciliation La faculté pour le juge aux affaires familiales de désigner un notaire au titre des mesures provisoires était peu utilisée à Saint-Etienne et Montbrison tant sur le fondement de l article que sur celui de l article du code civil ou l était de manière informelle (sans mission précise et sans consignation)l Le notaire désigné était généralement un notaire choisi par les époux ou le représentant de la chambre départementale des notaires et rares étaient les désignations qui aboutissaient à un rapport ou un projet de liquidation. Depuis l entrée en vigueur de la loi du 12 mai 2009 ayant fait du juge aux affaires familiales le juge de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux, les magistrats stéphanois ont été sensibilisés aux nouveaux enjeux et à la nécessité d anticiper les opérations liquidatives lorsqu elles s annoncent complexes. A ce jour, la plupart des juges aux affaires familiales du TGI de Saint-Etienne estime que la désignation d un notaire ou d un personnel qualifié peut s avérer utile à la fois pour favoriser les partages amiables et recueillir les informations nécessaires sur le patrimoine des époux afin de statuer sur une demande de prestation compensatoire. Le projet de charte, qui coïncide avec les magistrats stéphanois de se rapprocher des notaires, est le bienvenu. Il n appelle pas d observation particulière et recueille globalement l agrément des juges. Il a notamment le CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 12

13 mérite de préciser les conditions d intervention du notaire désigné en application de l article 255 (9 et 10 ). Il serait néanmoins nécessaire qu une liste de notaires volontaires pour être désignés soit établie. Il serait aussi souhaitable, en cas de désaccord persistant entre les époux sur l évaluation d un bien ou d un droit, que le notaire désigné fasse apparaître clairement les éléments sur lesquels il s est fondé pour procéder à son évaluation. - Au stade du prononcé du divorce A défaut de règlement conventionnel par les époux, les juges aux affaires familiales de Saint-Etienne ordonnent la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux. Ils ont cessé de désigner le président de la chambre des notaires de la Loire, avec faculté de délégation, pour procéder à ces opérations. Il est observé que les demandes de maintien en indivision, d attribution préférentielle ou d avance sur part de communauté ou d indivision sont très rares Tribunal de grand instance de Bourg-en-Bresse (contribution du 31 mai 2011) Les magistrats du TGI de Bourg-en-Bresse ne partagent pas l interprétation faite par la circulaire de la direction des affaires civiles et du sceau du 16 juin 2010, reprise par le projet de charte, concernant l application de la réforme issue de la loi du 12 mai 2009 et du décret du 17 décembre Ils estiment notamment que le renvoi opéré par l article du code de procédure civile aux règles de la procédure contentieuse applicable devant le tribunal de grande instance ne signifie pas que le juge aux affaires familiales doit être saisi par assignation et moins encore aux fins de partage dès lors que celui-ci a déjà été ordonné par le jugement de divorce, lequel a autorité de la chose jugée. Ils interprètent ce renvoi comme étant un renvoi, par dérogation aux règles applicables généralement devant le JAF, à la procédure écrite et à la constitution obligatoire d avocat. Ils ajoutent qu aucun texte n interdit au juge du divorce de désigner un notaire en ordonnant le partage et que la modification intervenue dans la rédaction de l article ne saurait signifier la suppression du procèsverbal de difficultés ni sa transmission au juge commis. A l exception des articles 10 et suivants qui sont en contradiction avec la pratique en vigueur à Bourg-en-Bresse, le projet de charte n appelle pas de remarques particulières. La principale difficulté dans la mise en oeuvre de la réforme réside dans un transfert artificiel de ce contentieux, les magistrats qui avaient précédemment en charge ce contentieux l ayant conservé en prenant la qualité de juges aux affaires familiales, ces derniers étant en nombre insuffisant pour assumer de nouvelles attributions Tribunal de grand instance de Villefranche-sur-Saône (contribution du 10 juin 2011) La réforme, qui concerne un faible nombre de dossiers pas an, a pu être mise en oeuvre sans difficulté particulière. Ainsi, lorsque le greffe reçoit d un notaire un procès-verbal de difficultés alors qu aucune procédure de liquidation n est en cours, une copie en est adressée aux ex-époux, accompagnée d une lettre-type les informant que la poursuite de la procédure doit se faire par voie d assignation avec assistance obligatoire d un avocat. Le projet de charte qui permettra une pratique prévisible et uniformisée, appelle les observations suivantes: - article 1, sur la désignation du notaire, il serait opportun que chaque chambre départementale dresse une liste des notaires acceptant d être désignés CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 13

14 - article 13, il ne semble pas possible que le juge aux affaires familiales puisse, en tant que juge de la mise en état, désigner un notaire et commettre un juge, pareille faculté relevant uniquement du juge statuant au fond. - article 14, s agissant des actions en référé prévues ensuite de jugements de divorce prononcés avant l entrée en vigueur de la charte, un notaire ou un représentant d une partie défaillante peuvent-ils désormais être désignés en dehors de toute procédure en partage ouverte par une assignation au fond? Autres questions : - comment le représentant d un époux défaillant sera-t-il rémunéré? - sous quelle forme statue le juge commis lorsqu il se prononce en vertu de l article 1371 du code de procédure civile et ses décisions sont-elles susceptibles de recours? - un projet d état liquidatif établi par un notaire avant l assignation en partage peut-il servir à trancher les contestations des parties ou faut-il nommer un autre notaire dans le respect de la procédure prévue aux articles 1359 et suivants du code de procédure civile? - en cas de déménagement de l un des époux, la procédure de liquidation relève-t-elle de la compétence territoriale du juge ayant prononcé le divorce ou de celle du juge dans le ressort duquel l époux a établi son nouveau domicile? 3.6. Tribunal de grande instance de Roanne (contribution du 5 juin 2011) Les magistrats roannais se heurtent parfois : - à la méconnaissance par certains avocats et notaires des règles permettant de déterminer la loi applicable, - à la méconnaissance par nombre d'avocats des règles de compétence et de procédure applicables, - au retard ou à l'absence de consignation par les parties lorsque le notaire est désigné en application de l'article du code civil, - à l'absence de diligences du notaire saisi (compte-rendu, projet d'état liquidatif), pouvant être due à son manque d implication a fortiori lorsqu il a été désigné contre son gré. Plus généralement, il leur semble indispensable, afin que l'esprit et la lettre des textes nouveaux reçoivent une application concrète, que chacun des professionnels concernés, y compris des représentants des avocats, participe à la rédaction et à la mise en oeuvre de bonnes pratiques de nature à enrichir et accélérer les opérations de liquidation. La charte proposée est à cet égard une excellente source de réflexion. Ils considèrent que les difficultés qui peuvent se présenter dans le cadre des liquidations contentieuses proviennent pour une large part d un manque d anticipation à tous les stades de la procédure. Ainsi, il conviendrait de proscrire certaine pratiques et notamment : - ne plus accepter, dans le cadre de l audience sur tentative de conciliation, au motif de l'accord des parties, de faire droit à leurs demandes tendant à voir désigner le notaire de chacun des époux au titre de l'article , cette double désignation démontrant à elle seule l'existence d'un contentieux, au risque avéré qu'aucun projet d'état liquidatif ne soit déposé par les notaires dont s agit qui n'auront guère conscience d'avoir été désignés par la juridiction et à qui ils n'estimeront n'avoir aucun compte à rendre, - ne pas renoncer à évoquer avec les parties, dans le cadre de l'audience sur tentative de conciliation, très concrètement et simplement, la façon dont chacun d'entre eux envisage le règlement de leurs intérêts patrimoniaux, au risque de ne pouvoir apprécier la nécessité de mesures d'investigations préalables notamment en l'application de l'article du code civil, quand bien même aucune demande ne serait formulée a priori par les parties, - ne plus accepter de statuer, en application de l article 267 du code civil, sur les désaccords persistants entre les parties alors même que le projet de liquidation du régime matrimonial n a pas été établi par un notaire désigné sur le fondement du 10 de l article 255 du même code CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 14

15 - ne plus accepter, au motif de conclusions concordantes, dans le cadre du prononcé du divorce, de poursuivre les pratiques anciennes consistant à «commettre» tel ou tel notaire pour les opérations de liquidation amiable, ce qui ne peut que créer, dans l'esprit du justiciable, une confusion, celui-ci étant en droit de penser que le notaire agit sur mandat judiciaire. Les magistrats du TGI de Roanne concluent que pour bien partager, il faut bien liquider et qu une bonne liquidation commence dès l'engagement de la procédure de divorce. L objectif du législateur d'accélérer les opérations contentieuses de liquidation et de partage par une implication de l ensemble des acteurs ne pourra être atteint que si le juge du divorce démontre aux parties et à leurs conseils sa détermination à y concourir activement notamment par un abandon des anciennes pratiques et une volonté de s'approprier les pouvoirs que la loi lui a conférés. Rédaction document préparatoire : Jean-Michel Etcheverry, secrétaire général première présidence cour d appel de Lyon CA Lyon Première présidence Liquidation des intérêts patrimoniaux des époux document préparatoire juin 2011 Page 15