Doc.97/CWEDD 791 Liège, le 4 décembre 1997
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- Marie-Paule Clément
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1 Doc.97/CWEDD 791 Liège, le 4 décembre 1997 Avis relatif à l'analyse coûts-bénéfices et à l'étude des conséquences prévisibles sur l'environnement, réalisées dans le cadre du Plan Wallon des Déchets Suite à la demande de M. le Ministre, le Conseil Wallon de l'environnement pour le Développement Durable a adopté le présent avis lors de son assemblée plénière du 4 décembre Le C.W.E.D.D. tient à rappeler préalablement qu'il a remis, en date du 23 octobre 1997, un avis sur le Projet de Plan Wallon des Déchets - Horizon 2010 (Doc.97/CWEDD 679). Cet avis prévoit notamment que "en ce qui concerne les documents soumis à enquête publique, le C.W.E.D.D. regrette que l'analyse "coûts-bénéfices" et l'analyse des impacts environnementaux du Plan, accompagnés d'un résumé non-technique, n'aient pas été également soumis à l'avis de la population. Sans ces documents d'évaluation du Plan, il est en effet fort difficile de se prononcer sur les options proposées. Le C.W.E.D.D. estime que l'autorité aurait pu prolonger la consultation de quelques semaines afin que ces documents puissent alimenter la réflexion de la population et des instances consultées." Le C.W.E.D.D. est conscient des conditions dans lesquelles les bureaux d'études S.D.I. et S.G.I. Ingienerie ont dû travailler, notamment au niveau des délais impartis. Un certain nombre de critiques énoncées ci-dessous ne peuvent dès lors leur être imputables.
2 2 I. En ce qui concerne l'analyse coûts-bénéfices 1. Méthodologie adoptée Le C.W.E.D.D. tient à souligner l'intérêt essentiel d'une démarche d'analyse coûtsbénéfices. La méthode d'analyse coûts-bénéfices, quoique relativement jeune, est un bel instrument théorique parce qu'elle aide le décideur, autant que l'analyste, à se placer du point de vue de la collectivité. Elle tend à mettre autant de rationalité dans les décisions d'investissement public que dans celles du secteur privé, mais en retenant théoriquement tous les effets de la décision sur tous les groupes concernés. C'est dans le mot "théoriquement" que le bât blesse, parce que ces études se cantonnent trop souvent au seul aspect économique du problème. Or, l'économiste doit comprendre que l'analyse d'un projet fait entrer en jeu bien d'autres disciplines en dehors de l'économique, sans quoi le travail risque de rester une construction de l'esprit, intéressante certes, mais peu susceptible de servir de guide à la réalisation de projets réussis 1. Ainsi, le fait que S.D.I. n'ait pas pris en compte les coûts économiques des effets sur l'environnement est compréhensible étant donné que cette question ne lui était pas posée et qu'il ne disposait pas de moyens et délais suffisants pour le faire. Il est par ailleurs exact que l'évaluation des coûts externes est bien difficile. Mais, au-delà de cet argument, le C.W.E.D.D. ne peut se satisfaire de ce que seuls les "coûts directs de mise en œuvre" et "coûts de gestion évités" soient pris en compte (point 2.1.). Quant aux arguments scientifiques donnés par S.D.I. au point 1.3., ils ne peuvent être pris comme prétexte pour justifier des analyses cloisonnées où les coûts économiques sont toujours séparés des coûts sociaux et environnementaux 2. Même si les résultats sont sujets à controverses 3, un processus interrogeant des ménages sur la valeur qu'ils accordent à la sauvegarde d'un actif naturel, ou à sa dégradation par incinérateur ou C.E.T., et mettant ces valeurs dites abstraites explicitement en balance avec des coûts concrets dans le cadre de l'évaluation globale de plusieurs options différentes, est un processus important pour éclairer les débats et choix de société. Bref, on peut comprendre que S.D.I. n'ait pas évalué les avantages et coûts externes (environnementaux et sociaux) dans les conditions où il était placé mais il faut regretter qu'un consultant ou une équipe de recherche n'aient pas été placés dans des conditions telles qu'ils puissent le faire. 1 L'analyse Coûts-Avantages, défis et controverses, sous la direction de Gilles Gauthier et Marie Thibaut, Economica, 49, rue Héricart, Paris, Une telle approche segmentée entretient les hiérarchies classiques entre les premiers coûts, dits objectifs, concrets ou réels et les seconds, dits subjectifs, abstraits ou émotionnels. Or les coûts abstraits, qui ne sont qu'imaginables, et non payables, aujourd'hui, sont les dettes environnementales de demain, qui devront bien être payées. 3 Quant aux besoins des générations futures, on peut répondre à ce qu'en dit S.D.I. (à la fin du point 1) que ce n'est pas non plus en renonçant à les évaluer qu'on y répondra le mieux.
3 3 Si nous avons bien compris, les conventions méthodologiques de S.D.I. (point 3, p. 5) admettent des coûts de référence globaux pour les déchets ménagers (les mêmes pour toutes les sous-régions). Or les différentes sous-régions partent de situations très différentes les unes des autres et il aurait été intéressant d'en tenir compte avec des coûts de références adéquats puisque ces données existent. Par ailleurs, la partie de l'étude relative à la prévention (point 1.1.) montre le grand intérêt de la démarche coûts-bénéfices puisqu'elle note qu' "une prévention bien pensée qui anticipe judicieusement les normes ou règlements futurs est la solution économiquement la plus avantageuse pour gérer l'environnement". Ainsi, la méthodologie adoptée permet de ne pas fonder la nécessité impérative de renforcer la prévention et la sensibilisation seulement en terme de protection de l'environnement, mais également sur une base économique. 2. Fiabilité des données Les observations suivantes doivent être faites en matière de données: - la lecture critique et les débats sont rendus difficiles, par des sources et des hypothèses de calcul imprécises; - le rapport contient des données manifestement sous-évaluées (ex: tableau 1.2.a collecte des PMC: FB/tonne); - l'absence de données pour beaucoup de flux déchets (reconnue et déplorée par les auteurs de l'étude) affaiblit la portée des conclusions possibles; - à côté de ces lacunes réelles, de nombreuses données économiques rassemblées notamment dans le rapport Cadet pour les déchets ménagers existent et n'ont malheureusement pu être utilisées. 3. Financement Comme l'a dit le C.W.E.D.D. dans son avis précédent sur le Plan, il manque toujours une vision claire des investissements requis pour la mise en œuvre du Plan. Ce n'est pas le rôle d'une évaluation coût-bénéfice de nous donner ces indications mais c'est une information au moins aussi indispensable pour éclairer les décisions à prendre: si nous connaissions ces montants nous comprendrions mieux les enjeux financiers importants de cette réflexion. Sans indiquer les montants à investir, le rapport anticipe d'ailleurs largement sur les décisions à prendre, notamment en matière de gestion de certains déchets (encombrants, p. 16). D'un point de vue financier, le chapitre de l'étude relatif à la taxation (pp. 27, 28, 29, 30), est important et montre que le Plan manque singulièrement de pédagogie et de clarté et n'aide pas le public à comprendre les alternatives devant lesquelles il est placé quant au recours aux instruments économiques ou financiers, à leur efficacité, enjeux de pouvoir et effets respectifs.
4 4 4. Création d'emplois C'est peut-être au niveau de la création d'emplois que se trouve la plus belle occasion manquée par le Plan. Dans la vision globale et stratégique demandée par notre avis précédent, la création d'emploi grâce à la politique de l'environnement est évidemment une question centrale pour mobiliser le soutien et l'intérêt pour ce Plan, au-delà de ses aspects liés à l'environnement. Or la création de emplois annoncée par le rapport est un chiffre qui ne rend pas justice au potentiel de la démarche planificatrice entreprise par la Région et n'attire pas suffisamment l'attention sur l'aspect stratégique de toutes ces décisions pour le destin des wallons. S.D.I. souligne bien qu'une telle estimation n'est pas exhaustive "faute d'avancement suffisant du projet". Il réclame bien une politique volontariste d'avant-garde très incitative et orientée vers la recherche-actions et le développement. Une partie de cette recherche consisterait, à l'avenir, à faire des études sur de nouveaux produits, procédés, marchés et filières, ainsi que sur la question essentielle du lien entre défense de l'environnement et création d'emplois durables. 5. Desiderata du C.W.E.D.D. Le C.W.E.D.D. rappelle l'intérêt de la démarche coûts-bénéfices. Cette étude ne peut cependant être considérée que comme un premier pas dans la direction d'une analyse économique plus large, qui implique des moyens et des délais plus importants. L'analyse coûts-bénéfices en elle-même mérite cependant un développement. En effet, la seule option investiguée est celle du projet de Plan Wallon des Déchets. Le C.W.E.D.D. estime qu'il aurait été intéressant d'évaluer les coûts et bénéfices globaux d'alternatives mettant plus l'accent sur la prévention. Le recours à une technique de scénarios prévisionnels aurait été utile pour présenter ces différentes options avec toutes leurs hypothèses et effets respectifs. Le C.W.E.D.D. demande que la démarche soit poursuivie, sur base d'un cahier des charges, à l'élaboration duquel il est prêt à contribuer. Ce cahier des charges devrait comporter notamment les éléments suivants: - prise en compte des analyses et des enquêtes menées auprès des différents acteurs, - examen des éléments macro-économiques et transfrontaliers, - étude approfondie en termes économiques, environnementaux et de création d'emplois, des alternatives, et particulièrement de la prévention. Enfin, le C.W.E.D.D. attire l'attention sur le manque de valeur pédagogique de cette étude, remarque qui est d'ailleurs valable pour l'ensemble des documents rédigés dans le cadre du projet de Plan Wallon des Déchets.
5 5 Il demande que dans la version qui sera soumise à l'approbation du Gouvernement wallon, le Plan des Déchets prévoit un mécanisme d'accompagnement et de recherche-action permettant le suivi et la réorientation périodique du Plan en fonction de la difficulté rencontrée dans sa mise en œuvre et des nouvelles alternatives pouvant apparaître. Le C.W.E.D.D. demande également que lors de cette approbation, un lien structurel soit expressément établi entre autres entre la planification dans le domaine des déchets et dans le domaine de la recherche - développement, pour favoriser les opportunités actuelles et futures relevées dans le projet de Plan au bénéfice de l'activité socio-économique en Wallonie. Ce Plan devra intégrer l'analyse coûts-bénéfices et une étude des incidences correcte. II. En ce qui concerne l'étude des conséquences prévisibles sur l'environnement Le C.W.E.D.D. estime qu'une étude des impacts sur l'environnement aurait du précéder l'analyse coûts-bénéfices. Il a relevé certaines contradictions dans l'étude, notamment en ce qui concerne l'estimation des quantités de déchets. Il constate également l'absence totale de prise en considération des alternatives, et note un certain nombre d'affirmations non étayées. La littérature existant à ce jour (notamment dans certaines études d'incidences réalisées en Région wallonne) est sensiblement plus précise que ce qui est dit dans l'étude; par exemple la comparaison des différents modes de gestion en terme de conséquences prévisibles sur l'environnement est à ce point floue, qu'à certains égards on aurait tendance à considérer, sur base de la lecture du document, que tous les modes de gestion sont comparables. Par ailleurs, la prévention n'est-elle pas aussi un mode de gestion? Elle n'est pas citée. Etant donné ce qui est dit ci-dessus, le C.W.E.D.D. a considéré qu'il était dans l'impossibilité de remettre un avis constructif sur cette étude. Il le regrette.
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