Prise en charge de la douleur des drains thoraciques chez l enfant après chirurgie
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- Nicole Clément
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1 Prise en charge de la douleur des drains thoraciques chez l enfant après chirurgie Thierry Moreaux*, Nathalie Duparc**, Agnès Pasturel**, Dr Laurence Teisseyre***, Dr Chantal Wood****, Anne Gaudelet***** *Puériculteur, IADE, **Puéricultrices, ***Médecin généraliste, ****PH, pédiatre, Unité d étude et de traitement de la douleur, *****Unité d épidémiologie clinique, Hôpital Robert Debré, Paris Les enfants porteurs de drain thoracique sont souvent insuffisamment soulagés en postopératoire ainsi qu au moment de l ablation du drain et les traitements antalgiques ne sont pas toujours adaptés, c est notre constatation en 2005 dans notre hôpital. C est pourquoi une enquête a été réalisée afin d évaluer nos pratiques et de mieux prendre en charge la douleur de ces enfants. Méthodologie Cette étude prospective, réalisée de février 2004 à octobre 2005, a inclus 40 enfants âgés de 4 à 11 ans (12 garçons et 28 filles) porteurs de drain thoracique. Vingt huit ont eu une chirurgie du rachis et 12 une chirurgie pulmonaire. Tous les enfants étaient en âge d évaluer leur douleur avec des échelles de la douleur : EVA, EN, échelle des visages. La douleur postopératoire de fond et lors des mobilisations a été évaluée en salle de réveil et en salle d hospitalisation, ainsi que la douleur lors de la traite du drain puis lors de son ablation. L enquête, réalisée par les infirmiers de l unité douleur, consistait soit à relever l existant, en ce qui concerne la SSPI 1 et la salle d hospitalisation, soit à évaluer les enfants eux mêmes lors de leur passage journalier dans le service de chirurgie. Résultats Évaluation de la douleur en SSPI Le recueil de données est fait sur les feuilles de surveillance de la salle de réveil. Onze enfants n ont pas été évalués dans l heure qui a suivi la sortie de la salle d opération. Dix enfants sont très douloureux. Cinq enfants sont sortis douloureux de la salle de réveil. La plupart des enfants sont douloureux de manière significative à J0. Dix huit enfants sur 37 présentent au moins une fois une douleur très forte (> 60/100). Trente cinq enfants sont suffisamment soulagés au moins une fois lors d une évaluation. Cependant, 4 ne le sont jamais. Titration de morphine en SSPI Trente quatre enfants ont une titration en morphine en salle de réveil. Neuf enfants ont besoin de dose importante de morphine supérieure à 0,2 mg/kg. La grande majorité des enfants a besoin 1 Salle de surveillance post-interventionnelle
2 d une dose de morphine lors de la titration entre 0,1 et 0,2 mg/kg. La titration est suivie 33 fois par une pose de pompe autocontrôlée de morphine. Sept enfants ont un traitement de nalbuphine. Évaluation de la douleur en service d hospitalisation Le recueil de données est réalisé par les «infirmiers ressource douleur» directement auprès des enfants. Les scores de douleur de fond, à la mobilisation et à la traite du drain sont recherchés quotidiennement jusqu au jour de l ablation du drain. Nous avons pu constater l effet bénéfique de la pose d une pompe à morphine avec un débit continu associé au mode «bolus», durant les 2 premiers jours. La mobilisation est presque toujours douloureuse et s atténue avec le temps. À J1, 4 enfants présentent des douleurs intenses (> 60/100), 1 seul à J2. À J5, 6 enfants sur 10 sont algiques lors des mobilisations. La traite du drain n est pas systématique. Elle a concerné 18 enfants. Ce geste a entraîné une douleur d intensité variable de 0 à 80/100. La douleur a été mesurée lors de 42 traites de drain effectuées sur 18 enfants : 16 fois les enfants étaient douloureux [30 60] et 8 fois très douloureux [60 100]. Les enfants les mieux soulagés lors de la traite des drains étaient ceux qui avaient comme traitement antalgique une pompe à morphine avec un débit continu associé au mode bolus, du paracétamol et un AINS. Ceux qui ont bénéficié d un AINS associé à un autre traitement antalgique sont moins douloureux que les autres. Score de douleur Tableau 1 : Douleur de la traite du drain thoracique et thérapeutiques antalgiques en cours. morphine + DC morphine + AINS morphine morphine + DC Paracétamolcodéine Skénan + Actiskénan [0 30] [30 60] [60 100] Totaux antalgique en service d hospitalisation La consommation moyenne de morphine est de 1 mg/kg/j (à J1 : minimum 0,42 mg/kg, maximum 2,76 mg/kg). Le paracétamol est systématique et les doses sont adaptées. Trente et un enfants ont des anti inflammatoires non stéroïdiens et ceux ci ont des scores de la douleur moindres à J1 par rapport à ceux qui n en ont pas reçu. À J2, 36 enfants/40 ont bénéficié de la et pour 10 enfants, la prescription est modifiée par la mise en place d un débit continu. Les enfants les plus douloureux à J1 sont globalement bien soulagés à J2. Nous avons choisi d étudier en détail l évolution de la douleur et les modifications de traitement sur J1, J2 pour les 10 plus jeunes enfants : pour ces enfants, voici les scores moyens puis le détail des scores et des traitements enfant par enfant. Totau x 108
3 Enfants de 4 6 ans (n = 4) Enfants de 7 11ans (n = 6) Tableau 2 : Score moyen de douleur de fond des 10 plus jeunes enfants. Classe d âge J1 J2 Enfants de 4 6 ans (n = 4) 42,5 10 Enfants de 7 11ans (n = 6) 55 38,3 Tableau 3 : Scores et traitements propres à chacun des 10 plus jeunes enfants. Enfant 1 Enfant 2 Enfant 3 Enfant 4 Enfant 1 Enfant 2 Enfant 3 Enfant 4 Enfant 5 Enfant 6 J1 Interventio n Score 50 0 Pose Score Pose Score 20 0 bolus + continu bolus + continu Score continu Score sans titration ni débit continu J2 Score Nubain Score Pose à J2 Score bolus Débit continu ajouté à J3 Score (30 à J3) bolus Débit continu ajouté à J2 Score Pose On voit que les enfants sous nalbuphine initialement avaient pour la plupart une douleur importante et la a été introduite secondairement avec succès. Pour certains déjà sous morphine, un débit continu a été ajouté. Évaluation de la douleur lors de l ablation du drain La majorité des drains est retirée à J3 et J4 postopératoire. À J5, les 3/4 des drains sont retirés. Pour 11 enfants, le drain thoracique est retiré à l occasion d une anesthésie générale pour un 2 e temps opératoire. Quinze enfants sur les 29 pour qui le drain est retiré en salle souffrent notoirement lors du retrait du drain ; 4 sont très douloureux (> 60/100)
4 Score de douleur morphine seul Tableau 4 : Douleur et retrait du drain thoracique. morphine + MEOPA MEOPA seul Pas d antalgique Totaux [0 30] [30 60] [60 100] Totaux Pour les 29 enfants dont le drain a été retiré en hospitalisation, les bolus de morphine ne sont pas systématiques, le MEOPA n a été utilisé que pour la moitié des enfants évalués. On constate donc que la morphine seule est insuffisante pour soulager la douleur lors de l ablation de drains thoraciques. Discussion D après la revue de la littérature effectuée par le groupe Pédiadol, voici les données de la littérature internationale sur la douleur entraînée par le retrait d un drain thoracique. Dans une première publication les auteurs rapportent 3 études [1] : 135 enfants de 5 ans ont été inclus dans une étude, 96 % ont reçu de la morphine une heure avant le retrait du drain et ont tous reçu du paracétamol et des AINS. La douleur des enfants a été évaluée soit avec l échelle des visages ou l échelle FLACC. Les scores de douleur étaient de 5,3 (± 2,64) ; 30 enfants de 12 ans en moyenne inclus dans une étude prospective qui ont reçu du MEOPA, 10 % ont été très douloureux (8/10) et 13 % lors d une respiration profonde 10 min après le geste bien que les 2/3 des enfants aient reçu de la morphine et/ou des AINS ; dans une autre étude, 16 enfants ont reçu soit du MEOPA ou de la morphine, dans les 2 groupes les enfants étaient douloureux (8/13 CHEOPS) avec moins d anxiété dans le groupe MEOPA. La même équipe a analysé 14 études décrivant l utilisation de la morphine, des anesthésiques locaux et du MEOPA qui ont révélé que la morphine seule est insuffisante pour soulager la douleur lors de l ablation de drains thoraciques [2]. L effet antalgique d une application d EMLA (3 heures avant l ablation d un drain thoracique) a été supérieur à celui d un bolus IV de morphine chez l adulte [3] et chez l enfant [4]. L ensemble de ces études retrouve donc des résultats comparables aux nôtres, avec une difficulté de soulager ces malades. Morphine et le MEOPA seuls sont insuffisants pour l ablation de drain thoracique et l association d une crème anesthésiante au MEOPA et à la morphine apparaît comme la solution idéale à recommander. Conclusion Cette étude a démontré que la présence d un drain thoracique justifie le plus souvent l emploi de morphine en débit continu dès le 1 er jour en association au mode bolus, pour anticiper la douleur lors des mobilisations, et celle du retrait du drain. Dans les suites de ce travail, nous avons constaté un changement dans les prescriptions initiales. Les enfants qui ont été réévalués ultérieurement (février à juin 2007 : 10 enfants) ont tous eu une de morphine et ceux qui n ont pas eu d emblée un débit continu de morphine ont eu un réajustement de traitement à J
5 L utilisation du MEOPA associée à un «bolus» de morphine est devenue la plupart du temps systématique au moment du retrait du drain thoracique mais ce traitement reste encore insuffisant, de nombreux enfants restent douloureux lors du soin. D autres stratégies peuvent être proposées et être une perspective pour la prise en charge de l ablation des drains thoraciques dans notre établissement : application d EMLA, association à l hypnose, augmentation de la posologie du bolus de morphine. Dans ces conditions nous espérons que la douleur de ce soin sera minimisée. Bibliographie [1] Bruce EA, Howard RF, Franck LS. The efficacy of morphine and entonox analgesia during chest drain removal in children. Paediatr Anaesth 2006 ; 16 (3) : [2] Bruce EA, Howard RF, Franck LS. J Clin Nurs 2006 ; 15 (2) : [3] Valenzuela RC, Rosen DA. Topical lidocaine prilocaine cream (EMLA) for thoracostomy tube removal. Anesth Analg 1999 ; 88 : [4] Rosen DA, Morris JL, Rosen KR et al. Analgesia for pediatric thoracostomy tube removal. Anesth Analg 2000 ; 90 :
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