Rationnel physiopathologique de la prise en charge médicamenteuse du sevrage tabagique : développements actuels et futurs
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- Germain Alexis Beauregard
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1 Rationnel physiopathologique de la prise en charge médicamenteuse du sevrage tabagique : développements actuels et futurs Pathophysiological rational of smoking cess ation drug treatments: present and futur developments Ivan Berlin* * Société française de tabacologie, groupe hospitalier universitaire Pitié-Salpêtrière ; université Pierreet-Marie-Curie Paris-VI, service de pharmacologie et INSERM U677. Bases physiopathologiques du tabagisme La nicotine est l alcaloïde principal des feuilles de tabac, dont elle représente 95 %. La nicotine du tabac est un racémate, la quantité de la forme dextrogyre, (R)-nicotine, est négligeable (< 1 %), mais cette proportion augmente jusqu à 10 % lors de la racématisation par la combustion. La forme active chez l homme est la forme lévogyre, (S)-nicotine. Le tabac, ou la fumée du tabac, contient des milliers de substances qui peuvent interagir avec la nicotine, substance au pouvoir addictif la mieux étudiée du tabac. Les évolutions récentes des connaissances suggèrent que la nicotine seule n explique pas la dépendance tabagique. On estime qu au moins 80 à 90 % de la nicotine inhalée avec la fumée du tabac est absorbée. Après absorption pulmonaire, la nicotine, via les veines pulmonaires, le cœur, les gros troncs artériels du cou, arrive en 10 secondes environ sur les sites de liaison du système nerveux central. Cette voie d administration court-circuite donc le système cave, et en particulier le foie. Après une bouffée, l extrême vitesse de l augmentation des concentrations artérielles et, par conséquent, cérébrales de la nicotine (et d autres substances moins étudiées) permet une activation immédiate du système de récompense, contribuant ainsi au développement et à la persistance de la dépendance tabagique. En outre, les fumeurs contrôlent individuellement la quantité de substances absorbées de la fumée du tabac en faisant varier le volume, la fréquence des bouffées et la profondeur de l inhalation. À cause de cette forte capacité de compensation, la classification des cigarettes en faible et fort contenu en nicotine a été abandonnée. En fumant des cigarettes, les concentrations artérielles de la nicotine varient entre 20 et 60 ng/ml, mais des concentrations atteignant 100 ng/ml ont aussi été détectées. La nicotinémie dans le sang veineux varie entre 10 et 50 ng/ml. Fumer des cigarettes représente une exposition répétée à des doses variables de nicotine. Le matin, la nicotinémie est basse ou proche de zéro. Après avoir fumé une cigarette, elle augmente d environ 10 ng/ml. Pour arriver à l état d équilibre pharmacocinétique, un fumeur va rapprocher les intervalles de cigarettes dans la matinée. L élimination de la nicotine est compensée par l apport nicotinique de la cigarette suivante. Par ailleurs, la nicotine peut persister dans les différents tissus qui la larguent progressivement. Ce largage tissulaire peut prolonger la vraie demi-vie d élimination (2 heures en moyenne) et assurer un taux résiduel le matin (1). La nicotine est un agoniste des récepteurs cholinergiques nicotiniques (R-AchN). Le neurotransmetteur 42 La Lettre du Cardiologue n juin 2008
2 Résumé La substance contenue dans le tabac et dans la fumée du tabac la mieux étudiée et tenue pour responsable de la dépendance tabagique est la nicotine. Celle-ci (ainsi que d autres substances), inhalée avec la fumée d une cigarette, a une biodisponibilité proche de 100 %, due à la grande surface d absorption des poumons ; elle arrive en quelques secondes dans le cerveau et se lie aux récepteurs nicotiniques cholinergiques. La nicotine exerce son effet en stimulant la libération de neurotransmetteurs comme la dopamine, la noradrénaline et la sérotonine. Cela se traduit par des effets cliniques : amélioration de l humeur, des performances cognitives, de l éveil, etc. Les traitements pharmacologiques du tabagisme se substituent à la nicotine (traitements substitutifs nicotiniques), stimulent d une façon sélective les récepteurs nicotiniques (varénicline) impliqués dans les effets centraux de la nicotine ou consistent en des antidépresseurs qui agissent directement sur un ou plusieurs systèmes de neurotransmission. Mots-clés Tabagisme Physiopathologie Traitements médicamenteux physiologique de ces récepteurs est l acétylcholine. Les R-AchN sont des pentamères transmembranaires constitués de sous-unités α, β, γ et δ. Les R-AchN appartiennent à la superfamille des canaux ioniques activés par un ligand. Leur présence a été démontrée dans plusieurs régions du cerveau comme, par exemple, dans le noyau accumbens, l aire tegmentale ventrale, le cortex préfrontal, etc., et ceux-ci se trouvent aussi bien sur les neurones noradrénergiques, dopaminergiques, sérotoninergiques que GABA- ou glutamatergiques (figure 1). Les R-AchN sont tenus pour responsables de la majorité des effets centraux de la nicotine. La présence de la sous-unité β a un rôle majeur dans la dépendance à la nicotine. La dépendance au tabac est le résultat de plusieurs processus : interaction entre la nicotine et d autres substances contenues dans le tabac ou dans la fumée Interneurones Aire tegmentale ventrale GABA α7 + GABA du tabac et influence des facteurs comme la personnalité, l activité sociale, l apprentissage conditionné, les prédispositions génétiques, les troubles psychiatriques, la consommation d autres substances de dépendance, etc. Les fumeurs décrivent les effets du tabac comme améliorant l attention, les performances cognitives et l humeur, et comme raccourcissant le temps de réaction. La majorité des fumeurs indiquent aussi d autres effets bénéfiques : l éveil, le plaisir, la relaxation, la diminution de l anxiété et de l appétit ainsi que la maîtrise du poids. Pour arriver à ces effets positifs, il est largement accepté que la nicotine agit en stimulant différents systèmes effecteurs. C est ainsi que la sensation du plaisir a été reliée à la stimulation de la libération de la dopamine, l éveil à la stimulation des systèmes noradrénergique et cholinergique, la suppression de l appétit aux systèmes Noyau accumbens DA EC + Interneurones EC Glutamate Cortex Summary The most studied substance contained in tobacco and tobacco smoke and thought to be responsible for tobacco dependence is nicotine. Nicotine (and several other compounds) inhaled in tobacco smoke has a bioavailability of close to 100%, due to the extremely large surface of absorption of the lungs. Nicotine reaches the brain in a few seconds and binds to the nicotinic acetylcholine receptors. Nicotine exerts its effect by stimulating the release of neurotransmitters such as dopamine, norepinephrine, serotonin. This translates at the clinical level into mood improvement, enhanced cognitive performances, increased alertness, etc. The pharmacological treatments substituted to nicotine (nicotine replacement therapies) selectively stimulate nicotinic receptors (varenicline) involved in the central actions of nicotine, or they are antidepressants acting on one or several neurotransmission systems. Keywords Smoking Pathophysiology Pharmacological treatments CB1-R R-AchN Libération des EC Figure 1. Les neurones dopaminergiques (en orange) sont sous inhibition tonique gabaergique et stimulation tonique glutamatergique. La nicotine stimule les neurones dopaminergiques (libération de la dopamine) directement via les récepteurs cholinergiques nicotiniques (R-AchN) situés sur les corps cellulaires. Elle peut aussi stimuler les neurones dopaminergiques indirectement via les récepteurs cholinergiques nicotiniques α7 situés sur les neurones glutamatergiques ou via les R-AchN inhibant les neurones gabaergiques inhibiteurs. Les récepteurs CB1 (CB1-R) des endocannabinoïdes (EC) ne se situent pas sur les neurones dopaminergiques. Leur stimulation supprime l inhibition gabaergique et la stimulation glutamatergique des neurones GABA (qui, sans stimulation d endocannabinoïde, aboutit à l inhibition des neurones dopaminergiques, d après [2]). La Lettre du Cardiologue n juin
3 Rationnel physiopathologique de la prise en charge médicamenteuse du sevrage tabagique : développements actuels et futurs sérotoninergique et noradrénergique, la régulation de l humeur aux systèmes sérotoninergique et noradrénergique, enfin l effet sur la mémoire au système cholinergique, mais aussi à une voie indirecte : l amélioration de l humeur. En agissant sur l ensemble de ces systèmes neurotransmetteurs, la nicotine (ou le tabac/ou la fumée du tabac) stimule le circuit cérébral de la récompense. De ce fait, la dépendance au tabac est caractérisée par une utilisation compulsive due à la perte de contrôle de la consommation. Des périodes d abstinence et de rechute s alternent. Chez les fumeurs dépendants, l incapacité d arrêter persiste malgré la connaissance des effets néfastes du tabagisme pour la santé et elle est souvent maintenue par l envie impérieuse de fumer déclenchée par l arrêt, temporaire ou soutenu, de la consommation. Le fumeur régule son envie de fumer en fonction de ses besoins du moment par l autoadministration des substances psychoactives (nicotine et d autres substances contenues dans la fumée du tabac). Il stabilise aussi son état émotionnel et cognitif. Il est évident que toutes les personnes qui ont fumé une cigarette ne deviennent pas des fumeurs chroniques ou dépendants. Plusieurs polymorphismes génétiques ont été étudiés afin de connaître les prédispositions génétiques qui rendent les individus susceptibles de devenir fumeurs ou fumeurs dépendants. Ces études concernent essentiellement les polymorphismes génétiques du métabolisme de la nicotine, des récepteurs et transporteurs de la dopamine, de la sérotonine et de la noradrénaline ainsi que les polymorphismes génétiques des R-AchN. Il semble que les mécanismes impliqués dans l initiation au tabac et dans la persistance du tabagisme ne soient pas strictement identiques. Les effets périphériques sensoriels du tabac à fumer ou sans fumée peuvent aussi jouer un rôle dans le développement et dans le maintien de la dépendance tabagique. Ils sont probablement médiés par des R- AchN périphériques exprimés sur les fibres afférentes du trijumeau. Le tabac ou la fumée du tabac contiennent d autres substances pharmacologiquement actives. Celles-ci peuvent avoir un effet propre, mais aussi potentialiser celui de la nicotine et la rendre hautement addictive. En effet, l une des conséquences biologiques majeures du tabagisme est l inhibition des enzymes monoamines oxydases (). On distingue deux isoformes : la A et la B. Elles se caractérisent par leur spécificité de substrat et d inhibiteur. Les sont présentes en grande quantité dans les organes qui jouent un rôle dans le maintien de l homéostasie de l individu par rapport au monde extérieur. Elles se trouvent donc dans de plus fortes concentrations au niveau des barrières de l organisme et ont un rôle de détoxification : poumons, placenta, tractus digestif, foie. Elles catabolisent les monoamines d origines exogène (tyramine) ou endogène (noradrénaline, sérotonine, dopamine). Cette fonction devient très importante au niveau du système nerveux central, où les participent à la régulation de la neurotransmission monoaminergique. Les médicaments inhibant les ont tous des propriétés antidépressives. Nous savons depuis 1995 que l activité des est considérablement inhibée chez les fumeurs par rapport aux non-fumeurs (3). L inhibition des peut être due à des substances contenues dans le tabac ou dans la fumée du tabac. Il est aussi possible qu il existe une prédisposition génétique d activité diminuée, rendant ces personnes vulnérables et susceptibles de devenir des fumeurs, parce que, chez elles, les effets de la nicotine sont accentués par une activité de la plus faible. Des travaux récents ont pu démontrer que la coadministration d inhibiteurs des augmente la motivation du rat à s autoadministrer la nicotine (4). Ces travaux apportent une première preuve directe du rôle de l inhibition des dans l induction et/ou le maintien de la dépendance tabagique-nicotinique. Ces recherches récentes vont dans la direction d une interaction nicotine-inhibition des. Ce modèle semble mieux expliquer le potentiel hautement addictif du tabac, ses effets sur l humeur et tous les effets psychotropes du tabagisme. Il est possible de concevoir que l inhibition des par le tabac contribue au développement et à la persistance de la dépendance aux autres substances addictives mettant en jeu les mêmes effecteurs (dopamine, noradrénaline, sérotonine) dont le catabolisme est effectué par les. Médicaments actuels et futurs du tabagisme Substitution nicotinique Les traitements substitutifs nicotiniques (TSN) remplacent la nicotine du tabac. Les formes buccales du tabac et des substituts nicotiniques (gommes, pastilles, comprimés à sucer, inhaleur) ont un ph alcalin, ce qui permet une absorption buccale accrue. Comparés aux cigarettes, l absorption est plus lente, les concentrations plasmatiques obtenues sont moindres et le temps pour obtenir la concentration plasmatique maximale est plus long. La nicotine est bien absorbée à travers la peau également. Le largage de la nicotine à 44 La Lettre du Cardiologue n juin 2008
4 partir des dispositifs transdermiques (timbre) dépend de la perméabilité et de la vascularisation de la peau, de la diffusion de la nicotine à partir de la matrice polymère et de la membrane du timbre. La montée des concentrations plasmatiques nicotiniques est plus lente qu avec les formes buccales de TSN. Les TSN donnent des nicotinémies inférieures à la nicotinémie obtenue en fumant des cigarettes. En outre, ils imitent mal l oscillation de pics plasmatiques (et cérébraux) de la nicotine. Cette sous-substitution pourrait être l une des causes de la faible efficacité thérapeutique des TSN en termes d abstinence à court, moyen et long terme. Il est à noter que la dose biodisponible à partir des TSN d absorption buccale est environ inférieure de moitié à la dose contenue dans la forme galénique. Optimisation de l efficacité des traitements substitutifs nicotiniques L optimisation des TSN implique deux conditions : une administration de la dose individuelle optimale et une durée d administration suffisamment longue pour prévenir les rechutes. Le principe actuel de la substitution nicotinique est fondé sur l induction de l abstinence, avec une durée de traitement relativement courte (3 à 6 mois). Ce principe ne tient pas compte de la nature chronique de la dépendance tabagique, acquise habituellement à l âge jeune. La chronicité de la dépendance peut impliquer un traitement long dont l induction de l abstinence est seulement la partie initiale. Après environ vingt ans de commercialisation des TSN et d utilisation par plusieurs millions de fumeurs, nous n avons pas de doutes sur leur bonne tolérance. Il est donc plus opportun d instaurer un TSN sur une longue période, en vue du maintien de l abstinence que d arrêter les TSN trop tôt. De plus, il semble que, après l arrêt de la substitution nicotinique, non seulement les rechutes soient plus probables que sous traitement continu, mais aussi que le risque de rechute soit augmenté (5). En fait, nous ne disposons pas de données sur la durée optimale des TSN. L étude CEASE, unique étude ayant comparé les différentes durées de traitement, a analysé, chez fumeurs, les effets des timbres nicotiniques de 15 et 25 mg/j et ceux d un placebo pour deux durées de traitement : 8 et 22 semaines. Il n y avait pas de différence en termes d abstinence tabagique à 12 mois entre les deux durées de traitement et entre la faible (15 mg/j) et la forte dose (25 mg/j) [6]. Toutefois, l étude Lung Health a montré que le meilleur facteur prédictif de l abstinence tabagique à 5 ans était la poursuite de la gomme nicotinique jusqu à au moins un an (7). De la même manière, une étude publiée il y a déjà vingt ans a relevé que l abstinence à un an a été la plus élevée chez ceux qui ont utilisé les gommes nicotiniques spontanément pendant un an (8). Les études testant des doses élevées (> 21 mg/j) de nicotine ne permettaient pas de conclure que des fumeurs répondent mieux à de fortes doses qu à de faibles doses de substitution. En revanche, la combinaison de TSN administrés par des voies différentes est l usage courant et la majorité des études de métaanalyse Cochrane souligne la supériorité de ce mode d administration sur une voie d administration unique (9). Cette coadministration semble assez logique et vise à assurer une concentration plasmatique de nicotine soutenue par les formes transdermales ainsi qu à écrêter les pics d envie de fumer par les formes buccales à absorption plus rapide, imitant ainsi mieux la situation de fumeur en état tabagique. De plus en plus de travaux suggèrent que la réponse pharmacodynamique à la nicotine est différente selon le sexe, ce qui peut expliquer les variations d efficacité thérapeutique (pourcentage d abstinents) observées dans un certain nombre d études. La clairance totale de la nicotine et de la cotinine (métabolite principal de la nicotine) est plus élevée chez les femmes que chez les hommes, et les contraceptifs oraux accentuent cette différence pharmacocinétique (10). Le cycle menstruel n a cependant pas d influence sur la pharmacocinétique de la nicotine (11). Il est donc envisageable d individualiser au maximum les doses (et la durée d administration) des TSN. À ce jour, aucune étude n a évalué l adaptation posologique individualisée des TSN permettant d obtenir une réponse thérapeutique supérieure au traitement standard préconisé dans le résumé des caractéristiques des TSN. Une étude nationale est en cours de réalisation pour répondre à la question, à savoir si une adaptation posologique individualisée, fondée sur la concentration salivaire de la cotinine, augmente ou non l efficacité des TSN (étude ADONIS, Adaptation of the DOse of NIcotine in Smoking cessation). Traitements médicamenteux non nicotiniques Comme mentionné plus haut, l effet de la nicotine sur l envie de fumer, l humeur, l anxiété ou la performance cognitive est indirect et dépend en grande partie de La Lettre du Cardiologue n juin
5 Rationnel physiopathologique de la prise en charge médicamenteuse du sevrage tabagique : développements actuels et futurs Retrouvez les références bibliographiques sur le site : Neurone présynaptique R-AchN Nicotine son effet sur les neurotransmetteurs (figure 2). C est ainsi que plusieurs antidépresseurs ont été étudiés pour faciliter le sevrage tabagique. Plusieurs études d une puissance suffisante ont évalué l efficacité des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS). Aucune de ces études n était positive. Il est donc établi que les ISRS ne facilitent pas l arrêt de la consommation tabagique (12). Le bupropion (Zyban ) a été développé dans cette indication, après une observation fortuite d une collègue psychiatre qui a remarqué que les patients traités avec cet antidépresseur fumaient moins. Cette molécule fait partie des traitements du tabagisme de première intention aux États-Unis (13), mais elle est peu utilisée en Europe, essentiellement à cause des effets indésirables potentiels. La nortriptyline (métabolite principale de l amitriptyline, Laroxyl ) est considérée en Amérique du Nord comme un médicament de deuxième intention (13). Son efficacité a été démontrée dans plusieurs études (12), mais ses effets indésirables, essentiellement anticholinergiques, limitent son utilisation. Cellule gliale NA DA 5HT Synapse NA/DA/sérotonine Neurone postsynaptique Figure 2. La nicotine se lie aux récepteurs cholinergiques nicotiniques (R-AchN) présynaptiques. La conséquence en est la libération des neurotransmetteurs : noradrénaline (NA), dopamine (DA), sérotonine (5HT). Les neurotransmetteurs stimulent les récepteurs postsynaptiques. Les monoamines oxydases () A et B se trouvent dans les mitochondries et catabolisent les neurotransmetteurs recaptés dans la cellule par les transporteurs de ces monoamines (flèches ). L inhibition de la recapture (antidépresseurs) ou l inhibition de l activité des peut avoir des effets similaires à ceux de la nicotine et potentialiser les effets de la nicotine sur la neurotransmission, et, par conséquent, sur les effets cliniques liés à ces neurotransmissions (humeur, éveil, performances psychométriques, envie de fumer, faim, etc.). Les inhibiteurs des ont été évalués dans plusieurs études et semblent efficaces. Malheureusement, aucune de ces études n avait la puissance suffisante pour conclure à une efficacité définitive (14). Le rimonabant est un antagoniste des récepteurs CB1, dont les agonistes physiologiques sont les endocannabinoïdes. Il a été développé dans le traitement de l obésité et dans le sevrage tabagique. Il a obtenu l AMM, fondée sur de nombreuses études positives, dans l obésité et dans le diabète de type 2 associé à une obésité. Les études de sevrage tabagique n ont pas encore été publiées. D après des résumés et des présentations de congrès, la première étude montrait une supériorité du rimonabant sur le placebo, mais les études ultérieures n ont pu confirmer cette supériorité. La varénicline est commercialisée en France depuis février 2007 sous le nom de Champix. Il s agit d un agoniste partiel des R-AchN tenus pour responsables de la majorité des effets centraux de la nicotine. La varénicline se lie avec une forte affinité, supérieure à celle de la nicotine, à ces récepteurs. Du fait de son activité agoniste partielle, elle stimule modérément le récepteur mais aussi, par son affinité plus importante que celle de la nicotine, elle reste liée au récepteur, même en présence de la nicotine, qui ne peut pas accéder à son site de liaison. L effet attendu et démontré est la diminution de l envie de fumer (15) et le désintérêt potentiel du fumeur de fumer sous varénicline. Deux études de phase II (16, 17), trois études de phase III (18-20) et une méta-analyse (21) concluent que la varénicline est supérieure au placebo mais aussi au bupropion en termes d abstinence. Deux études récentes ont comparé les effets de la varénicline et ceux des TSN. La première étude, non randomisée mais bien conduite dans une situation de pratique clinique et à une puissance suffisante, montrait une abstinence à court terme plus fréquente avec la varénicline qu avec les timbres nicotiniques (odds-ratio : 1,7, IC 95 : 1,09-2,67) [22]. La deuxième étude est un essai randomisé en ouvert varénicline contre timbre nicotinique. Le pourcentage de fumeurs abstinents pendant les quatre dernières semaines de traitement était de 55,9 % avec la varénicline et de 43,2 % avec le timbre nicotinique (odds-ratio : 1,7 ; IC 95 : 1,26-2,28) [23]. Un ouvrage publié récemment résume l état de la recherche clinique sur les différentes approches thérapeutiques du tabagisme. Ces dernières incluent les vaccins antinicotiniques, les antagonistes des opiacés et les agents glutamatergiques et gabaergiques (14). 46 La Lettre du Cardiologue n juin 2008
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