Zéro Herbi Viti la conduite des vignes sans herbicides

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1 Lettre actualités n 72 - mai 2015 Zéro Herbi Viti la conduite des vignes sans herbicides C. Gaviglio : IFV Pôle Sud Ouest - Tél : christophe.gaviglio@vignevin.com Zéro Herbi Viti la conduite des vignes sans herbicides Un projet pluridisciplinaire financé par l agence de l eau Adour-Garonne Un projet sur un vaste territoire, mené entre 2009 et Zéro Herbi Viti est un projet d une grande ampleur, couvrant les territoires viticoles du bassin versant Adour Garonne. Sur cette zone, les modes de production, la valorisation des produits ainsi que les habitudes d entretien du sol sont très variables. Des vignes très larges dans le cognaçais aux vignes très étroites du haut médoc, en passant par l entre-deux mers et les vignobles de Midi-Pyrénées, l enjeu est le même : réduire l usage des herbicides en proposant de nouveaux itinéraires d entretien du sol, laissant plus de place à l enherbement, en particulier sous le rang. En revanche, les acteurs sont différents et l organisation du conseil et de la production aussi. Cela a imposé une démarche ciblée par territoire avec une première étape d enquête technique et sociologique. Des sites vitrines ont été définis pour chaque zone de production, afin de bénéficier des enseignements d une mise en œuvre à l échelle de la production et non pas à l échelle de l expérimentation d une part, et de sites de démonstration de la faisabilité pour la phase de communication autour du projet. Légende : enherbement sous le rang, site de la ferle d Anglars-Juillac (46), crédit photo C.GAVIGLIO, IFV 81 La répartition des tâches entre les partenaires était la suivante : - IFV : mise en place des sites vitrine, choix techniques, matériel, suivi économique - Chambre d Agriculture de la Gironde : mise en place sites vitrine, suivi technique - Chambre d Agriculture de Charente : mise en place sites vitrine, suivi technique - CERTOP (Université Toulouse le Mirail) : analyse sociologique - Ecole d ingénieurs de Purpan : enquête sur les pratiques et suivi économique - Exploitations accueillant les sites vitrines (7 au total): enregistrement des pratiques, entretien dédié aux vitrines 01/03/2015 IFV Page 1 sur

2 Principaux enseignements du projet Ce projet de transfert et d expérimentation à l échelle de la parcelle a permis d acquérir des données à la fois techniques (organisation du travail, insertion des pratiques innovantes dans l itinéraire de production) et économiques tout en ayant une approche assez fine de la perception des innovations au sein de la filière, pour chacun des bassins de production étudié. Ces enseignements complètent les connaissances agronomiques déjà acquises sur le sujet grâce à des expérimentations plus classiques. Enseignements techniques Du point de vue technique, il ressort de cette étude la difficulté à conserver un enherbement total permanent pour tous les contextes de production. Le système de conduite de l entretien du sol a ainsi été revu sur certains sites avec l intégration du désherbage mécanique de l inter-rang (un sur deux) pour compenser les effets de concurrence hydrique et / ou azotés trop importants d un enherbement complet. Si cela solutionne de manière efficace les problèmes de rendement et de vigueur, cela impose de revoir la stratégie d entretien du sol globale. En effet, le positionnement et le réglage des tondeuses interceps est plus délicat dans les inter-rangs travaillés (il peut se former une marche avec le cavaillon) et si la tonte des inter-rangs est réalisée simultanément, il faut pouvoir relever la tondeuse pour les rangs travaillés. Le choix d un matériel adapté est une des clés pour réussir un entretien sans herbicides. La relative lenteur de travail des outils de tonte sous le rang est un point sur lequel il y a encore du travail à réaliser. En effet c est un facteur de coût et une limite potentielle à l adoption de cette technique innovante. Un réglage approfondi des machines permet de gagner un peu de débit de chantier, mais il y a un compromis à trouver entre la vitesse d exécution et la précision, la netteté du travail fini. Dans la pratique, pour des raisons d exigence par rapport à la netteté de la tonte ou par crainte de blesser des souches, les vitesses de travail enregistrées ont été très nettement inférieures à celles que nous pouvions espérer suite aux divers essais de matériels qui avaient été conduits. D autres enseignements pragmatiques sont à retenir de cette expérimentation à grande échelle : la gestion des fils releveurs sur vignes palissées doit notamment être revue pour éviter que ceux-ci soient pris au sol dans l herbe au printemps juste avant le relevage. La tonte sous le rang doit être faite avant l épamprage, que celui-ci soit manuel ou mécanique. Dans le cas d un épamprage mécanique, un complément de tonte près des souches peut être obtenu grâce à l action des lanières ou des fils. Il est à noter que des solutions de mécanisation combinant tonte et épamprage existent sur le marché. Enfin, la concurrence exercée par l enherbement peut induire une baisse d expression végétative rendant inutiles des opérations comme le dédoublage ou les vendanges en vert, et limitant fortement le nombre de rognages. L intérêt d un enherbement semé sous le rang (c est le cas pour 3 des 7 sites) par rapport à un enherbement spontané se justifie d après nos essais antérieurs pour la gestion de la fréquence des tontes et une concurrence légèrement moins marquée. Cependant, compte tenu de la difficulté à implanter sous le rang et à grande échelle un enherbement choisi, avec une densité maîtrisée, ce choix a été remis en cause à plusieurs reprises. La mécanisation du semis sous le rang n est pas développée chez les constructeurs faute de marché. Pendant la durée du projet, nous avons pu établir que l utilisation d un épandeur d engrais localisé était envisageable pour des vignes jusqu à 2 m de large afin de limiter la sensibilité au vent de graines très légères. Nous avons également identifié chez des vignerons, des idées de montages simples à partir d éléments du commerce connus pour répondre à cette problématique. Cela doit faire l objet d un projet pour la construction d un prototype «preuve de concept» facilement reproductible. 01/03/2015 IFV Page 2 sur

3 Légende : Exemples de tondeuses utilisées dans le cadre du projet ZHV sur les parcelles vitrines. Crédits photo C.GAVIGLIO, IFV 81 Enseignements économiques L impact économique de l adoption de la pratique innovante de l enherbement sous le rang a été évalué grâce aux cahiers d enregistrement des pratiques tenus par les chefs de culture des domaines porteurs des sites vitrines. Sur la durée du programme, les années 2009 et 2010 ont été écartées du calcul car le manque d expérience en matière d implantation d enherbement sous le rang a entraîné des pics de temps de travaux qui ne doivent pas se reproduire une fois le système installé. Le surcoût des itinéraires «Zéro Herbi Viti» a été évalué suivant les sites vitrines de +10% à %. Ces chiffres illustrent la difficulté à maîtriser les coûts de l entretien du sol avec les itinéraires sans herbicides mis dans des conditions de production réelles. Ils montrent aussi que la part la plus importante du coût est due au temps de travail, ce qui se traduit en surcoût réel lorsque l exploitation est contrainte d embaucher du personnel. Si ce n est pas le cas, la différence de coût réel est quasi inexistante mais c est l organisation du travail qui est remise en cause. Cependant, l analyse nous a permis de déceler des pistes d optimisation pour réduire le surcoût induit : c est l exemple du site pour lequel nous avons un écart de 170 %. Cette différence extrêmement importante peut être limitée à un surcoût acceptable de 6% en supprimant les interventions très lentes destinées à du travail de finition plus qu à de la tonte ayant un sens agronomique. La tolérance par rapport à l herbe est une des clés de la maîtrise des coûts et c est bien la perception que le viticulteur a de son travail qui est en jeu dans cette problématique. Enseignements sociologiques : freins et leviers à l acceptation du changement de pratique Le rapport complet est disponible sur demande auprès des équipes du CERTOP. Le travail réalisé sur les différents bassins de production a permis de bien caractériser la perception de la technique de l enherbement par les différents acteurs de la filière. Il a en outre permis d identifier les relais techniques utiles et pertinents lorsqu il s agit de prescription sur les pratiques culturales. Cet aspect extra-technique nous intéresse 01/03/2015 IFV Page 3 sur

4 particulièrement pour nous aider à mieux préparer le transfert des techniques expérimentées. Nous l avons utilisé pour préparer les journées de restitution et de démonstration sur chacun des sites vitrines, et nous l utiliserons pour préparer un plan d action stratégique par zone de production. En effet, certains producteurs sont très informés et techniquement pointus. Si on leur fait la démonstration que dans leur contexte de production la technique innovante est performante, ils pourront l adopter. Inversement, dans d autres secteurs, le viticulteur a peu de marge de manœuvre dans la définition de son itinéraire de culture car il se conforme à un cahier des charges donné par le technicien qui le suit (organisme de développement ou cave coopérative). C est donc par les cahiers des charges ou par les prescripteurs qu il faut passer pour initier de nouvelles expériences en matière d entretien du sol. Au total, une douzaine de cibles a été identifiée sur le territoire de l étude pour faciliter le transfert. Perspectives A l issue de ce projet, nous avons pu identifier les pistes de travail suivantes pour capitaliser l expérience acquise lors de la mise en place des sites vitrines et de leur suivi. La construction d un prototype de semoir sous le rang, en réponse au frein identifié de l absence de mécanisation spécifique pour mettre en place des parcelles avec de l enherbement sous le rang. Ceci a été réalisé en 2014 et a permis l implantation d un couvert de trèfle blanc nain sous le rang. Légende : semoir sous le rang et levée du trèfle blanc nain. Crédits photo L.GONTIER C.GAVIGLIO, IFV 81 La possibilité d utiliser des robots de tonte pour éviter l écueil des temps de travaux avec les matériels existants, et multiplier le nombre de tontes pour limiter la croissance de l herbe. Le lien avec la concurrence exercée par le couvert dans ces conditions doit encore être établi. Un partenariat avec la société vitirover est envisagé. Le maintien en l état des parcelles ayant servi de vitrine doit être favorisé pour conserver la possibilité de réaliser des démonstrations, de tester du matériel ou pour surveiller l évolution des paramètres agronomiques sur le long terme. L insertion de techniques complémentaires à l enherbement sous le rang : la technique des engrais verts permettrait de conserver une couverture au sol pendant la période hivernale sur les inter-rangs travaillés tout en apportant un complément nutritionnel à la vigne bienvenu dans certaines situations de production. Un plan de communication étendu à d autres supports. Beaucoup d action de communication ont été conduites, et nous pouvons maintenant travailler sur des supports différents. Sont envisagés en particulier : Des fiches techniques synthétiques par thème (l herbe, les machines, le coût, etc ) Un film permettant de suivre l évolution d une ou plusieurs parcelles tout au long de la saison 01/03/2015 IFV Page 4 sur

5 Un support de formation (présentation powerpoint, fiches pratiques, etc) sur le thème de l enherbement sous le rang, à destination de l enseignement viticole et du développement. Un plan d action stratégique défini pour chaque territoire d étude, afin d impliquer les acteurs locaux dans l adoption des pratiques innovantes. Copyright MatéVi. Toute reproduction totale ou partielle des contenus est strictement interdite. Pour pouvoir les diffuser, contactez-nous. 01/03/2015 IFV Page 5 sur