Le magnétisme dans la matière (Cours XVIII et XIX)
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- Jean-Baptiste Cormier
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1 Le magnétisme dans la matière (Cours XVIII et XIX) Un matériau magnétique peut porter, dans un petit volume d 3 V, grand à l échelle microscopique mais petit à l échelle macroscopique, un moment dipolaire magnétique d 3 µ = I d 3 V. (69) Le champ de vecteurs I est appelé la magnétisation du matériau magnétique et correspond donc au moment magnétique par unité de volume. Pour un matériau linéaire et isotrope, la magnétisation est proportionnelle au champ magnétique ; on écrit I = µ r 1 µ r B µ 0 (70) Le coefficient µ r est la perméabilité relative du matériau. La susceptibilité magnétique est quant à elle définie par χ m = µ r 1. Noter que cette description générale d un matériau magnétique est très similaire à celle utilisée pour les matériaux diélectriques. L origine de la magnétisation dans un milieu magnétique est le mouvement microscopique des charges qui constituent les atomes et les molécules du matériau. Ces mouvements de charge peuvent former des petits circuits électriques qui portent des moments magnétiques microscopiques. On peut avoir une idée de ce qu il se passe et des ordres de grandeur mis en jeu à l aide d un modèle très simple, bien qu une analyse correcte ne puisse se faire que dans le cadre de la Mécanique quantique. Considérons le mouvement d un électron autour du noyau de son atome est un cercle de rayon r parcouru à une vitesse angulaire constante ω. 1. (*) Quel est le moment cinétique σ de l électron? 2. (*) Quelle est l intensité dans le circuit microscopique formé par l électron en mouvement? En déduire le moment magnétique µ. 3. (*) Montrer que µ = γ σ (71) où γ, appelé facteur gyromagnétique de l électron, est donné par γ = e 2m en fonction de la masse m et de la charge e de l électron. (72) On peut montrer que les relations (71) et (72) sont toujours vraies dans le cadre classique, pour n importe quelle distribution de courant constituée de particules ayant toutes la même charge et la même masse. 63
2 4. (*) Aux échelles atomique, σ, où est la constante de Planck. Le moment magnétique microscopique typique est ainsi donné par le magnéton de Bohr, (a) Calculer numériquement µ B. µ B = e 2m (73) (b) En déduire l ordre de grandeur du rayon d un atome d hydrogène, la vitesse de l électron dans cet atome et l intensité dans le circuit électrique correspondant. On distingue trois grands types de magnétismes. Le diamagnétisme Ce type de magnétisme est présent dans tous les matériaux. Sa caractéristique principale est d être associé à une susceptibilité magnétique négative, χ m < 0. Dans un diamagnétique, le moment magnétique induit par la présence d un champ magnétique est orientée dans le sens opposé au champ magnétique! Le diamagnétisme est un effet assez faible, qui est masqué par les autres types de magnétisme lorsqu ils sont présents. Comme exemples de matériaux purement diamagnétiques, on peut citer l eau ou l azote. Les susceptibilités des diamagnétiques sont de l ordre de 10 6 pour les solides ou les liquides et de 10 9 pour les gaz. Le paramagnétisme Les matériaux paramagnétiques sont très similaires (vis-à-vis du champ magnétique) aux matériaux diélectrique polaires (vis-à-vis du champ électrique). Ils sont constitués d atomes ou de molécules qui portent un moment magnétique microscopique. En l absence de champ magnétique, ces moments sont orientés aléatoirement en raison de l agitation thermique et le moment magnétique macroscopique résultant est nul. Par contre, en présence d un champ magnétique, les moments ont tendance à s aligner avec le champ et il apparaît une magnétisation non-nulle. Les susceptibilités correspondantes sont donc automatiquement positives et dépendent fortement de la température. Aux températures ambiantes, elles valent environ pour les solides et les liquides et 10 6 pour les gaz. Par exemple, l oxygène, l aluminium ou tout simplement le corps humain sont des paramagnétiques. Le ferromagnétisme Les ferromagnétiques sont des matériaux fortement non-linéaires. Il est néanmoins utile de continuer à utiliser la notion de susceptibilité, mais celle-ci dépend du champ magnétique dans ce cas. Les susceptibilités des ferromagnétiques sont énormes, pou- 64
3 vant varier entre 100 et Plongé dans un champ magnétique extérieur, la magnétisation qui apparaît dans le ferromagnétique crée elle-même un champ B dip, somme des champs des dipôles dans le matériau, qui est très intense et surpasse de loin le champ extérieur appliqué au départ. Dans un ferromagnétique, les moments microscopiques sont (presque) tous alignés les uns avec les autres, même en l absence de champ magnétique extérieur, dans des régions de taille macroscopiques appelées domaines de Weiss. Un domaine de Weiss peut avoir une dimension allant jusqu à un millimètre et contient un nombre énorme de dipôles microscopiques (typiquement de à ). L alignement de ce très grand nombre de dipôles entre eux en champ nul provient d une interaction entre dipôle qui est d origine purement quantique. Le choix, par le matériau, d une direction privilégiée alors qu aucune contrainte extérieur ne l y pousse est un exemple du phénomène de brisure spontanée de symétrie (ici, c est la symétrie par rotation qui est brisée). Noter enfin que d un domaine de Weiss à l autre, les moments peuvent avoir des orientations totalement différentes. Si l on chauffe un ferromagnétique au-delà d une certaine température critique T c appelée température de Curie, l agitation thermique finit par l emporter et le matériau devient paramagnétique. À T = T c se produit une transition de phase dans le matériau. Pour le fer, qui est le ferromagnétique typique, on a par exemple T c = 1054 K. Enfin, une dernière remarque : on peut montrer rigoureusement que, dans le cadre d une description classique, la magnétisation est toujours nulle et ceci quel que soit le champ magnétique appliquée. Intuitivement, dans le cadre de la description classique, diamagnétisme et paramagnérisme se compensent toujours exactement. Ainsi, le magnétisme est un phénomène d origine purement quantique, bien qu il ait des manifestations macroscopiques évidentes. Le cas des ferromagnétiques est encore plus frappant : la nature même de l interaction entre les moments magnétiques, qui est responsable de la brisure de symétrie, n a de description que quantique. Dans les questions qui suivent, ne pas oublier qu il faut à chaque fois bien savoir justifier la réponse! 1. (*) Un diamagnétique est-il attiré ou repoussé par un aimant? Même question pour un paramagnétique. Que se passe-t-il si l on fait couler de l oxygène liquide entre deux aimants puissants? 2. (*) Un ferromagnétique est-il repoussé ou attiré par un aimant? Comparer la force qu exerce un aimant sur un morceau l aluminium et sur un morceau de fer. 3. (*) Un morceau de fer est collé sur un aimant. On chauffe à l aide d un chalu- 65
4 meau et, à un moment donné, le fer se décolle : que s est-il passé? 4. (*) Un aimant est simplement un matériau ferromagnétique pour lequel les différents domaines de Weiss possèdent des moments magnétiques alignés. Un aimant possède donc un moment magnétique permanent. (a) Que se passe-t-il si l on coupe un aimant en deux? (b) Y a-t-il des différences entre les propriétés magnétiques d un aimant et celles d un circuit électrique ayant le même moment magnétique? 5. (*) Donner une méthode simple (par chauffage et refroidissement) de fabrication d un aimant. 6. Expliquer pourquoi on retrouve de petits aimants dans la lave des volcans. Expliquer comment on a pu grâce à cela prouver que les continents dérivent et reconstituer le cheminement des plaques tectoniques au cours des dernières centaines de millions d années (c est le paléomagnétisme ). 7. (*) On approche un noyau de fer près d un solénoïde dans lequel on fait circuler un courant. Que se passe-t-il? 8. (*) Quel est l intérêt de mettre un noyau de fer à l intérieur d un solénoïde? On pourra en particuler comparer l auto-inductance du solénoïde avant et après avoir inséré le noyau de fer. De manière générale, on peut montrer que dans un matériau magnétique, tout se passe comme si la perméabilité du vide µ 0 était remplacée par µ 0 µ r. Noter que cette règle simple n est valable qu avec la définition un peu compliquée de µ r dans l équation (70). 9. Expliquer une méthode simple, utilisant de la limaille de fer, qui permet de visualiser les lignes du champ magnétique. 10. (*) On considère un matériau ferromagnétique, de magnétisation initiale nulle. (a) On plonge le matériau dans un champ magnétique extérieur B = B u z. Tracer l allure de la courbe donnant la magnétisation I = I u z en fonction de B, lorsque B varie de 0 à B max > 0 (courbe de première aimantation). (b) On se met ensuite à diminuer B. Tracer l aimantation en fonction de B. Que vaut l aimantation lorsque B = 0? On continue à diminuer B de 0 à B min, jusqu à inverser le sens de la magnétisation et au-delà. On refait ensuite augmenter B jusqu à B max et on recommence le cycle plusieurs fois. Tracer l aimantation en fonction de B le long du cycle (appelé cycle d hystérésis). 66
5 (c) Dans un ferromagnétique, suffit-il de connaître le champ magnétique pour en déduire l aimantation? (d) Expliquer comment le cycle d hystérésis peut être utilisé pour désaimanter très rapidement un aimant (c est le procédé utilisé dans les bibliothèques ou les magasins pour que les articles emportés ne sonnent pas aux portillons anti-vol). 67
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