Le contexte. Le déclic. Témoignage de Bertrand DAUZAT, Domaine du Castillet
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- Mauricette Forget
- il y a 7 ans
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1 Le contexte Après une activité de commercial dans l agroalimentaire tout en restant impliqué dans le domaine alors constitué de 5 hectares de vignes et 24 hectares en grandes cultures, Bertrand Dauzat s installe à temps complet sur l exploitation familiale en En 2015, 10 hectares de vignes supplémentaires (plantation et location), portent la surface viticole à 15 hectares. Si Bertrand Dauzat gère lui-même la partie grandes cultures, c est toutefois vers la viticulture que se porte son principal intérêt. En témoignent les nombreux essais menés par le viticulteur dans ses vignes avec un crédo majeur : la protection des sols et la gestion de l eau. Seul pour gérer l exploitation, de la vigne jusqu à la commercialisation, il est également attentif à maîtriser sa charge de travail. Le déclic C est d abord en grandes cultures que Bertrand Dauzat applique les principes de conservation des sols avec le semis direct, apte à lui faire gagner du temps sur les parcelles éloignées de l exploitation. Puis, convaincu par les résultats économiques et agronomiques, il étend ensuite la technique aux autres cultures (sauf le tournesol, plus délicat à implanter en semis direct). Pour accompagner sa démarche de conservation des sols, il adhère à l association Sol et Eau en Ségala avec un objectif, celui d appliquer aussi les principes d agriculture de conservation dans ses vignes. A l origine de sa réflexion : la nature de ses sols : «Comme mes sols sont superficiels et caillouteux, ils se réchauffent rapidement et s assèchent vite. De plus, gratter le sol augmente le dessèchement, or plus le sol est affiné, plus il tend à se tasser» Avec l adoption (en 2010) de la taille rase mécanique, la gestion des flux hydriques devient un enjeu plus prégnant pour le viticulteur qui ne dispose pas d irrigation sur le domaine. C est donc avec une double attente que Bertrand Dauzat pratique l enherbement dans l inter rang de ses vignes : protéger et structurer les sols, mais aussi conserver leur humidité. Bertrand DAUZAT- M. Gimaret/Solagro Viticulture et grandes cultures 15 ha en vigne et 24 ha en grandes cultures 1 UTH Contexte physique Type de sol : terres argilo-calcaires caillouteuses Contexte de production Grandes cultures : pois de printemps, pois-chiche, colza, blé tendre, féverole, tournesol Rendement des vignes : de 50 à 60 hl/ha (bouteille) à 70 à 110 hl/ha (vrac) Taille rase mécanique sur 15 ha Contexte économique Commercialisation en gros vrac (20%), petit vrac (60%) en bouteilles (20%) Solagro : 75, voie du TOEC - CS Toulouse Cedex 3 Page 1 sur 6
2 Mes pratiques agroécologiques Enherbement de l inter-rang La démarche Bertrand Dauzat vise une couverture quasi permanente des sols dans les inter-rangs des vignes, l un étant semé et l autre enherbé de façon naturelle (couvert spontané). Le trèfle blanc est privilégié dans les couverts semés, associé avec du triticale, de la vesce ou de l avoine. Le couvert est ensuite roulé après sa montée en graine, début juin, pour constituer un paillage protecteur. Plusieurs prérequis sous-tendent la démarche du viticulteur : Le couvert ne doit pas impacter le rendement des vignes L itinéraire technique ne doit pas générer du temps supplémentaire Quant aux attentes vis à vis du couvert, elles sont également de plusieurs ordres : Limiter les risques d érosion du sol ; Réduire les phénomènes de dessèchement du sol ; Améliorer la fertilité du sol (utilisation de légumineuses) ; Enrichir la biodiversité dans les vignes ; Participer à l esthétique des vignes (mélanges d espèces d intérêt visuel). Les savoirs agroécologiques Des enherbements qui privilégient le trèfle blanc Le trèfle blanc est l espèce que Bertrand Dauzat juge la plus adaptée tant à ses attentes qu à ses sols. Semées en pur ou en mélange avec de la vesce et une graminée (triticale ou orge), deux espèces de trèfles sont utilisées pour l enherbement de l inter-rang : le trèfle blanc nain, peu gourmand en eau, est ainsi implanté dans les sols superficiels caillouteux (sols qui se réchauffent vite et pourvus d une faible réserve hydrique), tandis que le trèfle blanc géant est réservé aux sols plus profonds. Trèfle blanc géant M. Gimaret/Solagro Trèfle blanc nain M. Gimaret/Solagro Solagro : 75, voie du TOEC - CS Toulouse Cedex 3 Page 2 sur 6
3 Une espèce de trèfle pour chaque type de sol : Type d enherbement Type de sol Intérêts communs Particularités Trèfle blanc nain Trèfle blanc géant Sols superficiels, caillouteux Terreforts, sols plus profonds bon effet paillage facilité d implantation plante autonome en azote permettant de réduire les apports d azote plante pérenne nécessitant peu d entretien (pas de tonte) faibles besoins en eau enracinement superficiel tapis racinaire agressif et concurrentiel pour les adventices production importante de biomasse espèce très couvrante qui permet un ressuyage rapide du sol limite : fanage assez rapide Selon Bertrand Dauzat, le trèfle blanc présente plusieurs avantages : il couvre bien le sol (bonne concurrence des adventices, protection du sol) ; comme c est une légumineuse, le trèfle ne concurrence pas la vigne vis à vis de l azote et restitue de l azote dans les sols ; il ne nécessite pas de tonte (peu d entretien donc faible charge de travail) ; c est une plante qu il ne faut renouveler que tous les 4 à 5 ans dans le couvert ; il s adapte bien aux terres séchantes et/ou aide au bon ressuyage des sols : «Un paillage fonctionnera une année sèche comme une année pluvieuse. Je compare souvent le paillage à un parasol ou à un parapluie. Quelles que soient les conditions, il a une fonction de protection du sol.» L enherbement spontané, constitué de luzerne corniculée, orge queue de rat, vesces commune, ray-grass, repousses d avoine se montre également très important pour le viticulteur : «Je m intéresse aux plantes bioindicatrices. En observant ce qui pousse naturellement dans mes sols, je peux être informé de l état de mes terres.» Un rang sur deux est laissé en enherbement spontané. Un essai est en cours en laissant cet enherbement naturel sur tous les interrangs, sur des vignes productives et des vignes qualitatives. Couvert spontané - M. Gimaret/Solagro Solagro : 75, voie du TOEC - CS Toulouse Cedex 3 Page 3 sur 6
4 Favoriser la régénération du couvert Le couvert est implanté dans l inter-rang début octobre après passage d un outil à dent puis un rotavator. Bertrand Dauzat ne réalise pas de tonte, hormis si un salissement trop important gagne le couvert. La première opération n intervient généralement que courant mai pour étêter le couvert : «J ai observé qu une fauche haute du trèfle en première coupe (passage avec le broyeur relevé), relançait la production». Passée cette intervention, le couvert est laissé en place le plus longtemps possible dans la saison. En 2014, le roulage est ainsi intervenu début juin, après sa floraison : «À partir de ce stade, la plante devient ligneuse et se casse facilement. L objectif est de pincer le couvert car une herbe pincée ne repousse pas, alors qu une herbe fauchée repousse» Autre avantage de laisser le trèfle monter en graine, celui de bénéficier d un ressemis : les graines tombent au sol suite au passage du rouleau, puis un passage de herse étrille permet de favoriser leur implantation. En résumé : Période Interventions culturales Outil Début octobre (tous les 4 à 5 ans, lors de la première implantation) Octobre (après les vendanges) Préparation du sol Semis d un couvert de trèfle blanc (4 à 5 kg / ha) en inter-rang Passage dans l inter-rang en enherbement spontané pour casser la semelle due au passage des machines Outil à dent puis rotavator Semoir à disque Outil à dent Mai Etêter le couvert pour dynamiser le peuplement Broyeur relevé Mai Deuxième passage dans l inter-rang en enherbement spontané pour aérer le sol Outil à dent Début juin Roulage après la montée en graine Rouleau Faca, puis herse étrille Une autre gestion des apports d engrais Pour se calquer au plus près des besoins de la vigne, Bertrand Dauzat n apporte de l azote qu à partir de la floraison. Les apports sont alors réalisés en pulvérisation foliaire avec de l urée diluée dans de l eau (0,6 kg dans 100 litres/ha). Des apports localisés sur le rang travaillé sont réalisés au mois de mars dans les vignes productives avec 200 kg de pour éviter le phénomène de «faim d azote» lors de la minéralisation des sarments (mobilisation d azote par les sarments lors de leur décomposition). Un essai sans azote à été réalisé cette année sur certaines vignes afin de pouvoir estimer les effets du trèfle blanc : «J observe une bonne vigueur de la vigne sur ces parcelles. Elles ne présentent pour l instant aucune différence avec les parcelles fertilisées.» Solagro : 75, voie du TOEC - CS Toulouse Cedex 3 Page 4 sur 6
5 Difficultés et pistes de réflexion Après un recul de 5 ans d implantation de couverts, Bertrand Dauzat se montre satisfait de la technique : «Je vois vraiment la différence. Je suis convaincu que mon sol est plus vivant.» Il observe un réchauffement moins rapide des sols, et une humidité bien conservée sous le paillage. Il espère également mesurer une amélioration des teneurs en matière organique. Une analyse de sol réalisée en 2014 sur l horizon superficiel a révélé un taux de matière organique de 3,2. Le viticulteur prévoit de réaliser de nouvelles analyses d ici 3 ans. Si les résultats sont globalement positifs, quelques incidents ont néanmoins causé des difficultés certaines années : «Une année les trèfles ont gelé, une autre les trèfles ont été attaqués par les escargots au semis», rapporte Bertrand Dauzat. Le viticulteur a également constaté que l implantation du trèfle pouvait se montrer délicate : «Un grattage superficiel avant semis permet d obtenir des levées plus régulières.» Bertrand Dauzat a en projet de nouvelles associations. Il expérimente ainsi un couvert de vesce/avoine. L avoine sert de «tuteur» pour la vesce rampante. Elle se montre également intéressante pour ses propriétés phytotoxiques contre le chiendent. La vesce fournit quant à elle l azote. «La complémentarité entre les deux systèmes racinaires est intéressante, mais l avoine présente une concurrence plus marquée avec la vigne.» Un projet, encore non testé, consisterait à compartimenter le semoir pour implanter une légumineuse au milieu de l inter-rang, et des plantes «tuteurs» de type triticale, avoine, sarrasin sur chacun des côtés afin de bien maintenir le couvert. L ajout de disques trancheurs sur les extrémités du rouleau Faca est également envisagé pour bien délimiter le couvert. Le semis direct du couvert fait aussi partie des évolutions envisagées. Intérêts du point de vue de l agriculteur Economiques Agronomiques Environnementaux réduction des apports d azote maîtrise des coûts d implantation du couvert réchauffement moins rapide du sol Amélioration de la vie du sol Humidité du sol conservée en période estivale Meilleure structure du sol Meilleures gestion des flux d azote Plus de biodiversité dans les vignes Social : moins de temps de travail Solagro : 75, voie du TOEC - CS Toulouse Cedex 3 Page 5 sur 6
6 Mes recommandations «Avant de se lancer avec les couverts, il faut bien prendre en compte la productivité souhaitée pour ses vignes et les adapter en conséquence. Je suis convaincu de l intérêt du trèfle blanc, que je recommande pour le peu d entretien qu il nécessite et sa durée de vie. Enfin, je conseille de surveiller l enherbement naturel de très près, car le salissement peut aller très vite.» Autres pratiques Epandage de BRF composté sur de très petites surfaces (terres très pauvres et caillouteuses), actuellement en grandes cultures. L objectif est d implanter dans le futur de la vigne sur ces parcelles. Le BRF est pris à Trifyl par le biais de l association Sol et Eau. Traitements herbicides en bas volume, localisés sur le rang. Mes sources Association Sol et Eau en Ségala Lecture de revues spécialisées : La Vigne, Viti Leader Contact N hésitez pas à me contacter! Bernard Dauzat Solagro : 75, voie du TOEC - CS Toulouse Cedex 3 Page 6 sur 6
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