Forum IRC de La Rochelle. L IRC : Vision partagée des acteurs de l écosystème de la jauge COMPTE - RENDU

Transcription

1 Forum IRC de La Rochelle L IRC : Vision partagée des acteurs de l écosystème de la jauge COMPTE - RENDU Le 19 septembre, profitant du week-end du Grand Pavois, l Association Propirc et l UNCL ont organisé à La Rochelle un forum débat sur la situation présente et le futur de la Jauge IRC. Une trentaine de personnes y ont participé, parmi lesquelles des architectes, des jaugeurs, des représentants des chantiers et bien entendu des coureurs. La réunion a été animée par un panel comprenant Philippe Sérénon qui a orienté les débats, Jean-Philippe Cau (Président de Propirc), Jean Sans, Bernard Nivelt, Daniel Andrieu, Gérard Quenot et Jean-Jacques Godet. J. Sans et B. Nivelt ont commencé par rappeler qu il existait deux types de règles : Celles qui, comme l ORC, sont basées sur l évaluation de la vitesse des bateaux (VPP) Celles qui, comme l IRC, permettent de calculer des handicaps pour une large gamme de bateaux. C est bien entendu la seconde catégorie et ses composantes qui nous intéressent. Hormis les discussions sur des points techniques précis qui sont résumées plus loin, l assistance unanime a commenté les constats et remarques suivantes : La règle IRC est devenue difficilement lisible pour le plaisancier moyen pour au moins trois raisons principales : Toute règle sportive, qui plus est pour un sport mécanique, voit son règlement technique s amplifier inexorablement au fil des années. Comme il en est de même des règlements générés par l Autorité Internationale (ISAF), la combinaison des deux entités produit une somme de règlements dont l interprétation devient rapidement affaire de spécialistes et donc éloigne la grande majorité des coureurs. Les règlements nationaux interfèrent avec les jauges et les règlements ISAF et compliquent encore l interprétation. La Règle IRC a donc perdu de sa souplesse, particulièrement en évoluant pour suivre ou poursuivre l architecture et la technologie. La quête d équité entre les bateaux a conduit à inventer le certificat «endorsed» et à combler les lacunes qui apparaissaient, donc à complexifier l IRC et à introduire un sentiment «d élitisme».

2 L aspect technique est certes important mais l environnement dans lequel évoluent bateaux et coureurs l est tout autant et il apparait que l IRC et l environnement des régates n ont pas évolué comme pourrait le souhaiter les compétiteurs. Deux exemples : Tout le monde, pratiquement, possède un Smartphone mais il n est pas possible de s inscrire à une régate en présentant son certificat sur le Smartphone De même il n est pas possible, sauf exception, d émarger depuis son Smartphone. Il semble que les procédures d inscription pourraient être plus commodes et plus rapides et faciliter la vie de propriétaires toujours pressés. Depuis 10 ans, tous les bateaux sont numérisés de la conception à la fabrication et l IRC (comme d autres Jauges) mesure encore, entre autres, la longueur de coque des bateaux! Les plus sévères disent que l IRC s est enfermée dans une sorte de douceur de vivre, et cela avec l assentiment des Clubs. On reproche la répétition des types de parcours (bien que sur ce sujet on constate que tous les goûts sont dans la nature), le faible temps de navigation par rapport au temps passé sur l eau, les retours tardifs le soir qui amputent les discussions d après régate et nuisent à la convivialité des événements. On discerne quand même, après un rejet des «courses de nuit», une remontée d intérêt pour les courses offshore. Le fait que l IRC soit cogérée par l UNCL et le RORC et utilisée par une quarantaine de pays (du Chili au Japon en passant par l Europe, la Russie et le Sud Est Asiatique) oblige à une certaine prudence et rend les évolutions plus complexes à mettre en œuvre. Il faut souvent compter plusieurs années pour qu une modification technique soit appliquée. Le poids de lobbies n est pas négligeable et paradoxalement ce ne sont pas les architectes qui tentent le plus d orienter l IRC mais les Propriétaires «actifs», par leur choix de types de régates. Les participants au Forum ont aussi recommandé d écrire des articles dans Seahorse ou Scuttlebutt qui sont des médias très consultés dans le monde anglo-saxon et peuvent être des vecteurs actifs de notre lobbying. En synthèse : La Règle IRC est bonne dans l ensemble car les acteurs reconnaissent qu elle : Protège la valeur patrimoniale du bateau Est sportivement équitable Est orientée haut niveau Par contre par certaines décisions ou non-décisions sa perception devient plus floue ou même carrément mauvaise.

3 Dans des pays où cohabitent plusieurs jauges, on constate depuis quelques années une diminution du nombre de «Bateaux IRC» et du nombre de bateaux-départs sur les courses dont la notoriété n est pas de tout premier plan. Pour remédier à cette décroissance, les organisateurs «ratissent» plus large en ouvrant leurs épreuves à plusieurs jauges ou classes ; il s ensuit un éclatement de la flotte en un grand nombre de catégories et des difficultés pour obtenir des classements significatifs. Paradoxalement, on constate aussi que le nombre de courses (ou de projets de courses) augmente, ce qui contribue aussi à la dispersion des bateaux-départs. Aucun propriétaire ne peut naviguer tous les WE, convoyer son bateau... Sur chaque façade, il faut faire un choix. Pour maintenir attractives des épreuves en décroissance, il faut trouver des solutions pour : Reconquérir les propriétaires anciens qui ont migré vers des environnements qu ils estiment plus simples, moins chers et plus valorisants. Amener de nouveaux propriétaires vers l'irc. Cela suppose aussi d attirer une population plus jeune qui pratique majoritairement les classes monotypes ou plus fun. Rendre l obtention d un certificat plus facile. Réduire la tâche du propriétaire au strict nécessaire. Aujourd hui la demande de certificat doit être accompagnée d un formulaire rempli. C est un travail que le propriétaire effectue en recopiant des données numériques du constructeur! Il serait plus simple que les Jauges s accordent pour lister 5 ou 6 documents numériques (datas, plans) qui rassemblent tous les paramètres nécessaires et que ces 5 ou 6 documents soient mutualisés. Rendre l utilisation de la jauge plus simple en faisant sauter des contraintes sur le nombre d équipiers par exemple. Tout le monde constate le succès des courses en double Le RORC prône des campagnes publicitaires dans les clubs afin de faire connaître l IRC. On pense que les Clubs connaissent l existence de l IRC, mais qu ils n adhèrent plus à son concept car ils ne se sentent pas impliqués dans ses orientations. On est en train de perdre les «cruiser racer». Ce segment de propriétaires privilégie les solutions simples, souhaite une navigation ludique, fût-elle en régate. Existe-t-il un Bateau IRC? Sur ce sujet les architectes ont été très questionnés. Il ressort de 20 minutes d échanges quelques idées générales : Les architectes anglais favoriseraient la stabilité de poids d équipage (bateaux plutôt légers, bulbes profonds) alors que les architectes français optent plutôt pour une stabilité de forme. Les bateaux français sont plus polyvalents. Les coureurs anglais cherchent à de la performance (par exemple en augmentant la surface de voile) alors que les français vont chercher à optimiser leur TCC en cherchant à le baisser.

4 Fastnet et Commodores Cup : C est un sujet qui a passionné l assistance. Pourquoi les Français qui gagnent tout au Fastnet n arrivent pas à gagner la CCup? Y a-t-il des bateaux typés Fastnet et d autres CCup? Ces épreuves sont-elles favorables aux bateaux légers? Aux bateaux lourds? Bien entendu, personne n a de réponse catégorique à ces questions mais sont apparus quelques consensus : Les types de navigation sont différents. La CCup est une course d équipe dans laquelle les gros bateaux sont plutôt favorisés (départ commun pour grands et petits bateaux). Les Anglais ont plutôt de gros bateaux alors que la moyenne des bateaux français se situe vers pieds. Il est plus facile de se démarquer dans une course en flotte de 3 4 jours. Les Anglais sont mieux habitués à la course d équipe et les Français pêchent sur ce point. Les Anglais favorisent les bateaux à stabilité de poids d où le nombre d équipiers. Ces bateaux sont plus performants que les bateaux français - à stabilité de forme - si on est dessus en permanence : ça fonctionne pour les courses courtes comme dans la CCup où la concentration est de tous les instants mais à l inverse les bateaux français sont plus tolérants sur les courses longues où l attention se relâche inévitablement. Géry Trenteseaux lui, réussit à combiner bateaux stables et équipage exceptionnel pour une concentration en continu, ce qui explique en partie ses victoires éclatantes. Dans les bateaux français de taille moyenne, on constate que se forment des flottes (JPK9.60 ou 10.10, A35, ) qui naviguent ensemble et qui tirent le niveau vers le haut. Les équipages progressent Dans les courses du RORC ou dans le Fastnet, d une année sur l autre, on retrouve les mêmes bateaux et propriétaires. Là aussi source de progression pour les équipages amateurs Importance du poids de l équipage J. Sans et JP Cau ont longuement expliqué la lourdeur des institutions mises en place avec le RORC pour faire évoluer la règle actuelle, le RORC ayant montré dans les CCUP qu il était le premier à contourner les règles qu on le «forçait» à édicter. Les points à retenir sont les suivants : Aujourd hui, le nombre d équipiers porté sur le certificat IRC ne dépend que de la longueur de coque. Le poids de l équipage étant un élément de performance important dans certaines conditions de mer et de vent il est souhaitable que ce poids soit cohérent avec l architecture globale du bateau. En ORC le TCC est fonction du poids de l équipage. La notion de poids limite véhicule l idée qu il faut contrôler ce poids limite comme on le fait (ou faisait) sur certaines classes de bateaux. Rien n oblige à contrôler tous les bateaux ; on ne contrôle pas tous les ronds de chute des GV! La jauge est basée sur les déclarations des propriétaires qu il faut continuer à considérer comme reflétant la vérité. Ceci justifiant aussi un contrôle adéquat dans les épreuves de haut niveau (la Copa del Rey a été cité en exemple avec des bateaux pesés la nuit entre deux épreuves!). Le Comité Technique travaille à une proposition en ce sens ; reste à faire passer le message.

5 Les facteurs sociétaux : S il y a une baisse relative des certificats IRC, cela ne signifie pas pour autant une baisse de «part de marché» car l ensemble des régates voit une désaffection qui reflète une baisse de l attractivité des régates et courses au large. Plusieurs facteurs exogènes et endogènes sont évoqués : Le facteur temps : le temps est de plus en plus rare, précieux et cher. Pour ce qui concerne les jeunes, le temps consommé par le numérique (internet, Réseaux sociaux) est considérable et concurrence le temps consacré à la vie concrète. Un hobby onéreux : coût des bateaux et de tout l environnement de course : équipement, préparation, équipage, transport ou convoyage, port et éventuellement inscriptions Un niveau de vie moyen qui s obtient maintenant beaucoup plus tard qu il y a 10 ans, et le renversement de cette tendance n est pas imminent. Les priorités socio-économiques du moment : garder son job, acheter son logement La pression sur la classe moyenne Des courses trop «sportivo-techniques» et pas assez ludiques / sociales : le succès du tour de Belle île, du Tourduf, des voiles de Saint-Tropez, de la semaine de Porquerolles ou la SNIM en attestent, à contrario du Spi Ouest devenu «business as usual» alors que c est la grande course du début de saison. Comment? Moins de temps d attente sur l eau au profit de plus de temps de partage à terre Un financement de plus en plus difficile des courses (baisse des subventions publiques, niveau d exigence des sponsors privés) Le management des clubs plus ou moins dynamiques et ouverts notamment aux coureurs qui viennent d ailleurs pour le weekend La baisse du bénévolat qui rend la logistique plus difficile La multiplicité des courses Un sport de moins en moins lisible : trop de formats, pas de hiérarchie claire, pas d identification simple Une population de jeunes (génération Y) plus attirée par le sport-spectacle «Urban/Nature» et fun relayé sur Internet que par le jeu d échec au ralenti de nos courses de racer-cruiser. Toujours ambitieux, les initiateurs du forum avaient prévu des séquences d échanges sur : Les évolutions matérielles déterminantes à attendre dans un proche avenir? Les canting keels et les foils, sans parler du Dynamic Stability System de Hugh Welbourn, vontils arriver sur des cruisers racers? L IRC sait-il les prendre en compte? Quid des foils? Quel rôle l électronique va-t-elle jouer dans l avenir? Afin de diminuer le coût des jauges, ne pourrait-on pas avoir un ensemble de mesures unique utilisable pour toutes les jauges? On constate qu il y a encore un lot de bons sujets pour un prochain forum! Merci à tous les participants pour s être joints à nous et avoir participé activement au débat. Réagissez à ce compte-rendu en postant vos mails à uncl@uncl.com.