Groupe d Epistémologie appliquée et de Clinique Rationnelle des Hôpitaux Publics du Pays de Charleroi
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- Paulette Bergeron
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1 Prévention et traitement de la néphropathie chez le sujet diabétique de type 2 T. RICHARD Groupe d Epistémologie appliquée et de Clinique Rationnelle des Hôpitaux Publics du Pays de Charleroi GERHPAC CHU de Charleroi Mots-clés : glomérulosclérose, néphropathie diabétique SITUATION DU PROBLÈME D ans un article publié en 1936, KIMMELSTIEL et WILSON ont décrit des lésions de type glomérulosclérose à l autopsie de patients diabétiques. 75 ans plus tard, la néphropathie diabétique est l une des principales causes d arrivée en hémodialyse dans la population générale. On considère habituellement que 40% des sujets nouvellement dialysés sont porteurs d un diabète. Cette complication ne concernera toutefois qu une partie des patients diabétiques (environ 20%). Compte tenu de l augmentation de l incidence du diabète dans le monde, un accroissement du nombre de malades est attendu dans les années à venir. La présence d une néphropathie est associée à un risque cardiovasculaire élevé chez sujet diabétique de type 2 : la plupart des patients décèdent de maladie cardiovasculaire avant d arriver au stade de l insuffisance rénale chronique. Lorsqu arrive le stade de l insuffisance rénale terminale, le pronostic de ces patients est extrêmement sombre : 30% des malades décèdent dans les 200 jours et 70% dans les cinq années qui suivent. Ce pronostic est comparable à celui d une néoplasie colique avec envahissement ganglionnaire. L e traitement visera donc à conserver la fonction glomérulaire, mais aussi de réduire le risque de maladies cardiovasculaires de ces malades. RMC
2 Le présent article vise à passer en revue de manière critique les différentes interventions préventives et thérapeutiques de cette maladie. Nous nous limiterons aux études d intervention randomisées d une durée supérieure à un an. HISTOIRE NATURELLE La néphropathie diabétique se caractérise par cinq stades, dont trois seulement sont détectables cliniquement : 1. L hyperfiltration glomérulaire 2. La néphropathie à lésions minimes 3. La néphropathie incipiens (microalbuminurie) 4. La néphropathie avérée (protéinurie) 5. L insuffisance rénale chronique L évolution a lieu généralement sur une période de 10 à 15 ans. Dans le cas particulier du diabète de type 2, le tableau peut être compliqué par l association avec une néphropathie hypertensive (néphroangiosclérose). Comme cité plus haut, le risque de chacun de ces stades n est pas tant celui d une progression inexorable de la néphropathie que celui d un évènement cardiovasculaire. I l existe plusieurs définitions de la microalbuminurie : l American Diabetes Association (ADA) la définit comme une excrétion d albumine entre 30 et 300 mg/g de créatinine. Cette définition n est pas celle rencontrée dans toutes les études d intervention, mais elle présente le double avantage de permettre une mesure ajustée à la créatininurie (donc indépendante de la quantité d eau consommée) et de ne pas nécessiter de collecte d urines de 24 heures. L e stade de la macroalbuminurie correspond à une excrétion de plus de 300 mg/g de créatinine. Il peut éventuellement évoluer vers un syndrome néphrotique avéré (soit une excrétion de plus de 3 g de protéines et une albuminurie inférieure à 3 g), puis à l insuffisance rénale chronique. La présence d une protéinurie est bien corrélée avec le futur déclin du débit de filtration glomérulaire. RMC
3 ETUDES D INTERVENTION INTRODUCTION D e nombreuses études ont porté sur les interventions visant à prévenir ou à traiter la néphropathie diabétique. Dans la plupart de ces études, la survenue ou l aggravation d une néphropathie diabétique n était pas le critère d appréciation principal de l étude : il s agissait d un critère secondaire, au sein d un large critère composite reprenant l ensemble des complications du diabète parfois même les complications macroangiopathiques. Ce résultat est exposé aux problèmes liés aux comparaisons multiples : le risque de voir une différence significative par hasard (erreur alpha) augmente avec le nombre de comparaisons. Lorsque l on analyse ces résultats, il faut donc appliquer une correction au calcul de l erreur alpha, appelée la correction de BONFERRONI : on divise le p nécessaire par le nombre de comparaisons effectuée. ROLE PRÉVENTIF DU CONTRÔLE STRICT DE LA GLYCEMIE C inq études d intervention ont comparé l effet de différents objectifs glycémiques sur la survenue d une néphropathie diabétique. En général, le critère d appréciation était un critère non-clinique, soit la survenue ou l aggravation d une microalbuminurie : peu ont étudié l effet de ce contrôle glycémique sur des critères cliniques, comme l arrivée en hémodialyse ou le décès d origine rénale. Ces études sont rapportées dans le tableau 1. L étude UKPDS, la plus longue et la plus ancienne, portant sur des nouveaux sujets diabétiques, n a pas montré de bénéfice spécifiquement sur ce critère. L étude ADVANCE, plus récente, a montré en revanche un bénéfice lors d un contrôle strict (HbA1c<6,5%) par rapport à un contrôle moins strict (HbA1c<7,5%), avec un NST de 83 pour un suivi moyen de 5 ans, sans effet sur le débit de filtration glomérulaire ou le nombre de patients arrivant en hémodialyse. L étude AC- CORD, publiée la même année, a montré un bénéfice du même ordre, mais au prix d une mortalité totale accrue. L étude VADT n a pas montré de différence significative, compte tenu de la correction de BONFERRONI. RMC
4 TABLEAU 1 Nombre de malades Intervention Contrôle Durée (ans) Effet sur les complications UKPDS % 8% VA ,30% 9,50% 2 - +/- ACCORD ,40% 7,50% Néphropathie ADVAN ,50% 7,30% 3,5 + + (NNT : 83) CE 4 Gliclazide VADT ,90% 8,50% ROLE PRÉVENTIF DU CONTRÔLE STRICT DE LA PRESSION ARTERIELLE L e tableau 2 résume les résultats des études randomisées ayant comparé un contrôle tensionnel strict à un contrôle tensionnel moins strict. L étude UKPDS a comparé un contrôle tensionnel considéré comme strict à l époque (<150/80 mm Hg) à un contrôle moins strict (<180/105 mm Hg). Le contrôle tensionnel a été associé à un bénéfice sur l ensemble des complications du diabète, mais pas en particulier sur la néphropathie. Dans l étude ABCD, chez des patients diabétiques normotendus, l abaissement de la pression artérielle de 10 mm Hg par rapport à la ligne de base a eu un effet sur l apparition ou l aggravation d une albuminurie, mais pas sur le critère d appréciation principal de l étude, qui était le débit de filtration glomérulaire. Dans l étude ACCORD, le contrôle tensionnel strict (TAs<120 mm Hg) n a pas montré de bénéfice comparé à un contrôle tensionnel moins strict (TAs<140mm Hg) TABLEAU 2 Nb patients TA intervention TA contrôle Médicament Durée Effet global Néphropathie UKPDS /82 154/87 Captopril Atenolol ABCD /75 137/81 Nisoldipine (NNT?) Enalapril ACCORD /- 133/- Tous 3,5 - - RMC
5 EFFET PREVENTIF DE L ADMINISTRATION SYSTEMATIQUE D UN IECA I ndépendamment des objectifs tensionnels visés, différentes études ont porté sur l effet spécifique de l administration systématique d un IECA chez tous les patients diabétiques de type 2. Elles sont reprises dans le tableau 3. Dans l étude UKPDS, le traitement intensif par captopril n a pas eu de résultat meilleur que le traitement intensif par atenolol. Dans l étude ADVANCE, l administration systématique d une association fixe de perindopril et d indapamide a eu un effet significatif sur la survenue ou l aggravation d une microalbuminurie. Dans une étude ayant comparé l enalapril au placebo, on a également observé une diminution significative de l apparition des néphropathies. TABLEAU 3 Nombre de patients Traitement Contrôle Durée Effet global UKPDS Captopril Atenolol 10 ans - - Effet sur la néphropathie ADVANCE Perindoprilindapamide Placebo 5 ans + + (NNT : 21) Enalapril Placebo 6 ans + + (NNT : 8) EFFET PREVENTIF DU FENOFIBRATE TABLEAU 4 Nb patients Durée (ans) Effet global Effet sur la néphropathie FIELD (NNT : 40) ACCORD ? RMC
6 RÔLE DE L ADMINISTRATION D UN IECA AU STADE DE LA MICROALBUMINURIE P lusieurs études ont cherché à démontrer l utilité d un traitement par IECA ou d un inhibiteur de l angiotensine 2 une fois la néphropathie détectée. Elles sont rassemblées dans le tableau 5. On y observe que l enalapril et l irbesartan sont supérieurs au placebo en termes de conversion vers une macroalbuminurie et (en général) de conservation de la clairance en créatinine. L étude ayant comparé l enalapril à la nifedipine n a pas mis en évidence de différence entre ces deux traitements. Dans l étude HOPE, le ramipril s est montré supérieur au placebo en termes de prévention cardiovasculaire, mais pas en termes de protection de la fonction rénale (P=0,03, non-significatif pour un critère secondaire). TABLEAU 5 Nb patients Traitement contrôle Durée (ans) Effet sur l albuminurie Effet sur la clairance Enalapril Placebo Enalapril Placebo 5 + (NNT : 6) Enalapril Nifedipine Irbesartan Placebo 5 + (NNT : 9)? HOPE Ramipril Placebo 4,5 - - RÔLE DES INHIBITEURS DE L ANGIOTENSINE II AU STADE DE LA MACROALBUMINURIE L e tableau 6 reprend ces études. Celles-ci montrent que la prescription d un traitement par losartan ou irbesartan diminue le risque de doublement de la créatinine sérique ou d arrivée en hémodialyse chez des patients macroalbuminurique, dont la plupart étaient déjà en insuffisance rénale lors de l inclusion. RMC
7 TABLEAU 6 Nb patients Traitement Contrôle Durée Effet sur le doublement de la créatinine Effet sur l arrivée en dialyse RENAAL Losartan Placebo 3,5 + (NNT : 22) + (NNT : 17) IDNT Irbesartan Amlodipine 2,6 + (NT : 12) - Placebo EFFET DE LA VITAMINE B A FORTE DOSE U n seul essai clinique a étudié l effet de l administration de vitamine B à forte dose chez des patients porteur d une néphropathie diabétique. Cet effet est apparu comme défavorable 19. CONCLUSION L a néphropathie est une affection grave, fréquente, dépistable via un test simple peu coûteux et pour laquelle, il existe une traitement spécifique. Les mesures préventives sont relativement peu efficaces. Le rôle du contrôle glycémique strict, semble assez faible, le contrôle tensionnel également. Il est possible que l administration systématique d un inhibiteur de l enzyme de conversion et/ou d un thiazidique apporte un bénéfice. Le bénéfice d un traitement systématique par fénofibrate est possible mais nécessite des investigations complémentaires. Une fois la néphropathie installée, les traitements sont relativement efficaces. Les IECA et les inhibiteurs de l angiotensine II sont les médicaments les mieux étudiés à ce stade. Il n est pas certain qu ils soient réellement plus efficaces que les autres antihypertenseurs en termes de protection rénale. Ils semblent en revanche plus efficaces pour la prévention cardiovasculaire globale. Au stade de la macroalbuminurie, les sartans sont les produits de premier choix : ils sont validés sur des critères cliniques comme l arrivée en hémodialyse. L UTILISATION DE VITAMINE B À FORTE DOSE EST À BANNIR RMC
8 RÉFÉRENCES : 1. Lancet 1998; 352: Diabetes Care 2000;23: , 3. NEJM 2008;358: NEJM 2008;358: NEJM 2009;360: BMJ 1998;317: Kidney International 2002;61: BMJ 1998;317: Lancet 2007;370: Ann Intern Med. 1998;128: Lancet 2005; 366: NEJM 2010;362: Annals of Internal Medicine. 1993;118: Diabetes care 1997;20(10): Diabetes Res Clin Pract2001;54: NEJM 2001;345-12: NEJM 2001;345-12: NEJM 2001;345: JAMA. 2010;303(16): Lancet.2000 Jan 22;355(9200):253-9 RMC
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