LA CONSTRUCTION DU CONCEPT DE NOMBRE CHEZ UN ENFANT AYANT REÇU UN DIAGNOSTIC D AUTISME

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1 LA CONSTRUCTION DU CONCEPT DE NOMBRE CHEZ UN ENFANT AYANT REÇU UN DIAGNOSTIC D AUTISME Mémoire Isabelle Malouin Maîtrise en psychopédagogie adaptation scolaire Maître ès arts (M.A.) Québec, Canada Isabelle Malouin, 2014

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5 RÉSUMÉ Le présent projet de recherche vise à décrire les progrès réalisés, par un élève autiste, dans l apprentissage du concept de nombre en travaillant dans une pédagogie développementale basée sur le jeu. On cherche à vérifier s il est possible de soutenir la construction du concept de nombre chez les enfants ayant reçu un diagnostic d autisme sans utiliser les méthodes béhavioristes habituelles, comme A.B.A. et T.E.A.C.C.H., mais plutôt en mettant en place un projet d intervention pédagogique basé sur la littératie et le jeu. Pour ce faire, une expérimentation a été réalisée auprès d un enfant autiste de 10 ans, à raison de 3 heures par jour, pendant deux années scolaires, pour travailler, entre autres, la construction du concept de nombre. La cueillette de données consiste en quatre entrevues semi-dirigées portant sur des tâches mathématiques liées à la construction du nombre, entrevues réalisées sur ces deux années pour vérifier l évolution de la compréhension de l aspect ordinal et de l aspect cardinal du nombre chez l enfant. Les résultats indiquent, au terme de ces deux années d intervention, que l enfant a progressé au niveau de sa représentation du nombre. iii

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7 TABLE DES MATIÈRES RÉSUMÉ... iii TABLE DES MATIÈRES... v LISTE DES TABLEAUX... ix LISTE DES FIGURES... xi AVANT-PROPOS... xiii INTRODUCTION Problématique L autisme La scolarisation des enfants autistes La méthode A.B.A La méthode T.E.A.C.C.H Les contextes d intervention privilégiés pour travailler le nombre Cadre théorique L abstraction Le nombre Aspect ordinal Aspect cardinal Opérations à construire La correspondance terme à terme La conservation Le comptage Autre procédure possible et difficultés reconnues Question générale Approche d intervention pédagogique Idées maîtresses d une approche développementale La complexité de la tâche Le sens des erreurs La zone proximale de développement Projet pédagogique d ensemble Contextes mathématiques aux fins du mémoire Le calendrier v

8 Les jeux de règles Jeu de Cher Ours polaire Autres jeux pour favoriser la construction du concept de nombre Méthodologie But et objectifs de la recherche Type d étude Sujet Modalités et temps d intervention Collecte de données Protocole d entrevue semi-dirigée Description des items du protocole d entrevue Items portant sur l aspect ordinal du nombre Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes Item 2 : Sériation d objets faisant une course Items portant sur l aspect cardinal du nombre Item 1 : Comparaison de collections d objets identiques (correspondance terme à terme) Item 2 : Comparaison de collections d objets différents (correspondance terme à terme) Item 3 : Conservation de quantités continues Item 4 : Conservation de quantités discontinues Item 5 : Comptage Item 6 : Cardinalité Plan d analyse des données Analyses des résultats Évaluation 1 : Octobre Items vérifiant la compréhension de l aspect ordinal du nombre Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes Item 2 : Sériation d objets faisant une course Items vérifiant la compréhension de l aspect cardinal du nombre Item 1 : Comparaison de collections (correspondance terme à terme) Item 2 : Conservation de quantités continues Item 3 : Conservation de quantités discontinues Item 4 : Comptage vi

9 Item 5 : Cardinalité Synthèse de la compréhension de l enfant en octobre Évaluation 2 : Mai Items vérifiant la compréhension de l aspect ordinal du nombre Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes Item 2 : Sériation d objets faisant une course Items vérifiant la compréhension de l aspect cardinal Item 1 : Comparaison de collections d objets identiques (correspondance terme à terme) Item 2 : Conservation de quantités continues Item 3 : Conservation de quantités discontinues Item 4 : Comptage Item 5 : Cardinalité Synthèse de la compréhension de l enfant en mai Évaluation 3 : Février Items vérifiant la compréhension de l aspect ordinal du nombre Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes Item 2 : Sériation d objets faisant une course Items vérifiant la compréhension de l aspect cardinal du nombre Item 1 : Comparaison de collections d objets identiques (correspondance terme à terme) Item 2 : Comparaison de collections d objets différents (correspondance terme à terme) Item 3 : Conservation de quantités continues Item 4 : Conservation de quantités discontinues Item 5 : Comptage Item 6 : Cardinalité Synthèse de la compréhension de l enfant en février Évaluation 4 : Juillet Items vérifiant la compréhension de l aspect ordinal du nombre Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes Item 2 : Sériation d objets faisant une course Items vérifiant la compréhension de l aspect cardinal du nombre vii

10 Item 1 : Comparaison de collections d objets identiques (correspondance terme à terme) Item 2 : Comparaison de collections d objets différents (correspondance terme à terme) Item 3 : Conservation de quantités continues Item 4 : Conservation de quantités discontinues Item 5 : Comptage Item 6 : Cardinalité Synthèse de la compréhension de l enfant en juillet Discussion Synthèse des résultats Sériation Correspondance terme à terme Conservation Comptage Cardinalité Les implications pédagogiques Les limites de l étude Avenues prospectives CONCLUSION RÉFÉRENCES ANNEXES viii

11 LISTE DES TABLEAUX Tableau 1 Organisation de la collection 31 Tableau 2 Limite de la reconnaissance visuelle.. 32 Tableau 3 Problème lors de regroupements Tableau 4 Exemple de matériel utilisé pour faire un calendrier Tableau 5 Utilisation de divers jeux de règles commerciaux. 46 Tableau 6 Données collectées Tableau 7 Synthèse de la progression de l enfant ix

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13 LISTE DES FIGURES Figure 1 Schéma conceptuel de l émergence de la construction du nombre. 9 Figure 2 Relation inclusive des nombres jusqu à Figure 3 Collections de jetons éparpillés Figure 4 Utilisation de la correspondance terme à terme pour comparer deux collections 19 Figure 5 Item de conservation des quantités continues Figure 6 Collection initiale de jetons Figure 7 Collection de jetons modifiée une première fois. 24 Figure 8 Collection de jetons modifiée une deuxième fois Figure 9 Présentation des jetons par l expérimentateur. 31 Figure 10 Échec à la reproduction d une rangée-modèle 34 Figure 11 Plateau du jeu Cher Ours polaire.. 44 Figure 12 Sériation de cinq pailles réalisée en octobre Figure 13 Droites de projection imaginée ajoutées sur la sériation de cinq pailles Figure 14 Ordre des voitures faisant la course 67 Figure 15 Comparaison de collections inégales de jetons Figure 16 Comparaison de collections inégales de jetons après déplacement en octobre Figure 17 Première transformation effectuée avec la pâte à modeler Figure 18 Deuxième transformation effectuée avec la pâte à modeler Figure 19 Troisième transformation effectuée avec la pâte à modeler 74 Figure 20 Rangée d'images présentée à l'enfant lors de l'item Figure 21 Construction d'une rangée équivalente en octobre Figure 22 Disposition des rangées pour la comparaison de collections et pour la conservation des quantités discontinues en octobre Figure 23 Première disposition de jetons à dénombrer Figure 24 Seconde disposition de jetons à dénombrer 85 Figure 25 Troisième disposition de jetons à dénombrer.. 87 xi

14 Figure 26 Sériation de pailles réalisée en mai Figure 27 Déplacement des collections inégales en mai Figure 28 Construction d'une rangée équivalente en mai Figure 29 Disposition des rangées pour la comparaison de collections et pour la conservation des quantités discontinues en mai Figure 30 Seconde disposition de jetons à dénombrer en mai Figure 31 Sériation de cartons réalisée en février Figure 32 Alignement des coureurs en février Figure 33 Figure 34 Figure 35 Comparaison de collections inégales d'objets identiques présentées à l'enfant en février Comparaison de collections égales d'objets identiques présentées à l'enfant en février Comparaison de collections égales réduites d'objets identiques présentées à l'enfant en février Figure 36 Comparaison de collections d'objets différents en février Figure 37 Rangée d'images présentée à l'enfant en février Figure 38 Construction d'une rangée équivalente en février Figure 39 Modification des rangées en conservation des quantités discontinues en février Figure 40 Présentation d'une rangée de bâtonnets à l'enfant Figure 41 Modification de la rangée de bâtonnets Figure 42 Cinq dames à habiller Figure 43 Sériation de cartons réalisée en juillet Figure 44 Alignement des coureurs en juillet Figure 45 Figure 46 Comparaison de collections inégales d'objets identiques présentées à l'enfant en juillet Comparaison de collections égales d'objets identiques présentées à l'enfant en juillet Figure 47 Comparaison de collections d'objets différents en juillet Figure 48 Rangée d'images présentée à l'enfant en juillet Figure 49 Construction d'une rangée équivalente en juillet xii

15 AVANT-PROPOS Tout d abord, je voudrais remercier ma petite Marianne et sa famille d être passées dans ma vie. Merci à vous, chers parents, de m avoir confiée ce que vous aviez de plus précieux. Je voudrais exprimer ma profonde gratitude envers ma directrice de recherche, madame Hélène Makdissi, pour la confiance qu elle a su me témoigner et pour m avoir confié un projet de recherche si gratifiant! Merci Hélène de m avoir permis de réfléchir tout haut avec toi, pour tes clins d œil, pour nos discussions ô combien formatrices, pour ton implication et ton soutien sans borne, pour ton temps et pour la qualité de tes commentaires et de tes conseils. Même si parfois j étais découragée devant leur ampleur, ils m ont aidée à progresser et à devenir une meilleure intervenante. Je tiens à remercier ma codirectrice, madame Izabella Oliveira. Muito obrigado! Vous avez réussi à convertir une linguiste et m avez redonné le goût des mathématiques, ce n est pas rien! Merci également à madame Andrée Boisclair d avoir bien voulu réfléchir avec nous et d avoir accepté de corriger ce mémoire. À mes amies et collègues de bureau, Alice, Camille, Claudia et Marie-Pierre, merci pour les dîners divertissants et pour vos conseils. Un merci particulier à Marie-Pierre et Claudia de m avoir soutenue et rassurée, soit pendant l année d intervention ou pendant celle de rédaction. Merci à mon amie, linguiste et future orthophoniste, Marie-Hélène, pour les périodes de détente et de loisir qui étaient nécessaires pour survivre à ce processus si intense que nous vivions, chacune dans notre pavillon. Je n aurais pu mener ce projet à terme sans le soutien de mes parents, Céline et Marc, et de mon frère, Sébastien. Je sais que l aboutissement de mon projet vous tenait profondément à cœur et vous m avez toujours démontré que vous croyiez en moi, même quand je ne le faisais plus. À ma famille, merci d avoir compris la distance et le temps nécessaire à l atteinte de mes rêves. Finalement, à celui qui partage ma vie, David, je veux te remercier pour tes encouragements, ton objectivité, ta compréhension, ton soutien et ton amour lors de ce long processus. xiii

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17 INTRODUCTION Au Québec, les méthodes favorisées dans les écoles pour travailler avec les élèves autistes sont les méthodes A.B.A. ( Applied Behavioral Analysis ) et T.E.A.C.C.H. ( Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped CHildren ) (Lovaas, 1987; Lovaas, Freitas, Nelson & Whalen, 1974; Rogers, 1998; Schopler, Brehm, Kinsbourne et Reichler, 1971; Schopler, Reichler & Lansing, 1988). Ces deux méthodes sont très inspirées du courant béhavioriste de la psychologie qui est basé sur un système de récompenses et de punitions. Toutefois, plusieurs apprentissages scolaires, comme celui du concept de nombre, ne peuvent se réduire à de telles associations de réponses attendues par autrui. En effet, la construction du nombre et les opérations qui y sont inhérentes prennent beaucoup de temps et d effort. Il faut plusieurs années pour que les élèves puissent bien comprendre le système numérique et faire des opérations sur les nombres qui le composent (ministère de l Éducation du Québec, 2001). Le présent projet de recherche consiste en une étude de cas menée avec une enfant autiste de 10 ans qui a été suivie en intervention individuelle, trois heures par jour, sur une période de deux années scolaires. L objectif général de la présente étude est de décrire les progrès réalisés, par un élève autiste, dans l apprentissage du concept de nombre en travaillant les notions mathématiques par une pédagogie développementale basée sur le jeu. Le mémoire comprend un premier chapitre qui dresse la problématique à laquelle ces enfants sont exposés lors de leur scolarisation. Le deuxième chapitre, le cadre théorique, permet de comprendre les concepts clés impliqués dans l émergence et dans la construction du concept de nombre chez un enfant. Dans le troisième chapitre, l approche d intervention pédagogique mise en place pendant ces deux années sera explicitée. Le quatrième chapitre abordera la méthodologie qui a été utilisée dans le cadre de cette recherche. Le cinquième chapitre présentera les analyses des résultats à partir des données recueillies lors de cette étude. Et, finalement, le sixième chapitre comportera une discussion générale sur l ensemble des résultats observés, au regard d autres études sur la construction du nombre présentes dans la littérature. 1

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19 1. Problématique Ce chapitre tentera d expliciter ce qu est l autisme, de décrire les principales modalités d intervention reconnues pour la scolarisation des enfants autistes (qui se basent principalement sur les méthodes A.B.A. et T.E.A.C.C.H.) en les mettant en tension par rapport aux contextes d interventions qui sont privilégiés pour travailler le nombre avec les enfants L autisme Vers la fin des années 1930, Leo Kanner, pédopsychiatre de formation, s intéressa à 11 enfants qui présentaient des caractéristiques communes, en souffrant toutefois de troubles non répertoriés. En 1943, au terme de 8 années de recherche auprès de ces enfants, il dressa le tableau clinique de «l autisme infantile précoce». À l époque, l autisme tel que défini par Kanner était considéré comme une psychose, au même titre que la schizophrénie (Ferrari, 1999). Les enfants observés par Kanner avaient principalement deux choses en commun : l isolement de l enfant (appelé aloneness) et son désir d immuabilité, son intolérance aux changements (ou sameness) (Kanner, 1943; Lenoir, Malvy & Bodier- Rethore, 2007). Depuis ce temps, un manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux a été créé par l American Psychiatric Association comme ouvrage de référence afin de classifier et de catégoriser les critères diagnostiques des troubles mentaux spécifiques. À travers les diverses éditions du Diagnostic and Statistical Manuel of Mental Disorders (DSM), l autisme, tel que décrit par Kanner, a été catégorisé de plusieurs façons. Dans les deux premières versions (DSM-I et DSM-II) parues respectivement en 1952 et 1968, l autisme était considéré comme une réaction schizophrénique de type infantile (Chamak, 2010; Habimana, Éthier, Petot & Tousignant, 1999). Par contre, dès la troisième édition, l appellation de «troubles envahissants du développement» est utilisée au lieu de psychose 3

20 (American Psychiatric Association, 1989, 2003). En effet, lors des années 1980, on réalise qu il ne s agit pas d un trouble infantile, mais bien d un dérèglement du développement, d où la raison pour laquelle ce trouble est décelé pendant l enfance (Frith, 1996). En général, les enfants atteints d un trouble envahissant du développement dans la lignée de l autisme présentent des déficits dans trois domaines en particulier : une altération qualitative des interactions sociales, une altération qualitative de la communication et un caractère restreint, répétitif et stéréotypé des comportements, des intérêts et des activités (American Psychiatric Association, 2003; Habimana, Éthier, Petot & Tousignant, 1999). Comme le développement de ces enfants peut sembler différent de celui des enfants toutvenant en ce qu il présente un écart par rapport à une norme établie, certaines mesures d intervention ont été conçues dans une optique behavioriste pour favoriser leur acquisition d autonomie 1. À cet effet, plusieurs thérapies et méthodes de prise en charge des enfants autistes ont été élaborées, dont les méthodes A.B.A. (Applied Behavioral Analysis) et T.E.A.C.C.H. (Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped CHildren) (Ferrari, 1999; Lenoir, Malvy & Bodier-Rethore, 2007; Rogers, 1998) La scolarisation des enfants autistes Au Québec, au tournant des années 90, le ministère de l Éducation a changé sa vision de la scolarité que doivent recevoir les enfants ayant un trouble autistique (Maertens, 2004; MELS, 2007; MEQ, 1999; Saint-Laurent, 2008). Si auparavant ces enfants devaient être placés dans des classes spécialisées ou même dans des écoles particulières, on prône depuis de plus en plus l inclusion scolaire pour la majorité des élèves dits à risque (c est-à-dire 1 Le développement des enfants atteints d un trouble autistique est considéré comme différent par les spécialistes qui mettent en place des méthodes béhavioristes d intervention. Ces dernières seront explicitées plus loin. Par contre, comme il sera possible de le constater à la lecture de ce mémoire, la posture ici adoptée se distingue de ce postulat. Dans une perspective développementale, il semble plutôt fécond, sous l angle pédagogique, d envisager plutôt un retard ou un décalage dans le développement de ces enfants que de le considérer comme atypique. C est justement pour pallier ce décalage que les hypothèses et les pratiques d intervention ont été élaborées. 4

21 ceux ayant de grandes difficultés d apprentissage ou de comportement ou une déficience intellectuelle légère) et pour la majorité des élèves handicapés (soit, ceux ayant une déficience intellectuelle plus prononcée, une déficience au niveau sensoriel ou moteur ou présentant un trouble envahissant du développement, etc.). Selon leurs besoins, ils bénéficient de mesures particulières, soit un accompagnement en tout temps par un professionnel (un technicien en éducation spécialisée par exemple) ou d un accompagnement régulier (l enfant peut recevoir pendant quelques heures durant la semaine un soutien fréquent d une personne qualifiée) (MELS, 2007). En ce qui concerne les enfants ayant un trouble autistique, ils peuvent être accompagnés en tout temps d un spécialiste dans une classe régulière ou être scolarisés dans une classe spécialisée pour enfants ayant des troubles similaires, selon la décision de la commission scolaire où est scolarisé l enfant (MELS, 2007). Dans ces classes spécialisées, diverses méthodes sont utilisées pour travailler avec les enfants autistes, dont principalement les méthodes A.B.A. et T.E.A.C.C.H., ces méthodes seront donc explicitées La méthode A.B.A. La méthode A.B.A. (Applied Behavioral Analysis) a été initiée par O. Ivar Lovaas dans les années 60. Ce chercheur norvégien s intéressait aux comportements sociaux et langagiers des enfants autistes. Dans ses recherches, il développe une méthode d intervention béhavioriste ayant pour but de contrôler les comportements de ces enfants pour favoriser leur communication (même si la plupart des enfants observés par son équipe n avaient pas développé de langage formel autre que l écholalie) et leur autonomie dans les aptitudes sociales (Lovaas, 1987; Lovaas, Freitas, Nelson & Whalen, 1974; Rogers, 1998). Pour que les enfants modifient leurs comportements, ils doivent suivre un programme intensif pendant plus de 30 heures par semaine. Pendant ce temps d intervention, les thérapeutes veulent «enseigner» aux enfants explicitement les comportements qui sont 5

22 acceptables en recourant à l imitation 2. Les comportements travaillés sont ceux pour lesquels l enfant présente des «déficits». L adulte effectue le comportement correctement et il attend de l enfant que ce dernier le réalise de la même façon. Pour ce faire, le thérapeute doit entraîner l enfant; chaque fois que ce dernier reproduit le comportement cible qui se rapproche de celui de l adulte (c est-à-dire du comportement attendu), l enfant reçoit une récompense, comme une bouchée de sa nourriture préférée (Lovaas & al, 1974). Par cette brève description, il est possible de constater que cette méthode est avant tout comportementale. Lovaas et ses collaborateurs cherchaient à rendre l enfant autiste le plus autonome possible pour favoriser sa communication et ses habiletés sociales. Pour ce faire, l adulte doit, d une part, servir d exemple pour que l enfant manifeste les comportements qui sont attendus de lui et, d autre part, récompenser l enfant aussitôt qu il les réalise La méthode T.E.A.C.C.H. Parallèlement à la méthode A.B.A. et dans la même optique béhavioriste, la méthode d intervention comportementaliste T.E.A.C.C.H. (pour Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped CHildren) a été mise sur pieds par Eric Schopler lors des années 60. Elle est basée sur le conditionnement opérant, tel que décrit dans la psychologie béhavioriste (Chamak, 2010; Rogers, 1998; Schopler, Brehm, Kinsbourne & Reichler, 1971; Schopler, Reichler & Lansing, 1988). Les thérapeutes qui utilisent cette méthode ont comme ligne de conduite le principe que, si on travaille pendant une période de temps suffisante, tout comportement indésirable peut être changé si des méthodes de renforcement sont appliquées (Schopler, Reichler & Lansing, 1988). Ces renforcements peuvent prendre la forme de récompenses : recevoir des bonbons lorsqu un exercice est bien réalisé selon les attentes du thérapeute, pouvoir accumuler des minutes pour jouer avec un jouet préféré ou pour écouter la télévision, etc. Elles servent principalement à motiver 2 La définition sous-entendue ici pour l imitation est celle utilisée dans la psychologie béhavioriste qui se limite à une association directe et non différée d un comportement attendu. Il ne s agit pas de l imitation au sens piagétien. 6

23 l enfant dans son travail et à favoriser sa socialisation, car cette méthode vise l acquisition d un maximum d autonomie pour les personnes étant atteintes d un trouble du spectre autistique, tout au long de leur vie (Chamak, 2010). Pour que l enfant réussisse les tâches qui lui sont problématiques, l adulte peut la décomposer en sous-étapes qui seront illustrées par des pictogrammes. De cette manière, lorsque l enfant vit de petites réussites (chaque sous-étape bien réalisée), il sera alors récompensé. Tout le matériel nécessaire à la réalisation d une tâche doit se trouver dans un même endroit (par exemple dans un panier) pour conserver l attention de l enfant sur des éléments jugés pertinents à la tâche par l adulte. Tout le matériel non nécessaire est rangé dans d autres paniers. Pour que cette méthode soit efficace, elle doit être utilisée autant à l école qu à la maison, avec le même système de pictogrammes, de paniers et de récompenses. Dans une étude menée en 1971, Schopler, Brehm, Kinsbourne et Reichler montraient que les enfants autistes réagissaient beaucoup mieux (c est-à-dire avaient de meilleurs comportements) lorsque les tâches étaient structurées et menées par le thérapeute que lorsqu elles étaient non structurées et décidées en cours de réalisation par l enfant (Schopler, Brehm, Kinsbourne & Reichler, 1971). Le fait de fournir à l enfant une structure qui peut être réutilisée à la maison permet de fournir à l enfant autiste des repères stables entre ces deux milieux (pour répondre à son besoin de sameness, présenté précédemment). Cette brève présentation permet de comprendre la posture épistémologique derrière cette méthode : pour rendre la personne autiste autonome, il suffit de lui offrir un contrôle externe sur son comportement par des récompenses alimentaires ou autres, en suivant un horaire structuré constant. Pour y arriver, les tâches qui normalement posent problème à la personne autiste sont décomposées en étapes par le thérapeute. Ces différentes étapes sont souvent présentées par des activités isolées (des exerciseurs visant l automatisation) et rangées dans des paniers qui contiennent tout le matériel nécessaire à leur réalisation. 7

24 1.3. Les contextes d intervention privilégiés pour travailler le nombre Comme démontré précédemment, on sait que les méthodes utilisées dans les écoles québécoises pour accompagner les enfants autistes sont principalement A.B.A. et T.E.A.C.C.H. Ces méthodes, bien qu elles soient considérées comme éducatives, servent principalement à contrôler le comportement plutôt qu à réaliser des apprentissages scolaires. Malgré cela, elles sont tout de même utilisées par les pédagogues pour soutenir des apprentissages complexes, comme la langue et le nombre par exemple. A contrario, pour les enfants tout-venant, les apprentissages scolaires sont plutôt basés sur un programme par compétences 3, qui doivent être construites par les enfants avec le soutien des enseignants : [Le Programme de formation de l école québécoise] propose une organisation des savoirs sous forme de compétences de manière à leur donner sens et ouverture et, d autre part, il retient un cadre conceptuel qui définit l apprentissage comme un processus actif et continu de construction des savoirs (p.4, MEQ, 2001). En ce sens, le ministère adopte une position socioconstructiviste des savoirs pour les enfants tout-venant et dans les classes régulières dans lesquelles les enfants autistes peuvent être intégrés, alors qu une position béhavioriste est préconisée en classes spéciales. Le nombre et le système de numération positionnelle est un construit social ayant subi plusieurs transformations et complexifications à travers l histoire (Gingras, Keatin & Limoges, 1999; Mainzer, 1999; Ross & Charbonneau, 2002; Sultan, 2008). Ils constituent des objets de savoir complexes exigeant de multiples abstractions. Or, le nombre n ajuste pas ses exigences aux enfants autistes. Il pose les mêmes exigences de conceptualisation et d abstraction, ce qui ne peut être produit par des imitations béhavioristes ou par de simples associations. La prochaine section vise précisément à étayer les fondements de la construction du nombre. 3 Pour le MEQ (2001), une compétence est vue comme : «un savoir-agir fondé sur la mobilisation et l utilisation efficaces d un ensemble de ressources» (p.4). 8

25 2. Cadre théorique Le présent cadre théorique permet d examiner les notions-clés à partir desquelles des interventions pédagogiques peuvent être construites pour travailler le concept du nombre avec tout enfant autiste, sans recourir aux méthodes habituelles, comme A.B.A. et T.E.A.C.C.H. La figure 1 tente de schématiser l émergence de la construction du concept de nombre chez l enfant. Figure 1 : Schéma conceptuel de l émergence de la construction du nombre 4 4 Comme on s intéresse à la construction du concept du nombre chez un enfant, le schéma conceptuel du nombre ne représente pas le nombre comme il sera une fois acquis (à ce moment, les aspects ordinal et cardinal seraient alors fusionnés), mais bien son émergence et les concepts qui y contribuent. 9

26 Cette figure met en relief la relation inclusive qui existe entre l abstraction et le nombre. En ce sens, pour que les nombres puissent être utilisés, le sujet doit faire preuve d abstraction. De plus, l abstraction ne se réduit pas seulement au nombre, elle est notamment présente lors de la construction et de l utilisation du langage. Le nombre en soi peut être décomposé en deux aspects : ordinal et cardinal. Lorsque le nombre est réellement construit, ces deux aspects convergent et s imbriquent pour devenir indissociables. Comme on s intéresse à la construction du concept du nombre chez un enfant, ce schéma conceptuel du nombre ne représente pas le nombre comme il sera une fois acquis (à ce moment, les aspects ordinal et cardinal seraient alors fusionnés), mais bien son émergence et les concepts qui y contribuent. Le schéma ici se penche sur l émergence du concept de nombre et de sa construction progressive vers une représentation mature. Si dans une compréhension mature, on peut envisager que les aspects ordinal et cardinal convergent et se combinent dans une vision unifiée du nombre, il n en demeure pas moins que cette fusion provient d un long travail de construction chez le jeune enfant. C est pourquoi le schéma présente ces deux aspects du nombre en sous-ensembles distincts qui devront progressivement être unifiés par l enfant notamment par trois opérations majeures à construire : le comptage, la correspondance terme à terme et la conservation. Ces deux dernières opérations peuvent émerger dans des contextes hors de ceux sollicitant directement le nombre, comme lors de comparaison (pour la correspondance terme à terme) et avec des quantités continues comme de la pâte à modeler (pour la conservation), voire en français dans la correspondance graphème-phonème du système alphabétique (correspondance terme à terme) et la conservation d une même chaîne de lettres pour représenter un même mot. Afin d étayer plus en profondeur ce schéma conceptuel de l émergence de la construction du nombre, l abstraction sera d abord explicitée, car elle demeure l assise fondamentale à la construction du nombre. Ensuite, le concept même de nombre sera défini, ainsi que les deux aspects qui permettent de le construire, soit l aspect ordinal et l aspect cardinal. Puis, 10

27 différentes opérations 5 que l enfant doit construire pour identifier et travailler avec le nombre, soit la correspondance terme à terme, la conservation et le comptage L abstraction Pour pouvoir déterminer le cardinal d une collection ou établir un ordre entre les éléments la composant, l enfant doit être en mesure de faire abstraction des différences qui pourraient être présentes entre les éléments pour les considérer comme un ensemble possédant une caractéristique commune abstraite de chacun des objets de l ensemble, que ce dernier soit plus ou moins homogène ou plus ou moins hétérogène. Dans ses nombreux ouvrages, Piaget établit deux catégories principales d abstraction : l abstraction empirique (ou abstraction simple) et l abstraction réfléchissante (Piaget, 1977; Piaget & Szeminska, 1964). Tout objet possède des propriétés physiques qui peuvent être observables par le sujet, comme sa couleur, sa forme, sa texture, etc. Pour pouvoir considérer ces propriétés, le sujet doit faire preuve d abstraction empirique (Kamii, 1980; Kamii & DeVries, 1981; Piaget, 1977). Pour ce type d abstraction, l attention de l enfant est centrée sur une propriété de l objet, habituellement physique (comme la couleur, la forme ou le type d objet) plutôt que sur l ensemble de ses caractéristiques (Kamii, 1980). À titre d exemple, lorsqu une assiette remplie de raisins lui est présentée lors de la collation, l enfant peut ignorer leur couleur pour énoncer le nombre total de raisins, plutôt que de distinguer les 8 raisins verts des 12 raisins rouges. L abstraction repose précisément sur l ignorance de critères spécifiques au profit de la construction d un critère générique, ici raisin. 5 La section sur les opérations à construire qui sera présentée en ne se trouve pas être une subdivision du nombre comme le sont l aspect ordinal et l aspect cardinal du nombre. Cette section devrait plutôt être subordonnée, à la fois, à l aspect ordinal et à l aspect cardinal du nombre, car la fusion de ces deux aspects du nombre provient de multiples actions de sériation et de classification faites par l enfant et de la construction progressive de régularités qui mèneront l enfant à envisager le comptage, la correspondance terme à terme et la conservation comme une opération. C est alors que la fusion des deux aspects sera possible et c est pourquoi ces trois opérations sont représentées, dans la figure 1, par des flèches d actions potentielles pouvant agir sur les aspects ordinal et cardinal du nombre. 11

28 Le nombre, quant à lui, en raison de sa conception hiérarchique et inclusive (en ce sens que 4 inclut 3, qui inclut 2, qui inclut 1), exige que l abstraction qui lui est portée soit tout autre et qu elle concerne davantage les relations qui existent entre les éléments comparés, dans ce cas-ci, les nombres eux-mêmes et les opérations qui y sont effectuées, peu importe les objets physiques qu ils représentent et leurs caractéristiques. C est l abstraction réfléchissante qui permet au sujet de réagir à la suite des opérations ou des actions qui ont été apportées en créant et en établissant des relations entre divers éléments (Kamii & DeVries, 1981). Les relations ainsi établies sont basées sur la coordination des actions qui peuvent être effectuées de façon inconsciente et pourront, dans le futur, créer des prises de conscience et de conceptualisations chez l enfant (Piaget, 1977). Ces relations sont d ordre logico-mathématique et elles se construisent sur des construits antérieurs de l enfant, notamment sur la base de multiples abstractions empiriques. Ce type d abstraction n est pas tiré des objets en tant que tels, comme le serait une seule abstraction empirique, mais bien des actions que l on peut effectuer, comme réunir des objets en une classe plus générale, ordonner, mettre en correspondance, etc. (Piaget, 1968). Il convient d illustrer cette notion par deux exemples. D abord, lorsque l on tente de comparer la hauteur de la tour de Pise et la hauteur de la tour Eiffel, cette relation n existe pas ni dans la tour Eiffel même ni dans la tour de Pise, par contre, l enfant est capable de visualiser ces deux tours en connaissant leur hauteur 6 : «la tour Eiffel est plus haute que la tour de Pise» peut être énoncée en tentant d établir une relation de correspondance entre leurs hauteurs respectives. Pour ce faire, l abstraction doit être réfléchissante, car elle ne concerne pas les caractéristiques des tours en soi, mais bien la relation qui existe entre leurs hauteurs respectives, soit 324 mètres est plus grand que 56 mètres. Dans un même ordre d idées, on peut dresser une collection de 6 objets devant un enfant. Ce dernier arrive à les compter en utilisant une abstraction empirique. Il peut, en plus, faire preuve d abstraction réfléchissante lorsqu il énonce que la quantité ne changera pas, même 6 La tour Eiffel mesure 324 mètres et la tour de Pise, environ 56 mètres. 12

29 si l ordre et la disposition des éléments sont modifiés; il coordonne alors la cardinalité et l identité de la collection (DeBlois, 1993). C est ce type d abstraction qui permet de mettre les nombres en relation, comme lorsque l enfant est questionné sur quel nombre est le plus grand ou s il y a égalité Le nombre Plusieurs auteurs abordent la définition du nombre (Baruk, 1995, 2003; Gelman & Gallistel, 1986; Piaget, 1967; Piaget & Szeminska, 1964; Van Nieuwenhoven, 1999). Parmi eux, Baruk (1995) établit deux sens très différents à la notion de nombre. Selon son sens mathématique premier, un nombre peut être défini comme : «un élément d un ensemble de nombres» (p.762), les ensembles de nombres étant, selon Baruk (1995, 2003) et Van Nieuwenhoven (1999), les nombres entiers naturels ( ), les nombres entiers relatifs ( ), les nombres rationnels ( ), les nombres réels ( ) et les nombres complexes ( ). Ces ensembles de nombres sont inclusifs, en ce sens que les nombres entiers naturels font partie de la classe des entiers relatifs, qui font partie de la classe des rationnels, etc. Pour travailler les nombres de cette façon, le sujet doit faire preuve d abstraction réfléchissante pour comprendre les relations qui existent entre ces classes de nombres, qui semblent pourtant assez différentes. Le deuxième sens, qui relève davantage du sens commun, évoque l idée de quantité liée au nombre, que Baruk (1995, 2003) nomme le «nombre-de». À cet effet, dans un ouvrage paru en 2003, cette auteure écrit : Certains caractères d une quantité peuvent s exprimer grâce aux nombres, mais doivent en être distingués : pour cela, il suffit que des nombres suivis de ce qu ils comptent, évaluent ou mesurent soient appelés des nombres-de (p.32). De plus, il n y a rien dans l appellation du nombre en soi (dans le mot nombre) qui exprime ou représente une quantité, en ce sens que cela demeure arbitraire. La combinaison des phonèmes /d/, /i/ et /s/ qui forment le mot «dix» n a aucune valeur en soi, car le signifiant (le mot «dix») et le signifié (ce qu est 10, le concept même, la représentation mentale que l on s en fait) sont unis arbitrairement. Piaget (1968) souligne, en exposant les conceptions de Saussure, que le signifiant n a rien dans ses caractéristiques phonétiques qui peuvent informer le lecteur ou l auditeur sur le contenu du signifié. Cela ne s applique pas 13

30 seulement aux mots nombres, mais bien à tous les mots du langage. Par contre, il est possible d affirmer que le nombre, s il est accompagné d un substantif nominal qui explicite ce qui est représenté, peut être utilisé dans le but de représenter une quantité. À titre d exemple, si on énonce «6» ou «6 bonbons», le sens du nombre utilisé dans ces deux énoncés n est pas le même; dans le deuxième cas, il s agit nécessairement d un «nombre-de» au sens de Baruk. L enfant aura plus de facilité à conceptualiser «6 bonbons», car il lui est possible de recourir à la visualisation de ces bonbons qui pourront être alors dénombrés, chose qui lui est beaucoup plus difficile à faire avec le nombre, comme objet mathématique, «6». Si l on s intéresse à la construction du nombre et à son émergence chez le jeune enfant, la distinction de «nombre-de» qu apporte Baruk au nombre est plus pertinente dans le cadre de ce mémoire que la définition proprement mathématique. Quant à eux, Piaget et Szeminska (1964) présentent deux aspects au nombre 7 : l aspect ordinal et l aspect cardinal. En effet, au sein d une série d objets ordonnés, il est possible d utiliser des nombres pour représenter la position des éléments (aspect ordinal) et pour représenter la totalité des éléments (aspect cardinal). À titre d exemple, lors d une fête d Halloween, les enfants veulent amasser le plus de bonbons et organisent un concours. Celui qui aura obtenu le plus grand nombre de bonbons est celui qui possède la collection qui a le plus grand cardinal. Il sera le grand gagnant et donc terminera le concours premier. Il s agit de deux aspects du nombre en partie paradoxaux : en ce qui concerne l aspect cardinal, en général, il est préférable d obtenir le plus grand résultat (nombre de bonbons amassés, nombre de billes, nombre de buts lors d une partie de hockey, etc.) alors qu en ce qui concerne l aspect ordinal, il vaut mieux obtenir un petit nombre (il est préférable d être le premier plutôt que le trentième, bien que trente soit plus grand qu un). La maîtrise des aspects du nombre doit permettre au sujet de comprendre que celui qui est né en 2005 est plus âgé que celui né en 2010 bien que, dans son aspect cardinal, à l inverse, 7 Ces aspects seront définis plus amplement dans la prochaine section. 14

31 2005 est plus petit que D ailleurs, Piaget et Szeminska (1964) décrivent ce paradoxe comme suit : [ ] une série dont les termes, tout en se succédant selon les relations d ordre que leur assignent leurs rangs respectifs, sont également des unités équivalentes les unes aux autres et par conséquent susceptibles d être réunies cardinalement (p.204). Dans cette optique, chez les piagétiens, la maîtrise du nombre est acquise lorsque l enfant est en mesure d établir ces deux types de relations entre les nombres : l ordre (aspect ordinal) et l inclusion hiérarchique (aspect cardinal). Ces deux relations sont interreliées; lorsque des éléments sont mis en ordre au sein d une même collection, ils sont forcément inclus dans un ensemble plus grand (la collection elle-même) qui est régi par une certaine hiérarchie (comme le 4 e élément qui englobe à la fois le 3 e, le 2 e et le 1 er ). En effet, comme le souligne Fayol (1990), à l instar de Piaget, «l apprentissage par cœur de la chaîne numérique verbale [ ] ne permettrait pas de dénombrer n importe quelle collection au cardinal jusqu alors ignoré» (p.38). À cet effet, il est nécessaire de comprendre ce que représente le nombre et l inclusion qui existe dans la chaîne numérique (Figure 2). Figure 2 : Relation inclusive des nombres jusqu à 4. Comme ce mémoire s intéresse aux assises premières de la construction du concept de nombre par la maîtrise de ses aspects ordinal et cardinal, la définition de Piaget et Szeminska (1964) sera privilégiée, car elle concerne, à la fois, les aspects ordinal et cardinal du nombre, plutôt que celles de Baruk qui n abordent que le nombre proprement mathématique et la cardinalité. Étant donné leur importance dans la constitution et dans la compréhension du nombre, il convient d approfondir dans un premier temps les aspects ordinal et cardinal du nombre. Ces assises permettront d ouvrir ensuite sur le comptage. 15

32 Aspect ordinal Dans une perspective piagétienne, pour bien saisir la relation d ordre entre les nombres, il est nécessaire de définir ce qu est l aspect ordinal du nombre. L aspect ordinal permet d identifier une position au sein d un ensemble ordonné préalablement établi. À titre d exemple, parmi un ensemble de sept voitures faisant une course, le nombre 5 désigne la voiture qui est à la cinquième position dans la course. Van Nieuwenhoven (1999) ajoute que les nombres ordinaux «sont utilisés pour désigner un élément individuel par sa position à l intérieur d un ensemble plutôt que pour quantifier un ensemble comme un tout» (p.106). L aspect du nombre qui permettrait de quantifier l ensemble comme un tout serait l aspect cardinal du nombre. Ce dernier sera défini sous peu. Un exemple d aspect ordinal du nombre peut être observé au sein du calendrier. Dans le cas du calendrier grégorien, il débute toujours par le mois de janvier (1 er mois) et il se termine par le mois de décembre (12 e mois), ce qui fait référence à une collection quantifiable prédéterminée au sein de laquelle un ordre est établi. Il y a douze mois dans une année et chaque mois conserve toujours la même position. L aspect ordinal du nombre se développe de façon progressive chez l enfant, ce dernier passant par trois stades lors de cette acquisition (Piaget & Szeminska, 1964). À titre d exemple, voyons comment se différencient les actions et les raisonnements d un enfant dans le contexte d une tâche de sériation pour chacun de ces trois stades. Au premier stade, l enfant ne parvient pas à dresser les éléments selon leur taille, il échoue la sériation. S il lui est demandé de sérier des pailles de différentes longueurs, l enfant prendra n importe quelle paille au hasard pour les placer l une à côté de l autre. Il peut également réussir à constituer de petites séries juxtaposées ou tenter de «créer un effet d escalier» en ne considérant que la partie supérieure de la paille (et donc, en ne plaçant pas les pailles sur une ligne horizontale). À ce stade, il fait preuve d un jugement pré-sérial. Au deuxième stade, l enfant parvient à sérier les pailles en effectuant plusieurs tâtonnements. Il arrive à construire la série correctement, au bout de plusieurs tentatives, mais il n est pas en mesure d établir des relations entre les éléments qui la composent. Son raisonnement est encore principalement basé sur les intuitions et sur sa perception. Finalement, au troisième stade, 16

33 l enfant comprend la sériation, en ce sens qu il considère qu une même paille peut être, à la fois, plus petite et plus grande qu une autre. Sa sériation n est plus basée sur sa perception et sur des intuitions, elle est opératoire due à une coordination des relations qui deviennent alors réversibles Aspect cardinal Pour pouvoir comptabiliser les éléments d une collection une seule fois, il est nécessaire d utiliser une certaine organisation, d où l utilité de sérier les éléments avant d en faire le décompte pour déterminer leur nombre. En ce sens, Piaget et sa collaboratrice Szeminska définissent le nombre cardinal comme étant : «une classe dont les éléments sont conçus comme des unités équivalentes les unes aux autres et cependant comme distinctes, leurs différences consistant alors seulement en ceci que l on peut les sérier, donc les ordonner» (1964, p.204). Si l on reprend l exemple précédent des voitures qui font la course, sur l ensemble des sept voitures, le nombre 5 désigne une quantité de voitures faisant la course : si l enfant en possède 5 sur un total de 7, il est celui qui en a le plus. Dans le même sens, pour connaître le nombre de fruits qui sont dans le panier, l enfant entreprend le comptage des éléments qui s y trouvent. Il compte 3 bananes, 2 oranges et 4 pommes. Il lui est nécessaire de sérier les bananes, les oranges et les pommes pour ne pas recompter un même fruit à plusieurs reprises. La banane qui est comptée en premier doit conserver sa première position pour que le dénombrement soit exact. De plus, pour connaître le nombre total de fruits, il doit considérer cet ensemble hétérogène comme un tout, d où l importance de la notion d inclusion hiérarchique : il doit regrouper les 3 bananes, les 2 oranges et les 4 pommes pour énoncer qu il y a 9 fruits. Il y a donc nécessité d abstraction réfléchissante permettant de réunir en une seule collection selon un critère commun ses éléments hétérogènes et distincts. 17

34 Opérations à construire Pour pouvoir affirmer que le concept de nombre est construit, il est important de vérifier si l enfant a précédemment construit plusieurs opérations qui lui seront nécessaires, comme la correspondance terme à terme, la conservation et le comptage La correspondance terme à terme Dans une perspective piagétienne, si l on souhaite que le comptage et la chaîne numérique ne prennent pas le sens d une simple comptine, il faut privilégier, chez le jeune enfant, l action concrète répétée et la réflexion sur elle pour favoriser les mises en relation. Pour ce faire, la procédure de correspondance terme à terme peut être réalisée de deux façons : 1) en faisant correspondre des éléments de deux collections distinctes ensemble, ce qui ne nécessite aucun comptage; ou 2) en énonçant un mot nombre par élément dénombré lors d un comptage. Lors de la comparaison de collections, la correspondance terme à terme entre leurs éléments permet à l enfant d établir l égalité ou la non-égalité entre des collections distinctes qui lui seraient présentées. Par contre, pour pouvoir se prononcer sur la différence qu il soulève entre les collections, il devra recourir au comptage ou du moins à certaines notions qui le supposent : à cet effet, il devra faire correspondre un mot nombre pour chaque élément dénombré. À titre d exemple, après avoir fait des correspondances entre les éléments de deux collections de différentes tailles (12 éléments contre 15), l enfant énonce que la deuxième en contient plus parce qu il en reste 3 et qu il n y en a plus de l autre côté. À cette fin, il opère sur le nombre, il compare et il parvient à identifier quelle collection comporte le plus d éléments et laquelle en a le moins. L enfant se dote ainsi d un outil pour expliquer sa réponse, et ce, même si sa chaîne numérique ne se rend pas à 15. C est en partie en ce sens que l opération pour Piaget précède et constitue le nombre et le comptage, 18

35 contrairement à ce que postule Gelman et Gallistel (1986) et Van Nieuwenhoven (1996, 1999). La correspondance terme à terme peut même devenir une opération 8 en ce sens que si l on déplace les éléments devant l enfant, ce dernier pourrait utiliser des arguments de réversibilité, de non-ajout et de non-retrait pour maintenir sa réponse, et ce, même si le nombre d objets en jeu dépasse la chaîne numérique maîtrisée par l enfant. Viser à ce que l enfant procède par correspondance terme à terme et à ce qu il conceptualise cette action comme une opération devient donc un objectif essentiel dans la construction même du nombre, beaucoup plus que de simplement étendre la chaîne des nombres. À titre d exemple, à la figure 3, deux collections de jetons sont éparpillées sur la table et sont présentées à l enfant. On lui demande si les deux collections comportent le même nombre de jetons ou si l une des deux est plus nombreuse. Ensuite, on demande à l enfant d expliquer comment il peut le savoir. Pour ce faire, il peut utiliser cette correspondance terme à terme comme démontré à la figure 4. Figure 3 : Collections de jetons éparpillés Figure 4 : Utilisation de la correspondance terme à terme pour comparer deux collections 8 Ici, pour le terme «opération», c est la définition piagétienne tirée de Legendre-Bergeron (1980) qui est préconisée. Une opération est «une action intériorisée, c est-à-dire effectuée symboliquement ou en pensée et réversible» (p.139). Plus précisément, on s intéresse aux opérations logico-arithmétiques, car ces dernières portent sur «des éléments discrets réunis en classe, sériés ou dénombrés et sont indépendants de l espace et du temps» (p.140). 19

36 Lorsque la correspondance terme à terme dans la comparaison de collections est bien utilisée (en organisant les jetons de manière à pouvoir comparer les deux collections visuellement, c est-à-dire sans avoir besoin de compter), l enfant est capable de vérifier rapidement si les collections qui lui sont présentées sont équivalentes ou non. Même lorsque les jetons de la deuxième rangée sont déplacés, de sorte que les jetons dépassent à droite et à gauche, l enfant confirme que c est toujours pareil, car il énonce qu il est possible de les remettre comme ils étaient avant. Cela témoigne qu il comprend la réversibilité mise en jeu. La correspondance terme à terme devient dès lors une opération logico-arithmétique au sens piagétien, car elle porte sur des éléments discrets sériés dans des collections, indépendant de l espace occupé (Legendre-Bergeron, 1980). Elle est intériorisée symboliquement puisque l enfant établit ici l équivalence avant même l action pratique en anticipant que s il fait de nouveau une correspondance (lorsqu il veut remettre les éléments à leur état initial), il obtiendra ce qu il avait au départ. De cette façon, l enfant est en mesure de comparer des collections, et ce même s il ne parvient pas toujours à en déterminer le cardinal. Pour y arriver, il devra recourir à un nouvel outil : le comptage utilisé en correspondance terme à terme (un mot nombre par élément dénombré) La conservation Si l on conçoit l importance de l opération de la correspondance terme à terme dans la construction du nombre, il convient dès lors de la mettre en relation avec la capacité d établir la conservation. En effet, lors de la construction des deux aspects du nombre (l aspect ordinal et l aspect cardinal), il est important de vérifier si l enfant est capable de maintenir un jugement rationnel sur des quantités lorsque leur apparence est modifiée par une tierce personne, donc faire preuve de conservation. Pour ce faire, l enfant doit faire preuve d abstraction réfléchissante, telle que définie précédemment et faire preuve de conservation. À l instar de Piaget, Legendre-Bergeron (1980) explique la conservation comme étant «la capacité de dégager les aspects invariants de l objet au travers des transformations qu il subit» (p.60). Vilette (1996) établit que l enfant a compris la notion de conservation lorsqu il est en mesure de comprendre la réversibilité (retour à l état antérieur) et les différences perçues entre les modifications. Les 20

37 tâches mathématiques proposées aux jeunes enfants visant la conservation ont été développées à l origine par Jean Piaget. Dans celle-ci, l enfant ne constate pas seulement les différences entre les collections qui lui sont présentées, mais il considère également les modifications qui y ont été apportées sous ses yeux. Malgré la différence qui subsiste visuellement entre les deux quantités à comparer, l enfant est capable de faire preuve d abstraction réfléchissante et d imaginer un possible retour à l état précédent sans avoir besoin de manipuler les collections elles-mêmes. Lorsque la conservation est acquise, Piaget et Inhelder (1967) décrivent que : [ ] les états sont dorénavant subordonnés aux transformations et celles-ci, étant décentrées de l action propre pour devenir réversibles, rendent compte à la fois des modifications en leurs variations compensées et de l invariant impliqué par la réversibilité (p.77). La conservation peut être observée, entre autres, sur des quantités continues (comme des longueurs, du volume, ou du poids) et sur des quantités discontinues Quantités continues La conservation de quantités continues peut être définie par la capacité de l enfant à faire abstraction de la forme pour déterminer la grandeur d une quantité comparativement à celle d une autre. Elle s acquiert en trois stades, qui sont assez similaires pour la conservation des quantités discontinues : 1) l absence de conservation; 2) les réponses intermédiaires; et 3) la conservation nécessaire (Piaget & Szeminska, 1964). Ce type de conservation est généralement évalué, chez les jeunes enfants, à l aide de boules de pâte à modeler. Lorsque les sujets sont plus âgés, la conservation de quantités continues peut être vérifiée à l aide de variation de longueurs, de volume et de poids, mais les stades sont les mêmes pour tous ces items. Si un adulte présente deux boules de pâte à modeler de même taille, l enfant doit établir l égalité entre ces deux parts de pâte. Lorsque l égalité a été établie, l adulte prend une des deux boules et la transforme sous les yeux de l enfant en trois temps : en galette, en rouleau et en miettes. Entre chaque transformation, il y a un retour à l état initial, c est-àdire la formation de boule de même grosseur que celle de référence. Au premier stade (absence de conservation), le fait que la part de pâte n ait plus la même apparence laisse croire à l enfant qu il s agit d une nouvelle quantité. Piaget et Szeminska 21

38 (1964) parlent de ce stade en l appelant «le stade de la quantité brute», en ce sens que l enfant utilise principalement sa perception pour déterminer la grosseur de la collection au lieu de recourir à une procédure plus efficace, telles que la quantification et l établissement de relations entre les éléments mis à sa disposition. L absence de conservation des quantités continues peut être observée lorsque l enfant pense que la modification de la forme (comme une boule de pâte à modeler qui est transformée en galette) entraine une modification dans la quantité. Si l apparence d une de ces deux boules est modifiée (en faisant un rouleau, une galette ou des miettes par exemple), l enfant énoncera qu une des deux parts contient plus de pâte que l autre (soit la boule initiale qui n a pas été modifiée ou la boule transformée), même si aucun ajout ou retrait de pâte n a été effectué. À ce moment, l enfant utilise seulement sa perception pour déterminer la ressemblance ou la différence de quantité des deux parts de pâte qui lui sont présentées. Pour un enfant «non conservant», il est inconcevable qu une quantité de matière «puisse demeurer invariante au travers des changements de forme» (Piaget & Szeminska, 1964, p.22). Cette absence de conservation est présente jusqu à 4 ou 5 ans. Au deuxième stade (réponses intermédiaires), l enfant fournit des réponses qui montrent qu il a compris l idée de conservation quand les différences entre les quantités ne sont pas très importantes, mais lorsque les changements sont importants, il a tendance à douter de lui et il redevient «non conservant». À ce stade, la quantification devient de plus en plus importante dans les réflexions de l enfant. En effet, l enfant tente de considérer, à la fois, l aspect perceptif et les relations opératoires effectuées sur les quantités pour fournir une réponse, mais il n y parvient pas toujours. Vers 6 ans, l enfant commence à comprendre que la quantité n est pas modifiée, mais ce n est pas stable encore dans son esprit. Lorsque la transformation est plutôt simple (comme lorsque l on écrase la boule pour en faire une galette), l enfant peut affirmer qu il s agit toujours de la même pâte que l on avait initialement. Par contre, lors de la transformation en rouleau ou en miettes, comme l apparence n est plus la même et que la pâte n occupe plus le même espace, un doute peut survenir chez lui; il fournit alors des réponses qui montrent que, pour lui, les quantités continues ne sont pas conservées à la suite de transformations. Lors de la transformation de la boule en miettes (Figure 5), l enfant doit prendre en considération l espace occupé par les miettes bleues, mais aussi leur grosseur : malgré le fait qu elles soient plus nombreuses 22

39 que la boule jaune, elles sont beaucoup plus petites. Les enfants du deuxième stade ont de la difficulté à intégrer toutes ces informations lors de leurs réflexions. Figure 5: Item de conservation des quantités continues Au troisième stade (conservation nécessaire), il n y a plus de doute dans l esprit de l enfant : peu importe les modifications qui sont apportées, il affirme qu il s agit toujours de la même quantité. L enfant n utilise plus seulement sa perception pour déterminer si les quantités sont égales ou non. Il est capable d analyser les changements qui ont été apportés et de comprendre que, même si la forme est différente, il s agit toujours de la même pièce de pâte à modeler. Ce stade est atteint vers l âge de 7 ans selon Piaget et Szeminska (1964) et vers 9 ans selon Meljac et Lemmel (2007) Quantités discontinues La conservation de quantités discontinues peut être définie par la capacité de l enfant de faire abstraction de la disposition des objets pour déterminer et maintenir le cardinal d une collection. Cette abstraction est réfléchissante, telle que définie précédemment. L enfant doit évaluer les relations entre les quantités qui lui sont présentées pour pouvoir les comparer. Son acquisition est caractérisée par trois grandes étapes de développement : 1) l absence de conservation; 2) le début de constitution d un ensemble; et 3) la conservation et la coordination (Piaget & Szeminska, 1964). Au premier stade (absence de conservation), l enfant croit que les modifications qui sont faites par une autre personne sous son observation affectent la quantité des éléments qui avaient été préalablement dénombrés. Il ressent alors le besoin de dénombrer chaque fois qu une modification est faite à la collection par l expérimentateur, même si aucun ajout ni retrait n est fait. À ce moment, il ne se fie qu à sa perception, en ne considérant pas les modifications en tant que telles, mais seulement le résultat final, ce qui le laisse croire à un 23

40 changement de la quantité d éléments qu il a toujours sous les yeux. Selon Piaget et Szeminska (1964), «les quantités sont d abord évaluées simplement en fonction des rapports perceptifs non coordonnés entre eux [ ] et c est cette incohérence initiale qui explique à la fois les continuelles contradictions entre les jugements successifs de l enfant et l absence de tout critère de conservation» (p.45). À titre d exemple, dans un premier temps, une rangée de six jetons comme suit est présentée à un enfant : Figure 6 : Collection initiale de jetons L enfant dénombrera la collection correctement et indiquera qu il y a six jetons. L expérimentateur prendra les mêmes six jetons et les déplacera légèrement de manière à ce que les jetons soient plus distancés, comme illustré à la figure 7 : Figure 7 : Collection de jetons modifiée une première fois À ce moment, l enfant qui n a pas compris l idée de conservation dénombrera à nouveau les jetons, même si aucun ajout ni retrait n a été apporté par l expérimentateur. Selon Piaget et Szeminska (1964), la non-conservation du nombre peut être présente jusqu à l âge de 5 ans. Au deuxième stade (début de constitution d un ensemble), les réflexions de l enfant se situent entre la perception (les quantités brutes) et la quantification. L enfant hésite, car il sait qu aucun élément n a été ajouté ou retiré de l ensemble dénombré, mais l apparence n est plus la même; cela le pousse à les dénombrer de nouveau, ce qui est caractéristique d une non-conservation. À ce stade, la conservation du nombre commence à apparaître dans le raisonnement de l enfant (alors âgé de 5 ou 6 ans, selon les travaux de Piaget), même s il est possible de voir que ce n est pas toujours stable. Si, toujours à partir de la même rangée de départ (Figure 6), l expérimentateur prend les jetons et les regroupe de manière à faire un tas, comme démontré à la figure 8, l enfant pourrait revenir avec des 24

41 conceptions issues de la non-conservation. Les réponses aux questions de conservation montrent que parfois le jugement est conservatoire pour l une des situations (la rangée plus espacée comme à la figure 7), mais non conservatoire pour l autre (les jetons rassemblés comme à la figure 8) ou l enfant hésite beaucoup et ne semble pas certain de ses réponses (Kamii, 1980). L enfant doit donc prendre l expérience de ce type de confrontation et réfléchir sur elle de multiples fois et dans une variété de contextes afin de construire une conservation solide. Figure 8: Collection de jetons modifiée une deuxième fois Au troisième stade (conservation et coordination), l enfant est convaincu que les changements de disposition n affectent pas la quantité qui lui est présentée. Pour justifier ses réflexions sur la conservation, l enfant peut recourir à trois types d argument, selon Kamii (1980), à l instar de Piaget : d identité, de réversibilité ou de compensation. L argument d identité est lorsque l enfant affirme que la quantité est la même, car il s agit toujours de la même collection, car il n y a eu aucun ajout ni aucun retrait. Un argument de réversibilité serait que l enfant sait qu il est possible de replacer les jetons à leur endroit initial pour vérifier s ils sont encore tous présents, ce raisonnement témoigne d une réflexion plus évoluée de l enfant : il ne se fie plus seulement à sa perception, il considère maintenant les changements apportés à la collection qu il a sous les yeux. Il est maintenant capable de visualiser un retour à l état initial avant de le réaliser. Et finalement, pour l argument de compensation, l enfant analyse la collection qui lui est présentée et il comprend que, à titre d exemple, si la rangée est plus longue, elle ne contient pas nécessairement plus de jetons, car les dit-jetons sont plus espacés les uns des autres. Lorsque la conservation du nombre est maîtrisée, le changement d apparence de la collection n affecte pas le raisonnement de l enfant. Comme le décrivait Van Nieuwenhoven (1999), «être conservant [avoir acquis la notion de conservation], c est admettre que le nombre d objets présents dans une collection ne peut être modifié que par l addition ou le retrait d un ou de plusieurs éléments : tous les autres changements étant non 25

42 pertinents, sans impact» (p.31). Selon certains auteurs (Piaget & Szeminska, 1964; Meljac & Lemmel, 2007), la conservation du nombre serait maîtrisée vers l âge de 7 ans Le comptage En plus de vérifier si l enfant est en mesure d établir des correspondances terme à terme et de se prononcer sur des questions de conservation, il est important de vérifier plusieurs habiletés, dont la capacité de l enfant à compter et à opérer sur les nombres avant d établir que son concept de nombre est construit. Piaget insistera sur la nécessité que ce comptage soit assis sur l opération (N+1, N+2, N+n', etc.), sur une construction solide des aspects ordinal et cardinal du nombre, reposant sur de multiples abstractions empiriques et réfléchissantes dans des actions concrètes de collections, de sériation, de comparaison, etc. Le comptage permet à l enfant, entre autres, d évaluer des quantités d objets à l aide de la suite numérique et de raisonner sur ces quantités. Par contre, cette activité doit avoir du sens pour l enfant et avoir un but particulier, qui peut être lié très fortement à la cardinalité. En effet, le comptage, entre autres, permet d identifier le nombre d éléments dénombrés. Certains auteurs, comme Fuson (1988, 1991), Gelman et Gallistel (1986) et Van Nieuwenhoven (1996, 1999) font passer au premier plan l importance du comptage, préalablement et comme soutien à l opération ultérieure. Ces derniers affirment que : À l origine, les enfants ne peuvent raisonner sur les nombres sans avoir des références sur ce qu ils représentent. Ces représentations sont obtenues par le comptage. Les jugements d équivalence ou de mise en ordre, l application d opérations d addition, de soustraction, l identité des nombres et les processus de résolution dépendent tous du comptage (Gelman & Gallistel, 1986, p.244) 9. Bien que ce mémoire se rattache davantage à la conception piagétienne de la construction du nombre misant sur l importance que la chaîne numérique soit assise sur l opération sur le nombre, la grille d analyse portant sur le comptage développé par Gelman et Gallistel 9 Traduction libre. 26

43 demeure intéressante pour interpréter quelques conduites de l enfant dans leur dénombrement. Les collections que l enfant aura à compter doivent être visibles et manipulables pour qu il puisse conceptualiser le nombre qui est formé par ses éléments. L enfant doit donc dépasser le stade de l abstraction empirique pour pouvoir opérer sur les nombres; pour ce faire, il peut utiliser le comptage. Les jeunes enfants ont besoin de matériel concret pour pouvoir comprendre le nombre, ce qui rejoint le concept d abstraction abordé par Piaget. Tout comme l apprentissage de la suite des mots nombres (chaîne numérique) ne suffit pas à maîtriser le comptage, ce dernier ne suffit pas non plus à la compréhension du système numérique (Fayol, 1990; Fuson, 1988, 1991; Gelman & Gallistel, 1986; Van Nieuwenhoven, 1996; Vergnaud, 1981). En ce sens, Gelman et Gallistel (1986), qui ont été repris par Van Nieuwenhoven (1996, 1999), se sont questionnés sur le processus de comptage et en sont venus à 5 principes de comptage qui doivent être maîtrisés pour pouvoir acquérir le nombre : 1) principe de la correspondance terme à terme entre le mot nombre utilisé et l élément dénombré (one-one principle); 2) principe d ordre stable (stable-order principle); 3) principe cardinal (cardinal principle); 4) le principe d abstraction (abstraction principle); et 5) le principe de la nonpertinence de l ordre (order-irrelevance principle). 1) Le principe de la correspondance terme à terme est utilisé lors des dénombrements et est circonscrit à la correspondance entre un objet dénombré et la chaîne numérique. Pendant cette activité, chaque mot nombre doit être associé à un seul élément dénombré. Ce principe comporte deux phases importantes : la séparation des éléments (en comptés et non comptés) et le marquage de ces éléments (pour ne pas les compter plusieurs fois ou en oublier). 2) Le principe d ordre stable requiert que la séquence de mots nombres de la chaîne numérique soit stable, en ce sens qu à toutes les fois qu un comptage est effectué, les mots nombres sont toujours à la même position (comme le 5 qui est entre le 4 et le 6). Ce principe est acquis lorsque chaque terme utilisé conserve toujours la même position dans la chaîne numérique : les éléments qui le précèdent et qui le suivent sont toujours les mêmes. 27

44 3) Pour le principe cardinal, l enfant doit comprendre que le dernier mot nombre énoncé lors d un comptage représente la quantité totale d éléments dénombrés. 4) Le principe d abstraction permet à la personne qui compte de ne pas considérer les différences physiques qui peuvent exister entre les éléments comptés et de les considérer ainsi comme un tout, malgré leur hétérogénéité. 5) Le dernier principe, celui de non-pertinence de l ordre, permet de mettre en exergue que l ordre dans lequel les éléments sont dénombrés n a aucune incidence sur le résultat du comptage, tant que les quatre principes précédents sont respectés également 10. Ce principe relève également de l aspect arbitraire et temporaire du comptage : n importe quel élément peut être à la position X, il doit seulement être le seul à avoir ce marquage lors de ce comptage en particulier (pour respecter les autres principes). Selon Fuson (1991), contrairement au contexte cardinal, le contexte ordinal demeure stable et immuable, peu importe les éléments qui nécessitent son utilisation. Le premier élément compté sera toujours le 1 er, le 2 e sera toujours compté après le 1 er, etc., peu importe l objet et sa position spatiale dans la collection. Pour le deuxième principe de Gelman et Gallistel (le principe d ordre stable), Fuson (1988) a ajouté quelques précisions. En effet, l auteure souligne que l acquisition de la chaîne numérique procède par niveaux de connaissances, qu elle a fixés au nombre de 5 : le chapelet, la chaîne non sécable, la chaîne sécable, la chaîne dénombrable et la chaîne bidirectionnelle. Certains de ces niveaux de connaissance sont repris et expliqués par Van Nieuwenhoven (1996, 1999). Au premier niveau, celui du chapelet, l enfant récite les mots nombres l un à la suite de l autre, sans leur accorder une signification particulière, un peu comme une 10 Lorsque ce principe est acquis, et seulement à partir de ce moment en particulier, l enfant est en mesure de faire preuve d abstraction réfléchissante sur les nombres en établissant des relations entre les divers éléments qui lui sont présentés. 28

45 chanson qu il aurait apprise par cœur. Les mots nombres n ont pas nécessairement de signification numérique pour lui. Au second niveau, la chaîne non sécable, les mots nombres ont une signification, en ce sens que l enfant sait qu il existe une différence entre 1, 2, 3, etc., mais les nombres font toujours partie d un ensemble qu il lui est impossible de séparer. À ce niveau, l enfant est en mesure de répondre à des questions sur ce qui suit et précède immédiatement un nombre. Pour réussir, il doit réciter la chaîne du début jusqu à l élément recherché. Si, à titre d exemple, on demande à l enfant ce qui vient après 8, il doit commencer par le début de la chaîne numérique pour connaître la réponse (1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, _ ). 11 Au troisième niveau, la chaîne sécable, l enfant a une assez bonne maîtrise de la chaîne numérique pour pouvoir débuter par un mot nombre autre que 1. Van Nieuwenhoven (1996), en expliquant les niveaux de connaissances de Fuson (1988, 1991), ajoute que «la chaîne sécable est une chaîne de liens connectés qui peut être entamée à n importe quel point d entrée (mot nombre), ces points peuvent donc être arbitraires» (p.298). À ce niveau, l enfant n a pas besoin de réciter la chaîne au complet pour connaître ce qui précède et ce qui suit un nombre, il est en mesure de donner instantanément la réponse. Par contre, il arrive que l enfant fasse quelques méprises. Même si la chaîne est ainsi assise sur l opération, car la chaîne numérique repose sur un nombre maintenant opérable offrant réversibilité, elle n est pas encore totalement dénombrable, en raison des erreurs encore fréquentes de l enfant. 12 L enfant est en mesure de le faire, mais il ne réussit pas toujours; en ce sens, la chaîne n est pas parfaitement dénombrable. Dans l exemple donné précédemment, l enfant qui possède une chaîne sécable est en mesure de répondre directement que c est 9 qui vient après 8, sans devoir réciter les éléments qui le précèdent dans la 11 Ceci suppose une certaine maîtrise du principe de la correspondance terme à terme, expliqué précédemment. 12 Ceci suppose donc une compréhension de l inclusion hiérarchique inhérente dans la chaîne numérique. L importance de cette inclusion est soutenue par Piaget et ses collaborateurs et elle est également reprise par Fayol (1990). Cela pourrait témoigner de la capacité de l enfant de faire preuve d abstraction réfléchissante sur les nombres. 29

46 chaîne numérique. À ce niveau, l enfant peut également compter en tenant compte d une borne inférieure et supérieure, autant à l endroit (en ordre croissant) qu à l envers (en ordre décroissant). Il est en mesure de compter, en respectant les bornes, par exemple de 9 à 15 : 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15 et il peut également le faire à l envers en comptant de 15 à 9 : 15, 14, 13, 12, 11, 10, 9. Toutefois, il ne serait pas en mesure de répondre à la question Au quatrième niveau, la chaîne est dénombrable 13. À partir de ce moment, l enfant peut effectuer un comptage en tenant compte d une borne inférieure et d une borne supérieure sans erreur. Il peut également opérer sur la série (autant en moins, qu en plus). L enfant est en mesure de répondre à une question telle que : «Tu as 12 bonbons et tu en retires 5, combien t en reste-t-il?» Donc, comme le disait Van Nieuwenhoven (1996), c est à ce moment que «la signification de la suite de comptage et la cardinalité fusionnent» (p.299). L enfant, dans ce cas-ci, parvient à faire , sans perdre de vue qu il doit soustraire seulement à 5 reprises, et non indéfiniment. Finalement, au dernier niveau, la chaîne est bidirectionnelle. L enfant réussit à compter à l endroit, à l envers et à partir d un nombre quelconque. Il parvient même à passer de l endroit à l envers et vice-versa sans problème et à décomposer les nombres en termes, comme 5 = 1+4, 2+3, 3+2 et 4+1. Il s agit alors d un réel comptage numérique, selon Fuson (1988, 1991) Autre procédure possible et difficultés reconnues Avant d entamer le comptage, l enfant peut déplacer les éléments afin d organiser son comptage. Il peut également déplacer les éléments dénombrés au fur et à mesure qu il effectue la tâche. Cette procédure est assez efficace lorsque le comptage est bien réalisé. En effet, l enfant doit énoncer un seul mot nombre pour chaque objet et déplacer un seul objet par mot nombre énoncé. De plus, il ne doit pas perdre le fil de son comptage et doit bien 13 Le domaine numérique est l étendue de nombres qui composent la chaîne numérique dénombrable. 30

47 séparer les éléments dénombrés des éléments non comptés pour ne pas les compter plus d une fois. En ce sens, deux procédures seront présentées : la construction d une représentation visuelle et la correspondance terme à terme. Pour pouvoir identifier le nombre d éléments contenus dans une collection, l enfant peut recourir à la représentation visuelle (ou l aspect figural chez Piaget). Il s agit d un outil auquel l enfant peut recourir pour connaître le nombre d éléments d une collection, sans avoir besoin de les dénombrer. Si, à titre d exemple, une collection non organisée de jetons lui est présentée (Figure 9) et qu il doit identifier leur nombre, l enfant pourra les ordonner, de façon à ce qu ils soient plus faciles à reconnaître le nombre (Tableau 1). Figure 9 : Présentation de jetons par l expérimentateur Tableau 1 : Organisation de la collection de jetons Organisation linéaire Aspect figural Dans les deux organisations présentées dans le tableau précédent, l enfant n a pas toujours besoin de compter les éléments pour en déterminer le nombre. Il lui suffirait de les placer de façon à ce qu il puisse associer un nombre à une forme qui lui est familière, comme la disposition des points sur les faces d un dé ou comme les symboles sur les cartes à jouer par exemple. Le nombre n est alors pas nécessairement conceptualisé comme une quantité, mais comme un nom associé à une image, au même titre que le nom d une personne peut 31

48 être associé à son visage ou à sa photo. Cette forme de reconnaissance ne reposant pas nécessairement sur une opération demeure extrêmement fragile. Il ne s agit qu un seul élément soit déplacé pour que l enfant n identifie plus le nombre (Tableau 2). Tableau 2 : Limite de l aspect figural 5 N est plus 5 Pendant les tâches de comptage et de comparaison de collections, certaines difficultés peuvent survenir chez des enfants aux débuts de leur apprentissage du concept du nombre. Lorsque les éléments à dénombrer sont très nombreux, ces difficultés peuvent prendre la forme d un manque d organisation ou encore d un échec lors de l utilisation d une procédure de comptage. En effet, si la collection comporte beaucoup d éléments et que ces derniers sont éparpillés sans représenter une forme ou une certaine régularité dans la disposition, l enfant peut commettre certaines erreurs lors du dénombrement ou de la correspondance. Une erreur que l enfant pourrait faire lors de son comptage serait de ne pas faire correspondre son comptage avec les objets : nommer un nombre sans pointer ou pointer un objet sans nommer ou compter plusieurs fois un même objet (Fuson, 1991). L enfant pourrait également échouer lors de la tentative de comptage par groupements si ces derniers ne sont pas réguliers (certains groupes de 7, d autres de 4 ou de 10, dépendamment de la position des éléments à compter). De plus, l enfant doit avoir atteint le niveau de chaîne sécable et bien organiser ses regroupements, sinon d autres problèmes peuvent survenir, comme en témoigne le tableau 3. 32

49 Tableau 3 : Problème lors de regroupement Chaîne non sécable Chaîne sécable Si l enfant ne compte pas les éléments, il peut tout de même faire face à quelques difficultés lors de l exécution des procédures présentées. En effet, l enfant pourrait tenter de manipuler les éléments qu il doit compter pour représenter une figure reconnaissable et échouer à cette tâche. À titre d exemple, si l enfant a 7 jetons qu il doit dénombrer, il se pourrait que, comme ce nombre ne se retrouve pas sur les dés standards, il ne soit pas en mesure de reproduire une forme qu il connaît. Si l enfant n utilise pas d emblée le comptage et qu il n a pas construit la correspondance terme à terme, il se peut également que, dans le cas où une rangée lui est présentée comme modèle à reproduire, qu il privilégie uniquement l aspect perceptif de la collection plutôt que l aspect de la quantité pour établir une égalité. Si, par exemple, on place six jetons devant l enfant en lui demandant de mettre le même nombre de jetons en face, l enfant pourrait utiliser l aspect de la longueur pour déterminer combien il doit en placer sans compter le nombre de jetons dans la rangée qu il doit reproduire et expliquer que les deux rangées sont égales parce qu elles commencent et terminent au même endroit (Figure 10). 33

50 Figure 10 : Échec à la reproduction d une rangée-modèle Ce recours à traiter les objets dénombrés uniquement de manière figurale pourra amener l enfant à produire des erreurs dans ses comparaisons de collections. Par exemple, s il place ses jetons plus près les uns des autres que dans la rangée de référence, il pourra placer plus de jetons que le modèle et confirmer qu il a mis le même nombre de jetons. Il ne vérifie donc pas que les deux collections qui lui sont présentées comportent le même nombre d éléments; il ne ressent pas le besoin de se vérifier, car sa perception de l espace occupé indique que les deux rangées sont identiques (en longueur) et conclut qu elles comportent donc forcément le même nombre d éléments Question générale Aux termes de ce cadre théorique, il est possible de retenir que la définition du nombre choisie s inscrit dans une pensée piagétienne, comme quoi le nombre se divise en deux aspects : ordinal et cardinal. L aspect ordinal entre en jeu lorsque l on cherche à indiquer la position d un objet dans un rang (comme le deuxième, le troisième, etc.). L aspect cardinal concerne plutôt la quantification des éléments d un même ensemble (dans mon sac, il y a deux poupées et trois ballons, donc cinq jouets). Pour en arriver à ces conceptions du nombre, l enfant doit faire preuve d abstraction d abord empirique en portant attention aux caractéristiques physiques des objets, puis réfléchissante en établissant des relations entre les éléments qui lui seront présentés. Cette capacité d abstraction se complexifie notamment par la construction de deux opérations interreliées, la correspondance terme à terme et la conservation, qui serviront à la conceptualisation même du nombre et du réel comptage, par l emploi d une chaîne numérique bidirectionnelle. 34

51 Malgré quelques distinctions concernant la construction du nombre chez l enfant toutvenant entre les perspectives présentées par Piaget et ses collaborateurs (1964, 1967, 1967, 1977) d une part, et d autre part, par Gelman et Gallistel (1986), Van Nieuwenhoven (1996, 1999) et Fuson (1988, 1991), l ensemble de la littérature scientifique consultée en psychologie et en didactique des mathématiques semble s entendre à savoir que le nombre se construit par l action même du sujet et sa réflexion sur elle. Aucune étude ne semble promouvoir la construction du nombre par simple répétition d un comportement numérique attendu et «imité» par l enfant guidé par un adulte qui le renforce positivement par des récompenses motivantes, comme le promeuvent A.B.A. et T.E.A.C.C.H. S il en est ainsi pour l enfant tout-venant, et si la construction du nombre nécessite la construction d abstraction et d opération, est-il possible de soutenir la construction du nombre chez l enfant autiste dans la même perspective développementale? 35

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53 3. Approche d intervention pédagogique Pour tenter de répondre à cette question, une approche d intervention pédagogique a été mise en place dans une perspective développementale. Ce chapitre permettra d exposer les idées maîtresses d une approche développementale, de présenter le projet pédagogique dans son ensemble ainsi que les contextes mathématiques qui ont été mis en place aux fins du présent mémoire Idées maîtresses d une approche développementale Une pédagogie basée sur une approche développementale doit respecter quelques principes importants, dont la complexité de la tâche proposée à l enfant, le sens donné aux erreurs et que l intervention soit située dans la zone proximale de développement de l enfant. Ces trois idées maîtresses seront ici explicitées La complexité de la tâche Dans l optique de soutenir la construction du concept de nombre chez l enfant autiste dans une perspective développementale, il convient d emblée d exposer les assises de l approche d intervention pédagogique. L intervenant ne doit pas décomposer les tâches considérées «difficiles» pour l enfant; il doit constamment lui proposer des tâches complexes (Lavoie, 2004; Prince, 2011). L objectif lors du choix des tâches est de proposer un problème qui peut être assimilé par l enfant, tout en causant un conflit cognitif qui l amène à sortir de sa zone de confort (où aucun apprentissage ne peut être effectué, en raison que l enfant est déjà en mesure d accomplir certaines de ces tâches par lui-même). L intervenant apporte son soutien lors de la résolution des tâches complexes en permettant à l enfant d exprimer son raisonnement ou en le questionnant sur l action qu il aura posée pour résoudre la tâche. Les actions de l enfant et ses réflexions sur ces dernières permettent au raisonnement de devenir «opérable». 37

54 Le sens des erreurs On cherche également à comprendre le sens des erreurs produites par l enfant pour décortiquer sa logique et, ainsi, améliorer les enseignements mis en place. Les erreurs ne doivent plus seulement être identifiées, mais on doit plutôt tenter de comprendre pourquoi elles surviennent et comment on peut amener l enfant à ne plus les commettre. En ce sens, Astolfi (1997) attribue un rôle nouveau à l erreur : «celui d indicateur et d analyseur des processus intellectuels en jeu» (p.17). Un intérêt pour les erreurs commises par les élèves dans le but de modifier les méthodes d enseignement se retrouve également chez Baruk (2003) La zone proximale de développement Pour que ces interventions soient bénéfiques pour l enfant, ils doivent être à un niveau particulier, défini par la zone proximale de développement (Z.P.D.). Ce concept, élaboré par Vygotski dans les années 1930, met en lumière le fait que le niveau réel de l enfant ne peut être établi seulement par les tâches qu il accomplit seul; il importe de considérer également ce qu il peut faire en collaboration avec un adulte (Vygotski, 1997). En ce sens, l adulte accompagne le sujet dans ses raisonnements mathématiques et le guide pour favoriser les apprentissages. Lorsque l enfant ne répond pas correctement à une question mathématique, il provoque en soutenant son raisonnement pour approfondir l apprentissage, en exagérant les erreurs que l enfant commet afin que ce dernier parvienne à réfléchir sur ses erreurs. De cette manière, on parvient à faire progresser l enfant peu à peu, en le sortant de sa zone de confort et en bousculant ses conceptions actuelles sur le nombre. Comme le souligne d ailleurs Vygotski, «la zone prochaine de développement [ou zone proximale de développement] a une signification plus directe pour la dynamique du développement intellectuel et la réussite de l apprentissage que le niveau présent de leur développement.» (p.352, 1997). 38

55 3.2. Projet pédagogique d ensemble Un projet d intervention pédagogique basé sur la littérature de jeunesse et sur le jeu a été mis sur pied. La période de temps pendant laquelle s étendent les interventions se divise en plusieurs univers de connaissances différents orientés par le choix des livres de littérature de jeunesse (Le Pôle Nord par exemple peut être travaillé pendant les mois de décembre à février). En fonction de cet univers, l intervenante crée du matériel pour jouer symboliquement (des marionnettes d animaux du pôle Nord, la construction d une maquette de banquise, d un igloo ) et tous les livres qui seront utilisés abordent différents aspects de la vie au Pôle Nord. En plus des récits, il est important de choisir des documentaires en lien avec cet univers, pour apporter des connaissances sur le monde aux enfants avec qui on élabore ce projet. Les récits seront utilisés à un rythme d un par semaine, qui sera discuté en lecture interactive chaque jour. En lien avec ces histoires, des jeux de règles (ou jeux de société) peuvent être élaborés pour travailler les notions mathématiques. Dans le cadre des interventions qui se sont déroulées de manière concomitante à ce mémoire, les périodes de travail ont toujours été basées sur un même horaire, qui a une durée d environ trois heures. D abord, un calendrier est construit avec l enfant pour travailler les notions mathématiques de nombre et de temps. Après le travail en mathématiques, la lecture du récit est effectuée. Lors de cette activité, l intervenante pose des questions sur le récit afin d aider l enfant à construire la trame causale de l histoire (comme : Que veut-il? Pourquoi fait-il cela? etc.). En plus de favoriser la structuration du récit, la lecture interactive permet de consolider certains aspects logico-mathématiques, comme les relations de causalité et de transitivité, notamment lors des questionnements à propos des buts des personnages. Le nombre est travaillé une seconde fois à l aide d un jeu de règles. Chaque jour de la semaine, un jeu est utilisé pour travailler différentes notions : la comparaison, la classification, la sériation, etc. Ensuite, on s invente une histoire que l on joue symboliquement (que ce soit avec de petites figurines ou des marionnettes sur la maquette ou grandeur nature en incarnant des personnages). Lors du jeu symbolique, l intervenante peut utiliser les informations recueillies dans les documentaires pour élargir les connaissances sur le monde de l enfant et elle peut travailler des notions mathématiques, 39

56 telles que la classification et la hiérarchisation des connaissances exploitées dans le contexte abordé. Bien que les concepts logico-mathématiques soient impliqués ainsi dans tous les contextes, la construction du nombre est travaillée plus spécifiquement dans deux contextes distincts aux fins de ce mémoire : la construction d un calendrier et les jeux de règles (couramment nommés jeux de société). Dans la prochaine section, ces contextes d interventions seront explicités Contextes mathématiques aux fins du mémoire Certains contextes d intervention permettent à l adulte de centrer ses questionnements sur les nombres utilisés, les opérations et les relations s y rattachant pour viser la construction du nombre dans ses aspects ordinal et cardinal. Dans le cadre de ce mémoire, deux contextes sont privilégiés: la discussion et les manipulations autour du calendrier et dans les jeux de règles Le calendrier Dans le cadre de ce projet d intervention, on demande à l enfant de construire un calendrier mural, en remplissant chaque jour une feuille avec la date, le nom de la journée et des informations sur la température où sur les activités qui étaient planifiées. Quand cette feuille est complétée, on lui demande d aller la coller sur un mur (ou un grand carton) qui sert alors de calendrier. De cette manière, l intervenante peut constater certaines organisations de temps chez l enfant. Dans le tableau 4, la feuille fournie à l enfant pour illustrer chaque journée se trouve à gauche et un exemple de calendrier rempli se trouve à droite. 40

57 Tableau 4 : Exemple de matériel utilisé pour faire un calendrier Exemple de feuille de calendrier Exemple d une feuille remplie par un enfant Exemple d un mois de calendrier rempli par un enfant Voici comment se déroulent les interventions. Pour chaque journée, l intervenante questionne l enfant sur les notions de temps. Elle lui demande «Quel jour de la semaine sommes-nous? Quelle est la date d aujourd hui?» pour que l enfant soit en mesure de se situer dans le temps. 41

58 L enfant doit inscrire le jour de la semaine et la date sur une petite feuille puis elle est invitée à dénombrer de petits blocs emboîtables pour représenter le nombre de la date du jour (série et quantité). Ensuite, à l oral, l intervenante la questionne sur la construction du nombre. Des questions telles que : «Dans la date d aujourd hui, combien y aura-t-il de paquets de dix et combien y aura-t-il de blocs tout seul?» sont posées pour représenter les dizaines et les unités. Quand l enfant a répondu à ces questions, l intervenante l invite à procéder au regroupement par 10 des blocs emboitables pour qu elle puisse concrètement vérifier ses hypothèses sur la construction du nombre. L intervenante questionne l enfant à nouveau pour savoir, une seconde fois lorsque tous les blocs sont organisés en groupement de 10 sur la table, «Combien y a-t-il de paquets de dix et de blocs tout seuls?» et «Dans tous ces paquets, il y a combien de blocs?». L enfant peut alors manipuler et vérifier le nombre à l aide des blocs emboitables (une dizaine ou un «paquet de dix» est représenté par un bâton de dix blocs emboitables) et les coller sur la feuille de la journée représentée. Cette feuille peut finalement être ajoutée au calendrier mensuel qui se trouve au mur. Ensuite, l intervenante questionne l enfant sur les jours de la semaine et les dates d hier, d avant-hier, de demain et d après-demain et sur les notions de semaine et de mois. Ces questionnements ont pour but de travailler les opérations sur les nombres connus par l enfant en ce sens que l enfant doit se souvenir de la date de la journée et additionner ou soustraire 1 et 2 journées. L enfant peut, par contre, regarder le calendrier mural pour guider ses réponses. Enfin, quand les feuilles quotidiennes sont ajoutées au calendrier, un travail d observation et de comparaison est réalisé à l oral. L intervenante demande à l enfant de lui indiquer quelle feuille contient le plus de blocs et quelle date y est inscrite. Elle pose également les mêmes questions à propos de la feuille qui contient le moins de blocs. Elle lui demande quel est le plus petit nombre et quel est le plus grand nombre présent sur le calendrier et l enfant doit chercher une régularité (comme le 1 est toujours au début et il ne contient pas beaucoup de blocs, mais le plus grand nombre change tous les jours, comment cela se peut-il? etc.). Les objectifs derrière cette activité sont de favoriser le dénombrement entre 1 et 31, de comprendre les notions de temps (comme les journées, les 42

59 semaines et les mois) et de réaliser des opérations sur la chaîne numérique, ce qui sollicite la correspondance terme à terme entre le bloc et le nombre énoncé par l enfant Les jeux de règles Pour travailler les différents aspects du nombre, divers jeux de règles peuvent être utilisés. Chaque fois, l objectif pédagogique précis est de soutenir l enfant dans sa construction du concept du nombre. Pour ce faire, l intervenante questionne l enfant sur les nombres utilisés dans le cadre du jeu, sur les relations et sur les opérations qui peuvent y être effectuées, que ce soit dans leur aspect ordinal ou cardinal selon le contexte du jeu, tout en demeurant dans sa zone proximale de développement. À titre d exemple, voici un jeu qui a été construit dans le cadre de ce projet d intervention pédagogique à partir d un livre de littérature de jeunesse, Cher Ours polaire de Barry Ablett 15 dans le but de construire le concept du nombre. 14 Travaillant prioritairement sur le petit nombre, il convient de préciser que le travail sur la dizaine est sans doute précoce. Comme ce sont des avancées et des discussions que l on fait avec les jeunes enfants toutvenant en train de construire les assises même du petit nombre par l opération sur ce dernier, ces questionnements sur le regroupement de 10 n ont pas été évités. L intention derrière n étant pas d exiger une réussite et une pleine compréhension immédiate de la base 10, mais strictement de susciter une expérience répétée de regroupement sur lequel, le temps venu, l enfant sera poussé à construire des régularités sur cette base. Autrement dit, ce travail se faisait en pleine connaissance et en considération du niveau de l enfant. Par exemple, sans conservation du nombre, les 21 blocs séparés ne représentaient sans doute pas la même quantité pour l élève qu une fois emboités. Il convenait de prendre le temps de recompter, ceci pouvant contribuer à soulever, à long terme, une problématisation chez l enfant. 15 Cher Ours polaire est l histoire d un ours polaire qui est triste parce qu il est seul. Il décide donc d écrire des lettres à ses amis et de les envoyer avec Pingouin le facteur. Il demande à Koala de lui envoyer quelque chose pour décorer son igloo, car celui-ci est triste et vide. Ensuite, il écrit à l Ours malais pour lui demander de lui envoyer quelque chose de bon à manger parce que la nourriture qu il a au Pôle Nord est gelée. Puis, il demande à son ami Panda s il n aurait pas une astuce pour se réchauffer, car il a froid au Pôle Nord. Celui-ci lui envoie des vers à soie. Ne sachant pas ce que c était, il envoie une lettre à son amie Grizzly pour lui dire qu il s ennuie et lui demande conseil pour les vers. À la tombée de la nuit, il ne voit pas bien toutes les belles choses qui se trouvent dans son igloo. Il écrit une lettre à l Ours à lunettes pour savoir comment voir dans le noir. L Ours polaire est heureux que tous ses amis aient pu l aider et il leur écrit une dernière fois pour les remercier. Quelques jours plus tard, le facteur lui apporte un énorme colis contenant tous ses amis. 43

60 Jeu de Cher Ours polaire Figure 11 : Plateau du jeu Cher Ours polaire Les joueurs sont des petits pingouins facteurs qui doivent distribuer les lettres de l Ours polaire à ses amis. Un joueur doit piger une lettre et la lire à voix haute. Tous les pingouins doivent aller porter cette lettre. Celui qui atteint le destinataire en premier gagne la lettre et doit en piger une nouvelle, qui devra être remise par un pingouin. À la fin de la partie, les joueurs comptent le nombre de lettres qu ils ont remises et le vainqueur est celui qui en a donné le plus. Par ce jeu, nous pouvons travailler la construction du nombre ainsi que la comparaison. Pour avancer les pions, un dé numéroté de 1 à 6 est utilisé. Certaines questions sont posées lors des parties pour travailler le nombre. Quand nous devrons rejoindre un ami de l Ours polaire, l intervenante demande : «Combien de cases est-ce qu il te manque pour donner la lettre? Et il m en manque combien? Qui est le plus proche? Qui est le plus loin? Qui va arriver en premier? Par quel chemin vas-tu passer?». Par ces questions, les aspects du nombre et la comparaison sont travaillés. Cette dernière question exige, à la fois, que l enfant dénombre les cases entre le point de départ et le point d arrivée, qu il établisse un cardinal pour chaque chemin possible et qu il utilise ces cardinaux pour comparer les divers chemins et choisir le plus rapide, selon la destination du moment. À titre d exemple, si le pion de l intervenante se retrouve à 3 cases de Koala et que celui de l enfant est à 4 cases, il doit vérifier lequel entre les deux est le plus proche en comptant le nombre de cases 44

61 séparant les pingouins de Koala. L enfant peut faire une correspondance terme à terme avec son doigt pour s assurer de bien compter les cases, mais il doit aussi concevoir la cardinalité, en ce sens que les cases dénombrées représentent une quantité précise révélée par le dernier mot nombre énoncé. On peut également travailler la comparaison grâce aux enveloppes que l on peut acquérir pendant la partie grâce à des questions du type : «Qui en a le plus? Qui en a le moins? Est-ce qu on en a le même nombre? Montre-moi pourquoi.» L utilisation des enveloppes facilite la comparaison, car il est possible de les manipuler, contrairement aux cases entre les pions et la destination Autres jeux pour favoriser la construction du concept de nombre Pour atteindre les objectifs pédagogiques qui permettent de construire le nombre, certains jeux commerciaux peuvent être utilisés si l intervenante oriente ses questionnements à cet effet. À titre d exemple, les jeux 16 Croque-carotte et Allez les escargots 17 peuvent s y prêter. Le tableau 5 donne un aperçu de ces jeux, des contraintes mathématiques qu ils contiennent et des exemples de questionnements mathématiques appropriés. 16 Ces deux jeux sont commercialisés par la compagnie Ravensburger. 17 Dans le jeu original, les deux dés sont colorés et chaque escargot avance d une case à la fois. Pour augmenter le niveau, un dé numéroté peut être utilisé pour travailler les concepts mathématiques. 45

62 Tableau 5 : Utilisation de divers jeux de règles commerciaux Jeu But : Atteindre la carotte avec l un de ses lapins, sans que les lapins ne disparaissent dans les trous de la montagne. But : Atteindre la ligne d arrivée avec tous les escargots. Contraintes mathématiques - Avancer de 1, 2 ou 3 cases, selon la carte pigée, en utilisant la correspondance terme à terme entre le nombre sur la carte et le nombre de cases à parcourir. - Plateau non linéaire (les lapins doivent gravir la montagne en tournant autour). - Utilisation d un dé numéroté de 1 à 6 pour le déplacement. - Compter le nombre de cases de déplacement. - Utilisation des notions de position. Questionnements mathématiques - Combien dois-tu obtenir pour atteindre la carotte? - Quel lapin se trouve le plus près de la carotte? - Quel lapin se trouve le plus loin de la carotte? - Quel lapin est le premier? - Quel lapin est le dernier? - Quel lapin est devant? Lequel est derrière? - Pour éviter les cases dangereuses, de combien de cases dois-tu avancer? - Quelle est la position de l escargot X? - Qui est premier? Deuxième? Troisième?... - Qui est dernier? - Qui est le plus près de la ligne d arrivée? Qui est le plus loin? De combien de cases est-il le plus loin? - Qui est devant l escargot X? Qui est derrière lui? - Est-ce qu il y a des escargots qui sont à la même position? - Combien lui manque-t-il de cases pour gagner? 46

63 En somme, la construction du concept de nombre peut être travaillée de diverses manières. Dans le cadre de ce mémoire, deux contextes particuliers sont abordés: le calendrier et les jeux de règles. Dans le cadre du calendrier, les objectifs pédagogiques visaient à complexifier la compréhension des notions de temps et de contribuer à la construction du nombre. Dans le cadre des jeux de règles, les objectifs pédagogiques visaient à travailler les opérations de comparaison, de quantification, de sériation et de classification sur les nombres. Pour ce faire, divers jeux de règles peuvent être utilisés, comme des jeux construits par l intervenant ou des jeux commerciaux. 47

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65 4. Méthodologie Une fois l approche pédagogique décrite en lien avec la construction du nombre chez un enfant, la méthodologie de la recherche ainsi réalisée peut être décrite. Dans les prochaines sections, le but et les objectifs de la recherche seront circonscrits. Ensuite, le type d étude, le sujet, les modalités d intervention, la collecte de données, le protocole d entrevue semidirigée et le plan d analyse des données seront présentés, en lien avec le but et les objectifs spécifiques de cette recherche But et objectifs de la recherche Il convient de rappeler que le présent projet de recherche vise à répondre à la question suivante : «Si avec l enfant tout-venant les méthodes A.B.A. et T.E.A.C.C.H. ne sont pas utilisées pour favoriser la construction du nombre, pouvons-nous soutenir cette même construction chez l enfant autiste en délaissant ces méthodes au profit d une pédagogie développementale?» La recherche de réponse à cette question fait émerger à son tour deux sous-questions : «Quelle compréhension des aspects ordinal et cardinal du nombre l enfant autiste démontre lors de la résolution de tâches mathématiques?» et «En quoi cet enfant évolue dans la compréhension des aspects ordinal et cardinal du nombre à la suite d intervention basée sur la construction d un calendrier et sur le jeu?». Dans cette optique, le but de cette étude est de décrire les progrès réalisés par un enfant autiste dans l apprentissage du concept de nombre en travaillant les notions mathématiques par une pédagogie développementale basée sur le jeu. Deux objectifs spécifiques ont ainsi été circonscrits : 1. Décrire la progression de la compréhension de l aspect ordinal du nombre; 2. Décrire la progression de la compréhension de l aspect cardinal du nombre Type d étude Ce projet de recherche est une étude de cas réalisée dans le cadre d un projet d intervention pédagogique basé sur la littératie et sur le jeu visant, dans le cas qui nous intéresse ici, à 49

66 construire le concept de nombre chez un enfant. En ce sens, cette recherche s inscrit dans un courant phénoménologique et herméneutique, car il ne s agit pas seulement de décrire les phénomènes observés, il faut également les comprendre (Van Manen, 1984, cité par Anadón, 2006; Van der Maren, 1995). Pour avoir accès aux raisonnements de l enfant pendant toute la durée des interventions, afin de constater les progrès ou les reculs vis-à-vis du nombre et ainsi établir la zone proximale de développement où les interventions devaient être réalisées, la méthode de recherche-action a été utilisée. L intervenante-chercheure devait constamment ajuster son approche pour répondre aux besoins de l enfant, tout en conservant ses objectifs pédagogiques en tête. Cette méthode est très dynamique et se déroule en trois grandes étapes, qui ne suivent pas forcément un ordre linéaire : 1) l action; 2) l observation; et 3) la réflexion. Chacune de ces étapes est présentée sous forme de boucle (ou de spirale) pour illustrer le processus par lequel passe le chercheur (Dolbec & Clément, 2004) Sujet Le sujet de cette étude est une enfant de 10 ans au début de l étude et de 12 ans à la fin ayant reçu un diagnostic d autisme et de déficience intellectuelle qui se nomme Marianne 18. Les parents, qui sont des professionnels, sont très présents et à l écoute des besoins de leur enfant. Cette dernière a un demi-frère plus âgé de 27 ans qui ne vit plus à la maison. La scolarisation antérieure de l enfant s est déroulée amplement autour d interventions béhavioristes promues par les méthodes A.B.A. et T.E.A.C.C.H., telles que décrites précédemment. Comme on cherchait à tracer la progression d une enfant autiste pour laquelle des interventions d ordre développemental devaient être déployées au quotidien, cela a exigé de sélectionner un seul sujet pour qui les parents acceptaient cette «intrusion» dans leur vie; il 18 Il s agit d un nom fictif. 50

67 s agit d un cas «par convenance» 19. La définition d étude de cas utilisée ici s apparente à celle qualifiée d «intrinsèque» par Stake (1994), qui considère l étude de cas comme un choix du sujet à étudier plutôt que comme un choix méthodologique. C est le sujet étudié en soi qui amène à se questionner sur la construction du nombre dans ses aspects ordinal et cardinal. Ce type d étude de cas signifie pour cet auteur que l on s intéresse à traiter en profondeur un seul sujet, pas parce qu il est représentatif d un échantillon, mais bien parce qu il représente des atouts permettant de répondre aux questions inhérentes à la recherche en soi (Karsenti & Demers, 2000; Stake, 1994) Modalités et temps d intervention La recherche se déroule dans un mode d intervention pédagogique individuelle ayant une visée développementale, tel que décrit au chapitre précédent. Lors de la première année d intervention (réalisé en par une autre intervenante-chercheure 20 ), les rencontres se déroulaient à la maison, à raison de 5 demi-journées par semaine. Le reste du temps, l enfant était scolarisée dans une classe spécialisée pour enfants ayant une déficience intellectuelle moyenne ou sévère. Lors de la deuxième année, les rencontres individuelles avaient lieu dans un local de l école où était scolarisée l enfant, à raison de 4 demi-journées par semaine. Ces rencontres étaient également réalisées selon l approche pédagogique décrite précédemment Collecte de données Pendant les deux années d intervention auprès de cette enfant, des données ont été prises à quatre moments pour tenter de tracer sa progression dans la construction du concept de Il s agit d un cas par convenance, au même sens qu un échantillon de convenance, c est-à-dire un échantillon de population choisi pour sa praticité et son accessibilité lors d'une enquête (Miles et Huberman, 2007). Cette intervenante-chercheure était madame Marie-Pierre Baron, doctorante en psychopédagogie. Il convient, par le fait même, de la remercier d avoir bien voulu partager ses données sur le nombre aux fins de ce mémoire. 51

68 nombre, soit en octobre 2011, en mai 2012, en février 2013 et en juillet Les deux premières évaluations ont été réalisées au domicile de l enfant où se déroulaient les interventions à ce moment et les deux dernières ont eu lieu à l école primaire de l enfant et au camp de vacances pour le mois de juillet, car c était à ces endroits que prenaient place les interventions. Tableau 6 : Données collectées Octobre 2011 Mai 2012 Février 2013 Juillet 2013 Entrevue semidirigée, retranscrite en verbatim Entrevue semidirigée, retranscrite en verbatim Entrevue semidirigée, retranscrite en verbatim Entrevue semidirigée, retranscrite en verbatim Interventions quotidiennes de trois heures pendant les années scolaires et Chaque évaluation était étalée sur une semaine, ceci ayant pour but de réaliser quelques items par jour (d une durée maximale de 30 minutes), pour conserver l implication de l enfant dans la tâche et ainsi d avoir une idée juste de son niveau. En ce sens, comme il s agit toujours de la même personne qui est évaluée à plusieurs moments distincts sur une période de temps préétablie pour tracer une évolution, cette recherche est donc longitudinale (Zazzo, 1967) Protocole d entrevue semi-dirigée Afin de répondre aux deux objectifs spécifiques suivants : 1) décrire la progression de la compréhension de l aspect ordinal du nombre; et 2) décrire la progression de la compréhension de l aspect cardinal du nombre, un protocole d entrevue semi-dirigée, fortement inspiré des travaux de Piaget, a été élaboré. Un exemplaire du protocole se retrouve à l annexe 1. Les items du protocole ont été réalisés sans soutien important de la part de l adulte. Ils ont tous été vidéofilmés et retranscrits sous forme de verbatims par l intervenante-chercheure. 52

69 Description des items du protocole d entrevue Les items 21 du protocole peuvent être divisés en deux groupes : ceux qui vérifient la compréhension de l aspect ordinal du nombre (objectif spécifique 1) et ceux qui vérifient la compréhension de l aspect cardinal du nombre (objectif spécifique 2) Items portant sur l aspect ordinal du nombre Deux items ont été réalisés pour vérifier la compréhension de l aspect ordinal du nombre chez l enfant : la sériation d objets de tailles différentes et la sériation d objets faisant une course Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes Le premier item concerne la sériation en ordre croissant d objets. L intervenantechercheure présente une série de cartons de différentes longueurs qu elle dépose de façon aléatoire sur la table. Elle demande à l enfant de les placer en ordre en commençant par le plus petit jusqu au plus grand. Cet item sert à vérifier si l enfant est capable de sérier des éléments en fonction de leur taille. - Placer X cartons de différentes longueurs sur la table. «Peux-tu les placer du plus petit au plus grand?» 21 Au départ, seules les évaluations réalisées lors de la deuxième année devaient être analysées. Par contre, comme l intervenante de la première année a accepté de partager ses données sur le nombre, il est possible d établir une progression de la compréhension du nombre sur une plus longue période de temps. Le protocole utilisé pendant les deux premières évaluations et pendant les deux dernières n est pas le même, bien que les deux protocoles élaborés (le premier ayant été réalisé par la première intervenante, madame Marie-Pierre Baron) observent les mêmes éléments par différentes tâches. Dans le cadre de ce mémoire, seul le protocole utilisé lors de la deuxième année sera décrit. 53

70 Item 2 : Sériation d objets faisant une course Le deuxième item concerne la sériation d éléments d une même collection. L intervenantechercheure utilise des escargots en bois de différentes couleurs et les dispose en ligne, comme s ils faisaient une course. Elle questionne l enfant sur la position de chaque escargot («Quelle est la position de l escargot bleu? De l escargot jaune? Qui est le dernier? Qui est le premier?», etc.) et sur des éléments spatiaux également («Qui est devant l escargot bleu? Qui est derrière le deuxième?», etc.). - Placer les 6 escargots de couleur (bleu, rose, orange, rouge, vert, jaune) en ligne. «Lequel est le premier? Lequel est le dernier? L escargot orange est à quelle position?», «Quel escargot est devant le orange? Quel escargot est derrière le orange? Si l escargot orange est le troisième, quelle est la position de l escargot rose? Et si l escargot rouge est après le orange, c est quoi sa position?» Items portant sur l aspect cardinal du nombre Six items ont été réalisés pour vérifier la compréhension de l aspect cardinal du nombre chez l enfant : la comparaison de collections d objets identiques et d objets différents (correspondance terme à terme), la conservation de quantités continues et discontinues, le comptage et la cardinalité Item 1 : Comparaison de collections d objets identiques (correspondance terme à terme) Le premier item concerne la correspondance terme à terme et se déroule en deux étapes distinctes. Premièrement, devant l enfant, l intervenante-chercheure dresse deux collections de jetons de couleurs différentes, comportant un nombre légèrement différent (un seul jeton de différence entre les deux collections), pour que l enfant ne puisse pas seulement utiliser des éléments perceptifs pour répondre. Ces derniers doivent être placés pêle-mêle sur la 54

71 table. La question : «Est-ce qu il y a plus de jetons ici (première collection), ici (deuxième collection) ou c est pareil?» est posée et reformulée à deux reprises pour que les choix ne se retrouvent pas toujours dans le même ordre, pour éviter que l enfant ne fasse que répondre le dernier élément énoncé par l intervenante-chercheure en utilisant l effet de récence. Par la suite, elle questionne l enfant pour comprendre comment elle peut faire pour le savoir. Si l enfant n y arrive pas, l intervenante-chercheure modifie le nombre de jetons des collections pour qu il y ait une grosse différence entre les deux cardinaux. Le même questionnement doit être utilisé. - Disposer sur la table deux collections inégales. «Est-ce qu il y en a plus ici, plus ici ou c est pareil? Est-ce qu il y en a pareil, plus ici ou plus ici?» - «Qu est-ce que tu peux faire pour que ce soit égal?» Deuxièmement, l intervenante-chercheure retire les jetons utilisés précédemment et dresse deux nouvelles collections comportant, cette fois-ci, le même nombre de jetons. Son questionnement reste le même : «Est-ce qu il y en a plus ici (première collection), ici (deuxième collection) ou c est pareil?» sans oublier de varier l ordre des choix de réponses. Elle demande également à l enfant comment elle peut savoir que c est pareil ou s il y a une collection qui comporte plus de jetons que l autre (selon la réponse donnée par l enfant). 55

72 - Disposer sur la table deux collections égales. «Est-ce qu il y en a plus ici, ici ou c est égal? Est-ce qu il y en a égal ou plus ici ou ici?» (Réduire les collections si elle ne réussit pas.) Le but de cet item est de vérifier les stratégies utilisées par l enfant lors d une tâche de comparaison de collections formées par une autre personne : est-ce qu elle recourt au comptage, à la correspondance terme à terme, à la reconnaissance visuelle? Item 2 : Comparaison de collections d objets différents (correspondance terme à terme) Le deuxième item concerne à la fois la conservation de quantités discontinues et la correspondance terme à terme. Premièrement, l intervenante-chercheure place sur la table des images de fruits pêle-mêle (6 images de pommes et 4 images de framboises). Elle demande à l enfant s il y a plus de pommes, plus de framboises ou si c est pareil, en prenant soin de la poser trois fois, en variant l ordre des choix de réponse pour vérifier que l enfant ne réponde pas seulement en utilisant l effet de récence. - Placer 6 images de pommes et 4 images de framboises sur la table. Demander à l enfant «Est-ce qu il y a plus de pommes ou plus de framboises? Est-ce qu il y en a plus ici, ici ou c est pareil?» (Reformulation de la question pour éviter l effet de récence.) Deuxièmement, l adulte forme une rangée de trois pommes et une autre de quatre framboises. Toutefois, les deux rangées occupent la même longueur sur la table, en raison de l espacement entre les images. L adulte questionne l enfant pour savoir s il y a plus de 56

73 pommes, plus de framboises ou si c est pareil. Tout comme les items précédents, cette question est reformulée deux fois pour varier l ordre des choix de réponses et l enfant est questionnée sur son choix («Comment tu fais pour le savoir?») pour vérifier la stratégie utilisée dans ce contexte. Ensuite, elle espace les images de pommes pour que cette rangée dépasse la rangée de framboises à la droite et à la gauche, en raison de l augmentation de l espace laissé entre chaque image. L enfant est questionnée à nouveau, de la même façon. Ces questionnements permettent à l expérimentatrice de vérifier si l enfant a construit la conservation des quantités discontinues. - Former 2 rangées : une avec 3 images de pommes et l autre avec 4 images de framboises. «Est-ce qu il y en a plus ici, plus ici ou c est pareil?» Déplacer les images de pommes pour que cette rangée soit plus longue que celle de framboises ou déplacer les images de framboises pour que cette rangée soit moins longue que la rangée de pommes et questionner l enfant : «Est-ce qu il y en a plus ici, plus ici ou c est pareil? Pourquoi?» Item 3 : Conservation de quantités continues Le troisième item concerne la conservation de quantités continues. En raison du niveau de développement de l enfant qui évolue autour de la construction du nombre dont il est question dans ce mémoire, l observation de la conservation sera circonscrite autour de certaines des quantités continues (avec une substance comme de la pâte à modeler), car elles sont acquises plus tôt dans le développement des enfants, comparativement à la conservation du poids ou du volume, par exemple. Cet item est tiré des travaux de Piaget. L intervenante-chercheure présente deux boules de pâte à modeler de même taille à l enfant. Celle-ci doit confirmer qu elles contiennent toutes deux la même quantité de pâte en répondant à une question : «Est-ce qu il y a plus de pâte ici (en pointant la première boule), ici (en pointant la seconde boule) ou c est pareil?» Celle-ci est reformulée à deux 57

74 reprises en changeant l ordre des éléments pour s assurer que l enfant ne fait pas qu utiliser l effet de récence en nommant le dernier élément énoncé par l adulte. - Faire deux boules de pâte à modeler de même grosseur, de couleur différente. «Est-ce que les deux boules sont pareilles?» Ensuite, lorsque l égalité est convenue, l intervenante-chercheure prend une boule et la transforme, sous les yeux de l enfant, en galette en l écrasant de la main. Elle demande à l enfant si les deux parts contiennent la même quantité de pâte, en reprenant les mêmes questions. - Faire une galette avec une des deux boules. «Est-ce qu il y en a plus ici, plus ici ou c est pareil? Est-ce qu il y en a pareil, plus ici ou plus ici?» L adulte effectue un retour à l état initial en reformant une boule avec la galette et en redemandant à l enfant de confirmer l égalité. - Reformer les deux boules. «Est-ce qu il y en a plus ici, plus ici ou c est pareil? Est-ce qu il y en a pareil, plus ici ou plus ici?» Puis, l adulte reprend la boule, la transforme cette fois-ci en rouleau et elle questionne l enfant à nouveau sur l égalité entre les deux parts de pâte. 58

75 - Prendre une boule et faire un rouleau avec. ««Est-ce qu il y en a plus ici, plus ici ou c est pareil? Est-ce qu il y en a pareil, plus ici ou plus ici?». Pour une seconde fois, l adulte effectue un retour à l état initial et questionne l enfant. - Reformer les deux boules. «Est-ce qu il y en a plus ici, plus ici ou c est pareil? Est-ce qu il y en a pareil, plus ici ou plus ici?» Finalement, elle transforme la boule en plusieurs miettes et questionne à nouveau l enfant s il y a un endroit où il y a le plus de pâte ou si c est égal. Cet item a pour but de vérifier si l enfant comprend les modifications qui sont effectuées ou si elle ne se fie qu à sa perception lorsqu elle affirme que les deux parts ne sont plus égales, bien que l intervenante-chercheure n ait fait aucun ajout ni aucun retrait de pâte lors de l expérimentation. - Prendre une boule et faire des miettes. «Est-ce qu il y en a plus ici, plus ici ou c est pareil? Est-ce qu il y en a pareil, plus ici ou plus ici?» 59

76 Item 4 : Conservation de quantités discontinues Le quatrième item concerne la conservation de quantités discontinues et elle a été vérifiée par deux tâches distinctes. Lors de la première tâche, l intervenante dresse une rangée de 5 images de pomme sur la table. Elle demande à l enfant de construire une rangée pareille avec des images de framboise. - Faire une rangée avec 5 images de pomme sur la table. «Peux-tu me mettre la même chose de framboises que j ai de pommes?» Puis, l intervenante modifie l apparence de la rangée d images de pomme en rapprochant les images l une de l autre de manière à ce que la rangée de l enfant (alors non modifiée) soit plus longue ou en éloignant les images l une de l autre de manière à ce que la rangée de l enfant soit plus courte. À la suite de ces modifications, elle questionne l enfant pour savoir si l une des deux rangées comporte plus d éléments que l autre. - Sous les yeux de l enfant, déplacer les images de la rangée de référence de manière à ce que cette rangée dépasse celle de l enfant à droite et à gauche, en raison de l espacement entre les images. «Y a-t-il plus de pommes, plus de framboises ou c est pareil?» Modifier l ordre des choix de réponses pour éviter que l enfant ne réponde qu en utilisant l effet de récence. Cet item vise à vérifier la conservation des quantités discontinues (ou du nombre). Si l enfant a construit une opération de conservation, les modifications apportées par l expérimentatrice n affecteront pas le compte des images de fruits et elle ne ressentira pas le besoin de les recompter chaque fois. Si, par contre, le nombre n est pas conservé, elle énoncera qu une rangée de fruits comporte plus d éléments, même si les deux rangées sont équivalentes. 60

77 Item 5 : Comptage 22 Le cinquième item en est un de comptage, qui se déroule en plusieurs étapes. L intervenante-chercheure demande d abord à l enfant de compter le plus loin possible, dans le but de déterminer l étendue de la chaîne numérique correctement réalisée par l enfant pour pouvoir fixer les limites dans laquelle elle peut la questionner sur le nombre. - «Peux-tu compter le plus loin possible?» L enfant se rend jusqu à Y. Ensuite, elle lui demande de compter en tenant compte d une borne supérieure, d une borne inférieure, en tenant compte de ces deux bornes à la fois et de compter à rebours. - «Peux-tu compter jusqu à Z (Z plus petit que Y)» - «Peux-tu compter à partir de X?» X est plus petit que Y - «Peux-tu compter à partir de X jusqu à Z?» - «Peux-tu compter à l envers à partir de Z?» Le soutien de l intervenante-chercheure doit être apporté seulement pour recentrer l enfant dans la tâche; pour ce faire, elle répète exactement ce que l enfant a formulé précédemment pour l emmener à poursuivre d elle-même ou lui reformule la consigne qui était demandée. En aucun cas, elle ne doit donner les réponses à l enfant. Cet item a pour but de connaître l étendue de la chaîne numérique connue par l enfant et les opérations qu elle est capable d y faire Item 6 : Cardinalité Le sixième item tente de vérifier la cardinalité et le recours au comptage chez l enfant, par l intermédiaire de deux tâches distinctes. Lors de la première tâche, l intervenante- 22 L item de comptage a été classé comme faisant seulement appel à l aspect cardinal du nombre. Par contre, lorsque le nombre est réellement bien construit, les deux aspects (ordinal et cardinal) sont totalement imbriqués et, par le fait même, impliqués conjointement lors de tout comptage. 61

78 chercheure présente une rangée horizontale de bâtonnets de bois, en veillant à laisser un espace entre chacun, devant l enfant et elle lui demande combien il y en a. - Déposer X bâtonnets sur la table, en rangée. «Combien est-ce qu il y a de bâtonnets sur la table?» L intervenante-chercheure reprend les mêmes bâtonnets, les éparpille sur la table et redemande à l enfant combien il y a de bâtonnets. Lorsque l enfant a répondu, elle les reprend et reforme une ligne horizontale en espaçant tous les bâtonnets et redemande à l enfant combien il y en a. - En déplaçant les bâtonnets qui ont été comptés : «combien y a-t-il de bâtonnets maintenant?» Une première fois en les plaçant pêle-mêle et une seconde fois en reformant une rangée espacée. Elle reforme la ligne initiale horizontale avec les bâtonnets et questionne à nouveau l enfant de gauche à droite pour savoir combien il y en a et de droite à gauche. - Lorsque les bâtonnets sont replacés en une rangée : «Et si tu commences par ici, combien tu vas en avoir? Et si on commence de l autre côté? Combien tu auras de bâtonnets?» Lors de la deuxième tâche, l intervenante-chercheure place 5 silhouettes de femmes sur la table. Elle met l enfant en contexte : elle devra aller au centre commercial (représenté ici par une table à l autre bout du local) pour dénicher des tenues de soirée pour les dames. 62

79 Chacune d elles doit avoir une robe, des chaussures et trois bracelets. L enfant est invitée à se rendre au centre commercial pour apporter les éléments nécessaires en une seule fois. Si l enfant n y arrive pas, l intervenante-chercheure peut lui suggérer de retourner une deuxième fois au magasin en sachant combien de morceaux exactement elle a besoin. Cet item a pour but de forcer l enfant à recourir au comptage, car elle n est plus en mesure, dans un contexte comme celui-ci où les éléments qu elle doit apparier ne se retrouvent pas au même endroit, d utiliser la correspondance terme à terme. - Prendre 5 dames en carton. Apporter un ensemble de robes, de souliers et de bijoux pour habiller les dames. «Tu devras aller au magasin chercher des vêtements et des accessoires pour toutes les mesdames. Prends les vêtements que tu as besoin pour que chaque dame soit prête pour aller au bal. Les dames doivent avoir une robe, des souliers et trois bracelets. Le magasin ferme bientôt, donc on doit faire notre commande au complet.» (Si l enfant n y arrive pas en une seule fois, lui permettre de retourner au magasin une deuxième fois.) 4.7. Plan d analyse des données Pour pouvoir se prononcer sur la compréhension des aspects ordinal et cardinal du nombre chez le sujet, on s intéresse ici à ses réponses; ces dernières seront analysées puis appuyées sur la discussion autour de ces réponses pour établir la construction de certains éléments du nombre. Cette recherche s inscrit donc dans une démarche qualitative d analyse de données, car on interprète le sens et la signification des phénomènes humains observés (Merriam, 1998; Mucchielli, 2009). L implication de la chercheure au sein même de la recherche amène le besoin de prendre certaines précautions méthodologiques. En ce sens, pour réduire au maximum les 63

80 possibilités de subjectivité et de biais de la part de la chercheure, toutes les analyses ont été réalisées en interjuges avec une professeure de l Université Laval Cette professeure est madame Hélène Makdissi, directrice de cette recherche, qui a construit le projet d intervention pédagogique. En raison du faible nombre de données à analyser (seulement 4 moments d évaluation), l ensemble des items ont été évalués séparément par la professeure Makdissi et l intervenante-chercheure, puis mis en commun par la suite jusqu à entente en prenant soin de préciser dans les analyses les éléments nécessaires à l entente. 64

81 5. Analyses des résultats La présente section sera divisée en quatre parties distinctes correspondant chacune à un temps d évaluation différent : octobre 2011, mai 2012, février 2013 et juillet Chacune de ces parties se divisera en trois sous-parties : une analyse des items vérifiant la compréhension de l aspect ordinal du nombre, une analyse des items vérifiant la compréhension de l aspect cardinal du nombre et une synthèse de la compréhension de l enfant ainsi inférée à chacun de ces quatre temps d évaluation Évaluation 1 : Octobre 2011 Lors de la première évaluation, qui a été réalisée en octobre 2011, la compréhension de l aspect ordinal du nombre de Marianne a été évaluée par deux items du protocole, soit la sériation d objets de tailles différentes et la sériation d objets faisant une course. La compréhension de l aspect cardinal du nombre a été évaluée par cinq items du protocole, soit la comparaison de collections, la conservation de quantités continues et de quantités discontinues, le comptage et la cardinalité Items vérifiant la compréhension de l aspect ordinal du nombre La présente section expose, d une part, les analyses concernant la capacité de l enfant à sérier en ordre de grandeur cinq pailles différentes et, d autre part, sa capacité à considérer les diverses positions d objets d une série Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes L intervenante demande à l enfant de sérier quatre pailles, puis d en ajouter une cinquième à la série élaborée. Cet item a pour but de vérifier la sériation effectuée par l enfant en portant particulièrement l attention sur la réalisation de l épreuve en soi, plutôt que sur la sériation produite. La figure 12 présente la sériation effectuée par l enfant, la dernière paille ajoutée étant indiquée par une ligne plus large que les quatre autres. 65

82 ( ) Figure 12 : Sériation de cinq pailles réalisée en octobre 2011 Extrait I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : (Place 4 pailles sur la table, devant l enfant, la paille 1 étant toujours la plus petite.) J te donne ces pailles-là. [...] Est-ce que tu peux les mettre en ordre? Du plus petit au plus grand, les pailles. (Place les pailles en ordre : ) Est-ce que c est du plus grand au plus petit ou... Est-ce qu i sont corrects? Est-ce qu i sont en ordre de grandeur? (Acquiesce de la tête.) O.K. [...] (Sort une 5e paille, qui devrait être la paille numéro 2.) Regarde, j en avais oublié une! Pour Marianne! Peux-tu la mettre à sa place? Où a va, cette paille-là? C est où sa grandeur? (Place la nouvelle paille, en avant-dernier, soit dans l ordre : 5, 3, 4, 2, 1.) Ici. [ ] Lors de la réalisation de la tâche, Marianne ne semble pas comparer les pailles entre elles. Elle discute avec l intervenante, prend une paille à la fois dans l ensemble qui lui est proposé et elle l ajoute à la fin. Elle comprend qu elle doit les placer en ordre, donc elle entreprend de les placer en ligne, ce qui est une bonne idée. On voit également, par la considération du bas des pailles, une tentative de mise en relation de la plus petite à la plus grande paille (Figure 13). Figure 13 : Droites de projection imaginée ajoutées sur la sériation de 5 pailles 24 Dans chaque verbatim, les participants des échanges sont l intervenante (I), Marianne (M) et, dans certains cas, Hélène Makdissi (H). Les propos sont transcrits en caractères standards, les faits et gestes sont transcrits entre parenthèses en italiques et [ ] indique une partie de conversation retirée quand l enfant parle d autre chose que la tâche ciblée. 66

83 En ce sens, on peut penser qu elle tente de comparer les pailles entre elles pour déterminer leur rang dans la série. Par contre, elle ne voit pas la nécessité d aligner le bas des pailles pour établir la comparaison des longueurs à partir d un point d origine commun. Elle se situerait donc au premier stade de Piaget, c est-à-dire qu elle n arrive pas à réaliser sa sériation en considérant, à la fois, la relation qui lie les pailles entre elles et les limites perceptives qu elle doit respecter. Lors de cet item, un ensemble de cinq pailles est présenté à l enfant qui doit les sérier. Marianne prend les pailles une à une et ne réussit pas la sériation. Elle se situe au premier stade. Bien qu elle tente une mise en relation des grandeurs dans la série en faisant une «échelle» du bas des pailles, elle n arrive pas à une sériation adéquate, faute de considérer un point d origine commun pour les cinq pailles. On peut souligner que Marianne se centre sur une des extrémités des pailles pour procéder à sa sériation. Elle ne procède pas par une opération d ensemble lui permettant d envisager de manière coordonnée les deux extrémités des pailles de manière simultanée en établissant la nécessité d une ligne d origine commune pour déployer sa série Item 2 : Sériation d objets faisant une course L intervenante présente un ensemble de voitures à l enfant, prétextant que ces dernières font une course. L intervenante questionne l enfant à propos de la position des voitures au sein de la course. Cette mise en situation cherche à vérifier si l enfant démontre une certaine compréhension de l aspect ordinal pouvant exister dans une série, en référant aux positions des coureurs et en utilisant des notions perceptives. La figure 14 expose l ordre des voitures faisant la course. Figure 14 : Ordre des voitures faisant la course Extrait 2 1I: 2M : 3I : [...] C est laquelle la voiture qu i est en premier? (Touche la voiture rose.) Rose. La rose. C est laquelle la voiture qu i est en dernier? 67

84 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : 25I : 26M : 27I : 28M : 29I : 30M : 31I : 32M : (Touche la voiture verte.) Vert. C est celle qui est en dernier? Ouais. C est laquelle la voiture qu i est au milieu? Rouge. La rouge. C est laquelle la voiture qui est en avant de la voiture orange? (Pointe la voiture orange.) Celle-là. Ouais, ça c est la voiture orange. C est laquelle qui est en avant d elle? Jaune. [...] C est laquelle la voiture qui est après la voiture verte? Rouge. Oui. C est laquelle la voiture qui est avant la voiture orange? Jaune. Jaune. [...] C est laquelle la voiture qui est à la troisième position? Hein? C est laquelle la troisième? (Pointe la voiture jaune.) Celle-là. C est celle-là qui est en troisième? Oui. Remontre-moi celle qui est en troisième. (Pointe la voiture jaune, puis la orange, puis la mauve.) C est lequel ton choix? Mauve. Qui est à la troisième position? Ouais. O.K. P is la voiture jaune là, est à quelle position? (Ne répond pas.) Hein? La voiture jaune est à quelle position? C est quoi son numéro? Rose. Non, la jaune. Est à quelle position? C est quoi son numéro? 2. [ ] Lorsque l intervenante lui demande quelle voiture est en premier, Marianne parvient à identifier qu il s agit de la voiture rose [lignes 1-2]. Elle arrive également à répondre que la voiture rouge se situe «après» la voiture verte [lignes 13-14]. Il y a toutefois chez Marianne, dans cette situation, une confusion entre «avant» et «après». Peu importe si l intervenante lui demande «avant» ou «après», Marianne nomme la voiture qui se trouve après celle ciblée [lignes 9-10; 13-14; 15-16]. Également, on note une confusion pour le terme «dernier». Il semble que, pour Marianne, le dernier soit associé immédiatement et de manière proximale au premier [lignes 3 à 6]. Identifiant adéquatement la première position, la dernière position devient ainsi, en réalité, la deuxième position. En outre, elle ne parvient pas à identifier adéquatement plusieurs positions : le milieu (elle répond que c est la rouge [lignes 7-8]), la troisième position (elle répond que c est la mauve [lignes 17 à 24]). Lorsqu on lui demande la position de la voiture jaune, elle répond que c est la «deux» [lignes 27 à 32]. Marianne était toutefois consciente que la série débutait par la voiture rose [lignes 1-2]. Il est possible de penser que la sixième position à identifier ne se 68

85 situait pas dans une «zone confortable» de la construction du nombre chez Marianne 25. Ainsi, ceci l a possiblement poussée à considérer le début de la série par la fin, la menant ainsi à identifier la voiture jaune comme étant à la deuxième position [lignes 27 à 32]. Lors de cet item, une série de voitures faisant une course est présentée à l enfant. L intervenante la questionne alors sur la position des participants. Même si elle parvient à identifier la première position et l élément qui se situe après un autre, Marianne éprouve non seulement beaucoup de difficulté à identifier correctement les positions des objets d une série, mais également demeure confuse face à plusieurs termes nécessairement convoqués pour parler d une série, comme «avant», «milieu» et «dernier» Items vérifiant la compréhension de l aspect cardinal du nombre La présente section expose les analyses concernant la capacité de l enfant à comparer des collections d objets, à établir la conservation (de quantités continues et discontinues), à procéder au comptage et à considérer l aspect cardinal d une quantité dénombrée Item 1 : Comparaison de collections (correspondance terme à terme) L intervenante dresse deux rangées de sept jetons devant l enfant. Elle ajoute deux jetons à l une des deux rangées et demande à Marianne combien il y a de jetons dans les rangées. Cet item sert à vérifier si l enfant est en mesure de comparer deux collections d objets identiques et surtout comment elle procède pour le faire : en se fiant à un aspect figural de la présentation des collections ou en établissant une opération. 25 En effet, bien que la chaîne numérique des nombres connus de Marianne va beaucoup plus loin que «sept», on le verra plus loin dans l analyse de l aspect cardinal, Marianne, à cette même époque, a de la difficulté, sans soutien de l adulte, à commencer à partir d un autre nombre que «un» (voir extrait 13, lignes 1 à 4) et à compter à rebours à partir de «sept» (voir extrait 14, lignes 1 à 10). Ceci permet de penser que le petit nombre, déjà en haut de «cinq», est peu construit et très fragile. 69

86 Figure 15 : Comparaison de collections inégales de jetons Extrait 3 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : [ ] (Ajoute 2 jetons à la rangée du haut, un de chaque côté.) J en ai mis d autres dans ma ligne à moi. Regarde. (Compte les jetons qui se trouvent dans la rangée du haut.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, Et p is là [rangée du bas], i en a combien? 7. P is là [rangée du haut], i en a? 8. (Fait signe à l enfant de monter.) 9. [ ] L extrait 3 montre que Marianne est en mesure de dénombrer adéquatement chacune des collections en établissant une correspondance terme à terme parfaite entre le mot nombre dit et chaque objet dénombré dans chacune des collections. Toutefois, cette habileté de comptage, bien qu elle-même assise sur une correspondance terme à terme, ne garantit pas d emblée que le dénombrement, aussi adéquat puisse-il être, assure la construction du nombre abstrait et issue d une opération de la pensée comme le montre si bien l extrait 4 qui suit. En effet, dans le prochain extrait, l intervenante modifie l apparence de la rangée de neuf jetons en rapprochant les jetons les uns des autres pour que cette rangée soit moins longue que celle qui contient toujours sept jetons. Elle interroge l enfant à savoir quelle rangée comporte le plus de jetons en conservant le même but qui est de vérifier si l enfant est en mesure de comparer deux collections d objets et la façon dont elle s y prend. 70

87 Figure 16 : Comparaison de collections inégales de jetons après déplacement en octobre 2011 Extrait 4 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : [ ] P is là, moi j fais ça. (Prend les jetons de la rangée du haut et les colle les uns sur les autres. De cette manière, la rangée du haut est plus courte que la rangée du bas.) Où est-ce qu i en a plus de jetons? Plus ici [rangée du haut], plus ici [rangée du bas] ou c est pareil? Plus pareil. Plus pareil? P, is est-ce que c est pareil, ou i en a plus ici [rangée du bas] ou plus ici [rangée du haut]? (Ne pointe rien.) Plus ici. C est lequel ton ici? Ici où? [ ] Est-ce qu i a la même chose ou est-ce qu i en a plus ici [rangée du bas] ou plus ici [rangée du haut]? (Ne pointe rien.) Plus ici. C est lequel ton ici? Montre-moi avec ton doigt où est-ce qu i en a plus ici. (Met sa main au-dessus des deux rangées.) Plus ici, ici. C est quelle ligne? C est celle-là [rangée du bas] ou c est celle-là [rangée du haut]? (Pointe la rangée du bas.) C est celle-là. [ ] Bien que Marianne soit en mesure de compter les deux collections correctement [extrait 3], malgré plusieurs tentatives et questionnements de la part de l intervenante dans ce quatrième extrait, elle n arrive toujours pas à identifier la rangée qui comporte le plus de jetons une fois la représentation figurale des collections transformée. Elle répond souvent le dernier élément énoncé par l adulte en utilisant l effet de récence. En fait, Marianne recourt à une stratégie de comparaison reposant sur l aspect figural des collections. C est pourquoi elle ne semble pas établir de relation entre les deux quantités dénombrées pour déterminer quelle collection est la plus nombreuse. Ainsi, le nombre 9 ne provient pas de la construction d une opération qui inclut les nombres qui le précèdent. Sa quantité demeure relative à l espace que les objets de la collection occupent. Il n en est donc pas abstrait, ce qui pousse Marianne à penser que 9 est plus petit que 7. 71

88 Lors de cet item, il est demandé à Marianne de comparer deux collections de jetons pour identifier laquelle est la plus nombreuse, donc qui contient le plus grand cardinal. Marianne est en mesure d utiliser la correspondance terme à terme pour procéder au comptage de chacune des collections. Toutefois, l aspect cardinal du nombre n est pas solidement construit étant donné que la quantité de chaque collection n est pas considérée pour les comparer. Au contraire, c est l aspect figural qui domine pour établir la comparaison. Ainsi, il est possible de souligner ici que, sans une correspondance terme à terme conçue comme une opération réversible, le comptage, même s il est adéquat, n assure pas la construction de l aspect cardinal du nombre Item 2 : Conservation de quantités continues L intervenante présente deux boules de pâte à modeler de même taille à l enfant en lui demandant si l une des deux boules contient plus de pâte. Lorsque l enfant a établi l égalité, l intervenante prend une des deux parts et la transforme à trois reprises sous les yeux de l enfant, soit en rouleau, en galette puis en miettes. À chaque fois, elle questionne l enfant pour savoir si l une des deux parts contient plus de pâte à modeler. Cet item a pour but de vérifier si l enfant comprend la conservation de quantités continues et si elle est capable de faire abstraction des transformations effectuées par l adulte par des arguments d identité, de réversibilité ou de compensation qui feraient de la conservation une réelle opération. Figure 17 : Première transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 5 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : [ ] Est-ce que c est pareil, est-ce qu i a plus de pâte à modeler ici [rouleau] ou plus de pâte à modeler ici [boule]? (Ne pointe rien.) Ici. Ici où? (Touche la boule puis touche le rouleau.) Lequel? (Touche la boule.) Comment ça se fait que, toi, tu penses qu i a plus de pâte à modeler? Où est-ce qu i a le plus de pâte à modeler? Ou que c est pareil? (Touche le rouleau puis touche la boule.) Celle-là p is celle-là. Ouais, i a celui-là p is celui-là. Est-ce qu i a plus de pâte à modeler dans celui-là [rouleau], est-ce qu i a plus de pâte à modeler dans celui-là [boule] ou si i a la même chose de pâte à modeler dans 72

89 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : les deux? La même pâte à modeler dans les deux. I a la même chose de pâte à modeler dans les deux, tu penses. P is est-ce qu i a la même chose dans les deux ou i a plus de pâte à modeler ici [boule] ou i a plus de pâte à modeler ici [rouleau]? Pâte à modeler dans les deux. Pas de pâte à modeler comme les deux? Non. Plus de pâte à modeler comme les deux. Plus de pâte à modeler comme les deux. Hein? Explique-moi. C est quoi ça plus de pâte à modeler comme les deux? (Ne répond pas.) [ ] Lors de cette première transformation, Marianne semble comprendre la conservation. Plutôt que de répondre à la question, elle touche les deux parts de pâte à modeler [lignes 5 à 10]. Par contre, quand l intervenante la questionne à plusieurs reprises, elle énonce qu une des deux parts contient plus de pâte, en l occurrence, la boule [lignes 5-6]. Cela peut laisser croire à un début de compréhension de la conservation, mais que ce serait encore très fragile, d où l incapacité de l enfant à expliquer sa réponse [lignes 14 à 16]. L intervenante prend le rouleau rouge et le transforme en boule de même grosseur que celle de référence. L enfant confirme alors leur égalité. Puis, l intervenante reprend la boule rouge et la transforme en galette devant les yeux de l enfant. Figure 18 : Deuxième transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 6 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : [ ] (Prend une des deux boules et la transforme en galette.) Est-ce qu elles sont pareilles? Est-ce que c est pareil ou est-ce qu i a plus de pâte à modeler ici [galette] ou ici [boule]? (Pointe la galette.) Ici. Plus de pâte à modeler ici, tu penses? (Touche la boule et la galette.) Non. Est-ce qu i a la même chose de pâte à modeler ou i a plus de pâte à modeler ici [boule] ou ici [galette]? (Pointe la galette.) Ici. Ici, tu penses. Pourquoi? Comment ça se fait? J sais pas. Tu sais pas, mais tu as peut-être une idée. (Ne répond pas.) Hein? As-tu une idée, toi? Si i a plus de pâte à modeler ici [galette], ici [boule] ou si i a la même chose dans les deux? I a la même chose dans les deux. 73

90 15I : 16M : 17I : 18M : I a la même chose dans les deux. Ah oui? Tu penses ça, toi? Oui. C est toi l experte. [ ] Alors, toi, tu m as dit qu i en avait plus ici [galette], plus ici [boule] ou i en avait pareil de la pâte à modeler? (Ne répond pas.) [ ] Lors de cette seconde transformation, les propos de Marianne témoignent de la réelle fragilité du début de conservation que l on pouvait voir à l extrait 5. Ici, Marianne utilise l aspect figural pour répondre à la question de l intervenante à plusieurs reprises [lignes 4; 8]. Par contre, à un moment, elle indique à l intervenante que ce sont les deux parts qui contiennent le plus de pâte [lignes 5-6; 13-14], mais elle ne parvient pas à expliquer ses réponses, autant celle qui établit l égalité entre les deux parts [ligne 6] que celle qui énonce que la galette comporte plus de pâte [lignes 8 à 12]. L intervenante prend la galette rouge et la transforme en boule de même grosseur que celle de référence. L enfant confirme alors leur égalité. Puis, l intervenante reprend la boule rouge et la transforme en miettes devant les yeux de l enfant. Figure 19 : Troisième transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 7 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : [ ] Toi là, Marianne, est-ce que tu penses qu i a plus de pâte à modeler ici [boule], ici [miettes] ou c est pareil? (Passe sa main au-dessus des miettes.) Ici. Ici? Ouais. Comment ça se fait que tu penses qu i en a plus ici [miettes] que là [boule]? Je sais pas. Pourquoi? [ ] Est-ce que i en a plus ici [miettes], ici [boule] ou c est pareil? (Passe sa main au-dessus des miettes.) C est pareil. (Met une main au-dessus des miettes et une main au-dessus de la boule.) Ça p is ça, c est pareil? Ouais. Ah! Comment ça se fait que c est la même chose, tu penses? (Ne répond pas.) Hein? Comment ça se fait que c est la même chose ça [miettes] p is ça [boule]? Je sais pas. Tu sais pas? I a tu une place où i en a plus de pâte à modeler? Ouais. Où? [ ] Tu m as dit quoi déjà, dans ma p tite tête de souris? Est-ce que ça ici [miettes] p is ça ici 74

91 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : 25I : 26M : [boule], c est pareil? I en a plus ici [boule] ou i en a plus là [miettes]? I en a plus. Où? (Met sa main au-dessus des miettes.) Ici. P is comment ça se fait qu i en a plus là? Je sais pas. T as peut-être une idée. [ ] (Montre les miettes.) Regarde ici. Toi, tu penses qu i en a plus ici? Oui. [ ] Le raisonnement de Marianne lors des épreuves de conservation témoigne d une absence de conservation. Comme on peut le constater, quand les boules de pâte à modeler sont transformées par l intervenante, elle répond souvent en utilisant l effet de récence [lignes 7-8] ou en se laissant influencer par l aspect figural (comme l espace occupé par les miettes sur la table) [lignes 2; 8; 20; 24]. De plus, Marianne n arrive pas à justifier ses choix [lignes 9 à 12; 13-14; 21-22]. Elle ne démontre pas clairement une construction de la conservation de la matière. Elle se situerait donc au premier stade en ce qui concerne la conservation de quantités continues. Lors de cet item, l intervenante propose deux parts égales de pâte à modeler à l enfant. Par la suite, elle réalise trois transformations avec l une des deux parts devant ses yeux : une fois en rouleau, une fois en galette et une fois en miettes. À chaque fois, l enfant doit se prononcer sur les quantités de pâte à modeler dans chaque part. Marianne ne démontre pas clairement une construction de la conservation des quantités continues. Elle répond aux questions de l adulte en utilisant principalement l aspect figural et l effet de récence Item 3 : Conservation de quantités discontinues D abord, l intervenante dresse une rangée de sept images de chevalier. L enfant, pour sa part, doit construire une rangée équivalente avec des images de princesse. Cet item vise à vérifier la capacité de l enfant à utiliser la correspondance terme à terme pour comparer des collections et à établir une conservation des quantités à la suite d une transformation de l aspect figural de l une des deux collections. 75

92 Figure 20 : Rangée d images présentée à l enfant lors de l item 3 Figure 21: Construction d une rangée équivalente en octobre 2011 Extrait 8 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : (Place 7 images de chevaliers dans une rangée sur la table.) Là, moi, je mets des chevaliers, comme ça. Toi, est-ce que tu peux mettre la même chose de princesses que de chevaliers? Toi, tu t occupes des princesses. Je veux que tu mettes pareil de princesses que de chevaliers. Pour que chaque chevalier ait sa princesse. Oui. Hein, on va faire 2 lignes : une ligne où c est moi et une ligne où c est toi. (Prend les images de princesses une à une et les place en rangée. Elle ne fait que placer toutes les images qu elle a sous la main, soit 10 images de princesses. Même si les deux rangées sont éloignées l une de l autre, on peut voir que 7 premières princesses se trouvent sous les 7 chevaliers.) Est-ce qu i a pareil de princesses que de chevaliers? I a tu la même chose? Oui. I a combien de chevaliers? J vais compter. (L intervenante pointe chaque chevalier pendant que Marianne fait le décompte.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. Ça veut dire que je veux combien de princesses? Si j ai 7 chevaliers, j veux combien de princesses? Tu n en veux. Pareil. (Pointe les images de princesses, en faisant le décompte.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10. Oui. P is là, toi, tu m as dit que j ai 7 chevaliers p is j veux pareil de princesses. Pas de princesses de plus, j veux la même chose de princesses. 76

93 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : Oui. Ça veut dire que ça va me prendre combien de princesses, si j ai 7 chevaliers? J vais en enlever. Ouais, mais t en enlèves combien? 3. Oui. O.K. (Retire toutes les princesses et recommence sa rangée.) Ça prend pareil de princesses que de chevaliers. [ ] (Replace les 10 images de princesses sur la table.) La construction de la rangée de princesses a été difficile pour Marianne. Même si elle semble être en mesure d opérer sur les collections lorsque l intervenante lui demande combien elle doit retirer de princesses pour en avoir le même nombre [lignes 15 à 17], on voit que ce raisonnement est très fragile. En effet, entre les lignes 20 et 22, on peut voir que Marianne retire toutes ses princesses et recommence la construction de la rangée plutôt que d en retirer trois, comme elle venait tout juste de le souligner [ligne 18]. Marianne ne se sert ni de la correspondance terme à terme relativement bien établie entre les chevaliers et les princesses, ni du dénombrement qu elle fait adéquatement pour construire, au final, une collection de même quantité. Pourtant, elle sait que, quand on lui pose la question «combien» [ligne 7], elle doit compter [ligne 8]. Ce comptage, toutefois, ne mène pas à la construction de la cardinalité de la collection puisque, en fin de compte, elle replace dix princesses pour établir sa collection équivalente à son avis à sept chevaliers [ligne 22]. Il est difficile de s expliquer ici comment Marianne est parvenue à identifier qu il fallait retirer trois princesses aux dix présentes dans la collection pour arriver à sept princesses «pareil que» sept chevaliers. Deux hypothèses peuvent être suggérées. Premièrement, on peut penser que Marianne a opéré mentalement sur le nombre (par soustraction 10-7 ou par complétion 8, 9, 10). Pour parvenir à une telle opération, il faudrait que l aspect cardinal du petit nombre soit bien construit. L extrait 4, où Marianne affirme que 7 est plus que 9 en se centrant sur l aspect figural des collections de jetons, suggère fortement que l aspect cardinal du nombre est loin d être construit, ce qui pousse à rejeter cette première hypothèse. La seconde hypothèse pourrait reposer sur l idée que Marianne comprend qu il y a trop de princesses et donc qu il faut en retirer. Le nombre 3 étant relativement bien construit (à cette époque Marianne parvenait seule à compter à rebours à partir de 3 dans les interventions quotidiennes), Marianne énonce ce nombre qui s avère être le plus grand dans la «zone de confort» de sa chaîne numérique. De plus, la disposition des chevaliers et des 77

94 princesses laisse trois princesses à l écart qui débordent la ligne des chevaliers, ce qui peut l amener à considérer ce qui excède comme le retrait à faire pour que les deux collections débutent et terminent au même endroit. Ici, la correspondance terme à terme sert de soutien pour comparer les deux collections et identifier l excédent, mais elle délaissera ce soutien dès qu elle retirera des princesses [lignes 20 à 22], changeant ainsi l aspect figural. La correspondance terme à terme n est donc pas pleinement une opération réversible. C est plutôt cette dernière hypothèse qui est retenue et qui est également soutenue par la suite de cet extrait 8 et par l extrait 9 qui suit. Il convient toutefois de mettre en exergue ici que la demande de comparaison et les relations à établir entre les deux collections pour parvenir à identifier qu il y a trois princesses à retirer, possiblement soutenu par la correspondance terme à terme entre les chevaliers et les princesses, précède la construction de l aspect cardinal des quantités en jeu (ici 7 et 10). Cela permet de penser que l action de l enfant à procéder à des comparaisons et à des correspondances terme à terme, et ce, même si ces actions ne sont pas encore conçues comme des opérations impliquant sine qua non la réversibilité, contribueront à construire l aspect cardinal du nombre pour donner un réel sens numérique à la comptine des nombres. Autrement dit, ici, ce n est pas la comptine des nombres et l aspect cardinal construit qui permet la mise en relation et l opération de comparer les deux collections, mais bien l inverse : c est l exigence d opération imposée par l adulte dans la demande de comparaison qui pousse l enfant à mettre en relation les deux collections par l action de correspondance terme à terme qui semble devenir un tremplin servant la construction de l aspect cardinal du nombre. Par la suite, lorsque les deux rangées comportent le même nombre d éléments, l intervenante espace les images de chevaliers devant les yeux de l enfant et elle lui demande s il y a une rangée qui en a le plus. On cherche alors à vérifier si l enfant comprend la conservation des quantités discontinues et si elle est capable de faire abstraction des transformations effectuées par l intervenante par des arguments d identité, de réversibilité ou de compensation, qui ferait de la conservation une opération. 78

95 Figure 22 : Disposition des rangées pour la comparaison de collections et pour la conservation des quantités discontinues en octobre 2011 Extrait 9 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : 25I : 26M : 27I : 28M : 29I : 30M : 31I : 32M : [ ] (À ce moment, les chevaliers ne sont pas décalés.) Est-ce que j ai pareil de princesses p is de chevaliers? Oui. Oui! P is là, moi, j vais faire ça, comme ça. (Espace les images de chevaliers pour que la rangée dépasse à la droite et à la gauche de la rangée de princesses.) [ ] Est-ce que c est pareil les chevaliers p is les princesses ou si j en ai plus ici [princesses] ou plus ici [chevaliers]? Oui. Oui, quoi? C est pareil. C est la même chose de chevaliers p is de princesses? Oui. Est-ce que c est la même chose ou si j en ai plus ici [princesses] ou plus ici [chevaliers]? [ ] Ici, estce que c est la même chose ou i a plus de chevaliers ou i a plus de princesses? I a plus de princesses. Tu penses qu i a plus de princesses? Oui. Comment ça se fait? Explique-moi, voir. [ ] Toi, tu m as dit qu i en avait plus ici [chevalier], plus ici [princesses] ou c est pareil? (Pointe la rangée de princesses.) Ici. I en a plus ici? Comment ça se fait que tu sais ça? [ ] Comment ça se fait qu i a plus de princesses? Je sais pas, moi. [ ] Moi, là, mon ami qui est tout petit m a dit qu i avait plus de chevaliers parce que la ligne est plus longue que la ligne de princesses. Penses-tu qu i a raison? (Acquiesce de la tête.) Tu penses qu i a raison le p tit garçon? Oui. Le p tit garçon dit qu i en a plus là [chevaliers] p is, toi, tu dis qu i a raison? Oui. Mais, toi, tantôt, tu m as dit qu i avait plus de princesses. Oui. C est où qui en a le plus ou c est pareil? (Pointe la rangée de chevaliers.) Ici. Comment ça se fait qui en a plus là? J sais pas. Tu sais tantôt, quand on a mis un amoureux p is une amoureuse ensemble, on avait dit qu i en avait pareil, Hein? Ouais. P is là, toi, tu me dis qu i en a plus ici? C est tu ça? Ouais. [ ] 79

96 Lors de cet item, sous la demande de l intervenante et avec son soutien, Marianne compte les images lors de la construction de la rangée, mais elle ne recourt plus au comptage par la suite. Elle ne semble pas non plus établir de correspondance terme à terme entre les deux collections. De ce fait, elle n arrive pas à affirmer que les deux rangées comportent toujours sept éléments et, donc, qu elles sont toujours identiques. En affirmant qu une rangée compte plus d images que l autre [lignes 10; 14; 26], Marianne se situe au premier stade en ce qui concerne la conservation de quantités discontinues. Pour répondre aux questions de l intervenante, elle utilise principalement l aspect figural des collections et l effet de récence plutôt que de recourir à des opérations, telles que la correspondance terme à terme entre les deux rangées et le comptage. Lorsqu une contre-suggestion lui est proposée, même si cette dernière est incorrecte, Marianne change d avis et énonce que c est le petit garçon qui a raison [lignes 17 à 20; 23 à 26]. De plus, comme Marianne ne parvient pas à expliquer ses réponses en recourant aux arguments d identité, de réversibilité et de compensation, la conservation n est pas une opération pour elle [lignes 13 à 16; 27-28]. Lors de cet item, une rangée de sept images de chevalier est présentée à Marianne. Cette dernière doit construire une rangée équivalente avec des images de princesse. Sans soutien de la part de l intervenante, Marianne n y parvient pas. Elle n utilise pas le comptage pour comparer les deux collections, mais elle utilise adéquatement la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l image dénombrée. Cette mise en correspondance terme à terme établie à tâtons semble permettre des mises en relation permettant de comparer les collections qui servira la construction ultérieure de l aspect cardinal des nombres en jeu dans la comparaison. Toutefois, la correspondance terme à terme n est pas encore utilisée comme opération réversible. En effet, si l intervenante modifie l apparence de l une des rangées en espaçant les images l une de l autre, de sorte que cette rangée dépasse l autre rangée des deux côtés, Marianne affirme qu une des deux rangées compte alors plus d images que l autre en utilisant l aspect figural, ce qui témoigne également que Marianne n a pas construit la conservation des quantités discontinues Item 4 : Comptage Sans utiliser de matériel, l intervenante demande à l enfant de compter le plus loin possible. Cette demande a pour but de vérifier l étendue de la chaîne numérique de l enfant. 80

97 Extrait 10 1M : 2I : 3M : 4I : 5M : 6I : 7M : 8I : 9M : [ ] 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30. En connais-tu d autres après? Non. Après 30, c est (Laisse l enfant compléter.) 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40. P is après? 41, 42, 42, 43, 45, quarante-seize, 46, 47, 48, 49, 30. J suis bonne, Hein? Oui, tu es bonne! Qu est-ce qu i a après? (Réfléchit.) 41, 42, 43, 45, 46, 47, 48, 49, 30. [ ] Marianne connaît bien la comptine numérique jusqu à 49 [lignes 1; 5; 7]. Ensuite, elle énonce 30 et recommence la dizaine de quarante [lignes 7 à 9]. Ensuite, l intervenante lui demande de compter en tenant compte d une borne supérieure, fixée à 9 [extrait 11]. Puis, l intervenante lui demande de compter en tenant compte d une borne inférieure fixée à 3 [extrait 12]. Ceci a pour but de vérifier si la chaîne numérique de Marianne est sécable ou non. Extrait 11 1I : 2M : 3I : 4M : [ ] Marianne, es-tu capable de compter jusqu à 9? Oui. À 9, on arrête. Vas-y. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. [ ] Marianne réussit à compter en tenant compte d une borne supérieure [ligne 4]. Extrait 12 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : [ ] Es-tu capable de compter à partir de 3. On commence pas à 1, on commence à 3. Oui. 1, 2, 3. C est beau! P is là, si on commence à 3? Hein? 3 (Laisse l enfant compléter.) 2, 1. Excellent! P is là, si on compte, p is on part à 4 et après ça on continue. 4 (Laisse l enfant compléter.) 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12. [ ] Avec un léger soutien de l adulte, Marianne parvient à compter à partir de 4 [lignes 5-6]. L intervenante lui demande ensuite de compter en considérant, à la fois, la borne inférieure 5 et la borne supérieure 9. 81

98 Extrait 13 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : [ ] Es-tu capable de compter si on part à 5 et on continue jusqu à 9? Oui. On commence à 5, p is on arrête à 9. Oui. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Wow! Et p is là, si on commence pas à 1. On commence à compter à 5. Oui. Hein, on commence pas à 1. On les dit dans notre tête, p is rendu à 5, on les dit fort. De 5 jusqu à 9. J veux compter. Vas-y. 1, 2, 3, 4, 5, 6 5. [ ] Marianne n est pas en mesure de compter avec une borne inférieure et une borne supérieure. Elle réussit à respecter la borne supérieure, mais elle débute toujours avec 1 [lignes 4; 10]. Ainsi, la chaîne numérique de Marianne ne semble pas être une chaîne sécable, mais davantage non sécable. Seule, Marianne ne semble pas en mesure de compter en commençant par un mot nombre autre que 1. Finalement, l intervenante demande à l enfant de compter à rebours à partir de 7. Ceci permet de vérifier si la chaîne numérique de l enfant est dénombrable. Selon Fuson (1988, 1991), Gelman et Gallistel (1986) et Van Nieuwenhoven (1996, 1999), cette chaîne dénombrable assure un aspect cardinal au nombre, car l enfant peut ainsi considérer le nombre de départ, ici 7, et de là, opérer N, soit dans ce cas-ci, N-1, mais ce, si et seulement si l enfant n a pas appris la comptine inverse. Extrait 14 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : [ ] P is si on commence à compter à 7, p is là on descend? Hein, on va à l envers. Qu est-ce qui vient avant 7? 8. Ça c est après. Avant, c est quoi? 6. Après ça, avant? 7. Ça c est après. Qu est-ce qui vient avant 6? (Ne répond pas.) On a dit : 7, 6, (Laisse l enfant compléter.) 7. Marianne n arrive pas à compter à rebours à partir de 7 [lignes 4 à 6; 7 à 10]. Cela concorde avec ce qui a été observé plus tôt : comme sa chaîne numérique n est pas encore sécable, Marianne ne parvient pas à comprendre la réversibilité qui existe au sein de cette chaîne, ce 82

99 qui est nécessaire lors d un comptage à rebours. L intervenante demande à l enfant de compter à rebours, mais cette fois à partir de 5. Extrait 15 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : [ ] Si, moi, j compte à l envers à partir de 2. Ça fait : 2, 1. Es-tu capable si on commence à 5? Hein? Si on commence à 5, p is on compte à l envers? On descend. 5 (Laisse l enfant compléter.) 4, 3, 2, 1. 0! T es bonne! Et si on commence à 6, es-tu capable? Oui. Vas-y! 1, 2, 3, 4, 5, 6. Et si je commence à 6 et j veux aller jusqu à 1? Ça fait (Laisse l enfant compléter.) 6, 7. Par en bas. 6, (Laisse l enfant compléter.) Après? Tu l as fait tout à l heure, qu est-ce qui vient avant 6? 5. Après? 8. Avant 5? 6. [ ] Avec le soutien de l adulte, elle réussit à compter à rebours en débutant par 5 [lignes 1-2], mais elle n arrive pas à le faire en débutant par 6, même avec du soutien de la part de l intervenante [lignes 7-8]. Ensuite, il est difficile de se prononcer, car l intervenante soutient l enfant pour identifier le nombre avant 6 [lignes 11-12], mais le soutien peut devenir confus par la suite puisque l intervenante lui demande «après» (au sens de «continue») alors qu elle veut savoir «avant» [ligne 13]. L enfant peut alors avoir compris qu il fallait nommer un nombre «après», comme 8 [ligne 14] au lieu de continuer le comptage à rebours en nommant ce qui précède 5. Lors de cet item, on cherche à vérifier la construction de la chaîne numérique de l enfant. Marianne arrive à compter seule jusqu à 49, à tenir compte d une borne supérieure telle que 9, d une borne inférieure telle que 3 et à compter à rebours à partir de 5. Par contre, elle n est pas en mesure de considérer, à la fois, une borne inférieure et une borne supérieure, ni à compter à rebours à partir de 6. La chaîne numérique de Marianne serait donc considérée comme non sécable lorsque le nombre est supérieur à 3, car elle n est pas en mesure de compter à partir d un mot nombre autre que 1, 2 ou 3, qui se trouve être son domaine numérique opérable à ce moment. 83

100 Item 5 : Cardinalité L intervenante place dix-huit jetons pêle-mêle sur la table devant l enfant. Elle demande alors à Marianne de les dénombrer. Cet item tente de vérifier les méthodes de comptage utilisées par Marianne ainsi que sa compréhension de la notion de cardinalité. Figure 23 : Première disposition de jetons à dénombrer Extrait 16 1M : 2I : 3M : 4I : 5M : 6I : 7M : 8I : 9M : 10I : 11M : 12I : 13M : [ ] (Compte les jetons en recomptant plusieurs jetons à deux reprises et en conservant un doigt sur le même jeton pour les 5 derniers nombres.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30. Tu penses qu i en a 30? Oui. Combien t as dit qu i en avait, déjà? 6. I en a combien? ? Hein? Dans ma p tite tête de souris, tu m as dit qu i en avait combien, ici? (Chuchote.) Siiiii Siiiiii. 6? Non, 9. 9? Ah, O.K. Et si je les prends comme ça et que je les mets ici. (Déplace l ensemble des jetons sur la table.) Combien tu penses qu i en a? 9. [ ] Au premier comptage, Marianne en dénombre 30 [ligne 1]. Elle commet plusieurs méprises, comme compter plusieurs jetons à deux reprises par manque d organisation et, rendue à 25 à la fin de son «comptage», elle conserve son doigt sur un même jeton et continue de compter jusqu à 30. Moins d une minute plus tard, quand l intervenante lui demande à nouveau combien il y en avait, elle répond qu il y en a 6, puis 16, puis 9 [lignes 5; 7; 11; 13]. Pour elle, le comptage ne permet pas d identifier le cardinal d une collection car il ne repose pas sur l établissement d une quantité à ce qui est dénombré. 84

101 L intervenante déplace les jetons sur la table et demande à l enfant combien il y en a, sans les compter. Ensuite, il est demandé à l enfant de compter les jetons pour vérifier son hypothèse. Extrait 17 1I : 2M : 3I : 4M : [ ] O.K. Et si je les prends comme ça et que je les mets ici. (Déplace l ensemble des jetons sur la table.) Combien tu penses qu i en a? 9. 9, aussi. Peux-tu les compter? Pour vérifier, voir, combien i en a? (Compte les jetons à nouveau, en comptant plusieurs jetons à plusieurs reprises.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30. [ ] Lors du recomptage, elle arrive encore à 30, en comptant plusieurs jetons plus d une fois [ligne 4]. Marianne semble avoir de la difficulté à bien utiliser la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l objet dénombré quand le nombre est supérieur à 10. En raison des difficultés de l enfant, l intervenante retente le même exercice, mais avec un ensemble de cinq jetons. Figure 24 : Seconde disposition de jetons à dénombrer Extrait 18 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : [ ] (Retire les 18 jetons de la table et en place 5.) I a combien de jetons, ici, tu penses? (Ne répond pas.) Veux-tu les compter? Oui. (Compte les jetons, en comptant un même jeton à 2 reprises.) 1, 2, 3, 4, 5, 6. I en a combien, déjà? (S apprête à les compter.) Sans les compter, combien i en avait? Et p is, si je les prends et que j les mets comme ça [ils sont alors déplacés sur la table], i en a combien? (S apprête à les compter.) Sans les compter, combien tu penses qu i en a? [ ]Sans les compter, combien tu penses qu i en a? 4. Veux-tu les compter, voir? (Compte correctement les jetons.) 1, 2, 3, 4, 5. Wow! Tu m as dit qu i en avait 5. T es b en bonne! T as raison! Et p is là, moi, j en mets 2 autres. I en a combien maintenant? 6. 85

102 17I : 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : 25I : 26M : 27I : 28M : 29I : 30M : 31I : 32M : J en ai mis 2 autres. 6. Veux-tu compter? [...] Vas-y, compte-moi ça pour me dire combien i en a. 6. Veux-tu compter pour vérifier? (Compte les jetons en comptant plusieurs jetons, à plusieurs reprises.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Wow! C est super, ça. Et p is là, toi, tu dis qu i en a 9. T es une championne. Moi, j en prends un p is je l enlève. Combien tu penses qu i en a? I en avait 9 p is, moi, j en ai enlevé 1. Oui. Qu es ça fait si j en ai enlevé 1? I en avait 9 p is j en ai enlevé 1. Pourquoi? Pour le remettre dans mon sac. Combien tu penses qu i en a, maintenant? (Chante.) Hein? I en a combien, maintenant? J en avais 9 p is j en ai enlevé 1. Ça fait combien? 6. Ça fait 6? J en avais 9 p is j en ai enlevé [ ] Au premier essai, Marianne compte les jetons trop rapidement et elle compte un même jeton à deux reprises [ligne 4]. Bien que spontanément Marianne souhaitait compter de nouveau les jetons à la demande de l adulte («Il y en a combien déjà?» [lignes 5-6], elle parvient, sous l exigence de l adulte [ligne 7], à ne pas compter et à maintenir le dernier mot nombre énoncé lors du premier comptage [ligne 8], ce qui permet de souligner une émergence de construction de cardinalité. Au deuxième essai, Marianne réussit à compter les cinq jetons seule, en utilisant bien la correspondance terme à terme en touchant seulement un jeton par mot nombre énoncé et en ne comptant pas de jeton à plusieurs reprises [ligne 14]. Toutefois, le principe de cardinalité n est pas encore solidement construit chez Marianne : lorsque l intervenante lui demande combien il y a de jetons une seconde fois, Marianne recommence son comptage [lignes 6; 10] puis elle ne maintient pas le dernier mot nombre dit à la suite d un déplacement des objets par l adulte [lignes 9 à 12]. Pour elle, le dernier mot nombre dit ne tient pas toujours lieu de cardinal de la collection ce qui ne lui permet pas de constituer une chaîne dénombrable de N sur laquelle on peut ajouter ou retirer un nombre quelconque (N-n'). De ce fait, elle ressent le besoin de recompter à chaque fois. D ailleurs, elle n arrive pas à réaliser des opérations d addition et de soustraction sur ce nombre [lignes 15 à 20; 29 à 32]. Comme Marianne éprouve encore quelques difficultés, l intervenante lui propose la même tâche avec un ensemble de trois jetons. 86

103 Figure 25 : Troisième disposition de jetons à dénombrer Extrait 19 1M : 2I : 3M : 4I : 5M : 6I : 7M : 8I : 9M : 10I : 11M : 12I : 13M : 14I : 15M : 16I : 17M : [ ] (Compte les jetons.) 1, 2, 3. I en avait combien? (S apprête à les compter.) Compte-les pas. Dis-moi combien tu en avais compté tantôt Là, moi, j les prends et j les amène ici. (Déplace les 3 jetons sur la table.) I en a combien maintenant? 3. 3? Vérifie donc! Compte-le avec ton doigt. 1, 2, 3. I en a 3, t as raison. Et p is là, j en ai 2 qui étaient là tantôt et qui veulent revenir. Si j en ai 3 et que j en ajoute 2, ça va faire combien tu penses? Sans compter. J en ai 3 p is j en ajoute 2, ça fait combien? 3. Oui, j en ai 3, t as raison. P is j en ai 2 autres qui viennent les trouver. Ça fait combien, tout ensemble? 3. Veux-tu vérifier? Oui. Vérifie. (Compte les jetons.) 1, 2, 3, 4, 5. [ ] Avec trois jetons, Marianne réussit son comptage dès la première fois. Ce comptage tient lieu de cardinal puisqu elle parvient à identifier et à maintenir la quantité de jetons à la suite de leur déplacement par l adulte [ligne 7]. Même avec un petit nombre déjà construit, cet aspect cardinal est encore relativement fragile puisque Marianne cherche spontanément à compter de nouveau [ligne 3]. De plus, elle ne parvient pas à effectuer une addition sur ce petit nombre correctement, elle répond que même si on ajoute deux jetons, il y en aura toujours trois jetons [lignes 11 à 13]. Ceci témoigne que la comptine des nombres n a pas une valeur de chaîne dénombrable intégrant une construction relativement solide de la cardinalité. 87

104 Lors de cet item, une collection de jetons est présentée pêle-mêle à Marianne. Cette dernière doit la dénombrer et réaliser des opérations d addition et de soustraction. Marianne parvient à compter les collections de cinq et de trois jetons en utilisant bien la correspondance terme à terme entre le mot nombre énoncé et l élément dénombré, mais elle n y arrive pas avec dix-huit jetons. En ce qui concerne les opérations qu elle devait réaliser sur ces nombres, elle ne les a pas réussies. De plus, peu importe la grandeur de la collection, Marianne ressent toujours le besoin de la recompter pour connaître le nombre d éléments qui la composent. Ces éléments indiquent que sa chaîne numérique est encore non sécable, et par le fait même, non dénombrable. Comme la cardinalité n est pas encore maîtrisée par Marianne, sa chaîne numérique, même si elle est étendue, n est pas opérable. Toutefois, on note une émergence de l aspect cardinal sur le petit nombre Synthèse de la compréhension de l enfant en octobre 2011 Pour la compréhension de l aspect ordinal du nombre, Marianne tente de mettre en série cinq pailles en établissant un ordre de grandeur en considérant seulement l une des extrémités. Elle éprouve ainsi de la difficulté à sérier des objets de tailles différentes, car elle n utilise pas un point d origine commun pour tous les éléments et elle ne parvient pas à identifier l ensemble des positions dans une série. À ce moment, elle se situerait donc au premier stade de développement de l aspect ordinal selon Piaget. En ce qui concerne l aspect cardinal du nombre, bien que Marianne soit capable de réciter la chaîne numérique jusqu à 49, elle n a pas construit le petit nombre (en bas de 10), c està-dire qu elle n a pas compris la valeur de ces nombres et qu ils ne sont pas opérables. En ce sens, elle est en mesure d utiliser correctement la correspondance terme à terme mot nombre énoncé et objet dénombré lorsque les collections comportent moins de dix éléments. Même si Marianne n utilise pas la correspondance terme à terme comme une réelle opération, impliquant sine qua non la réversibilité, l identité ou la compensation, elle peut utiliser la correspondance terme à terme établie pour comparer et mettre en relation deux collections pour identifier la nécessité de retirer trois objets pour rendre les collections équivalentes. L exigence d opération de l adulte par une demande de comparaison entre deux collections de cardinal inférieur à dix semble précéder la construction même des aspects cardinaux des collections comparées (7 et 10) et semble indiquer que la 88

105 correspondance terme à terme, même si elle n est pas encore une pleine opération, est un précurseur de l aspect cardinal du nombre. La chaîne numérique de Marianne est encore non sécable : elle connaît la comptine des mots nombres, mais elle doit toujours commencer son comptage par 1, d où sa difficulté à compter à rebours et à considérer, à la fois, une borne inférieure et une borne supérieure. Elle n utilise pas le comptage pour comparer les collections qui lui sont présentées ni pour en connaître le cardinal : ce principe de comptage n est donc pas encore construit chez elle. Le petit nombre inférieur à 3 semble construit; c est donc le domaine numérique de Marianne à cette époque. Au-delà de 3, la chaîne des nombres, même si elle est stable jusqu à 49, représente ainsi davantage une comptine plutôt qu une réelle chaîne numérique inhérente au dénombrement. Dans les tâches de conservation, Marianne répond principalement en se laissant influencer par l aspect figural des éléments et n arrive pas à justifier ses réponses. Marianne n a donc pas encore construit la conservation des quantités continues et discontinues. À ce moment, la correspondance terme à terme, la conservation et le comptage ne sont pas construits comme des opérations et elle se situerait au premier stade de développement de la conservation selon Piaget Évaluation 2 : Mai 2012 Lors de la deuxième évaluation, qui a été réalisée en mai 2012, la compréhension de l aspect ordinal et de l aspect cardinal de Marianne a été analysée à l aide des mêmes items que lors de la première évaluation. L aspect ordinal du nombre a été évalué par deux items : la sériation d objets de tailles différentes et la sériation d objets faisant une course. L aspect cardinal, quant à lui, a été évalué par cinq items : la comparaison de collections, la conservation de quantités continues et de quantités discontinues, le comptage et la cardinalité. 89

106 Items vérifiant la compréhension de l aspect ordinal du nombre La présente section expose, d une part, les analyses concernant la capacité de l enfant à sérier en ordre de grandeur cinq pailles différentes et, d autre part, sa capacité à considérer les diverses positions d objets d une série Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes L intervenante demande d abord à l enfant de sérier quatre pailles, puis d en ajouter une cinquième à la série élaborée. Cet item a pour but de vérifier la sériation effectuée par l enfant en portant particulièrement l attention sur la réalisation de l épreuve en soi, plutôt que sur la sériation produite. La figure 26 présente la sériation effectuée par l enfant, la dernière paille ajoutée (N) étant indiquée par une ligne plus large que les quatre autres. Figure 26 : Sériation de pailles réalisée en mai 2012 ( N) Extrait 20 1I : 2M : 3I : 4M : (Place 4 pailles sur la table.) Je te place des pailles, ici. Est-ce que tu peux les placer de la plus petite à la plus grande? Oui. Place-les, en ordre de grandeur. De la plus petite à la plus grande. (Place les pailles une par une, les dépose de la gauche à la droite, en considérant un point d origine commun.. Elles sont placées dans cet ordre : , 1 étant la plus petite.) 5I : 6M : 7I : 8M : Il faut les placer de la plus petite à la plus grande. Ouais. Est-ce qu i sont placées de la plus petite à la plus grande? Non. 90

107 9I : 10M: 11I : 12M: Place-les comme il faut. [ ] Il faut les placer de la plus petite à la plus grande. Où? Sur la table. I faut les ranger de la plus petite à la plus grande. [ ] (Prend la plus grande paille et la déplace au début, en la décalant un peu vers le bas.) 13I : 14M: On les place de la plus petite à la plus grande. On met la plus petite au début. [ ] (Déplace les pailles. Elles sont maintenant dans l ordre : ) 15I : 16M: 17I : 18M : Est-ce qu elles sont mises de la plus petite à la plus grande? Oui. Oui. (Sort une nouvelle paille N, qui irait au milieu, soit entre la 2 et la 3 de la première série.) Cellelà, on la mettrait où? (Ajoute la paille à la fin : N.) J ai gagné! [ ] Lors de la réalisation de la tâche, Marianne prend les pailles une par une dans l ensemble pour les placer à la fin de la série. Une fois cette première sériation établie en quelque sorte par l ordre dans lequel elle a pris chaque paille [ligne 4], on peut poser l hypothèse qu elle ajuste sa série en effectuant des tâtonnements entre les pailles [lignes 12; 14]. Elle entreprend de les placer en ligne en considérant un point d origine commun pour les pailles. Marianne semble comprendre que pour sérier les pailles, elle doit les comparer et, pour ce faire, elles doivent nécessairement avoir un même point d origine. À sa première sériation [ligne 4], sous le questionnement de l adulte, elle réalise que sa série ne respecte pas un ordre de grandeur. Elle semble écarter la plus longue paille en la replaçant au début [ligne 12]. Ce faisant, elle semble considérer seulement les trois pailles qui restent et parvient à déplacer la plus petite devant les deux autres qui la précèdent [ligne 14]. Toutefois, à l ajout de la cinquième paille, Marianne reprend sa procédure initiale d ajouter la dernière paille prise à la fin de la série sur la droite [ligne 28]. Ainsi, en se centrant sur l alignement du bas des pailles, elle n a pas réussi à sérier totalement les cinq pailles entre elles en considérant de manière coordonnée et simultanée les deux extrémités lors du déploiement de la série. Elle se situerait donc au premier stade de Piaget, c est-à-dire qu elle n arrive pas à réaliser 91

108 sa sériation en considérant, à la fois, la relation qui lie les pailles entre elles et les limites perceptives qu elle doit respecter. Lors de cet item, un ensemble de cinq pailles est présenté à l enfant qui doit les sérier. Marianne prend les pailles une à une et ne réussit pas la sériation. Elle se situe au premier stade. Bien qu elle comprenne que toutes les pailles doivent partager un point d origine commun, elle ne parvient pas à mettre en relation les grandeurs des pailles entre elles. Elle ne procède pas par une opération d ensemble lui permettant d envisager de manière coordonnée les deux extrémités des pailles de manière simultanée, même si on semble voir émerger la compréhension que les pailles doivent avoir un point d origine commun pour déployer sa série. Elle semble privilégier un tâtonnement qui lui permet de considérer la sériation de trois éléments Item 2 : Sériation d objets faisant une course L intervenante présente un ensemble de voitures à l enfant, prétextant que ces dernières font une course. L intervenante questionne l enfant à propos de la position des voitures au sein de la course. Cette mise en situation cherche à vérifier si l enfant démontre une certaine compréhension de l aspect ordinal pouvant exister dans une série, en référant aux positions des coureurs et en utilisant des notions perceptives. La figure 14 expose l ordre des voitures. Figure 14 : Ordre des voitures faisant la course Extrait 21 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : [ ] Regarde : première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième, septième. [ ] C est laquelle la voiture qui est en premier? (Pointe la rouge, qui est troisième en réalité.) Celui-là. P is c est laquelle la voiture qui est en dernier? (Pointe la bleue, qui est quatrième en réalité.) Celui-là. P is c est laquelle la voiture qui est au milieu? (Pointe la orange, qui est cinquième en réalité.) Celui-là. [ ] Dans ces voitures-là, c est laquelle qui est en première position? C est laquelle qui est en premier? (Pointe la bleue, qui est quatrième en réalité.) Celui-là. C est laquelle la voiture qui est en dernière position, qui est en dernier? 92

109 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : 25I : 26M : 27I : 28M : 29I : 30M : 31I : 32M : 33I : 34M : 35I : 36M : (Réfléchit et pointe la orange, qui est cinquième en réalité.) Celui-là. C est laquelle la voiture qui est au milieu? (Pointe la voiture jaune, qui est sixième en réalité.) Celui-là. C est laquelle la voiture qui est en avant de la voiture orange? Jaune. C est laquelle la voiture qui est après la voiture verte? Rose. Qui est après la voiture verte? Rouge. C est laquelle la voiture qui est en avant de la voiture orange? Bleue. C est laquelle la voiture qui est au milieu? Orange. C est laquelle la voiture qui est en première position? Jaune. C est laquelle qui est en dernière position? Violet. C est laquelle la voiture qui est à la troisième position? La troisième position. Personne. [ ] C est laquelle qui est à la troisième position? Bleue? Et la voiture jaune, elle est à quelle position, elle? Violet. Non, écoute ma question. La voiture jaune est à quelle position? Violet. Je te demande c est quoi le numéro de sa position à la voiture jaune. Est à quelle position? C est quoi son numéro de position? 3. [ ] Lorsque l intervenante lui demande une première fois quelle voiture est «en avant» de la orange [ligne 13] et «après» la verte [ligne 15], Marianne ne répond pas correctement en inversant les positions : elle répond que la voiture jaune est en avant de la orange [ligne 14], alors qu elle se trouve «après», et elle nomme la voiture rose comme étant après la verte [ligne 16], alors qu elle se trouve «avant». L intervenante questionne l enfant à nouveau à propos de ces voitures [lignes 19 et 17, respectivement] et cette dernière répond correctement [lignes 20 et 18, respectivement]. Marianne réussit à identifier la voiture qui se trouve en dernière position lors d une troisième tentative [lignes 25-26]. Par contre, en ce qui concerne les autres positions des voitures, elle n arrive pas à les identifier correctement [lignes 1 à 12] : la première (elle indique que c est la rouge [lignes 1-2], puis que c est la jaune [lignes 23-24]), celle du milieu (elle indique que c est la orange [lignes 21-22]) et la troisième position (elle répond qu il n y a personne [lignes 27-28], ensuite que c est la bleue [lignes 29-30] et elle attribue également cette position à la voiture jaune [lignes 35-36]). 93

110 Lors de cet item, une série de voitures faisant une course est présentée à l enfant. L intervenante la questionne alors sur la position des participants. Même si elle parvient à identifier, avec beaucoup d insistance et de soutien de la part de l adulte, le dernier élément de la série ainsi que les éléments qui se trouvent «avant» et «après» un autre, elle éprouve beaucoup de difficulté à identifier les autres positions des objets au sein de la série. Elle ne semble pas comprendre certains termes nécessairement convoqués pour une série, comme «premier» et «milieu» Items vérifiant la compréhension de l aspect cardinal La présente section expose les analyses concernant la capacité de l enfant à comparer des collections d objets, à établir la conservation (de quantités continues et discontinues), à procéder au comptage et à considérer l aspect cardinal d une quantité dénombrée Item 1 : Comparaison de collections d objets identiques (correspondance terme à terme) L intervenante dresse deux rangées de sept jetons devant l enfant en les faisant d emblée correspondre comme l illustre la figure 27. Elle ajoute deux jetons à l une des deux rangées et demande à Marianne combien il y a de jetons dans les rangées. Cet item vise à vérifier si l enfant est en mesure de comparer deux collections d objets et surtout comment elle procède pour le faire : en se fiant à l aspect figural de la présentation des collections ou en établissant une opération. Figure 27 : Déplacement des collections inégales en mai 2012 Extrait 22 1I : 2M : 3I : [ ] Est-ce que les deux lignes sont pareilles? Oui, elles sont pareilles. Alors, toi, tu me dis que, les deux lignes, i sont pareilles. Regarde bien. (Ajoute 2 jetons à la rangée du haut, un à gauche et un à droite.) Moi, j ajoute 2 jetons à celle d en haut. Ça veut dire qu i en a maintenant 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Ici [rangée du haut], i en a 9 et ici [rangée du bas], i en a 7. Je prends celle-là d en haut et je fais ça ici. (Rapproche les 9 jetons l un de l autre, de manière à ce 94

111 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : 25I : 26M : 27I : 28M : qu il n y ait plus d espace entre eux.) Peux-tu me dire où est-ce qu i a le plus de jetons? Est-ce qu i a plus de jetons ici [rangée du haut], ici [rangée du bas] ou c est pareil? (Pointe la rangée du haut.) Ici. Ici en haut. Pourquoi, tu sais ça, toi? Pourquoi je sais ça, moi? Ouais. Comment ça se fait que tu sais ça qu i a plus de jetons ici [rangée du haut] que ici [rangée du bas]? (Pointe la rangée du bas.) Ici, je sais. Où est-ce qu i a le plus de jetons? Ou est-ce que c est pareil ou i a plus de jetons quelque part? I a plus de jetons. Où? (Pointe la rangée du bas.) Ici. Celle-là, pourquoi? (Ne répond pas.) Explique-moi. (Pointe la rangée du bas.) Plus de jetons. Oui. Explique-moi pourquoi tu penses qu i a plus de jetons sur celle-là. I a plus de jetons là-bas [rangée du bas]. Oui. Pourquoi? I avait plus de jetons en arrière, à droite, à gauche. Ouais. P is i en avait doucement sur ici [rangée du haut]. Ouais. I en avait doucement. Doucement. [ ] P is là, maintenant, où est-ce qu i en a plus des jetons? B en ici. (Passe sa main rapidement au-dessus des deux rangées.) En haut ou en bas? En bas. [ ] Au début de l extrait 22, Marianne affirme qu il y a plus de jetons dans la rangée du haut [ligne 4]. Par contre, quand l intervenante lui demande de s expliquer, elle change d idée et indique qu il y a plus de jetons dans la rangée du bas, ce qu elle soutiendra pendant toute la durée de l échange [lignes 8 à 12; 16 à 18; 25 à 28]. Avec le questionnement de l adulte, elle parvient à expliquer sa pensée par un raisonnement reposant sur l aspect figural. En effet, pour Marianne, il semble que la rangée du bas, constituée de sept jetons, ait «plus de jetons» que celle du haut, constituée de neuf jetons, parce que «i avait plus de jetons en arrière, à droite, à gauche» [lignes 18 à 20]. Elle ajoute également : «P is, i en avait doucement sur ici» en pointant la rangée du haut [ligne 22]. Il est difficile d interpréter avec une dose de certitude cette réponse originale et spontanée de Marianne. Conjugué à la ligne 20, on peut penser, sous toute réserve, que Marianne compare encore de manière figurale les jetons qui avancent «doucement» dans la rangée du haut, ces derniers occupant une plus petite distance que les jetons qui avancent à grands pas dans la ligne du bas. Quoi qu il en soit, on peut constater que le nombre en soi, pour Marianne, n est pas 95

112 garant de la quantité, et donc ne représente pas le cardinal de la collection. Pour identifier quelle collection est la plus grande, elle utilise l aspect figural en s appuyant sur l apparence de la collection, même si la collection a été modifiée par l adulte devant elle et même si l adulte au départ a dénombré devant elle les deux collections en affirmant «j ajoute deux jetons à celle d en haut» [ligne 3]. Par la suite, l intervenante remet les jetons des deux rangées en correspondance l un avec l autre, la rangée du haut dépassant d un jeton de chaque côté. Elle questionne à nouveau l enfant à savoir si l une des deux rangées comporte plus de jetons. Figure 15 : Comparaison de collections inégales Extrait 23 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : [ ] (Replace la rangée de 9 jetons, comme elle était au début, avec un jeton dépassant la rangée du bas de chaque côté.) Où est-ce qu i en a plus de jetons, maintenant? (Ne pointe rien.) Ici. En haut ou en bas? En bas. En bas aussi? [ ] Est-ce que tu peux me dire si i a plus de jetons ici [rangée du haut], ici [rangée du bas] ou c est pareil? C est pareil. Comment ça se fait que tu sais ça? Explique-moi voir. Je vais les compter, Marie-Pierre. O.K. Compte-les. [ ] (Compte la rangée du haut.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Ouais. Est-ce que je peux compter encore? Oui, laquelle tu veux compter? Là [rangée du bas]. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. Est-ce que i a plus de jetons ici [rangée du haut], ici [rangée du bas] ou c est pareil? C est pareil. C est pareil. I a la même chose. Et si je fais ça? (Déplace les 7 jetons de la rangée du bas pour que la rangée dépasse la rangée du haut à droite et à gauche.) Est-ce qu i a plus de jetons ici [rangée du haut], ici [rangée du bas] ou c est pareil? C est pareil. C est pareil? Comment tu fais pour savoir ça, toi? (Ne répond pas.) [ ] À la suite du déplacement des jetons, Marianne ne parvient pas à identifier correctement la rangée qui comporte le plus de jetons; elle répond principalement le dernier élément énoncé 96

113 par l adulte par effet de récence [lignes 3-4; 5-6; 15-16; 17-18]. Pour expliquer son choix, elle décide spontanément de recourir au comptage [ligne 8]. Bien qu elle soit en mesure de bien dénombrer les deux rangées de jetons en établissant une correspondance terme à terme parfaite entre le mot nombre dit et chaque jeton dénombré [lignes 10; 14], les nombres obtenus ne tiennent pas lieu de cardinal des collections puisque les nombres 7 et 9 sont considérés comme «pareils». Elle ne réussit pas à comparer les deux nombres par l intermédiaire du dénombrement, même si ce dernier est exécuté adéquatement. En ce sens, Marianne nous enseigne que ni la comptine numérique ni même un dénombrement adéquat ne peuvent être considérés garants d une solide construction du nombre. Ainsi, vérifier les habiletés de dénombrement, même si nécessaire, ne semble pas suffisant en soi pour se prononcer sur la construction du nombre chez l enfant. Lors de cet item, l intervenante demande à Marianne de comparer deux collections de jetons pour identifier laquelle est la plus nombreuse, donc qui contient le plus grand cardinal. Marianne est en mesure d utiliser la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l élément dénombré pour procéder au comptage de chacune des collections. Toutefois, comme c était le cas en octobre 2011, l aspect cardinal du nombre n est pas solidement construit, car elle n utilise pas la quantité de chaque collection pour les comparer. Au contraire, Marianne s appuie amplement sur l aspect figural dans sa conception du nombre. Bien que Marianne maintienne une comptine stable jusqu à 10 et puisse dénombrer adéquatement des collections, elle n a pas une construction solide du nombre puisque le dénombrement n assure pas la conceptualisation de l aspect cardinal du nombre, conception qui pousse Marianne à affirmer parfois que 7 = 9 ou parfois Item 2 : Conservation de quantités continues L intervenante présente deux boules de pâte à modeler de même taille à l enfant en lui demandant si l une des deux boules contient plus de pâte. Lorsque l enfant a établi l égalité, l intervenante prend une des deux parts et la transforme à trois reprises sous les yeux de l enfant : en rouleau, en galette, puis en miettes. À chaque fois, elle questionne l enfant pour savoir si l une des deux parts contient plus de pâte à modeler. Cet item a pour but de vérifier si l enfant comprend la conservation de quantités continues et si elle est capable de faire abstraction des transformations effectuées par l adulte par des arguments d identité, de réversibilité ou de compensation qui feraient de la conservation une réelle opération. 97

114 Figure 17 : Première transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 24 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : 25I : 26M : 27I : 28M : 29I : 30M : 31I : 32M : 33I : 34M : 35I : 36M : [ ] Est-ce qu il y a la même chose de pâte à modeler dans les deux ou est-ce qu i a plus de pâte à modeler dans le boudin ou est-ce qu i a plus de pâte à modeler dans la boule? Plus de pâte à modeler dans la boule. Pourquoi i a plus de pâte à modeler dans la boule? Je sais pas. Hein? Explique-moi. Comment ça se fait qu i a plus de pâte à modeler ici [boule jaune] que ici [boudin rouge]? [ ] Toi, tu me dis qu i a plus de pâte à modeler ici [boule jaune]. Comment ça se fait? [ ] Comment ça se fait que toi, tu penses qu i en a plus ici [boule jaune]? (Ne répond pas.) [ ] I en a plus dans la boule? Pourquoi toi, tu penses qu i a plus de pâte à modeler ici [boule jaune] que ici [boudin rouge]? (Ne réponds pas.) Faut que tu m expliques pourquoi i en a plus ici [boule jaune]. (Pointe la boule jaune.) Là! Oui, pourquoi i en a plus là? [ ] Pourquoi i a plus de pâte à modeler dans la boule que dans le boudin? Dans le boudin. Quoi dans le boudin? De la pâte à modeler. I a plus de pâte à modeler dans le boudin? Oui. Que dans la boule? Oui. [ ] Pourquoi? Pourquoi i en a plus dans le boudin, tu penses? I en a assez. Ouais. Dans le boudin? Mais pourquoi i en a plus dans le boudin, tu penses? (Ne répond pas.) Hein Marianne? Pourquoi tu penses qu i en a plus dans le boudin? Comment ça se fait? (Réfléchit.) Oui. Oui? Pourquoi i en a plus dans le boudin, tu penses? Comment ça se fait? Moi, je comprends pas pourquoi i en a plus là. Parce que i avait un boudin dans la boule jaune. Parce qu i avait un boudin dans la boule jaune? Oui. Un boudin quelle couleur dans la boule jaune? (Pointe le boudin rouge.) Ici. Ouais. P is c est où qu i a plus de pâte à modeler? Ou i ont la même chose de pâte à modeler? (Ne répond pas.) Est-ce que c est la même chose de pâte à modeler dans ou i en a un qui a plus de pâte à modeler que l autre? (Pointe le boudin rouge.) Ici. [ ] 98

115 Le raisonnement de Marianne lors de cette première transformation semble assez ambivalent. Tout d abord, elle indique que la boule contient plus de pâte à modeler en utilisant l effet de récence [lignes 2; 10], sans toutefois être en mesure d expliquer sa réponse [lignes 4; 6; 8]. Puis, elle énonce qu il y a plus de pâte à modeler dans le rouleau (ou boudin) [lignes 12 à 18]. Ensuite, elle parvient à expliquer l une de ses réponses en formulant «qu il y avait un boudin dans la boule» [ligne 28]. Il semble que, pour Marianne, la transformation soit comprise comme des actions juxtaposées qui permettent de faire l hypothèse de plus de pâte à modeler, comme si boule + boudin boule. Malgré le fait qu elle semble comprendre que le rouleau a été formé à partir d une boule identique, elle ne parvient pas à identifier clairement que les deux parts de pâte à modeler contiennent la même quantité de pâte, indiquant plutôt que le boudin contient plus de pâte à modeler. L intervenante prend le rouleau rouge et le transforme en boule de même grosseur que celle de référence. L enfant confirme alors leur égalité. Puis l intervenante reprend la boule rouge et la transforme en galette devant les yeux de l enfant. Figure 18 : Deuxième transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 25 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : [ ] Est-ce qu i a la même chose dans la boule p is dans la galette ou i a plus de pâte à modeler dans la galette ou dans la boule? Dans la boule. I en a plus dans la boule. Est-ce qu i a plus de pâte à modeler dans la boule, dans la galette ou c est pareil, i a la même chose de pâte à modeler dans les deux? C est pareil. C est pareil. Concentre-toi bien. Écoute-moi bien, reste concentrée. Est-ce qu i a la même chose de pâte à modeler dans les deux ou i en a plus ici [boule jaune] ou plus ici [galette rouge]? (Touche la galette rouge, mais ne regarde pas.) Plus ici. Ici où? (Ne répond pas et ne regarde pas.) Tu dis qu i en a plus ici, lequel? La boule ou la galette? La galette ou la boule? La galette. I en a plus dans la galette, tu penses? Oui. Comment ça se fait? [ ] Comment ça se fait que tu penses qu i en plus dans la galette que dans la boule? Dans la boule. Est-ce qu i a la même chose de pâte à modeler dans les deux ou i a plus de pâte à modeler ici [boule 99

116 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : 25I : 26M : 27I : 28M : 29I : 30M : 31I : 32M : 33I : 34M : jaune] ou ici [galette rouge]? (Pointe la galette rouge.) Ici. Ici où? Dans la boule. Dans la boule? Pourquoi i a plus de pâte à modeler dans la boule? Oui. Comment ça se fait? Comment ça se fait qu i a plus de pâte à modeler dans la boule? Comment tu fais pour savoir ça, toi? (Réfléchit.) Oui. [ ] Est-ce qu i a la même chose de pâte à modeler dans les deux ou i en a plus dans l une que dans l autre? Est-ce que c est pareil. Tu penses que c est la même chose? B en oui. Ah oui? I a la même chose de pâte à modeler dans la galette p is dans la boule? Bien oui! Est-ce qu i en a un qui a plus de pâte à modeler que l autre? Oui. Lequel? [ ] Est-ce que c est pareil ou i en a un qui a plus de pâte à modeler? Plus que la pâte à modeler. Où ça? Où est-ce qu i a plus de pâte à modeler? Dans la boule jaune. [ ] Les propos de Marianne dans cet extrait 25 nous permettent de constater qu elle n a toujours pas construit la notion de conservation des quantités continues, du moins pas solidement. En effet, lorsque l intervenante la questionne à savoir si une part de pâte contient plus de pâte à modeler ou si les deux quantités sont égales, Marianne répond principalement le dernier élément énoncé par l intervenante, par effet de récence [lignes 2; 4; 6; 14;16]. De plus, quand les questions de l intervenante sont fermées, Marianne répond toujours par l affirmative [lignes 12; 26; 28; 30] et elle ne parvient pas à expliquer ses réponses [lignes 19 à 23]. Il est vrai toutefois que l enfant soulève la possibilité de l égalité par la question : «Est-ce que c est pareil?» [ligne 24]. Si cet énoncé de Marianne, qui peut provenir d une imitation différée [ligne 3], peut laisser entrevoir une émergence, il n en demeure pas moins que cela demeure extrêmement fragile, comme le montre l ensemble de l extrait 25. L intervenante prend la galette rouge et la transforme en boule de même grosseur que celle de référence. L enfant confirme leur égalité. Puis, l intervenante reprend la boule rouge et la transforme en miettes devant les yeux de l enfant. 100

117 Figure 19 : Troisième transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 26 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : [ ] Est-ce que tu penses qu i a la même chose de pâte à modeler dans la boule que dans toutes les miettes ensemble ou i a plus de pâte à modeler dans la boule ou plus de pâte à modeler dans les miettes? Dans les miettes. I a plus de pâte à modeler dans les miettes, tu crois? Oui. Comment ça se fait? (Ne répond pas.) Comment ça se fait, tu penses, qu i a plus de pâte à modeler dans les miettes que dans la boule? [ ] Est-ce qu i a la même chose de pâte à modeler dans toutes les miettes mauves ensemble p is dans la boule ou est-ce qu i a plus de pâte à modeler dans toutes les miettes mauves ou plus de pâte à modeler dans la boule? Dans la boule. I a plus de pâte à modeler dans la boule. Oui. Est-ce que i a plus de pâte à modeler dans la boule, plus de pâte à modeler dans les miettes mauves ou c est la même chose les deux? [ ] Je veux savoir : est-ce qu i a la même chose de pâte à modeler dans la boule jaune p is dans les miettes rouges toutes ensemble ou est-ce qu i a plus de pâte à modeler ici [miettes rouges] ou plus de pâte à modeler ici [boule jaune]? (Ne pointe rien.) Plus de pâte plus de pâte à modeler ici. Où ça? (Pointe les miettes.) Ici. Dans les miettes? Oui. Comment ça se fait? (Met sa main au-dessus des miettes, en faisant un rond.) Parce qu elles sont ici. Parce qu i sont ici. Oui. [ ] Le raisonnement de Marianne lors de ces tâches de conservation témoigne d une absence de conservation. Lorsque les boules de pâte à modeler sont transformées, elle répond principalement en utilisant l effet de récence [lignes 2; 8; 12], sans être en mesure de s expliquer [lignes 5-6]. Cependant, Marianne fournit une explication plus claire, à l aide d un geste, lorsqu elle doit expliquer pourquoi elle pense qu il y a plus de pâte à modeler dans les miettes que dans la boule [lignes 12 à 18]. Son explication permet de bien comprendre qu elle se fie à l aspect figural pour juger de la quantité. En effet, elle délimite 101

118 un grand rond «imaginaire» pour couvrir l ensemble des miettes, ce rond prenant plus d espace que la boule [ligne 18]. Lors de cet item, l intervenante propose deux parts égales de pâte à modeler à l enfant. Par la suite, elle réalise trois transformations avec l une des deux parts devant ses yeux : une fois en rouleau, une fois en galette et une fois en miettes. À chaque fois, l enfant doit se prononcer sur les quantités de pâte à modeler dans chaque part. Comme en octobre 2011, Marianne ne démontre pas clairement une construction de la conservation des quantités continues. Elle répond aux questions de l adulte en utilisant principalement l effet de récence. Par contre, il y a une émergence de tentative d explication en se basant sur l aspect figural Item 3 : Conservation de quantités discontinues D abord, l intervenante dresse une rangée de sept images de chevalier. L enfant, pour sa part, doit construire une rangée équivalente avec des images de princesse. Cet item vise à vérifier la capacité de l enfant à utiliser la correspondance terme à terme pour comparer les collections et à établir une conservation des quantités à la suite d une transformation de l aspect figural de l une des deux collections. Figure 20 : Rangée d images présentée à l enfant lors de l item 3 Figure 28 : Construction d une rangée équivalente en mai

119 Extrait 27 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : 21I: 22M: 23I: 24M: 25I: 26M: 27I: 28M: 29I: 30M: [ ] (Place une rangée de 7 images de chevalier sur la table.) Ça, c est des (Laisse l enfant compléter.) Chevaliers! I en a combien? Veux-tu les compter? Oui. S il-te-plaît. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. Très bien! Là, j vais te donner les princesses. Je veux que tu mettes la même chose de princesses que de chevaliers. Qu i aille pareil de princesses que de chevaliers. [ ] Faut qu i aille pareil de chevaliers que de princesses. Faut que chaque chevalier ait une princesse. Oui. Oui. Faut faire une ligne de princesses en d ssous (Pointe sous la rangée de chevaliers.) Là? Oui. (Fait une nouvelle rangée de princesses sous celle de chevaliers. Elle s arrête, car elle n a plus de princesses dans les mains. Il y en a 6 sous les 7 chevaliers et 4 devant elle, près du bord de la table.) Est-ce que chaque chevalier a une princesse? Oui. I avait combien de chevaliers? 3. Combien? Compte-les. Combien i a de chevaliers? 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. I a 7 chevaliers. Ça veut dire que ça prend combien de princesses, pour que ce soit pareil? 8. Pour que ce soit pareil. 8. Si i a 7 chevaliers, i faut la même chose de princesses. Ça veut dire (Laisse l enfant compléter.) (Ne répond pas.) I a 7 chevaliers et i faut que chaque chevalier ait sa princesse. I faut pareil de princesses. Pour que ce soit égal, ça veut dire que ça prend combien de princesses? 9. [ ] I a combien de chevaliers? 7. Ça veut dire qu i faut (Laisse l enfant compléter.) 8 princesses. [ ] Au départ, Marianne compte les sept chevaliers correctement en utilisant la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l élément dénombré [ligne 6]. Encore ici, on voit que le dénombrement, aussi adéquat soit-il, n assure pas la cardinalité du nombre [lignes 6; 16; 20; 22; 28; 30]. Ensuite, elle met six princesses sous les chevaliers en utilisant les limites perceptives. Les deux lignes semblent de même longueur si on se fie à l aspect figural des collections. Malgré les questions de l intervenante, Marianne ne parvient pas à identifier que la rangée de princesses devra également comporter sept images pour être équivalente [lignes 20; 22; 26; 30], même si elle dénombre adéquatement les sept chevaliers [ligne 28]. 103

120 L intervenante rectifie la situation en ajoutant une princesse à la ligne formée par l enfant. Une fois les deux rangées égalisées, l intervenante modifie l apparence de la rangée de chevaliers pour qu elle dépasse celle de princesses de chaque côté. On cherche alors à vérifier si l enfant comprend la conservation des quantités discontinues et si elle est capable de faire abstraction des transformations effectuées par l intervenante par des arguments d identité, de réversibilité ou de compensation, qui ferait de la conservation une opération. Figure 29 : Disposition des rangées pour la comparaison de collections et pour la conservation des quantités discontinues en mai 2012 Extrait 28 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : 13I : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : [ ] (Déplace les chevaliers pour qu ils ne soient plus en correspondance avec les princesses. La rangée des chevaliers dépasse à gauche et à droite celle des princesses.) Est-ce qu i a encore le même nombre de chevaliers que de princesses ou i en a plus ici [rangée de chevaliers] ou i en a plus ici [rangée de princesses]? (Pointe entre les deux rangées approximativement.) Ici. Ici où? En bas [rangée de princesses]. I en a plus en bas. Oui. Pourquoi? Parce que. Comment ça se fait qu i en a plus en bas, toi, tu penses? Parce que i avait des princesses. Ouais? P is est-ce qu i a plus de Est-ce qu i en a plus ici [rangée de princesses], i en a plus ici [rangée de chevaliers] ou c est pareil? C est pareil. P is est-ce que c est pareil, i en a plus ici [rangée de princesses] ou plus ici [rangée de chevaliers]? Plus ici. Ici où? Où est-ce qu i en a plus? En bas [rangée de princesses]. En bas, pourquoi tu penses qu i en a plus en bas? Parce que i en a en bas. Ouais, mais i en a en haut aussi. Pourquoi tu penses qu i en a plus en bas? Parce qu i en a en haut. [ ] Tu te souviens? Tantôt, tu m avais dit qu i en avait pareil ou pas pareil dans les deux lignes? Pas pareil. P is c est où est-ce qu i en a le plus? (Pointe la rangée de princesses.) [ ] 104

121 Marianne utilise le comptage pour construire la collection de princesses [extrait 27, lignes 6; 18], mais elle ne recourt plus à ce comptage comme un outil mettant en relief la cardinalité au service de la comparaison des deux collections. Elle utilise principalement l aspect figural des collections quand elle énonce que la rangée de princesses comporte plus d éléments que celle de chevaliers [lignes 4; 10; 16; 24]. Il est possible de penser que Marianne se soit centrée ici non pas sur les limites perceptives des deux collections, comme c était le cas dans l extrait 27, mais davantage sur les longs espacements entre les chevaliers qui lui donnent l impression qu il y a plus de princesses étant donné la densité que cela occasionne. Elle répond également à quelques reprises en utilisant l effet de récence [lignes 1 à 4; 11-12]. En affirmant que l une des deux rangées comporte plus d éléments que l autre à la suite du déplacement des éléments, Marianne se situe au premier stade en ce qui concerne la conservation de quantités discontinues. Elle ne recourt pas à des opérations comme la correspondance terme à terme ni au comptage pour comparer les deux collections, privilégiant l aspect figural. De plus, tout comme en octobre 2011, Marianne ne parvient pas à expliquer ses réponses en recourant aux arguments d identité, de réversibilité et de compensation [lignes 7 à 11; 17 à 20]. Lors de cet item, une rangée de sept images de chevalier est présentée à Marianne. Cette dernière doit construire une rangée équivalente avec des images de princesse. Sans un soutien de l adulte, Marianne n y arrive pas. Pour comparer les deux collections, elle privilégie l aspect figural, plutôt que la correspondance terme à terme et le comptage. Ce dernier est utilisé, mais le cardinal qui lui est inhérent dans une compréhension du nombre mature n est pas construit chez Marianne. En ce sens, lorsque l intervenante modifie l apparence de l une des deux collections, Marianne affirme que l une des deux rangées comporte plus d éléments en se centrant sur un des aspects figuraux, ce qui témoigne que Marianne n a toujours pas construit la conservation des quantités discontinues, puis ce qui explique que la cardinalité n est pas inhérente à son comptage. Tout apparaît comme si Marianne a appris une procédure mécanique de comptage sans avoir compris le raisonnement opératoire qu elle sous-tend. 105

122 Item 4 : Comptage Sans utiliser de matériel, l intervenante demande à l enfant de compter le plus loin possible. Cette demande a pour but de vérifier l étendue de la chaîne numérique de l enfant. Extrait 29 1M : 2I : 3M : 4I : 5M : 6I : 7M : 8I : 9M : [ ] 1, 2 (Regarde ailleurs.) 3, 4, 5, 6, (Regarde ailleurs.) 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20! Vas-y , 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30. Continue. 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40! Oui. Vas-y, continue. [ ] Continue, 40 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49,30. Continue. [ ] Tu es rendue où? 49, 50, 51, 52, 54, [ ] 55, 56, 57, 58, 59, 40! 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 60! 61, 62, 63, 64, 68. [ ] Comme elle le faisait déjà en octobre, Marianne compte jusqu à 49 sans erreur [lignes 1; 3; 5; 7]. Après 49, elle retombe à 30 [ligne 7]. Elle discute et reprend à 49. Elle compte jusqu à 59 en omettant 53. Une fois à 59, elle recommence avec 40, compte jusqu à 49 et continue de 60 à 68 en omettant le 63, le 65, le 66 et le 67 [ligne 9]. Ensuite, l intervenante lui demande de compter en tenant compte d une borne supérieure, fixée à 9 [extrait 30]. Par la suite, l intervenante lui demande de compter en tenant compte d une borne inférieure fixée à 3 [extrait 31]. Ceci a pour but de vérifier si la chaîne numérique de Marianne est sécable ou non. Extrait 30 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : [ ] Moi là, j aimerais ça que tu comptes jusqu à 9. [ ] 9. Jusqu à 9. 9, 10, 11 Là, toi tu comptes à partir de 9. Moi, je veux du début p is on arrête à 9. Jusqu à 9, vas-y. 1. (Pause.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. [ ] Marianne réussit à compter en tenant compte d une borne supérieure fixée à 9 [ligne 6] et elle réussit également à compter en utilisant ce même nombre 9 comme borne inférieure, probablement car elle ne semble pas avoir bien compris la question [lignes 1 à 4]. Malgré le fait que Marianne ait réussi à considérer 9 comme borne inférieure [extrait 30], 106

123 l intervenante lui demande de compter à partir de 3 [extrait 31], en visant le même but qui était de vérifier si la chaîne numérique de Marianne est sécable ou non. Extrait 31 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I: 8M: 9I: 10M: [ ] P is là, j aimerais ça que tu comptes à partir de 3. On commence à 3. Oui. Vas-y. 1. Ah! On commence à 3. On commence pas à 1, on commence à 3. Vas-y. 1, 2, 3. Ouais, ça c est jusqu à 3. Moi, je veux qu on compte à partir de 3. Tu commences à compter à partir de 3. Oui. Ton premier chiffre, c est 3. Vas-y. 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10. [ ] Marianne parvient à compter à partir de 3 [ligne 10]. L intervenante lui demande ensuite de compter en considérant, à la fois, la borne inférieure 5 et la borne supérieure 9. Extrait 32 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : [ ] On commence à 5 p is on arrête à 9. [ ] Le premier chiffre c est 5 et on arrête rendues à 9. (Montre 5 avec ses doigts.) [ ] On commence à 5 et on termine à 9. Vas-y. 5, 9. 5, après 5? 6, 7, 8, 9. [ ] Marianne réussit cette tâche, avec un léger soutien de l adulte [lignes 5-6]. Lors de la même tâche réalisée en octobre, Marianne éprouvait de la difficulté à respecter, à la fois, une borne inférieure et supérieure [extrait 13], ce qui permettait de poser que sa chaîne numérique était non sécable à l époque. A contrario, le fait qu elle puisse considérer deux bornes fixées par l adulte en même temps peut signifier que sa chaîne numérique soit devenue sécable : Marianne est maintenant en mesure de commencer un comptage par un 107

124 mot nombre autre que 1 [extraits 30; 31; 32]. 26 Il convient toutefois de souligner que cette nouvelle capacité d une chaîne sécable n est donc pas, elle non plus, garante de l aspect cardinal du nombre, tel que démontré dans l extrait 30 qui impliquait notamment des nombres de sa chaîne numérique sécable. Finalement, l intervenante demande à l enfant de compter à rebours à partir de 7. Ceci permet de vérifier si la chaîne numérique de l enfant est dénombrable. Extrait 33 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I: 8M: 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: [ ] Moi, je veux savoir qu est-ce qui vient avant. Hein? Comme quand je compte p is que je fais : 3, 2, 1. Là, on va faire pareil, mais on commence par 7. 7, (Laisse l enfant compléter.) 8. (Fait non de la tête.) On recule. [ ] Qu est-ce qui vient avant 7? Oui. C est quoi le chiffre qu on dit juste avant de dire 7? 6. Oui. 7, 6, (Laisse l enfant compléter.) (Ne répond pas.) On continue de reculer : 7, 6, (Laisse l enfant compléter.) 7. 7, 6, on continue. Qu est-ce qui vient avant 6? 5. Oui! On continue. 8. Qu est-ce qui vient avant 5? 8. Hein? 7, 6, 5, (Laisse l enfant compléter.) 4, 3, 2, 1. [ ] Avec un soutien important de la part de l adulte, Marianne arrive à compter à rebours à partir de 7 [lignes 5 à 12]. Par contre, rendue à 5, elle y arrive seule [lignes 17-18]. Le fait que Marianne soit en mesure de compter plus aisément à rebours qu elle le faisait en octobre concorde avec le fait que sa chaîne numérique soit maintenant sécable. En ce sens, sa chaîne numérique commence à s asseoir sur l opération, permettant la réversibilité, ce qui est nécessaire lors d un comptage à rebours. Toutefois, sa chaîne numérique ne peut 26 Il convient de rappeler que cette amélioration de la chaîne numérique de l enfant survient aux termes d interventions pédagogiques qui se sont déroulées pendant l année, non pas sur la chaîne numérique en soi et son extension, mais sur les opérations sur le petit nombre comme cela a été décrit au chapitre

125 être considérée dénombrable pour le moment, en raison des erreurs encore fréquentes, notamment lors des comparaisons de collection où «7 est plus que 9» [extrait 22]. Lors de cet item, on cherche à vérifier la construction de la chaîne numérique de l enfant. Marianne arrive à compter seule sans erreur jusqu à 49, à tenir compte de bornes supérieure et inférieure fixées à 9 et de compter à rebours, avec un soutien de l adulte, à partir de 7. La chaîne numérique de Marianne peut être considérée comme sécable au moins pour les nombres inférieurs à 10, car elle est en mesure de compter à partir de 9, seule sans erreur. La prise de maturité dans la chaîne numérique n assure toutefois pas la construction de la cardinalité inhérente au nombre si l on compare les réponses adéquates de Marianne dans cet item par rapport à ce qu elle a répondu, par exemple, à l extrait 22 : 7 9 ou, parfois, à l extrait 23 : 7 = 9.On peut également souligner que la progression de la chaîne numérique de Marianne est survenue dans un contexte pédagogique qui a amplement mis l accent, non pas sur l extension de la chaîne numérique, mais bien sur les opérations sur le petit nombre Item 5 : Cardinalité L intervenante place dix-huit jetons pêle-mêle sur la table devant l enfant. Elle demande alors à Marianne de les dénombrer. Cet item tente de vérifier les méthodes de comptage utilisées par Marianne ainsi que sa compréhension de la notion de cardinalité, bien que cette dernière puisse être inférée par l intermédiaire d autres items précédents. Figure 23 : Première disposition de jetons à dénombrer 109

126 Extrait 34 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I: 8M : [ ] Compte-les. Je veux savoir i en a combien. (Entreprend le comptage de façon assez organisée, elle compte en ligne, mais compte 2 jetons à 2 reprises, donc elle n arrive pas au bon compte.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20. Excellent! Très, très bien! [ ] I en avait combien déjà? J me souviens p us combien i en avait. 7. I en a 7? Oui. T en as compté 7, toi? Oui, j en ai compté 7. Marianne en dénombre 20 [ligne 2], ce qui se rapproche beaucoup plus du réel cardinal de la collection, que lors de l évaluation d octobre 2011 où Marianne dénombrait 30 jetons [extrait 16]. Bien que l adulte laisse sous-entendre par la formulation de sa question que la quantité («combien») est issue du comptage [ligne 1], quand l adulte lui demande de nouveau combien il y en avait [ligne 3], elle répond qu il y en a 7 [lignes 4; 8]. De plus, comme c était le cas lors de l évaluation d octobre 2011, Marianne éprouve encore quelques difficultés à bien utiliser la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l élément dénombré lorsque les collections comportent plus de 10 éléments. L intervenante déplace les jetons sur la table et demande à l enfant combien il y en a, sans les compter. Ensuite, il est demandé à l enfant de compter les jetons pour vérifier son hypothèse. Extrait 35 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I : 10M: [ ] Là, je les prends et je fais ça. (Prend les jetons et les disperse sur la table.) Sans compter là, combien tu penses qu i en a, des jetons? (Regarde ailleurs.) 8. Tu penses qu i en a 8? (Acquiesce de la tête.) Est-ce que tu peux les compter maintenant pour vérifier? (Ne fait rien.) On les compte pour vérifier. [ ] Combien i a de jetons? Oui. (Ne compte pas.) 8. O.K. Compte-les. (Compte les jetons, en faisant 2 oublis et en comptant 2 fois 2 jetons, donc elle obtient le bon total, par hasard.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18. [ ] À la suite du déplacement, Marianne énonce qu il y a huit jetons [lignes 2; 8]. Ce nombre ne correspond ni au décompte qu elle avait réalisé précédemment [extrait 34, ligne 2], ni au 110

127 nombre qu elle avait énoncé à l adulte [extrait 34, lignes 4; 8]. Cela témoigne que Marianne n a pas encore construit totalement le principe de cardinalité. Lors de la vérification, Marianne obtient un bon compte en faisant deux types de méprises : elle oublie deux jetons et en compte deux à deux reprises [ligne 10]. Elle est donc en mesure de bien réaliser la correspondance terme à terme entre le mot nombre énoncé et l élément compté, mais elle éprouve de la difficulté à bien organiser son comptage. En raison des difficultés que présente l enfant à travailler avec une collection de 18 éléments, l intervenante tente de nouveau le même exercice, mais avec un ensemble de cinq jetons. Il convient de souligner que le nombre 5 fait partie de sa chaîne numérique sécable [extrait 32] et que Marianne parvient à ce moment de l année à compter à rebours à partir de 5 [extrait 33, ligne 18]. Figure 30 : Seconde disposition de jetons à dénombrer en mai 2012 Extrait 36 1M: 2I: 3M: 4I: 5M: 6I: 7M: 8I: 9M: 10I: 11M: 12I: 13M: 14I: 15M: [ ] (Compte en touchant chaque jeton.) 1, 2, 3, 4, 5. Combien i en a déjà? Combien t as dit? 5. I en a 5! Ah, super! (Déplace les jetons sur la table et les éparpille à nouveau.) Compte-les pas. Dismoi combien tu penses qu i en a? 8. Ah, O.K. Compte-les voir, pour vérifier. [ ] Peux-tu compter pour vérifier? (Ne fait rien.) Compte-les. Tu m as dit qu i en avait combien? Combien tu penses qu i en a? (Compte les jetons en comptant un même jeton 2 fois.) 1, 2, 3, 4, 5, 6. Recompte-les voir. (Recompte les jetons, en faisant la même méprise.) 1, 2, 3, 4, 5, 6. Très bien. Si je les mets comme ça. (Place les 5 jetons pour former une ligne horizontale.) Là, i en a combien? Peux-tu les compter s il te plait? Oui. Compte-les voir. 1, 2, 3, 4, 5. [ ] Marianne dénombre correctement les jetons dès la première tentative [ligne 1]. Quand l intervenante lui demande combien il y avait de jetons, elle est en mesure de répondre 5, sans avoir besoin de les recompter [lignes 2-3]. Par contre, quand l intervenante déplace la collection sur la table, Marianne énonce qu il y a huit jetons [ligne 5], ce qui était déjà son 111

128 hypothèse lors de l échange précédant alors qu il y avait dix-huit jetons [extrait 35, lignes 2 à 8]. Au moment du recomptage, Marianne fait une méprise de compter un même jeton à deux reprises, ce qui lui donne un total de six jetons [lignes 9 et 11]. L intervenante forme alors une ligne avec les cinq jetons, ce qui permet à l enfant de bien organiser son comptage et d arriver au bon total [lignes 12 à 15]. Ensuite, l intervenante demande à l enfant d opérer sur cette rangée de jetons en posant une hypothèse, qui sera vérifiée en ajoutant ou en retirant des jetons. Extrait 37 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I : 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: 19I: 20M: [ ] Oui, i en a 5. Moi, j en ajoute 1. J en mets un autre. I va en avoir combien? 6. Oui. On l essaie. J en mets 1. Peux-tu les compter? Oui. Très bien. Compte-les. Tu m as dit qu i allait en avoir 6. Essaie-le. [ ] I en a combien? 1, 2, 3, 4, 5, 6. Très, très bien! Mais là, toi, tu m as dit qu i en avait 6. [ ] Tu m as dit qu i en avait combien déjà? (Compte les jetons.) 1, 2, 3, 4, 5, 6. Très bien. Moi, je vais en enlever 2. I va en avoir combien si j en enlève 2? (Ne répond pas.) Hein? I en a 6 et j en enlève 2. I va en avoir combien? 3. 3? (Réfléchit.) Oui, i va en avoir 3. O.K. On l essaie. (Compte 2 jetons.) 1, 2, je les enlève. I en reste combien? (Ne compte pas.) I en a 4. Oui! Et p is là, tu m as dit i en a 4. Et si j en mets 2 autres, i va en avoir combien? 5. Si j en mets 2 autres? I va en avoir 5! On l essaie. (Ajoute 2 jetons à ceux déjà sur la table.) Compte-le, i en a combien? (Compte les jetons, en comptant 2 fois un même jeton.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. [ ] Lorsque la collection comporte cinq jetons, elle arrive à réaliser l opération d un seul ajout [lignes 1-2; 13-14]. Par contre, dans tous les cas, elle semble comprendre le vocabulaire relié aux opérations qui lui sont demandées. En ce sens, lorsqu on lui demande d ajouter des jetons, elle répond par un nombre plus grand que celui de départ [lignes 15-16] et lorsqu on lui demande de retirer des jetons, elle répond par un nombre plus petit que celui 112

129 de départ [lignes 9-10]. De plus, on observe la non-réversibilité qui subsiste dans sa chaîne numérique [lignes 13 à 16]. Au cours de cet échange, Marianne répond adéquatement la quantité restante à la suite du retrait des deux jetons, et ce, sans dénombrer oralement les jetons. Cette réussite apporte plusieurs hypothèses. D abord, comme les jetons étaient placés en ligne à ce moment, il est possible que Marianne ait reconnu l aspect figural d une rangée de quatre éléments. Elle peut également avoir résolu mentalement la soustraction 6-1-1, étant capable de compter à rebours à partir de 5. Finalement, elle peut avoir compté mentalement les jetons disposés sur la table avant de répondre à la question de l intervenante. Étant donné la rapidité de Marianne à répondre 4, l hypothèse du dénombrement mental, c est-à-dire sans avoir pointé avec son doigt les objets comptés, est rejetée. Bien que le nombre 5 soit relativement bien construit (si le compte à rebours à partir de 5 est possible, il ne demeure pas le cardinal d une collection dénombrée [extrait 36]), rien ne montre dans les données colligées jusqu à ce moment que c est le cas pour 6. C est pourquoi l hypothèse d une reconnaissance figurale est retenue, d autant plus que Marianne recourt encore très souvent, et de manière dominante, à l aspect figural dans l ensemble de ses raisonnements. Cette hypothèse est d ailleurs confortée par la difficulté de Marianne à faire l opération inverse d addition (l ajout de deux jetons aux quatre déjà présents) où elle répond cinq. Les réponses aux questions témoignent que la capacité à opérer sur les nombres est en développement chez Marianne, bien que sa chaîne numérique soit maintenant sécable. Il convient donc de travailler sur le petit nombre et d y faire des opérations afin que la comptine numérique prenne un réel sens cardinal et que la cardinalité vienne soutenir le dénombrement. Lors de cet item, une collection de jetons est présentée pêle-mêle à Marianne. Cette dernière doit la dénombrer et réaliser des opérations d addition et de soustraction. Marianne parvient à compter correctement la collection de cinq jetons en utilisant bien la correspondance terme à terme entre le mot nombre énoncé et l élément dénombré, mais elle n y arrive pas avec dix-huit jetons. En ce qui concerne les opérations qu elle devait réaliser sur ces nombres, lorsque le nombre de départ est inférieur ou égal à 5, elle parvient à réaliser l addition ou la soustraction de 1 élément. Par contre, sa chaîne numérique semble être non réversible : un retrait de deux éléments suivi d un ajout de deux éléments ne sont pas compris comme étant des opérations inverses par Marianne, étant donné qu elle ne rétablit pas la quantité d origine avant ce retrait suivi du même ajout. 113

130 Synthèse de la compréhension de l enfant en mai 2012 Pour la compréhension de l aspect ordinal du nombre, Marianne a prouvé qu elle a fait des avancées en ce qui a trait à la sériation. Elle n arrive toujours pas à sérier les éléments, même avec un soutien de l adulte, mais elle est en mesure de constater les erreurs et de replacer des objets au sein d une série de trois éléments; ce qui prouve l avancée de sa réflexion. De plus, elle considère maintenant la nécessité d utiliser une ligne d origine commune lors du déploiement d une série. Par ailleurs, lorsqu elle est questionnée sur les positions d une série, Marianne parvient à identifier ce qui se trouve «avant» et «après», mais pas les positions occupées par les participants à une course. À ce moment, elle se situerait au premier stade de développement de l aspect ordinal selon Piaget. En ce qui a trait à l aspect cardinal du nombre, Marianne se trouve sensiblement au même niveau qu en octobre Sa comptine numérique est toujours élaborée, sans pour autant, que le nombre comme tel soit bien construit. Elle utilise correctement la correspondance terme à terme entre le mot nombre énoncé et l objet dénombré, mais celle-ci n est toujours pas utilisée comme une opération réversible qui mène à la construction de l aspect cardinal du nombre. La chaîne numérique de Marianne est maintenant sécable, ce qui constitue une avancée à ce sujet. Elle connaît bien la comptine des mots nombres et il lui est possible d entamer un comptage par un mot nombre autre que 1, notamment 9 dans l un des items. Malgré le fait que les nombres inférieurs à 10 sont de plus en plus partie prenante d une chaîne numérique sécable pour Marianne, le comptage n est toujours pas utilisé comme une opération permettant de comparer des collections et d identifier correctement le cardinal d une collection. Dans les tâches de conservation, comme c était le cas en octobre 2011, Marianne répond principalement en utilisant l aspect figural des collections et l effet de récence. Elle n arrive pas clairement à expliquer ses réponses, quoique cela semble être en émergence. Marianne n a donc pas encore construit la conservation des quantités continues et discontinues. À ce moment, la correspondance terme à terme, la conservation et le comptage ne sont pas 114

131 construits comme des opérations et elle se situerait au premier stade de développement de la conservation selon Piaget Évaluation 3 : Février 2013 Lors de la troisième évaluation, qui a été réalisée en février 2013, des tâches similaires à celles d octobre 2011 et de mai 2012 ont été proposées à l enfant pour vérifier sa compréhension du nombre, mais sans utiliser nécessairement des items identiques. Toutefois, les items permettaient de vérifier les mêmes éléments constitutifs du nombre Items vérifiant la compréhension de l aspect ordinal du nombre La présente section expose, d une part, les analyses concernant la capacité de l enfant à sérier en ordre de grandeur cinq cartons différents et, d autre part, sa capacité à considérer les diverses positions d objets d une série Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes L intervenante présente cinq cartons de tailles différentes à l enfant. Elle lui demande de les placer du plus petit au plus grand. Cet item a pour but de vérifier la sériation effectuée par l enfant en portant toujours l attention sur la réalisation de la tâche en soi, plutôt que simplement sur la sériation produite. La figure 31 présente la première sériation réalisée par l enfant. 28 Il convient de rappeler que, à partir de cette troisième évaluation, l intervenante de l enfant est également la chercheure du présent mémoire. 115

132 Figure 31 : Sériation de cartons réalisée en février 2013 ( ) Extrait 38 1I : 2M : [ ] Es-tu capable de les placer du plus petit au plus grand? (Les place dans cet ordre : ) Youhou! 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: Est-ce qu ils sont placés du plus petit au plus grand? Oui. C est lequel le plus petit? (Pointe le carton 1.) Est-ce que tu l as mis en premier? (Prend le plus court et le déplace : )[Voir Figure 31.] Oui! (Rit.) Là, ils sont placés du plus petit au plus grand? Oui. [ ] Lors de la réalisation de la tâche, comme c était le cas avec les pailles en octobre 2011 et en mai 2012, Marianne semble prendre les cartons l un après l autre en discutant d autre chose et elle les place systématiquement à la droite de ceux déjà en place. Ainsi, l ordre de la série semble correspondre davantage à l ordre dans lequel elle a pris chaque carton plutôt que d être établi sur un critère de grandeur. Toutefois, on peut remarquer que Marianne ne semble pas prendre les cartons au hasard. Elle semble créer des couples dichotomiques plus petit/plus grand et juxtaposer ces couples les uns après les autres, sans pouvoir coordonner les deux premiers couples ensemble. L extrait 38 montre également qu elle est en mesure de repérer le plus petit carton [lignes 5-6] dans la série ainsi établie, et ce, même si elle ne le place pas en premier [ligne 8]. On remarque qu elle parvient à sérier en ordre de grandeur trois éléments au milieu de la série à la suite d une certaine organisation basée sur l établissement de couple dichotomique plus petit/plus grand. Également, on remarque qu elle maintient la nécessité de partir d un point d origine pratiquement commun, du moins à l œil, pour sérier les cinq éléments. 116

133 Lors de cet item, un ensemble de cinq cartons est présenté à l enfant qui doit les sérier. Marianne prend les cartons un à la fois et les place systématiquement à la droite du dernier carton posé. Elle semble créer des couples dichotomiques plus petit/plus grand et juxtaposer ces couples les uns après les autres sans pouvoir coordonner les deux premiers couples ensemble. Malgré le fait qu elle soit en mesure de considérer une ligne d origine commune aux cinq cartons, elle ne réussit pas à déployer seule la série correctement. Elle parvient à sérier quatre éléments Item 2 : Sériation d objets faisant une course L intervenante présente un ensemble d escargots en bois à l enfant, prétextant qu ils font une course pour retourner le plus rapidement possible à la maison. Elle questionne l enfant à propos de la position des escargots au sein de la course. Cette mise en situation cherche à vérifier si l enfant démontre une certaine compréhension de l aspect ordinal pouvant exister dans une série, en référant aux positions des coureurs et en utilisant des notions perceptives. La figure 32 illustre l alignement des escargots faisant la course. Figure 32 : Alignement des coureurs en février 2013 Extrait 39 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: [ ] I : C est lequel le premier? C est lequel qui est le plus près de la maison? M : (Pointe le jaune.) I : Elle est où la maison? M : (Pointe la maison.) I : Ah! Et qui est le plus près de la maison? M : L escargot bleu. I : Oui, l escargot bleu! Ça veut dire qu il est le (Laisse l enfant compléter.) M : Plus près de la maison. I : Oui, il est le plus près. C est le (Laisse l enfant compléter.) M : Plus près de la maison. I : Oui, c est aussi le (Laisse l enfant compléter.) M : Premier. I : Le bleu c est le premier, le rose c est le (Laisse l enfant compléter.) M : Dernier. I : C est le rose qui est en dernier? M : Oui. I : Tu penses? 117

134 18M: 19I: 20M: 31I: 32M: 33I: 34M: 35I: 36M: 37I: 38M: 39I: 40M: 41I: 42M: 43I: 44M: M : Oui. I : L escargot orange, il est à quelle position? C est quoi son numéro le orange? M : Deux. I : C est le deux le orange, montre-moi? M : (Pointe le jaune.) I : Est-ce que c est lui le orange? M : Non. I : C est lequel le orange? Est-ce que tu le vois? M : Oui. (Pointe le vert et ensuite le orange.) I : Ah! Et il est à quelle position? Le bleu c est le un, ensuite? M : (Pointe le rose.) I : Lui c est quoi? M : Le deux. I : Le deux! Et le orange? M : Le trois. I : Il est à quelle position? M : Troisième. [ ] Avec un léger soutien de l adulte, Marianne identifie correctement l escargot qui occupe la première position [lignes 9 à 12]. Précédemment, elle avait identifié l escargot jaune comme celui qui occupait la première position [lignes 1-2]. Cette réponse de l enfant nous amène à poser l hypothèse que Marianne a été influencée par le fait que la maison, qui représente ici la ligne d arrivée de la course, a été posée à la droite de la table et non à la gauche. De ce fait, comme l enfant est habituée à dénombrer les objets de gauche à droite, elle identifie alors le dernier escargot comme étant le premier. De plus, lorsque l intervenante demande à l enfant quelle position est occupée par l escargot orange [ligne 19], Marianne répond qu il se trouve en deuxième [ligne 20]. Pour se justifier, elle pointe l escargot jaune [lignes 31-32]. À ce moment, l intervenante a identifié ce geste comme une réponse, mais peut-être qu il s agissait plutôt du début de réflexion sur la position de l escargot orange (pour trouver cette position inconnue, elle devait forcément commencer la série avec la première position qui était occupée, selon son hypothèse de départ, par l escargot jaune). L intervenante, qui n avait alors pas compris la démarche possible de l enfant, lui apporte son soutien pour qu elle puisse répondre à la question. Une fois la première position identifiée correctement, elle énonce que le rose occupe la dernière position [lignes 13 à 18]. Cette réponse concorde avec les évaluations d octobre 2011 et de mai 2012, où Marianne confondait la deuxième position avec la dernière. Pour elle, le terme «dernier» est associé immédiatement et de manière proximale au terme «premier». On peut voir également qu avec le soutien de l adulte, Marianne parvient à identifier la 118

135 deuxième et la troisième position. L extrait 40 présente les autres questionnements autour des positions des participants à la course. Extrait 40 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: [ ] Dis-moi, quel escargot est devant l escargot orange? Qui est devant lui dans la course aux escargots? (Pointe le bleu.) Oui, c est vrai qu il est devant lui. Est-ce qu il y en a un autre qui est aussi devant lui? (Pointe le vert.) Est-ce qu il est devant lui? [ ] Qui est devant l escargot orange? Qui est juste juste devant lui? (Pointe le rose.) Oui, bravo! Qui est juste derrière l escargot orange? (Pointe le rouge.) Bravo ma belle! Si l escargot orange est le troisième, l escargot rose est à quelle position lui? (Pointe le rose.) S il est devant l escargot numéro trois? Ça veut dire que c est le numéro (Laisse l enfant compléter.) Quatre. Si l escargot orange est le troisième, celui qui est devant lui, c est lequel? (Pointe le rouge.) [ ] Marianne parvient à identifier les escargots qui occupent les positions «devant» et «derrière» un autre escargot [lignes 1 à 6; 7-8]. D abord, elle indique à l intervenante que l escargot bleu se trouve devant le orange [lignes 1-2], ce qui demeure vrai; il n est seulement pas l escargot qui se trouve proximalement devant le orange. Avec un soutien de la part de l intervenante, elle identifie qu il s agit de l escargot rose [lignes 3 à 6]. En ce qui concerne la position «derrière», comme Marianne éprouvait de la facilité lors des évaluations précédentes à identifier le participant d une série qui se trouvait «après» un autre, elle identifie correctement et sans soutien l escargot rouge comme étant derrière le orange [lignes 7-8]. On voit également qu elle parvient à opérer sur cette série. Lorsque l intervenante lui demande d identifier la position de l escargot qui se trouve devant le troisième, ce qui nécessite de réaliser une soustraction sur une position, elle répond en effectuant plutôt une addition [lignes 11-12], donc elle opère «plus 1». C est donc dire que l opération effectuée par Marianne l amène à une mauvaise réponse. Toutefois, cette réponse nous montre qu elle opère sur la série. Le nœud réside ici sur un paradoxe concernant la construction du nombre : pour être «plus» en avant dans une série, je dois faire «moins 1» et non pas «plus 1». Par la suite, lorsque l intervenante la questionne pour savoir qui se trouve devant l escargot orange, elle identifie le rouge [lignes 13-14], qui 119

136 se trouve en réalité «après», et ce, sans doute, en raison de la quatrième position qu elle venait d identifier pour répondre à cette même question. Lors de cet item, une série d escargots faisant une course est présentée à l enfant. L intervenante la questionne alors sur la position des participants. Marianne est en mesure d identifier les participants se trouvant «devant» et «derrière» un autre. Avec un soutien de la part de l adulte, elle parvient à identifier plusieurs positions, comme la première, la deuxième et la troisième, ce qui constitue une avancée. Par contre, sans soutien de la part de l adulte, il subsiste toujours une confusion entre la deuxième position et la dernière. De plus, bien que cela mène à une réponse inadéquate, elle démontre qu elle opère sur la série. Ceci représente une avancée Items vérifiant la compréhension de l aspect cardinal du nombre La présente section expose les analyses concernant la capacité de l enfant à comparer des collections d objets, à établir la conservation (de quantités continues ou discontinues), à procéder au comptage et à considérer l aspect cardinal d une quantité dénombrée Item 1 : Comparaison de collections d objets identiques (correspondance terme à terme) L intervenante place deux collections de jetons sur la table devant l enfant. D un côté, il y a huit jetons bleus et de l autre sept jetons rouges. L intervenante questionne l enfant afin de savoir s il y a un côté qui comporte plus de jetons que l autre ou non et comment cette dernière peut le savoir. Cet item a pour but de vérifier comment va procéder Marianne pour comparer les deux collections : en recourant à la correspondance terme à terme ou en comptant les jetons. La figure 33 illustre les deux collections de jetons. Figure 33 : Comparaison de collections inégales d objets identiques présentées à l enfant en février

137 Extrait 41 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: 19I: 20M: [ ] Je suis toute mêlée, tu m as dit trois choses différentes. Tu m as dit que c était égal, qu il y en avait plus ici [7 rouges] et qu il y en avait plus ici [8 bleus]. Comment on fait pour le savoir? Hein? Comment on pourrait faire pour le savoir pour vrai où est-ce qu il y en a plus? Qu est-ce qu on pourrait faire tu penses? (Ne répond pas.) Comment on fait pour savoir il y en a plus où, où est-ce qu il y en a plus? Est-ce que tu aurais un truc? Oui. Ce serait quoi ton truc? Il y en a plus ici. (Pointe les 8 bleus.) Il y en a plus ici? Comment tu fais pour le savoir? J suis bonne. [ ] (Compte tous les jetons rouges.) 7. 7! Et ici [les bleus], combien on en a? Tu vas les compter, vas-y. (Compte les jetons en faisant deux méprises un oubli et un recomptage du même jeton. Elle arrive donc au bon résultat.) 8. Les rouges, tu m as dit 7 et ici tu m as dit 8. Est-ce qu il y a un endroit où i en a plus ou c est pareil? Est-ce qu il y a une des deux couleurs où on en a le plus ou c est pareil? C est pareil. Ici [rouges], on en a 7 et ici [bleus] on en a 8. Est-ce qu il y en avait un qui avait plus ou c est pareil? C est plus. C est où qu il y en a plus? (Pointe les bleus.) Là. C est là qui en a plus? Oui. [ ] Dans le cadre de cette tâche, Marianne n utilise pas d emblée la correspondance terme à terme pour comparer les deux collections. Elle ne procède pas non plus d emblée au comptage. Après avoir donné tous les choix de réponses possibles [repris par l adulte à la ligne 1], elle identifie les jetons bleus comme étant plus nombreux [ligne 8]. Sous l insistance de l adulte qui demande des explications, elle effectue un comptage des jetons [lignes 10; 12], mais ce comptage ne mène pas à la conception de la cardinalité des collections dénombrées puisque ce comptage amène Marianne à affirmer que «c est pareil». Ce faisant, Marianne ne se sert pas des résultats de son comptage pour établir la comparaison. Il semblerait donc qu elle n ait pas encore construit le principe cardinal inhérent au comptage mature. De plus, pour répondre aux questions de l intervenante, elle utilise l effet de récence [ligne 1] et quand l intervenante demande la façon dont elle peut identifier la collection la plus nombreuse, Marianne n arrive pas à répondre [lignes 2 à 6]. 121

138 Malgré cela, elle identifie à plusieurs reprises que la collection de jetons bleus comporte le plus de jetons [lignes 8; 16 à 20]. Par la suite, l intervenante modifie les collections qui sont présentes sur la table. Elle retire l ensemble des jetons sous les yeux de l enfant et dispose deux nouvelles collections de six jetons chacune, en poursuivant le même but, c est-à-dire de vérifier comment allait procéder l enfant pour comparer les deux collections. Figure 34: Comparaison de collections égales d objets identiques présentées à l enfant en février 2013 Extrait 42 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: 19I: 20M: 21I: 22M: 23I: 24M: 25I: 26M: 27I: [ ] (Change les deux collections de jetons. D un côté, il y a 6 jetons rouges et de l autre il y a 6 jetons bleus.) Maintenant, je les ai changés et on va refaire la même chose. Est-ce que tu penses qu il y en a plus ici [6 rouges], plus ici [6 bleus] ou c est pareil? (Ne répond pas.) Je les ai changés, c est plus pareil. Comment on va faire pour savoir il y en a combien? [ ] Est-ce qu il y en a plus ici [rouges], ici [bleus] ou c est pareil? C est pareil. Est-ce que c est pareil, il y en a plus ici [bleus] ou ici [rouges]? Ici. (Pointe les rouges.) Et est-ce qu il y en a plus ici [rouges], c est pareil ou il y en a plus ici [bleus]? Plus ici [bleus]. O.K. Comment on peut le vérifier? On peut compter. Vas-y. (Compte les bleus.) 6. Il y a 6 bleus. Et des rouges, on en a combien? (Compte les rouges.) 6. On en a combien? 6. Et des bleus, on en a combien? 6. Est-ce qu il y a un des deux qui en a plus? Oui. Lequel? 6. C est lequel qui a 6? (Pointe les bleus.) Et l autre [les rouges], il y a combien? 6. Est-ce qu il y en a un qui en a plus? 122

139 28M: 29I: 30M: 31I: 32M: 33I: 34M: 35I: 36M: 37I: 38M: 39I: 40M: 41I: 42M: 43I: 44M: Oui. Lequel? (Pointe les rouges.) Lui. Les rouges? Oui. O.K. [ ] Les bleus il y en avait combien tu m as dit? (Recompte les bleus.) 6. Il y en a 6! Et les rouges, on en a combien? (Compte les rouges.) 6. Qu est-ce que ça veut dire ça? Qu on a gagné. Oui, on a gagné. T as bien raison. Mais est-ce qu il y en a un des deux qui en a plus? Oui. Lequel? (Pointe les rouges.) Lui. Est-ce que c est égal? Non. [ ] Marianne identifie correctement le cardinal des deux collections en utilisant correctement le comptage [lignes 12; 14]. Pendant l échange avec l intervenante, l enfant ne ressent pas le besoin de recompter le nombre de jetons pour pouvoir énoncer leur quantité [lignes 16; 18; 22; 26]. Malgré le fait qu elle sache pertinemment que les deux collections comportent six jetons, elle identifie toujours l une des deux collections comme étant la plus nombreuse [lignes 24; 30; 42] et elle affirme que les deux collections sont inégales [lignes 43-44]. Cette conversation avec Marianne dans l extrait 42 pourrait laisser le lecteur sceptique en ce qu il peut soulever son incertitude à savoir si l enfant comprend réellement les termes utilisés («pareil» et «égal»). C est pourquoi la même situation a été refaite avec un nombre plus petit et mieux construit chez Marianne. L extrait 43 qui suit permet de faire l hypothèse forte que Marianne comprend bien les termes utilisés, c est donc réellement la conception du nombre qui est en jeu. Figure 35 : Comparaison de collections égales réduites d objets identiques présentées à l enfant en février

140 Extrait 43 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: [ ] Regarde sur la table maintenant. On va faire la même chose. Ici [les 3 bleus], tu en as combien? (Compte les jetons.) 3. Et tu as combien de rouges? (Compte les jetons.) 3. Est-ce qu il y en a un des deux qui en a plus? Oui Lequel? (Pointe sur la table entre les deux collections.) Lui pis lui. Les deux? Oui. Ça veut dire qu elles sont (Laisse l enfant compléter.) Égales! [ ] Quand les collections sont réduites à trois jetons de chaque côté, Marianne est en mesure de bien les dénombrer [lignes 2; 4] et d affirmer que les deux collections comportent le plus de jetons [ligne 8 à 10] et, donc, qu elles sont égales [lignes 11-12]. Lors de cet item, il était demandé à Marianne de comparer deux collections de jetons pour identifier laquelle est la plus nombreuse, donc qui contient le plus grand cardinal. Marianne dénombre correctement les jetons en utilisant la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l élément dénombré, mais ces outils ne sont pas encore utilisés comme des opérations permettant la comparaison. Le comptage effectué par Marianne ne tient pas non plus lieu de cardinal de chacune des collections. Malgré cela, elle parvient à identifier à quelques reprises correctement la collection comportant plus de jetons, sans toutefois être en mesure de l expliquer. Quand deux collections au même cardinal lui sont présentées, elle dénombre correctement les éléments, sans toutefois concevoir les deux quantités comme équivalentes lorsque celles-ci sont supérieures à 5. Quand les quantités sont inférieures à 5, elle est en mesure d énoncer leur égalité Item 2 : Comparaison de collections d objets différents (correspondance terme à terme) L intervenante place sur la table une rangée de trois images de pomme et une de quatre images de framboise. Elle demande alors à l enfant d identifier quelle rangée est la plus nombreuse. Cet item sert à vérifier si l enfant est en mesure de comparer des collections d objets différents et comment elle procède pour le faire : en se fiant à l aspect figural de la 124

141 collection ou en établissant une opération comme la correspondance terme à terme ou le comptage. Figure 36: Comparaison de collections d objets différents en février 2013 Extrait 44 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: [ ] Est-ce qu il y en a plus ici [framboises], plus ici [pommes] ou c est pareil? C est pareil. Montre-moi que c est pareil. Anne-Sophie va me dire «Comment ça c est pareil? Moi, je trouve que c est pas pareil». Comment tu vas lui expliquer à Anne-Sophie que c est pareil? (Pointe une pomme.) Ça? Qu est-ce que tu vas lui dire? Tu dois parler pour expliquer. (Pointe une pomme et une framboise.) Ça et ça, O.K. (Pointe deux framboises pour une pomme.) O.K., est-ce que c est pareil? Non. Non, c est pas pareil. Montre-moi où i en a plus. (Pointe les pommes.) [ ] Marianne ne compte pas directement l ensemble des éléments de chaque rangée. Au départ, elle dit à l intervenante que les deux rangées sont pareilles, en utilisant l effet de récence [lignes 1-2]. Ensuite, elle tente une explication en utilisant la correspondance terme à terme entre les deux rangées [lignes 4 à 6; 8]. Elle indique le fait que deux framboises correspondent à la même pomme [lignes 8 à 10], sans être en mesure de l expliquer oralement. Malgré cela, quand l intervenante lui demande où il y en a plus, elle répond que ce sont les pommes [ligne 12]. Il y a toutefois ici une légère avancée. En effet, c est la première fois que Marianne, malgré l aspect figural, utilise spontanément une comparaison terme à terme pour comparer. À l une des correspondances entre les deux rangées, elle pointe deux framboises pour une pomme en parvenant à dire que ce n est pas pareil. Il y a quand même une avancée à comparer chaque correspondance établie comme sousensemble dans la comparaison, et ce, de manière juxtaposée. Elle ne parvient toutefois pas 125

142 à coordonner ces comparaisons de deux couples et d un trio pour établir la collection la plus nombreuse là où il y a deux framboises pour une pomme. Lors de cet item, il est demandé à Marianne de comparer deux collections inégales d objets non identiques pour identifier celle qui est la plus nombreuse. D abord, Marianne répond en utilisant l effet de récence. Puis, lorsque l intervenante lui demande pourquoi, elle tente spontanément une explication basée sur la correspondance terme à terme. En effet, elle pointe une pomme pour une framboise, puis une pomme pour deux framboises. Elle parvient à indiquer à l intervenante que ce n est pas pareil. Ceci représente un avancement par rapport à mai Malgré cela, elle répond qu il y a plus de pommes, en se basant sur l aspect figural des deux collections. Elle parvient à juxtaposer des correspondances exactes entre les deux collections, sans toutefois les coordonner en un tout dans le but de les comparer Item 3 : Conservation de quantités continues L intervenante présente deux boules de pâte à modeler de même taille à l enfant en lui demandant si l une des deux boules contient plus de pâte. Lorsque l enfant a établi l égalité, l intervenante prend une des deux parts et la transforme à trois reprises sous les yeux de l enfant, soit en rouleau, en galette puis en miettes. À chaque fois, elle questionne l enfant pour savoir si l une des deux parts contient plus de pâte à modeler. Cet item a pour but de vérifier si l enfant comprend la conservation de quantités continues et si elle est capable de faire abstraction des transformations effectuées par l adulte par des arguments d identité, de réversibilité ou de compensation qui feraient de la conservation une réelle opération. Figure 17 : Première transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 45 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: [ ] Est-ce qu il y en a plus ici [boule], ici [rouleau] ou c est pareil? (Pointe le rouleau.) C est pareil. C est pareil. Est-ce que c est pareil, il y en a plus ici [rouleau] ou ici [boule]? Ici. (Pointe la boule.) Est-ce qu il y en a plus ici [boule], ici [rouleau] ou c est pareil? C est pareil. 126

143 7I : 8M : 9I: 10M: Est-ce que c est pareil, ou il y en a plus ici [boule] ou ici [rouleau]? (Elle pointe vaguement entre les deux.) Quelle couleur tu m as dit qu il y en avait plus? Pareil. [ ] À la suite de la première transformation de pâte à modeler, Marianne semble démontrer légèrement un début de conservation. Bien qu elle réponde quelque fois avec l effet de récence [lignes 2; 4; 6], quand l intervenante lui demande la couleur où il y a le plus de pâte à modeler, celle-ci répond que c est pareil [ligne 10]. On note toutefois une grande fragilité, comme c était le cas lors des évaluations précédentes. L intervenante prend le rouleau rouge et le transforme en boule de même grosseur que celle de référence. Puis, elle reprend la boule rouge et la transforme en galette devant les yeux de l enfant. Figure 18 : Deuxième transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 46 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : [ ]Est-ce qu il y a un endroit où i en a plus? Ici [jaune], ici [rouge] ou c est pareil? C est pareil. Est-ce que c est pareil ou il y en a plus ici [galette rouge] ou ici [boule jaune]? Il y en a plus ici. (Ne pointe pas.) Lequel des deux? (Ne répond pas.) [ ] Ici. (Pointe la boule jaune.) Ici, O.K.! Est-ce qu il y en a plus ici [boule jaune], c est pareil ou il y en a plus ici [galette rouge]? Ici. (Pointe la galette rouge.) [ ] Lors de cette seconde transformation, Marianne répond aux questions de l intervenante par l effet de récence [lignes 1-2; 3 à 6; 7-8], ce qui témoigne que, pour elle, la transformation de l apparence peut modifier la quantité en soi, ou du moins, la conservation n est pas une évidence construite qui stabilise ses réponses aux questions, peu importe l ordre des choix donnés par l adulte. 127

144 L intervenante prend la galette rouge et la transforme en boule de même grosseur que celle de référence. Puis, elle reprend la boule rouge et la transforme en miettes devant les yeux de l enfant. Figure 19 : Troisième transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 47 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: [ ] Si on fait ça. (Prend la boule rouge et l émiette.) Est-ce que c est pareil ou il y en a plus ici [miettes rouges] ou ici [boule jaune]? Ici [miettes rouges]. Ici [miettes rouges], ici [boule jaune] ou c est pareil? C est pareil. (Pointe les miettes rouges.) Est-ce qu il y a un endroit où il y en a plus? Oui. Où? Quelle couleur? Rouge. Rouge! Est-ce que c est pareil? Oui. C est pareil aussi? C est pareil, il y en a plus ici [miettes rouges] ou ici [boule jaune]? Ici. (En pointant vaguement vers la table.) Ah, je peux pas deviner lequel tu montres. C est lequel ça? (Pointe les miettes rouges.) Les rouges, il y en a plus? Oui. [ ] Si, lors de la transformation de la boule en rouleau, Marianne semblait faire preuve d un début de conservation en énonçant que la boule et le rouleau étaient pareils alors que l intervenante lui demandait où il y en avait le plus, induisant ainsi qu il était acceptable de penser qu il y en avait plus à un endroit [extrait 45, lignes 9-10], elle témoigne tout de même d une absence de conservation lors de la transformation de la boule de pâte à modeler en galette et en miettes. Elle répond systématiquement que les miettes rouges sont plus nombreuses. Même lorsque, par effet de récence, elle répète la formulation «c est pareil» énoncée précédemment par l adulte, elle pointe les miettes rouges [ligne 4]. Son raisonnement repose ainsi sur l aspect figural pour répondre, notamment avec la dernière transformation où la boule est transformée en miettes. Ces dernières (de couleur rouge) 128

145 prenant plus d espace sur la table peuvent donner l impression d une plus grande quantité de pâte à modeler que dans la boule de référence (de couleur jaune). Lors de cet item, l intervenante propose deux parts égales de pâte à modeler à l enfant. Par la suite, elle réalise trois transformations avec l une des deux parts devant ses yeux : une fois en rouleau, une fois en galette et une fois en miettes. Chaque fois, l enfant doit se prononcer à savoir s il y avait plus de pâte à modeler à un endroit ou si c était pareil. Comme lors des évaluations précédentes, Marianne ne démontre pas clairement une construction de la conservation des quantités continues. Il y a toutefois émergence de la conservation lors de la première transformation, bien que celle-ci soit fragile. Si, lors de la transformation en rouleau, à la suite de plusieurs réponses témoignant de l effet de récence, elle énonce que les deux parts sont égales, ses réponses lors des deux autres transformations se basent principalement sur l aspect figural et sur l effet de récence Item 4 : Conservation de quantités discontinues D abord, une rangée de 5 images de pomme est faite par l intervenante. L enfant, pour sa part, doit construire une rangée équivalente avec des images de framboise. Cet item vise à vérifier la capacité de l enfant à établir une conservation des quantités à la suite d une transformation de l aspect figural de l une des deux collections. Figure 37 : Rangée d images présentée à l enfant en février 2013 Figure 38 : Construction d une rangée équivalente en février

146 Extrait 48 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: [ ] (Place une rangée de 5 pommes sur la table.) Ça c est mes pommes à moi. Tu vas me donner des framboises comme moi, pareil. (Place 9 framboises collées les unes aux autres et ne les compte pas pour vérifier. Elle établit l équivalence par les limites perceptives.) T as fini, c est pareil? Oui. Bravo, t es bonne! I a combien de pommes? 1, 2, 3, 4, 5. Bravo! Et il y a combien de framboises? 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Bravo! Est-ce que c est pareil? Oui. Est-ce que il y en a plus ici [pommes], ici [framboises] ou c est pareil? C est pareil. [ ] Avant de construire sa rangée, Marianne ne semble pas vérifier le nombre d images de pomme posées par l adulte en comptant à voix haute. On peut poser l hypothèse qu elle l ait fait mentalement, sans ressentir le besoin de l oraliser en raison du faible nombre d éléments à dénombrer. Cette hypothèse est vite infirmée : la rangée réalisée nous indique qu elle n a pas recouru au comptage pour construire sa rangée. En effet, Marianne pose neuf images de framboise comme équivalence à la rangée de cinq pommes [ligne 2]. Lorsque l intervenante lui demande combien il y a de fruits, elle recourt correctement au comptage et à la correspondance terme à terme entre le mot nombre énoncé et l élément dénombré [lignes 5 à 8]. Toutefois, ce nombre ne tient pas lieu de cardinal de la collection ni d un outil de comparaison pour Marianne qui énonce à deux reprises que les deux rangées sont pareilles [lignes 9 à 12]. Dans un second temps, l intervenante prend les cinq images de pomme et les déplace sur la table, de manière à ce que cette rangée soit étirée par rapport à son apparence initiale. Cette rangée dépasse alors la rangée de neuf framboises de chaque côté Étant donné que Marianne avait établi une égalité entre ces deux collections, une conservation établie oblige à considérer le maintien de l égalité comme une réponse validant la conservation. Ce sont les pommes qui ont été étendues, car elles constituent la collection la moins nombreuse. En effet, sachant que Marianne raisonne sur une base figurale, l allongement de la rangée devrait être celle identifiée comme plus nombreuse, ce qui permettra de rejeter la conservation des quantités discontinues. Toutefois, si ce sont les framboises qui sont allongées et que l enfant affirme qu il y en a plus, on ne pourra plus rejeter la 130

147 Figure 39 : Modification des rangées en conservation de quantités discontinues en février 2013 Extrait 49 1I : 2M : 3I : 4M : [ ] Regarde bien! (Prend les pommes et les distance pour que cette ligne dépasse celle de framboises). Là, est-ce qu il y a plus de pommes, plus de framboises ou c est pareil? C est pareil. Est-ce que c est pareil ou il y a plus de pommes ou de framboises? Il y a plus de pommes. [ ] À la suite de la modification, Marianne ne parvient pas à répondre correctement aux questions de l intervenante. Elle répond en utilisant l effet de récence [ligne 2] ou en se fiant à l aspect figural de la collection [ligne 4], ce qui laisse croire que Marianne n aurait pas encore construit la conservation des quantités discontinues comme une opération, car elle ne recourt pas à des arguments d identité ou de réversibilité. Lorsque sa collection est dressée, elle affirme tout de même que les deux collections (la sienne et celle de référence) sont égales. À ce moment, elle démontre une absence de conservation de quantités discontinues, car elle n arrive pas à maintenir la quantité sans avoir recourt à un recomptage. conservation des quantités discontinues, car on garderait le doute à savoir si l enfant reconsidère sa réponse et auquel cas, de surcroit, l amènerait à une bonne réponse, et ce, même si elle emprunte un raisonnement basé sur l aspect figural. 131

148 Lors de cet item, une rangée de cinq images de pomme est présentée à Marianne. Cette dernière doit construire une rangée d images de framboise équivalente. Marianne, se fiant à l aspect figural de la rangée de pommes, ne réussit pas la tâche. Elle pose neuf images de framboise pour cinq images de pomme et affirme que les deux rangées sont pareilles. Par la suite, lorsque l adulte modifie l apparence de la rangée de pommes, Marianne modifie sa réponse en affirmant qu il y a plus de pommes lorsque ces dernières sont très distancées les unes des autres, alors qu en réalité, il y en a moins Item 5 : Comptage Sans utiliser de matériel, l intervenante demande à l enfant de compter le plus loin possible. Cette demande a pour but de vérifier l étendue de la chaîne numérique de l enfant. Extrait 50 1M : 2I : 3M : 4I : 5M: 6I : 7M : 8I : 9M : 10I : 11M : [ ] 1,, 21, 23, 24,, 30, 31, 32, 33, [ ], 32, 33, 34,, 40! Wow! Es-tu capable de compter encore? Non. On arrête à 40? Sais-tu qu est-ce qui vient après? 40, 41, B en oui, t as raison 42, 43, 44, 45, 46, 45, 46, 47, 48, 49, 50! Woo, es-tu capable de continuer après 50 aussi? Oui. Montre-moi voir. 50, 51, 52, 53, 54, 55. (Elle s arrête.) [ ] Marianne compte jusqu à 55 en faisant une omission (elle oublie le 22) et en disant un nombre deux fois, parce qu elle s était mise à parler d autre chose [lignes 1; 5; 7; 11]. Sa chaîne a donc sensiblement la même étendue que lors des évaluations précédentes, où elle comptait jusqu à 49, sans erreur [extraits 10; 29]. Ensuite, l intervenante lui demande de compter en tenant compte d une borne supérieure fixée à

149 Extrait 51 1I : 2M : 3I : 4M : [ ] Et maintenant, es-tu capable de compter jusqu à 20? (Ne répond pas.) Es-tu capable d arrêter à 20? Oui! (Compte jusqu à 28 rapidement sans arrêt.) Wow, tu vas loin! Mais es-tu capable d arrêter à 20? Oui! 29, 30, [ ] Comme la borne fixée à 20 était trop élevée, l intervenante l a réduite à 15. Extrait 52 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M : [ ] Non, on commence au début et tu vas arrêter à 15. Es-tu capable? À 20. À 20, tu penses? Tu vas être capable d arrêter à 20? Oui. Montre-moi. (Compte jusqu à 23.) À combien on arrête? À 3. À 3? Vas-y. 1, 2, 3. Bravo, tu es une championne! Es-tu capable d arrêter à 12? (Compte jusqu à 12.) [ ] Marianne ne parvient pas à compter en tenant compte d une borne fixée à 20. À chaque fois [extraits 51 et 52], elle compte rapidement et ne s arrête pas à la borne [ligne 6]. Elle est toutefois en mesure de s arrêter à 12 [ligne 12]. Le nombre 20 doit donc se retrouver à l extérieur de son domaine numérique opérable. De plus, comme il s agit d un nombre élevé, il est possible que Marianne, trop emportée par son comptage, perde l objectif de vue et ne parvienne pas à s arrêter à ce nombre. Ensuite, l intervenante demande à Marianne de compter en considérant, à la fois, une borne inférieure fixée à 4 30 et une borne supérieure fixée à 9. Cette demande a pour but de vérifier si la chaîne numérique de Marianne est sécable ou non. 30 Lors de cette évaluation, il n a pas été demandé à l enfant de compter en tenant compte seulement d une borne inférieure, en raison de sa réussite lors de la deuxième évaluation (où elle parvenait à compter seule 133

150 Extrait 53 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : [ ] Es-tu capable de compter en commençant à 4 et en arrêtant à 9? Ça, c est difficile! Oui. Vas-y. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Championne! Es-tu capable de commencer à 4? Oui. Tu comptes à partir de 4 et on monte. Es-tu capable? Oui. Vas-y. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. [ ] Marianne n est pas en mesure de compter en tenant compte des deux bornes à la fois, même si cette tâche avait été réussie avec soutien lors de l évaluation précédente. Lors de chaque comptage, elle débute par 1 au lieu de considérer la borne inférieure fixée par l adulte [lignes 4; 10]. Comme la chaîne numérique de Marianne avait été considérée comme sécable en mai 2012, cette non-réussite pourrait être expliquée potentiellement par le niveau d implication et de concentration de l enfant dans la tâche. Finalement, il lui a été demandé de compter à rebours à partir de 9. Ceci permet de vérifier si la chaîne numérique de l enfant est dénombrable. Extrait 54 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M: 13I : 14M: 15I : 16M: [ ] On va commencer à 9 et on va se rendre à 1. Vas-y. 1. On commence avec 9 et on descend jusqu à 1, on recule. Comme 3, qu est-ce qui vient avant? 1. 3, ! On va faire la même chose en commençant à 9. 9 (Laisse l enfant compléter.) 3. Qu est-ce qui vient avant 9? 10. Avant? (Ne répond pas.) 9 huuuuuuu (Laisse l enfant compléter.) 8. à partir de 9). Toutefois, cette habileté sera vérifiée lors de la mise en commun des bornes inférieure et supérieure présentée ici. 134

151 17I : 18M: 19I : 20M : 21I : 22M : 23I : 24M : Qu est-ce qui vient avant? 7. Avant? Avant? 8. [ ] Même avec un soutien de la part de l intervenante, Marianne n a pas été en mesure de compter à rebours à partir de 9 [lignes 15 à 24]. Toutefois, elle réussit l exemple en comptant à rebours à partir de 3 avec l intervenante [lignes 3 à 8], cela indique qu elle avait bien compris la consigne. Lors de cet item, on cherche à vérifier la construction de la chaîne numérique de l enfant. Marianne arrive à compter seule sans erreur jusqu'à 55 et à tenir compte d une borne supérieure fixée à 12. Par contre, elle ne parvient pas à compter en tenant compte d une borne inférieure et d une borne supérieure. Comme les évaluations précédentes le démontrent, Marianne a plus de facilité à considérer une borne supérieure qu une borne inférieure, alors, elle n est pas en mesure de considérer de façon concomitante les deux bornes pour guider son comptage, ignorant la borne inférieure qui était fixée par l adulte. De plus, elle ne parvient pas à compter à rebours à partir de 9, même avec un soutien de la part de l adulte. Cela peut laisser croire que le nombre 9 se situe hors de son domaine numérique opérable, c est-à-dire qu il n est pas encore dénombrable pour elle Item 6 : Cardinalité La compréhension de la cardinalité chez l enfant a été vérifiée, entre autres choses, à l aide de deux tâches distinctes. Lors de la première tâche, l intervenante dresse une collection de onze bâtonnets devant l enfant. Cette dernière doit identifier le nombre de bâtonnets présents sur la table. Figure 40 : Présentation d une rangée de bâtonnets à l enfant 135

152 Extrait 55 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M : [ ] (Place 11 bâtonnets en une rangée sur la table devant Marianne.) Es-tu capable de les compter? Oui. Vas-y. (Compte jusqu à 11.) T en a 11? Oui. [ ] Marianne est en mesure de bien utiliser le comptage et la correspondance terme à terme entre le mot nombre énoncé et l élément dénombré pour déterminer le nombre de bâtonnets [ligne 4]. Devant les yeux de l enfant, l intervenante prend tous les bâtonnets dans ses mains et les dépose de façon pêle-mêle sur la table. Figure 41 : Modification de la rangée de bâtonnets Extrait 56 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M : [ ] (Déplace les 11 bâtonnets et les place pêle-mêle sur la table.) Et maintenant, on en a combien? (Compte les bâtonnets en en oubliant un.) (Pointe celui qui reste.) 11. Là, on en a combien? 11. [ ] À la suite du premier déplacement effectué par l intervenante, Marianne recompte les bâtonnets pour répondre à la question, en faisant une méprise [ligne 2]. Cette conversation avec Marianne permet de mettre en relief que cela ne lui posait pas problème d affirmer qu il y avait dix bâtonnets [ligne 2] alors qu elle venait d en compter onze avant le déplacement de ces derniers. En soi, cela montre comment le dénombrement de Marianne ne prend pas le sens de la cardinalité de la collection dénombrée. Il n y a pas réelle construction de la cardinalité ou du principe cardinal. Avec un soutien de l adulte, elle arrive au bon compte [lignes 3-4]. 136

153 Devant les yeux de l enfant, l intervenante prend tous les bâtonnets dans ses mains et les dépose en une rangée sur la table, comme ils étaient positionnés au départ. Elle demande d abord à l enfant combien il y en a et ensuite, combien il y en a si on commence par la fin (donc en comptant de droite à gauche, plutôt que de gauche à droite). Figure 40 : Présentation d une rangée de bâtonnets à l enfant Extrait 57 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M : 7I : 8M : 9I : 10M: 11I : 12M: 13I : 14M: 15I : 16M: 17I : 18M: 19I : [ ] (Refait une rangée avec les 11 bâtonnets.)si je les mets comme ça, on en a combien? (Compte les bâtonnets.) , t as bien raison. Mais, j ai une question. Si on commence par ici [l autre bout], on va en avoir combien? 1. 1, mais si on s en va par là [vers la gauche de Marianne], on va en avoir combien? 2. (Ne regarde pas les bâtonnets et fixe l intervenante.) 2, ensuite? On va en avoir combien en tout? 3. (Ne regarde pas les bâtonnets et fixe l intervenante.) Juste 3? Oui. [ ] Tu penses qu on en a juste 3? Si on compte comme ça? (Pointe de gauche à droite.) Est-ce que tu es capable de compter à l envers? Oui Vas-y, on va commencer ici et on va aller par là. Combien on va en avoir? 2. Il y en a juste 2? [ ] Est-ce que tu peux compter à partir de là? Oui. Parce que d habitude, on compte comme ça [de gauche à droite]. Mais si on compte comme ça [droite à gauche], on va en avoir combien? 2. O.K., vas-y. (Pointe les bâtonnets avec son doigt.)[ ] Marianne est dans l obligation de recompter les bâtonnets chaque fois qu une modification est apportée à leur disposition [extraits 56; 57]. Le nombre n est pas maintenu si on commence à compter à un autre endroit [lignes 3 à 9; 17 à 19]. À ce moment, elle démontre une absence de conservation de quantités discontinues, car elle n arrive pas à maintenir la quantité de la collection à laquelle rien n a été ajouté ou retiré. De plus, on voit que Marianne n a pas construit le principe de la non-pertinence de l ordre. Compter la collection à partir d un autre endroit, pour Marianne, contribue à changer la quantité. 137

154 Lors de la deuxième tâche, cinq images de dames sont déposées sur la table devant Marianne. Cette dernière est invitée à aller au magasin pour chercher une robe, des chaussures et trois bracelets pour chacune des dames. Pour ce faire, elle doit choisir ce qu elle veut parmi 15 paires de chaussures, 15 robes et 25 bracelets présents au magasin. Lors de cette épreuve, l intervenante veut vérifier quelle stratégie Marianne utilise pour déterminer les morceaux dont les dames ont besoin pour aller au bal. Cette épreuve, créant une contrainte, engendre la nécessité d avoir recours au dénombrement pour résoudre la situation en empêchant la correspondance terme à terme dans l action immédiate. Figure 42 : Cinq dames à habiller Extrait 58 1I : 2H : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M: [ ] Elles ont froid et ce soir, il y a un bal. Elles doivent aller au bal et s habiller comme des princesses. Pour aller au bal, on a besoin d une robe, des souliers et des bijoux. On doit aller chercher une robe, des souliers et 3 bracelets pour les madames. Pour chacune des madames. Oui. Moi je vais être au magasin et il va falloir que tu viennes chercher des morceaux pour habiller les madames, mais le magasin ferme bientôt. (Se dirige tout de suite au magasin.) Bonjour madame! Bienvenue au magasin de princesses. De combien de morceaux avez-vous besoin aujourd hui? 2. 2 quoi? Robes. Vous avez besoin de 2 robes? Vous pouvez les choisir. Avez-vous besoin d autre chose? Nous avons des robes, des souliers et des bracelets. [ ] (Prend ses 2 robes, 1 bracelet et 1 soulier.) Vous avez 2 robes, 1 bracelet et 1 soulier, c est suffisant? Oui. [ ] Au lieu de compter les morceaux dont elle a besoin, Marianne se dirige tout de suite au magasin et prend quelques articles [lignes 4 à 10]. De retour à la table, même s il lui manque des morceaux, elle ne compte pas les dames, ni les morceaux supplémentaires qu elle doit aller chercher. Elle ne recourt pas au comptage pour connaître le nombre de 138

155 dames pour déterminer le nombre de robes nécessaires, pas plus que les pieds pour les chaussures. Plus tard, un questionnement semblable est réalisé autour de la recherche du bon nombre de souliers. Extrait 59 1H : 2I: 3M : 4I : 5M : 6I : 7H : 8M : 9H : 10M : 11H : 12M : 13H : 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : 19I : 20M : [ ] Marianne, maintenant tu dois aller au marchand de chaussures. Vite, il va fermer sa boutique. Va chercher des chaussures pour toutes les madames. Oui, bonjour je suis le marchand de chaussures. De combien de chaussures avez-vous besoin? (Se dirige au magasin.) 2. Voilà, avez-vous besoin d autres chaussures? Non. D accord, aurevoir. Mais là, Marianne j ai un problème. Est-ce que toutes tes princesses sont prêtes pour aller au bal? Estce qu elles ont des chaussures? Non. Va demander au chaussurier des chaussures pour toutes les madames. Combien de chaussures tu vas lui demander? 2. Ça va être assez pour toutes les madames? Oui. Regarde bien si tu as assez de chaussures pour habiller toutes les filles si tu en achètes 2? Oui. Bonjour, mon magasin est fermé. Combien de chaussures avez-vous besoin? 2. Est-ce que c est suffisant? Oui. Combien de dames avez-vous à habiller? C est tout, bye! [ ] Même avec un soutien important de la part des intervenantes, Marianne ne recourt pas au comptage pour déterminer le nombre de morceaux nécessaires à la réalisation de la tâche. Elle ne semble pas comprendre que le comptage peut être utilisé pour connaître le cardinal d une collection, et donc qu elle saurait tout de suite combien de robes et d accessoires dont elle a besoin. Elle procède plutôt par essai-erreur en allant chercher 1 ou 2 morceaux à la fois [lignes 3; 10]. Lorsque l adulte la questionne pour savoir si deux chaussures seront suffisantes pour toutes les filles, elle répond par l affirmative [lignes 13-14]. Elle sait donc que deux chaussures sont nécessaires, mais elle ne dénombre pas les pieds des filles à habiller [lignes 15 à 20]. 139

156 Cet item a été réalisé en deux parties distinctes. Lors de la première tâche, l intervenante dresse une rangée de onze bâtonnets de bois devant l enfant. Marianne doit la dénombrer, ce qu elle réussit. L intervenante modifie l apparence de la collection, et ce, à deux reprises : en déposant les bâtonnets pêle-mêle et en les replaçant en ligne droite. À la suite de chaque modification, l enfant ne parvient pas à identifier le cardinal de la collection sans devoir recompter les éléments à chaque fois. De surcroît, faisant une méprise dans son second dénombrement, Marianne n a pas de problème à arriver à un autre nombre que celui énoncé précédemment pour la même collection. De plus, lorsque l intervenante lui demande de commencer son comptage à un nouvel endroit, elle n est pas en mesure d énoncer qu il y aurait toujours onze bâtonnets, préférant les recompter. Bien plus, elle maintient que la quantité est de trois en commençant d un nouvel endroit. Cela témoigne que Marianne n a toujours pas construit la conservation des quantités discontinues. Du coup, ni le principe cardinal, ni la non-pertinence de l ordre n apparaissent dans les raisonnements de Marianne. Lors de la deuxième tâche, l intervenante présente un ensemble de cinq dames à l enfant. Cette dernière doit aller au magasin chercher des vêtements pour que les dames puissent aller au bal. Pour ce faire, Marianne doit dénombrer les éléments à aller chercher avant de se rendre au magasin, ce qu elle n est pas en mesure de faire. Même avec un soutien de la part de l adulte, Marianne ne recourt pas au comptage pour identifier le nombre de dames à habiller, et donc le nombre de robes à aller chercher. Elle procède par tâtonnements, allant chercher un ou deux morceaux à la fois Synthèse de la compréhension de l enfant en février 2013 Pour la compréhension de l aspect ordinal du nombre, Marianne se situe environ au même niveau que lors de l évaluation de mai Elle est en mesure d identifier ses erreurs au sein d une série et de considérer un point d origine commun pour tous les éléments, mais elle ne parvient pas à déployer la série en ordre de grandeur au-delà de trois éléments. Dans une série établie, elle identifie correctement les participants qui se trouvent «devant» et «derrière» un autre et elle arrive, avec un soutien de l adulte, à identifier correctement les participants qui occupent la première, la deuxième et la troisième position. À ce moment, elle se situerait au premier stade du développement de l aspect ordinal selon Piaget. La comptine numérique est toujours élaborée, bien que le nombre supérieur à 6 ne soit pas bien construit. En effet, 6 peut être plus grand que 6 pour Marianne [extrait 42] et 9 140

157 demeure toujours non dénombrable puisque Marianne ne parvient pas à établir de décompte à rebours à partir de ce nombre [extrait 54]. L aspect cardinal du nombre n est pas encore construit chez Marianne, du moins pas au-delà de 3 [extrait 43]. Bien que la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l élément dénombré soit juste, celle-ci n est pas encore utilisée comme une opération permettant de comparer des collections entre elles. La chaîne numérique de Marianne est sécable, comme c était déjà le cas en mai Le comptage n est toujours pas utilisé comme une opération permettant de comparer des collections. Elle a moins besoin de recompter une collection déjà dénombrée à plusieurs reprises, sans toutefois être en mesure d utiliser ce cardinal comme outil de comparaison. L item l invitant à aller chercher des objets pour habiller des dames est assez éloquent à cet égard [extraits 58; 59]. Dans les tâches de conservation, on peut voir une émergence de la conservation en ce qui concerne les quantités continues. Lors de la transformation de la boule en rouleau, Marianne énonce que les deux parts de pâte sont pareilles. Par contre, dès la seconde transformation, elle répond en utilisant principalement des éléments de l aspect figural. Marianne se situerait donc au premier stade de développement de la conservation selon Piaget. À ce moment d évaluation passée en février 2013, la correspondance terme à terme, la conservation et le comptage ne sont pas encore construits comme des opérations, ce qui montre l absence de la conceptualisation de la cardinalité bien que Marianne parvienne à dénombrer adéquatement des collections diverses Évaluation 4 : Juillet 2013 Lors de la dernière évaluation, qui a été réalisée en juillet 2013, les tâches proposées à l enfant étaient les mêmes que celles de l évaluation de février

158 Items vérifiant la compréhension de l aspect ordinal du nombre La présente section expose, d une part, les analyses concernant la capacité de l enfant à sérier en ordre de grandeur cinq cartons différents et, d autre part, sa capacité à considérer les diverses positions d objets d une série Item 1 : Sériation d objets de tailles différentes L intervenante donne cinq cartons de tailles différentes à l enfant. Elle lui demande alors de les placer du plus petit au plus grand. Cet item a pour but de vérifier la sériation effectuée par l enfant en portant toujours l attention sur la réalisation de la tâche en soi, plutôt que sur la sériation produite. Figure 43 : Sériation de cartons réalisée en juillet 2013 ( ) Extrait 60 1I : 2M: (Dispose cinq cartons de différentes longueurs sur la table, devant l enfant.) Tu te souviens? Je t avais donné des petits cartons comme ça et je t avais demandé de les placer en commençant du plus petit jusqu au plus grand. Est-ce que t es encore capable de le faire? (Rigole.) Oui. (Déplace le 5 complètement à droite et prend le 1. Prend le 4 et le place à la gauche du 5.Place le 2 à la gauche du 1 et prend le carton 3 et le place à la gauche du 4. L ordre à ce moment est : ) 3I : 4M : 5I : 6M : 7I: 8M : O.K. Comme ça, est-ce qu ils sont du plus petit au plus grand? Non. Est-ce que tu commences avec le plus petit sur la table? Non. Ah ben! (Pointe le carton 2.) Ça veut dire que lui c est pas le plus petit? Non. (Le retire de la série et le place plus haut sur la table.) 142

159 9I : 10M : 11I : 12M : C est lequel le plus petit? (Prend le carton 1 dans ses mains.) OK. [À ce moment, il n y a que le carton 2 qui n est pas encore placé.] (Pointe le carton 2.) Lui, il va où? (Le place devant le 1.) Ici. 13I: 14M : 15I : 16M : 17I : 18M : (Pointe le 1.) Est-ce qu il est plus petit que celui-là? Non. (Le place entre le 1 et le 3. À ce moment, l ordre est ) Est-ce qu ils sont placés du plus petit au plus grand? (Ne regarde pas la table.) Non. Regarde la table. Est-ce qu ils sont placés du plus petit au plus grand? Oui, comme ça. [ ] Contrairement aux fois précédentes, Marianne ne place plus les cartons de gauche à droite en ordre chronologique de ses prises. Elle donne à chaque carton qu elle place un ordre relatif, et ce, non seulement en considérant les deux cartons, mais en créant une relation approximative avec ceux qui demeurent à sérier. En effet, la ligne 2 de l extrait 60 montre qu elle prend en premier le plus grand carton et elle le déplace complètement à droite. Ce déplacement à l extrême droite permet d inférer que Marianne considère le carton 5 en fonction de ceux qui restent. Ensuite, de manière dichotomique, elle sélectionne le plus petit carton qu elle place à gauche, ce qui suppose une comparaison avec le carton 5. Dans ce qui reste Marianne prendra toujours le plus grand, le carton 4, puis le plus petit, le carton 2, comme s il y a un début d organisation de la sériation basée sur la dichotomie plus grand/plus petit dans la construction des couples de cartons. Puis, elle vient placer d abord le carton 4 à gauche du carton 5, établi comme le plus grand. Son erreur réside strictement sur l idée de toujours placer à gauche, même lorsqu elle série les plus petits, ceci l amène à placer le carton 2 à gauche du 1. De retour dans ce qui reste, elle prend le carton 3, le plus grand qui reste, et le met à gauche du 4, «le dernier plus grand placé». Cette organisation relativement bien structurée présente un avancement certain puisqu elle prend la forme d une opération. D autant plus que, en analysant sa série avec l adulte, Marianne parvient à corriger sa série adéquatement. Il n est pas étonnant de voir que Marianne sort de la série le carton 2 mal placé [ligne 8]. Ainsi, Marianne reprend ce qui reste, le carton 2, et tente de le remettre dans la série. Mais voilà qu elle n a plus de points de repère par rapport au dernier 143

160 placement, le carton 3. Avec un léger soutien de l adulte [ligne 13], Marianne parvient à finir adéquatement la série [ligne 14]. Ainsi, seule, elle parvient à sérier quatre éléments en ordre, en respectant une ligne d origine commune [lignes 2 à 8]. En outre, sa procédure de dichotomiser le plus grand du plus petit lui permet de considérer d une façon coordonnée les deux extrémités de tous les éléments à sérier de façon simultanée, et ce, par l établissement d une comparaison par couple. Lors de cet item, l intervenante présente un ensemble de cinq cartons à l enfant qui doit les sérier. Elle prend les cartons dans l ensemble présenté en prenant le plus grand, puis le plus petit. Elle les place ensuite aux extrémités, pour poursuivre avec le plus grand et le plus petit de ceux qui restent qu elle place à la gauche du dernier élément placé. Elle parvient à réaliser une réelle opération d ensemble lors du choix des éléments à placer. Elle est en mesure de considérer, à la fois, la ligne d origine commune et la longueur des cartons pour les sérier correctement, ce qui constitue une révolution cognitive Item 2 : Sériation d objets faisant une course L intervenante présente un ensemble d escargots en bois à l enfant, prétextant qu ils font une course pour retourner le plus rapidement possible à la maison. L intervenante questionne l enfant à propos de la position des escargots au sein de la course. Cette mise en situation cherche à vérifier si l enfant démontre une certaine compréhension de l aspect ordinal pouvant exister dans une série, en référant aux positions des coureurs et en utilisant des notions perceptives. La figure 44 illustre l alignement des escargots faisant la course. 144

161 Figure 44 : Alignement des coureurs en juillet Extrait 61 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: [ ] Regarde, ils font la course. La maison est la ligne d arrivée. C est quoi la position de l escargot bleu? M : Arrivée. I : Il est le (Laisse l enfant compléter.) M : Premier. I : Premier. Le jaune? M : Dernier. I : Le jaune, c est le dernier? Le orange? M : Le troisième. I : Le troisième. Le rose? M : Le quatrième. I : Le quatrième. Le rouge? M : Le cinquième. I : Le cinquième. Et le vert? M : Le sixième. I : Le sixième. C est lequel le deuxième? M : (Pointe le rose.) I : Le rose, c est le deuxième? M : Oui. [ ] Au début de l échange, Marianne identifie correctement le premier [lignes 1 à 4], le troisième [lignes 7-8], le quatrième [lignes 9-10], le cinquième [lignes 11-12] et le sixième [lignes 13-14]. Par contre, il y a une confusion entre le deuxième et le dernier [lignes 5-6; 15-16]. Tout comme lors des évaluations précédentes, lorsqu elle énonce les positions, elle dit «premier» et elle enchaîne avec «dernier» au lieu de «deuxième». Toutefois, on peut souligner une extension des rangs chez Marianne. En effet, lors des évaluations précédentes, elle ne se rendait pas plus loin que le troisième [extrait 39]. L extrait Le changement d orientation de la série par rapport à l évaluation de février 2013 a pu influencer les réponses de l enfant. Cela a pu, en quelque sorte, soutenir l enfant par rapport à l évaluation de février 2013 puisque, en cours d année, pendant les interventions, Marianne dénombrait généralement les éléments de gauche à droite. 145

162 présente le questionnement et le soutien apporté par l intervenante à propos de ces deux positions. Extrait 62 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: 19I: 20M: 21I: 22M: 23I: 24M: 25I: 26M: 27I: 28M: 29I: 30M: [ ] C est lequel qui est en premier dans la course en ce moment? Le bleu. Le bleu! Tu as bien raison! Qui est derrière lui? Le jaune. Le jaune. Ça veut dire qu il est le (Laisse l enfant compléter.) Premier. Est-ce qu il a quelqu un devant lui, le jaune? Non. Le bleu, tu m as dit que c était le premier. Le jaune, c est le (Laisse l enfant compléter.) Dernier. Est-ce qu il a des gens derrière lui? (Ne regarde pas.) Non. Derrière lui, est-ce qu il y a des gens? Oui. Est-ce qu il peut être le dernier, s il a des gens derrière lui? Non. Non. (Pointe le bleu.) Lui, c est le premier. (Pointe le jaune.) Lui? Premier Dernier! Après le premier, c est le (Laisse l enfant compléter.) Troisième. O.K. On va les compter, d accord? (Pointe le bleu.) Le premier, c est le un. Ensuite? (Pointe le jaune.) Premier. Après le un, c est le (Laisse l enfant compléter.) Deux. Si c est le deux, il est (Laisse l enfant compléter.) Le deuxième. Le deuxième, t as bien raison. Le bleu, c est le premier. Le jaune, c est le (Laisse l enfant compléter.) Dernier. Le d (Laisse l enfant compléter.) Deuxième. [ ] On peut constater que, même avec un grand soutien de la part de l adulte, la confusion entre «deuxième» et «dernier» persiste chez Marianne. Elle est en mesure d identifier correctement la première position et celle-ci est associée de façon proximale à la dernière 146

163 position [lignes 9-10; 17-18; 27-28]. 32 De plus, tel que démontré dans l extrait 63, Marianne parvient à opérer sur la série. Extrait 63 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: I : [ ] Qui est devant l escargot rose? M : L escargot orange. I : L escargot orange. Il est à quelle position l escargot orange si le rose est le quatrième? M : (Ne répond pas.) I : L escargot orange, c est lequel? M : (Pointe le orange.) I : Si le rose, c est le quatrième, le orange, c est le (Laisse l enfant compléter.) M : (Ne répond pas.) I : Il est devant lui, c est le (Laisse l enfant compléter.) M : (Ne répond pas.) I : Si le rose est quatrième et que l escargot orange est devant lui. Avant le quatrième, c est le (Laisse l enfant compléter.) M : (Chuchote.) Le septième. I : Avant le quatrième, c est le (Laisse l enfant compléter.) M : Troisième. I : Troisième. Bravo! Si le rose est quatrième, qui est derrière lui? M : Le r... orange.[ ] Marianne est en mesure d identifie la couleur de l escargot se trouvant devant un autre [lignes 1-2]. Par contre, elle ne parvient pas seule à identifier sa position. Toutefois, avec le soutien de l adulte qui lui indique la position de l escargot qui se trouve derrière lui [lignes 5 à 10; 11], elle y arrive [ligne 15]. C est également ici une avancée. On voit d abord l hésitation de Marianne à répondre à la question de l adulte à savoir la position de l escargot orange devant le rose qui, lui, est quatrième [lignes 3 à 8]. Quand l adulte lui précise que l escargot orange est «devant», l enfant hésite encore [ligne 10], puis chuchote sa réponse en augmentant le rang à 7, comme si l enfant pensait : «si je suis plus en avant, je dois faire «plus» dans la comptine». Toutefois, si l on pense que le chuchotement de 32 Comme c était le cas lors des trois évaluations précédentes, deux hypothèses se posent. Premièrement, on peut poser l hypothèse que cette confusion relève d une difficulté liée au langage. Toutefois, comme elle parvient à identifier correctement plusieurs autres positions [extrait 61], cette hypothèse peut être rapidement rejetée, car, langagièrement, il n est pas plus difficile d arriver à «deuxième» à partir de «deux» que d arriver à «troisième» à partir de «trois». La seconde hypothèse serait plutôt d ordre conceptuel. Marianne associe de façon proximale «premier» et «dernier». C est sa conception de ce qu est le «dernier» qui doit prendre une maturité pour approcher de la convention imposée par ce langage mathématique. C est cette hypothèse qui sera conservée dans ce mémoire. 147

164 Marianne pouvait être un signe de son incertitude et de sa réflexion, on voit, sous l insistance de l adulte [ligne 13] qui énonce strictement de nouveau sa question avec la même formulation [ligne 11], que Marianne parvient à opérer adéquatement «moins 1» sur la série [ligne 14]. 33 Lors de cet item, l intervenante présente une série d escargots faisant une course à l enfant. Elle la questionne alors sur la position des participants. Marianne parvient à nommer les rangs jusqu à la 6 e position, bien qu une confusion persiste toujours pour la 2 e position qu elle identifie «dernier» de manière proximale au «premier». Elle est en mesure d identifier correctement qui se trouve «derrière» ou «devant» un autre participant. Elle parvient également à opérer sur la série, ce qui constitue un avancement cognitif important Items vérifiant la compréhension de l aspect cardinal du nombre La présente section expose les analyses concernant la capacité de l enfant à comparer des collections d objets, à établir la conservation (de quantités continues ou discontinues), à procéder au comptage et à considérer l aspect cardinal d une quantité dénombrée Item 1 : Comparaison de collections d objets identiques (correspondance terme à terme) L intervenante place deux collections de jetons sur la table devant l enfant. D un côté, il y a huit jetons bleus et de l autre sept jetons rouges. L intervenante questionne l enfant afin de savoir s il y a un côté qui comporte plus de jetons que l autre ou non et comment cette dernière peut le savoir. Cet item a pour but de vérifier comment va procéder Marianne pour comparer les deux collections : en recourant à la correspondance terme à terme ou en comptant les jetons. La figure 45 illustre la comparaison de deux collections de jetons. 33 Pour le lecteur sceptique qui soulèverait l hypothèse que Marianne aurait pu, pendant l échange verbal, identifier la troisième position en comptant «dans sa tête» à partir de la première position, il convient de préciser que l opération 4 e 1 = 3 e a été absolument nécessaire puisque, pendant cet échange verbal, Marianne regardait l intervenante et non pas la série d escargots. 148

165 Figure 45 : Comparaison de collections inégales d objets identiques présentées à l enfant en juillet 2013 Extrait 64 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: 19I : 20M: 21I : 22M: [ ] Tu vois, i en a des rouges et i en a des bleus. Est-ce que tu pourrais me dire où est-ce qu i en a plus? M : (Pointe les rouges.) Ici. I : Tu penses qu i en a plus ici? M : Non. I : Non? Tu penses qu i en a plus où? M : (Pointe les bleus.) Ici. I : Ici? [ ] Où est-ce qu i en a plus Marianne? M : (Pointe les rouges.) I : Où? M : (Pointe les rouges.) I : Quelle couleur? M : Rouges. I : Rouges. Comment on peut faire pour le savoir? M : (Rigole.) I : Comment on peut faire pour le savoir où est-ce qu i en a plus? M : (Pointe les bleus en riant.) I : Tu peux dire la couleur. Où est-ce qu i en a plus? M : (Pointe les bleus en riant.) I : C est quelle couleur? M : (Rigole doucement.) Bleus. I : Bleus? Comment on peut faire pour le savoir? M : (Ne répond pas.) [ ] D abord, l intervenante questionne Marianne de façon ouverte pour vérifier comment elle procède pour identifier quelle collection comporte plus de jetons. Elle ne recourt pas au comptage ni à la correspondance terme à terme pour répondre à l intervenante. Elle répond parfois que les rouges sont plus nombreux [lignes 2; 8; 10 à 12] et parfois que les bleus sont plus nombreux [lignes 6; 16 à 22]. Au bout d un moment, comme l enfant n établit pas de relation oralement ou manuellement entre les deux collections, l intervenante indique à l enfant qu un de leurs amis leur avait 149

166 déjà donné un truc pour savoir où il y avait plus d éléments, ce qui amènera l enfant à compter les jetons. Extrait 65 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: [ ] Comment tu fais pour le savoir? Est-ce qu on peut utiliser un truc? Non. Que Simon nous a donné? Non. Non? Oui. Oui. C est quoi le truc que Simon nous a donné? (Pointe les rouges.) Lui. Mais c est quoi le truc pour savoir? Est-ce qu on sait combien il y en a des jetons? Oui. Combien? (Compte les rouges.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. Ah! I a 7 rouges. Et des bleus, il y en a combien? (Compte les bleus.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8. Où est-ce qu i en a plus? (Pointe les bleus.) Ici. [ ] L extrait 65 démontre que Marianne ne recourt pas d emblée à la correspondance terme à terme ni au comptage pour résoudre la tâche proposée par l intervenante. Par contre, lorsque l adulte lui demande si elle sait «combien» il y a de jetons, Marianne comprend que, pour ce faire, elle doit les dénombrer [lignes 9 à 14]. Par la suite, l adulte questionne l enfant pour savoir laquelle des deux collections comporte le plus de jetons. Extrait 66 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: [ ]Les rouges, i en a combien? (Pointe les rouges.) Ici. I en a combien? (Compte les rouges.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. P is des bleus, i en a combien? (Compte les bleus et en oublie un.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. 7 et (Pointe celui qui manque.) 8. Où est-ce qu i en a plus? Dans 8. Dans 8. Où est-ce qu i en a moins? Dans 7. Dans 7. Est-ce que c est égal? Non. Est-ce que i en a plus ici [bleus], ici [rouges] ou c est pareil? C est pareil. 150

167 17I : 18M: 19I : 20M: 21I : 22M: 23I : 24M: 25I : 26M: 27I : 28M: 29I : 30M: 31I : 32M: 7 et 8, c est pareil? Non. Est-ce que c est pareil, i en a plus ici [bleus] ou plus ici [rouges]? (Pointe les rouges.) Ici. (Pointe les rouges.) Ici, i en avait combien? 7. (Pointe les bleus.) Et ici, i en avait combien? 8. (Pointe les rouges.) Est-ce qu ici, i en a plus? Non. Non. Où est-ce qu il y en a plus? Dans 7. Dans 7 i en a plus que dans 8? Non, i en a moins. I en a moins que dans 8. Donc, où est-ce qu il y en a plus? Quelle couleur? (Pointe les bleus.) Bleus. [ ] Une fois les jetons bien comptés, elle répond aux questions par le dernier élément dit par l adulte, en utilisant l effet de récence [lignes 15-16; 19-20]. Par contre, quand l adulte ne lui formule pas de choix de réponses, elle arrive à identifier que 8 est plus grand que 7 [lignes 9 à 12; 21 à 26; 29 à 32], ce qui constitue une avancée par rapport aux trois premières évaluations où Marianne ne parvenait pas à mettre les cardinaux de deux collections en relation [extraits 4; 22; 41], mais cette avancée demeure très fragile comme il sera possible de le noter dans l extrait 67 qui suit. Par la suite, l intervenante modifie les collections qui sont présentes sur la table, elle retire l ensemble des jetons sous les yeux de l enfant et dispose deux nouvelles collections de six jetons chacune, en poursuivant le même but, c est-à-dire de vérifier comment allait procéder l enfant pour comparer les deux collections. Figure 46 : Comparaison de collections égales d objets identiques présentées à l enfant en juillet

168 Extrait 67 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I : 18M: 19I : 20M: 21I : 22M: 23I : 24M: [ ]Tu m as dit : ici [rouges], i en a 6 et ici [bleus], i en a 6. Est-ce qu il y a un côté qui en a plus? Non. Non? Oui. Oui? Lequel? Le bleu. Le bleu? I en a combien le bleu? (Compte les bleus.) 1, 2, 3, 4, 5, 6. 6, wow bravo! Et les rouges, i en a combien? (Compte les rouges.) 1, 2, 3, 4, 5, 6. Les bleus, i en a 6 et les rouges, i en a 6. Où est-ce qu i en a plus? Oui. Où est-ce qu i en a plus? (Pointe les rouges.) Ici. Les rouges? Tantôt c étaient les bleus, maintenant ce sont les rouges. C est lequel qui en a plus? Estce qu i en a un qui en a plus? Non. Non. Qu est-ce que ça veut dire si i en a pas un qui en a plus? (Pointe les bleus.) C est les rouges. Tu me dis les rouges et tu me montres les bleus. J pense que t es dans les PATATES! (Rigole.) [ ] (Pointe les rouges.) Ici, tu m as dit les rouges i en a 6. Et les bleus, tu m as dit i en a 6. Est-ce qu i a un côté qui en a plus? Oui. Oui? Lequel? (Pointe les bleus.)[ ] Quand deux collections comportant le même nombre de jetons lui sont proposées, Marianne ne parvient pas à établir l égalité quand elles comportent 6 jetons. Elle est en mesure de bien dénombrer chacune des collections [lignes 8; 10], mais ce dénombrement ne tient pas lieu de cardinal de collection pouvait être utilisé comme outil de comparaison. Elle énonce parfois qu il y a plus de bleus [lignes 6; 24] et parfois qu il y a plus de rouges [lignes 14; 18]. Jamais Marianne ne soulève l hypothèse d égalité. Ceci n est pourtant pas lié au langage, mais représente bel et bien un nœud d ordre conceptuel puisque, pour faciliter la comparaison à partir d un nombre plus petit, la même tâche est reprise en réduisant les collections à quatre jetons de chaque côté. Très clairement et de manière stable, Marianne postule l égalité. Extrait 68 1M : 2I : 3M : 4I: [ ] (Compte les rouges.) 1, 2, 3, 4. Et des bleus, i en a (Laisse l enfant compléter.) (Ne compte pas les bleus.) 4. Qu est-ce que ça veut dire? Les rouges i en a 4 et les bleus i en a 4? 152

169 5M: 6I : 7M : 8I: 9M: 10I: 11M: 12I: 13M: 14I: 15M: (Compte les bleus.) 1, 2, 3, 4. Les rouges i en a 4 et les bleus i en a 4. Est-ce qu il y a un côté où i en a plus? Non. Ça veut dire qu ils sont (Laisse l enfant compléter.) Égal. Égal. Est-ce que les bleus i en a plus? Oui Non! Est-ce que les rouges i en a plus? Non. Ils sont (Laisse l enfant compléter.) Égal! [ ] Quand les collections sont réduites à quatre jetons de chaque côté, Marianne est en mesure non seulement de les dénombrer correctement [lignes 1; 5], mais elle parvient également à reconnaître l'aspect cardinal du nombre 4. Elle ressent le besoin de compter les jetons dès le départ pour énoncer qu'il y a quatre jetons rouges [ligne 1]. Lors de cet item, l intervenante demande à Marianne de comparer deux collections de jetons pour identifier laquelle est la plus nombreuse, donc qui contient le plus grand cardinal. Marianne dénombre correctement les jetons en utilisant correctement la correspondance terme à terme entre le mot nombre énoncé et l'élément dénombré. Par contre, même si elle est en mesure d'affirmer à quelques reprises que 7 8, lorsque l'intervenante la questionne à propos des collections de jetons, elle ne réussit pas à affirmer que la collection de huit jetons bleus est plus nombreuse que celle de sept jetons rouges. Quand deux collections de même cardinal lui sont présentées, elle réussit à les dénombrer correctement, mais elle n'est pas en mesure d'établir leur égalité lorsque leur cardinal est 6. Par contre, elle y arrive lorsque leur cardinal est Item 2 : Comparaison de collections d objets différents (correspondance terme à terme) L intervenante place sur la table une rangée de trois images de pomme et une de quatre images de framboise. Elle demande alors à l enfant d identifier quelle rangée est la plus nombreuse. Cet item sert à vérifier si l enfant est en mesure de comparer des collections d objets différents et comment elle procède pour le faire : en se fiant à l aspect figural de la collection ou en établissant une opération comme la correspondance terme à terme ou le comptage. 153

170 Figure 47 : Comparaison de collections d objets différents en juillet 2013 Extrait 69 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: 19I: 20M: 21I: 22M: 23I: 24M: [ ] Tu te souviens, avec les jetons. Quand on avait des jetons bleus et des jetons rouges, J te demandais : «Où est-ce qu il y en a plus?» et tu m as trouvé un truc. C était quoi notre truc pour savoir combien i en avait? Les framboises. Tu penses que c est les framboises qu i a plus? C est vrai? Oui. O.K. Comment on fait pour le savoir? I en a combien des framboises? Est-ce qu on le sait? Où est-ce qu il y en a plus? [...] I' a combien de framboises? (Compte les framboises.) 1, 2, 3, Et i a combien de pommes? (Compte les pommes.) 1, 2, Où est-ce qu il y en a plus? (Ne regarde pas et met sa main au-dessus des deux rangées.) Ici. C est où ici? (Fait un rond au-dessus des deux rangées.) Là. Tout ensemble? Non! Non. Où est-ce qu il y en a plus? [ ] I a combien de pommes? (Compte les pommes.) 1, 2, 3. Et des framboises? (Compte les framboises.) 1, 2, 3, 4. Où est-ce qu il y en a plus? (Passe sa main au-dessus des fruits.) Ici. Est-ce que c est pareil 3 et 4? Non. Lequel qui en a plus? Les framboises ou les pommes? Les framboises. [ ] Marianne n'utilise pas d'emblée le comptage comme outil de comparaison entre les deux collections et elle identifie tout de suite qu'il y a plus de framboises [lignes 1 à 4]. Lorsque l'intervenante lui demande «Combien?», elle exécute un comptage [lignes 5-6]. Elle parvient à différencier les deux cardinaux en jeu, soit 3 et 4, pour énoncer qu'il y a plus de framboises, sans recourir à l'effet de récence [lignes 21 à 24]. De plus, Marianne ne se laisse pas influencer par l'aspect figural des deux collections : en effet, elle répond qu'il y a plus de framboises, même si la rangée de pommes, qui contient trois éléments, est plus longue. Ceci représente une belle avancée pour Marianne. 154

171 Lors de cet item, l intervenante demande à Marianne de comparer deux collections inégales d objets non identiques pour identifier celle qui est la plus nombreuse. Marianne est en mesure d'identifier qu'il y a plus de framboises avant même de recourir au comptage et même si l'aspect figural peut indiquer le contraire. Elle semble laisser de côté cet indice figural qu'elle utilisait systématiquement pour déterminer la collection qui contenait le plus grand cardinal. Maintenant, elle parvient à comparer des collections de 3 et 4 éléments et à affirmer qu'il y a plus de framboises. Le fait que Marianne délaisse l'aspect figural pour utiliser des outils plus mathématiques représente une belle avancée. De plus, ici, les nombres 3 et 4 ont vraiment un sens cardinal qui permet à Marianne de les comparer Item 3 : Conservation de quantités continues L intervenante présente deux boules de pâte à modeler de même taille à l enfant en lui demandant si l une des deux boules contient plus de pâte. Lorsque l enfant a établi l égalité, l intervenante prend une des deux parts et la transforme à trois reprises sous les yeux de l enfant, soit en rouleau, en galette puis en miettes. À chaque fois, elle questionne l enfant pour savoir si l une des deux parts contient plus de pâte à modeler. Cet item a pour but de vérifier si l enfant comprend la conservation de quantités continues et si elle est capable de faire abstraction des transformations effectuées par l adulte par des arguments d identité, de réversibilité ou de compensation qui feraient de la conservation une réelle opération. Figure 17 : Première transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 70 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: [ ] Si je prends la boule et que je fais un rouleau comme ça avec. (La boule rouge est alors transformée en rouleau.) Où est-ce qu i en a plus? (Pointe la boule jaune et le rouleau rouge.) Ici, ici. Ça veut dire qu ils sont (Laisse l enfant compléter.) Pareils. Sont pareils? Sont différents. Sont pareils ou sont différents? Différents. Où est-ce qu i a le plus de pâte à modeler? Est-ce qu i en a un qui a plus de pâte à modeler? Non. 155

172 11I: 12M: Ça veut dire qu i sont (Laisse l enfant compléter.) Pareilles. [ ] À la suite de la première transformation, Marianne postule l égalité, ce qui fait foi de la construction de la conservation. En effet, au départ, elle indique à l'intervenante que la boule jaune et le rouleau rouge contiennent plus de pâte [lignes 1-2], cette formulation peut vouloir dire qu'elle considère les deux parts de pâte à modeler comme équivalentes, ce qu'elle confirme en énonçant qu'elles sont pareilles en complétant les propos de l'adulte [lignes 4; 11-12]. Toutefois, on peut constater qu'il semble exister encore un léger doute chez elle quand elle énonce qu'ils sont «différents» [lignes 6; 8] lorsque l'intervenante lui demande s'ils sont pareils, en reprenant ses propos [ligne 5]. Malgré cela, la conservation semble construite plus solidement que lors de l'évaluation de février 2013, car l hésitation de l enfant ne perdure pas. L intervenante prend le rouleau rouge et le transforme en boule de même grosseur que celle de référence. Puis, elle reprend la boule rouge et la transforme en galette devant les yeux de l enfant. Figure 18 : Deuxième transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 71 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: [ ] (Pointe la jaune.) Celle-là, on la laisse comme ça. Si je prends la rouge et que je fais ça. (L écrase pour faire une galette.) Est-ce qu i a un endroit où i a plus de pâte? Oui. Où? (Pointe la galette rouge.) Ici. Est-ce qu il y en a plus ici [galette rouge], ici [boule jaune] ou c est pareil? C est pareil. C est pareil. Est-ce que c est pareil, i en a plus ici [boule jaune] ou ici [galette rouge]? (Pointe la galette rouge.) Ici. P is, est-ce que i en a plus ici [boule rouge], c est pareil ou i en a plus ici [boule jaune]? I en a plus ici [boule jaune]. O.K. C est lequel qui en a plus? (Met sa main par-dessus la boule jaune pour toucher la galette rouge.) Là. Les deux, est-ce qu i sont pareilles? Oui. (Pause.) Non. (Pause.) Oui. Hum? Tu m as dit toutes les réponses. Est-ce qu elles sont pareilles? 156

173 16M: 17I: 18M: 19I: 20M: 21I: 22M: B en oui. Oui? Est-ce qu il y a un endroit où i en a plus? (Prend la galette rouge et la boule jaune dans ses mains.) Oui. [ ] Est-ce qu i a un endroit entre les deux où est-ce qu i en a plus? Oui. Lequel? (Pointe la galette rouge.) Ici. [ ] Lors de cette seconde transformation, Marianne répond aux questions de l intervenante par l effet de récence dans la majorité des cas [lignes 5-6; 7-8; 9-10]. Lorsque l intervenante lui demande si les deux parts de pâte à modeler sont pareilles, elle répond par l affirmative [lignes 14; 16]. Par contre, elle affirme également qu il y en a un endroit où il y en a plus [lignes 14-18; 19-20]. Même si elle semble parfois indiquer qu elle comprend que la quantité de pâte à modeler est toujours la même malgré les transformations apportées par l adulte en pointant, à la fois, la boule et la galette [ligne 18], sa compréhension de la conservation est encore fragile. En effet, à la fin de l échange, Marianne affirme que la galette contient plus de pâte [ligne 22]. L intervenante prend la galette rouge et la transforme en boule de même grosseur que celle de référence. Puis, elle reprend la boule rouge et la transforme en miettes devant les yeux de l enfant. Figure 19 : Troisième transformation effectuée avec la pâte à modeler Extrait 72 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: [ ] Oui, regarde. Si j fais ça (Prend la boule rouge et l émiette.), où est-ce qu i en a plus? (Pointe les miettes rouges.) Ici. Ici. Est-ce qu il y en a plus ici [miettes rouges], ici [boule jaune] ou c est pareil? (Met sa main au dessus des miettes rouges.) C est pareil. C est pareil, i en a plus ici [miettes rouges] ou ici [boule jaune]? (Pointe la boule jaune.) Ici. Ici. Est-ce qu il y en a plus ici [boule jaune], c est pareil ou il y en a plus ici [miettes rouges]? (Pointe les miettes rouges.) Ici. Où est-ce qu i en a plus? Est-ce qu il y a un endroit où i en a plus? 157

174 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: 19I: 20M: 21I: 22M: 23I: 24M: 25I: 26M: Oui. C est où? À la maison. (Rit.) Mais entre la jaune et la rouge, est-ce qu il y a un endroit où i en a plus? Oui. Où? (Regarde ailleurs et ne répond pas.) Sur la table ici, est-ce qu il y a un endroit où il y en a le plus? Oui. Où? (Pointe les miettes rouges.) Ici. Ici. (Pointe la boule jaune.) Ça veut dire qu ici i en a (Laisse l enfant compléter.) Pareil. Plus. [ ] Est-ce qu il y a un endroit où i en a plus? Oui. Où? (Pointe les miettes rouges.) Ici. [ ] Le raisonnement de Marianne, lors de ces épreuves, témoigne d un début de compréhension de la conservation. Si, lors de la transformation de la boule en rouleau, Marianne parvient à établir la conservation entre les deux parts de pâte [extrait 70], ce début de conservation n est pas observable avec les autres transformations. En effet, lors des deux autres transformations, Marianne fait preuve d une absence de conservation en affirmant que la galette et les miettes contiennent plus de pâte à modeler que la boule de référence [extrait 71, ligne 22; extrait 72, ligne 26]. Dans ce dernier extrait, bien qu elle réponde en utilisant l effet de récence [lignes 1 à 8], Marianne pointe les miettes rouges, même si, par effet de récence, elle énonce que les deux parts sont pareilles [ligne 4]. Marianne semble comprendre qu elle ne peut plus seulement répondre aux questions de l adulte en reprenant le dernier élément nommé, elle doit se fier à ses propres conclusions, d où la réponse finale qu il y avait plus de pâte dans les miettes [lignes 23 à 26]. Lors de cet item, l intervenante propose deux parts égales de pâte à modeler à l enfant. Par la suite, elle réalise trois transformations avec l une des deux parts devant ses yeux : une fois en rouleau, une fois en galette et une fois en miettes. À chaque fois, l enfant doit se prononcer sur les quantités de pâte à modeler dans chaque part. Lors de la transformation de la boule en rouleau, Marianne fait preuve de conservation en énonçant que les deux parts de pâte sont pareilles. Ceci montre le début d une révolution cognitive : l émergence de la conservation des quantités continues. Par contre, lors des autres transformations, elle recourt encore à l aspect perceptif pour énoncer que la galette et les miettes contiennent plus de pâte. 158

175 Item 4 : Conservation de quantités discontinues D abord, l intervenante dresse une rangée de cinq images de pomme. L enfant, pour sa part, doit construire une rangée équivalente avec des images de framboise. Cet item vise à vérifier la capacité de l enfant à établir une conservation des quantités à la suite d une transformation de l aspect figural de l une des deux collections. Figure 48 : Rangée d images présentée à l enfant en juillet 2013 Figure 49 : Construction d une rangée équivalente en juillet 2013 Extrait 73 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: [ ] (Place 5 images de pommes en rangée sur la table.) Tu vois les pommes que j ai mises? Est-ce que tu les vois bien? Oui. Je vais te donner des framboises et le chef cuisinier veut faire une salade de fruits avec des pommes et des framboises. Là, il a demandé notre aide, parce qu il dit Marianne et Isabelle se sont des championnes dans ces jeux-là. Il m a dit que pour faire la salade de fruits, il a besoin d avoir le même nombre de pommes et de framboises. Est-ce que tu es capable de lui donner le même nombre de framboises que son nombre de pommes? Oui. Vas-y. Le chef cuisinier a besoin de toutes ces pommes-là et il a besoin de la même chose de framboises. Est-ce que t es capable de lui donner? (Prend une pomme dans ses mains.) Tu dois mettre le même nombre de framboises qu il y a des pommes. (Prend les framboises une à une, les enligne avec les pommes et s arrête à 5.) Est-ce que c est pareil? Oui. Oui! Bravo! T en a mis combien des framboises? (Compte les framboises.) 1, 2, 3, 4,

176 13I: 14M: 15I: 16M: Et i a combien de pommes? (Compte les pommes.) 1, 2, 3, 4, 5. Si j ai 5 pommes et 5 framboises, qu est-ce que ça veut dire? C est pareil. [ ] Ici aussi, il est possible de souligner la révolution cognitive de Marianne. En effet, de manière concomitante au début de la conservation des quantités continues, on peut voir ici que Marianne utilise spontanément la correspondance terme à terme pour établir une collection équivalente. Elle arrive à construire une collection de framboises équivalente à celle de cinq pommes déjà placée par l intervenante en utilisant spontanément la correspondance terme à terme, sans soutien et sans que ce ne soit une suggestion de l adulte [ligne 8]. Il s agit d une avancée chez Marianne. Dans le cadre de cette tâche, la correspondance terme à terme est utilisée comme un début d opération permettant la construction d une collection équivalente à une déjà construite. Sous la demande de l adulte, elle recourt au comptage pour identifier le nombre de pommes et de framboises présentes sur la table [lignes 11-12; 13-14]. 34 Dans un second temps, l intervenante prend les cinq images de framboise et les déplace sur la table, de manière à ce que cette rangée soit étirée par rapport à son apparence initiale. Cette rangée dépasse alors la rangée équivalente de cinq pommes. Extrait 74 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: [ ] Regarde bien. Si je fais ça. (Prend la rangée de framboises et l étire pour qu elles soient très espacées et que la rangée dépasse celle des pommes.) Est-ce qu i en a un des deux qui en a plus? Oui. Lequel? (Pointe les framboises.) Lui. C est lequel? Les framboises. I a plus de framboises, c est vrai? I en a combien maintenant? (Compte les framboises.) 1, 2, 3, 4, 5. P is les pommes, i en avait combien? (Compte les pommes.) 1, 2, 3, 4, 5. Est-ce qu i en a un qui en a plus? 34 Cependant, il est vrai ici que l item a été contextualisé autour de la fabrication d une salade de fruits, ce qui a pu influencer les réponses et les productions de l enfant. Il n en demeure pas moins que l on observe ici une avancée majeure qui doit être soulignée. 160

177 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: Oui. Lequel? [ ] I a 5 pommes et 5 framboises, est-ce qu il y en a un des deux qui en a plus? Oui. Est-ce que tu peux dire lequel en a plus? Oui. [ ] C est lequel? Les framboises. [ ] Même si Marianne est en mesure de construire une rangée équivalente [extrait 73], par l intermédiaire de la correspondance terme à terme marquant un début ou une assise de l opération, l extrait 74 démontre que l opération de correspondance terme à terme n est pas construite étant donné que l enfant n imagine pas le retour possible à la correspondance qu elle a établie pour maintenir l égalité (par l argument de réversibilité). Au contraire, lorsque l apparence de l une des rangées est modifiée par l intervenante, elle répond que l une des deux rangées comporte plus d éléments que l autre, dans ce cas-ci, plus de framboises [lignes 4; 6; 18]. Cela prouve que la conservation des quantités discontinues n est toujours pas construite chez Marianne. Lors de cet item, l intervenante présente une rangée de cinq images de pomme à Marianne. Cette dernière doit construire une rangée équivalente avec des images de framboise. Marianne réussit cette tâche en utilisant spontanément la correspondance terme à terme pour construire sa rangée. Elle dispose une framboise en correspondance avec chaque pomme. Malgré cela, même si elle est en mesure de compter les deux rangées de cinq éléments, leur cardinal ne peut pas encore être utilisé comme outil de comparaison. Lorsque l apparence de l une des deux rangées est modifiée par l intervenante, Marianne semble raisonner les quantités en se basant sur l aspect figural des collections, comme elle le faisait précédemment. Cela témoigne qu elle n a pas encore construit la conservation des quantités discontinues Item 5 : Comptage Sans utiliser de matériel, l intervenante demande à l enfant de compter le plus loin possible. Cette demande a pour but de vérifier l étendue de la chaîne numérique de l enfant. 161

178 Extrait 75 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I : 8M : 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: 19I: 20M: 21I: 22M: 23I: 24M: 25I: 26M: 27I: 28M: 29I: 30M: [ ] Est-ce que tu peux compter le plus loin possible, comme si tu voulais jamais arrêter pour montrer comment t es bonne? Oui. Vas-y. Jusqu à quoi? Le plus loin possible, jusqu à temps que tu sois dans les patates. [ ] (Compte sans erreur jusqu à 48). 49, 30! Après 49, c est (Laisse l enfant compléter.) (Ne répond pas.) 48, 49, (Laisse l enfant compléter.) ! Qu est-ce qui vient ensuite? (Compte sans erreur de 50 à 58.) 59, 30. Qu est-ce qui vient après 59? ! Qu est-ce qui vient ensuite? 62. Après 60, c est (Laisse l enfant compléter.) (Ne répond pas.) 59, 60, (Laisse l enfant compléter.) 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 69. Qu est-ce qui vient après? Est-ce que tu l sais? , qu est-ce qui vient ensuite? Soixante-troi Soixante-trente. Soixante-trente Soixante-quarante. Marianne parvient à compter seule jusqu à 69, sans erreur [lignes 6; 12; 14; 20]. Ensuite, elle enchaîne avec soixante-trente et soixante-quarante [lignes 24; 30]. Il s agit d une amélioration par rapport aux évaluations précédentes où elle comptait jusqu à 55 [extrait 50]. Ensuite, l intervenante lui demande de compter en tenant compte d une borne supérieure fixée à 20. Extrait 76 1I : 2M : 3I : 4M : [ ] Maintenant, est-ce que tu peux compter jusqu à 20? Oui. Vas-y. (Compte jusqu à 20 sans erreur.) [ ] 162

179 Contrairement aux évaluations précédentes, Marianne réussit à compter jusqu à 20, sans soutien de la part de l intervenante [ligne 4]. Extrait 77 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I: 8M: 9I: 10M: 11I: 12M: [ ] Est-ce que tu peux compter en commençant à 5? Après on arrête? On commence à 5 et on continue. 1. On commence avec 5. 5, (Laisse l enfant compléter.) 6, 7, 8, 9, 10, 11. C est assez. Oui, on commençait à 5, c est bizarre hein? On dirait qu on est dans les patates! Mais t es bonne! Est-ce que t es capable de commencer avec 11? Oui. Vas-y. 1. On commence avec 11, vas-y. 11 (Laisse l enfant compléter.) 11, 12, 13, 14. [ ] Lors de cette évaluation, Marianne arrive à compter en tenant compte d une borne inférieure fixée par l adulte. Avec un léger soutien de l adulte, elle réussit à compter à partir de 5 [lignes 5-6] et à partir de 11 [lignes 11-12]. Ensuite, l intervenante a demandé à Marianne de compter en considérant, à la fois, une borne inférieure fixée à 5 et une borne supérieure fixée à 20. Cette demande a pour but de vérifier si la chaîne numérique de Marianne est sécable ou non. Extrait 78 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: [ ] Maintenant, est-ce que tu peux commencer avec 5 et on arrête à 20? Oui. D accord, on commence avec 5. 5 (Laisse l enfant compléter.) 20! Oups, 5, 20. (Rit.) (Rit et compte de 5 à 20 sans erreur.) [ ] Marianne parvient à considérer les deux bornes à la fois, sans difficulté [ligne 6]. Cela permet de constater que sa chaîne numérique est sécable sur une plus grande étendue que lors des évaluations précédentes. Finalement, il lui a été demandé de compter à rebours à partir de 9 et de 12. Ceci permet de vérifier si la chaîne numérique de l enfant est dénombrable. 163

180 Extrait 79 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M: 7I: 8M: 9I: 10M: 11I: 12M: 13I: 14M: 15I: 16M: 17I: 18M: 19I: 20M: 21I: 22M: 23I: 24M: 25I: 26M: 27I: 28M: 29I: 30M: 31I: 32M: [ ] Maintenant, on va commencer à 9. Après ça, on arrête? Jusqu à 1 et après ça, c est terminé. 9, qu est-ce qui vient avant? 1. Tout de suite? (Rit.) Non. (Rit.) , ça c est après. Bravo! Qu est-ce qui vient avant 9? 9, (Laisse l enfant compléter.) 8. (Ne répond plus). On descend jusqu à 1 et c est terminé. 9, 8. 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1. T es bonne, bravo! Est-ce que tu serais capable de commencer à 12, tu penses? Est-ce que tu penses que tu serais capable? B en oui! (Rit.) Tu penses? Ah b en, ça c est vraiment une tâche de 6 e année. Non, de 7 e année! De 7 e année même! J pense que tu as raison! Tu penses que tu serais capable? [ ] Tu penses que tu serais capable de commencer à 12? Vas-y! (Rit.) On commence avec 12 et on descend jusqu à 1. [ ] 12, qu est-ce qui vient avant? 11. (Acquiesce.) 10, 9, 8, 7. Après? Avant. 6, 5, 4, 3. (Regarde ailleurs.) Et on descend jusqu à 1. Qu est-ce qui vient avant 3? 2! 2, et (Laisse l enfant compléter.) Stop! On arrête à 2? Non, à 1. À 1. Qu est-ce qu i manque? (Ne répond pas.) Tu m as dit : 12, 11, 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, qu est-ce qu i manque? 1! [ ] Avec un soutien de la part de l intervenante, Marianne parvient à compter à rebours à partir de 9 [lignes 7 à 10] et à partir de 12 [lignes 17-18; 20; 22; 24; 31-32]. Cela indique que le petit nombre est plus solide chez Marianne que lors des évaluations précédentes. Le fait qu elle soit capable de compter à rebours à partir de 12 indique que le nombre 12 fait maintenant partie de sa chaîne numérique sécable. 164

181 Lors de cet item, on cherche à vérifier la construction de la chaîne numérique de l enfant. Marianne arrive à compter seule jusqu à 69. Elle parvient également à compter à partir d une borne inférieure fixée à 11, de compter jusqu à une borne supérieure fixée à 20, de considérer, à la fois, une borne inférieure fixée à 5 et une borne supérieure fixée à 20. De plus, contrairement à l évaluation précédente, elle est en mesure de compter à rebours à partir de 12, ce qui peut laisser croire que le nombre 12 se trouve à l intérieur de sa chaîne numérique sécable. Cette avancée dans la chaîne n est cependant pas garante de l aspect cardinal du nombre puisque au même moment, Marianne ne fait pas toujours preuve de conservation et elle énonce qu une collection dont l apparence est modifiée change de quantité (extrait 74) Item 6 : Cardinalité La compréhension de la cardinalité chez l enfant a été vérifiée, entre autres choses, à l aide de deux tâches distinctes. Lors de la première tâche, l intervenante dresse une collection de onze bâtonnets devant l enfant. Cette dernière doit identifier le nombre de bâtonnets présents sur la table. Figure 40 : Présentation d une rangée de bâtonnets à l enfant Extrait 80 1I : 2M : 3I : 4M : 5I: 6M : 7I: 8M: [ ] Ma belle Marianne, combien il y en a sur la table? Je sais pas. Comment on peut faire pour savoir combien il y en a? (Entreprend le comptage et s arrête.) 1, 2, 3. Il y en a juste 3? Non. Ah. I en a combien? [ ] T as combien de bâtonnets sur la table? (Compte les bâtonnets avec son doigt.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11. [ ] Comme c était le cas en février 2013, lorsque la rangée de bâtonnets lui est présentée, Marianne est en mesure de bien utiliser le comptage et la correspondance terme à terme 165

182 entre le mot nombre énoncé et l élément dénombré pour connaître le nombre de bâtonnets [ligne 8]. Devant les yeux de l enfant, l intervenante prend tous les bâtonnets dans ses mains et les dépose de façon pêle-mêle sur la table. Figure 41 : Première modification d une rangée de bâtonnets Extrait 81 1I : 2M : [ ] (Prend tous les bâtonnets, en fait un tas et les éparpille sur la table.) Si je fais ça, il y en a combien? (Compte les bâtonnets avec son doigt.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11. [ ] À la suite du premier déplacement effectué par l intervenante, Marianne recompte les bâtonnets pour répondre à la question [ligne 2]. À ce moment, elle ne semble pas faire preuve de conservation : même si aucun élément n a été ajouté ou retiré, elle ressent le besoin de compter les bâtonnets de nouveau. Devant les yeux de l enfant, l intervenante prend tous les bâtonnets dans ses mains et les dépose en une rangée sur la table, comme ils étaient positionnés au début. Elle demande d abord à l enfant combien il y en a et ensuite, combien il y en a si on commence par la fin (donc en comptant de droite à gauche, plutôt que de gauche à droite). Figure 40 : Présentation d une rangée de bâtonnets à l enfant Extrait 82 1I : (Prend les bâtonnets qui étaient éparpillés sur la table et reforme une rangée horizontale.) Maintenant, il y en a combien? 166

183 2M : 3I : 4M : 5I: 6M : 7I : 8M : 9I : 10M: 11I : 12M: 13I : 14M: 15I : 16M: 17I : 18M: 19I : 20M: 21I: 22M: 23I: 24M: (Compte les bâtonnets en comptant deux fois le même.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12. On en a 12 maintenant? Oui. Est-ce que tu penses que tu penses que tu es dans les patates? Oui. Ah! On va les recompter, moi, j pense que t es dans les patates. Recommence. (Rit.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11. Et si je fais (Pointe de droite à gauche.) Si on compte comme ça, il va en avoir combien? (Ne répond pas.) Quand tu as compté comme ça (Pointe de gauche à droite.), il y en avait 11. (Dit quelque chose d inaudible.) Ouais, quand on compte comme ça [de gauche à droite], i en a 11. Si on compte comme ça [de droite à gauche], i va en avoir combien? 1. I en a juste 1? Non. I va en avoir combien? (Ne répond pas.) (Pointe le premier en commençant par la droite.) Si on commence par celui-là, tu penses qu il va en avoir combien? 11. Tu penses qu i va en avoir 11? Est-ce qu on vérifie? (Toujours le doigt pointé vers le bâton.) Commence ici. 1 (Retire son doigt.) Vas-y. (Prend les bâtonnets pendant qu elle les compte et déplace ceux qu elle a comptés pour qu ils reforment une ligne de gauche à droite.) 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11. [ ] Lors du premier recomptage, Marianne fait une méprise [ligne 2]. Pour tenter de rectifier le tout, l intervenante lui suggère qu elle «est dans les patates», une formulation utilisée lors de l année d intervention pour dédramatiser l erreur et pour ne pas décourager l enfant [lignes 5 à 7]. Une fois les bâtonnets bien comptabilisés, Marianne pose l hypothèse qu il y aurait onze bâtonnets en comptant de droite à gauche [lignes 19-20]. Pour se vérifier, elle entreprend de déplacer les éléments comptés pour les replacer en commençant de la gauche à la droite. Il s agit d une belle procédure utilisée spontanément par Marianne. De plus, la compréhension du principe de non-pertinence de l ordre lors d un comptage est une avancée pour Marianne. En effet, maintenant, elle est en mesure d énoncer qu une collection comportera le même nombre de jetons si l on commence à compter à partir d un autre endroit, comme ici de la droite à la gauche [lignes 19-20]. Lors de la deuxième tâche, cinq images de dame sont déposées sur la table devant Marianne. Cette dernière est invitée à aller au magasin pour chercher une robe, des chaussures et trois bracelets pour chacune des dames. Pour ce faire, elle doit choisir ce 167

184 qu elle veut parmi 15 paires de chaussures, 15 robes et 25 bracelets présents au magasin. Lors de cette épreuve, l intervenante veut vérifier quelle stratégie Marianne utilise pour déterminer les morceaux dont les dames ont besoin pour aller au bal. Cette épreuve, créant une contrainte, engendre la nécessité d avoir recours au dénombrement pour résoudre la situation en empêchant la correspondance terme à terme dans l action immédiate. Figure 42 : Cinq dames à habiller Extrait 83 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M: 13I : 14M: 15I : 16M: 17I : 18M: 19I : 20M: 21I: 22M: 23I: 24M: 25I: [ ] Tu dois venir voir la vendeuse de robes. Quand tu vas venir me voir, tu dois savoir combien de robes tu as besoin pour que tes filles puissent aller au bal. Quand tu sais combien de robes tu as besoin, tu peux venir au magasin acheter tes robes. (Ne regarde pas les silhouettes sur la table.) Je veux venir. Tu veux venir? Tu sais combien de robes tu as besoin pour que tes madames puissent aller au bal? Oui. D accord, tu peux venir me voir. (Se lève et se dirige au magasin, sans avoir compté les dames.) [ ] Bonjour Madame Marianne! Bienvenue au magasin de robes! Combien de robes avez-vous besoin aujourd hui? Combien? 2. Vous avez besoin de 2 robes? Oui. Est-ce que toutes vos princesses vont avoir des robes, si je vous en donne seulement 2? Oui. Oui? D accord. (Lui donne les 2 robes.) Voilà! Bonne journée et à bientôt! [ ] Avec les robes que tu as achetées, est-ce que tu as assez de robes pour toutes tes princesses? Oui. (Retourne à la table et place les robes sur la dame 2 et la dame 3.) Maintenant que tu as installé tes robes, est-ce que toutes les princesses ont des robes? Non. Combien de robes il te manque? (Regarde la première dame.) 1. Il t en manque seulement une? Non. Et toutes tes princesses vont avoir des robes? Non. Tu dois savoir combien tu en as besoin pour revenir au magasin. (Ne regarde pas les dames et rigole.) Quand tu vas avoir trouvé le bon nombre de robes, tu peux revenir au magasin. Quand tu reviens au magasin, tu dois savoir exactement combien de robes tu as besoin parce que le magasin ferme très, très bientôt. Combien de robes as-tu besoin pour que toutes tes princesses puissent aller au bal? 168

185 26M: 27I: 28M: 29I: 30M: 31I: 32M: 33I: 34M: 35I: 36M: (Ne répond pas.) Ensuite, tu pourras venir me voir pour les acheter. Je vais venir les acheter. (Se dirige au magasin sans avoir compté oralement le nombre de robe manquante.) Est-ce que tu sais exactement combien de robes tu as besoin? Oui. Oui? Tu peux venir les acheter. [Au magasin.] Bienvenue Madame Marianne! Bienvenue au magasin de robes! [ ] Combien de robes avez-vous besoin pour aujourd hui? 2. Avec 2 robes, est-ce que toutes vos princesses vont avoir des robes? Oui. Êtes-vous bien certaine? Parce qu ensuite, le magasin de robes va être fermé. Est-ce que toutes les princesses vont être habillées? Oui. [ ] Comme lors de l évaluation de février 2013, au lieu de compter les morceaux dont elle a besoin, Marianne se dirige tout de suite au magasin et prend quelques articles [lignes 6 à 12; 28 à 36]. De retour à la table, même s il lui manque des morceaux, elle ne compte pas les dames, ni les morceaux supplémentaires qu elle doit aller chercher [lignes 14 à 18]. Elle ne recourt pas au comptage pour connaître les nombres de dames pour déterminer le nombre de robes nécessaires. Plus tard, un questionnement semblable est réalisé autour de la recherche du bon nombre de souliers. Extrait 84 1I : 2M : 3I : 4M : 5I : 6M : 7I : 8M : 9I : 10M : 11I : 12M: 13I : 14M: 15I : 16M: 17I : 18M: 19I : 20M: [ ] D accord! Maintenant, pour aller danser, nous avons besoin d une belle robe et des (Laisse l enfant compléter.) Chaussures. Des chaussures. Combien de chaussures as-tu besoin pour que toutes les princesses puissent aller au bal? [ ] On en a besoin de combien? (Ne répond pas.) Est-ce qu on peut le savoir? Oui. Comment on peut le savoir? Si on regarde bien nos madames sur la table, comment on peut faire pour savoir combien de chaussures nous avons besoin pour qu elles puissent aller au bal? (Regarde ailleurs.) Si tu regardes sur la table, combien de chaussures nous avons besoin pour aller au bal? 3. Avec trois chaussures, est-ce que toutes les princesses vont pouvoir aller au bal? Non. Non. Ça prend combien de chaussures? 2. Si j t en donne seulement 2, est-ce que toutes les princesses vont pouvoir aller au bal? Non. Combien tu dois venir en acheter au magasin? 2. Si je t en donne 2, est-ce que toutes les princesses vont pouvoir aller au bal? Oui. [ ] 169

186 Même avec un soutien important de la part de l intervenante, Marianne ne recourt pas au comptage pour déterminer le nombre de morceaux nécessaires à la réalisation de la tâche. Elle ne semble pas comprendre que le comptage peut être utilisé pour connaître le cardinal d une collection, et donc qu elle saurait tout de suite combien de robes et d accessoires elle a besoin. Lorsque l intervenante lui demande si le nombre de chaussures qu elle demande sera suffisant pour toutes les dames, elle répond par la négative [lignes 11-12; 14-16]. Elle semble savoir qu elle n en aura pas assez, sans toutefois être en mesure de concevoir le comptage des dames comme un outil visant à connaître le cardinal d une collection fournie, et donc, permettant la correspondance terme à terme non proximale entre les dames et les articles du magasin. Cette tâche semble donc se trouver dans sa zone de développement proximale pour la suite des apprentissages. Cet item a été réalisé en deux parties distinctes. Lors de la première tâche, l intervenante dresse une rangée de onze bâtonnets de bois devant l enfant. Marianne devait la dénombrer, ce qu elle réussit. L intervenante modifie l apparence de la collection, et ce, à deux reprises : en déposant les bâtonnets pêlemêle et en les replaçant en ligne droite. À la suite de chaque modification, l enfant ne parvient pas à identifier le cardinal de la collection sans devoir recompter les éléments à chaque fois. Lorsque l intervenante lui demande de commencer son comptage à un nouvel endroit, elle parvient à poser l hypothèse qu il y aurait onze bâtonnets. Les raisonnements de Marianne laissent croire qu elle comprend maintenant la non-pertinence de l ordre, ce qui représente une avancée. Lors de la deuxième tâche, l intervenante présente un ensemble de cinq dames à l enfant. Cette dernière doit aller au magasin chercher des vêtements pour que les dames puissent aller au bal. Pour ce faire, Marianne doit dénombrer les éléments à aller chercher avant de se rendre au magasin, ce qu elle n a pas été en mesure de faire. Même avec un soutien de la part de l adulte, Marianne ne recourt pas au comptage pour identifier le nombre de dames à habiller, et donc le nombre de robes à aller chercher. Elle procède par tâtonnements, allant chercher un ou deux morceaux à la fois. Elle se situe au même niveau que lors de l évaluation précédente. 170

187 Synthèse de la compréhension de l enfant en juillet 2013 La compréhension de l aspect ordinal du nombre s est complexifiée. Marianne parvient à sérier cinq éléments de différentes tailles en effectuant une opération d ensemble sur la série. En ce qui concerne les positions, Marianne est capable d identifier le premier, le troisième, le quatrième, le cinquième et le sixième participant d une course correctement. Par contre, une confusion subsiste entre la deuxième position et la dernière. Marianne commence à opérer sur la série, ce qui constitue un bel avancement. La comptine numérique est toujours bien élaborée. Le nombre jusqu à 9 semble relativement bien construit. En effet, Marianne parvient à identifier qu une collection de huit éléments est plus nombreuse qu une collection de sept éléments à plusieurs reprises. Ceci demeure toutefois très fragile, car elle n arrive pas à établir l égalité entre deux collections de six éléments. De plus, Marianne utilise parfois la correspondance terme à terme comme une opération permettant de construire une collection équivalente à une posée par l adulte. Elle est maintenant en mesure de compter à rebours seule à partir de 12, ce qui constitue une belle avancée. La chaîne numérique de Marianne est toujours sécable, comme c était déjà le cas en mai 2012, mais elle est plus étendue. Même si la chaîne est maintenant sécable sur une plus grande étendue, l aspect cardinal du nombre est construit seulement jusqu à 4. De plus, le comptage n est toujours pas utilisé comme une opération permettant de comparer des collections. Lors de la tâche de cardinalité avec les bâtonnets, Marianne témoigne qu elle comprend mieux le principe de non-pertinence de l ordre. Dans les tâches de conservation, on peut voir une émergence de la conservation en ce qui concerne les quantités continues. Comme c était le cas en février 2013, lors de la transformation de la boule en rouleau, Marianne énonce que les deux parts de pâte sont pareilles de façon assez décidée. Ceci montre une révolution cognitive considérable. Toutefois, lors de l item avec les quantités discontinues, Marianne répond principalement en se basant sur l aspect figural. Donc, elle se situerait donc toujours au premier stade de développement de la conservation selon Piaget. 171

188 À ce moment d évaluation passée en juillet 2013, la conservation et le comptage ne sont pas encore construits comme des opérations. Par contre, Marianne commence à utiliser la correspondance terme à terme comme opération lui permettant de construire et de comparer des collections, ce qui représente une avancée. 172

189 6. Discussion Sur la base des méthodes d enseignement béhavioristes déployées auprès des enfants autistes et des problèmes que cela peut poser dans la construction de concepts comme le nombre, ce projet de recherche visait à vérifier s il était possible de favoriser la construction du nombre chez l enfant autiste en intervenant pédagogiquement d une autre manière, d une manière plus développementale et plus proche de ce qui se fait avec l enfant tout-venant. Dans cette optique, le but de cette étude était de décrire les progrès réalisés par un enfant autiste dans l apprentissage du concept de nombre en travaillant les notions mathématiques par une pédagogie développementale basée sur le jeu. Deux objectifs spécifiques ont ainsi été circonscrits : 1) décrire la progression de la compréhension de l aspect ordinal, et 2) décrire la progression de la compréhension de l aspect cardinal du nombre. Dans un premier temps, une synthèse des analyses vise à mettre en relief la progression de Marianne à ces égards. Par la suite, à la lumière de cette synthèse, les implications pédagogiques, les limites de l étude et les avenues prospectives de recherche seront envisagées Synthèse des résultats Dans le but de décrire les progrès réalisés par Marianne dans l apprentissage du concept de nombre, plusieurs éléments doivent être explicités en lien avec les réponses de Marianne aux évaluations. La figure 1, qui était présentée au début du chapitre 2, sera utilisée pour mettre la progression de Marianne en relief, en ce qui concerne le concept de nombre. Le lecteur se souviendra qu il avait été étayé que le nombre mature est réellement construit lorsque l aspect ordinal et l aspect cardinal convergent et s imbriquent l un dans l autre à la suite de multiples abstractions réfléchissantes. Pour que cela puisse être fait, les opérations de conservation, de correspondance terme à terme et de comptage doivent être, elles aussi, bien construites. Dans le cas de Marianne, les opérations de conservation et de 173

190 correspondance terme à terme sont en construction. Le tableau 7 35 permet de mettre en relief la progression de Marianne à travers les deux années d intervention. 35 Dans ce tableau, certains éléments constitutifs du nombre s entrecroisent, notamment la correspondance terme à terme, la conservation et la cardinalité. Le tableau 7 met en relief ces trois éléments constitutifs du raisonnement sur le nombre en les gardant associés aux items dans lesquels ils ont émergé afin que le raisonnement de l enfant demeure situé en contexte. 174

191 Tableau 7 : Synthèse de la progression de l enfant Sériation 5 pailles (ou cartons) à sérier Octobre 2011 Mai 2012 Février 2013 Juillet Tente une mise en relation des - Comprend que toutes les pailles - Comprend que tous les - Réalise sa sériation de manière grandeurs dans la série en doivent partager un point cartons doivent partager un organisée. faisant une «échelle» du bas d origine commun, même si elle point d origine commun. - Construction de couples des pailles. ne parvient pas à mettre en - Construction de couples dichotomiques plus petit/plus - Ne considère pas un point relation les grandeurs des pailles dichotomiques plus grand et vient placer les d origine commun. entre elles. petit/plus grand et nouveaux éléments à la gauche - Se centre sur une des - Ne procède pas par une juxtaposition de ces couples. de ceux déjà sériés, début de extrémités des pailles pour opération d ensemble lui - Ne procède pas par une coordination des couples. procéder à sa sériation. permettant d envisager de opération d ensemble lui - Considère, d une façon - Parvient à identifier la manière coordonnée les deux permettant d envisager de coordonnée, les deux extrémités première position et l élément extrémités des pailles de manière coordonnée les de tous les éléments à sérier de qui se situe après un autre. manière simultanée. deux extrémités des cartons façon simultanée. - Éprouve de la difficulté à - Semble privilégier un de manière simultanée. identifier correctement les tâtonnement qui lui permet de positions des objets. considérer la sériation de 3 - Demeure confuse face à éléments. plusieurs termes - Parvient, avec un léger nécessairement convoqués soutien de l adulte, à sérier 4 pour parler d une série, éléments. comme «avant», «milieu» et «dernier». ou - Parvient à identifier la 1 re position et l élément qui se situe après un autre. - Éprouve de la difficulté à identifier correctement les autres positions des objets d une série. - Demeure confuse face à plusieurs termes nécessairement convoqués pour parler d une série, comme «avant», «milieu» et «dernier». - Identifie, avec beaucoup d insistance et de soutien de la part de l adulte, le dernier élément de la série ainsi que les éléments qui se trouvent avant et après un autre. - Éprouve beaucoup de difficulté à identifier les autres positions des objets au sein d une série. - Ne semble pas comprendre certains termes nécessairement convoqués pour une série, comme «premier» et «milieu». - Est en mesure d identifier les participants se trouvant «devant» et «derrière» un autre. - Parvient à identifier plusieurs positions, comme la 1 re, la 2 e et la 3 e avec soutien de l adulte. - Confusion 2 e et dernière position. - Commence à opérer sur la série, bien que cette opération ne mène pas nécessairement à la bonne réponse. - Identifie correctement ce qui se trouve «derrière» ou «devant» un autre participant. - Identifie, avec le soutien de l adulte, le participant avant un autre et même d en identifier la position par opération. - Arrive à nommer la 1 re, la 3 e, la 4 e, la 5 e et 6 e position. - Confusion 2 e et dernière position, associée, de manière proximale, à la 1 re position, bien qu avec le soutien de l adulte, elle parvient à nommer la 2 e position. 175

192 Correspondance terme à terme ou ou Conservation ou ou - Est en mesure d utiliser la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l objet pointé pour procéder au comptage de chacune des collections. - Ne procède pas spontanément à la correspondance terme à terme pour comparer. - N envisage pas le comptage comme moyen de comparer les collections. - Le comptage ne mène pas à une conception de l aspect cardinal du nombre. - Base ses réponses sur l aspect figural principalement. Ainsi, 9 < 7. - N utilise pas la correspondance terme à terme pour constituer une rangée équivalente. Si la rangée de princesses débute à la même place que les chevaliers, elle dépasse amplement à la fin (elle place toutes les princesses à sa disposition, 10). - Ne maintient pas l égalité des collections dès qu une des deux collections est distancée. - Absence de conservation. - Base ses réponses sur l aspect figural ou sur l effet de récence. - Est en mesure d utiliser la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l objet pointé pour procéder au comptage de chacune des collections. - Ne procède pas spontanément à la correspondance terme à terme pour comparer. - N envisage pas le comptage comme moyen de comparer les collections. - Le comptage ne mène pas à une conception de l aspect cardinal du nombre. - Base ses réponses sur l aspect figural principalement. Ainsi, 9 < 7 ou 9 = 7 selon la disposition des objets. - N utilise pas la correspondance terme à terme pour établir une rangée équivalente de princesses. Elle construit sa rangée équivalente en respectant relativement les limites perceptives de la rangée des chevaliers (7 = 6). - Ne maintient pas l égalité des collections dès qu une des deux collections est distancée. - Absence de conservation. - Base ses réponses sur l effet de récence. - Tentative de début d explication basée, mais sur l aspect figural. - La cardinalité n est pas inhérente au comptage. - Est en mesure d utiliser la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l objet pointé pour procéder au comptage de chacune des collections. - Tente spontanément une explication basée sur la correspondance terme à terme. - Émergence de l aspect cardinal pour le nombre plus petit que 5. - Le comptage ne mène pas à une conception de l aspect cardinal du nombre quand il est plus grand que 5. - Parvient à juxtaposer des correspondances exactes entre les deux collections, sans toutefois les coordonner en un tout dans le but de les comparer (1 pomme pour 1 framboise, 1 pomme pour deux framboises, mais maintient l égalité des collections). - N utilise pas la correspondance terme à terme pour établir une rangée équivalente de framboises. Elle construit sa rangée équivalente en respectant les limites perceptives de la rangée de pommes (5 = 9). - Fragile émergence de la conservation des quantités continues boule boudin. -Absence de conservation des quantités discontinues. - Base principalement ses réponses sur l aspect figural ou sur l effet de récence. - Est en mesure d utiliser la correspondance terme à terme entre le mot nombre dit et l objet pointé pour procéder au comptage de chacune des collections. - Ne procède pas spontanément à la correspondance terme à terme pour comparer. - Est en mesure d'affirmer à quelques reprises que 7 8, cela demeure très fragile dans le sens où il demeure facile de retomber dans l effet de récence. - Arrive à énoncer l'égalité, par le comptage, pour une collection au cardinal inférieur à 5. Mais 6 6. Utilise le comptage pour comparer. - Est en mesure d'identifier la collection la plus nombreuse même si l'aspect figural peut indiquer le contraire pour des collections de 3 et 4. - Les nombres 3 et 4 ont vraiment un sens cardinal. - Est en mesure de construire une collection équivalente en utilisant la correspondance terme à terme. - Réel début de conservation des quantités continues clairement établie lors de la transformation boule- boudin. - Base ses réponses sur l aspect figural dans les autres cas. - Le cardinal ne peut pas encore être utilisé comme outil de comparaison pour les nombres supérieurs à

193 Comptage Compter le plus loin Bornes inférieure et supérieure Compter à rebours Cardinalité ou ou - Arrive à compter seule jusqu à N est en mesure, seule, de considérer une borne inférieure fixée à 3. - Est en mesure de considérer une borne supérieure fixée à 9. - Compte à rebours à partir de 5. - Sa chaîne numérique est non sécable et non opérable. - Parvient à dénombrer sans erreur des collections au cardinal inférieur à Recompte toujours la collection à partir de 1 pour répondre à la question combien il y en a dès que la collection est plus grande que 3. - Ne parvient pas à opérer sur le nombre. - Ne comprend pas le principe cardinal du comptage. - Arrive à compter seule jusqu à Est en mesure de considérer des bornes inférieures et supérieures fixées à 9, de façon non simultanée. - Compte à rebours à partir de 7, avec beaucoup de soutien. - Sa chaîne numérique est sécable pour les nombres inférieurs à Parvient à dénombrer sans erreur des collections au cardinal inférieur à Ne recompte pas la collection pour nommer le cardinal plus petit ou égal à 5 si aucune transformation spatiale n a été faite sur la collection. - Ne maintient pas la quantité de la collection à 5 éléments si les objets de la collection sont déplacés. - Parvient à opérer +/- 1 sur un nombre comme 5. - Sa chaîne numérique est non réversible, en ce sens que si X est ajouté puis retiré le nombre d origine n est pas maintenu. - Ne comprend pas le principe cardinal du comptage. - Arrive à compter seule jusqu à Est en mesure de considérer une borne supérieure fixée à Ne parvient pas à compter à rebours à partir de 9. - Le nombre n est pas maintenu si on commence à compter d un autre endroit (avec 11). - Recompte à chaque fois une collection si la disposition est modifiée et cela ne lui pose pas de problème si elle ne recompte pas le même nombre de bâtonnets si une méprise arrive dans son comptage. - Ne comprend pas le principe cardinal du comptage ni la non-pertinence de l ordre. - Arrive à compter seule jusqu à Est en mesure de considérer une borne inférieure fixée à 11 et une borne supérieure fixée à 20, de façon non simultanée. - Est en mesure de considérer, à la fois, une borne inférieure fixée à 5 et une borne supérieure fixée à Compte à rebours à partir de Recompte à chaque fois une collection si la disposition est modifiée, mais, avec l aide de l adulte, cela lui pose problème si elle ne recompte pas le même nombre de bâtonnets si une méprise arrive dans son comptage (une avancée importante pour la construction de l aspect cardinal). - Comprend le principe de nonpertinence de l ordre lors d un comptage. - N utilise toutefois pas spontanément le comptage comme moyen pour déterminer la cardinalité (elle ne compte pas les dames pour savoir combien de robes elle doit aller chercher). 177

194 Sériation Au fil des moments d évaluation, les habiletés et les procédures de sériation de Marianne ont nettement évolué. En octobre 2011, on voit qu elle commence d abord à établir sa sériation en se centrant sur le bas des pailles et en y établissant un escalier, sans toutefois se préoccuper de faire partir les pailles d une ligne d origine commune. Par la suite, en mai 2012, on voit que Marianne construit la nécessité de faire partir les éléments à sérier d une même ligne d origine (avec quelques écarts). Ce faisant, Marianne parvient à mettre en série trois éléments selon leur grandeur. Sur ces bases, bien qu elle ne procède pas par une opération d ensemble permettant d envisager de manière systématique et coordonnée les deux extrémités des cartons simultanément, Marianne semble ensuite construire une organisation pour la mise en ordre de grandeur. Puis, en février 2013, elle semble construire des couples dichotomiques plus petit/ plus grand qu elle juxtapose. Avec un léger questionnement de l adulte, elle ajuste ce premier jet de sériation qui l amènera à sérier adéquatement quatre éléments. À la fin de l expérimentation, en juillet 2013, Marianne crée toujours ses couples dichotomiques, mais elle ne fait plus simplement les juxtaposer, elle coordonne la sériation de ces couples en plaçant toujours à gauche du plus grand, puis du plus petit de la série le nouveau couple plus grand/ plus petit à insérer. Ces dernières procédures de Marianne montrent une organisation qui marque la progression de l aspect ordinal du nombre. Elles sont la manifestation d abstractions empiriques qui, si l on se fie à Kamii (1980), Kamii et DeVries (1981) et Piaget (1977), deviendront le terreau pour les abstractions réfléchissantes qui la conduiront au nombre mature. Il est intéressant de souligner que cette organisation des séries basée sur la coordination des couples dichotomiques, qui présente une amorce de l opération, émerge au même moment que Marianne parvient à identifier plusieurs positions dans la série et même à réaliser des opérations sur elle, bien que cela ne la mène pas nécessairement vers une réponse adéquate. Avant ce moment charnière de l organisation de la série par construction de couples dichotomiques, Marianne ne semblait pas comprendre plusieurs termes nécessairement convoqués pour une série, comme ceux des différentes positions. 178

195 Correspondance terme à terme Entre octobre 2011 et juillet 2013, l utilisation de la correspondance terme à terme de Marianne a changé. On voit que, lors des deux premières évaluations en octobre 2011 et en mai 2012, la correspondance terme à terme était utilisée uniquement entre le mot nombre énoncé et l élément dénombré. De plus, elle n y recourait pas spontanément; il fallait une certaine insistance de la part de l adulte pour qu elle compte les collections en utilisant la correspondance terme à terme. Toutefois, comme le principe cardinal inhérent au comptage n était pas construit chez elle, elle n était pas en mesure d utiliser le résultat de son comptage pour procéder à une comparaison entre deux collections. À ces deux moments, Marianne répond principalement aux questions de l intervenante en se basant sur l aspect figural des collections, sans être en mesure de fournir des explications ou sans même procéder à une manipulation quelconque, entre autres choses, à la correspondance terme à terme. De ce fait, elle peut affirmer que 9 est plus petit que 7, et parfois même qu ils sont égaux, dépendamment de la présentation de la collection. Par la suite, en février 2013, on voit que Marianne, même si elle recourt encore à l aspect figural pour déterminer l étendue d une collection, tente d expliquer ses réponses en utilisant la correspondance terme à terme. Elle semble comprendre le principe cardinal résultant d un comptage lorsque les collections comptent moins de cinq éléments; au-delà de ce nombre, le comptage ne mène plus à un aspect cardinal. Elle parvient également à juxtaposer des correspondances terme à terme exactes entre deux collections, sans toutefois, les coordonner dans le but de comparer l ensemble de la collection. À titre d exemple, la comparaison entre 3 pommes et 4 framboises amène Marianne à établir deux couples 1 pomme/1framboise, puis à identifier un couple 1 pomme/2 framboises, ce qui la pousse à affirmer que ce dernier couple n «est pas pareil», sans pour autant lui permettre de coordonner ses manipulations pour établir la collection qui contient le plus d éléments. À la fin de l expérimentation, en juillet 2013, même si elle recourt toujours à la correspondance terme à terme principalement lors du dénombrement et qu elle ne l utilise pas d emblée pour comparer, elle parvient à énoncer l égalité entre deux collections au cardinal inférieur à 5 et à identifier la collection la plus nombreuse entre des collections de 3 et 4 éléments, malgré le fait que l aspect figural peut indiquer le contraire. Cette habileté de Marianne apparaît précisément au même moment où 179

196 elle se sert spontanément de la correspondance terme à terme pour établir une collection équivalente. Lorsque les collections à comparer comportent 7 et 8 éléments, elle est en mesure d affirmer à plusieurs reprises que 7 est plus petit que 8, sans toutefois que cela ne soit solide. En effet, lors de cette même tâche, elle répond à nouveau par l effet de récence. Cela témoigne que les nombres 3 et 4 ont maintenant un réel sens cardinal pour elle, contrairement aux nombres 7 et 8. Ce faisant, les progrès de Marianne permettent de remettre en question les propos de Fuson (1988, 1991), Gelman et Gallistel (1986) et de Van Nieuwenhoven (1996, 1999) comme quoi le comptage doit précéder l opération, ceci menant souvent l intervenant à agir sur le comptage délaissant l opération. Or, tel qu il a été présenté dans le chapitre précédent, le fait que Marianne ait une chaîne numérique étendue ne signifie pas que son nombre soit réellement construit et qu elle soit en mesure d opérer sur le nombre. Il apparaît en fait que ce soit davantage la construction de la correspondance terme à terme sur les éléments de collections à comparer qui mène la voie vers l opération servant à établir un comptage et appuyant une chaîne dénombrable. En ce sens, à l instar de Piaget, qui affirmait que l opération précède et constitue le nombre et le comptage, Marianne nous enseigne que ni la comptine numérique ni même un dénombrement adéquat ne peuvent être considérés garants d une solide construction du nombre Conservation Aux termes des deux années d intervention, les raisonnements et la compréhension de Marianne à propos de la conservation ont évolué. Au moment de la première évaluation en octobre 2011, Marianne ne parvient pas à utiliser la correspondance terme à terme comme une opération réversible permettant de construire une rangée équivalente. Si elle place le premier élément d une rangée en concordance avec le premier élément d une seconde, elle n utilise plus les limites perceptives par la suite, plaçant plutôt toutes les images qu elle a à sa disposition. Elle ne parvient pas à maintenir l égalité aussitôt que l apparence de l une des deux collections est modifiée. Elle ne semble pas avoir construit la conservation, basant plutôt ses réponses sur l aspect figural et sur l effet de récence. Par la suite, en mai 2012, elle ne recourt pas encore à la correspondance terme à terme pour construire une rangée 180

197 équivalente, mais elle utilise dès lors les limites perceptives de la rangée de référence pour guider le nombre d éléments à poser. Elle ne maintient toujours pas l égalité lorsque l apparence de l une des deux collections est modifiée et elle ne fait pas preuve de conservation. Ses réponses se basent toujours sur l effet de récence et sur l aspect figural, à partir duquel elle tente d expliquer son raisonnement. Ensuite, en février 2013, elle présente une émergence de compréhension de la conservation des quantités continues lors de la transformation de la boule en rouleau, mais celle-ci est très fragile. Avec les quantités discontinues, elle ne fait pas preuve de conservation, ses réponses se basant principalement sur l aspect figural ou sur l effet de récence. À la fin de l expérimentation, en juillet 2013, elle utilise correctement la correspondance terme à terme pour construire une collection équivalente, ce qui constitue une belle avancée. Elle présente également un réel début de conservation des quantités continues, lors de la transformation de la boule en rouleau. Par contre, dans les autres cas, ses réponses se basent toujours sur l aspect figural. À partir de ce moment, le cardinal d une collection peut être utilisé comme outil de comparaison seulement s il est inférieur à 4. Les réponses et les tentatives d explication de Marianne au sein des quatre temps d évaluation témoignent qu elle n est pas encore totalement en mesure de faire preuve d abstraction réfléchissante en ce qui concerne le nombre et ses composantes. En ce sens, le fait qu elle réponde principalement aux questions de l intervenante en se basant sur l aspect figural le montre. Par contre, lors de la dernière évaluation, un réel début de conservation des quantités continues est observé. La détermination de Marianne à affirmer que les deux parts de pâte à modeler sont «pareilles», malgré la transformation faite par l adulte, représente une révolution cognitive qui pourrait indiquer qu elle arrive maintenant à faire preuve d une certaine abstraction réfléchissante. À l instar de Piaget et Szeminska (1964), on peut constater que le début de compréhension de la conservation que présente Marianne n est pas sans lien avec le fait qu elle parvienne maintenant à sérier des éléments en organisant des couples dichotomiques, à opérer sur la série et à recourir à la correspondance terme à terme comme un début d opération servant la comparaison. De plus, le fait que Marianne éprouve plus de facilité avec les items concernant la conservation des quantités continues plutôt que discontinues concorde avec l évolution développementale tracée par ces auteurs à ce sujet (Piaget & Szeminska, 1964). 181

198 Comptage Entre octobre 2011 et juillet 2013, la chaîne numérique de Marianne s est développée. Même si, on voit que, dès la première évaluation en octobre 2011, Marianne connaît bien la comptine numérique jusqu à 49, cette chaîne est non sécable. En ce sens que, à ce moment, elle n est pas en mesure de compter à partir d une borne inférieure autre que 1. Elle parvient cependant à compter à rebours à partir de 5. À ce même moment également, elle n utilise pas la correspondance terme à terme ni pour établir une collection équivalente, ni pour comparer deux collections. Par la suite, en mai 2012, sa comptine numérique s est maintenue jusqu à 49 et elle est maintenant en mesure de considérer une borne inférieure et une borne supérieure fixées à 9 de façon non simultanée. Cela indique que sa chaîne numérique est sécable pour les nombres inférieurs à 10. Elle arrive à compter à rebours à partir de 7 avec un soutien de l adulte. Par contre, lors d une tâche de correspondance terme à terme réalisée au même moment, elle énonce que deux collections au cardinal de 7 et 9 sont égales et parfois que celle de 7 comporte plus de jetons que celle de 9. Cela prouve que, même si sa chaîne est sécable, celle-ci n est pas dénombrable, donc pas opérable, pour autant. Par la suite en février 2013, elle arrive à compter jusqu à 55 seule et elle est en mesure de tenir compte d une borne supérieure fixée à 12. À ce moment, elle ne parvient pas à compter à rebours à partir de 9. Entre ces deux moments d évaluation, sa chaîne numérique ne se serait donc pas complexifiée. À la fin de l expérimentation, en juillet 2013, elle arrive à compter seule jusqu à 69, à tenir compte d une borne inférieure fixée à 11 et d une borne supérieure fixée à 20, de façon non simultanée et à tenir compte, à la fois, d une borne inférieure fixée à 5 et d une borne supérieure fixée à 20. Elle arrive également à compter à rebours seule à partir de 12. La nouvelle capacité de Marianne à considérer des bornes fixées par l adulte et à compter à rebours montre que sa chaîne numérique est maintenant sécable jusqu à 12. En ce sens, Marianne nous montre que le fait d être très avancée dans la comptine numérique et de posséder une chaîne numérique sécable ne mène pas forcément à la compréhension de la cardinalité, comme le soulignait Fayol (1990) à l instar de Piaget. Même si Marianne est en mesure de compter jusqu à 69 seule et de compter à rebours à partir de 12 sans soutien, elle n est toujours pas en mesure de comparer des collections de 7 182

199 et 8 objets entre elles et d établir l égalité entre deux collections de 6 éléments. Donc, les différentes productions et réponses de Marianne, lors de ces quatre moments d évaluation, indiquent que, même si le compte à rebours permet une chaîne sécable, il n est pas garant de l aspect cardinal du nombre. En fait, si Van Nieuwenhoven (1996) affirme que le comptage doit en venir à prendre une signification cardinale, les productions de Marianne, tout comme les travaux de Piaget (Piaget & Szeminska,1964) indiquent plutôt que la construction de l aspect cardinal est en soi une opération qui semble reposer grandement sur la correspondance terme à terme, non pas limitée au mot nombre servant le strict comptage, mais ancrée sur les manipulations de celle-ci pour qu elle devienne une réelle opération assurant la réversibilité. C est donc l intervention provoquant la correspondance terme à terme chez l enfant qui assurerait la construction de l opération nécessaire à la compréhension cardinale du nombre bien plus que le comptage et les cinq principes lui étant inhérents définis par Gelman et Gallistel (1986) (ordre stable, correspondance terme à terme entre mot nombre dit par objet, cardinalité inférée par la réponse de l enfant à la question «combien de», abstraction limitée à la capacité de compter des objets hétérogènes et non-pertinence de l ordre) Cardinalité Aux termes des deux années d intervention, Marianne a progressé en ce qui concerne la cardinalité. Au premier moment d évaluation, en octobre 2011, Marianne parvient à dénombrer des collections au cardinal inférieur à 10 sans commettre d erreur. Par contre, elle recompte toujours la collection lorsque l intervenante lui demande combien il y a d éléments si la collection en comporte plus que 3, nombre qui était déjà son domaine numérique avant même le début des interventions relatées dans ce mémoire. Elle ne parvient pas à opérer sur le nombre et ne comprend pas le principe cardinal du comptage; elle recompte sans cesse une même collection et ne parvient pas à utiliser son comptage pour comparer. Au second temps d évaluation, en mai 2012, lorsque les collections ont un cardinal égal ou inférieur à 5, elle ne ressent plus le besoin de recompter les éléments si aucune modification n a été faite à la collection. Toutefois, si cette collection est déplacée, Marianne ne maintient plus le cardinal et elle la compte de nouveau. Elle est également en mesure d opérer un ajout ou un retrait d un élément sur un ensemble de cinq éléments. Sa 183

200 chaîne numérique n est pas encore réversible puisque si on retire X éléments que l on rajoute par la suite, elle ne maintient pas le nombre d origine. Elle ne maîtrise pas le principe cardinal du comptage. Par la suite, en février 2013, lorsqu une collection lui est présentée, le nombre n est pas maintenu si on commence à compter à partir d un nouvel endroit; ce qui implique qu elle ne comprend pas le principe de non-pertinence de l ordre. De plus, elle compte de nouveau chaque fois qu une collection de 11 éléments est déplacée ou si son apparence est modifiée. Si, lors de son recomptage, elle arrive à un autre total parce qu elle aurait fait une méprise, cela ne lui pose aucun problème. Cela témoigne qu elle n a toujours pas construit le principe cardinal du comptage. Pour elle, le comptage ne semble pas permettre de connaître la quantité. Toutefois, à la fin de l expérimentation, en juillet 2013, lorsqu elle recompte une collection si celle-ci est déplacée, elle cherche à obtenir le même total, ce qui prouve une avancée importante pour la construction de l aspect cardinal du nombre. De plus, elle comprend maintenant le principe de nonpertinence de l ordre lors d un comptage, sans toutefois recourir à ce dernier pour connaître la cardinalité d un ensemble; ce principe serait donc encore en construction. Les réponses de Marianne indiquent que, à l instar de Fayol (1990), Fuson (1988, 1991), Gelman et Gallistel (1986), Van Nieuwenhoven (1996) et Vergnaud (1981), le comptage ne suffit pas à comprendre le système numérique. En ce sens que, même si la chaîne numérique de Marianne est élaborée, elle n est pas encore en mesure d opérer aisément sur le petit nombre. Marianne est en mesure de compter à rebours à partir de 12, ce qui rend ce nombre sécable, mais, au même moment, cette enfant ne parvient pas à comparer deux ensembles de 7 et 8 jetons, tel que démontré précédemment, ni à énoncer qu un même ensemble de 11 bâtonnets contiendra toujours 11 bâtonnets, même s ils sont déplacés par l adulte. De plus, les résultats lors de l item de cardinalité réalisé lors des deux premières évaluations témoignent que, comme le soulignait Baruk (2003), lorsque l enfant est mis en contexte, par l utilisation de «nombre-de», dans ce cas-ci, de nombre de jetons, cela favorise la visualisation qui peut permettre à l enfant de réussir la tâche, plutôt que de lui demander, sans matériel à sa disposition, d opérer sur le «nombre». Concrètement, le fait de voir les jetons sur lesquels elle devait opérer a pu soutenir Marianne lors de la réalisation de la tâche, d où sa capacité à opérer sur le nombre 5 en mai

201 La synthèse des résultats de recherche et de leur analyse permet d envisager qu il est effectivement possible de soutenir la construction du nombre sans recourir aux méthodes A.B.A. et T.E.A.C.C.H. avec l enfant autiste, tout comme on le fait avec l enfant toutvenant. En effet, au début des interventions, comme le témoignent les réponses de Marianne lors de la première évaluation, le nombre plus grand que 3 n était pas construit chez elle, bien qu elle était scolarisée avec les méthodes A.B.A. et T.E.A.C.C.H. depuis déjà de nombreuses années. À la suite des deux années d interventions, le concept du nombre est en pleine construction et de belles avancées ont été réalisées, notamment en ce qui concerne la sériation, la correspondance terme à terme et la conservation des quantités discontinues Les implications pédagogiques Les progrès observés chez Marianne peuvent être considérés sous l angle d implications pédagogiques. La chaîne numérique a été servie non pas par des activités visant spécifiquement son extension, mais par les opérations sur le petit nombre lors des interventions pédagogiques. En effet, au quotidien, le travail en mathématique était fait dans le jeu et par la construction d un calendrier, tel que décrit au troisième chapitre. Dans chacune de ces activités, des questionnements mathématiques étaient formulés à l élève pour réfléchir sur le nombre et construire du sens à partir de son action et de son raisonnement. De cette façon, l enfant était amenée à décomposer le nombre pour pouvoir le comprendre, principalement en manipulant du matériel. La progression réalisée par Marianne en ce qui concerne les opérations de conservation et de correspondance terme à terme n est pas due à un enseignement explicite de ces tâches. Le fait de questionner l enfant à propos des nombres lors de différents contextes l amène à développer sa pensée. Comme le soulignait Piaget (1977), lorsque l enfant réalise de multiples abstractions empiriques, cela lui permet d établir des relations logico-mathématiques entre des éléments qui lui sont présentés. Le fait que l enfant coordonne certaines relations l amène à effectuer des prises de conscience et à complexifier ses conceptualisations. C est de cette façon que les interventions ont été mises en place. 185

202 Dans le cadre de ce mémoire, des interventions pédagogiques ont été mises en place dans une perspective développementale. De ce fait, les tâches proposées étaient complexes et se situaient dans la zone proximale de développement de l enfant, sans que l attention de l adulte ne soit portée exclusivement sur les erreurs commises, mais plutôt sur le cheminement et les raisonnements de l élève lors de la réalisation de la tâche. Les résultats obtenus témoignent que cette posture d enseignement peut être bénéfique pour construire le concept du nombre chez un enfant autiste, sans avoir besoin d utiliser un système béhavioriste, comme les méthodes A.B.A. et T.E.A.C.C.H Les limites de l étude Cette étude comportait plusieurs limites méthodologiques. D abord, lors des évaluations, le protocole mathématique n a pas été dirigé de la même façon. En effet, quelques variations ont été portées au protocole pour pouvoir obtenir une réelle lecture du niveau maximal de l enfant, entre autres, lors du changement d orientation de la série d escargots lors de l item 2 de l aspect ordinal en juillet 2013 par rapport à février 2013 et lors de la mise en contexte de construction de salade de fruits lors de l item 4 de l aspect cardinal de juillet 2013 par rapport à février Ces changements à eux seuls peuvent avoir contribué au sens accordé à la tâche par Marianne et, ainsi, influencer sa capacité à répondre. Puis, pendant la passation des items, l intervenante recourt très rarement aux contresuggestions. Ce type particulier de questionnement (comme «Ah oui, tu penses ça? J ai un ami de maternelle qui m avait dit l inverse. Comment tu pourrais lui expliquer pour qu il comprenne?»), qui peut être utilisé en cas de réussite ou d échec de la part de l enfant, permet de soutenir l enfant afin qu il explicite son propre raisonnement si nécessaire, tout en «bousculant» ses croyances, dans une visée pédagogique développementale. Étant mis dans un contexte où il doit expliquer à un ami plus jeune, l enfant est porté à exprimer ses réflexions, chose qu il n aurait peut-être pas faite si l adulte lui avait seulement demandé «Pourquoi tu penses ça? Comment tu fais pour savoir? Montre-moi», comme il a été principalement fait dans le cadre des évaluations relatées dans ce mémoire. On voit d ailleurs que les quelques fois où ces contre-suggestions ont été utilisées avec Marianne, cette dernière a davantage explicité son raisonnement. Si ce type de contre-suggestions 186

203 avait été utilisé plus systématiquement, peut-être que Marianne serait parvenue à mieux rendre son raisonnement sur le nombre. En outre, les protocoles d entrevue ont été réalisés par deux personnes différentes (octobre 2011 et mai 2012 pour l une et février 2013 et juillet 2013 pour l autre). Or, ce type d entrevue d exploration critique avec l enfant n est pas aseptisé de la relation établie entre l adulte et l enfant. L adulte doit pouvoir s ajuster à l enfant au moment opportun (Ferreiro, 1997) pour accéder à la théorie en action de l enfant. Or, si ce type d entrevue convoque les habiletés conversationnelles de l enfant, il engage aussi celles de l adulte tout en les colorant de ses représentations de l enfance, de l apprentissage, du statut de l erreur, etc. (Masciotra, 2004). On comprend, dès lors que la variation de l adulte peut avoir eu un impact sur les productions de Marianne que l on ne peut plus isoler dans la progression relatée. Finalement, le choix d une étude de cas implique que les résultats ne soient pas généralisables, les conclusions y demeurent circonscrites et situées (Karsenti & Demers, 2000; Stake, 1994). Elles gardent toutefois leur pertinence théorique. Ainsi, l intervention pédagogique basée sur la littératie et le jeu ayant permis à cette enfant de complexifier sa construction du concept du nombre permet de soulever l hypothèse que, même si les résultats ne sont valables que pour cette enfant, dans ce type particulier d intervention et d évaluation, le travail effectué en mathématiques par la construction d un calendrier et par les jeux de règles, tout en favorisant les manipulations et diverses correspondances terme à terme, pourrait permettre à des enfants, atteints d un trouble autistique ou non, de construire le concept du nombre Avenues prospectives Dans une étude ultérieure, il serait intéressant de mener une recherche du même type avec un échantillon plus considérable d enfants autistes et d utiliser un groupe contrôle travaillant le nombre avec les méthodes A.B.A. et T.E.A.C.C.H. afin de vérifier si la méthode d intervention développementale mise en place dans le cadre de ce mémoire peut être utilisée quotidiennement dans les classes spécialisées et servir une progression significativement plus marquée. Dans un même ordre d idée, cette comparaison entre les 187

204 deux types d enseignement pourrait offrir des alternatives pédagogiques aux enseignants, aux éducateurs et aux parents d enfants autistes. De plus, en tant que pédagogue, ce mémoire comporte une vision différente de l enseignement des mathématiques aux enfants autistes. En ce sens, si les méthodes A.B.A. et T.E.A.C.C.H. ne semblent pas porter fruit au niveau de la conceptualisation chez l enfant et ne lui permettent pas de développer son plein potentiel, une pédagogie développementale basée sur le jeu, telle que décrite au troisième chapitre, pourrait être une alternative à mettre en place. De plus, comme il a été démontré tout au long de ce mémoire, étant donné que l enfant autiste ne se développe pas différemment de l enfant tout-venant, une telle pédagogie pourrait être utilisée avec des jeunes en difficultés d apprentissage et même dans des classes dites «régulières». Il suffit que l enseignant fixe ses objectifs pédagogiques en fonction de la zone proximale de développement de ses élèves pour y réaliser ses interventions au juste niveau conceptuel que ce dernier a construit et qu il ne base pas ses enseignements strictement sur l âge de ses élèves, ou sur le cursus scolaire prévu pour cet âge et le degré scolaire y correspondant. 188

205 CONCLUSION Ce projet de recherche a été mené auprès d une enfant autiste entre l âge de 10 ans et 12 ans. Cette dernière a reçu, pendant deux années scolaires complètes, des interventions pédagogiques quotidiennes basées sur la littératie et le jeu dans une perspective développementale. Ces interventions avaient pour but de construire le concept du nombre. Chaque jour, le nombre était travaillé dans deux contextes en particulier : lors de la construction d un calendrier mural et lors des jeux de règles. Pour évaluer la progression de l enfant, un protocole mathématique a été expérimenté à quatre reprises pendant les deux années. Les résultats montrent que les interventions pédagogiques orientées sur le nombre ont permis à l enfant de complexifier sa compréhension des aspects ordinal et cardinal du nombre, notamment par l intermédiaire d opérations à élaborer sur le petit nombre. En effet, aux termes des deux années d interventions, Marianne parvient à utiliser la correspondance terme à terme comme le début d une opération permettant de construire des collections équivalentes, commence à comprendre de façon plus solide la conservation des quantités continues, parvient à sérier des éléments selon leurs tailles et à opérer sur la série. Même si sa chaîne numérique est étendue, même quand une partie de cette chaîne est sécable, la cardinalité mérite toujours une grande attention de la part de l intervenant, car elle n est pas assurée par l extension de la chaîne puisque Marianne énonce parfois que 7 est plus grand que 8 et que deux collections au cardinal de 6 ne sont pas égales, ces nombres faisant partie de son domaine numérique. Les résultats de cette recherche permettent d établir des liens entre la démarche d intervention pédagogique mise en place et la construction du concept de nombre. Dans une recherche ultérieure, il serait intéressant d utiliser cette démarche d intervention, non seulement avec un échantillon d enfants autistes, mais également dans des classes d adaptation scolaire pour travailler avec ces jeunes à un juste niveau, déterminé par leur zone proximale de développement. 189

206

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211 ANNEXES Annexe 1 : Protocole mathématiques utilisés en février 2013 et en juillet 2013 Items concernant l aspect ordinal 1. Sériation d objets de tailles différentes - Placer X cartons de différentes longueurs sur la table. «Peux-tu les placer du plus petit au plus grand?» 2. Sériation d objets faisant une course - Placer les 6 escargots de couleur (bleu, rose, orange, rouge, vert, jaune) en ligne. «Lequel est le premier? Lequel est le dernier? L escargot orange est à quelle position?», «Quel escargot est devant le orange? Quel escargot est derrière le orange? Si l escargot orange est le troisième, quel est la position de l escargot rose? Et si l escargot rouge est après le orange, c est quoi sa position?» Items concernant l aspect cardinal du nombre 1. Comparaison de collections d objets identiques (correspondance terme à terme) - Disposer sur la table deux collections inégales avec une très petite différence de cardinal. «Est-ce qu il y en a plus ici, plus ici ou c est pareil? Est-ce qu il y en a pareil, plus ici ou plus ici? Qu est-ce que tu peux faire pour que ce soit égal?» Si l enfant échoue, lui présenter deux collections comportant des cardinaux assez différents. 195

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