Et si on écoutait de la musique?

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1 Et si on écoutait de la musique? À LA MAISON Sans être musiciens ni pédagogues, mais juste mélomanes et parents, les adultes peuvent donner le goût de la musique à leurs enfants. Nul besoin de connaître la facture de tel ou tel instrument, d avoir des connaissances précises, théoriques ou pratiques. Le seul plaisir partagé compte. La joie que peut procurer l écoute d une musique, quelle qu elle soit, est contagieuse! Désirer qu un enfant s intéresse à la musique, c est s y intéresser aussi. Si vous aimez la musique, si vous en écoutez en de nombreuses occasions, vous avez toutes les chances pour que vos enfants l aiment aussi, car votre transmission est naturelle et évidente. Les enfants sont sensibles à vos goûts et à vos centres d intérêt. La musique à la maison est abordée de manière très différente chez les uns ou les autres. Elle varie selon les cultures, 8

2 Et si on écoutait de la musique? les milieux socioprofessionnels, les vécus propres à chaque famille. D autres paramètres peuvent entrer en ligne de compte. Cependant, il y a des éléments communs à tous, même s il s agit d une généralité toute relative. L univers sonore Dès la naissance, et même in utero, nos sens sont en éveil. Les futurs parents apprennent très vite de nos jours que le bébé perçoit certaines fréquences et reconnaît la voix de sa mère et de son père, bien avant sa venue au monde. Dès que son oreille se développe, il perçoit le son de l afflux sanguin au cordon ombilical. À la naissance, l oreille formée est identique à celle d un adulte, le toucher et la voix font vivre au nouveau-né ses premières émotions. Mais très vite, le bébé est plongé dans un environnement sonore bien différent : appareils ménagers, télévision, radio, ordinateurs, les sources de bruit ne manquent pas! Nos oreilles sont très sollicitées et de façon quasi continue. Tout cela constitue un ensemble de fonds sonores qui ne laisse plus beaucoup de place à la musique. Cette écoute subie peut entraîner une fatigue auditive importante. De ces désagréments découle une certaine passivité de l oreille : les bruits affluent, mais les enfants s y habituent et ne font pas toujours l effort de les distinguer. Leur contact avec la musique est fréquent, mais de manière non volontaire. Elle est présente chaque fois qu ils regardent la télévision, rythmant films et publicités. Dans les films, elle accentue une 9

3 J'aime pas la musique! émotion, souligne un événement. Dans la publicité elle est une accroche que les enfants perçoivent. On peut se poser la question de savoir s ils comprennent le message oral (slogan) ; les images ne sont pas toujours décryptées à bon escient, tandis que la musique leur est familière, et ce même lorsqu ils sont très jeunes. Même si elle reste perçue non consciemment, le message émotionnel qui lui est rattaché est, lui, reçu par les enfants. Notre quotidien est donc ponctué d événements sonores plus ou moins agressifs : en voiture, dans les transports en commun, au travail pour les parents, à l école pour les enfants. Veiller à la qualité de notre environnement sonore, c est éviter une fatigue auditive et choisir le monde sonore dans lequel nous voulons vivre. L écoute, affiner son ouïe Pour les petits, il est primordial de découvrir et d explorer des sons. Ils les distinguent peu à peu, puis les créent par jeu ou par curiosité, qu il s agisse de reproduire des bruits familiers ou des cris d animaux. Les tout petits à qui l on chante berceuses et comptines font de l éveil musical sans le savoir et partagent avec leurs parents des moments précieux. Un bébé qui babille et tape sur un tambour est déjà sensibilisé à la diversité des sons. Donner à un enfant cette liberté en se gardant de didactisme, c est le laisser découvrir sa créativité. Néanmoins, en arrivant à distinguer un son d un autre, en s arrêtant de temps en temps sur telle ou telle résonance, 10

4 Et si on écoutait de la musique? notre oreille devient sélective et s affine en choisissant ce que l on veut entendre. On peut par exemple distinguer le tictac d un réveil au milieu d une pièce, malgré la présence d autres sons. Dès lors, il se peut que ce bruit anodin provoque une gêne, alors qu il n en était rien auparavant. Il en est de même pour nos autres sens. Un néon, par exemple, peut tout à coup devenir très agaçant pour la vue si l on remarque son clignotement! Ces petits désagréments quotidiens nous sont paradoxalement très utiles, ils nous font prendre conscience de nos facultés sensorielles innées, si peu utilisées! La majorité des enfants scolarisés à l école élémentaire disent écouter de la musique à la maison. Mais par quel moyen? Radio et télévision constituent l essentiel de leurs sources musicales. On constate que leur écoute n est pas véritablement choisie. En effet, par l intermédiaire de ces médias, les enfants perçoivent ce que le monde extérieur leur propose. Ils ne font pas de choix personnels mais sont naturellement poussés à adhérer aux mouvements de mode. Leurs préférences vont alors vers ce qui est diffusé le plus fréquemment. L influence du cercle familial est évident. Si certains apprécient la musique classique, la musique jazz, les musiques du monde, ou tout autre style de musique, c est parce qu une personne de leur entourage familial en écoute. L audition d enregistrements, contrairement aux médias, implique un choix préalable. Il y a une part personnelle importante dans le 11

5 J'aime pas la musique! fait de choisir ce que l on veut écouter et de s installer à cet effet à un moment précis de la journée. Après enquête, certaines réponses d enfants nous permettent de mieux comprendre pourquoi le passage à l acte musical peut se révéler difficile. Comment expliquer d un seul coup à un enfant dont l audition musicale a été si passive que la musique doit aussi, pour exister, se façonner avec patience, discipline et travail? À la maison, l écoute de la musique peut être source de partage d émotions variées et d expériences diverses. L écoute est choisie, c est un acte volontaire. À l inverse de l écoute non consciente, elle intervient lorsqu on le désire. Bien choisir son moment, c est ne pas omettre que le silence est propice à l écoute ; savoir l apprécier, c est se rendre disponible. Certains parents proposent parfois de faire écouter à leurs enfants une musique qu ils affectionnent, ou qu ils veulent découvrir avec eux après une détente corporelle et auditive. Cette disponibilité nouvelle les rend bien plus réceptifs, les uns et les autres sont comme invités à se connaître mieux. La communication qui s établit n est pas nécessairement verbale : un mouvement du corps, une expression du visage peuvent suffire à l échange. Cependant, la curiosité enfantine amène bien souvent des questions comme : «Qu est-ce que c est?» ou des affirmations telles que : «C est une musique triste!» ou «J ai envie de danser!». Le dialogue instauré à ce moment-là est primordial. Inciter l enfant à verbaliser ses émotions, ses affirmations ou ses 12

6 Et si on écoutait de la musique? questions, c est entrer dans son monde avant de l inviter dans le nôtre. L étude, l indispensable partage La musique à la maison, c est aussi pour certains enfants le moment de l étude du solfège et d un instrument. Pour que le passage du tout plaisir à l apprentissage se passe au mieux, il est préférable, dans la mesure du possible, d accompagner chaque étape. Les encouragements des parents sont pour beaucoup dans la réussite de l apprenti musicien. Jusqu alors, la musique faisait partie de son environnement d une façon ou d une autre, sans efforts. Soudainement, il intègre un système proche du système scolaire avec une exigence de résultats. Forcer un enfant c est risquer l échec. L inciter au partage d un moment privilégié, c est éviter la rupture avec sa prime enfance. Le moment de l étude, lorsqu il est choisi, régulier et partagé permet à l enfant de progresser dans de bonnes conditions. Souvent, de par nos activités et la gestion de notre temps, il peut paraître difficile de trouver ce moment, pourtant indispensable et nécessaire. En engageant un enfant dans la voie musicale, les parents s impliquent aussi. C est à eux que revient le rôle du principal auditeur, du premier public. Pour autant, les parents ne doivent pas se substituer au professeur. L apprentissage de l autonomie de l enfant est essentielle. La musique sera alors synonyme de plaisir et de partage. 13