1- Les transferts d eau dans le sol
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- Edith Sauvé
- il y a 7 ans
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1 La modification des structures foncières conduisant à une ouverture des paysages et à une disparition des haies a engendré de nombreux problèmes que l on connaît mieux maintenant avec du recul comme l accroissement des quantités d eau ruisselée et l érosion accrue des sols entraînant une dégradation chimique accélérée des eaux de surface. Or l agriculteur est le premier gestionnaire de la ressource en eau car il est consommateur de 42% de la ressource prélevée et les surfaces irriguées ont été multipliées par 5 depuis 1955 (source CEMAGREF). Les eaux de ruissellement alimentent les rivières qui se chargent en matières en suspension (M.E.S). L'augmentation de la turbidité (état d un liquide trouble) des eaux modifie l'équilibre de la chaîne alimentaire et peut même entraîner l'asphyxie des poissons. L'envasement a un effet négatif sur le développement des alevins. Le lit de la rivière peut être colmaté et l'échange avec la nappe alluviale interrompue. L'entraînement des particules de sols dans les eaux superficielles s'accompagne également de celui des intrants agricoles (engrais, pesticides) et des polluants d'origine industrielle, urbaine, routière. L'apport d'azote et de phosphore provoque l'eutrophisation exagérée (1) de la rivière (ou de la zone littorale). L'impact écologique des produits phytosanitaires est reconnu mais plus difficile à évaluer du fait de la multiplicité de ces substances et de leur large spectre d'action. Les métaux lourds sont également transportés par les eaux de ruissellement. La préservation ou la restauration de structures naturelles du paysage (zones humides, bocage) sont considérées comme l'un des moyens utilisables pour limiter la pollution diffuse. 1- Les transferts d eau dans le sol Le ruissellement naît sur les parcelles d un bassin versant pour atteindre le point bas de ce bassin, ou exutoire, qui est la rivière. Les substances entraînées lors de ce ruissellement vont suivre certaines voies de circulation privilégiées, naturelles comme les rus et les vallons, ou crées artificiellement comme les fossés, les routes etc L érosion hydrique est induite par l action de la pluie sur la surface du sol, puis par le ravinement dû à l action du ruissellement (d abord diffuse sur les parcelles, elle se concentre peu à peu en rigoles). Le couvert végétal joue un rôle important dans le maintien de la perméabilité du sol en protégeant la surface du sol de l impact de la pluie. Le système racinaire et l activité biologique agissent dans le même sens. La pente est un facteur aggravant par accélération du ruissellement et réduction de la capacité de rétention temporaire de la surface du sol. L activité agricole peut aussi être un facteur aggravant par le tassement du sol par les engins qui diminuent la porosité et la perméabilité du sol, ou l absence de couvert végétal sur les sols en hiver. Une fraction seulement de la terre arrachée atteint le réseau hydrographique. Plus le bassin versant est important et plus elle diminue. De plus, les haies, bois, prairies, zones humides situées sur les voies d écoulement constituent des obstacles propices à la diminution du volume de cette fraction. L eau de ruissellement est chargée en particules terreuses, fertilisants, et produits phytosanitaires s ils sont présents sur les parcelles. Ces substances sont transportées dans la phase soluble ou fixées sur les particules. 1
2 Pour affiner le diagnostic, et pouvoir définir les actions à mettre en œuvre, il est nécessaire de s informer sur les types de communications hydrauliques entre les parcelles et les cours d eau pour savoir s il est préférable de concentrer les actions à proximité des cours d eau ou les étendre à l ensemble du bassin versant, et pour proposer des aménagements susceptibles de limiter les transferts après avoir réalisé un inventaire des filtres déjà existants sur le bassin (haies, bois, marais etc ). précipitations Haie : obstacle au ruissellement + frein pour l érosion du sol prairie Le couvert végétal arboré ou arbustif diminue les précipitations réelles au sol: par interception d'une partie de la pluie, qui se réévapore le jour même; par rétention de la litière. Il accroît les capacités d'emmagasinement des bassins versants: par accroissement de la capacité de rétention du sol avec la litière devenant humus; par diminution de l'évaporation au sol; par une meilleure percolation des eaux à travers les sols mieux aérés, rendus plus macroporeux par les conduits racinaires d'une rhizosphère généralement épaisse. 2- Nitrates et aménagement des haies : La contamination des eaux superficielles dépend essentiellement du mode d alimentation des cours d eau et des caractéristiques du ruissellement de la zone étudiée. Pour les nappes souterraines, la contamination de la nappe va dépendre de la vulnérabilité du milieu (caractéristique du sol et du sous sol : texture, perméabilité, porosité, sens et vitesse d écoulement, teneur en matière organique, ph, activité biologique, caractéristique du climat, topographie). Une étude (2) a étudié les modifications de la dynamique de l'eau et des flux de nitrates induites par la présence d'une haie interface entre versant cultivé et zone humide, mais les résultats peuvent aisément être transposés : «Pour cela, on a suivi, pendant deux ans et demi, le potentiel de l'eau du sol et la composition chimique de la nappe à différentes profondeurs, ceci le long de deux transects (3) voisins : l'un recoupant un talus et une haie de ceinture de fond de vallée, l'autre non. Les données obtenues ont été complétées par des expérimentations plus ponctuelles : traçage dans la nappe, mesures du potentiel dénitrifiant (qui est la capacité des bactéries du sol à transformer le nitrate en azote gazeux, mesurée au laboratoire dans des conditions optimales). 2
3 L'impact de la haie sur la dynamique de l'eau est essentiellement lié à la transpiration des chênes qui provoque un fort assèchement du sol en été à l'amont du transect. L'amont est en effet colonisé par les racines, de préférence à l'aval saturé durablement en eau dès la surface. Cet assèchement entraîne, à la reprise des pluies d'automne, un retard à l'écoulement direct de la nappe du versant vers la zone humide, retard qui en 1999 et 2000 représentait environ 1 mois ½ soit 100 mm de pluie. L'influence de la haie se manifeste aussi par une disparition quasi totale des nitrates dès le printemps dans la partie superficielle de la nappe, cinq mètres en amont de la haie, en relation avec le prélèvement par les arbres. C'est évidemment une observation essentielle. Plus encore, l'absence de nitrates persiste en automne sur ce transect et est expliquée par le ralentissement des transferts d'eau, favorisant la dénitrification et/ou limitant le lessivage vertical vers la nappe. Une quantification de l'effet de la haie sur les flux hydriques et nitriques vers la zone humide a été abordée. Il apparaît que l'impact de la haie étudiée sur les flux d'eau reste faible : le volume d'eau qui sert à l'automne à réhumecter le sol asséché ne représente que quelques pour cent du flux annuel transitant par la nappe. L'impact de la haie sur les flux de nitrates vers la zone humide est par contre plus net.» Sur ce site, le flux de nitrates estimé sur 120 cm de profondeur sur toute la période d'étude est environ 4 fois plus faible en présence de haie. HAIE Flux de nitrates Flux divisé par 4 3- Pollution par les produits phytosanitaires Insecticides, herbicides, fongicides et bien d'autres encore, les produits phytosanitaires sont nombreux et variés. Selon les cibles visées, on distingue actuellement plus de 15 familles de pesticides utilisés en agriculture. La plupart des pesticides actuellement utilisés sont des substances de synthèse, qui peuvent parfois demeurer des années dans le sol sans se décomposer. Ainsi, le DTT, un insecticide, a été abondamment répandu dans les années 60. Toxique à forte dose, il a finalement été interdit en France en La vigne, les céréales (blé et orge) et le maïs sont les cultures les plus consommatrices de pesticides. Elles utilisent respectivement 51%, 26% et 13% du total des produits phytosanitaires épandus (source CEMAGREF). En ce qui concerne le mode de transfert, on retient deux phénomènes plus importants : - le transfert par le vent : phénomène de dérive faisant intervenir de nombreux facteurs (vitesse du vent, humidité, température, stade de croissance, taille des gouttes de pulvérisation ), - le transfert par l eau : phénomène de ruissellement. 3
4 Le schéma suivant présente les différents modes de dispersion des produits phytosanitaires dans l environnement : (source CORPEN, "Qualité des eaux et produits phytosanitaires." Propositions pour une démarche de diagnostic (1996) Des études sur les bandes enherbées mais pas encore sur les haies : Les chercheurs du CEMAGREF ont mis au point plusieurs dispositifs expérimentaux permettant de mesurer la capacité de ces zones d'herbe à limiter le transfert des pesticides vers les eaux de surface : «L'un d'eux a été mis en place sur un site expérimental géré par l'itcf, près d'angers. Dans un champ, des parcelles agricoles sont implantées en amont de "bandes d'herbe", de largeurs variables. Les eaux de ruissellement provenant de chaque parcelle sont collectées après le passage au travers de la bande enherbée et analysées en laboratoire. Ces expérimentations ont mis en évidence l'efficacité de ces zones tampons à retenir les molécules de pesticides. Ainsi, une bande de 6 mètres de large, par exemple, peut intercepter jusqu'à 99% des molécules polluantes. Ces molécules se retrouvent adsorbées à la surface du dispositif enherbé.» Mais il existe d autres dispositifs : Les surfaces enherbées représentent un exemple de zones tampons utilisées pour lutter contre la pollution agricole. Il en existe d'autres : les espaces boisés tels les haies, les bosquets et les boisements au bord de cours d'eau, ou bien encore les zones humides. Tous ces éléments du paysage sont capables de freiner et d'épurer les eaux d'écoulement avant qu'elles atteignent les eaux de surface. Il est très difficile de généraliser les différents résultats obtenus sur le terrain car le comportement des produits phytosanitaires dans l'environnement dépend de nombreux paramètres : hydrologiques, chimiques et érosifs, spécifiques à chaque parcelle. Les chercheurs essaient aujourd'hui de modéliser les différents mécanismes intervenant dans le transfert des polluants : «L'idée est de mener de front deux démarches, l'une plutôt expérimentale et l'autre plutôt théorique : les expériences de terrain permettent de valider les modèles mathématiques et les modèles permettent de mieux comprendre certains résultats expérimentaux. A terme, ces modèles devraient pouvoir intégrer trois échelles : celle de la parcelle agricole, celle du "petit" bassin versant, et enfin celle du "grand" bassin hydrographique. L'objectif est de définir une méthode de diagnostic de la contamination et d'élaborer des règles générales applicables dans un maximum de régions.» 4
5 Cependant, les résultats obtenus jusqu'à présent permettent déjà de proposer des solutions d'aménagement de l'espace rural pour améliorer la lutte contre la pollution d'origine agricole. (Préconisation PAC, source FDSEA 67) Une association haie / bande enherbée est tout à fait concevable pour absorber les molécules des produits phytosanitaires, mais aussi lutter contre les phénomènes de volatilisation de ces produits (vers les parcelles voisines et les habitations) soient 5 à 40 % des volumes épandus (source M. Chassin, Journées phytosanitaires régionales 2005, INRA de Bordeaux). Enfin, il faut savoir que les haies seraient un des éléments d'une série de mesures de gestion pour limiter la dérive (au même titre que les buses anti-dérives et les bandes enherbées). Les haies font donc parti des modifications qui vont être apportées à l'arrêté ministériel de 75 relatif aux dispositions concernant l'application des produits antiparasitaires à usage agricole, actuellement en cours de relecture auprès de la profession agricole. Cédric LAURET (merci à Valérie MERLE, SRPV de Bordeaux pour ses conseils et le suivi de ce dossier) (1) L eutrophisation est le processus naturel d'enrichissement des lacs et des étangs en éléments nutritifs dissous, stimulant la croissance des algues et d'autres plantes microscopiques (2) Thèse de Caubel Virginie, «Influence de la haie de ceinture de fond de vallées sur les transferts d'eau et de nitrate dans la nappe». Thèse Ecole Nationale Supérieure Agronomique de Rennes en partenariat avec INRA USARQ (3) un transect est une bande étroite ou ligne tracée réellement ou virtuellement à l'intérieur d'un milieu donné et qui permet d'en faire l'analyse, le profil et la cartographie 5
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