RENSEIGNEMENTS INTÉRESSANT LES MARINS

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1 Almanach 1904 : P. 152 RENSEIGNEMENTS INTÉRESSANT LES MARINS Ce qu il faut pour être inscrit maritime. Pour être inscrit maritime, il faut être Français, faire une navigation maritime et naviguer à titre professionnel, c est-à-dire qu il faut vivre du métier de navigateur ou de pêcheur. Celui qui déclare faire ce métier, et qui ne le fait pas réellement, s expose à des poursuites en police correctionnelle. L enfant qui veut faire le métier de marin peut dès qu il a 10 ans se présenter au bureau de la marine ; il faut qu il présente son acte de naissance, et qu il soit autorisé par son père, son tuteur, ou, à défaut, par le juge de paix. De plus, il faut qu il sache lire et écrire. On marque alors au bureau comme inscrit provisoire. A 13 ans, il faut qu il ait le certificat d études primaires ou qu il ait fréquenté l école ; sans cela on l efface de la matricule du bureau, et il ne peut naviguer qu à partir de 16 ans. Lorsqu il a 18 ans, et s il a navigué pendant 18 mois, il devient inscrit définitif. S il n est pas inscrit définitif avant le jour de la clôture des opérations du conseil de révision dans son département, il tirera au sort et fera son service dans l armée de terre. Service dans la flotte. De 18 à 50 ans, l inscrit définitif est soumis aux obligations militaires spéciales. Dès qu il a 20 ans, il doit se présenter au bureau de la marine pour être levé au service de la flotte. S il ne se présente pas volontairement, il est recherché, et s il tarde à paraître, il est puni comme insoumis. Après sa présentation au bureau, on lui donne un livret, une feuille de route et l argent nécessaire pour se rendre au dépôt. (La feuille de route lui permet de voyager à quart de place en chemin de fer.) S il a un motif de dispense, il le déclare au moment où il se présente pour qu on ne lui fasse faire qu un an de service. Il peut renoncer à sa dispense s il le veut. Les dispensés ne partent pour le service que le 1 er octobre de chaque année. Cas de dispense. - On appelle dispensé : 1 L aîné de plusieurs enfants ayant perdu père et mère, ou bien dont le père est déclaré absent ou interdit ; 2 le fils unique ou l aîné des fils, ou bien (s il n y a ni fils ni gendre) le petit-fils unique ou l aîné des petits-fils d une femme veuve, ou dont le mari a été déclaré absent ou interdit, ou d un père aveugle ayant plus de 70 ans ; 3 le fils unique et aussi l aîné des fils d une famille de 7 enfants au moins ; 4 le plus âgé des frères inscrits la même année sur la liste du recrutement, ou faisant partie du même appel ; 5 celui qui a un frère en activité de service dans les armées de terre ou de mer ; 6 celui dont le frère sera mort en activité de service, ou aura été réformé, ou admis à la retraite pour blessures reçues dans un service commandé, ou pour infirmités contractées dans l armée ; 7 celui dont le frère inscrit maritime a disparu en mer, étant embarqué sur un navire français, ou est mort des suites du naufrage. Toutes ces dispenses ne sont bonnes que pour les enfants légitimes ; les enfants naturels n y ont pas droit. Lorsqu un marin a droit à dispense parce qu il a un frère présent sous les drapeaux, au moment de la levée, il peut attendre, avant de partir pour faire un an, que son frère ait fini son temps. Dans ce cas, il est «ajourné». Ceux qui sont soutiens de famille peuvent aussi être dispensés de service après qu ils ont fait un an. Il faut pour cela faire une demande au maire en y joignant deux papiers :

2 1 une note des impôts que paie sa famille, note certifiée vraie par le percepteur ; 2 un avis, avec explication, fait par trois pères de famille de la commune, ayant un fils au service ou dans la réserve. La dispense comme soutien de famille peut être accordée soit avant soit après l incorporation ; si elle est accordée avant, le dispensé ne part qu au 1 er octobre avec les autres dispensés de droit ; pour être accordée après, il faut avoir fait au moins un an de service et que les motifs pour lesquels la demande est faite soient survenus depuis l incorporation (revers de fortune, maladies des parents, etc. etc.) Quand il est arrivé au dépôt, l inscrit est examiné, et, s il est reconnu impropre au service, on le réforme et on le renvoie dans ses foyers. S il est reconnu bon, on le garde au service pendant une période qui varie suivant les ordres du ministre, puis, s il ne demande pas à rester, il est congédié. Une fois rendu chez lui, l inscrit doit être à tout instant en mesure de se présenter de suite au bureau de la marine, s il en reçoit l ordre, soit en cas de rappel, soit en cas de mobilisation. Les périodes de 28 jours pour les inscrits maritimes sont supprimées actuellement. Pour qu on sache toujours où le trouver en cas de besoin, l inscrit doit faire connaître au bureau de la marine (et là où il n y en a pas, à la gendarmerie) tous ses changements de résidence, quand c est pour plus d un mois. Pour qu on sache toujours où le trouver en cas de besoin, l inscrit doit faire connaître au bureau de la marine (et là où il n y en a pas, à la gendarmerie) tous ses changements de résidence, quand c est pour plus d un mois ; sans cela, il s expose à une punition de 3 à 8 jours de prison. Dès que l inscrit a été porté sur les matricules, on lui a donné un petit livret appelé fascicule de mobilisation ; il faut qu il fasse bien attention de ne pas le perdre, car il doit le présenter toutes les fois qu on le lui demande sous peine de 8 jours de prison ; et il ne peut embarquer nulle part sans le montrer. Le ministre a prescrit de se montrer très sévère pour toutes ces fautes, désormais. Si l inscrit reste 3 ans sans faire son métier de navigateur ou de pêcheur, on l efface des matricules et il cesse d appartenir à l inscription maritime pour passer au recrutement. Le fascicule est retiré à l inscrit pendant son service, mais il lui est rendu à son retour. Il y a deux choses principales à recommander aux marins qui naviguent au commerce ou à la pêche : 1 Ne jamais embarquer sur un bateau sans avoir été présenté par le patron au bureau du commissaire ; 2 Ne quitter son bateau qu après autorisation, ou bien, si on a été débarqué, se faire effacer du rôle en se présentant au bureau de la marine toujours accompagné du patron ; sans cela, les patrons s exposent à être punis. Avantages des inscrits maritimes. Les inscrits maritimes ont le droit de vendre leurs pêches sans payer de patente ni de redevance personnelle. Ils peuvent se faire donner gratuitement par l État des parties de grèves pour y établir des pêcheries, et aussi des parquages pour les coquillages et les crustacés qu ils pêchent eux-mêmes. Les femmes, les veuves et les orphelins non mariés des inscrits maritimes ont les mêmes droits. Les inscrits peuvent se marier sans autorisation quand ils ne sont pas au service ni en congé limité. Ils peuvent aussi obtenir des pensions et des secours de la Caisse des invalides et de la Caisse de prévoyance. En arrivant au service, ils sont tout de suite matelots de 3 classe, tandis que les marins qui se sont engagés ou qui ont tiré au sort ne sont qu apprentis marins, et par conséquent sont moins payés. Ce que peut devenir l inscrit au service de la flotte. Quand l inscrit est levé pour faire son service, il est classé comme matelot de 3 classe sans spécialité : s il n a pas l instruction ou la bonne volonté suffisante pour entrer dans une spécialité, il a bien des chances de rester matelot de 3 classe pendant tout son service, tandis que s il peut entrer clans une spécialité, il gagnera d abord une classe, en même temps qu un supplément de brevet, et probablement

3 encore il arrivera, avant d avoir fini son temps, matelot de 1 ère classe ou quartiermaître. - Les chauffeurs seuls ne gagnent pas une classe en obtenant leur brevet, mais ils ont une solde plus forte. Les inscrits ont un grand intérêt à obtenir des avancements pendant qu ils sont au service, car plus tard, la pension sur Ia Caisse des Invalides sera calculée d après le grade et la classe du grade qu ils avaient au moment de leur congédiement. Il y a plusieurs spécialités. On peut être : gabier timonier, canonnier, fusilier, torpilleur, mécanicien, fourrier, charpentier, infirmier, tambour ou clairon, chauffeur, boulanger-coq. - Pour obtenir le brevet d une de ces spécialités, il faut toujours passer par une école et subir des examens. Les spécialités pour lesquelles on exige le plus d instruction sont celles de fourrier, torpilleur, mécanicien, infirmier et timonier. Celles pour lesquelles on est le moins exigeant à ce point de vue sont celles de chauffeur, de gabier, de fusilier et de tambour et clairon. C est parmi les fusiliers et les tambours ou clairons qu on a le moins de chance d arriver rapidement ; il est très difficile d y être nommé quartier-maître ; on avance plus vite au contraire chez les torpilleurs, les timoniers, les mécaniciens et les fourriers. Les gabiers sont formés sur la Melpomène, la frégate à voiles que tous les pécheurs de l Océan connaissent bien. - Les timoniers sont formés dans l escadre à Toulon comme les canonniers. L école des fusiliers, c est le bataillon de Lorient, auquel est adjointe l école des tambours et clairons. Les torpilleurs ont leur école à Toulon. Les mécaniciens ne se recrutent que parmi les ouvriers mécaniciens de la marine du commerce ou de l industrie et aussi parmi les apprentis de l école de Lorient. (Voir plus loin.) Dessiné par Roger Chapelet, gravé par Claude Durrens. Les fourriers sont formés dans chaque port militaire, ainsi que les infirmiers et les boulangers-coqs, à des cours spéciaux. Enfin les chauffeurs sont formés sur tous les bateaux et doivent, pour obtenir leur brevet, avoir servi sur des torpilleurs et sur des gros bâtiments comme chauffeurs auxiliaires. Voici un tableau des soldes des marins de l État. GRADES A TERRE EN RESERVE A LA MER A L HOPITAL EN CONGE A L HOPITAL EN CONGE Quartiers maîtres de 1 ère classe Quartiers maîtres de 2 ème classe Matelots de 1 ère classe Matelots de 2 ème classe Matelots de 3 ème classe Quartiers maîtres mécaniciens ou chauffeurs de 1 ère classe Quartiers maîtres de 2 ème classe Ouvriers-mécaniciens et matelots-chauffeurs de 1 ère classe Ouvriers-mécaniciens et matelots-chauffeurs de 2 ème classe Ouvriers-mécaniciens et matelots-chauffeurs de 3 ème classe Supplément accordé à tous les matelots, gabiers, canonniers, En réserve 0 20 torpilleurs, fusiliers, timoniers A la mer 0 40 Supplément accordé à tous les matelots, fourriers, charpentiers, En réserve 0 20 infirmiers, tambours, clairons A la mer 0 10 Supplément accordé à tous les boulangers-coqs En réserve 0 30 A la mer 0 40

4 D autres suppléments sont en outre accordés à ceux qui font preuve d une instruction spéciale ou d une aptitude particulière comme les scaphandriers, les canonniers pointeurs, etc. ou bien à ceux qui remplissent des fonctions spéciales ; les chauffeurs auxiliaires reçoivent 0 fr.10 en réserve et 0 fr.10 à la mer. Il y a même des suppléments accordés sur chaque bâtiment de l État aux hommes qui montrent le plus de conduite, de bonne volonté et de zèle. Les matelots brevetés, ainsi que les mécaniciens et les chauffeurs de 1 ère classe, portent un galon de laine rouge sur la manche ; pour les fourriers, ce galon est remplacé par un galon d or sur le haut du bras ; les quartiers-maîtres portent un double galon de laine. PENSIONS Vous savez qu il faut deux conditions pour avoir droit à la pension demi-solde : 1 - avoir fait 25 années (300 mois) de navigation (la navigation au commerce compte â partir de 10 ans) ; 2 - avoir dépassé l âge de 50 ans. Voici différentes choses qu il faut retenir : ceux qui sont affligés avant l âge de 50 ans par des maladies ou des infirmités graves qui les empêchent absolument de naviguer peuvent demander leur pension, s ils ont 300 mois de navigation, malgré qu ils n aient pas 50 ans. Dans ce cas, il faut demander dès le mois de décembre au bureau de la marine à être examiné par la commission spéciale qui se réunit tous les ans au mois de janvier. Vous savez qu on retient une petite somme sur tous les salaires des inscrits ; cela sert, pour une petite part, à leur préparer une pension pour plus tard. Les marins engagés à salaires fixes (au mois ou au voyage) paient trois francs pour cent francs de salaire. Les marins engagés à la part pour le pilotage en mer paient par mois : 3 francs - 1 fr 50 1 fr 20 0 fr 75-0 fr 30 suivant les fonctions. Les marins qui font la petite pêche ou le pilotage de rivière paient par mois : Pour les patrons, c est 1 fr 50 ; pour les matelots, c est 0 fr 75 ; pour les novices, 0 fr 50 ; pour les mousses, 0 fr 25. Chiffre annuel des pensions demi-solde que l État doit aux marins qui ont 25 ans de service, soit à bord des navires de l Etat, soit du commerce. PAYÉS A L ÉTAT De 25 fr. et au-dessous fr. à 40 fr à 55 fr à 70 fr. et au-dessus Domestiques : 40 fr. et moins Cuisiniers : 40 à 55 fr Maîtres d hôtel : 55 à 70 fr. et plus Pour les capitaines au long cours, les maîtres au cabotage, les patrons brevetés et les mécaniciens, le taux de la pension varie de 660 à1 068 francs. Maximum Pour 5 ans de service à l Etat Pour 60 ans ou infirmités Maximum Moitié du maximum pour veuve ou orphelin Traitement pour enfants au-dessous de 10 ans

5 Ceux qui ont fait cinq ans de service à l Etat peuvent recevoir un supplément de pension de 6, 7, 8 ou 10 francs par mois, suivant la catégorie. Ceux qui ont l âge de 60 ans peuvent aussi recevoir un supplément qu on appelle supplément d invalidité et qui est de 9, 12 ou 14 francs par mois. De plus, ceux qui ont des enfants de moins de dix ans reçoivent pour chacun d eux 2 ou 3 francs par mois. Les veuves des marins qui avaient une pension ou qui avaient 300 mois de navigation quand ils sont morts ont droit à la moitié de la pension du mari (la moitié du maximum, mais il faut que les veuves aient 40 ans, si elles n ont pas d enfants). Les veuves reçoivent aussi des suppléments pour les enfants de moins de 10 ans. Les orphelins de père pensionné ou de veuve pensionnée ont droit à la pension de veuve (moitié de la pension du père) jusqu à l âge de 21 ans. S ils sont plusieurs enfants, ils reçoivent la pension tant que le plus jeune n a pas atteint 21 ans. Le paiement des pensions demi-solde est fait tous les 3 mois, les premiers de janvier, avril, juillet et octobre. Tous ceux qui viennent toucher leur pension doivent montrer leur titre de pension ; en principe, la pension n est payable qu au titulaire du brevet. CAISSE DE PRÉVOYANCE Entre les marins français, contre les risques et accidents de leur profession. Tous les marins embarqués, sans exception, depuis l âge de 10 ans, doivent faire obligatoirement partie de la Caisse de Prévoyance. On a commencé à améliorer cette malheureuse loi (voir plus loin), et il y a lieu d espérer qu elle sera très prochainement remaniée suivant les vrais intérêts des pêcheurs. Nous joignons nos instances à celles des milliers de pêcheurs qui réclament la révision de cette loi sur la Caisse de Prévoyance, et nous espérons que les changements tant désirés ne tarderont pas à être adoptés. En attendant, nous sommes obligés de reproduire encore une fois, à regret, le règlement encore en vigueur à ce sujet. Tous les marins embarqués, sans exception, depuis l âge de 10 ans, doivent faire obligatoirement partie de la Caisse de Prévoyance. Les cotisations qu ils ont à verser sont fixées à la moitié des taxes déjà perçues sur leurs gains et salaires en faveur de la Caisse des Invalides, sans toutefois que ces cotisations puissent dépasser 2 francs par mois pour les inscrits appartenant aux deux dernières catégories du tarif ci-après. Les propriétaires ou armateurs des bateaux armés pour le long cours, le cabotage, la grande et la petite pêche, le pilotage et le bornage, ainsi que les propriétaires de bâtiments de plaisance munis de rôles d équipages, sont assujettis au versement d une cotisation égale au montant de celle acquittée par leurs équipages. Par exception, les patrons propriétaires de bateaux se livrant à la petite pêche, au pilotage ou au bornage qui montent eux-mêmes lesdits bateaux, ne sont plus assujettis à la cotisation personnelle. Les marins ont droit à une pension viagère dite demi-solde d infirmité, variant de 204 à 300 francs par an, lorsqu ils sont atteints de blessures ou de maladies ayant leur cause directe clans un accident ou un risque de leur profession les mettant dans l impossibilité absolue et définitive de continuer la navigation. Si l impossibilité n est pas définitive, l indemnité n est payée que temporairement. Ont également droit à une pension viagère variant de 192 à 250 francs les veuves des marins morts en possession d une demi-solde d infirmité ainsi que les veuves de ceux qui ont été tués, ou qui ont péri dans l exercice de leur profession, ou dont la mort a été la conséquence des blessures ou des maladies ouvrant des droits à la demi-solde d infirmité.

6 CATÉGORIES Pension des marins. Pensions des veuves ou secours annuels aux orphelins Secours annuels aux ascendants Supplément pour enfants de moins de 10 ans Capitaines au long cours et mécaniciens d une machine de 300 chevaux au moins Marins pilotes d une station de mer, patrons d Islande, maîtres au cabotage, mécaniciens de 1ère et 2ème classes Marins non titulaires d un des brevets ci-dessus et embarqués en dernier lieu comme officiers au long cours, au cabotage ou à la grande pêche, ou comme patrons d embarcations exerçant la pêche au large Marins ne se trouvant dans aucune des catégories ci-dessus y compris les borneurs Après la mort de la veuve, la pension qu elle avait passe aux orphelins, jusqu à ce que le plus jeune ait accompli l âge de 16 ans. Lorsque les marins morts en possession de pension ou de droits à cette pension ne laissent ni veuves ni orphelins, un secours viager variant de 96 à 125 francs par an est payé aux ascendants les plus proches âgés d au moins 60 ans et qui auraient eu droit à une pension alimentaire. Toutes les allocations sont réduites de moitié lorsque les titulaires touchent déjà une autre pension. Elles sont payées tous les 3 mois et d après les mêmes règles que pour les pensions demi-solde. On n a qu un délai de deux mois peur demander une indemnité ou une pension sur la caisse de Prévoyance, à compter du jour où le marin blessé ou tombé malade en service a été mis à terre, ou bien du jour de sa mort. - On ne saurait trop recommander aux patrons de s adresser le plus tôt possible au bureau de la marine pour connaître les formalités à accomplir, même quand il s agit d une maladie légère ou d une blessure peu grave parce qu on ne sait jamais si un mal, d apparence insignifiant, ne deviendra pas sérieux, et quand on n a pas fait de suite le nécessaire, on perd tout droit à l indemnité, et c est vraiment dommage de voir que des pécheurs qui paient une si lourde charge ne profitent pas de toutes les occasions pour en bénéficier. Seulement, remarquez bien qu il faut donner des preuves que c est bien en accomplissant le métier de marin qu on a attrapé la maladie ou l accident. CE QU IL FAUT POUR ÊTRE REÇU CAPITAINE au Cabotage D abord, avant de se présenter pour passer l examen, il faut prouver : 1 - qu on a 24 ans ; 2 - qu on a fait soixante mois de navigation. Voici comment il faut avoir fait ces soixante mois : ça ne compte qu à partir de 16 ans ; ça doit être fait sous pavillon français. Sur ces soixante mois, il faut qu il y en ait la moitié (30 mois) faits à l Etat, ou bien à bord d un navire armé au cabotage. Et puis, il faut passer deux examens, la pratique et la théorie. Vingt-quatre heures au moins avant l examen, il faut avoir déposé au bureau de la marine les papiers que voici : 1 - acte de naissance ; 2 - état des services ; 3 - extrait du casier judiciaire ; 4 - attestation de bonne conduite, écrite par le maire et visée par le commissaire ; 5 - certificats d aptitude et de capacité, visés par le commissaire. Enfin, le plus difficile, c est d être reçu aux deux examens.

7 Dans l examen de pratique, dont il faut parfaitement connaître toutes les parties, on vous fait des questions sur le gréement et la manœuvre des navires et embarcations, sur les sondes et la connaissance des fonds, des côtes, des dangers, des courants et marées des côtes de France ; sur les règles de feux et de routes, des manœuvres à faire pour éviter les abordages, sur l usage des instruments de sauvetage. Si vous êtes reçu à ce premier examen, vous avez deux ans devant vous pour vous présenter à l examen de théorie. Si au bout de deux ans vous n avez pas encore été accepté à l examen de théorie, il faudra que vous recommenciez pendant six mois à naviguer au cabotage, ou à l Etat, pour avoir le droit de vous présenter de retour à l examen. Sans cela, il faudrait que vous recommenciez à passer le premier examen encore une fois. Pour le second examen, l examen de théorie, on vous demande de répondre de deux manières, par écrit et oralement. Par écrit, vous aurez à faire une dictée et deux séries de calculs, et oralement vous aurez à parler d arithmétique pratique, de géométrie, de navigation pratique, d emploi des machines à vapeur. Quand vous avez passé les deux examens, on vous donne un brevet. Il y a maintenant deux espèces de brevets de maître au cabotage : le brevet ordinaire qui ne permet de commander que des voiliers, et le brevet supérieur pour lequel est exigé un examen plus complet, qui donne le droit de commander des vapeurs ou des voiliers. Celui qui n a obtenu que le brevet ordinaire peut obtenir ensuite le brevet supérieur en passant de nouveau un examen complémentaire. PILOTES ET ASPIRANTS PILOTES Pour être reçu aspirant pilote, il faut : 1 - avoir plus de 24 ans ; 2 - subir un examen. Cet examen est fait par une commission qui se compose d un officier de marine ou de port, de deux pilotes, de deux capitaines au long cours, en présence du commissaire de l inscription. Dans cet examen, il faut répondre à des questions concernant le pilotage des parages où l on veut piloter. Les pilotes n ont le droit de piloter que dans les limites de leur station, sauf certains cas qui sont indiqués dans un règlement. Les aspirants pilotes passent pilotes à l ancienneté ; ils remplacent les pilotes infirmes et leur paient pendant leur vie un tiers de leurs appointements. Les pilotes sont dispensés de service. Ils ont droit à une demi-solde plus forte que celle des autres marins. Ils ont le devoir de répondre à tous les appels des marins. Tous les navires de plus de 80 tonneaux, s ils sont des voiliers, de plus de 100, si ce sont des vapeurs, sont forcés d appeler le pilote, de le prendre lorsqu ils peuvent, ou de payer le pilotage comme s ils l avaient pris. Les autres bâtiments ne sont obligés de payer le pilote que lorsqu ils l ont appelé et qu il s est présenté. Quand ils veulent s absenter, les pilotes doivent avoir la permission du commissaire. Ils n ont pas le droit de faire une autre navigation que la petite pêche. Comment on peut devenir PILOTE DE LA FLOTTE ou patron pilote de torpilleurs. Les élèves pilotes de la flotte et les apprentis patrons pilotes de torpilleurs sont

8 choisis parmi les seconds-maîtres, quartiers-maîtres et matelots de la manœuvre, des torpilles ou de la timonerie en activité de service, ou parmi les marins de l Inscription Maritime présents dans leurs foyers. Les uns et les autres doivent : 1 Être âgés de 20 ans au moins, de 28 ans au plus au 31 décembre de l année courante. 2 Justifier de 3 années de navigation et posséder le sens marin. 3 Savoir lire et écrire couramment, connaître les quatre règles d arithmétique et les premiers principes du système métrique. 4 Savoir gouverner, sonder, et posséder les connaissances suffisantes pour la manœuvre des petits bâtiments : les apprentis patrons pilotes de torpilleurs doivent connaître la manœuvre des canots. 5 Être d une bonne constitution, avoir une excellente vue. (Les élèves pilotes particulièrement ne doivent avoir ni myopie, ni presbytie, ni daltonisme même très faible, etc.) Les intéressés qui sont dans leurs foyers s adresseront, avant le 1 er mai de chaque année au plus tard, au Commissaire de l inscription maritime avec tous les certificats qu ils peuvent avoir, leurs livrets, etc. Les examens ont lieu dans la deuxième quinzaine du mois d août. Le grade le moins élevé des pilotes de la flotte est correspondant à celui de secondmaître : les plus gradés sont officiers. Le grade le moins élevé des patrons pilotes de torpilleurs est celui de quartiermaître : le grade le plus élevé est celui de premier-maître. CE QU IL FAUT POUR ENTRER A L ÉCOLE DES MÉCANICIENS DE LORIENT On vient de créer à Lorient une école d ouvriers mécaniciens pour les jeunes gens de 15 ans et 9 mois au moins, et de 17 ans au plus. Les jeunes gens qui y sont admis y restent deux ans et demi, à moins qu ils ne fassent preuve d une aptitude supérieure qui permette de réduire cette durée. Au bout de ce temps d école, ils sont nommés ouvriers mécaniciens de 1 ère ou de 2 ème classe, suivant leur habileté. Ils contractent un engagement de servir jusqu au jour où leur classe sera congédiée, c est-à-dire jusqu à 24 ans et demi environ. Les parents n ont rien à payer pour cette école ; au contraire, les apprentis y recoivent une solde de 0 fr. 50 par jour, sur laquelle est payé leur habillement, et peuvent déléguer 9 francs par mois. Pour y être admis, il faut être de bonne conduite et bien constitué, peser au moins 45 kilos et mesurer 1 mètre 50. Il faut en outre savoir lire et écrire. On prend de préférence ceux qui ont le certificat d études primaires et ceux qui ont fait au moins six mois de bon apprentissage comme ajusteur, tourneur, chaudronnier, fondeur et forgeron en fer ou en cuivre, ou comme apprenti dans une machine de bateau à vapeur. Les candidats sont choisis de préférence parmi les enfants des marins de l Etat, ou du Commerce, ou des pêcheurs. Les demandes d admission à cette école sont faites au plus tard dans les premiers jours de février et d août de chaque année, au commissaire de l Inscription Maritime. CE QU IL FAUT POUR ENTRER A L ÉCOLE DES PUPILLES Ce sont des orphelins, enfants légitimes de gens de mer, qu on reçoit à cette école. L âge, c est à partir de 7 ans, quand ils sont orphelins de père et mère, et à partir de 9 ans s ils ont encore, soit le père, soit la mère. A partir de 13 ans, on ne peut plus

9 être admis à l école. Voici ceux qui ont le plus de chance d être reçus à l école des pupilles, par ordre : - D abord tous les orphelins dont les pères ont été tués en guerre, ou sont morts de blessures de guerre, ou encore victimes d un acte de dévouement. - Ensuite les orphelins de père et de mère, puis les orphelins de mère, puis les orphelins de père, servant dans la marine de l Etat ou du commerce, ou dans le personnel militaire des arsenaux de l Etat. Puis les orphelins dont le père servait dans les ouvriers des arsenaux, et mort par suite d accident survenu en service commandé. A 14 ans, les enfants peuvent revenir dans leur famille, ou bien entrer à l école des mousses. Voici les papiers qu il faut présenter au bureau de la marine, pour demander à entrer dans l école des pupilles : une demande sur papier timbré de 0 fr. 60 ; un certificat de bonne vie et mœurs délivré par le maire ; certificat de l instituteur indiquant le degré d instruction ; certificat du maire faisant connaître la situation de fortune des parents, accompagné de l acte de naissance de l enfant ; un certificat du médecin prouvant que l enfant a une bonne santé et a été vacciné ; les actes d état civil constatant la position de famille ; le relevé des services du père (extrait de matricule, etc.) ; les certificats et autres pièces qui serviront à établir le classement de l enfant et ses chances d admission. Ces papiers doivent être remis au commissaire le 1 er juillet ou le 1 er novembre au plus tard. CE QU IL FAUT POUR ENTRER A L ÉCOLE DES MOUSSES. Pour être admis aux Mousses, il faut que l enfant présente les meilleures garanties d aptitude corporelle, d intelligence, de bonne conduite et de bonne moralité. On les choisit parmi les enfants de marins matelots, quartiers-maîtres et officiers mariniers payés par la marine, aussi bien des ports que du littoral. Mais on accorde la préférence aux orphelins de père et de mère sortant de l école des pupilles. On les choisit aussi parmi les enfants des militaires de tous grades de l armée de terre, comme de l armée de mer. Puis aussi parmi les enfants des habitants de la côte. Enfin aussi parmi les enfants de l intérieur de la France. Pour être reçus. - Ces enfants doivent avoir au moins 14 ans ½, mais pas plus de 15 ans ½ ; il faut qu ils aient de 1 m 429 à 1 m 451 au moins de hauteur, suivant l âge, mesurés pieds nus. Ils doivent avoir une excellente vue et jouir d une très bonne santé. Ils doivent peser au moins 40 kilogrammes, pesés tout nus. Ils doivent avoir au moins 71 centimètres de tour de poitrine (mesuré sous les bras) et 22 centimètres de tour de bras (mesuré entre le coude et l épaule en pliant le bras). Ils doivent savoir lire, écrire et connaître les quatre règles de l arithmétique. Voici les papiers qu il faut : acte de naissance de l enfant ; certificat de vaccine ; certificat du maire énonçant les moyens d existence, le nombre des enfants, leur âge et les autres charges des parents ; certificat du maire ou du commissaire de police prouvant que l enfant a une bonne conduite et n a rien fait de mal ; un certificat de l instituteur, expliquant ce que sait l enfant, et parlant de ses aptitudes, de son caractère, de sa conduite et de sa moralité ; le consentement des parents ou tuteurs ; les actes de décès des parents s ils sont morts ; un état des services du père ; un certificat de visite faite par un médecin de la marine, ou, à défaut, par un médecin civil. Ces papiers doivent être remis au commissaire de la marine avant le 1 er mai ou avant le 1 er novembre. Les parents ou tuteurs s engagent en même temps à rembourser les frais de l école pour l entretien et l instruction de l enfant, dans le cas où l enfant quitterait l école, ou bien s il ne voulait pas s engager, à l âge de 16 ans, à servir plus tard dans la flotte,

10 jusqu à la fin du service dans l armée active de la classe où les placera leur âge c est-àdire pendant sept ans. Il faudra encore que les parents remboursent les frais d école, si on est forcé de renvoyer l enfant, mauvais sujet. Ces frais d école sont de 1 fr 20 par jour ; il faut y ajouter les dettes pour les fournitures supplémentaires d habillement. Lorsque le mousse a 16 ans, il devient apprenti marin ; à 18 ans on le nomme matelot de 3 ème classe. SOCIÉTÉS DE SECOURS ET DE PENSIONS Sociétés mutuelles! Mutualité! on ne parle que de cela depuis quelques années On a raison, car l Association mutuelle est une vraie providence pour le travailleur qui ne peut compter que sur ses bras. Par l Association mutuelle, le travailleur se prépare de gros intérêts pour ses économies. Grâce à l Association mutuelle, il peut compter sur des secours lorsqu il sera malade ou blessé, et sur des indemnités lorsqu il aura éprouvé des pertes matérielles telles que perte de bateau. Ça vaut la peine n est-ce pas que nous causions un peu de mutualité. Qu est-ce que c est que ces Sociétés mutuelles? Pourquoi y a-t-il tant d avantages à en faire partie? Comment ça se fait-il que ces Sociétés puissent donner tant d argent? Ce que c est? Le voici : l Association mutuelle c est la réunion de plusieurs personnes (cent, mille, dix mille, un million) qui versent tous les ans dans la caisse de la Société une petite somme pour que cette Société puisse distribuer des secours aux sociétaires qui viennent à être malades ou blessés, ou donner une pension de retraite aux sociétaires vivants lorsqu ils seront vieux. Pourquoi on vous conseille d en faire partie? Parce qu à notre époque difficile, c est le seul vrai moyen de s assurer des secours dans la vieillesse ou dans la maladie. Comment il se fait que les caisses de ces Sociétés peuvent payer tant d argent? La cotisation du grand nombre profite à quelques-uns. Ca c est facile à comprendre : ce sont tous les sociétaires qui paient chacun une petite cotisation, tandis que les sociétaires qui ont besoin de secours sont en très petit nombre : la cotisation du grand nombre profite à quelques-uns. Parlons d abord des associations mutuelles qui assurent contre les accidents, contre les maladies ou contre les pertes de bateaux. En première ligne, il y a d abord l assurance sur la vie et contre les accidents professionnels qui a commencé à fonctionner le 1 er janvier 1899, sous la direction et la garantie de l Etat. Tous les marins sont obligés d en faire partie. Dans beaucoup de ports, se sont formées des sociétés mutuelles qui donnent des secours. ASSURANCES DE BATEAUX D autres mutuelles sont des associations de prévoyance qui assurent les bateaux Voilà qui vous intéresse particulièrement : Le Ministre de la Marine a décidé de ne jamais accorder de secours individuels pour perte de bateaux ou d engins de pêche aux marins habitant une localité où fonctionne une société d assurance ou de secours mutuels. C est aux sociétés que le ministre distribue les fonds dont il dispose. Nous ne comprenons pas qu un patron intelligent puisse hésiter à faire assurer son bateau. On se dit qu on est bon patron et qu il n arrivera rien au bateau ; seulement, un beau jour, on est surpris par la mauvaise chance comme les camarades, et j en connais joliment qui ont bien regretté alors de n avoir pas pris la précaution d assurer leur bateau. Tenez, prenez pour exemple, l Association de prévoyance des patrons pêcheurs de Concarneau. Une fois sociétaire, le patron d un bateau de 2 à 5 tonneaux, est certain d obtenir pour lui, ou pour ses héritiers, s il se noie, le paiement de 400

11 francs en cas de perte de bateau. Si, au lieu de se perdre, le bateau ne subit que de grosses avaries, il recevra un secours égal aux deux tiers de la réparation c est-à-dire, que, s il fait pour 150 francs d avaries, la société lui paiera 100 francs. Pour avoir droit à toutes ces faveurs il suffit d être sociétaire, c est-à-dire de payer d abord un droit d entrée qui est de 7 fr 50, et puis, de payer tous les mois la petite somme de 50 centimes. Pour les bateaux de plus de 5 tonneaux le droit d entrée est de 15 francs, la cotisation tous les mois est de 1 franc, mais aussi le remboursement en cas de perte totale du bateau est de 800 francs. Dans le quartier de Quimper, il y a une autre mutuelle d assurance entre marins, qui fonctionne, elle aussi, très bien. Elle assure les bateaux de Penmarch, Guilvinec, Lesconil, Ile Tudy, Sainte-Marine, à peu près dans les mêmes conditions. A Groix, également, la Mutuelle des Marins assure les dundees à raison de 1 fr 50 pour 100 francs, c est-à-dire qu un dundee de francs doit payer 150 francs, par an pour être assuré. A Belle-Île, l association d assurance qui possède déjà francs de capital, et, depuis quatre ans, rembourse en entier, les pertes subies par les pêcheurs qui font partie le l Association. Nous en avons assez dit pour faire voir l utilité et l importance de ces sociétés mutuelles d assurance. Disons quelques mots maintenant d une mutuelle de retraite, qui assure à ses sociétaires une pension pour les mauvais jours. Voici un homme qui gagne 2, 3 ou 4 francs par jour à quelque rude métier, un rude métier qui va le faire vieillir vite et l exposer à des maladies, à des accidents qui l empêcheront de travailler et de gagner sa vie. Cet homme-là, il faut qu il ait un peu de prévoyance, il faut qu il s assure du pain pour les mauvais jours qui le guettent. Il faut, par conséquent, qu il fasse le sacrifice de quelques sous tous les jours, dans le but de se préparer une pension pour plus tard. Le marin a déjà la pension que l État l oblige à se préparer, aussi il ne se préoccupe guère d autre chose parce qu il gagne vraiment trop peu. Pour les marins qui ont la chance de pouvoir mettre quelques sous de côté toutes les semaines, voici des détails sur la caisse de retraite que nous vous recommandons. Vous pouvez, en toute sécurité, lui confier vos économies, c est la Caisse nationale de retraites pour la vieillesse. Ce n est qu à partir de l âge de 60 ans que vous pouvez commencer à toucher votre pension.