RAPPORT D ENQUÊTE (COPIE DÉPERSONNALISÉE) DIRECTION RÉGIONALE MAURICIE et CENTRE-DU-QUÉBEC

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1 EN RAPPORT D ENQUÊTE (COPIE DÉPERSONNALISÉE) DIRECTION RÉGIONALE MAURICIE et CENTRE-DU-QUÉBEC ACCIDENT AYANT ENTRAÎNÉ LE DÉCÈS FERME PATRICE CHARRON DE WICKHAM LE 14 JUILLET 2004 Daniel Lemieux, ing. Inspecteur Denis Marchand Inspecteur Date du rapport : 2 mars 2005

2 Rapport distribué à : - D r Jean Brochu, coroner ; - D r André Dontigny, directeur de santé publique. Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 2

3 TABLE DES MATIÈRES PAGE 1. Résumé du rapport Organisation du travail Structure générale de l établissement Organisation de la santé et de la sécurité du travail Description de l activité impliquée Description du lieu de travail Description de l activité impliquée lors de l accident L accident : faits et analyse Chronologie de l accident Constatations et informations recueillies Énoncés et analyse des causes Conclusion Causes de l accident Autres documents émis lors de l enquête...13 Annexe A Annexe B Annexe C Informations sur l accidenté Photos Références bibliographiques Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 3

4 1. RÉSUMÉ DU RAPPORT Description de l accident Le 14 juillet 2004 à Wickham, monsieur A procède à la vidange d un silo d entreposage. Lorsque la vidange s interrompt par la formation d un pont de grain, il intervient pour que l écoulement reprenne. Vers 18 h, il est retrouvé enseveli sous des grains de maïs dans le silo. Conséquence L accidenté est mort asphyxié. Causes Deux causes expliquent cet accident : Un problème de conservation des grains de maïs cause la formation d un pont de grain dans le silo ; L accidenté a recours à une méthode de travail dangereuse qui consiste à s introduire le haut du corps jusqu aux hanches, dans une ouverture restreinte, sous le pont de grain pour le briser. Mesures correctives Suite à cet événement, la CSST a interdit à tout travailleur d entrer dans les silos à grains jusqu à ce qu une procédure sécuritaire de travail en espaces clos soit élaborée et que les travailleurs soient informés sur celle-ci (voir le rapport d intervention RAP émis le 27 août 2004). Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 4

5 Silo de grains où est survenu l accident Le présent résumé n a pas comme tel de valeur légale et ne tient lieu ni de rapport d enquête, ni d avis de correction ou de toute autre décision des inspecteurs. Il ne remplace aucunement l ensemble du rapport qui devrait être lu en entier. Il constitue un aide-mémoire identifiant les éléments d une situation dangereuse et les mesures correctives à apporter pour éviter la répétition de l accident. Il peut également servir d outil de diffusion dans votre milieu de travail. Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 5

6 2. ORGANISATION DU TRAVAIL 2.1 Structure générale de l établissement La ferme Patrice Charron de Wickham concentre ses activités à l élevage de veaux de grains et à la culture de céréales. Trois sites localisés à Wickham permettent la production d environ veaux de grains par année. Il s agit d une entreprise à propriétaire unique. En plus du propriétaire, l emploi de cette ferme. à 2.2 Organisation de la santé et de la sécurité du travail Il n existe pour cet établissement aucune structure ou activité liée à la santé et à la sécurité du travail. Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 6

7 3. DESCRIPTION DE L ACTIVITÉ IMPLIQUÉE 3.1 Description du lieu de travail L accident s est produit dans le silo d entreposage illustré à la photo #1 de l Annexe B. Le silo a un diamètre de 4,6 m (15 pi) et sa partie cylindrique a une hauteur de 5,8 m (19 pi). Il contient des grains de maïs séché provenant de la récolte de novembre Trois ouvertures permettent d accéder à l intérieur du silo : Une première se situe sur le toit (voir Annexe B : photo #2). Elle est de forme trapézoïdale dont la dimension des côtés est de 63 cm (25 po) tandis que la largeur varie entre 33 cm (13 po) et 43 cm (17 po). Son accès est possible grâce à une échelle fixée à la structure du silo. Aucun moyen physique (échelle, corde, harnais) n est présent pour descendre à l intérieur du silo ; Une seconde mesurant 69 cm (27 po) de large par 142 cm (56 po) de haut est localisée à environ 84 cm (33 po) du sol dans la partie cylindrique du silo (voir Annexe B : photo #3). Derrière celle-ci se trouve trois portes ouvrant vers l intérieur mesurant chacune 69 cm (27 po) de large par 43 cm (17 po) de haut. Les portes peuvent s ouvrir seulement lorsque le niveau de céréales y est inférieur ; Une troisième est celle utilisée pour la vidange par gravité (voir Annexe B : photo #4). Son ouverture est possible en soulevant une plaque de métal vers le haut. Elle est placée à environ 38 cm (15 po) du sol et mesure 25 cm (10 po) de large par 40 cm (16 po) de haut. Il est possible d accéder à cette ouverture seulement lorsqu il n y a plus de grain dans le silo ou encore, lorsque l écoulement est interrompu. Une vis sans fin installée sous le plancher au centre du silo, pouvant servir à le vidanger, n est pas fonctionnelle puisque la force motrice est inexistante et que la poulie servant de lien avec cette force est cassée (voir Annexe B : photo #5). La vidange du silo s effectue plutôt par gravité à partir de la troisième ouverture. Une vis sans fin mobile est donc installée à l extrémité du silo à la base de l ouverture et elle transporte les grains de maïs jusqu'à la remorque de chargement. Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 7

8 Un ventilateur muni d une minuterie programmable est installé à la base du silo d entreposage (voir Annexe B : photo #6). Celui-ci sert à souffler de l air sous le plancher perforé du silo et ainsi, s assurer d une bonne conservation du maïs. Le moteur du ventilateur est brisé lors de l accident. 3.2 Description de l activité impliquée lors de l accident L activité impliquée au moment de l accident consiste à vider le silo d entreposage par l ouverture de vidange par gravité déjà pratiquée dans le bas du silo (voir Annexe B : photo #4). Lorsque des morceaux de grains de maïs s agglutinent, ils forment un pont de grain dans le silo. À ce moment, l écoulement est interrompu. Une intervention humaine s avère donc nécessaire pour briser le pont de grain et ainsi, que puisse reprendre l écoulement. Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 8

9 4. L ACCIDENT : FAITS ET ANALYSE 4.1 Chronologie de l accident Dans la journée du 14 juillet 2004 vers midi, Monsieur A s aperçoit que la température du maïs dans le silo d entreposage est trop élevée. Il n a d autre choix que de procéder à sa vidange. Le remplissage d une première remorque se termine vers 16 h 30. Au deuxième remplissage, alors que la vidange s interrompt par la formation d un pont de grain de maïs, Monsieur A intervient seul pour que l écoulement reprenne. Pour ce faire, il s insère le corps jusqu aux cuisses à l intérieur du silo par l ouverture servant à la vidange par gravité. À l aide d un objet, il frappe sur le pont de grain de maïs au-dessus de lui pour le briser. Au moment où il réussit à le briser, le pont de grain s effondre sur lui. Vers 18 h, il est retrouvé enseveli sous des grains de maïs dans le silo. Monsieur A décède par asphyxie. 4.2 Constatations et informations recueillies La victime a été retrouvée en position agenouillée et coincée au niveau des hanches dans l ouverture. La partie supérieure de son corps se trouvait à l intérieur du silo. Ses jambes sont demeurées à l extérieur du silo, appuyées contre le grillage de protection de la vis sans fin servant au transport des grains de maïs vers la remorque. Au moment de l accident, la vis sans fin est toujours en mouvement; La dimension de l ouverture utilisée pour la vidange par gravité permet à un individu de s introduire dans le silo, à la condition de s insérer le corps de côté dans le sens de la hauteur de l ouverture. La dimension restreinte de la largeur de l ouverture empêche de pénétrer ou d évacuer le silo si l individu ne se tourne pas sur le côté ; Selon la littérature (voir Annexe C : référence 1), afin d éviter que les grains de maïs moisissent et s agglutinent dans le silo d entreposage, le contenu en humidité du maïs ne doit pas excéder 15 %. Ce taux peut varier pour plusieurs raisons : séchage insuffisant ou trop rapide ou refroidissement inadéquat du maïs, ventilation inadéquate du silo ou infiltration d eau. De plus, le risque de formation d un pont de grain dans un silo est plus élevé si les grains ont chauffé au cours de la période d entreposage ; Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 9

10 Le jour de l accident vers midi, Monsieur B a été informé par Monsieur A que le maïs chauffait dans le silo d entreposage et que sa vidange était requise. La littérature entérine cette façon de faire (voir Annexe C : référence 2) ; Vers 16 h 30, une remorque de kg (15 t) avait déjà été remplie de grains de maïs. L accidenté en était à remplir une 2 e remorque. Au moment de l accident, le silo d entreposage est rempli aux 2/3 de sa capacité maximale de kg (60 t). Le niveau de grains se situe au-dessus de l ouverture des trois portes dans la partie cylindrique du silo ; Une tige de bois, une autre en métal ainsi qu une fourche sans manche ont été retrouvées à l extérieur du silo, à proximité de l ouverture servant à la vidange par gravité. Aucun témoignage n a pu confirmer la présence d un de ces objets ensevelis sous les grains de maïs à l intérieur du silo. 4.3 Énoncés et analyse des causes L accidenté pénètre dans le silo par l ouverture localisée dans la partie cylindrique du silo ou par celle se situant sur le toit. Une ouverture localisée dans la partie cylindrique du silo est munie derrière elle de trois portes s ouvrant uniquement vers l intérieur. Celles-ci n ont pu être utilisées pour pénétrer à l intérieur du silo puisque celui-ci était au 2/3 rempli et que le niveau de céréales était supérieur aux trois portes. Le niveau de céréales empêchait donc l ouverture de ces portes. Une autre ouverture se situant sur le toit demeure toujours accessible pour pénétrer dans le silo. Donc, la victime aurait pu grimper sur le toit du silo à partir de l échelle extérieure et par la suite, aurait pénétré ou chuté à l intérieur du silo pour finalement se retrouver coincée dans l ouverture utilisée pour la vidange par gravité. Toutefois, quelques éléments recueillis durant l enquête viennent expliquer que la victime n aurait pas utilisé cette entrée pour s insérer dans le silo : Il n y avait pas d échelle à l intérieur du silo. De plus, ni harnais ni corde n a été retrouvé sur le lieu de l accident. Sans échelle ou sans corde, la victime aurait pu difficilement sortir du silo par l ouverture sur le toit, surtout lorsque le niveau de céréales est trop bas ; Suite à une chute par l ouverture du toit, un affaissement du pont de grain et l entraînement de la victime dans le maïs, elle n aurait pratiquement pas pu se retrouver comme suit : Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 10

11 dans une position agenouillée ; les hanches coincées dans l ouverture à l intérieur du silo ; les deux jambes parfaitement étendues et appuyées contre le grillage de protection de la vis sans fin mobile à l extérieur du silo. Considérant ces deux éléments, il apparaît invraisemblable que l accidenté ait pénétré ou chuté dans le silo par cette ouverture. Cette cause n est pas retenue Un problème de conservation des grains de maïs cause la formation d un pont de grain dans le silo. Qu il s agisse d un séchage insuffisant ou trop rapide, d un refroidissement inadéquat du maïs, d une ventilation inadéquate du silo ou encore d une infiltration d eau, chacun de ces facteurs peuvent expliquer une mauvaise conservation des grains de maïs et par conséquent, la formation d un pont de grain à l intérieur du silo. Dans le cas présent, il semble probable qu une ventilation inadéquate soit à l origine de la température élevée du maïs, puisque le moteur du ventilateur était non fonctionnel. Toutefois, il ne nous apparaît pas pertinent dans le cadre de cette enquête d en déterminer la raison exacte. Cependant, le fait qu il y ait présence de morceaux de grains de maïs agglutinés, formant un pont de grain et empêchant ainsi la vidange du silo, est à l origine de l intervention de la victime dans le silo. Cette cause est retenue L accidenté a recours à une méthode de travail dangereuse qui consiste à s introduire le haut du corps jusqu aux hanches, dans une ouverture restreinte, sous le pont de grain pour le briser. Les silos d entreposage de grains de maïs représentent, pour les personnes qui y pénètrent, un risque d ensevelissement. Il s agit de circonstances connues dans le secteur agricole. Il est aussi connu que les silos de grains possèdent les caractéristiques inhérentes à un espace clos, tel que défini à l article 1 du règlement sur la santé et la sécurité du travail (RSST) : il n est pas conçu pour être occupé par des personnes ni destiné à l être, mais qui à l occasion peut être occupé pour l exécution d un travail ; Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 11

12 on ne peut y accéder ou on ne peut en ressortir que par une voie restreinte ; il peut présenter des risques pour la santé, la sécurité ou l intégrité physique pour quiconque y pénètre. Compte tenu des conséquences souvent graves lors d un travail effectué en espace clos, des précautions particulières doivent être mises de l avant. Dans le cas actuel, l intervention aurait dû s effectuer par l ouverture se situant sur le toit. De plus, la procédure de travail aurait dû prévoir le port d un harnais de sécurité avec un câble relié à l extérieur et la présence d une deuxième personne pour surveillance. Considérant que l accidenté travaillait seul pour la vidange du silo, il aurait plutôt dû tenter de briser le pont de grain avec un objet assez long, tout en demeurant le corps à l extérieur du silo. Aucune de ces mesures n a été mise en application par la victime. Cette dernière décide plutôt de se glisser sous un pont de grain par une ouverture restreinte de 25 cm (10 po) de large par 40 cm (16 po) de haut pour tenter de le briser. Considérant la dimension de cette ouverture, il est compréhensible qu une évacuation d urgence pourrait s avérer ardue, advenant une reprise de l écoulement. C est en effet ce qui s est passé. Lorsque le pont de grain s est brisé, la victime devait, pour pouvoir se retirer du silo, se tourner sur le côté dans le sens de la hauteur de l ouverture, puisqu il lui était impossible de sortir autrement du silo. L effondrement rapide du pont de grain a fait en sorte que la victime ne pouvait plus bouger. Donc, le fait de s être introduit sous un pont de grain par une ouverture restreinte et difficilement accessible, a empêché le travailleur de se retirer du silo. Cette cause est retenue. Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 12

13 5. CONCLUSION 5.1 Causes de l accident Deux causes expliquent cet accident : Un problème de conservation des grains de maïs cause la formation d un pont de grain dans le silo ; L accidenté a recours à une méthode de travail dangereuse qui consiste à s introduire le haut du corps jusqu aux hanches, dans une ouverture restreinte, sous le pont de grain pour le briser. 5.2 Autres documents émis lors de l enquête Suite à cet événement, la CSST a interdit à tout travailleur d entrer dans les silos à grains jusqu à ce qu une procédure sécuritaire de travail en espaces clos soit élaborée et que les travailleurs soient informés sur celle-ci (voir le rapport d intervention RAP émis le 27 août 2004). Ferme Patrice Charron à Wickham, 14 juillet 2004 Page 13

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