Avant-propos du Plan de Restauration des Tortues Marines des Antilles Françaises

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1 Dessin : Tanguy Deville Plan de Restauration des s Marines des Antilles Françaises Octobre 2005 PLAN DE RESTAURATION DES TORTUES MARINES DES ANTILLES FRANCAISES Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage Direction Régionale Outre Mer Avant-propos du Plan de Restauration des s Marines des Antilles Françaises Le Plan de Restauration des s Marines des Antilles Françaises concerne les deux régions administratives françaises des Petites Antilles : la Guadeloupe et la Martinique où les problématiques de conservation des tortues marines sont assez comparables. Novembre 2005 Ce plan de restauration décrit 52 objectifs à court et à long terme qui permettent de définir la politique de restauration des populations de tortues marines aux Antilles françaises. Après réflexion et afin de faciliter la mise en oeuvre de ce plan, il est apparu peu judicieux d y regrouper la partie opérationnelle. Trois documents portant chacun sur une zone géographique constitueront donc la partie opérationnelle du Plan de Restauration des s Marines des Antilles Françaises : - le Plan de Restauration des s Marines de Guadeloupe, - le Plan de Restauration des s Marines de Martinique, - un programme de coopération internationale à développer sur un territoire géographique plus large (acteurs à définir) PLAN DE RESTAURATION DES TORTUES MARINES DES ANTILLES FRANCAISES PLAN D ACTION GUADELOUPE Direction Régionale de l Environnement de Guadeloupe Avec la participation du Réseau s Marines de Guadeloupe Janvier 2008 Ces documents préciseront : - la description des actions et leur hiérarchisation, - les opérateurs, - la localisation, - la mise en oeuvre sur le terrain, - la planification des actions, - l évaluation financière, - le plan de financement, - etc Concernant le programme de coopération internationale, il est indispensable de préciser que les tortues marines sont des espèces migratrices qui exploitent l ensemble de la zone biogéographique des Caraïbes, voire au delà. Les actions sur les sites de pontes ne peuvent s envisager que parallèlement à des actions sur les sites d alimentation qui peuvent parfois être éloignés de plus de 500 km. A l échelle des Caraïbes, de nombreuses structures collaborent depuis 25 ans pour certaines d entre elles, à la conservation de ce patrimoine. Un partenariat local et international restera ainsi un des moyens les plus efficaces pour restaurer les populations de tortues marines, élément culturel des Antillais qui a failli disparaître. Ministère de l Ecologie, du Développement et de l Aménagement Durables Direction régionale de l'environnement GUADELOUPE Vous pouvez télécharger les documents ci-contre sur le site du Ministère de l Ecologie : lan d action pour les tortues marines de la Martinique Direction Régionale de l environnement Martinique Ministère de l Écologie, de l Énergie, du Développement durable et de l Aménagement du territoire 134 Rev. sci. Bourgogne-Nature

2 LES PLANS NATIONAUX D ACTIONS REPTILES ET AMPHIBIENS Le Plan de Restauration des s Marines des Antilles françaises (partie archipel guadeloupéen, Saint- Martin et Saint-Barthélemy) Eric DELCROIX* Article rédigé par le secrétariat de rédaction d après l enregistrement audiovisuel de cette communication. Résumé Les tortues marines des Antilles françaises bénéficient depuis 2007 d un Plan de Restauration validé pour une période de 5 ans. Ce document stratégique et opérationnel fait suite aux conclusions alarmantes issues des travaux menés, notamment par les membres des Réseaux s Marines Guadeloupe et Martinique depuis la fin des années 90. En effet, le statut de conservation des cinq espèces présentes aux Antilles françaises, et notamment celui des 3 espèces qui pondent sur ce territoire, est jugé critique. Les effectifs des populations sont très bas, les sites de ponte sont dégradés et soumis à une pression anthropique croissante et le nombre annuel de mortalités par les captures accidentelles liées aux filets de fond est estimé entre 800 et Le Plan de Restauration, piloté par les Directions de l Environnement de l Aménagement et du Logement et coordonné par l ONCFS, s appuie sur un Réseau dynamique d acteurs opérationnels, dont de nombreux bénévoles. Ce Réseau permet de suivre les populations, de mener des opérations de sensibilisation, de développer des actions pour limiter les menaces sur les plages et d initier des projets avec les marins pêcheurs pour trouver des alternatives aux engins de pêche problématiques. Après 5 ans d actions, les indicateurs sont encourageants mais les efforts doivent se poursuivre tant sur ces espèces longévives toujours menacées que sur leurs habitats vulnérables. Mots-clés : imbriquée, verte, luth, réseau, conservation. * Coordinateur du PRTMAF partie Guadeloupe Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage / Réseau s Marines Guadeloupe eric.delcroix@oncfs.gouv.fr - Présentation du plan Le Plan de Restauration des s Marines des Antilles françaises (PRTMAF) concernent les 10 îles principales (Saint-Barthélemy, Saint-Martin, archipel guadeloupéen, Martinique). Un document stratégique a été établi pour la période (reconduction prévue de 2012 à 2016) et deux documents opérationnels ont été rédigés pour la Martinique et l archipel guadeloupéen. Les Directions de l Environnement, de l Aménagement et du Logement sont les maîtres d ouvrage et l opérateur coordinateur est l Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage. La mise en œuvre est menée par un réseau d acteurs sous l appellation «Réseau s Marines Guadeloupe» (RTMG) et «Réseau s Marines Martinique» (RTMM) et un appui ponctuel d autres structures. Ce plan est financé par l Europe, l Etat, la Région, l ONFCS (sur des programmes financiers de 24 mois) et par apports financiers des membres du RTMG (par l exemple, l Office National des Forêts et le Conservatoire du Littoral dans le cadre de la restauration des sites de pontes). Tableau I. Les tortues marines présentes dans les Antilles françaises Espèces imbriquée verte luth caouanne olivâtre ponte oui oui oui non non alimentation oui oui non priorité prioritaire hautement prioritaire oui occasionnelle oui rare secondaire secondaire secondaire Cinq espèces de tortues présentes dans les Antilles françaises sont concernées par le plan (tableau I). Trois espèces sont présentes en ponte et deux sont observées uniquement en mer de manière occasionnelle et rare (il s agit certainement d animaux de passage et pas des groupes qui s alimentent de manière régulière dans les eaux des Antilles françaises). Rev. sci. Bourgogne-Nature ,

3 Au niveau prioritaire, la verte et la imbriquée sont jugées respectivement hautement prioritaire et prioritaire dans le cadre d une restauration des populations. Les autres espèces, la luth, la caouanne et la olivâtre, sont de priorité secondaire. Historiquement, on a très peu de données pour la luth et on suppose qu elle est en mode colonisation sur les Antilles françaises. Elle ne répond donc pas aux critères de restauration. Par contre, pour la verte et la imbriquée, on est sûr que les effectifs ont fortement chuté d où la nécessité de restaurer leurs populations notamment pour la verte qui a été appréciée pour sa chair. Une stratégie a été mise en œuvre pour mener Figure 1. Stratégie pour la restauration des populations de tortues marines. cet objectif de restauration (figure 1). Pour ce plan en fin de période, les menaces ont bien été identifiées et le statut de conservation évolue au fur et à mesure des connaissances. Pour l identification des «souspopulations», nous sommes actuellement dans l étude génétique. Les menaces principales sont : la capture accidentelle par la pêche ; la destruction et la dégradation des habitats notamment des sites de pontes ; le braconnage. Suivis et amélioration des connaissances Un suivi de l évolution des pontes par espèces est entrepris depuis 2000 avec une généralisation des suivis depuis 2008 : 3 espèces suivies 60 plages suivies (sur les 180) du 1 er mars au 15 novembre comptages traces et 200 suivis de nuit (minimum) 11 équipes de terrain : un noyau dur de 50 bénévoles car une grosse partie du travail est réalisé par des bénévoles un outil statistique pour évaluer le nombre total de pontes a été développé par le P r Marc GIRONDOT de l Université Paris Orsay Le suivi de l évolution sur les sites de plongée est plus difficile à mener car plus complexe et plus onéreux que le suivi sur les plages qui reste abordable et relativement facile. Pour exemple dans l archipel guadeloupéen, le suivi des sites de pontes nous a permis d éditer annuellement des cartes de répartition et d abondance des pontes sur les plages (figures 2 à 4). Quasiment toutes les plages accueillent des pontes de tortues marines, il n y a des points que sur les 60 plages suivies sur les 180. Pour la imbriquée, on dénombre entre 1000 à 1200 pontes par an sur l archipel avec un gros effectif sur l île Marie-Galante avec deux tiers des pontes de l année. Il s agit de l espèce la plus largement répartie et présente sur toute l archipel avec des effectifs plus ou moins importants. Figure 2. Activités de pontes de la imbriquée (Eretmochelys imbricata) en Eric DELCROIX Rev. sci. Bourgogne-Nature ,

4 Figure 3. Activités de ponte de la verte (Chelonia mydas) en Figure 4. Activités de ponte de la luth (Dermochelys coriacea) en Figure 5. Evolution de l indice d abondance annuel depuis 2004 sur les sites de plongée. Pour la verte, on dénombre entre 100 à 400 pontes par an avec uniquement deux sites utilisés de manière annuelle et régulière jusqu en 2007, l est de l île Marie- Galante et les Ilets de la Petite-Terre. Ce n est que très récemment que l on retrouve des tortues vertes de manière sporadique sur d autres plages. On est certainement en phase de recolonisation avec des animaux provenant peut-être de l île d Aves (Venezuela) situé à 200 km à l ouest de la Guadeloupe où les populations sont en augmentation. La luth, dernière espèce présente en ponte sur l archipel guadeloupéen, est beaucoup plus rare avec moins de 100 pontes recensées par an et essentiellement situé au nord de l île Basse-Terre et sur sa côte atlantique. Cette espèce absente auparavant colonise tranquillement avec d importantes fluctuations annuelles du nombre de pontes. Après 20 ans de protection des tortues marines, le suivi permet de mettre en évidence des tendances d augmentation des populations depuis On travaille sur des espèces classées en danger critique d extinction dont les populations augmentent aujourd hui localement et également à l échelle des Caraïbes. Le suivi des sites d alimentation est obtenu par le retour d informations des clubs de plongée. Il permet d établir un indice d abondance plus ou moins fiable qui permet de voir à minima que les observations restent régulières voire en légères augmentation sur les sites de plongée, mais il ne s agit pas d un suivi global (figure 5). Différentes actions sont menées, plus ou moins ponctuellement pour améliorer les connaissances : Suivi des femelles par baguage ; Suivi de femelle par balise Argos ; Suivi du comportement des tortues en alimentation (GPS, profondimètre, ) ; Etude génétique en cours, pour mieux comprendre la structure au moins des femelles présentes sur nos plages, voire les échanges et éventuellement confirmer nos hypothèses sur la verte de colonisation depuis d autres sites. Les tortues marines de Guadeloupe se répartissent sur les Petites Antilles et même aux Caraïbes avec différents échanges mis en évidence grâce à des retours de bagues et au suivi Argos (jusqu au Nicaragua situé à 2500 km des Antilles). Le Plan de Restauration des s Marines des Antilles françaises (partie archipel guadeloupéen, Saint-Martin et Saint-Barthélemy) 137

5 La protection des sites de pontes Un bilan de l état des plages a été réalisé entre 2002 et 2006 et on considère que deux tiers des plages nécessitent à minima des travaux de restauration en raison : de la dégradation de la végétation des sites de pontes ; de l éclairage qui est problématique en occasionnant désorientation et mortalité de tortues ; du tassement du sable par la circulation d engins et de voitures du bétonnage du littoral et des constructions. Des actions de conservation se sont développées et se renforcent notamment avec le Conservatoire du Littoral et l Office National des Forêts comme des actions ponctuelles de mise en défens de la végétation par la pose de plots en bois, d enrochements ou d enclos de régénération. Un important réseau de bénévoles permet d agir rapidement en cas d atteinte à un site. Suite à un signalement d atteinte, une réponse est apportée en s appuyant sur la réglementation ou de manière consensuelle quand toutes les autorisations nécessaires ont été données, ce qui peut arriver. Des panneaux d information sont implantés sur les plages. Des outils techniques permettent de valoriser toute la connaissance acquise en matière de restauration des sites de ponte. Des formations sont également menées auprès des décideurs, des élus, des aménageurs. Figure 6. Gestion de zone de stationnement, au moment des travaux en haut et 18 mois après en bas. Figure 7. Enclos de re-génération n au moment des travaux en haut et 18 mois après en bas. Les captures accidentelles Les captures accidentelles liées à la pêche sont la première cause de mortalité des tortues marines aux Antilles à l origine de 91 % des échouages avec une estimation annuelle de la mortalité entre 800 et individus. Le problème vient des filets de fond qui sont posés au fond de l eau entre quelques heures à plusieurs jours pour capturer poissons, langoustes ou lambis, comme les trémails de fond et la folle à lambi qui reste jusqu à 48 heures dans l eau. La tortue a besoin de 138 Eric DELCROIX Rev. sci. Bourgogne-Nature ,

6 remonter toutes les demi-heures pour respirer, ce qui ne laisse aucune chance à celle qui se fait prendre dans un filet. Actuellement, un étudiant en thèse termine une importante étude expérimentale ayant porté sur le test de différents paramètres sur les engins (hauteur, type de maille, rapport d armement) afin de proposer des mesures de gestion de la pêche. Pour éviter les captures accidentelles, on tente d impliquer les marins-pêcheurs dans le programme ; de sensibiliser les marins-pêcheurs (respect des temps de calés réglementairement fixé à 5 heures) ; de valoriser les engins et techniques alternatives ; de développer une zone de non pêche ; d améliorer les connaissances sur la structure et le fonctionnement des populations en alimentation ; de modifier la réglementation (comme réglementer de manière stricte le trémail de fond, voire l interdire). Lutte anti-braconnage La lutte contre le braconnage est coordonnée et mise en œuvre par le Service Mixte de Police de l Environnement (SMPE). Le braconnage est malheureusement en augmentation ces dernières années, lié au fait qu il y a plus de tortues sur les plages. Des marchés parallèles se développent pour la viande de tortue. Le braconnage est principalement mené sur les dépendances entraînant plus de difficultés pour monter des opérations. Un centre de soins géré par l association Karet et basé à l Aquarium de la Guadeloupe permet de prendre en charge chaque année les tortues blessées (moyenne annuelle de 5 individus). C est symbolique mais cela permet de mener des campagnes de sensibilisation à l occasion de relâcher. Communication et sensibilisation Actions développées : - Sensibilisation scolaire et grand public (mise en œuvre par les associations) - Production d outils de communication (plaquettes, panneaux, ) - Articles de presses, TV, radio - Site Internet - Partage des connaissances, participation à des rapports nationaux et internationaux Action à développer : - Communication et sensibilisation des pêcheurs - Supports de communication technique - Supports de communication de vulgarisation - Eco-tourisme Conclusion Un grand bout de chemin a été fait mais il faut poursuivre les efforts et concrétiser les mesures de conservation indispensables pour consolider la restauration des populations de tortues marines et de leurs habitats. Remerciements Nous tenons à remercier toutes les personnes œuvrant pour la protection des tortues marines dans les Antilles françaises. Le Plan de Restauration des s Marines des Antilles françaises (partie archipel guadeloupéen, Saint-Martin et Saint-Barthélemy) 139