SAMEDI 22 OCTOBRE PRIERE. Jacques 4, Luc 18, 9-14

Transcription

1 SAMEDI 22 OCTOBRE PRIERE O. Dieu, ta parole est comme le feu, embrase-nous! Ta Parole est comme l eau, rafraîchis-nous! Ta Parole est comme le vent, élargi-nous! Ta Parole est comme la terre, enracine-nous! Amen Jacques 4, Ne médisez pas les uns des autres, frères. Celui qui médit d'un frère ou qui juge son frère, médit de la loi et juge la loi. Or, si tu juges la loi, tu n'en es pas l'observateur, mais le juge. 12 Un seul est législateur et juge, celui qui peut sauver et perdre ; mais toi, qui es-tu, qui juges le prochain? Luc 18, 9-14 En ce temps-là, à l adresse de certains qui étaient convaincus d être justes et qui méprisaient les autres, Jésus dit la parabole que voici : «Deux hommes montèrent au Temple pour prier. L un était pharisien, et l autre, publicain (c est-à-dire un collecteur d impôts). Le pharisien se tenait debout et priait en lui-même : Mon Dieu, je te rends grâce parce que je ne suis pas comme les autres hommes ils sont voleurs, injustes, adultères,ou encore 1

2 comme ce publicain. Je jeûne deux fois par semaine et je verse le dixième de tout ce que je gagne. Le publicain, lui, se tenait à distance et n osait même pas lever les yeux vers le ciel ;mais il se frappait la poitrine, en disant : Mon Dieu, montre-toi favorable au pécheur que je suis! Je vous le déclare : quand ce dernier redescendit dans sa maison, c est lui qui était devenu un homme juste, plutôt que l autre. Qui s élève sera abaissé ; qui s abaisse sera élevé.» 2

3 Avertissement : la prédication est écrite pour être délivrée oralement. Êtes-vous déjà entrés dans le Temple de Jérusalem? Moi : jamais! En fait, c est un peu comme dans une église, sauf que ce n est pas une église. Le Temple, c est là qu on se tenait devant Dieu à Jérusalem. Avec son art de la narration, Jésus en quelques mots, nous y entraîne, suivons-le! Deux hommes montent au Temple, un pharisien et un péager. La scène se déroule sous nos yeux. Comme si on y était! Tout commence par la montée des marches. Il y avait des escaliers interminables pour monter au temple. Ceux de Saint-François à côté c est de la «bibine». Et puis les escaliers, c est symbolique pour aller à Dieu, ça Monte, il faut s élever et ça demande ma foi un rude effort. Ah chers amis, la montée des marches du Temple! C est tout un art. 3

4 Et ça attire les regards. Un vrai spectacle! Pour l un c est comme le Festival de Cannes, le tapis rouge et les flashs en moins! Un moment de gloire. Ô, n exagérons rien, le pharisien est un puritain. Ne comptez pas sur lui pour étaler son honneur qui est tout Intérieur, tout en retenue, en discrétion. Pour l autre, le péager, cette montée est un Calvaire. Arrivé à l intérieur, entre deux colonnes, Jésus fait de nous les témoins oculaires d une scène que nous n aurions pas dû voir. Et il fait de nous les auditeurs de prières que nous n aurions pas dû entendre. Mais bon sang se demande-t-on? - pourquoi donc Jésus nous fait-il entrer ainsi dans l intimité de ces deux-là? Devant quelqu un qui prie, c est bien connu, on chuchote, on se tait, on se retire discrètement, sur la pointe des pieds. Peut-être aurions-nous dû nous effacer? Laisser ces deux hommes à leur prière. Laisser ces deux hommes à Dieu. 4

5 Trop tard ; de lecteur, nous voilà voyeurs. Sous nos yeux, le pharisien prie debout. Comme ses pères avant lui, comme tous les juifs avant lui. N allez pas croire qu il se monte le col. Dans le judaïsme, on prie Dieu debout. On a toujours fait comme ça! Loin derrière lui un péager, un publicain, se fait tout petit et cherche à passer inaperçu. Pour le coup, c est raté, on l a déjà remarqué ; il crève l écran. Le pharisien rend grâce à Dieu d être ce qu il est. Son sens de la reconnaissance est tout à son honneur. C est un bon type. Un type bien. Entre lui et cette canaille de péager, il n y a pas photo et il le sait bien. Jésus raconte une parabole en noir et blanc. Une parabole sans nuance. C est souvent ainsi qu on voit le monde : en noir et blanc. Avec d un côté les bons et de l autre les méchants. 5

6 Les croyants et les mécréants. Les damnés et les Saints. Les pharisiens et les publicains. Alors on n est pas trop surpris de la scène. Jésus grossit le trait. Fait dans la caricature. «Faut pas croire», dans la vraie vie, un pharisien n est pas comme ça. Ni un péager d ailleurs. C est réducteur. Mais peu importe, on aime bien les simplifications. On assiste à la scène un peu gêné. Et l on se demande bien où Jésus veut en venir? Ce qui est sûr, c est qu à peine franchis le seuil de cette parabole, et le seuil de ce Temple, ce pharisien nous devient profondément antipathique. «Antipathique de chez antipathique». Détestable, même. Oh, bien sûr on ne le dira pas jamais comme ça, en ces termes si forts. 6

7 Parce qu on sait que ce n est pas très chrétien ni charitable mais franchement entre nous - ce type est insupportable, non? Ne me dites pas le contraire, je ne vous croirais pas! Avec sa manière bien à lui de se mettre en avant. De péter plus haut que son De se croire arrivé. De se croire parfait. En un mot, l imbu est imbuvable. Et c est alors que venant du fond du lecteur et du spectateur que nous sommes. C est alors qu une petite voix se fait entendre un peu comme une prière : «Mon Dieu heureusement que je ne suis pas comme lui!» C est vrai, non? Heureusement qu on n est pas comme lui! Décidément, ce pharisien incarne tout ce que l on n aime pas. Et voyez-vous, c est exactement à ce moment précis. Au moment même où je m entends murmurer intérieurement «heureusement 7

8 que je ne suis pas comme lui». que je comprends soudain où Jésus voulait en venir. Oui, au moment même où j entends cette voix monter en moi que je me rends compte qu au fond je suis pareil à lui. Pareil! Moi aussi, devant Dieu, je me rassure à l idée que je ne suis pas comme lui. D ailleurs, c est la vérité! Je ne suis pas comme les autres. Certes je ne vaux pas mieux qu eux mais quand même. «Ah mon Dieu heureusement que je ne suis pas comme ce pharisien!» Seigneur, tu me connais, depuis le temps qu on se fréquente! Je suis plus modeste, infiniment. Plus humble. Misère! Voilà donc où voulait en venir Jésus. Me conduire là où je prends conscience que je suis comme ce pharisien! 8

9 Et pas rien qu un peu. Bien sûr, je résiste à cette idée. Je me dis : non, ce n est pas possible, pas comme lui! Jésus ne raconte pas cette histoire, pour dévaloriser les pharisiens et les juifs. Non! Ni pour rehausser les péagers, non! Non, Jésus raconte cette histoire pour nous dire que dans nos relations. Dans nos relations avec les autres. Dans notre relation avec Dieu. le vrai poison c est ce besoin que l on a sans cesse de se comparer les uns aux autres. Ce besoin que l on a de se rassurer en voyant les autres autour de nous. Le pharisien de la parabole est vraiment un type bien. Il jeûne, prie, fait l aumône. Il a tout pour lui, TOUT! Qu avait-il encore besoin de se comparer ainsi à ce péager? 9

10 Le pharisien a tout pour lui. Une seule chose lui manque, le courage d être devant Dieu tel qu il est, en toute simplicité. Il n a pas ce courage. Et ça en dit long sur l image qu il se fait de Dieu. D un Dieu terrifiant, glaçant. Alors pour se tenir devant ce Dieu là, il se cache derrière ce péager. Il s appuie sur lui pour se rehausser. Pire, il l abaisse pour mieux s élever. Il l écrase pour mieux se mettre en valeur. De son côté, le péager, se tient seul devant Dieu. Il est cassé! Comme en ruine. Pareil à un naufragé. Mais est-il autre chose qu un naufragé? Il ne cache rien de ces zones d ombre, comment le pourrait-il d ailleurs? L homme est tout sauf exemplaire. C est une crapule, c est de notoriété publique. 10

11 Mais il a une chose que le pharisien n a pas. C est le courage de se tenir devant Dieu tel qu il est. Sans fard, Sans masque. Cette parabole, c est une histoire sur le courage d être! Le courage d être devant Dieu, avec tout ce que nous essayons tant bien que mal de lui cacher ; nos failles, nos manques. L histoire est inachevée. La fin reste à écrire. Elle commence à la sortie de cette église. Comment vais-je rentrer chez moi après m être tenu devant Dieu? Amen 11