Les inégalités, le talon d achille du modèle marocain de développement
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- René Desmarais
- il y a 7 ans
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1 Les inégalités, le talon d achille du modèle marocain de développement Communication au Colloque CESE-PNUD «les inégalités et les perspectives de développement social» Rabat, 12 mai 2015
2 Questions et constats Les inégalités sont-elles reconnues comme un fait de société à part entière (observé, analysé dans ses causes, conséquences, évolutions, seuils de tolérance)? Les inégalités sont-elles «gouvernées»? Quelles sont les manifestations des inégalités? Exercice des libertés fondamentales, accès aux services et biens essentiels revenus, consommation, mobilité sociale, santé, accès à l activité, accès à l emploi, à la justice, aux transports, aux loisirs, droit à la sécurité, protection contre les nuisances environnementales, Quels sont les effets de la croissance économique sur le niveau des inégalités au sens large? Les investissements étrangers ont-ils permis de réduire les inégalités? La réduction de la pauvreté réduit-elle les inégalités? Y-a-t il un seuil d acceptabilité des inégalités? Lien entre cohésion sociale, sécurité sociale, stabilité et durabilité du développement
3 Le contexte mondial : les inégalités s aggravent et leur réduction ne résultera pas de libre jeu du marché OIT («Le marché du travail, les institutions et les inégalités, bâtir des sociétés plus justes pour le XXIe siècle», février 2015) : «Les inégalités se sont creusées dans la plupart des pays industrialisés et en Asie, ainsi qu en Inde, en Chine et dans certaines régions d Afrique». A contrario, elles ont reculé dans l essentiel de l Amérique latine et dans quelques pays africains. Néanmoins, l Amérique latine reste la région la plus inégalitaire au monde, juste après l Afrique australe. Augmentation des inégalités au Maroc durant la période , en tendance inverse du reste des pays de la région MENA, sauf Liban et Yémen, qui ont connu la même régression durant cette période La réduction des inégalités n est pas un effet naturel ou mécanique des lois du marché : l équité est à la fois un objectif politique et une construction institutionnelle, qui résulte des lois, des politiques publiques et des pratiques collectives
4 La réduction des inégalités levier de lutte contre la pauvreté Au Maroc, entre 1990 et 2011 la pauvreté monétaire est passée de 13,1% à 8,9% ; HCP: «L'impact de la réduction de l'inégalité sur la baisse de la pauvreté est plus efficace que celui de la croissance». En réduisant les inégalités de 1%, la pauvreté baisse de 5,9%. Un taux de croissance de 1%, par contre, ne fait reculer la pauvreté que de 2,9%. en agissant sur les inégalités, il est possible de réduire la pauvreté même en période de croissance négative».
5 BAD: Les IDE creusent les inégalités au Maroc La BAD : «le lien entre l'ide et le bien-être au Maroc n est pas concluant» L IDE creuse les inégalités de revenus au Maroc en raison de la faible diversification sectorielle des IDE entrants. «Le Maroc est l un des pays les moins diversifiés en termes de concentration sectorielle. [ ] Les entrées d IDE ciblent essentiellement les services et le tourisme (finance, affaires, hôtellerie et restauration). Pratiquement aucun IDE ne vise le secteur primaire au Maroc et très peu le secteur manufacturier» Les inégalités des chances contribuent à hauteur de 26,4% à l inégalité des revenus salariaux» (HCP). La source majeure de l inégalité des chances résulte du système d éducation-formation. 31,3% de l inégalité totale est due à la différence entre les niveaux scolaires des chefs de ménages.
6 Les inégalités persistent au Maroc malgré la réduction de la pauvreté Entre 2002 et 2007, il y a eu creusement des inégalités : l indice de Gini s est aggravé, en passant de 0,393 à 0,408. Les inégalités ont un caractère structurel (étude 2011 du Haut commissariat au Plan sur la mobilité sociale intergénérationnelle) : le taux de la mobilité sociale ascendante est plus important parmi les hommes (43,7%) que parmi les femmes (17,9%) et plus répandu parmi les citadins 51,1% que parmi les ruraux (14,8%). La mobilité descendante frappe d abord et beaucoup plus les femmes et les ruraux que les hommes et les résidents des villes Inégalités des chances d accès à l emploi Taux de chômage : 1,16 millions d actifs 9,9% en 2014 (contre 8,9% en 2011) Inégalités selon le diplôme : 5 fois plus de risques de chômage pour les diplômés (22,5% que pour les non-diplômés (4,1%) Creusement des inégalités de consommation: les 10% des ménages les plus aisés consommaient en 2012 plus du tiers des dépenses de consommation (33,8%), contre 32,13% en 2001), et contre 30,95% en les dépenses de consommation des 10% les moins aisés représentaient 2,6% dépenses en 2012, idem en 2001 et 1999
7 Recommandations; éléments conceptuels Sortir de l idée fausse que la réduction du coût du travail ou sa déprotection seraient les facteurs efficients de sortie du chômage (indices «doing business») Sortir de l idée fausse selon laquelle réguler le marché du travail temporaire constituerait une entrave au développement du travail temporaire ; la nature du contrat de travail agit sur les conditions de travail et sur la rémunération et, affirme l OIT, «la multiplication des contrats de travail temporaires et de travail à temps partiel peut alimenter les inégalités selon la façon dont ils sont réglementés sur les marchés nationaux» Sortir de l idée fausse que les IDE sont intrinsèquement porteurs de mieux-être pour tous Sortir de l idée fausse la croissance réduit les inégalités et la pauvreté Reconsidérer l idée que les inégalités sont un coût politiquement neutre et socialement acceptable dans risque pour la stabilité et la sécurité
8 recommandations Renforcer les institutions du marché du travail, pour améliorer leur efficience : renforcer les attributions de la CNSS ; étendre le champ d action économique et financier des mutuelles ; renforcer le contrôle du respect de la législation du travail, et notamment le salaire minimum, la prévention du recours abusif aux contrats précaires et atypiques, le respect de la réglementation sur le temps de travail Renforcer le rôle et améliorer les moyens d action des institutions de redistribution des revenus (INDH, Ramed, CNSS, Mutuelles) en matière protection sociale ( pensions de retraite, transferts vers les chômeurs et les pauvres, développement des services de l économie sociale et solidaire) Améliorer les services publics : améliorer la régulation de l intermédiation privée du travail ; services de garderies et d éducation pour les enfants en bas âge). Respect des minima légaux et promotion de la négociation collective : ces deux facteurs agissent directement sur le niveau et la réparation des revenus. Ils réduisent les écarts dans la répartition salariale globale en permettant d élargir t le bas de la pyramide salariale
9 recommandations Amélioration du ciblage des politiques de redistribution et de compensation des prix : réévaluer l accès préférentiel, au profit des catégories pauvres et moyennes, aux services publics de base (transport, éclairage, eau potable, scolarité, logement à bas prix ) et aux produits de première nécessité (huile, sucre, farine, gaz ) Accorder des aides directes par ménage Repenser les dispositifs d incitation aux IDE : orienter les investissements vers les secteurs les plus productifs de l'économie, le manufacturier notamment; encourager les investissements étrangers dans les secteurs à forte intensité de main d'œuvre (agriculture, infrastructures, télécommunication, numérique); Repenser les critères d évaluation de la performances des administrations et des services publics, mieux redistribuer et mesurer l impact sur la réduction de la pauvreté
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