Les Aventures de Victor Vivarais

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1 Raymond Rochette Les Aventures de Victor Vivarais Publibook

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5 Du même auteur Reconnaissance de dettes, Publibook, Les Aventuriers de la Transsaharienne, Publibook, Le Chien d or, Publibook,

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7 Le bar «L horizon» Je déambule dans ma petite ville provençale d un bar à l autre. Au bout de la ville, un petit bar qui s appelle «L Horizon». Ce bar est fréquenté par des paumés, des homosexuels, des semi-prostituées, la drogue y circule. J ai pas mal bu. Faut dire que pour aller dans ce bar, vaut mieux avoir bu, tu rentres mieux dans l ambiance. J y entre. Tout de suite la musique m assourdit, du rap. Un couple au fond du bar danse sur cette musique. Je commande un pastis 51 à la serveuse. Elle me gratifie d un large sourire. Ses lèvres sont maquillées d un rouge à lèvres vif ; elle a un décolleté très plongeant ; quand elle se penche, on voit presque le bout de ses seins. Je bois mon pastis en regardant des filles habillées sexy quand une blonde aux yeux verts, vingt-cinq ans environ, vient vers moi, jolie quoiqu un peu maigrichonne. Elle me dit : T as l air sympa, tu m offres à boire? Qu est-ce que tu bois? Un whisky. Je commande un whisky à la serveuse. Je m appelle Hélène, et toi? Victor. Victor, c est joli comme prénom. Tu trouves Son verre servi, elle boit, me sourit et me dit : T es vraiment sympa. 11

8 Tu es gentille mais tu exagères. Tu ne me connais pas. Si, moi je vois tout de suite les braves gens. Tu peux me donner ton numéro de téléphone. Comme je suis ivre, je le lui donne. Elle l enregistre sur son portable. Elle me remercie, prend son verre et me plante là. Elle est allée rejoindre ses copains à l autre bout du comptoir. Je me dis qu elle a voulu boire un verre à l œil et pour me consoler je commande un autre 51. Non! Je n ai pas besoin d être frustré pour boire et je me fous que la blonde ait bu un verre sur mon compte. Je sors du bar en titubant. Je m en veux d avoir trop bu. Demain, je vais avoir un réveil difficile. Je suis chauffeur routier, ce qui n est pas un travail de tout repos et avec la fatigue due à l abus d alcool, la journée sera dure. 12

9 Château-Rouge Une semaine après, je ne pensais plus à la blonde, quand endormi dans la couchette de mon camion, j entends retentir la sonnerie de mon portable. Je regarde l heure, il est bientôt minuit. Je suis inquiet. Qui peut bien m appeler à cette heure-ci. Je porte le téléphone à mon oreille. J entends des pleurs et une voix féminine. Allô Victor? Oui, qui es-tu? Pourquoi tu pleures? Je suis Hélène. Hélène? Oui, le bar «L Horizon» Ah oui, Hélène qu est-ce qu il t arrive pour m appeler à cette heure-ci? Je suis prisonnière, me dit-elle avec des sanglots plein la voix. Prisonnière! Oui, on me séquestre. Ses pleurs augmentent ; elle ne peut presque plus parler. Où ça? Dans un château, le château du village de Château- Rouge. Qu est-ce que je peux faire pour toi? Quand tu auras une journée de libre, viens me voir. Mais tu dis qu on te séquestre! Ce n est pas vraiment ça, disons que certaines personnes m empêchent d être complètement libre. Viens au château et tu demandes Hélène. Château-Rouge, je sais où ça se trouve mais, ton château 13

10 À la sortie du village, sur ta droite, tu verras un château au sommet d une colline, c est là. Dimanche matin, ça te va? D accord, à dimanche matin. Tu sonneras et tu demanderas Hélène, me dit-elle d une voix joyeuse. Et elle raccroche. Elle est passée des larmes au rire en un clin d œil. Je suis songeur : ai-je affaire à une folle ou me prend-elle pour un con? Dimanche J aurais pu laisser tomber la blonde et aller boire l apéro avec les copains. Oui, mais voilà : j ai une conscience, moi. Quand je promets, je tiens parole. Ma vieille Peugeot 405 est une bonne voiture. Elle ne rechigne pas à monter la petite route de montagne qui mène au bled paumé portant le nom de Château-Rouge. Cette route me paraît ne plus finir. Un panneau : «Château-Rouge 1 km». Enfin! C est pas trop tôt. Le village apparaît. C est un petit village aux maisons éparpillées, pour la plupart des vieilles bâtisses. Perché sur une colline, un château. Une route encore plus étroite que la précédente m y conduit. Je gare ma voiture à côté d un lourd portail en fer qui donne accès au château. Une sonnerie est fixée à côté d une grande plaque en cuivre où est inscrit en toutes lettres : «Édouard de Château-Rouge» : un noble si on en croit le nom. J hésite à sonner. Je me demande ce que je fous là. Une sévère envie de foutre le camp. Allez! Un peu de courage, je sonne. J attends Quelqu un viendra-t-il m ouvrir? Si! Un type se pointe : costume noir, cravate noire sur chemise blanche. L homme a une soixantaine d années, il est maigre, avec des cheveux gris et rares. Il a un regard d une tristesse qu on dirait que toute la misère du monde vient de tomber sur ses chaussures. 14

11 Monsieur? me dit-il d une voix monocorde. Je voudrais voir mademoiselle Hélène. Qui dois-je annoncer? Victor Vivarais. Bien, attendez-moi ici. Au bout de deux ou trois minutes, «Triste Mine» se rapplique. Le portail s ouvre sur un grand parc ombragé par des grands platanes. Un chemin d une centaine de mètres va jusqu au château. Entrez. Je passe le portail. La blonde Hélène vient vers moi, les bras tendus avec un grand sourire. Elle m embrasse en me serrant fort. On dirait que ça fait vingt ans qu elle me connaît, alors que l on ne s est vus que quelques minutes dans un bar miteux. Seule sa bouche sourit, son regard est vide et mélancolique, ça m inquiète. Viens, me dit-elle, je vais te présenter Édouard, le propriétaire du château. Elle me conduit à l intérieur du château. Quel luxe! Accrochés aux murs, des tableaux, des tableaux de grands peintres si j en juge par la beauté des peintures. Dans un vaste salon, cinq personnes sont assises à une table, un homme d une cinquantaine et deux couples beaucoup plus jeunes. Ils boivent du champagne et sont sapés avec élégance. Du beau monde Hélène me présente au plus âgé : une belle gueule, mince, élégant. Édouard, voici Victor dont je t ai parlé. L homme me tend une main fine et molle. Enchanté, asseyez-vous. Que buvez-vous? Champagne, whisky? Ou alors j ai aussi de la bière et du pastis Cela se voit-il tellement que je suis un buveur de bière et de pastis? pensai-je. Pourtant j ai pris la précaution de 15

12 me vêtir correctement. Jean tout neuf, belle chemise rouge et baskets blanches impeccables. Pour moi ce sera un whisky, dit Hélène. Pareil pour moi. Édouard interpelle «Triste Mine» : Louis, emmenez-nous deux verres de whisky. Louis s exécute et remplit nos verres. Victor, je vous présente Christian et Patricia, Stéphane et Colette, dit Édouard en désignant les quatre autres personnes. Patricia et Colette sont deux belles femmes, Christian et Stéphane deux beaux garçons. Ils me regardent tous avec curiosité. Hélène, assise à côté de moi, avale son whisky et s en ressert un autre. Christian, chemise ouverte sur une chaîne en or, me dit : Je suis producteur de cinéma et de télévision. Je voudrais faire une expérience de jeux. Deux équipes s affronteraient sur plusieurs jeux différents : des jeux choisis par chacune des équipes et des jeux choisis au hasard. Êtes-vous sportif, Victor? Je l ai été. J ai été champion de France de boxe française poids léger. Ça, c est très intéressant, la boxe. Je veux faire cette expérience avant de la proposer à des chaînes de télévision. Je ferai filmer les jeux, comme ça les responsables des chaînes pourront les visionner. Des sportifs comme vous m intéressent. Ça fait un an que je n ai pas pratiqué, je n ai plus le temps de m entraîner. Si vous acceptez, vous serez rémunéré, me dit Édouard, venez dimanche prochain avec des amis de votre âge et sportifs si possible et nous parlerons de tout cela. Jouez-vous au poker? Non. 16