Les sanctuaires des provinces orientales aux époques hellénistique et romaine. CM3 L espace cultuel de Pétra

Transcription

1 Les sanctuaires des provinces orientales aux époques hellénistique et romaine CM3 L espace cultuel de Pétra

2 Problématiques Quels sont les différents types de monuments cultuels à Pétra? Comment étaient répartis les sanctuaires dans l espace urbain de Pétra et quels étaient les éléments qui définissaient le choix de ces emplacements?

3 Plan du cours I/ Présentation générale du site de Pétra II/ Religion et espace cultuel à Pétra

4 1 ère partie I/ PRÉSENTATION GÉNÉRALE DU SITE DE PÉTRA 1) Présentation géographique 2) Présentation historique 3) Organisation de l espace urbain

5 Carte royaume nabatéen

6 1) Présentation géographique Implanté dans un secteur particulièrement difficile pour une occupation humaine, le site de Pétra n était que plus rigoureusement soumis aux conditions imposées par le paysage. Centre commercial à vocation internationale, Pétra devait sa prospérité à sa situation au croisement de plusieurs pistes caravanières qui reliaient l'égypte à la Syrie et l'arabie du Sud à la Méditerranée, chargées principalement de produits de luxe (épices et soie en provenance d'inde, ivoire en provenance d'afrique, perles de la Mer Rouge et encens du sud de l'arabie).

7 Carte site de Pétra

8 Carte royaume nabatéen

9 2) Présentation historique Installation dans la région dès la première moitié du VII e millénaire avant notre ère. Premières traces d'installations sédentaires édomites sur le site de Pétra remontent à la fin du VIII e siècle av. J.-C. et du VII e siècle av. J.-C. La plus ancienne attestation des Nabatéens à Pétra remonte à 312 avant notre ère mais il devait être installé sur le site avant.

10 2) Présentation historique 1 ère phase de développement de la ville de Pétra se situe au III e siècle av. J.-C. Capitale du royaume nabatéen. 2 e phase (I er siècle av. J.-C. et le début du I er apr. J.-C.) : extension de l habitat vers les wadis proches de la ville basse et une monumentalisation du centre urbain avec la mise en place d un véritable espace public autour d une voie principale (cardo) et la construction des principaux monuments constitutifs d un centre urbain. 3 e phase (I er apr. J.-C. jusqu à l annexion romaine en 106) : embellissement et aménagement urbains 4 e phase : sous l occupation romaine : la ville continue à se développer dans un cadre romanisé. Elle a reçu le titre de «métropole» en 114. Elle demeure un important centre politique, économique et culturel jusqu au milieu du II e s. apr. J.-C.

11 3) Organisation de l espace urbain La topographie du site a fortement influencé l organisation de l espace urbain. Les vestiges étaient dispersés sur un espace d une dizaine de kilomètres de diamètre, avec sans doute une concentration au centre et des noyaux périphériques. Il est difficile de définir les limites précises de la ville.

12 3) Organisation de l espace urbain Le site naturel de Pétra était composé de plusieurs ensembles topographiques. La ville basse était entourée soit de massifs rocheux à sommet tabulaire dont les parois étaient de véritables falaises et dont les sommets étaient accessibles par des wadis étroits et abrupts, soit des massifs à terrasses étagées qui s élevaient progressivement depuis le centre. Le site était par ailleurs coupé en deux parties (nord et sud) par le Wadi Musa qui empruntait le Sîq, traversait la ville d est en ouest et se prolongeait à l ouest par le Wadi as-siyyagh.

13 Carte site de Pétra

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16 2 e partie II/ RELIGION ET ESPACE CULTUEL À PÉTRA 1) Une religion omniprésente 2) Classification des monuments cultuels 3) Typologie et fonction des monuments cultuels 4) La hiérarchisation de l espace cultuel

17 1) Une religion omniprésente Une religion polythéiste avec une multitude de divinités : d une part un panthéon de dieux plus ou moins anonymes et d autre part un panthéon organisé d un dieu principale Dushara/Dusarès + de 700 monuments cultuels à Pétra Grande variété des constructions : une multitude de monuments rupestres et quelques temples monumentaux

18 2) Classification des monuments cultuels Laïla Nehmé a établi une typologie des monuments cultuels qui repose sur trois critères de classement : Le premier considère les sanctuaires du point de vue des éléments qui le composent. Le second critère de classement s intéresse quant à lui à la position des sanctuaires. Le troisième critère de classement relève, quant à lui, du contexte archéologique dans lequel se trouvent les sanctuaires.

19 a) Les éléments qui composent les sanctuaires Ils sont multiples et variés : niches, bétyles, môtab-s, autels, chambres rupestres, salles de banquets cultuelles, plates-formes aménagées, gradins à offrandes, cupules, bassins, citernes. La composition des monuments cultuels est très variée : trois grands cas de figure s offrent à nous : Un monument isolé (ex. : un temple, une niche, une chambre cultuelle) Un groupe de monuments de types différents (ex. : un temple + une chambre ; une chambre + 3 niches ) Un groupe de monuments du même type (ex. : 5 niches)

20 b) La position des sanctuaires On trouve des sanctuaires dans chacun des éléments qui composaient le milieu naturel original et accidenté du site de Pétra : Au sommet des massifs tabulaires : Ces massifs accueillent les sanctuaires appelés «hauts-lieux» Sur les terrasses intermédiaires des massifs étagés : elles accueillent de petits sanctuaires au rayonnement local, pas de voies processionnelles pour y accéder Le long des wadis principaux : ces aménagements cultuels appartiennent à un type bien particulier de monuments puisqu il s agit presque exclusivement de petits oratoires composés de niches vides ou à bétyles et de bétyles isolés ou multiples. Leur présence sur les rives d un wadi constitue la preuve que celui-ci a servi d itinéraire, de voie processionnelle pour accéder à un sanctuaire. Le long des wadis secondaires : Ces sanctuaires ne sont pas visibles depuis le wadi principal, ce qui traduit une volonté manifeste de ne pas révéler l existence d un sanctuaire et donc de préserver la tranquillité des cultes rendus aux divinités. Par exemple, les deux sanctuaires d Isis. Sur le pourtour de cirques rocheux : Dans les mamelons sont taillés divers aménagements qui utilisent en commun la cour.

21 Au sommet des massifs tabulaires : les hauts-lieux

22 Haut-lieu de terrasse intermédiaire al- Habis

23 c) Le contexte archéologique Le contexte dans lequel apparaissent des monuments cultuels est diversifié. Celui-ci a une incidence sur la fonction de ces monuments et sur le public qui y a accès. Sur une voie processionnelle : il s agit des oratoires qui ponctuent l itinéraire d accès à un sanctuaire plus important. Comme les niches taillées à intervalles plus ou moins réguliers le long de l escalier d accès à un sanctuaire plus important. Sur une piste caravanière : à proximité de pistes. Ils devaient alors être surtout fréquentés par les voyageurs qui l empruntaient. Dans un secteur à dominante cultuelle Dans un secteur à dominante domestique : ils peuvent être soit associés à l habitat ou à proximité d habitat Dans un secteur à dominante funéraire Isolé : les hauts-lieux et quelques petits sanctuaires

24 Sur une voie processionnelle: la montée vers le haut-lieu du Jabal al-nmeir

25 Sur une piste caravanière

26 Dans un secteur à dominante cultuelle Sommets de massifs, lieu d installation privilégié des hauts-lieux Des voies d accès à ces hauts-lieux, sous la forme d itinéraires processionnels Des secteurs isolés aménagés en sanctuaires

27 Dans un secteur à dominante domestique Un complexe d'habitation troglodyte avec des chambres rupestres associées à des éléments à caractère cultuel : citernes, terrasses, escaliers, niches et un triclinium (salle de banquet).

28 Dans un secteur à dominante funéraire

29 3) Typologie et fonction des monuments cultuels On peut établir une typologie simplifiée des monuments cultuels : Les temples construits Les hauts-lieux Les niches cultuelles Les chambres rupestres Les salles de banquet

30 Les temples construits Des temples construits de forme rectangulaire sont identifiables à plusieurs endroits du site mais les plus connus sont ceux de la ville basse : Qasr al Bint, temple dit «aux lions ailés «, Great Temple.

31 Les temples construits Le rôle de ces temples dans l espace cultuel de Pétra, est très différent de celui que jouent les sanctuaires rupestres. Qu ils soient construits dans le centre monumental ou dans les secteurs périphériques, ils résultent non pas d initiatives individuelles mais du pouvoir royal ou municipal. Ils constituent un pôle d attraction et un centre de ralliement pour les populations habitant les secteurs périphériques de l agglomération principale.

32 Les hauts-lieux Chacun des massifs qui entourent la ville de basse de Pétra présentent sur leur sommet un ou plusieurs sanctuaires. Ces sanctuaires sont appelés des «hauts-lieux». C est-à-dire un sanctuaire rupestre et à ciel ouvert, généralement composé de plusieurs éléments de types différents. Ils ont pour point commun une position topographique dominante et bénéficient d un territoire d accès privilégié, sous la forme de rampes ou d escaliers taillés dans le rocher.

33 Madhbah : obélisques

34 Haut-lieu du Madhbah

35 Haut-lieu du Madhbah

36 Haut-lieu du Madhbah

37 c) Les niches : les monuments cultuels les plus fréquents Deux groupes distincts : Les niches isolées Les groupes de niches

38 Les niches isolées dans un contexte domestique : elles jouent le rôle d oratoire domestique et mettent l habitation sous la protection de la divinité dans un contexte funéraire : elles sont destinées à mettre en valeur le tombeau à côté duquel elles sont taillées sous la protection de la divinité que représente le ou les bétyles contenu(s) dans la niche. sur une voie processionnelle : elles sont taillées le long des abords immédiat de la voie et en affirment le caractère sacré indépendante : il faut sans doute les considérer comme des manifestations de la religiosité d individus isolés habitant le secteur dans lequel elles se trouvent faisant partie d un monument cultuel ou associé à un monument de type cultuel : Dans les chambres rupestres la présence de niches donne à la chambre son caractère cultuel. Dans les salles de banquet donne la fonction cultuelle du lieu.

39 Les groupes de niches Groupe de plusieurs niches (2 à une centaine) : on peut supposer qu elles n ont pas toutes été taillées en même temps. La niche principale a entraîné la construction des autres niches. Ex : défilé du Sîq Groupe de moins de 5 niches : il est vraisemblable qu il constitue des sanctuaires consacrés à une divinité particulière et qu ils étaient fréquenté soit par des individus isolés, soit par des confréries organisées qui se réunissaient pour des banquets sacrés dans les salles prévues à cet effet. Ex : Sanctuaire de Sadd al- Mreriyyeh ; sanctuaire d Umm al-biyârah.

40 Le défile du Sîq

41 Quelques niches gravée sur les parois du Sîq

42 Sanctuaire de Sadd al-mreriyyeh

43 Sanctuaire de Sadd al-mreriyyeh

44 Sanctuaire Umm al-biyârah

45 d) Chambres rupestres jouant le rôle de chapelle cultuelle Elles sont considérées comme chambre cultuelle car elles contiennent au moins un élément cultuel du type bétyle ou autel, quelle que soit sa forme (gravé ou sculpté, dans un niche ou non). Par opposition, toute chambre contenant une à douze niches vides est considérée comme habitation. Les niches constituent des placards. En appliquant ce critère, 33 chambres cultuelles ont été identifiées.

46 Chapelle d Obodas

47 e) Salles de banquet Les salles de banquet ne constituent pas un monument cultuel à part entière mais elles entrent dans la composition de nombreux monuments cultuels. 111 salles de banquet ont été identifiées sur le site de Pétra, une grande partie d entre elles ont un caractère cultuel. Certaines salles de banquet ne sont pas véritablement associées à des sanctuaires mais simplement à une ou deux niches à bétyles qui suffisent à lui conférer un caractère cultuel.

48 Carte répartition des monuments religieux

49 e) Salles de banquet Ce sont des biclinium (2 banquettes), triclinium (3 banquettes) ou stibadium (en forme de fer à cheval) Ces salles de banquet, sont couvertes ou hypèthres. Elles servent aux repas pris en commun à l occasion des cérémonies religieuses ou commémoratives.

50 Salles de banquet : chapelle d Obodas Triclinium rupestre couvert

51 Salles de banquet : chapelle d Obodas Triclinium hypèthre (espace construit en plein air)

52 4. La hiérarchisation de l espace cultuel L espace de Pétra était aussi un espace religieux. On trouve, sur toute la surface du site, mais répartis d une façon inégale, un très grand nombre de vestiges qui vont de simples dédicaces à des divinités aux grands temples du centre de la ville. Afin d expliquer la répartition des édifices cultuels, il faut tenir compte de critères multiples comme la topographie du site, la typologie des sanctuaires, les divinités qui y étaient honorées et le public qui les fréquentait.

53 4) La hiérarchisation de l espace cultuel La répartition des lieux de culte semble fondée sur une dichotomie dont les quatre termes se combinent entre eux : espace public/espace privé ; espace collectif/espace individuel. On peut répartir ainsi l espace cultuel : L espace public L espace cultuel privé et collectif L espace cultuel privé et individuel

54 4) La hiérarchisation de l espace cultuel L espace public regroupe les haut-lieux et les temples. Ceux-ci résultent non pas d initiatives individuelles, mais, sinon du pouvoir municipal, ou même royal, du moins d un clan. Ils sont peu nombreux et constituent un pôle d attraction et un centre de ralliement pour les populations habitant les secteurs périphériques de l agglomération principale. Ils sont répartis sur le site selon une trame assez régulière : les temples dans la ville basse et un haut-lieu, ou presque, sur le bord de chacun des massifs qui l entourent. L espace public est donc organisé à partir d un centre d où rayonnaient les voies processionnelles qui conduisaient aux hauts-lieux.

55 4) La hiérarchisation de l espace cultuel Le second type d espace cultuel est privé et collectif et se subdivise en trois sous-catégories : La première est commune à un groupe de personnes habitant dans un même lieu. Il est constitué de sanctuaires domestiques et de hauts-lieux de terrasses intermédiaires. Il s agit en quelque sort de «sanctuaires de quartier». La seconde est commune à un groupe de personnes vénérant la même divinité. La troisième est commune à un groupe de personnes appartenant à un groupe social particulier qui fréquentait un espace réservé à cet usage.

56 4) La hiérarchisation de l espace cultuel Le troisième type d espace cultuel enfin est privé et individuel. Il regroupe tous les petits monuments cultuels isolés, niches, bétyles, autels et autres petits monuments qui sont omniprésents sur le site. >> on peut imaginer que ces monuments isolés constituent des offrandes individuelles.

57 4) La hiérarchisation de l espace cultuel L aspect le plus frappant de l espace cultuel de Pétra est sa hiérarchisation ; en effet, les très nombreux sanctuaires de la ville étaient fréquentés par des groupes d importance inégale et sans doute à des occasions différentes. De plus, on peut penser que la fréquentation des sanctuaires définissait en partie le choix de l emplacement du sanctuaire.

58 4) La hiérarchisation de l espace cultuel Le Qasr al Bint : un sanctuaire fédérateur? Situé à la convergence des voies d accès à la ville, et visible des quatre points cardinaux, le temple est remarquablement implanté au bout de l axe principal est-ouest, en effet, le Sîq aboutit à la porte monumentale de son téménos. Il est aussi un pôle de ralliement des pistes caravanières aboutissant au centre ville. >> temple fédérateur et rayonnement international

59 Le Qasr al Bint