Jardins d ici. terrasses fertiles. de Xavier Robin

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Patrice Ménard
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1 terrasses Les fertiles de Xavier Robin

2 Comme Xavier Robin, apprenez à maîtriser les contraintes de votre terrasse pour y installer un jardin potager. À vous tomates, aubergines, haricots, fraises et même pêches! Texte et photos : Frédérique Basset Contre les limaces, si la barrière de cendre récupérée dans son barbecue n a pas eu l effet escompté, Xavier Robin passe à la vitesse supérieure et remplit des coupelles de bière où les gastéropodes viendront se noyer. Faire son potager sur une terrasse peut sembler une gageure. Les conditions, il est vrai, ne sont pas optimales, car les plantes doivent s adapter à un milieu qui n est pas prévu pour elles. Cultiver hors sol sur une petite surface implique donc des adaptations à de multiples contraintes. CARTOGRAPHIER SA TERRASSE Mais rien n est impossible à qui a la fibre végétale! C est le cas de Xavier Robin. Chargé de l environnement à la mairie de Villefontaine en Isère, membre fondateur d une Amap, Xavier est un jeune écologiste convaincu qui a toujours cultivé un petit coin de potager, dans un jardin ou sur une terrasse. Installé à Villefontaine depuis dix ans, il a emménagé en août 2009 dans un appartement doté de deux terrasses de 22,5 m 2 chacune. Sur chaque terrasse, une jardinière en pierre d 1,20 m de large, 5 m de long et 70 cm de profondeur, soit environ 6 m 2, a été intégrée dès la construction. Si l on compte tous les bacs et pots qu il a ajoutés, il dispose d environ 10 m 2 de culture par terrasse. «Avant de commencer mon potager, explique-t-il, j ai cartographié les microclimats de mes deux terrasses. J ai identifié les endroits exposés à la pluie, au soleil et à l ombre ainsi que les vents dominants. J ai d autre part réalisé l aménagement dans une approche écosystémique : j ai construit un bassin avec des palettes recouvertes d une bâche qui a le double avantage de créer un microclimat et d attirer les libellules. J ai installé une prairie sauvage (1,50 m x 1,50 m) pour inviter les insectes pollinisateurs, en laissant pousser la végétation spontanée et en semant des graines de géranium, graminées, lin, fleurs des champs J ai également fabriqué des abris à insectes des bûches percées et des nichoirs pour les oiseaux et les chauves-souris. J ai installé des pots de fleurs renversés avec de la paille pour les perce-oreilles, un petit monticule de cailloux pour les lézards, un fagot de paille, un tas de bois sec que je laisse se décomposer et qui plaît bien aux carabes.» OPTIMISER L ESPACE Ces aménagements effectués, Xavier Robin avait encore à gérer de nombreuses contraintes. «La principale, c est l espace, confirme-t-il. Il faut trouver des as- Les 4 Saisons

tuces pour gagner un maximum de place, jouer sur la densité, la culture verticale, l utilisation du moindre mètre carré.

3 Arroser le sol et les murs (ci-dessus) permet de faire tomber la température de la terrasse qui peut atteindre jusqu à 40 C en été! Autre péoccupation de Xavier Robin : le poids des bacs et des jardinières. Ceux-ci sont en matériaux composites voire en plastique, moins lourds que la traditionnelle terre cuite (à droite). tuces pour gagner un maximum de place, jouer sur la densité, la culture verticale, l utilisation du moindre mètre carré. Je plante mes concombres en espalier et je cultive les radis, dont les racines ne sont pas profondes, dans de petits bacs. Cela me permet d économiser la terre des jardinières pour d autres plantes qui ont besoin de plus de profondeur. Je plante les fraisiers en surdensité : les pieds sont à 10 à 15 cm les uns des autres, au lieu de 20 à 30. Les fruits sont un peu moins gros, mais la quantité est plus importante. En plus, cela m évite de désherber. J ai créé une palissade de haricots à rames face au sud, qui dispense une ombre naturelle et, à leurs pieds, j ai mis des tomates et de la salade qui profitent de l ombre des haricots, ce qui me permet de ne faire qu un seul arrosage au lieu de deux. J ai également planté des tomates en haies palissées, en laissant une vingtaine de centimètres seulement entre chaque pied.» L EAU, UN CASSE-TÊTE Outre l espace, il faut penser au poids des bacs et de la terre. Chez Xavier Robin, les jardinières étant intégrées à la structure des terrasses, le poids de la terre a été prévu dès la construction. Ce qui n est pas le cas pour les pots et jardinières. «Pour peser le moins possible sur le sol, j ai choisi des bacs en plastique ou en matériau composite, plus légers que la terre cuite. Au fond, je mets des billes d argile : elles évitent de charger la terrasse tout en maintenant l humidité.» La gestion de l eau est en effet un casse-tête sur une terrasse, car dans cet espace ultra minéral, la température peut atteindre 40 C en été! Le sol renvoie alors la chaleur qui grille les racines des plantes. «J utilise plusieurs stratégies pour conserver l humidité, dont je surveille le niveau tous les jours. Le soir, j arrose le sol et les murs pour faire baisser la température. Les deux-tiers des terrasses étant occupés par les pots et jardinières, les dalles sont 62 Les 4 Saisons 199

presque toutes recouvertes par la végétation. Au moment de la plantation, je stresse hydriquement les plantes pour qu elles soient plus résistantes à la sécheresse.

4 presque toutes recouvertes par la végétation. Au moment de la plantation, je stresse hydriquement les plantes pour qu elles soient plus résistantes à la sécheresse. Je récupère le broyat des espaces verts de la ville que j épands sur toutes les surfaces cultivées pour les protéger de la chaleur. J ai multiplié la végétation pour avoir un maximum d ombres portées, et installé des plaques de lino sous les pots afin de les isoler du sol cela coupe le pont thermique.» Au printemps, Xavier Robin prépare ses semis dans des bacs qu il peut déplacer en fonction de la température, afin de leur offrir la meilleure exposition possible et les protéger du gel. «Je récupère les graines de tomates d une année sur l autre. Pour les autres légumes, je participe au troc de printemps qu organise la ville où se retrouvent environ deux cents jardiniers.» Sur ses terrasses, il cultive tout ou presque! Dans son jardin d aromatiques, il y a de la mélisse, de l oseille, de la ciboulette, du basilic, du thym, de la sauge, de la citronnelle, du persil, du romarin, de la menthe, de l estragon et de l origan. Il a planté dix-sept pieds de tomates de dix variétés différentes : Saint- Pierre, Evergreen, Noire de Crimée, Cornue des Andes, Cœur de Bœuf, des aubergines, fraises, haricots rames, groseilles, groseilles à maquereaux, framboises, concombres, courges, piments, poivrons, radis, salades, carottes, courgettes, sans oublier les fruits de son pêcher et de son prunellier! À la création de son potager, Xavier Robin a étudié tous les recoins de sa terrasse pour définir les zones d ombre et de soleil, celles exposées à la pluie ou aux vents dominants. Il a par ailleurs construit un bassin qui génère un micro climat et favorise la biodiversité. Les 4 Saisons

Pour gérer l espace, Xavier Robin joue sur des encombrements horizontaux et verticaux et sur les densités de plantations. Compostages de saison Xavier Robin utilise deux techniques de compostage.

5 Pour gérer l espace, Xavier Robin joue sur des encombrements horizontaux et verticaux et sur les densités de plantations. Compostages de saison Xavier Robin utilise deux techniques de compostage. En été, il pratique uniquement un lombricompostage dans un silo en plastique qu on trouve sur internet et composé de plusieurs plateaux troués qui s emboîtent et d un robinet de sous tirage des jus. Le compost fait par les lombrics est facile à écouler (peu de volume, facile à utiliser), mais les jus sont plus problématiques : très riches, ils peuvent tuer les végétaux. Xavier Robin les dilue et les écoule en désherbant. En hiver, il recourt surtout au compostage en tas sur l emplacement où il prévoit d installer ses courges la saison suivante. PRÉVENTION ET OBSERVATION Xavier a choisi de cultiver en bio et donc de privilégier des méthodes préventives. «Quand j ai emménagé dans cet appartement, la terre sableuse et calcaire des jardinières récupérée du chantier de construction de l immeuble n était pas très fertile. J ai un lombricomposteur dont j utilise le jus (dilué à 10%) comme engrais car il est riche en azote (voir encadré) et, vu le volume de compost que j ai besoin, je récupère beaucoup de compost industriel que ma commune produit avec les déchets d espaces verts. J envisage aussi l acquisistion d un composteur rotatif à manivelle : le procédé semble intéressant. Je me sers de la cendre du barbecue pour faire une barrière défensive qui dissuade les limaces de venir sur les plantes. Si, malgré tout, elles franchissent cette barrière, je remplis des coupelles de bière où elles viennent se noyer. J utilise aussi les plantes compagnes, comme la capucine, qui attirent les pucerons sur elles. Je m appuie beaucoup sur l observation avant d intervenir. Par exemple, j ai eu des pucerons sur les haricots, mais j ai remarqué la présence de coccinelles : je les ai donc laissées faire leur boulot! De petites chenilles vert clair à la tête noire se sont attaquées à mon prunellier. J ai taillé au sécateur tous les endroits où elles avaient fait des nids que j ai ensuite brûlés. Ces pratiques demandent un peu plus de travail manuel, mais pas plus de temps, et sans doute moins que si j avais recours aux produits chimiques, car la surveillance mène à la prévention. Et la prévention est le meilleur des remèdes pour éviter les maladies et l invasion des prédateurs!» 64 Les 4 Saisons 199

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