TRIBUNAL DU TRAVAIL DE MONS Section de Mons 7000 MONS Rue de Nimy, 70
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1 1 er feuillet TRIBUNAL DU TRAVAIL DE MONS Section de Mons 7000 MONS Rue de Nimy, 70 JUGEMENT PRONONCE A L AUDIENCE PUBLIQUE DU 19 AVRIL 2010 R.G. n 09/172/A Rép. A.J. n La 4 ème chambre du Tribunal du travail de Mons, section de Mons, après en avoir délibéré, a rendu le jugement suivant : EN CAUSE DE : B. Sabrina ; PARTIE DEMANDERESSE AU PRINCIPAL PARTIE DEFENDERESSE SUR RECONVENTION, comparaissant en personne, assistée de Mme LOVECCHIO, déléguée syndicale CSC Mons, munie de procuration écrite ; CONTRE : S.A. CORA, (BCE n ), ayant son siège social à 6040 CHARLEROI, Zoning Industriel, 4 ème Rue; PARTIE DEFENDERESSE AU PRINCIPAL, PARTIE DEMANDERESSE SUE RECONVENTION, représentée par Me Marie-Paule GOMREE, Avocat à Bruxelles. 1. Procédure. Le dossier du Tribunal contient, notamment, les pièces suivantes : la requête introductive d instance de Mme B. entrée au greffe le 15 janvier 2009 ; les conclusions de la SA CORA déposées au greffe le 16 janvier 2009 ; les conclusions additionnelles et de synthèse de la SA CORA déposées au greffe le 27 mai 2009 ; les conclusions de Mme B. reçues par fax au greffe le 27 août 2009 ; les secondes conclusions additionnelles et de synthèse de la SA CORA déposées au greffe le 27 octobre 2010 ; les conclusions de synthèse de Mme B. déposées au greffe le 28 décembre 2009 ; le dossier de pièces de chacune des parties. La cause a été fixée à l audience du 15 m ars 2010 par ordonnance prise en application de l article 747, 2 du Code judiciaire. Lors de l audience du 15 mars 2010, le Tribunal a entendu les parties et appliqué, sans succès, l article 734 du Code judiciaire.
2 2 ème feuillet Il a été fait application de la loi du 15 juin 1935 sur l emploi des langues en matière judiciaire. 2. Objet des demandes. - a - Contestant son licenciement pour motif grave, Mme B. poursuit la condamnation de la SA CORA à lui payer une indemnité compensatoire de préavis de 2.728,32 bruts. Elle sollicite également les intérêts moratoires et judiciaires à dater du 16 janvier 2009 ainsi que la délivrance d une fiche de salaire à peine d astreinte. - b - La demande reconventionnelle de la SA CORA tend à obtenir la condamnation de Mme B. à lui payer 250,00 de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi suite aux manquements commis par son ex-employée, sur un montant évalué à 2.000, Contexte du litige et position des parties. - a - Entre janvier 2003 et décembre 2006, Mme B. travaille pour compte de la SA CORA dans le cadre de divers contrats de travail à durée déterminée. Le 22 décembre 2006, la SA CORA et Mme B. signent un contrat de travail à durée indéterminée prenant cours le 3 janvier Ce contrat est à temps partiel (mi-temps) et horaire variable. L employée est engagée pour prester en qualité «d employé de base «livre service» catégorie 3». Concrètement, elle exerce les fonctions d hôtesse de caisse. Par courrier recommandé du 16 janvier 2008, la SA CORA met immédiatement fin au contrat de travail, sans préavis ni indemnité, pour motif grave. Par courrier recommandé du 19 janvier 2008, la SA CORA dénonce les motifs ayant justifié la rupture du 16 janvier. En résumé, il est reproché à Mme B. d avoir, le 14 janvier 2008 vers 16h20, délibérément omis de pointer différents produits au profit d une amie-collègue. L opération frauduleuse portait sur une poussette enfant de 39,99, un paquet de café de 3,05 et un paquet de mentos de 0,90. Ces faits ont été constatés par un agent de sécurité et reconnus par la «bénéficiaire», Mme P. Mme B. conteste ces faits. - b - Mme B. réfute toute faute grave et postule la condamnation de son exemployeur à lui payer une indemnité de rupture de 2.728,32 bruts. Mme B. conteste avoir délibérément omis de pointer la poussette enfant qui lui a été présentée par Mme P. Elle explique avoir entendu le «bip scanner» et
3 3 ème feuillet pensé de bonne foi que l article avait été enregistré. Elle a continué à scanner les autres articles sans se rendre compte de l erreur technique. Mme B. fait également valoir que les deux autres articles n ont pas été présentés à la caisse par Mme P. Mme B. soutient aussi qu il n y avait pas impossibilité définitive de poursuivre les relations de travail puisqu elle a pu travailler le matin de son licenciement, lendemain des faits. D autre part, Mme B. conteste la version des faits donnée par Mme P. le 15 janvier et, par après, dénoncée par celle-ci. A propos de la demande reconventionnelle de la SA CORA, elle conclut à son non fondement en l absence de faute et de dommage. - c - La SA CORA entend justifier la rupture pour faute grave en se référant aux faits constatés par l agent de sécurité, les «aveux» de Mme P. et l invraisemblance des explications de son ex-employée. La SA CORA introduit une demande reconventionnelle afin d obtenir réparation des dommages subis suite à la fraude de Mme B. 4. Position du Tribunal La demande principale de Mme B. - a - Selon l article 35 de la loi du 3 juillet 1978, chacune des parties peut résilier le contrat sans préavis pour un motif grave. Est considérée comme constituant un motif grave, toute faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre l employeur et le travailleur (cf alinéa 2). Il est encore précisé à l alinéa 8 de cet article 35 que la partie qui invoque le motif grave doit prouver la réalité de ce dernier. Le vol ou, d une manière plus générale, toute fraude justifie le licenciement pour faute grave en raison de l atteinte portée à la confiance nécessaire devant exister dans les relations entre l employeur et le travailleur. La valeur du vol ou du détournement n a pas, en elle-même, d importance puisque le fait essentiel est la perte de la confiance. Il en va, tout particulièrement, ainsi dans les grandes surfaces exposées au risque de vols et où l employeur doit pouvoir compter sur l honnêteté de ses préposés. - b - La faute grave imputée à Mme B. est établie. D une part, il est établi que Mme B. n a pas scanné la poussette enfant que Mme P. a présenté à sa caisse le 14 janvier 2008 à 16h20.
4 4 ème feuillet Mme P. a été interpellée dès après son passage à la caisse. L agent de sécurité a constaté que trois articles (poussette enfant, paquet de café & paquet de mentos), non repris au ticket de caisse, n avaient été ni enregistrés ni, à fortiori, payés. Suite à ce contrôle, Mme P. a restitué deux articles (café & mentos) et payé la poussette enfant. Elle a signé un document (constat n 1029 pièce 5 du dossier de l employeur) dans lequel elle reconnaît les faits dont les modalités reprises sont : «ne pas avoir présenté la marchandise» et «avoir dissimulé la marchandise». Rien ne démontre que les paquets de café et de mentos ont été effectivement présentés à la caisse tenue par Mme B. Il n est pas exclut que ces articles aient été dissimulés par Mme P. de telle sorte que Mme B. ignorait qu il y avait vol. Cela expliquerait d ailleurs la référence à la dissimulation de marchandise au constat signé par l auteur du vol. Il n en va pas de même de la poussette enfant. Ce volumineux article a bien été présenté à la caisse mais n a pas été scanné. Mme B. explique avoir bien «scanné» cet article et entendu le «bip» mais que suite à un problème technique il n a pas été enregistré. Elle ajoute que les «scanners» des caisses connaissaient régulièrement de tels problèmes, à savoir que la caisse n enregistrait pas un article le premier parce que non prête au moment du début des opérations. Les explications de Mme B. ne sont pas crédibles. Tout d abord, la SA CORA explique que le son émis en cas de «scanning» d un article est clairement différentiable de celui émis par une caisse qui refuse d entamer les opérations. Ensuite, une caisse ne fonctionnant pas émet un message clair quant à son nonfonctionnement. Aucune erreur d interprétation n est possible. De toute façon, il appartenait à l hôtesse de caisse d être attentive en particulier pour le 1 er article présenté au bon enregistrement de l article scanné et de vérifier la concordance du ticket avec les articles présentés. L «erreur de bonne foi» est d autant moins crédible que l article litigieux est très volumineux et que sa valeur (39,99 ) est quasiment égale au total de la valeur des 23 articles scannés (43,18 ). La circonstance que les faits surviennent en période de solde où les prix peuvent varier à la baisse est indifférente à la réalité de la faute de l hôtesse de caisse qui n a pas scanné un article, fait qui ne pouvait échapper à son attention. D autre part, Mme P. a reconnu le caractère frauduleux des faits non seulement dans son chef mais également dans celui de Mme B. Le lendemain des faits litigieux - soit le 15 janvier -, Mme P. a été entendue par son employeur la firme de travail intérimaire en présence du directeur du CORA où elle travaillait en intérim. A cette occasion, elle a rédigé deux attestations dans lesquelles elle reconnaît [1] utiliser une carte de fidélité qui n est pas la sienne mais aussi [2] recourir à un système de fraude entre collègues. Ce système de fraude consiste à scanner un article et ensuite à annuler l opération. Elle explique en avoir fait bénéficier des collègues, dont Mme B., en sorte que «ce qui c passez était un retour des choses».
5 5 ème feuillet Mme P. a ensuite fait volte face et prétendu avoir subi des pressions pour rédiger ces attestations. Elle a même déposé avec Mme B. une plainte, classée sans suite par l Auditorat du travail. Cependant, le Tribunal constate que Mme P. a donné des exemples d articles volés (dvd, lingerie féminine & foie gras). Or, la SA CORA a, après recherche, retrouvé des opérations litigieuses de décembre 2007 portant sur les articles cités par Mme P. Les attestations de Mme P. sont donc conformes à la réalité puisque corroborées par les vérifications de l employeur. Le Tribunal retient que Mme B. a délibérément participé à une fraude au profit d une amie-collègue en s abstenant sciemment d enregistrer un article présenté par cette amie-collègue. - c - Mme B. prétend que cette faute ne rendait pas immédiatement et définitivement impossible la relation de travail au motif que son employeur l a laissé travaillé le matin de son licenciement. Ce moyen ne peut être accueilli. L employeur dispose, à partir de la connaissance des faits, de trois jours pour procéder au licenciement pour faute grave. En l espèce, les faits sont survenus le 14 janvier à 16h20 et le licenciement est intervenu le 16 janvier. Le délai légal est bien respecté. D autre part, il convient de rappeler que l employeur a la charge de la preuve et que le délai de trois jours ne peut courir qu à partir de la connaissance certaine des faits litigieux. En l espèce, la SA CORA ne pouvait avoir connaissance certaine de la participation de Mme B. au vol qu après avoir obtenu les explications de Mme P. Vu l importance d un licenciement pour faute grave (en particulier pour vol), l employeur pouvait légitimement attendre l audition de Mme B. pour prendre la décision de licencier. - d - Le licenciement pour faute grave de Mme B. est justifié. La demande (principale) de Mme B. est non fondée La demande reconventionnelle de la SA CORA. La demande reconventionnelle de la SA CORA n est pas fondée. Si la fraude - et donc la faute - de Mme B. est établie, l employeur n a subi aucun dommage. Deux des trois articles volés ont été restitués (paquets de café & de mentos), le troisième (la poussette enfant) étant payé après interpellation.
6 6 ème feuillet 4.3. Les dépens. Les dépens sont mis à charge de Mme B. L indemnité de base de 650 peut être accordée. PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL, Statuant contradictoirement, Dit la demande (principale) de Mme B. recevable mais non fondée. Dit la demande (reconventionnelle) de la SA CORA recevable et non fondée. Condamne Mme B. aux dépens, liquidés en faveur de la SA CORA à 650. Ainsi jugé par la 4ème chambre du Tribunal du travail de Mons, section de Mons, composée de : Ph. LECOCQ, Vice-Président du Tribunal, présidant la 4ème chambre; Ch. DESAMORY, Juge social au titre d employeur ; L. PERONE, Juge social au titre de travailleur employé ; D. MAISTRIAU, Greffier.
comparante par Maître MILLIARD, avocat au barreau de NOUMÉA,
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