abc article original A. Bibi 1 S. Benmoussa 1 A. Torjman 2 N. Taboubi 1 F. Ouali 1 H. Cherif 1 L. Hamzaoui 2 T. Messaoud 1 B. Zouari 3 S.
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- Marc-Antoine St-Jacques
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1 abc Ann Biol Clin 2006 ; 64 (6) : Intérêt de la dissociation albumine-transferrine (DAT) dans le diagnostic de la carence martiale dans une cohorte de écoliers dans une région du grand Tunis Difference albumin-transferrin interest in the iron deficiency detection in a cohort of 1288 schoolchildren in the district of Tunis A. Bibi 1 S. Benmoussa 1 A. Torjman 2 N. Taboubi 1 F. Ouali 1 H. Cherif 1 L. Hamzaoui 2 T. Messaoud 1 B. Zouari 3 S. Fattoum 1 1 Laboratoire de biochimie clinique, hôpital d enfants, Tunis <slaheddine.fattoum@rns.tn> 2 Direction régionale de la santé publique de Ben Arous 3 Laboratoire de médecine préventive, Faculté de médecine de Tunis Résumé. La carence martiale constitue la carence nutritionnelle la plus fréquente quelle que soit la région du globe. Elle touche préférentiellement les enfants en bas âge, en période de croissance ainsi que les femmes en âge de procréer, enceintes ou allaitantes. Dans cette étude, nous nous proposons d évaluer la fréquence de la carence martiale dans une population de enfants scolarisés âgés de 11 à 14 ans en étudiant l apport de tests classiques du bilan martial (fer, transferrine, ferritine, hémogramme), ainsi que d un profil protéique inflammatoire (PPI) qui permet l expression de certaines protéines en pourcentage des valeurs normalisées pour l âge et le sexe. Au cours de la carence martiale, la synthèse de la transferrine est augmentée alors que celle de l albumine ne varie pas, il en résulte une dissociation albumine-transferrine (DAT) révélatrice de carence martiale. Le diagnostic de carence martiale a été posé sur la présence d une hypoferritinémie (< ng/ml) et/ou d une DAT > 28 %. Les résultats de la ferritine ont permis d identifier 33,8 % d enfants carencés ; l analyse des données de la DAT a révélé par ailleurs 12,8 % de sujets présentant une carence martiale parmi la population ayant des valeurs normales de ferritine. Les performances diagnostiques de ces deux tests ont été évaluées par rapport à celle de la carence martiale définie par une augmentation du récepteur soluble de la transferrine (RsTf) dans deux groupes de sujets, présentant ou non une inflammation biologique. L efficacité diagnostique de la DAT reste inchangée dans les deux situations. De par sa situation privilégiée dans le métabolisme du fer, la ferritinémie est le test à pratiquer en première intention afin d évaluer cette carence. Toutefois, son interprétation reste parfois délicate et demande un complément d information apporté par la DAT qui apparaît - après le RsTf - comme la meilleure alternative à la ferritine en cas de processus inflammatoire sous-jacent. Mots clés : carence martiale, ferritine, inflammation, profil protéique, DAT doi: /abc Article reçu le 12 avril 2006, accepté le 5 septembre 2006 Tirés à part : S. Fattoum Abstract. Iron deficiency (ID) is the most common nutritional deficiency worldwide especially among young children, women in pregnancy and breastfeeding. This study was undertaken to assess the prevalence of ID in 1288 pupil ranging in age from 11 to 14 years. Haemoglobin (Hb), mean corpuscular volume (MCV), mean corpuscular Hb (MCH), serum iron (Fe) serum transferrin (Trf), serum ferritin (Ft) and an inflammtory proteic profil (IPP) were measured. The IPP combines the analysis of protein variations: protein results are converted in percent of normal values referenced for the technique used. It Ann Biol Clin, vol. 64, n 6, novembre-décembre
2 Les désordres à l origine d une balance négative en fer sont des troubles courants mais souvent non identifiés à temps. Ils touchent préférentiellement les femmes en âge de procréer, enceintes ou allaitantes, les enfants en bas âge ou en période de croissance, les adolescents ainsi que les personnes dont l alimentation n assure qu un faible apport en fer [1, 2]. Le dépistage précoce et la surveillance de la balance martiale épargneraient l apparition des signes fonctionnels de cette carence où il est classique de distinguer trois niveaux. Un premier niveau latent où le stock de fer tissulaire s épuise sans que l érythropoïèse ne soit touchée ; ce stade est objectivé par une hypoferritinémie. Si la carence persiste, on observe un deuxième niveau de carence installée en fer fonctionnel où les stocks de fer sont épuisés et où l érythropoïèse est ralentie. Si la carence reste méconnue et non traitée, on se trouvera au stade ultime d anémie ferriprive où la ferritine plasmatique est effondrée et la dyserythropoïèse carentielle est manifeste. Toute la difficulté consiste alors à avoir des tests simples, fiables et spécifiques permettant de dépister précocement le stade de déplétion simple et de commencer à temps une thérapeutique préventive. Le dosage de la ferritine plasmatique est le paramètre le plus fiable pour diagnostiquer une carence en fer, mais il se trouve considérablement influencé par l existence d une maladie intercurrente, notamment un syndrome inflammatoire. Le profil protéique intégrant des marqueurs inflammatoires ainsi que des paramètres du statut martial permet l expression des dosages protéiques en pourcentage des valeurs normalisées pour l âge et le sexe. Il présente has been suggested that on the protein profile, an increase in serum transferrin level compared to a normal serum albumin level (DAT: difference albumintransferrin), appears early in the course of ID. Iron deficiency was defined by a low serum ferritin (< ng/ml) and/or a pathologic DAT (> 28%). Approximately, 33.8% of children had Ft < ng/ml and 12,8% had DAT > 28% while ferritin values were in the normal range. Diagnosis performance (sensitivity, specificity and diagnosis efficacy) of ferritin and DAT were compared to the performance of high serum transferrin receptor (stfr) values in 2 populations presenting or not a biological inflammation. Only the diagnosis efficacy of DAT was constant in both situations. In conclusion, the serum ferritin concentration is the first indicator of body storage iron identifying ID, however normal or elevated values of ferritin may be difficult to interpret particulary in the presence of inflammation. stfr and DAT values are thus reliable indicators of ID in such circumstances. Key words: iron deficiency, ferritin, inflammation, proteic profile, DAT l intérêt d analyser les variations relatives de différentes protéines les unes par rapport aux autres et non plus de chaque protéine prise isolément. Au sein de ce profil, le calcul de la dissociation entre albumine et transferrine (DAT) revêt un intérêt particulier dans le diagnostic d une carence martiale. Physiologiquement, ces deux protéines présentent des variations pratiquement parallèles. Une hypoalbuminémie peut résulter d une fuite protéique (rénale, cutanée...) ou d un défaut de synthèse, notamment lors des atteintes hépatocellulaires ou des états inflammatoires. La transferrine diminue à son tour au cours des états inflammatoires ou de l insuffisance hépatocelluaire et augmente au cours de la carence martiale. Ainsi, les situations où l albuminémie est abaissée s accompagnent d une baisse de la transferrinémie et ne modifient pas la DAT. L augmentation de la DAT, par contre, se fait grâce à l augmentation de la transferrine et est observée essentiellement au cours de la carence martiale. L association d un syndrome inflammatoire et d une carence martiale rend les valeurs isolées de tansferrinémie ininterprétables sans toutefois modifier la DAT qui montre une élévation révélatrice de carence martiale [3, 4]. Plusieurs travaux menés en Tunisie pour étudier l ampleur de l anémie et ses étiologies avaient démontré que l anémie ferriprive occupe la première place et reste encore un problème de santé publique. Toutes les régions sont affectées par ce trouble nutritionnel avec une légère prédominance dans les régions du Nord Ouest et du Sud Ouest [1, 5]. Dans cette enquête, nous avons entrepris d analyser l intérêt de la ferritine et de la DAT dans l évaluation de la carence martiale dans une population particulièrement concernée par ce déficit. 566 Ann Biol Clin, vol. 64, n 6, novembre-décembre 2006
3 martiale et DAT Matériel et méthodes Matériel Notre enquête a porté sur un échantillon de jeunes écoliers (675 filles, 613 garçons) apparemment sains, âgés de 11 à 14 ans, issus de familles de niveau socioéconomique moyen et originaires du gouvernorat de Ben Arous dans la région du Grand Tunis où la scolarisation est de 100 % ; l échantillon étudié se trouve par conséquent parfaitement représentatif de la région. Les prélèvements ont été réalisés de janvier à juin Tous les prélèvements ont été réalisés à jeun, de huit heures à neuf heures du matin après un accord parental. Le bilan martial et les dosages protéiques ont été réalisés sur du sang total prélevé sur héparinate de lithium. Les plasmas ont été séparés le jour même puis répartis en trois aliquotes dont deux ont été conservées à 20 C pour les dosages différés. Les hémogrammes ont été réalisés sur du sang total prélevé sur EDTA. Compte tenu de l importance du dosage de la ferritinémie dans la qualification de la carence martiale, nous avons jugé nécessaire d étudier l imprécision de la technique utilisée pour le dosage de ce paramètre dans notre laboratoire. La reproductibilité inter-séries a été testée sur deux échantillons de contrôle (Abbott immunoassay-mcc (Liquid) levels 1 and 2) dosés 30 fois dans 30 séries différentes. La répétabilité intra-série a été testée sur les mêmes échantillons de contrôle dosés 20 fois dans la même série. Méthodes Tous les enfants ont bénéficié d un bilan biologique comprenant : un hémogramme : hémoglobine (Hb), volume globulaire moyen (VGM), teneur globulaire moyenne en hémoglobine (TGMH) sur compteur globulaire ABX micros 60 (ABX Diagnostics Montpellier France) ; un dosage de fer sérique (Fe) par méthode colorimétrique à la ferrozine sur automate Hitachi 902- Roche Diagnostics GmbH Mannheim Germany ; un dosage de ferritinémie (Ft) par méthode immunoenzymologique micro-particulaire (MEIA) sur automate Axsym-Abbott Diagnostics Wiesbaden Germany ; un profil protéique inflammatoire regroupant transferrine (Trf), albumine (Alb), une protéine à cinétique rapide : la C-réactive protéine (CRP) et deux protéines à cinétique lente : orosomucoïde (Oro) et haptoglobine (Hpt). L ensemble de ces protéines a été dosé par immuno-néphélémétrie sur automate BN TM 100 Dade Behring S.A. Paris, France ; un logiciel de gestion des résultats (Protis -Dade Behring) permet l expression des dosages protéiques en pourcentage de la médiane des valeurs établies en fonction de l âge et du sexe, et permet par la suite l obtention d un profil protéique ; un dosage du récepteur soluble de la transferrine a été réalisé par immuno-néphélémétrie (BN TM 100 Dade Behring) dans un groupe de 70 enfants parmi la population étudiée. Nous avons également calculé l index RsTf-Ft = RsTf / log Ferritine. Tous les sujets présentant une hémoglobinopathie ont été exclus de la présente étude et ont fait l objet d une étude séparée. Définition de la population normale Nous avons considéré comme seuils de normalité pour les différents paramètres, les valeurs les plus communément admises [6-10] : fer sérique : lmol/l ; transferrine :2à3,2g/L; albumine : enfants de 11 à 12 ans : 41,6 à 50,9 g/l, filles de 12 à 14 ans : 41,8 à 51,3 g/l, garçons de 12 à 14 ans : 41,9 à 51,4 g/l ; CRP : inférieure à 6 mg/l ; orosomucoïde : enfants de 11 à 12 ans : 0,50 à 1,07 g/l, filles de 12 à 14 ans : 0,48 à 1,05 g/l, garçons de 12 à 14 ans : 0,51 à 1,11 g/l ; haptoglobine : enfants de 11 à 12 ans : 0,49 à 1,32 g/l, filles de 12 à 14 ans : 0,49 à 1,33 g/l, garçons de 12 à 14 ans : 0,50 à 1,38 g/l ; RsTf : 0,83 à 1,76 mg/l ; enfants de 11 à 12 ans : Hb 11,5 g/dl, VGM : 77 à 86 fl,tgmh:25à29pg; filles de 12 à 14 ans : Hb : 12 à 16 g/dl, VGM : 78 à 102 fl,tgmh:25à30pg; garçons de 12 à 14 ans : Hb : 13 à 16 g/dl, VGM : 78 à 98 fl, TGMH : 25 à 30 pg. Définition de la carence martiale Nous avons choisi comme seuil de définition de la carence martiale une valeur de ferritinémie inférieure à ng/ml. Dans un deuxième temps, nous avons posé le diagnostic de la carence martiale à partir des données du profil protéique où la différence calculée entre la transferrinémie (%) et l albuminémie (%) est le témoin de carence martiale si elle est 28 %. Analyse statistique La comparaison des moyennes a été effectuée par le test de l écart réduit (z 0 ), la différence est dite significative si z 0 1,96 ; (a = 5 %) ou par le test t ou t de student, pour les effectifs < 30. La différence est dite significative si t 0 >t n ddl,a/2 ;(a =5%)out 0 >t k ddl,a/2. Les performances diagnostiques des tests ont été évaluées par le calcul de la spécificité et de la sensibilité. Ann Biol Clin, vol. 64, n 6, novembre-décembre
4 Résultats Étude de l imprécision Les CV observés sont satisfaisants bien qu ils soient légèrement plus élevés que ceux rapportés dans d autres études(2,5à4%)[11]. Reproductibilité inter-série Les coefficients de variation (CV) pour les deux échantillons de contrôle contenant respectivement 28 ng/ml et 210 ng/ml de ferritine sont respectivement de 4,36 et 5,40 % (tableau 1). Tableau 1. Reproductibilité inter-série et intra-série de la ferritine. Inter-série Intra-série Contrôle bas Moyenne (ng/ml) 29,52 28,33 Écart-type (ng/ml) 1,29 1,02 CV(%) 4,36 3,61 Contrôle haut Moyenne (ng/ml) 210,83 204,76 Écart-type (ng/ml) 11,39 9,60 CV(%) 5,40 4,68 Répétabilité intra-série La répétabilité est très satisfaisante : les CV des deux échantillons de contrôle sont respectivement de 3,61 et 4,68 %. Nos résultats se trouvent en accord avec ceux d études antérieures rapportant des CV de 1,5 à 5,6% [12]. La classification de la population globale figure sur le tableau 2. Population normale Au sein de la population étudiée, nous avons sélectionné un groupe de 386 enfants soit 30 % (214 filles, 172 garçons) indemnes de signes biologiques de carence en fer ou de tout type d anémie selon les critères préalablement définis. Cette population témoin servira de référence pour toute comparaison ultérieure. Les moyennes des différents paramètres explorés figurent sur le tableau 3. Tableau 2. Répartition de la population totale (n = 1 288) en fonction des données biochimiques et hématologiques. M m N Microcytose + inflammation Normaux Carencés Enfants a priori non carencés Ferritine < ng/ml Ferritine ng/ml n = 386 soit 30 % n = 435 soit 33,8 % n = 467 soit 36,2 % latente installée Anémie ferriprive martiale n = 9 soit 34 % Anémie n = 163 soit 34,9 % Absence d anémie n = 145 soit 31,1 % DAT>28% DAT<28% DAT<28% latente* Microcytose* n (%) Filles n(%) Garçons n(%) 214 (55,4) 172 (44,6) 165 (37,9) 1 (69,7) 50 (30,3) 6 (35,8) 126 (80,8) 30 (19,2) 114 (26,2) 34 (29,8) 80 (70,2) 95 (59,7) 50 (52,6) 45 (47,3) en fer + inflammation 34 (21,4) (44,1) 19 (55,9) Anémie ferriprive + inflammation 30 (18,9) 13 (43,3) 17 (56,6) 3 (1,8) 1 (33,3) 2 (66,7) 27 (16,6) 16 (59,3) 11 (40,7) 133** (81,6) 57 (42,9) 76 (57,1) 27 (18,6) 12 (44,4) (55,6) 36 (24,8) (41,7) 21 (58,3) Trf 3,2 à 3,6 g/ll 47 (32,4) 26 (55,3) 21 (44,7) Fe < 10 µmol/l 35 (24,2) 17 (48,6) 18 (51,4) M : macrocytaire ; m : microcytaire ; N : normocytaire ; * : ferritine «limite» de à 30 ng/ml ; ** : 98 enfants parmi les 133 présentent une ferritine «limite»deà30ng/ml. Tableau 3. Moyennes et écarts-types des paramètres biochimiques et hématologiques dans la population témoin. Population témoin Hb (g/dl) VGM (fl) TGMH (pg) Fe (µmol/l) Trf (g/l) Ft (ng/ml) DAT (%) n = 386 Enfants ans 13,09 ± 0,57 83,65 ± 3,32 28,23 ± 1,05 n=35 Filles ans 13,24 ± 0,70 84,30 ± 3,03 28,71 ± 1,31 n = ,94 ± 4,91* 2,83 ± 0,23* 28,60 ± 12,93* 12,37 ± 9,69* Garçons ans 13,64 ± 0,52 84,02 ± 2,90 28,63 ± 1,14 n = 160 * : Moyenne de l ensemble du groupe (n = 386) indépendamment de l âge et du sexe. 568 Ann Biol Clin, vol. 64, n 6, novembre-décembre 2006
5 martiale et DAT Tableau 4. Moyennes et écarts-types des paramètres biochimiques et hématologiques dans les populations carencées (ferritine < ng/ml). Populations Hb (g/dl) VGM (fl) TGMH (pg) Fe (µmol/l) Trf (g/l) Ft (ng/ml) DAT (%) latente Enfants ans 13,03 ± 0,38 82,58 ± 2,16 28,03 ± 0,74 n=14 Filles ans 13,18 ± 0,62 85,03 ± 3,54 28,94 ± 1,61 17,32 ± 7,51* 2,94 ± 0,20* 11,47 ± 2,72* 18,80 ± 8,84* n = 106 p<10-2 p<10-6 p<10-6 p<10-6 Garçons ans 13,56 ± 0,51 83,88 ± 3,48 28,49 ± 1,47 n=45 installée Enfants ans 13,21 ± 0,48 83,05 ± 4,37 28,06 ± 1,84 n=8 Filles ans 13, ± 0,66 83,20 ± 4,54 28,19 ± 1,65 16,83 ± 10,* 3,51 ± 0,25* 9,52 ± 3,31* 36,58 ± 9,44* n = 120 p<10-2 p<10-3 p<10-2 p<10-6 p<10-6 p<10-6 Garçons ans 13,80 ± 0,58 82,93 ± 3,07 28, ± 1,13 n=28 Anémie Enfants ans 12,32 ± 0,40 p< ,26 ± 3,72 p< ,2 ± 1,58 12,42 ± 4,69 3,13 ± 0,42 11,09 ± 3,36 24,90 ± 12,60 n=12 p<10-4 p<10-2 p<10-4 p<10-4 p<10-2 p<10-4 p<10-4 Filles ans 11,04 ± 0,92 76,90 ± 7,38 25,30 ± 2,79 11,51 ± 6,97 3,56 ± 0,44 7,86 ± 4,47 41,71 ± 16,30 n=31 p<10-6 p<10-6 p<10-6 p<10-6 p<10-6 p<10-6 p<10-6 Garçons ans n=71 12,26 ± 0,58 p< ,92 ± 4,97 p< ,63 ± 3,44 p< ,06 ± 14,10 3,25 ± 0,44 p<10-6 9,63 ± 3,54 p< ,51 ± 16,34 p<10-6 : différence non significative par rapport au groupe témoin de la même tranche d âge ; * : Moyenne de l ensemble du groupe (carence latente ou carence installée) indépendamment de l âge et du sexe. Population carencée En se basant sur les résultats préliminaires de ferritinémie et sachant qu il n existe pas d autres affections induisant une hypoferritinémie, 435 enfants soit 33,8 % (275 filles, 160 garçons) ont été considérés comme carencés. L étude simultanée des concentrations de ferritinémie, de transferrinémie ainsi que de l hémogramme a permis de classer la population carencée en 3 groupes selon les stades évolutifs de la carence martiale (tableau 4) : 165 enfants soit 37,9 % (1 filles, 50 garçons) se trouvent au stade de carence latente objectivée par une diminution de la ferritinémie. L ensemble des paramètres biochimiques montre une variation significative par rapport au groupe témoin. Les paramètres hématologiques ne diffèrent pas par contre de ceux du groupe témoin ; 6 sujets soit 35,8 % (126 filles, 30 garçons) manifestent une carence en fer installée où les signes de dysérythropoïèse commencent à apparaître ; en effet, en plus des variables biochimiques, la TGMH et le VGM diffèrent significativement de ceux du groupe témoin à l exception du groupe d enfants âgés de 11 à 12 ans où l effectif relativement faible (n = 8) serait probablement à l origine de la variation non significative ; 114 enfants soit 26,2 % (34 filles, 80 garçons) présentent une anémie microcytaire hypochrome par carence en fer où toutes les variables biochimiques et hématologiques diffèrent de façon fortement significative des groupes normaux. La distribution des valeurs de ferritine dans ces trois groupes est illustrée sur la figure 1. Population a priori non carencée Le deuxième groupe comporte 467 enfants soit 36,2 % (186 filles, 281 garçons) a priori non carencés où la ferritinémie est ng/ml. Au sein de ce groupe nous constatons que : 9 enfants (soit 34 %, soit 12,3 % de la population totale) présentent une élévation de la DAT (DAT 28 %) sur le profil protéique, évocatrice de carence martiale contrastant avec une ferritinémie normale ou élevée. Cette augmentation de la DAT est liée essentiellement à une élévation de la transferrine suite à une carence martiale. Les autres causes d élévation de la transferrine sont habituellement de diagnostic facile et ne sont pas rencontrées dans la population étudiée (imprégnation œstrogénique, cancer hormono-sécrétant...) [13]. Afin d éliminer toute augmentation de la transferrine d origine hormonale, particulièrement dans une population d enfants en âge péripubertaire, nous avons comparé les moyennes de transferrinémie dans les deux sexes de la population normale ; Ann Biol Clin, vol. 64, n 6, novembre-décembre
6 la différence s est révélée non significative (z 0 =1,43), ce qui est en faveur de l origine purement carentielle de l augmentation de la transferrine ; 163 enfants anémiques normochromes (soit 34,9 %) présentent une DAT non évocatrice de carence martiale ; 98 parmi eux présentent une ferritinémie entre et 30 ng/ml et/ou une transferrinémie 3,2 g/l. Un complément d information devra être apporté par le dosage de la vitamine B12, de l acide folique ou par l étude des enzymes érythrocytaires afin de préciser l origine de l anémie. De même, le dosage du récepteur soluble de la transferrine peut également être d un apport considérable pour le diagnostic différentiel des anémies microcytaires [14, ] ; 145 sujets non anémiques (soit 31,1 %) se distinguent par une microcytose isolée, une augmentation modérée de la transferrinémie, une ferritinémie entre et 30 ng/ml ou une hyposidérémie Fréquence (%) Fréquence (%) Fréquence (%) 25 1 à 2 2 à 3 3 à 4 4 à 5 Groupe de carence latente Intervalles de ferritinémie (ng/ml) Groupe de carence installée 5 à 6 6 à 7 3 à 4 4 à 5 6 à 7 7 à 8 8 à 9 9 à à à à à à 3 à 4 4 à 5 6 à 7 7 à 8 8 à 9 9 à à à à à à Intervalles de ferritinémie (ng/ml) Groupe d'anémie ferriprive Intervalles de ferritinémie (ng/ml) 7 à 8 8 à 9 9 à à à à à à Figure 1. Distribution des valeurs de ferritinémie chez les enfants carencés (ferritine < ng/ml). 570 Étude comparative des performances diagnostiques de la ferritine et de la DAT Devant des valeurs de ferritinémie normales ou élevées contrastant avec des signes biochimiques ou hématologiques de carence, nous nous sommes proposés d étudier les performances diagnostiques de la ferritine et de la DAT dans le diagnostic de la carence martiale définie uniquement par l augmentation de la concentration sérique du RsTf. L examen de référence étant la mesure des réserves médullaires en fer, compte tenu des contraintes de cet examen, nous avons opté pour le dosage du RsTf dont les variations sont totalement indépendantes de toute réaction inflammatoire contrairement à celles du fer, de la ferritine et de la transferrine. Pour cela, nous avons étudié les paramètres suivants : ferritine, DAT et RsTf ainsi que l index RsTf-Ft chez 70 enfants présentant ou non une inflammation biologique pouvant gêner l interprétation de la ferritinémie. La distribution des valeurs du RsTf dans le groupe de carence pure ou associée à une réaction inflammatoire montre des variations de forte amplitude : les valeurs sont augmentées de 2,5 à 7 fois la valeur normale. Par contre, la DAT et l index RsTf-Ft montrent des variations de moindre amplitude lors d un processus inflammatoire concomitant (tableau 5). La ferritine et la DAT montrent toutes les deux une spécificité maximale (100 %) pour les seuils préalablement définis. Toutefois, la présence d un facteur interférant (inflammation) modifie sensiblement les performances diagnostiques de la ferritine. En terme d efficacité diagnostique, elle passe de 0,73 à 0,35. Par contre, la DAT conserve son efficacité diagnostique (0,62 et 0,61) et paraît donc plus discriminative dans le diagnostic de carence martiale dans un contexte inflammatoire. Discussion Le diagnostic de carence martiale a été basé initialement sur la simple présence d une hypoferritinémie (< ng/ml). Ainsi, près de 33,8 % des enfants étudiés sont touchés par cette carence dont le quart (26,2 %) se trouvent déjà au stade d anémie ferriprive. L analyse de la distribution des valeurs de ferritinémie montre que dans le groupe de carence latente, environ 70 % des enfants présentent une ferritine entre 10 et ng/ml. Au stade de carence installée et d anémie, la distribution semble plutôt d allure gaussienne avec une ferritine inférieure à 9 ng/ml dans environ 50 % des cas (figure 1). Dans cette étude nous n avons pas pris en considération les valeurs de fer sérique, ce paramètre présentant plusieurs sources de variations et sa baisse n étant pas un Ann Biol Clin, vol. 64, n 6, novembre-décembre 2006
7 martiale et DAT Tableau 5. Valeurs extrêmes et moyennes de la ferritine, la DAT, le RsTf et de l index RsTf-Ft. DAT (%) RsTf (mg/l) Ft (ng/ml) RsTf-Ft (mg/l) CMP CMI CMP CMI CMP CMI CMP CMI Moyenne ± ET 38,52 ± 21,07 24,54 ± 10,89 5,48 ± 2,79 4,95 ± 3,24 6,55 ± 5,40 170,6 ± 218,4 42,00 ± 95,50 3,18 ± 1,60 Valeur minimale 0,27 3,56 1,86 1,61 1, ,18 1,69 Valeur maximale 70,22 43,6 10,6 6,9 14,23 599,5 393,35 6,50 CMP : carence martiale pure ; CMI : carence martiale + inflammation ; ET : écart-type. Tableau 6. Moyennes et écarts-types de la CRP, l ORO et l HPT dans les groupes d enfants présentant ou non une réaction inflammatoire. ORO (g/l) HPT (g/l) CRP (mg/l) Enfants ans 1,62 ± 0,25 1,99 ± 0,23 11,45 ± 10,51 n=16 Filles ans 1,78 ± 0,33 2,03 ± 0,50 12,67 ± 9,53 n=40 Garçons ans 1,83 ± 0,38 2,09 ± 0,48 11,16 ± 10,59 n=35 Population témoin Enfants ans 0,77 ± 0,18 1,01 ± 0,13 5,28 ± 1,56 n=30 Filles ans 0,79 ± 0,19 0,94 ± 0,16 4,35 ± 0,96 n=30 Garçons ans 0,83 ± 0,21 0,97 ± 0,18 4,32 ± 0,93 n=30 signe fiable de carence martiale, peut-être due à l inflammation [16]. À titre d exemple, la sidérémie dans le groupe de garçons ayant une anémie ferriprive ne diffère pas de celle du groupe témoin. Par contre, la transferrine et la DAT montrent une variation significative à tous les niveaux de carence par rapport au groupe témoin et apparaissent donc comme deux paramètres discriminatifs de la carence martiale d importance comparable à celle de la ferritine. Par ailleurs et compte tenu de la fréquence des syndromes inflammatoires et infectieux - mêmes minimes - à cet âge, il n est pas exclu que les valeurs normales ou élevées de ferritine masquent un état carentiel sous-jacent. L analyse du profil protéique inflammatoire révèle l intérêt de la DAT dont l élévation révélatrice de carence martiale a été retrouvée chez 34 % des enfants présentant une ferritine normale ou élevée. Dans ce groupe la déficience évolue également du niveau latent au stade d anémie. L analyse des protéines de l inflammation a permis de retrouver une composante inflammatoire d évolution variable dans environ 40 % des cas (tableau 6). La présence d une réaction inflammatoire accompagnant la carence en fer rend compte des valeurs normales de la ferritine et de la transferrine ; ces deux paramètres deviennent peu ou pas interprétables pour apprécier le statut martial en cas d inflammation biologique ; seule la DAT conserve son intérêt dans de telles situations. Ainsi, l usage de la DAT dans notre étude a permis d améliorer la sensibilité du dosage de la ferritine (sans en altérer la spécificité). L association d une ou deux protéines positives de l inflammation (ORO, HPT) au bilan martial permet d interpréter de façon précise les valeurs de la ferritinémie. Au cours des états inflammatoires, où l augmentation de la ferritine peut masquer un état carentiel, un autre paramètre du bilan martial apparaît de grande valeur diagnostique : le récepteur soluble de la transferrine. Sa concentration sérique est le reflet direct de l expression des récepteurs cellulaires, elle varie très peu chez le même individu et est indépendante de l âge, du sexe, du statut hormonal et de tout syndrome inflammatoire [17, 18]. Son augmentation est toujours associée à un déficit en fer en dehors de pathologies liées à la stimulation de l érythropoïèse (hémoglobinopathies, activation physiologique de l érythropoïèse en fin de grossesse...) ou de certaines pathologies hématologiques (myélofibroses, syndromes myélodysplasiques) [19-21]. Cependant, le dosage du RsTf ne peut être généralisé à tous les bilans puisqu il multiplie le coût des analyses. Au sein de la population étudiée, nous relevons un groupe particulier de sujets (anémiques ou non) ayant une DAT évocatrice de carence martiale et ne présentant pas de réaction inflammatoire pouvant expliquer les valeurs paradoxalement «normales» de ferritine ; toutefois, les ferri- Ann Biol Clin, vol. 64, n 6, novembre-décembre
8 tinémies y sont à la limite supérieure de la normale : il est probable que de telles valeurs ( à 30 ng/ml) soient indicatrices de carence (figure 2). Par ailleurs, il ne faudrait pas perdre de vue que la ferritine est le dernier paramètre à se normaliser lors du traitement d une anémie ferriprive. Cette normalisation se fait après celle du fer, de la transferrine et de l hémoglobine [16] Nombre d'observations à à à à 100 Intervalles de ferritinémie (ng/ml) Figure 2. Distribution des valeurs de ferritinémie chez les enfants ayant une ferritinémie ng/ml et une DAT 28 %. No rmale Pas d anémie ferriprive Abaissée martiale Hémoglobine Abaissée Anémie ferriprive Ferritinémie Cette étude démontre une nouvelle fois que la carence martiale est largement répandue dans notre pays et constitue la principale cause d anémie chez l enfant. De par sa situation privilégiée dans le métabolisme du fer, il apparaît nettement que la ferritinémie est le meilleur test à pratiquer en première intention afin d évaluer cette carence. La DAT permet à son tour de révéler certains cas de carence sous-jacents à des processus inflammatoires. Toutefois l intérêt de la DAT seule n est pas confirmé dans notre étude puisque sur l ensemble des carences décelées par hypoferritinémie, la DAT n était positive que dans 48,7 % des cas. L association de la ferritine et de la DAT dans un bilan martial semble améliorer la sensibilité de ces tests (88 %) contre 73 % et 62 % respectivement pour la ferritine et la DAT s ils étaient considérés séparément. En pratique, une bonne interprétation d un résultat de ferritinémie doit tenir compte de l ensemble des paramètres pouvant être impliqués dans le métabolisme du fer. Le choix de ces paramètres est dicté par une stratégie diagnostique adaptée à la population étudiée et aux signes d appel cliniques et biologiques (figure 3). DAT > 28 % Protéine(s) de l inflammation martiale avec inflammation Normale (groupe à risque / signes cliniques d appel) Pas de carence martiale? DAT et profil protéique DAT< 28 % RsTf Trans ferrinémie Hémoglobine RsTf N RsTf No rmale Augmentée No rmale Abaissée Pas de carence martiale martiale latente installée avec inflammation Anémie ferriprive avec inflammation No rmale Hémoglobine Abaissée Pas d anémie Anémie non ferriprive Figure 3. Arbre décisionnel dans l interprétation d une ferritinémie. 572 Ann Biol Clin, vol. 64, n 6, novembre-décembre 2006
9 martiale et DAT Références 1. Institut national de nutrition et de technologie alimentaire. Anémies en Tunisie. Causes et mesures d intervention. Enquête nationale. Février Hercberg S, Cailhol J, Franchisseur C, Maurel M. La déficience en fer et l anémie ferriprive dans la population française. Revue française des Laboratoires 2001 ; 334 : Vernet M, Corberand J, David V, et al. Algorithmes de prescription recommandés pour le diagnostic d un déficit et d une surcharge en fer. Ann Biol Clin (Paris) 2001 ; 59 : Pelissolo-Vastra I, Foglietti MJ. Diagnostic des carences ferriprives dans la population âgée. Feuill Biol 1995 ; 36 : Taboubi N. Étude analytique des hémoglobinopathies dans la région de Béja A propos d une enquête de dépistage en milieu scolaire sur élèves. Thèse pour le diplôme d état de Doctorat en Médecine 2004 ; Faculté de Médecine de Tunis. 6. Vernet M. Exploration du statut martial. Rev Prat 2000 ; 50 : Maachi M, Fellahi S, Puy H, Bastard JP. Difficultés d interprétation d un résultat de ferritine en Revue Française des Laboratoires 2005 ; 371 : Dreyfus B. Hématologie. Paris : Flammarion, Yip R, Johnson C, Dallman PR. Age-related changes in laboratory values used in the diagnosis of anemia and iron deficiency. Am J Clin Nutr 1984 ; 39 : Cacoub P, Thiolières JM, Alexandre JA, Foglietti MJ, Giraudet P, Godeau P. Profil protéique et carence martiale : intérêt de l étude du couple albumine-transferrine. Rev Med Int 1996 ; 17 : Dézier JF, Vernet M. Détermination de la ferritine sérique. Intérêt et limites. Presse Med 1992 ; 21 : Vernet M, Revenant MC, Charlier De Bressing C, et al. Valeurs de référence de la ferritine sérique chez l adulte. Ann Biol Clin (Paris) 1994 ; 52 : Laurell CB, Rannevik G. A comparison of plasma protein changes induced by danazol, pregnancy and estrogens. J Clin Endocrinol Metab 1979 ; 49 : Beguin Y. Intérêt du dosage du récepteur soluble de la transferrine (stfr) pour l évaluation de l érythropoïèse et de l état du fer. Hématologie 2001;3: Ruivard M, Boursiac M, Mareynat G, et al. Diagnostic de la carence en fer : évaluation du rapport «récepteur soluble de la transferrine / ferritine». Rev Med Int 2000 ; 21 : Romslo I, Talstad I. Day-to-day variations in serum iron, serum iron binding capacity, serum ferritin and erythrocyte protoporphyrin concentrations in anaemic subjects. Eur J Haematol 1988 ; 40 : Malope BI, Mac Phail AP, Alberts M, Hiss DC. The ratio of serum transferrin receptor and serum ferritin in the diagnosis of iron status. Br J Haematol 2001 ; 1 : Olivares M, Walter T, Cook JD, Hertrampf E, Pizarro F. Usefulness of serum transferrin receptor and serum ferritin in diagnosis of iron deficiency in infancy. Am J Clin Nutr 2000 ; 72 : Gillain N, Gillain S, Minon JM, Thoumsin H, Foidart JM. Intérêt du dosage des récepteurs solubles de la transferrine dans le dépistage de la carence martiale en fin de grossesse. Immuno-Analyse & Biologie Spécialisée 2003 ; 18 : De Azevedo Paiva A, Rondo PHC, Guerra-Shinohara EM, Silva CS. The influence of iron, vitamin B(12), and folate levels on soluble transferrin receptor concentration in pregnant women. Clin Chim Acta 2003 ; 334 : Huebers HA, Beguin Y, Pootrakul P, Einspahr D, Finch CA. Intact transferrin receptors in human plasma and their relation to erythropoiesis. Blood 1990 ; 75 : Ann Biol Clin, vol. 64, n 6, novembre-décembre
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