1 - MODÈLE DE L'OUVRAGE.
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- Jean-Charles St-Amand
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1 Les fiches d'informations du Club Ouvrages Maritimes n 09 (2007) Importance de la modélisation des pieux sur le calcul de l'enveloppe des moments d'une poutre supportant une voie de roulement. par Olivier Soulat, CETMEF Cette fiche a pour objet d'attirer l'attention sur les écarts constatés sur les moments obtenus dans une poutre continue sur appuis régulièrement espacés, soumise à une charge roulante, du fait de la prise en compte (ou non) du caractère élastique des éléments (pieux) supportant cette poutre. 1 - MODÈLE DE L'OUVRAGE. L'ouvrage, modélisé au moyen du logiciel ROBOT, est la poutre avant d'un quai sur pieux La poutre. La poutre modélisée correspond à une poutre de forte inertie, fréquemment rencontrée dans le cas des poutres de couronnement qui reçoivent et répartissent les efforts d'amarrage ou d'accostage ainsi que l'effet des charges verticales sur le quai. La poutre en béton armé a les caractéristiques suivantes : Section carrée de 2,5 m de coté Longueur totale de 290 m Module élastique du béton : MPa L'inertie de la poutre de couronnement est donnée par la formule suivante : Les pieux. I =b h3 12 avec b (largeur de la poutre) = 2,5 m h ( hauteur de la poutre) = 2,5 m soit I = 3,255 m 4 L'ouvrage est constitué de 30 pieux, soit 29 travées. Les pieux de 20 m de long supportant la poutre sont espacés de 10 m. Ils sont encastrés en tête dans la poutre (armature en attente en tête de pieux et coulage de la poutre sur la tête des pieux) et en pied (par exemple pieux battus dans un substratum rigide). Les pieux, également réalisés en béton armé, ont les caractéristiques suivantes : Diamètre de 1,5 m Module élastique du béton : MPa L'inertie et la section des pieux sont données par les formules suivantes : I = D4 2 D et S= La charge roulante. avec D est le diamètre du pieu, soit I = 0,2485 m 4 et S = 1,7671 m 2 L'ouvrage est soumis à une charge roulante constituée de 9 charges ponctuelles de 500 kn espacées de 1 m. Les charges sont appliquées à la fibre moyenne de la poutre. La charge roulante est automatiquement déplacée sur toute la longueur de la poutre par pas de 0,25 m par le logiciel de calcul utilisé (Robot). Le logiciel établit l'enveloppe des moments générés par la charge roulante après son passage sur la totalité de l'ouvrage. 1 6
2 Figure 1 : Schéma de l'ouvrage et de la charge roulante. 2 - RÉSULTAT DES CALCULS Sans modélisation des pieux (poutre sur appuis simples). Les pieux supportant l'ouvrage n'étant pas modélisés, le calcul est réalisé avec une poutre continue reposant sur des appuis ponctuels et au moins une rotule (afin d'avoir un ouvrage non mobile horizontalement). L'enveloppe obtenue sous le passage de la charge roulante est la suivante : Figure 2 : Enveloppe des moments sous l'effet du passage de la charge roulante pour une modélisation sur appuis simples. Moment maximal 1 (en travée) = kn.m Moment minimal 2 (sur appuis) = kn.m Ces valeurs sont obtenues sur les travées et appuis aux extrémités de l'ouvrage. Sur le reste de l'ouvrage (travées et appuis courants), on obtient les valeurs suivantes : Moment maximal moyen = kn.m Moment minimal moyen = kn.m 1 La fibre inférieure de la poutre est tendue 2 La fibre supérieure de la poutre est tendue 2 6
3 2.2 - Avec modélisation des pieux. Les pieux supportant l'ouvrage sont modélisés comme décrit dans le modèle de l'ouvrage. Résultats du calcul. L'enveloppe obtenue sous le passage de la charge roulante dans le cadre de cette modélisation est la suivante : Figure 3 : Enveloppe des moments sous l'effet du passage de la charge pour une modélisation avec prise en compte des pieux. Moment maximal (en travées) = kn.m Moment minimal (sur appuis) = kn.m Ces valeurs sont également obtenues à proximité des extrémités de l'ouvrage. Sur le reste de l'ouvrage (travées et appuis courants) on obtient les valeurs suivantes : Moment maximal moyen = kn.m Moment minimal moyen = kn.m On constate que dans le cas de cet ouvrage, le fait de ne pas modéliser le comportement des pieux conduit à : Sous-évaluer le moment maximal en travées de 18% à proximité des extrémités et de 33% en travées courantes ; Surévaluer le moment minimal sur appuis de 35% à proximité des extrémités et de 26% en travées courantes. Modélisation du comportement des pieux par appuis élastiques. Pour comprendre l'effet de la prise en compte des pieux, une troisième modélisation de l'ouvrage est réalisée au moyen d'appuis élastiques dont on peut ajuster les paramètres : Rigidité en translation horizontale de l'appui, Rigidité en translation verticale de l'appui, Rigidité en rotation de l'appui. Dans un premier temps, les paramètres de rigidité équivalent au comportement des pieux sont calculés : on prend les déplacements pour une force de 1 kn ou un moment de 1 kn.m appliqué en tête d'un pieu encastré en pied. Nature du déplacement Déplacement horizontal d h sous l'effet d'une charge horizontale d h =F L3 3 EI Déplacement vertical d v sous l'effet d'une charge verticale d v =F L ES Rigidité 1/d h = kn/m 1/d v = kn/m Rotation r en tête d'ouvrage sous l'effet d'un moment r=m L EI 1/r = kn.m/rad ou kn.m/deg 3 6
4 A proximité des extrémités de l'ouvrage, les moments obtenus avec cette modélisation des appuis sont les suivants : Moment maximal (en travées) = kn.m Moment minimale (sur appuis) = kn.m Sur le reste de l'ouvrage (travées et appuis courants), on obtient les valeurs suivantes : Moment maximal moyen = kn.m Moment minimal moyen = kn.m Ces résultats étant du même ordre que ceux obtenus en modélisant les pieux, l'étude de l'influence des différents paramètres est réalisée en utilisant le modèle sur appuis élastiques Influence des paramètres d'appui. Rigidité en translation horizontale des appuis. Cette rigidité est proportionnelle à l'inertie des pieux et inversement proportionnelle au cube de la longueur de ceux-ci. Le tableau ci-dessous donne l'évolution des moments sur appuis et en travée en section courante et à proximité des appuis en fonction de l'évolution de la rigidité en translation horizontale de l'appui. Coefficient sur la rigidité horizontale 0, Rigidité en translation horizontale des appuis (kn.m/deg) M max extrémités (kn.m) M min extrémités (kn.m) M max courant (kn.m) M min courant (kn.m) Tableau 1 : Influence de la rigidité en translation horizontale des appuis. La rigidité en translation horizontale des appuis n'a dans ce cas aucune influence sur les valeurs des moments. La structure étant uniquement soumise à des charges verticales et la poutre de couronnement ayant une forte section, les déplacements horizontaux sont nuls ou quasi-nuls. Rigidité en rotation des appuis. Cette rigidité est également proportionnelle à l'inertie des pieux et inversement proportionnelle à la longueur de ceux-ci. Le tableau ci-dessous donne les résultats pour plusieurs valeurs de rigidité en rotation. Coefficient sur la rigidité en rotation 0, Rigidité en rotation des appuis (kn.m/deg) M max extrémités (kn.m) M min extrémités (kn.m) M max courant (kn.m) M min courant (kn.m) Tableau 2 : Influence de la rigidité en rotation des appuis. La rigidité en rotation des appuis a une influence réduite pour une variation d'un facteur 10 de celle-ci, une variation d'un facteur 100 de la rigidité en rotation a un impact plus significatif. Cette influence réduite s'explique par le fait que la poutre a une inertie importante ce qui limite fortement les rotations (sous charge dissymétrique) de celle-ci au droit des appuis. 4 6
5 Rigidité en translation verticale des appuis. Cette rigidité est proportionnelle à la section des pieux et inversement proportionnelle à la longueur des pieux. Le tableau cidessous donne les résultats obtenus : Coefficient sur la rigidité en translation verticale Rigidité en translation verticale des appuis (kn/m) 0,1 0,2 0,5 0, M max extrémités (kn.m) M min extrémités (kn.m) M max courant (kn.m) M min courant (kn.m) Tableau 3 : Influence de la rigidité en déplacement vertical des appuis. On constate que la rigidité en translation verticale des appuis a une influence considérable sur les valeurs des moments maximums et minimums de la courbe enveloppe du passage d'une charge roulante sur l'ouvrage. Les valeurs des moments maximums et minimum augmentent lorsque la rigidité verticale des appuis diminue. L'évolution la plus importante est constatée sur la valeur du moment maximal (en travée : quasi doublement pour une réduction d'un facteur 10 de la rigidité en translation verticale de l'appui). Lorsque la rigidité des appuis devient très importante (multiplication par un facteur 50 à 100), la rigidité verticale se rapprochant de la rigidité verticale «infinie» des appuis ponctuels, les valeurs des moments tendent vers celles obtenues dans le cadre du calcul sur appuis simples (sans modélisation du comportement des pieux). Le graphique ci-dessous, tracé en coordonnées semi-logarithmiques afin de faciliter la lecture, montre l'évolution des moments maximums et minimums en fonction de la rigidité verticale des appuis. Figure 4 : Variations des moments maximums et minimums en fonction de l'évolution de la rigidité en translation verticale des appuis. Ce résultat s'explique par le fait que la poutre de couronnement a une inertie très importante et a donc une très grande rigidité en flexion. Une flexion liée à l'affaissement d'un appui (même faible) par rapport aux autres génère des efforts de flexion très important dans la poutre. Ce phénomène est d'autant plus important que les appuis s'affaissent facilement (rigidité moindre en translation verticale des appuis). Ce phénomène apparaît quand une charge de longueur limitée est appliquée sur l'ouvrage (affaissement d'un appui par rapport aux autres), et il n'existe pas quand une charge uniforme est appliquée sur toute la longueur de l'ouvrage. 5 6
6 2.4 - Influence de l'inertie de la poutre. L'influence de l'inertie de la poutre est étudiée en reprenant la modélisation de l'ouvrage avec les pieux. Le calcul est réalisé pour une inertie divisée par 2 et pour une inertie divisée par 4 (ce qui peut correspondre par exemple à la poutre supportant le rail arrière de grue). Le calcul a également été fait avec le cas sur appuis simples pour vérifier que les caractéristiques de la poutre ont peu d'effets sur la répartition des moments dans ce cas. Le tableau ci-dessous donne les résultats des différents calculs réalisés en modifiant l'inertie de la poutre (obtenue par réduction de la largeur b). Modélisation des appuis (pieux modélisés) Appuis non modélisés (appuis simples) Inertie de la poutre 1 1/2 1/4 M max extrémités (kn.m) M min extrémités (kn.m) M max courant (kn.m) M min courant (kn.m) M max extrémités (kn.m) M min extrémités (kn.m) M max courant (kn.m) M min courant (kn.m) Tableau 4 : Influence de l'inertie de la poutre sur l'évolution des valeurs des moment maximums et minimums pour une modélisation avec ou sans prise en compte du comportement des appuis. On constate que l'inertie de la poutre n'a aucune influence sur le résultat du calcul lorsque celui-ci est réalisé en considérant des appuis simples (non modélisation du comportement des pieux). On constate également que pour une poutre de plus faible inertie, l'augmentation des moments en travée (M max, du fait de la prise en compte du comportement des pieux par rapport à la modélisation sur appuis simples) est moindre. De même la réduction des moments sur appuis (M min ) est moindre. Ce dernier résultat permet donc de montrer que l'erreur apportée par la non prise en compte du comportement des pieux supportant la poutre est d'autant plus importante que la poutre supportée est rigide en flexion (grande inertie). 3 CONCLUSION. Pour un ouvrage comportant une poutre de forte inertie reposant sur des pieux et soumise à des charges verticales localisées pouvant se déplacer, il est important de correctement modéliser le comportement des pieux (plus particulièrement leur rigidité sous charge verticale) les valeurs de la courbe enveloppe des moments étant très sensibles à cette rigidité. Le fait de négliger le comportement des pieux en modélisant un ouvrage sur appuis simples «infiniment» rigides en translation verticale conduit à surévaluer les moments sur appuis et à largement sous-évaluer les moments en travée. Ce phénomène est d'autant plus important que l'inertie de la poutre supportée est grande. La non-modélisation du comportement des pieux apporte donc une forte incertitude sur les résultats lorsque l'ouvrage est soumis à une charge de longueur limitée (par rapport à la longueur totale de l'ouvrage). Il est donc nettement préférable de modéliser les pieux (ou leur comportement au moyen d'appuis élastiques) et ce d'autant que la plupart des logiciels de calculs de structures actuellement disponibles laissent cette possibilité. 6 6
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