Territoires, territorialité et territorialisation à l œuvre sur le terrain et sur internet

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1 - 1 - Présentation rapide de la communication en «4 pages» Territoires, territorialité et territorialisation à l œuvre sur le terrain et sur internet Anne PIPONNIER IUT Michel de Montaigne-Université de Bordeaux3, CEMIC-GRESIC 1, rue Jacques Ellul F Bordeaux cedex anne.piponnier@iut.u-bordeaux3.fr Tél : Fax : Pierre CHAMPOLLION IUFM de Grenoble, UMR ADEF 36, avenue de l Ecole Normale F Valence pierre.champollion@grenoble.iufm.fr Tél : Fax : Introduction A partir de la définition initiale du «territoire» sommairement élaborée à l occasion de la deuxième conférence internationale sur l «intelligence territoriale» de Pécs (mai 2004) 1, nous prendrons appui sur les résultats intermédiaires établis pendant l année universitaire à l occasion de la 25 ème université d été de la communication d Hourtin sur «territoires et communication» (août 2004), du colloque du Centre d Etude et de Recherche sur les Montagnes Sèches et Méditerranéennes (CERMOSEM) sur la «ressource territoriale» (2004), du séminaire REIT-OER d Aix-en-Provence (avril 2005) sur les «territoires» et du colloque RAPPE d Aix-en-Provence (mai 2005) sur les «territoires de l éducation et de la formation», pour présenter les grandes évolutions des concepts de «territoire» et de «territorialité» et, surtout, des processus de «territorialisation» développées dans le Réseau Européen d Intelligence Territoriale (REIT) par l Observatoire de l Ecole Rurale (OER) et ses partenaires approfondir, à la lumière de nos propres travaux scientifiques, caractéristiques et temporalités des processus de territorialisation à l oeuvre. Après avoir initialement présenté rapidement cet historique, «contextualisé» REIT, de la notion de territoire, nous interrogerons de façon pluridisciplinaire la notion de territorialisation en croisant, sans les confondre, les regards de la géographie, des sciences de l information et de la communication et de la sociologie, notamment. Nous tenterons ensuite d opérationnaliser ce processus complexe dans la perspective originale développée par le 1 CHAMPOLLION P. (2004), «Essai de problématisation de la liaison école-territoire», Reit Seminar of Pecs mai 2004 [en ligne], disponible sur : <

2 - 2 - REIT, c est-à-dire dans une approche à la fois appropriable par des chercheurs de disciplines différentes et par les acteurs locaux du développement territorial durable fondé sur les TIC. Enfin, nous présenterons, à titre d étude de cas, d une part, les premiers éléments constitutifs de la territorialité et de la territorialisation de l espace éducatif français sis dans les trois zones rurales de l espace à dominante rurale récemment identifiées par l INSEE et l INRA, «rural isolé», «pôles ruraux et leur périphérie» et «rural sous faible influence urbaine» 2, ainsi que dans la «zone administrative de montagne» 3 et, d autre part, le territoire informationnel progressivement construit par le «site web d observatoire et de réseau» de l OER à partir du repérage et de l identification de l évolution de la ressource territoriale développée (catégorisation, organisation et énonciation éditoriale, ) dans le cadre des processus politique, économique, social, culturel, symbolique et «immatériel» de territorialisation numérique. 1. Historique du travail conduit sur le concept de «territoire» par l OER 4 pour le compte du REIT Du territoire au processus de territorialisation La notion de territoire qui a été développé à Pécs (CHAMPOLLION, 2004, op. cit.) correspond de facto à des «lieux», pas forcément «contigus», «mis en réseaux», «emboîtés dans des échelles variables», «générateurs de sens et d identités» (CHAMPOLLION, POIREY, 2004) 5. La question cruciale que pose dans ce contexte la notion de territoire est de savoir à partir de «quand», c est-à-dire à partir de quel type et de 2 CHAMPSAUR P. (dir) (1998), Les Campagnes et leurs villes, Paris : INRA-INSEE 3 Il convient de rappeler également ici que la définition de la «zone administrative de montagne française» (cf. pour les détails le paragraphe ), qui a servi de base au zonage «montagne» de l Observatoire de l Ecole rurale, résulte d un ensemble de textes administratifs pris entre 1974 et à la suite du décret initial de juin 1961 qui définissait administrativement la commune montagnarde comme une commune «ayant plus de 80% de son territoire à une altitude moyenne supérieure à 700 mètres 3, ou une dénivellation entre le point le plus bas et le point le plus haut de 400 mètres au minimum» Cette définition rigoureusement administrative a été quelque peu «assouplie» par la loi «Montagne» 3. 4 L Observatoire de l Ecole Rurale correspond à une équipe de recherche pluridisciplinaire et pluricatégorielle issue de cinq IUFM et de deux universités du sud-est et de l est de la France? Cette recherche, à partir de l analyse d une importante base données originale constituée par le suivi longitudinal individuel de quelque élèves ruraux (originaires du «rural isolé», du «rural sous faible influence urbaine» et des «pôles ruraux» selon la nomenclature INRA / INSEE de 1998) de six départements français interrogés, de même que leurs parents, à quatre reprises entre le CM2 et la fin de 2 nde, tente essentiellement d identifier les différents paramètres influant sur la réussite scolaire et l orientation. Elle cherche aussi à apprécier l éventuel impact, toujours en terme de réussite scolaire et d orientation, de trois stratégies particulières de rupture de l isolement mis en en œuvre par les écoles rurales et montagnardes (utilisation régulière des TICE, travail régulier en réseaux horizontaux et/ou verticaux, d affinités et/ou institutionnels, et constitution de partenariats durables avec des organismes extérieurs à l Education Nationale). Pour obtenir davantage de précisions sur l Observatoire de l Ecole Rurale, on peut consulter son site web à l adresse suivante : < En tant qu équipe de recherche du REIT, l Observatoire de l Ecole Rurale prend en charge l axe 1 du réseau : «Connaissance du territoire». 5 CHAMPOLLION P., POIREY J.-L. (2005), «Première approche de l impact de la scolarisation en zone de montagne sur la réussite scolaire et l orientation», in Actes des 7èmes journées d étude RAPPE, Aix-en- Provence, 24 p.

3 - 3 - quel niveau d «organisation», un «espace» naturel et/ou «anthropisé» devient un «territoire», c est-à-dire à partir de quand le processus de «territorialisation» se développe. Le critérium ainsi provisoirement 6 retenu, dans le cadre du Réseau Européen d Intelligence Territoriale par l équipe de recherche de l Observatoire de l Ecole Rurale, qui regroupe géographes, sociologues, représentants des sciences de l éducation, représentants des sciences de l information et de la communication et acteurs pédagogiques, est le suivant : il n y a pas de territoire, y compris «immatériel», sans «projection» collective de ses acteurs vers un futur commun structurant, ayant évidemment fonction «identitaire» et «symbolique». 2. Apports théoriques des différentes disciplines intéressées par le concept 2.1 Approche géographique Le concept de territoire a été développé initialement par la géographie qui l a progressivement différencié des notions de milieu, de région et d espace dans les années : - L espace, au sens géographique du terme, est «l étendue terrestre utilisée et aménagée par les sociétés en vue de leur reproduction. Il comprend l ensemble des lieux et de leurs relations. Il est donc à deux faces : un système de relations et un produit social organisé» (BRUNET, 1992) 7. - Le milieu, géographiquement parlant, correspond au «cadre dans lequel se déroule l existence des hommes» (CLAVAL, 1995) 8. - La région renvoie d abord à un «espace vécu», intermédiaire entre le local et le national (FREMONT, 1976) 9. Aujourd hui, le concept de territoire, qui s est progressivement opérationnalisé dans le cadre des politiques d aménagement du territoire, a pris pour les géographes un sens «composite». Ainsi, selon GUMUCHIAN (2001) 10, «le terme de territoire a une double acception : soit il se réfère à une réalité juridico administrative, comme c'est le cas dans l'expression «6 Au cours du séminaire interdisciplinaire REIT / OER consacré au territoire organisé en avril 2005 sur le site d Aix-en-Provence de l IUFM d Aix-Marseille. 7 BRUNET R., FERRAS R., THERY H. (1993), Les Mots de la géographie, dictionnaire critique, Paris : Reclus-La Documentation Française, 518 p. 8 CLAVAL P. (1993), Géographie de la France, Coll. «Que sais-je?», Paris : PUF, 127 p. 9 FREMONT A. (1976), La région, espace vécu, Paris : PUF, 223 p. 10 GUMUCHIAN H. (2001), «Ecole, territoire et développement durable», in L Enseignement scolaire en milieu rural et montagnard, Tome 1, Espaces ruraux et réussites scolaires, Besançon : Presses universitaires franc-comtoises, Besançon

4 - 4 - aménagement du territoire», soit il renvoie au concept de territorialité largement présent dans l'ensemble des sciences sociales depuis une bonne vingtaine d'années. Autant réalité naturelle que sociale, le territoire ne se laisse pas facilement décomposer. Milieu, pratiques, représentations et organisation socio politique constituent un système dont les parties sont interdépendantes». Selon DI MEO (1998) 11, le territoire «témoigne d une appropriation à la fois économique, idéologique et politique de l espace par des groupes qui se donnent une représentation particulière d eux-mêmes, de leur histoire, de leur singularité». 2.2 Approches par les autres disciplines Le concept de territoire intéresse évidemment d autres disciplines : sociologie, économie, anthropologie et, aujourd hui, sciences de l information et de la communication, entre autres. Il est même devenu un enjeu pour toutes ces disciplines. Pour Max WEBER 12, le territoire, comme en éthologie, est la marque essentielle de l Etat, c est-à-dire du pouvoir. Pour les sciences de l information et de la communication, c est aujourd hui la communication et l échange, au travers des réseaux numériques maillant l espace social, qui tisse et structure de plus en plus le territoire (PIPONNIER, 2005) Essai de définition opérationnelle du concept Le territoire présente donc, selon nous, cinq caractéristiques principales : - une double «nature» : matérielle et foncière, d une part, et symbolique et identitaire (risque de «patrimonialisation» de ce fait), aussi bien à l interne que vis-à-vis de l extérieur, d autre part ; - une triple «appropriabilité», spatiale, identitaire et communicationnelle, par ses «habitants» ; 11 DI MEO G. (1998), Géographie sociale et territoires, Paris : Nathan Université, 317 p. 12 Economie et société 13 PIPONNIER A. (2005), «Le dispositif de diffusion mis en œuvre par l OER : une approche des stratégies de communication au service de la recherche et de la formation», in L Enseignement scolaire en milieu rural et montagnard, tome 3, Besançon : Presses universitaires franc-comtoises, pp

5 une «inscription» dans le temps, l espace et l «immatériel» : il est donc caractérisé, sous ces trois angles, par un «périmètre» historiquement daté et borné ; - un «fondement» et une «légitimité» pour le développement économique, social et culturel et ses acteurs ; - une aptitude à l «auto-référencement». 4. Processus de territorialisation A partir de quelques exemples issus pour l essentiel de nos recherches personnelles 4.1 Sur le terrain - «Espace à dominante rurale» (travaux OER en cours) ; - «Zone de montagne» (CHAMPOLLION, 2005) Sur internet (PIPONNIER, 2005) 15 - Développement de nouveaux territoires communicationnels (réseaux) ; - Estompage de l ancienne frontière, née de la division du travail, entre production d informations et de ressources et diffusion de ces mêmes informations et ressources 16. Conclusion - Liens territoire et politiques publiques régionales, nationales et européennes, décentralisation politique, déconcentration administrative et dé-et-recomposition territoriale, - Territoire au croisement de deux grands axes : balisage de l incertitude (production de repères) et développement de la complexité et du métissage 14 CHAMPOLLION P., «Effets de territoires et orientation», in L Enseignement scolaire en milieu rural et montagnard, Tome 4, Parcours scolaires et constructions de projets au collège, Presses universitaires franccomtoises, Besançon, à paraître en HDR en cours. 16 CHAMPOLLION P., PIPONNIER A. (2005), «Les Projets éditoriaux des sites web de réseau : nouvelles pratiques interculturelles de coopération internationale et impacts sur la formation à la recherche», in Actes du congrès AIPU 2005, Genève, à paraître