ENSEIGNEMENT ORAL de KYABJE KALU RIMPOCHÉ à PARIS le 15 Mai 2010

Transcription

1 ENSEIGNEMENT ORAL de KYABJE KALU RIMPOCHÉ à PARIS le 15 Mai 2010 La partie de l enseignement qui n a pas été traduite disait : «Venir à un enseignement du Dharma, ce n est pas comme aller à l école où l on écoute l enseignant avec un certain respect, mais où finalement on s ennuie. La différence entre une conférence et un enseignement est que le premier s adresse au public, tandis que le deuxième s adresse à des disciples avec lesquels l enseignant entre en relation. L enseignement est destiné à être mis en pratique, pas seulement à être écouté respectueusement. C est pour le mettre en pratique que l on vient assister à un enseignement, sinon autant rester chez soi et passer du bon temps. Si vous venez écouter un enseignement comme on va à un spectacle, il n y aura pas de résultats. N essayez de pas de vous forcer à croire aux enseignements bouddhistes, car ça ne marchera pas, ils n auront aucun effet sur vous. Quand j étais plus jeune, j aimais bien recevoir des conseils personnels de mes différents maîtres, mais pendant les enseignements publics, je m ennuyais, car je ne les prenais pas à cœur. Pour prendre les enseignements à cœur, le respect n est pas suffisant, il faut avoir de la dévotion. Si l on n a pas de dévotion, c est que l on n a pas confiance. Il faut comprendre que l enseignement du Dharma n est pas un discours ordinaire. Et la vraie compréhension du sens ne peut venir que par la pratique, pas seulement en écoutant. Quand la dévotion est présente, on peut se passer du support du texte, l esprit est ouvert et on a confiance dans ce qu on fait, l enseignement est clair et le résultat est générateur de mérites. Il suffit parfois d entendre un seul mot d enseignement pour comprendre des tas de choses. Si vous avez de la dévotion, les résultats se produisent. Les problèmes que l on rencontre actuellement dans certains centres bouddhistes viennent du manque de dévotion. Certaines personnes sont avides de disciples, de gains matériels et ne veulent que «se remplir le ventre». Elles oublient de faire ce que le maître leur a dit. Elles oublient le lien qu elles ont avec lui et leurs promesses de pratique (Samaya). Quand on vient recevoir une initiation, il y a une promesse à tenir. Avant de vous donner l initiation d Avalokiteshvara aujourd hui, j aimerais que vous me disiez combien d entre vous sont prêts à réciter 1, 2 ou 3 malas de mantras chaque jour. Si vous ne pouvez pas tenir cette promesse, ne prenez pas l initiation. Pendant la cérémonie, contentezvous de regarder vos voisins. Je dis cela parce que je respecte le Dharma et que je vous respecte. Vous êtes également responsable de ce que vous faites. Si quelqu un décide de s allonger par terre pendant l initiation, d écouter de la musique, etc., c est lui que cela regarde, pas moi. Personnellement, cela ne me dérange pas. Je ne suis pas votre père ni votre mère, et je ne veux pas que vous me preniez comme tels. Situ Rimpoché dit souvent à ses disciples : «Soyez heureux, tout simplement car quand vous êtes heureux, tout va bien. Pas de problème; alors soyez heureux.» LINK OF SHANGPA 11 rue Saint Benoit SAINT-MAUR linkofshangpa@gmail.com

2 Au sujet de votre travail, le travail que vous faites est important. C est ce qui vous maintient en vie. Mais le travail n est pas une fin en soi, d ailleurs jamais il ne s achève ; sauf au moment de notre mort. Mais tant que l on est vivant, il y a des milliers de choses à faire. Donc, parfois il faut penser au sens de votre vie, à la place de la religion dans votre vie. Il ne faut pas se dire, cette religion est bien, celle-ci est mauvaise. Toutes les religions se valent. Avoir ce genre de pensées, de saisies sur ce qui est bien ou mal, ce n est pas le résultat d un pratiquant. Un pratiquant doit être équanime et simple. Il faut aussi avoir confiance et foi dans ce qu on fait. Il faut toujours veiller à aller de l avant, ne pas faire marche arrière, faire ses pratiques et continuer à avancer sur la voie. Ce n est pas la peine de comparer les autres religions, cela ne sert à rien. Pourquoi les gens parlent-ils toujours de religion? S ils ont compris le sens du samsara, à quoi bon discriminer. Les religions sont destinées à nous donner du bonheur, un pur bonheur. Si vous voulez être heureux, arrêtez de juger, de dire ceci est bon, ceci est mauvais. Si vous avez trop de jugements, aucune religion ne pourra vous aider, même pas le bouddhisme. Si vous pensez, c est moi qui ai raison, les autres ont tort, c est une situation conflictuelle. Et on ne peut pas pratiquer dans une situation conflictuelle. Un pratiquant doit considérer que toutes les religions sont égales. La vôtre ne vous rend pas différent des autres. En fait, tout dépend de votre karma. Lorsque j étais en retraite j étais un vrai, un pur deuxième Kalu Rinpoché. Et après la retraite, je suis devenu un faux Kalu Rimpoché. Trop de responsabilités, beaucoup de problèmes ont surgi ; cela me donne parfois des insomnies. J ai du mettre en place de nombreux projets : il faut que je finisse cela et après que je fasse ceci, etc. Et si je regarde ce que j ai accompli, c est un pourcentage très faible. Et, parfois je me dis : «Kalu Rimpoché, sais-tu quand tu vas mourir? Sais-tu vraiment quand ta vie va finir?» Puisque je n en sais rien, j ai arrêté de penser au futur. Et je ne pense qu au présent, à l immédiat, à quelle sorte de pratique, de visualisation, je devrais faire, quelle sorte de méditation. A propos de la méditation, beaucoup de gens pensent qu ils peuvent tout comprendre tout de suite. Ils pensent qu ils peuvent comprendre d emblée ce qu est la méditation. Il y a de nombreux types de méditation. Par exemple, il y a la méditation de Shiné, essayer de calmer, d apaiser notre esprit, en essayant de se concentrer sur un seul point. Un autre type de méditation consiste à reconnaître sa nature de bouddha, ouvrir son cœur et regarder en nous. Je ne dis pas que c est la vacuité. Beaucoup de gens parlent de la vacuité. Si votre esprit est vraiment la vacuité, il vous suffit de regarder le ciel, le ciel est vide et vous pensez que vous voyez la nature de bouddha. Notre nature de bouddha n est pas cette vacuité, C est ne pas voir de couleur, de forme, de taille, etc. LINK OF SHANGPA - Enseignement de KYABJE KALU RINPOCHE 15 Mai p 2

3 Comment faut-il pratiquer? Il faut commencer par comprendre ce qu est la vie, comme le Bouddha qui a compris ce que voulait dire être riche ou pauvre. En se rendant dans les villages, il vit la réalité de la vie, puis il se mit à méditer jusqu à la réalisation. Avant de commencer à méditer, vous devez comprendre ce qu est le samsara, il ne faut pas se précipiter dans la pratique. Si vous pratiquez sans cette compréhension préalable, les pratiques successives ne vont faire qu enfler votre orgueil, vous donnant l impression que vous avez accompli telle ou telle pratique et que maintenant, vous pouvez passer à la suivante, etc. Prenez votre temps de vraiment comprendre ce qu est le samsara. Une fois que vous aurez acquis cette compréhension, vous ne serez plus le même. Si vous comprenez ce qu est l impermanence, l attachement, vous avez la base suffisante pour vous permettre de vraiment pratiquer et d avoir les fruits de la pratique. Je ne veux pas entrer dans le détail, mais vous donner l essentiel dont tout le reste dépend. Les préliminaires consistent à : 1) se prosterner et prendre refuge avec l intention d aider tous les êtres qui sont pour moi comme une famille. Je ne peux pas laisser tomber tous ces êtres qui souffrent, il faut que je les aide. Mais comment puis-je les aider? Il faut demander les conseils du Bouddha, du Dharma et du Sangha. Le refuge est donc primordial. 2) Réciter le mantra de Vajrasattva pour purifier tous les aspects négatifs de notre corps, de notre parole et de notre esprit. 3) Offrir le mandala permet d accumuler des mérites, ce qui est très important. C est comme déposer de l argent sur un compte, pour le faire fructifier avec le temps. Pour obtenir le fruit, il faut créer du mérite. C est un processus de mûrissement naturel. Mandala signifie «offrir» aux bodhisattvas qui, animés d une grande compassion, s appliquent à aider les êtres. 4) Faire le gourou-yoga. Grâce à votre dévotion pour votre maître racine, toutes les divinités bénissent votre maître, qui en est alors l incarnation. Votre maître a encore plus d amour et de compassion que le Bouddha, parce que vous n avez pas le mérite de voir le Bouddha à notre époque. C est pourquoi le Bouddha est venu dans notre monde sous l aspect d un être humain, notre maître, qui nous montre ce qu est la vie et la mort, comme le Bouddha lui-même l a montré à ses disciples. Vous avez donc beaucoup de chance de voir le Maître. Le voir ainsi, c est reconnaître votre nature de bouddha, c est ouvrir votre cœur. LINK OF SHANGPA - Enseignement de KYABJE KALU RINPOCHE 15 Mai p 3

4 Ces pratiques fondamentales sont ce qu il faut constamment maintenir, sinon les autres pratiques soi-disant moins élémentaires n auront aucun effet. Le plus important, même si vous avez reconnu votre nature de bouddha, c est de bien établir ces fondements. Même dans la vie ordinaire, commencer quelque chose, c est beaucoup plus facile que de le maintenir. Il se peut que vous reconnaissiez votre nature de bouddha, mais maintenir cette reconnaissance est très difficile. Pour cela, il faut que vous persistiez dans ces pratiques fondamentales ; chacune d elles est une voie vers l éveil. Après ces quatre fondements, il faut faire la pratique de Shiné. C est très important pour calmer l esprit. Si votre esprit n est pas calme, vous ne pourrez pas visualiser des déités. Une fois que votre esprit est calme, tout est parfait : les visualisations peuvent être parfaites. Même au quotidien, si notre esprit n est pas calme, nous ne pouvons pas travailler efficacement. Commencez donc par prendre une grande inspiration avant de commencer à travailler! Je ne sais pas ce que vous faites, en tous cas c est ce que je fais. Plus vous pratiquerez Shiné et plus vous serez aptes à faire des visualisations de divinités. Shiné peut être ennuyeux, il n y a rien à faire, juste à rester concentré sur un objet. Mais avec cet entraînement à la concentration, dès que vous visualiserez des déités, il y aura des résultats. Vous pourrez rester concentrés sur plusieurs déités en même temps. Shiné est donc très utile. La pratique de visualiser des déités est aussi très importante car cela nous fait relâcher notre attachement à nos corps, parole et esprit. Au cours de ma retraite de trois ans, la première année était surtout une entrée en matière, la deuxième année j ai surtout compris ce qu était le samsara et la compassion. La troisième année, grâce à cette compréhension du samsara, j ai vraiment pratiqué. En méditant pendant un an, il est possible de vraiment se transformer. On ressent alors vraiment la bénédiction et la présence des déités et des protecteurs qui vous entourent. Tout devient très différent. Sans dévotion, la récitation de mantras et de rituels peut être très ennuyeuse. Mais avec la dévotion tout change, Ne perdez jamais espoir, ne vous découragez, persévérez quelles que soient les pratiques que vous entreprenez. On ne peut pas tout comprendre d un coup, allez écouter des enseignements et si vous ne comprenez pas la première fois, ce n est pas grave, la fois suivante, vous comprendrez un peu mieux, etc. Parfois on comprend et parfois on ne comprend pas, cela fait partie de la nature humaine. La pratique finale, c est la méditation et la reconnaissance de la nature de bouddha qu elle permet de maintenir. Après cela, je ne sais pas, je n en suis pas à ce niveau. C est peut-être l éveil, mais je ne sais pas, je ne l ai pas encore atteint, sinon je pourrais vous donner un enseignement dans votre propre langue, en toutes les langues possibles. Mais je ne suis même pas un bodhisattva de haut niveau. Je vous indique seulement comment il faut pratiquer en vous disant la vérité. N allez pas dès le départ suivre des enseignements sur la méditation, Ne vous précipitez pas! Mais, s il y a un enseignement sur la pratique des quatre fondements, sur la compassion, sur le sens de la vie, alors vous pouvez y aller. Mais si c est une initiation pour pratiquer des déités, ou sur la vacuité, n y allez pas. Je suis jeune et j ai peu d expérience, mais je peux vous dire que lorsque les choses sont trop précipitées ce n est pas bon. Prenez votre temps! Commencez par les quatre fondements, puis lentement vous comprendrez de mieux en mieux. Ne faites pas les choses avec force, soyez naturels! Au début, au milieu et à la fin de la pratique, vous devez être naturels. Mais on peut être naturel et gardez le contrôle. LINK OF SHANGPA - Enseignement de KYABJE KALU RINPOCHE 15 Mai p 4

5 Je ne fais que partager avec vous un peu de mon expérience de pratique acquise pendant ma retraite de trois ans. Je vais vous quitter dans quelques jours et ne je vous reverrai sans doute pas avant plusieurs années. Je veux donc tout partager avec vous. La prochaine fois, j essaierai de faire de mon mieux pour vous donner des enseignements. Mais je ne donnerai jamais d enseignements sur la pratique à des gens qui n ont pas posé les quatre fondements. Je vais maintenant vous donner l initiation d Avalokiteshvara, mais je voudrais savoir combien d entre vous sont prêts à réciter trois rosaires de mantras par jour? Une initiation, c est une permission de pratique. J ai moi aussi pris des initiations pour pouvoir pratiquer. Ne pensez jamais que vous en avez fini avec telle ou telle pratique. Et ne dîtes pas aux autres que vous avez fini de faire telle pratique. Continuez à faire vos pratiques, à cultiver la dévotion envers votre maître racine. Dès lors que vous avez de la dévotion pour votre maître racine, il n y a plus de distance entre vous et lui. Sans dévotion, la distance est très importante. Si votre dévotion est pure, le maître est toujours avec vous, vous recevez sa bénédiction à tout moment. La raison pour laquelle j insiste sur l engagement à réciter trois malas par jour, c est que je vous prends au sérieux et que je veux m occuper de vous. Je ne veux pas faire comme certains lamas qui donnent des initiations, puis s en vont sans s occuper de vous, sans se préoccuper du samaya. Nous devons être sérieux. Il est de mon devoir de ne pas vous abandonner et vous oublier. Je respecte le Dharma et je vous respecte en tant que pratiquants du Dharma. Il m importe que vous soyez de bons pratiquants du Dharma et de bons êtres humains. (Traduction orale et transcription de C. Charrier) Paris, 22 mai 2010 LINK OF SHANGPA - Enseignement de KYABJE KALU RINPOCHE 15 Mai p 5