VIEILLISSEMENT.DE LA FONCTION D EQUILIBRATION PROCESSUS MULTISENSORIEL

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1 1 VIEILLISSEMENT.DE LA FONCTION D EQUILIBRATION PROCESSUS MULTISENSORIEL France Mourey Cadre de santé rééducateur, docteur es sciences. Centre Gériatrique de Champmaillot 2 rue Jules Violle BP Dijon Cedex tel fax france.mourey@chu-dijon.fr Introduction Si en terme de diagnostic médical il est nécessaire d aborder chaque entrée sensorielle séparément afin d identifier les différentes lésions concernant chacune d elle, il faut pour comprendre l impact fonctionnel de ces lésions chez le sujet âgé avoir une vision plus large de l afférentation. Au delà de la détection d une image rétinienne, d un son ou d un contact cutané l ensemble des capteurs sensoriels nous permettent d analyser le mouvement lui-même et l espace environnant. A partir de la coopération de plusieurs capteurs, le cerveau reconstruit de manière cohérente le contrôle postural et les mouvements du corps. Ainsi, la nature des entrées sensorielles, leur mode d intégration et leur cohérence constituent un versant essentiel des travaux actuels sur l organisation de la posture et du mouvement. D une manière générale, on parle plus volontiers aujourd hui d une physiologie de la perception. Ainsi la perception de la verticale est le résultat d un compromis multisensoriel : les informations vestibulaires, visuelles et proprioceptives sont comparées aux références intrinsèques de la direction axiale du corps. 1

2 2 Les afférences visuelles Le poids des messages visuels dans la physiologie de la perception fait encore aujourd hui l objet de nombreuses études et dépasse largement la simple notion d acuité visuelle. Il a été bien montré chez le sujet jeune que la fonction dite proprioceptive de la vision périphérique joue un rôle prédominant dans le contrôle postural. Elle informe sur les mouvements relatifs de la scène visuelle et participe largement à la construction de la verticale subjective conjointement aux informations d origine otolithiques. Ce type d afférence constitue typiquement un système intervenant à plusieurs niveaux de la perception et ce, en lien permanent avec d autres entrées afférentielles. Les afférences vestibulaires Si classiquement les messages vestibulaires de même que les messages somesthésiques qui sont à la base du sens de l équilibre et du positionnement articulaire, ne faisaient pas partie des cinq sens, ils apparaissent comme essentiels dans la définition actuelle de la perception. Le système vestibulaire ne peut être dissocié de la vision et des mécanismes de stabilisation de la tête dans l espace. En effet, les réflexes vestibulo-oculaires et vestibulo-nucaux témoignent des liens qui unissent les capteurs visuels vestibulaires et proprioceptifs cervicaux. Des travaux récents montrent que la stabilisation de la tête dans l espace permet la création d un référentiel à partir duquel s organisent les mouvements des segments sous-jacents mais aussi la fusion sensorielle (vestibulaires et visuelles). Le système vestibulaire nous permet également d intégrer la contrainte gravitaire. Les afférences proprioceptives et cutanées Les messages proviennent à la fois des récepteurs fusoriaux des muscles, des organes tendineux de Golgi, des récepteurs articulaires et des récepteurs cutanés. En ce qui 2

3 3 concerne les fuseaux neuro-musculaires et les organes de Golgi, il a été démontré que la sollicitation expérimentale de ces capteurs suffit à créer l illusion du mouvement. Par ailleurs, il semble qu en dehors du sens du toucher, le rôle de la peau ait été sous-estimé tant en ce qui concerne la perception des déplacements segmentaires que comme détecteur des appuis au niveau de la sole plantaires. L ensemble de ces informations est essentiel dans l élaboration du schéma corporel. Intégration Posture et mouvement sont sous dépendance d un programme moteur commun. L approche actuelle, à la fois sensori-motrice et cognitive, montre que cette programmation repose sur l idée d une représentation centrale du mouvement et de la posture. Le SNC utilise la référence gravitaire verticale dans la régulation posturale. Le SNC ne peut assurer le guidage d un segment ou du corps que s il dispose d un cadre de référence. Le mouvement met en jeu des afférences qui informent le SNC sur le cours de son exécution. A partir de ces informations mouvement et posture peuvent être corrigés si une erreur est détectée. Ces processus dits de feedback sont cependant trop lents pour être utilisés en permanence dans le contrôle du mouvement. Ainsi, une théorie projective de l action semble s imposer selon laquelle il y aurait une présélection des informations sensorielles à partir d une simulation interne du plan d action. En d autres termes, la programmation centrale permet d anticiper la commande mais aussi le recrutement des capteurs sensoriels en fonction d une représentation interne du mouvement et de la posture. L afférence serait alors utilisée de manière intermittente pour remettre à jour la représentation interne 3

4 4 Les effets du vieillissement Outre l effet des maladies, les effets du vieillissement sont particulièrement marqués sur la vision périphérique ayant des conséquences néfastes sur l équilibration. Il existe également des changements anatomiques importants du système vestibulaire qui justifient la terminologie de presbyvestibulie. En ce qui concerne les capteurs somesthésiques leur efficacité est essentiellement compromise par la pathologie (arthrose) et par le remplacement prothétique qui lui fait suite. Compte tenu du rôle joué par les informations somesthésiques dans la constitution de la représentation interne du corps, il est légitime de penser que les modifications apportées par l âge puissent altérer par ce biais le contrôle de la posture et du mouvement. Par ailleurs, la raideur cervicale favorise une instabilité de la tête dans l espace. Les effets du vieillissement et des maladies sur la qualité des différents messages sensoriels aboutissent parfois à un véritable processus de désafférentation. En ce qui concerne l'organisation de la posture et du mouvement l impact du vieillissement est difficile à préciser, en raison des connexions entre les différentes entrées, des variations individuelles dans l utilisation des afférences, du vieillissement différentiel et de l'intrication avec la pathologie. Cependant, il est légitime de penser que la pauvreté progressive des messages afférents ainsi que l accumulation d afférences erronées (vestibulaires, visuelles et somesthésiques amène une détérioration de la mémoire spatiale et des référentiels construits par le système nerveux central. A cela s ajoutent les effets propres à la non-utilisation qui privent le cerveau d'informations essentielles. L observation clinique nous donne des exemples très fréquents du phénomène de sommation et des difficultés de compensation chez le sujet très âgé. Ainsi, nombre de sujets très âgés présentent plusieurs déficits sensoriels ayant contribué à fragiliser la programmation et le contrôle posturo-cinétique. Une fragilité s installe alors de manière très insidieuse qui ne sera révélée que lorsqu une altération sensorielle supplémentaire, sans gravité apparente, viendra 4

5 5 s ajouter aux déficiences déjà existantes. A ce moment, aucune source afférentielle ne pouvant compenser cette nouvelle perte, la sommation des pertes rend brutalement impossible le contrôle harmonieux de la posture et du mouvement. C est un processus de décompensation. Conclusion L approche scientifique actuelle des entrées sensorielles et plus largement de la perception montre l importance d identifier en terme de conséquences fonctionnelles sur l équilibration l impact des atteintes sensorielles chez le sujet âgé. Ces données doivent guider nos approches tant dans le domaine de la prévention que dans celui du traitement curatif. Pour en savoir plus : 1. Mourey F, Camus A, Pfitzenmeyer P. Posture et vieillissement: données fondamentales actuelles et principes de prise en charge. La presse médicale. 2000; Pfitzenmeyer P, Mourey F, Manckoundia P, Béatrice Tavernier-Vidal. La désadaptation psychomotrice. La Revue de Gériatrie. 2003;28: