ALLOCUTION DU DIRECTEUR DU CIFAF LORS DE LA JOURNEE DE FORMATION CONTINUE SUR LA COUR PENALE INTERNATIONALE : 5 NOVEMBRE 2014 A COTONOU.
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- René Sergerie
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1 ALLOCUTION DU DIRECTEUR DU CIFAF LORS DE LA JOURNEE DE FORMATION CONTINUE SUR LA COUR PENALE INTERNATIONALE : 5 NOVEMBRE 2014 A COTONOU. Mesdames, Messieurs, Le Centre International de Formation en Afrique des Avocats Francophones (CIFAF) a aujourd hui, l insigne honneur d accueillir cinq représentants de la Cour Pénale Internationale (CPI) : Madame Antonia Pereira de Souza Fonctionnaire Adjointe chargée de la coopération du bureau du Procureur, Madame Natacha SCHAUDER Chef des opérations, Unités des victimes et des témoins, Madame Anne-Aurore BERTRAND Conseiller en coopération du Bureau du Greffier, Monsieur Amady BA Chef de la section coopération internationale à la CPI et Monsieur Pascal TURLAN Conseiller en coopération judiciaire à la CPI que je remercie d avoir accepté de partager leurs expériences et leur savoir sur les principes majeurs des domaines couverts par l action de la CPI, savoir, la compétence de la Cour, les stratégies du Bureau du Procureur de la CPI, les principes de la complémentarité et de la coopération et les perspectives de la coopération du greffe de la CPI. Ces ateliers de formation permettront à l auditoire diversifié que vous constituez (avocats, magistrats, greffiers, universitaires, fonctionnaires de police judiciaire, journalistes, acteurs de la scène politique et de la société civile, étudiants en droit international) d enrichir et d approfondir vos connaissances sur une Institution récente et qui nous concerne tous. Association loi 1901 enregistrée sous le n 2003/0032/DEP/ATL/LIT/SG/SAG/Assoc du 24 mars 2003 Compte bancaire ECOBANK-Bénin n , Agence principale de Cotonou 01 BP cifaf2000@yahoo.fr / jurysjam@yahoo.fr- Tél : (229) et (229) , Fax (229) , Cotonou, Bénin.
2 En effet, si un grand nombre d Etats africains ont signé en 1998 puis ratifié en 2002 le Statut de Rome donnant naissance à la CPI permettant à celleci d entrer en action, nombreux sont encore les praticiens du droit qui perçoivent la CPI comme une Institution lointaine, méconnaissant ses objectifs, n ayant qu une connaissance approximative de ses mécanismes fonctionnels et procéduraux et surtout la taxant bien souvent à tort ou à raison «d une justice à deux vitesses». Ces critiques dont les médias se font l écho, conjuguées à la compétence limitée des praticiens intéressés par ce droit, justifient la pertinence et montrent l importance d organiser une journée de formation sur la CPI. Cette journée de formation continue sur les mécanismes de la CPI est d autant plus digne d intérêt qu en ce moment un certain nombre d hommes politiques africains sont actuellement jugés par la Cour Pénale Internationale pour crime contre l humanité ou crime de guerre. Sans vouloir être trop long, permettez-moi de rappeler brièvement, l histoire de la CPI. A l issue de la deuxième guerre mondiale, le monde a profondément été choqué par la découverte des horreurs commises par les nazis en Europe ou les japonais dans le pacifique. Aussi, les Alliés ont-ils éprouvé le besoin de juger les criminels de guerre au cours des procès de Nuremberg (1945) et de Tokyo (1946). Les travaux de ces deux cours ont abouti à la définition de crime contre l humanité, de crime de guerre et de crime contre la Paix. Dans les années 1990, sont mis en place des Tribunaux Pénaux Internationaux (TPI) pour juger les criminels de guerre de différents pays comme par exemple ceux de l ex-yougoslavie en 1993 ou ceux du Rwanda en 1994 ou encore ceux de Sierra Léone en
3 Mais ces tribunaux avaient été créés pour juger des crimes commis pendant une période et pour un conflit spécifique. La nécessité de créer une cour pénale indépendante et permanente s imposait. CPI. En 1998, cent vingt (120) Etats ont adopté le Statut de Rome créant la En 2002, soixante (60) Etats l avaient ratifié permettant à la CPI d entrer en vigueur. En 2013, cent vingt-deux (122) Etats sur les cent quatre-vingt-treize (193) membres de l ONU avaient ratifié le Statut de Rome dont le Bénin et avaient accepté l autorité de la CPI. Précisons cependant que la CPI n est pas une Institution onusienne même si le Conseil de Sécurité de l ONU peut la saisir. Il est important de rappeler que la CPI n interfère pas dans les affaires judiciaires des Etats membres. En effet, la CPI ne juge que les personnes accusées des crimes les plus graves, savoir : crime de guerre, crime contre l humanité, crime de génocide. Elle n intervient pas lorsqu une personne fait l objet d une enquête ou de poursuites dans son propre pays. L initiative en matière d enquête et de jugement des crimes commis est donc laissée aux Etats. Mais si les juridictions nationales n ont pas la volonté ou la compétence pour juger les accusés desdits crimes, la CPI peut alors exercer sa compétence. Elle n est donc saisie qu en dernier recours. Aujourd hui, 21 affaires dans le contexte de neuf (9) situations sont ouvertes devant la Cour. 3
4 Malheureusement, la majorité de ces affaires concerne l Afrique. Aussi, l Ouganda, la RDC, la République Centrafricaine, le Mali, signataires du Statut de Rome, ont déféré à la Cour des situations concernant des faits qui se sont déroulés sur leur territoire. Le Conseil de Sécurité de l ONU a déféré à la CPI la situation du Darfour au Soudan ainsi que celle de la Libye. Le Procureur a ouvert une enquête dans les deux cas. Il a également ouvert une enquête dans le cadre de la situation au Kenya et en Côte d Ivoire sans oublier la Guinée et le Nigéria. Mais si de nombreux Etats africains font l objet d enquêtes de la part de la CPI, l Asie est également concernée mais dans une moindre mesure (Afghanistan, Géorgie, Corée du Nord) ainsi que l Amérique Latine (Colombie Honduras). Nous ne pouvons qu être frappés par le nombre d affaires pendantes devant la CPI concernant les Etats africains. Cette situation n est-elle pas due au fait que les Droits de l Homme sont encore méconnus par une majorité de la population, ignorés et bafoués par les gouvernements de nombreux Etats africains? Nombre de dirigeants au pouvoir depuis des décennies, refusent tout changement, toute alternance au pouvoir. D autres sont tentés de manipuler la Constitution de leur pays, de la modifier afin de se maintenir coûte que coûte au pouvoir ou bien «omettent» d organiser les élections. Or, les peuples las de subir les exactions, la misère, aspirent au changement. 4
5 Quand j écrivais cette allocution, je ne me doutais pas que les événements très récents et en cours au Burkina Faso viendraient confirmer mes propos. Lorsque les citoyens dépassent le sentiment de peur, à la seconde où ils cessent d avoir peur, plus rien ne les retient, alors, le risque de soulèvement, le risque de guerre civile et le cortège de toutes les horreurs qui l accompagnent, sont bien réels. Tel est le cas au Burkina Faso aujourd hui. Il a fallu des morts et des blessés graves avant que Blaise COMPAORE ne comprenne le rejet dont il est l objet de la part de ses concitoyens. Pourquoi en arriver à cette extrémité? Il est donc fondamental que les hommes politiques africains prennent conscience de leurs responsabilités et qu ils acceptent enfin le processus démocratique caractérisé par l alternance au pouvoir afin que la Paix se trouve garantie et que le nombre d affaires pendantes devant la CPI diminue de manière significative. Malheureusement, les événements d hier et d aujourd hui démontrent la surdité dont font preuve les Chefs d Etats africains ne comprenant pas que leurs concitoyens ont atteint une maturité politique qui rend le processus démocratique irréversible. Ils n ont pas compris que le monde a changé et que l Afrique aussi change. Aussi, je suis persuadé que les ateliers de réflexions que je vous invite maintenant à rejoindre seront pour nous tous très riches que se soit au niveau professionnel qu au niveau personnel. Je vous remercie. 5
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