ANALYSE DE LA SEQUENCE 14 L OCCUPANT GABRIEL LE BOMIN 2008

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1 ANALYSE DE LA SEQUENCE 14 L OCCUPANT GABRIEL LE BOMIN 2008 Plan Photogramme Descriptif Dialogues et musique 14.1 Caméra à l épaule. Pano haut vers bas (visage vers revolver). Time Code Note de GLB sur les personnages : «Quand Pierre se retrouve avec l arme, c est quelque chose de lourd, d extérieur à lui, un corps étranger. Il le porte comme un objet dont il ne veut pas.» 14.2 Ellipse. Pano haut vers bas (visage vers revolver) Ellipse. Plan rapproché. La note d intention de GLB nous dit : «Le montage, donc le récit, fonctionne par ellipse, laissant aux spectateurs une part active dans la construction de l histoire. Ces plans essentiels sont ceux où Pierre est en train de quitter l enfance.» Gabriel Le Bomin installe une durée de plans de quelques secondes, avec peu d événements dans le plan. Cette pauvreté narrative nous laisse le temps d imaginer ce qui peut se passer ensuite. Meurtre à venir ou pas? 14.4 Point de vue subjectif de Pierre. Le point d écoute est également subjectif puisque les paroles des soldats ne sont pas sous-titrées. A partir de ce plan, les plans raccourcissent un peu et l action donnée à voir est plus riche dans chaque plan. Le rythme s accélère. LE PREMIER SOLDAT (en italien) : Honte sur ta famille... LE DEUXIÈME SOLDAT (il lui crache dessus) (en italien) : Salaud de déserteur

2 14.5 La caméra s est rapprochée de Pierre (gros plan). La tension du spectateur monte. Le déroulement initial de l acte de Pierre est contrarié par la présence des italiens. Pierre est lui-même dans une grande tension intérieure Point de vue subjectif en plan moyen La note d intention de GLB nous dit : «La caméra sera souvent tenue à l épaule afin de renforcer l aspect immédiat, brut, de chaque situation.» Raccord dans l axe (pas de faux raccord). Cela permet de s'affranchir de l'usage souvent périlleux du zoom. Ca n est pas Pierre qui se rapproche mais la façon qu il a de percevoir la scène. La caméra suit la chute du corps à gauche puis revient rapidement à droite vers le déserteur et l autre soldat. Ces mouvements de caméra dynamisent le plan et donnent une certaine violence à la scène. Cette scène n aurait pas supporté des plans de coupe ou gros plans car le point de vue est celui de Pierre Léger recadrage vers la droite et faux raccord : Il s'agit d'une incohérence entre deux plans qui peut rendre difficile la compréhension d'une scène ou l'appréhension du lieu dans lequel elle se déroule. Un faux raccord crée une discontinuité narrative perturbante pour le spectateur, mais dans certains cas il s'agit d'un effet recherché. Lorsqu'un même sujet est présent dans deux plans qui se succèdent, et que la valeur de ces plans est la même, la différence entre l'angle sous lequel le sujet est filmé dans le premier et le deuxième plan doit être supérieure à 30. Ce raccord contribue à dérouter le spectateur, qui est dans l œil de Pierre

3 14.9 Gros plan. Pierre prend conscience ici qu il a nourri un assassin. Les yeux sont exorbités Plan moyen. Ellipse Plan rapproché. Faux raccord spatial? Faux raccord spatial : Pierre était à la sortie de la grotte au plan précédent et se retrouve au milieu de la garrigue ici. Gabriel Le Bomin cherche à perdre le spectateur, à nouveau. La caméra suit Pierre de gauche à droite puis panote violemment de droite à gauche pour revenir sur le déserteur qui arrive. Il n y a pas d ellipse car pas de coupe

4 14.13 Le temps est lui aussi dissolu, puisqu il est impossible que le déserteur soit déjà là. Le spectateur ne peut qu observer la scène sans bien comprendre ce qui se passe. On est dans le point de vue de Pierre Gros plan du visage de Pierre apeuré puis pano du visage vers le revolver. La caméra est horizontale Pierre se trouve face à un étranger et même s il ne lui veut pas de mal, il n a jamais vraiment vu son visage, il peutêtre impressionné Le plan est le symétrique du précédent. La caméra part d un gros plan du visage de l occupant et panote vers son arme. Ce plan met les deux personnages sur un pied d égalité. L occupant n est, de plus, pas filmé en contre-plongée, ce qui aurait dû être le cas vue la différence de taille (voir plan suivant) mais à l horizontale aussi. Nous sommes face à un vrai duel d adultes L égalité se poursuit ici puisque le plan moyen met les deux personnages dans le même plan, ce qui rompt le champ/contre-champ. On les voit pour la première fois ensemble. C est la première vraie rencontre

5 14.17 Pano du visage de l occupant vers le livre d architecture puis vers le visage à nouveau. La note d intention de GLB nous dit : «La mise en scène doit être à l image du scénario et des relations entre les personnages. Tendue, âpre, sans fioriture.» Le raccord entre ce plan et le précédent se fait par le livre en gros plan, qui est également le moyen d échange entre Pierre et l occupant. L occupant a acheté sa survie et sa nourriture avec les pages du livre, les jours précédents. Il achète aujourd hui son salut avec le reste du livre entier. Ce geste paternaliste de l occupant casse la symétrie de la relation établie avec Pierre On peut croire ici à un pseudo-raccord dans l axe mais on a affaire à un faux-raccord (position des mains différentes) Coûte que coûte, Gabriel Le Bomin a probablement jugé nécessaire de prolonger l image en cours, ce moment d union et de paix entre les deux personnages Champ de la fin de la rencontre, avec Pierre en amorce à droite

6 14.21 Pano droite gauche pour arriver sur le visage de Pierre en contre-champ. Faux raccord à 180. Pierre qui était sur la droite du plan précédent est passé à gauche. Y a t il eu inversion des rôles? Pierre devient-il adulte à ce moment précis du film? L échange est maintenant terminé entre Pierre et l occupant La note d intention de GLB nous dit : «Lorsqu il doit assumer sa «faute» (avoir alimenté et protégé un «occupant»), il est dans l incapacité de tirer. Il refuse d être l un des maillons de la violence que la guerre génère. Son geste (laisser partir le soldat italien) est un geste de liberté totale, un geste de paix individuelle, prometteur d une paix générale possible.» Ellipse avec le plan précédent. Le revolver, symbole de la guerre, et le livre d architecture, symbole du rapprochement des deux personnages et du rêve de Pierre cohabitent dans le même plan, comme pour ne pas faire redescendre tout de suite la tension Faux raccord sur l ouverture du carnet Au dessus, son nom : Andrea Bertini. Une date de naissance et en caractères gras : Accademia di Belle Arti di Roma

7 14.25 Note de GLB sur les personnages : «Les images, que l italien lui donne, le troublent profondément. Il ne sait pas pourquoi mais quelque chose l émeut profondément, sincèrement dans l harmonie, la beauté des architectures. C est comme si l italien lui donnait accès à un monde nouveau, inconnu.» Note de GLB sur les personnages : «Comment réagit il face à ces images? Il reste sobre, il les observe avec gourmandise mais sans débordement. Il y a une vraie émotion qui le travaille et il ne sait pas pourquoi. Cloches de l église Quand il est seul et qu il les regarde, bien sur il est séduit par ce qu il voit mais il cherche déjà à comprendre ce qu il regarde, la façon dont c est fait, ce que ça représente.» Gros plan sur Pierre qui vient d entendre les cloches. Regarde-t-il son rêve? Se voit-il bâtisseur d églises? La note d intention de GLB nous dit : «Pour Pierre, cette expérience a été fondatrice comme nous le laisse entendre l épilogue. Il s agit bien d une initiation, d un passage.» Bella ciao : Et les gens qui passeront O bella ciao Et les gens qui passeront Me diront «Quelle belle fleur» Car c'est la fleur du partisan O bella ciao Car c'est la fleur du partisan Mort pour la liberté 12 39