Cartographie des corridors écologiques : quelles données pour quelles échelles territoriales?
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- Jean-Paul Théophile Henry
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1 Cartographie des corridors écologiques : quelles données pour quelles échelles territoriales? Laurence Hubert-Moy - Jean Nabucet - Clémence Vannier- Antoine Lefebvre Laboratoire UMR CNRS 6554 LETG-Rennes COSTEL / OSU Rennes Université Rennes2 Place du Recteur Henri Le Moal Rennes Cedex laurence.moy@uhb.fr RÉSUMÉ. La cartographie des corridors écologiques, qui contribue à celle des trames vertes et bleues, est actuellement entreprise sur l ensemble du territoire national afin d élaborer des schémas régionaux de cohérence écologiques dans le contexte du grenelle de l environnement. Plusieurs couches d information spatialisées sont actuellement disponibles dans les bases de données nationales pour réaliser cette cartographie. Or l exploitation de ces couches pose un certain nombre de questions relevant de la qualité des données elles-mêmes, de leur traitement, et de leur pertinence, tant vis-à-vis des caractéristiques des territoires étudiés que des échelles auxquelles ces derniers sont appréhendés. Les objectifs de cette étude étaient d identifier des corridors à partir des données actuellement disponibles et de déterminer à quelles échelles territoriales les cartographies des corridors réalisées avec ces données sont exploitables. Pour cela, les couches d information disponibles sur la région Bretagne ont été recensées puis traitées pour cartographier les corridors aux échelles régionale, intercommunale, et communale. L analyse comparée des cartes des corridors aux trois échelles révèle des différences significatives, montrant l intérêt et les limites de chaque type de données selon l échelle considérée. Elle met aussi en évidence le fait que les couches d information spatialisées disponibles dans les bases de données nationales ne permettent de cartographier qu une partie des corridors écologiques, les corridors boisés. ABSTRACT. Mapping of ecological corridors, which contributes to that of the green and blue belt network, is being undertaken across the country to develop regional schemes of ecological coherence. Several layers of spatial information are currently available in national databases to perform this mapping. The use of these layers raises a number of issues regarding data quality and processing, and data relevance with regard to characteristics of the studied areas and the scales at which corridors are observed. The objectives of this study were to identify the corridors from these data and to determine at what spatial scales these maps can be used. For this, the layers of information available on the Brittany region have been identified and processed to map corridors at regional, community of cities and city levels. Comparative analysis of maps of corridors to the three scales showed significant differences, stating the advantages and disadvantages of each type of data according to the scale considered. It also highlights the fact that only wooded corridors can be mapped with the layers of spatial information available in national databases. Revue. Volume X n x/année, pages 1 à X
2 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 2 MOTS-CLÉS : Corridors écologiques, Trames vertes et bleues, Analyse spatiale, Télédétection, Connectivité. KEYWORDS: Ecological corridors, Blue and green belt network, Spatial analysis, Remote sensing, Connectivity. 1. Introduction Les réseaux écologiques font l objet d une attention politique et sociétale croissante depuis plus de trois décennies (Jongman et al., 2004) afin d identifier et de protéger les continuités écologiques à l échelle internationale ou européenne, nationale, régionale et jusqu aux plus petites entités administratives. En effet, en dépit du fait que les processus en jeu font encore largement débat au sein de la communauté scientifique, des recherches ont montré que les continuités écologiques favorisent les mouvements d organismes et la continuité des processus écologiques (Gilbert-Norton et al., 2010). L enjeu majeur auquel doit répondre le développement d un réseau écologique est le maintien de la biodiversité existante dans des systèmes écologiques dominés par les activités anthropiques (Bennett et al., 2006 ; Fahrig et al., 2011). Les lois Grenelle 1 (2009) et 2 (2010) prévoient la mise en place d une trame verte et bleue correspondant respectivement à des réseaux écologiques terrestres et aquatiques sur l ensemble du territoire français, afin de maintenir la biodiversité et les services écosystémiques. En complément de la loi Grenelle 2, des orientations nationales ont été définies afin de préciser le cadre retenu pour approcher les continuités écologiques à diverses échelles spatiales et de façon cohérente sur l ensemble du territoire national (MEDDTL, 2011 ; Sordello et al, 2011). Ces orientations sont prises en compte dans le cadre des Schémas Régionaux de Cohérence Ecologiques (SRCE) pour la cartographie des trames à l échelle régionale, ces derniers étant eux-mêmes pris en compte dans les documents de planification et les projets des collectivités territoriales et de leurs groupements, notamment en termes d aménagement de l espace. Dans ce contexte réglementaire, les collectivités locales et les bureaux d étude sont amenés à réaliser des cartographies de trames vertes et bleues. Or, il existe actuellement un décalage entre l urgence de la mise en place de la trame verte et bleue, qui doit être effectuée pour la fin de l année 2014, et les connaissances scientifiques sur lesquelles s appuyer pour cela. Ce décalage s observe tant au niveau de l identification, du fonctionnement écologique, du statut réglementaire, de la gestion que de l'évaluation de l efficacité des trames. Ainsi, la communauté scientifique est très régulièrement interrogée par les gestionnaires du territoire en charge de la constitution et de la mise en œuvre des trames vertes et bleues sur les moyens d identifier et de cartographier ces dernières. Parallèlement, la mise à disposition de nouvelles données d observation de la terre offre des
3 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 3 possibilités d amélioration souvent méconnues de la communauté scientifique ellemême pour la cartographie de ces trames. Il apparaît donc pertinent et d actualité de faire le point sur les données et les méthodes d identification des continuités écologiques. La trame verte et bleue est composée de deux principaux éléments (MEDDTL, 2011) : les réservoirs de biodiversité d une part, définis comme «des espaces dans lesquels la biodiversité, rare ou commune, menacée ou non menacée, est la plus riche ou la mieux représentée, où les espèces peuvent effectuer tout ou partie de leur cycle de vie (alimentation, reproduction, repos) et où les habitats naturels peuvent assurer leur fonctionnement, en ayant notamment une taille suffisante» sont des habitats écologiques de grande taille souvent considérés comme des noyaux ou zones puits; les corridors écologiques d autre part, qui assurent «des connexions entre des réservoirs de biodiversité, offrant aux espèces des conditions favorables à leur déplacement et à l accomplissement de leur cycle de vie». Généralement, les écologues s accordent pour définir les corridors comme des éléments paysagers linéaires entre deux taches d habitats, au sein d un environnement contrasté, la matrice (Forman et Godron, 1986 ; Beier et Noss, 1998). Or, si les réservoirs sont généralement bien connus et inventoriés, les questions de l identification et de la cartographie des corridors qui les relient restent posées. Plusieurs raisons peuvent expliquer cela : Tout d abord, les corridors peuvent prendre différentes formes : linéaire, en pas japonais ou paysager (Figure 1). Ensuite, en fonction des objectifs définis en termes de biodiversité et de services écosystémiques d un côté et des échelles considérées de l autre, les corridors sont constitués d éléments de nature différente. Ainsi, ils peuvent prendre en compte exclusivement des espaces boisés ou à l inverse inclure des espaces mixtes constitués de surfaces en eaux, de zones humides, de prairies et de bois, ou encore des espaces agricoles ouverts. Enfin, de tailles très variables, ils peuvent être réduits à une haie à une échelle très locale ou correspondre à des continuums larges de végétation «naturelle» à une échelle régionale. L identification et la cartographie de ces continuités écologiques se posent donc à différentes échelles spatiales. Quelle que soit l échelle à laquelle elle est entreprise, la cartographie des continuités écologiques soulève un certain nombre de questions en grande partie dues au manque de connaissances sur les méthodes ou les données disponibles. Plusieurs approches méthodologiques ont été appliquées ou sont en cours de développement pour cartographier les trames vertes et bleues (Amsallem et al., 2010), que ce soit à l échelle nationale (Berthoud et al., 2003), à l échelle régionale (Hendoux, 2011), ou à l échelle locale (François et al., 2010). Elles peuvent être regroupées en deux familles principales. La première comprend les approches centrées sur les espèces animales ou végétales qui déterminent la trame verte et bleue en fonction des connaissances acquises sur les espèces d un territoire, les habitats favorables à leur survie et leur capacité de déplacement. Toutefois, les capacités de dispersion des espèces et les facteurs qui les contraignent sont assez peu
4 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 4 connus (Liénard et Clergeau, 2011), sans compter que les données relatives aux espèces sont rarement disponibles en dehors des territoires dont le patrimoine naturel fait l objet de mesures particulières (inventaires, mesures de gestion, ou de protection, etc.). La seconde famille regroupe les approches de type éco-paysagères qui reposent sur la structuration des éléments du paysage sur un territoire donné. Dans ce cas, les éléments du paysage constitutifs de la trame verte ou bleue sont d abord identifiés à partir de cartes existantes ou à partir de bases de données nationales, puis connectés à partir de méthodes reposant soit sur des indices relevant de l écologie du paysage (Saura et Rubio, 2010), soit sur la théorie des graphes (Pascal-Huorta et Saura, 2006). Le choix de la méthodologie utilisée pour cartographier la trame verte et bleue selon ce type d approche dépend de l échelle considérée, de la disponibilité et de la qualité des données, et de la stratégie définie par les acteurs selon les enjeux locaux ou régionaux, qu ils soient d ordre écologique ou politique. Figure 1. Exemple d éléments de la trame verte et bleue : réservoirs de biodiversité et types de corridors terrestres (source : Amsallem et al., 2010, d après Bennett 1991) D une façon générale, la cartographie des corridors effectuée selon une approche éco-paysagère utilise des données multi-sources, mêlant bases de données cartographiques diverses, données de télédétection et observations réalisées sur le terrain. Plusieurs couches d information spatialisées sont actuellement disponibles dans les bases de données nationales pour réaliser cette cartographie (Tableau 1). Or l exploitation de ces couches pose un certain nombre de questions relevant de la qualité des données elles-mêmes, de leur traitement et de leur pertinence, tant vis-àvis des caractéristiques des territoires étudiés que des échelles auxquelles ces derniers sont appréhendés. Par exemple, la cartographie des continuités écologiques à partir de la couche Corine Land Cover montre que l exploitation de cette dernière
5 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 5 est inadaptée dans les régions aux paysages fragmentés du Grand Ouest français, puisqu elle ne prend pas en compte les corridors écologiques de petites tailles comme les haies bocagères (Figure 2). Tableau 1. Couches d information présentes dans des bases de données nationales et exploitables pour la cartographie des corridors écologiques Echelle Raster 1/ SCAN100 (IGN ) Données de base Vecteur Corine Land Cover (IFEN ) BD CARTO (IGN ) Données thématiques biodiversité Carte nationale des habitats (MEDDTL) 1/ /10000 SCAN25 (IGN ) Bd Ortho (IGN ) BD CARTHAGE (IGN ) Bd Topo (IGN ) Carte nationale forestière (IGN ) Carte des ZNIEFF Carte des espaces protégés Carte Natura /5000 Carte locale des habitats Figure 2. Cartographie des territoires non fragmentés à l échelle nationale (Source : Corine Land Cover, d après Deshayes, 2006, Projet d expertise : Réalisation d une cartographie des espaces naturels terrestres non fragmentés, UMR TETIS Cemagref, Cirad, AgroParisTech-ENGREF)
6 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 6 La télédétection constitue une source de données largement utilisée pour identifier et caractériser des réseaux écologiques, que ce soit de façon directe à travers le traitement et l analyse de photographies aériennes et d images de satellites ou de façon indirecte via l exploitation de bases de données constituées à partir de données de télédétection, telles que Corine Land Cover. Ces couches d information sont dérivées de données de télédétection à haute résolution spatiale (photographies aériennes, images SPOT). Or, il existe aujourd hui une large gamme de données utilisables pour cartographier les corridors écologiques à différentes échelles (Figure 3). Figure 3. Résolutions spatiales et échelles d exploitation des données de télédétection La cartographie des corridors effectuée à partir de données multi-sources diffère selon l échelle à laquelle elle est effectuée. A une échelle régionale, ce sont généralement les continuums boisés qui sont mis en évidence, ce qui minimise l emprise spatiale réelle des corridors écologiques. A des échelles locales ou microlocales, ces cartographies sont pour la plupart réalisées à partir de l inventaire des zones ayant un statut de protection (RNN, APPB,...) et/ou pour lesquelles des
7 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 7 inventaires faunistiques et floristiques détaillés ont été réalisés (ZNIEFF, sites NATURA 2000,...), de l utilisation de photographies aériennes et de travaux de terrain complémentaires permettant de définir la qualité des éléments paysagers repérés précédemment. A cette échelle, l utilisation d images satellitales pour l identification des corridors est encore marginale. Dans ce contexte, les objectifs de cette étude étaient d identifier des corridors à partir des données actuellement disponibles et de déterminer à quelles échelles territoriales les cartographies des corridors réalisées avec ces données sont exploitables. Pour cela, après avoir recensé et analysé les couches d information disponibles dans des bases de données nationales et une base de données régionale, ces couches ont été traitées et comparées pour cartographier les corridors aux échelles régionale, intercommunale, et communale/infracommunale. Nous avons choisi de centrer cette étude sur les corridors et non sur l ensemble de la trame verte et bleue, puisque la plupart des réservoirs sont déjà connus. Cette étude s appuie sur l exemple de la région Bretagne qui présente un paysage bocager très fragmenté qui ne facilite pas la mise en évidence de corridors écologiques à l échelle régionale. 2. La cartographie des corridors à l échelle régionale 2.1. Données et méthode Les données qui ont été utilisées pour cartographier les corridors écologiques à l échelle régionale sont extraites de bases de données accessibles à tous en ligne. Elles comprennent deux types de données issues des bases de données nationales, la couche Corine Land Cover (CLC) et la BD CARTO, et une couche extraite d une base de données régionale que nous avons créée et que nous appellerons COSTEL Land Cover (CoLC) (Tableau 2). Tableau 2. Données utilisées pour cartographier les corridors à l échelle régionale Données Corine Land Cover BD CARTO IGN COSTEL Land Cover Données Sources Précision (Ha) Mise à jour Landsat TM 25 5 ans Carte TOPO 1:50000 IGN Image SPOT Landsat TM Orthophotoplan IGN ans 1 5 ans Dates Licence Nomenclature (Bretagne) Libre 5 classes niveau 1 27 classes niveau 2? Payante 9 classes Propriétaire 9 classes
8 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 8 La couche CLC est issue d une base de données géographiques présentant l inventaire de l occupation du sol au 1/ ème sur l ensemble de l Europe (IFEN, 2008). La méthode utilisée pour la créer est basée principalement sur la photo-interprétation d images satellitaires Landsat et SPOT. Les unités cartographiées, dont la taille minimale est de 25 ha, sont classées selon une nomenclature hiérarchisée en 44 thèmes. Les objets terrestres ayant une surface inférieure à 25 ha ne sont pas extraits, ce qui entraîne une sous représentation des classes très fragmentées au profit des catégories d occupation des sols dont les surfaces sont plus étendues et compactes. Ainsi, la classe «surfaces boisées» n inclut pas les haies, les boqueteaux et les petits bosquets, alors qu elle englobe des surfaces non boisées telles que des petites parcelles agricoles au sein ou en bordure de massifs forestiers. Trois versions de Corine Land Cover sont actuellement disponibles : la version de 1990 a été élaborée à partir d images enregistrées entre 1987 et 1994, et les versions de 2000 et 2006 à partir d images datant respectivement et majoritairement de 2000 et de Les cartes d évolution entre ces versions sont produites en découpant le territoire en mailles de 3 kilomètres de côté (IFEN, 2005). Ainsi, les évolutions des grandes surfaces homogènes sont grossièrement localisées, alors que les évolutions de faible ampleur, portant sur moins de 5 hectares, ne sont pas décrites. En outre, il n est pas possible d évaluer une évolution d une durée supérieure à une dizaine d années à partir de cette base de données. La BD CARTO est une base de données produite par l IGN (Institut Géographique National et Forestier) sur l ensemble du territoire national et exploitable à des échelles moyennes variant du 1/ ème au 1/ ème (IGN, 2006). Elle a été constituée à partir de la numérisation des cartes topographiques de l IGN au 1/ ème et de la photo-interprétation d images SPOT. La nomenclature de la BD CARTO comprend 7 thèmes : les réseaux routier, ferré, hydrographique, administratif, l occupation du sol, les équipements, et les toponymes, le thème «Occupation des sols» comprenant 14 classes. Selon les versions de la BD CARTO et les items de la nomenclature considérés, la taille des objets cartographiés s échelonne de 1 à 25 ha, et leur précision géométrique varie entre 15 et 50 mètres, selon les thèmes et selon le type de paysage concerné, la précision étant plus élevée en milieu rural qu en milieu urbain. Le rythme de la mise à jour de la BD CARTO varie selon les thèmes, ce qui ne permet pas d étudier des changements d occupation des sols. Par exemple, le réseau routier est mis à jour annuellement, tandis que l occupation des sols n a pas été identifiée depuis La couche CoLC a été élaborée par le laboratoire COSTEL afin de produire une cartographie de l occupation des sols sur l ensemble de la région Bretagne, ce qui représente une superficie de km², et exploitable à des échelles variant du 1/ ème au 1/25000 ème. La nomenclature de cette couche est assez réduite, puisqu elle comprend 9 thèmes, mais les objets sont représentés de façon détaillée au regard de la superficie considérée, l unité minimale de cartographie étant d un ha.
9 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 9 Elle a été créée en utilisant plusieurs types de données de télédétection et appliquant une méthode de traitement d images hybride : cinq scènes satellitaires Landsat Thematic Mapper et une série temporelles d images MODIS ont été classées de façon automatique afin d identifier respectivement 5 thèmes («Surfaces boisées à dominante conifères», «Surfaces boisées à dominante feuillus» «Surfaces en eau», «Surfaces artificialisées», «Surfaces agricoles»), et discriminer les «Cultures» des «Prairies» au sein du thème «Surfaces agricoles», tandis que des photographies aériennes de l IGN (ou des orthophotoplans selon les dates) ont fait l objet d une photo-interprétation assistée par ordinateur pour identifier les 3 thèmes restants («Fourrés pré-forestiers juvéniles», «Fourrés pré-forestiers matures», «Landes»). La couche a été produite pour trois dates (1985, 2005, 2010), ce qui permet de cartographier de façon détaillée l évolution de l occupation des sols entre ces dates à l échelle régionale. Comparativement à la couche CLC, la BD CARTO comprend moins de classes thématiques pour le thème «Occupation des sols», mais elle prend en compte des objets de taille plus réduite. A ce titre, ces couches apparaissent bien complémentaires. Dans les deux cas, l'occupation des sols est une information géographique fortement interprétée, ce qui peut entraîner des erreurs (Coudercy, 1997). En particulier, les objets appartenant à une thématique mixte (parcellaire complexe, territoire partiellement occupé par...) peuvent être interprétés diversement selon le photo-interprète, tant au niveau de leurs limites avec les objets voisins que de leur affectation à un thème donné. Par ailleurs, la mise à jour de ces couches reste très irrégulière, ce qui entraîne une forte imprécision sur l identification et la quantification des changements d occupation des sols. A contrario, la couche CoLC permet de cartographier l occupation des sols de façon détaillée, tout en étant remise à jour de façon synchrone, ce qui facilite l analyse détaillée des changements à l échelle régionale. La seule classe d occupation des sols constitutive des corridors écologiques présente dans les couches d information extraites des trois bases de données utilisées correspond aux surfaces boisées. Afin de pouvoir comparer les cartes des corridors dérivées de ces couches, toutes les classes correspondant aux surfaces boisées ont été retenues (Tableau 3). Les corridors cartographiés sont donc réduits ici aux continuums boisés. Tableau 3- Classes retenues dans les nomenclatures associées aux couches d information utilisées pour cartographier les corridors boisés BD Corine Land Cover (CLC) BD CARTO IGN BD COSTEL LAND COVER (CoLC) 311 Forêts de feuillus Forêts 21 Forêts de feuillus 312 Forêts de conifères 22 Forêts de conifères 313 Forêts mélangées 62 Fourrés pré-forestiers matures 324 Forêts et végétation arbustives en mutation
10 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 10 Un indice de connectivité des boisements a été calculé pour chacune des trois couches d information. Parmi les indices existants, nous avons retenu un indice simple, rapide à calculer et facilement interprétable, qui est le nombre d éléments boisés, quelle que soit leur taille, connectés à une distance de 200 mètres dans toutes les directions. La distance de connexion retenue correspond approximativement à la distance minimale de dispersion d une espèce d oiseaux généraliste, le merle noir (Turdus Merula) (Paradis et al., 1998), des travaux étant engagés afin d évaluer l impact des corridors écologiques sur la dispersion de cette espèce sur la Zone Atelier Armorique (Programme DIVA CORRIDORS, projet Agriconnect) Analyse comparative des cartes La comparaison des cartes des corridors boisés à l échelle régionale montre que les couches d information extraites des trois bases de données mettent en évidence les continuités écologiques avec des niveaux de précision différents selon la couche mais aussi selon la taille des éléments boisés considérés (Figure 4 et Tableau 4). BD Corine Land Cover (CLC) BD CARTO IGN BD COSTEL land Cover (CoL Surfaces boisées 0 50 Nombre de bois Legend bois_costel_buf200 Legend bois_costel_buf200 bois_costel_buf200.count Legend 1-10 bois_costel_buf200 bois_costel_buf200.count Legend bois_costel_buf200 bois_costel_buf200.count Legend bois_costel_buf200 bois_costel_buf200.count Legend bois_costel_buf200 bois_costel_buf200.count bois_costel_buf200 bois_costel_buf200.count bois_costel_buf200.count Classe de bois de 5ha Legend Figure 4- Identification des corridors boisés à l échelle régionale à partir des couches extraites des trois bases de données: cartes des éléments boisés (en haut) ; distribution du nombre d éléments boisés extraits en fonction de leur taille en ha (au milieu) ; carte de connectivité des éléments boisés (le nombre d éléments connectés est indiqué en bas)
11 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 11 Ainsi, les graphiques présentés dans la partie centrale de la figure 4, qui représentent la distribution du nombre de bois par classes de surface de 5 ha, montrent que la distribution des boisements de grande dimension (supérieurs à 50ha) est similaire pour les trois couches. Toutefois, si le nombre des surfaces boisées supérieures à 50 ha extraites varie peu selon la couche considérée (de 1079 à 1212), il représente une proportion de boisements par rapport à l ensemble des boisements extraits très variable (de 4 à 47%) (Tableau 4). A contrario, la représentation des surfaces boisées inférieures à 50 ha change sensiblement selon les couches. Ainsi on observe bois de moins de 25 ha en Bretagne à partir de la couche CoLC contre 3141 pour la BD CARTO et 1319 pour la couche CLC. Au total, 96% des surfaces boisées mises en évidence par la couche CoLC ont une superficie inférieure à 50 ha, contre 71% et 52% respectivement pour la BD CARTO et pour la couche CLC. Le nombre d omissions augmente avec la diminution de la taille des boisements, la quasi-totalité des boisements inférieurs à 25 ha étant absents pour la couche CLC. Ces différences s expliquent principalement par le seuil minimal de cartographie retenu au niveau de l élaboration des bases de données (Tableau 2). Les couches dérivées des trois bases de données apparaissent donc adaptées à la cartographie des ensembles boisés d une superficie supérieure à 50 ha. Toutefois, il n en est pas de même pour les boisements de taille inférieure, qui ne peuvent être correctement extraits qu à partir de la BD CoCL. Ainsi, dans des régions au paysage très fragmenté comme la Bretagne où la majorité des espaces boisés ont une taille comprise entre 1 et 5 ha, les BD CARTO et CLC ne sont pas adaptées pour cartographier ces éléments paysagers. Tableau 4- Surfaces boisées extraites à l échelle régionale à partir des trois bases de données Bois 1ha Bois 10ha Bois 10ha Nombre % Nombre % Nombre % BD CoLC BD TOPO Niv. 1 BD TOPO Niv La comparaison des cartes de continuités écologiques élaborées à l échelle régionale à partir des cartes des surfaces boisées illustre l impact de la précision des trois bases de données sur la représentation des corridors (figure 4, partie inférieure). En émettant l hypothèse que l augmentation du nombre de connections entre les boisements influe positivement sur la circulation des espèces (ce qui reste à vérifier pour une partie d entre elles), nous avons choisi de mettre en évidence le
12 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 12 niveau de connectivité entre les éléments boisés à travers le nombre d éléments boisés connectés à une distance inférieure à 200m. Les cartes des corridors dérivés de la couche CLC et de la BD CARTO sont similaires : Elles montrent des boisements de grande dimension relativement isolés avec un faible nombre de connections avec les boisements de taille inférieure. Le niveau de connectivité évalué à partir de ces cartes est faible, un seul groupe de boisements étant caractérisé par plus de 100 connections. La carte dérivée de la couche CoLC contraste avec les deux précédentes, car elle montre un niveau de connectivité beaucoup plus élevé à l échelle régionale. Cette carte fait toutefois apparaître un contraste fort entre les secteurs où le niveau de connectivité entre les éléments boisés est très élevé (Morbihan, Bretagne centrale) et les secteurs où le niveau de connectivité est très faible (Ille et Vilaine, région de Pontivy, Littoral nord-ouest). Il apparaît donc que la finesse de représentation des éléments boisés à partir de la couche CoLC permet de mettre en évidence le rôle essentiel des boisements de petite taille dans les continuités écologiques qui influent sur la circulation des espèces à une échelle régionale. 3. La cartographie des corridors à l échelle intercommunale 3.1. Données et méthode La cartographie des corridors écologiques à l échelle intercommunale a été effectuée à partir de données extraites de deux bases différentes, la couche CoLC précédemment décrite et la couche VEGETATION de la BD TOPO de l IGN. La couche VEGETATION de la BD TOPO version 1 a été produite à partir de 2006 conjointement par l IGN et l IFN (Institut Forestier National), dès que la mise à disposition de référentiels numériques photographiques comme la BD Ortho, actualisée tous les 5 ans avec une résolution de 50 cm, a permis d envisager une cartographie de la végétation au 1/25 000ème à l échelle nationale (Touzet et Lecordix, 2010). Elle est élaborée à partir de la segmentation et de la photointerprétation de la BD Ortho en Infrarouge Couleur. Elle comprend les forêts, ainsi que des autres éléments arborés constitutifs de la couche végétation de la BD Topo : les bosquets (appelés bois dans la nomenclature BD Topo ), les haies, les vergers et certains arbres isolés. Le seuil de représentation des espaces boisés est de 0,5 ha. Les espaces dont la taille est comprise entre 0,5 ha et 2 ha sont cartographiés en précisant la densité de végétation (forêt ouverte/forêt fermée) et sa composition (feuillue/résineuse), tandis qu au-delà de 2 ha les essences pures de la forêt fermée sont identifiées quand leur taux de recouvrement dépasse 75 %. La mise à jour de cette couche est programmée tous les cinq ans. La version 1 de la couche VEGETATION de la BD TOPO ne comprend donc qu une classe thématique, alors que la version 2 en comprend 10 (IGN, 2011). Toutefois, la version 2 de cette
13 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 13 couche n est pas disponible sur un certain nombre de régions françaises, parmi lesquelles la Bretagne. Les données issues de la BD TOPO utilisées dans le cadre de cette étude présentent deux niveaux de précision (Tableau 5). Un premier, le plus précis (BD TOPO VEGETATION Niv. 1), qui correspond à la couche végétation originale produite par l IGN et l IFN, comprend l ensemble des espaces boisés de plus de 500m² (bois, boqueteaux, haies ). Le second niveau, plus grossier (BD TOPO VEGETATION Niv. 2), inclut les bois, bosquets et boqueteaux de plus de 5000 m², ce seuil correspondant à la limite inférieure de la classe «Boqueteau» de l IFN. Pour obtenir cette couche, nous avons appliqué une opération morphologique de fermeture (érosion-dilatation) sur la couche BD TOPO Niv. 1. Cette dégradation a été effectuée afin de permettre la comparaison entre la couche CoLC et la couche d information issue de la BD VEGETATION, les haies n étant pas présentes sur la couche CoLC. Les surfaces boisées représentées dans les trois couches utilisées à l échelle intercommunale ont été regroupées en une seule classe thématique. Cette classe inclut une très grande partie des surfaces boisées pour la couche BD TOPO Niv. 1, puisque seuls les arbres isolés et les haies ayant une faible canopée sont omis, tandis que les couches BD TOPO Niv. 2 et CoLC ne comprennent pas le réseau de haies, ce qui peut représenter une forte proportion des éléments paysagers boisés dans des régions bocagères. Tableau 5. Données utilisées pour cartographier les corridors à l échelle intercommunale Données BD TOPO IGN Couche végétation V1 BD CoLC Données Sources BD ORTHO Relevés GPS BD Carto Carte TOPO Landsat TM Orthophotoplan IGN Précision (Ha) Mise à jour Dates Licence Nomenclature (Bretagne) ans 2006 Payante 1 classe 1 5 ans Propriétaire 9 classes 3.2. Analyse comparative des cartes L analyse comparée des cartes produites à partir des couches CoLC et BD TOPO VEGETATION Niv. 2 montrent que leur représentation des boisements est assez proche, malgré la différence de précision des deux couches (le seuil minimal de détection des éléments boisés est de 1 ha pour la première et de 0,5 ha pour la
14 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 14 seconde), tandis qu elle contraste fortement avec la carte générée à partir de la couche BD TOPO VEGETATION Niv. 1. En effet, en dépit de la différence de précision entre les couches CoLC et BD TOPO VEGETATION Niv. 2 qui se reflète à travers le nombre de boisements de petite taille détectés (Figure 5, partie centrale ; Tableau 6), les valeurs de l indice de connectivité calculé à partir de des deux couches (Figure 5, partie basse) diffèrent très peu. Ceci peut s expliquer par le fait que les bois non connectés sont de petite taille et dispersés dans le paysage. Ces couches permettent de mettre en évidence les principaux groupes d éléments boisés connectés et par contraste les espaces où le niveau de connectivité est faible. Il apparaît donc que la couche CoLC offre un niveau de précision suffisant pour cartographier les principales continuités écologiques à une échelle intercommunale. Toutefois, ces deux couches ne prennent en compte que les espaces boisés d une dimension supérieure à 0,5 ha pour la BD TOPO VEGETATION Niv. 2 et de 1ha pour la BD CoLC, excluant ainsi le réseau linéaire des haies qui constitue une partie non négligeable des éléments boisés qui composent le paysage breton. BD COSTEL land Cover (CoLC) BD TOPO IGN VEGETATION Niv. 2 BD TOPO IGN VEGETATION Niv Kms Nombre de Bois Surfaces boisées Classe de Bois de 1ha Kms Figure 5- Identification des corridors boisés à l échelle intercommunale à partir des couches extraites des bases de données COSTEL Land Cover et BD TOPO de l IGN : cartes des éléments boisés (en haut) ; distribution du nombre d éléments boisés extraits en fonction de leur taille en ha (au milieu) ; carte de connectivité des éléments boisés (le nombre d éléments connectés est indiqué en bas)
15 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 15 La couche BD TOPO VEGETATION Niv. 1 permet de prendre en compte la quasi-totalité du réseau de haies bocagères. Le nombre de boisements de petite taille détectés est sensiblement supérieur au nombre mis en évidence avec les deux autres couches de données, 99,8% des surfaces boisées mises en évidence par cette couche CoLC ayant une superficie inférieure à 10 ha et encore 97% pour les surfaces boisées de moins de 1ha, contre 7,5% pour la couche BD CoLC pour cette dernière catégorie (Tableau 6). Tableau 6- Surfaces boisées extraites à l échelle intercommunale partir des deux bases de données Bois 1ha Bois 10ha Bois 10ha Nombre % Nombre % Nombre % BD CoLC BD TOPO Niv. 1 BD TOPO Niv Si l on observe la carte de connectivité obtenue à partir de cette couche (Figure 5, partie basse), il apparaît que l ensemble des éléments boisés représentés sont connectés à une distance inférieure à 200m. Cela souligne l importance de la prise en compte du bocage pour l analyse de la connectivité à une échelle intercommunale. Toutefois, pour observer l hétérogénéité du niveau de connectivité au sein de la matrice agricole, il est nécessaire de recalculer l indice de connectivité en abaissant le seuil de dispersion des espèces. La cartographie de l indice élaboré en connectant les éléments boisés distants de moins de 50 m a permis de montrer des disparités de connectivité à une échelle intercommunale avec un niveau de précision élevé. Ce niveau est nécessaire pour analyser la fonctionnalité des corridors écologiques pour certaines espèces, le seuil de 50 m correspondant par exemple à la distance moyenne de dispersion d auxiliaires des cultures de type carabes (Charrier et al., 1997 ; Lys et Nentwig, 1992). Ainsi, à l échelle intercommunale, les informations dérivées à partir des deux bases de données utilisées apparaissent complémentaires : la BD CoLC permet de faire ressortir les principales continuités écologiques boisées, qui peuvent potentiellement impacter la circulation de certaines espèces, tandis que la BD TOPO, à travers sa couche VEGETATION, permet de mettre en évidence les continuités générées à partir de la quasi-totalité des éléments boisés présents dans le paysage. Ainsi, elle fait ressortir les continuités écologiques potentiellement utilisables pour les espèces à faible mobilité. En outre, la composition de ces
16 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 16 continuités boisées peut dors et déjà être décrite avec trois classes thématiques pour la BD CoLC et bientôt avec 10 classes sur l ensemble du territoire national pour la BD TOPO version La cartographie des corridors à l échelle communale/infracommunale 4.1. Données et méthode Les données qui ont été utilisées pour cartographier les corridors écologiques à l échelle communale/infra communale comprennent la couche BD TOPO VEGETATION Niv. 1 précédemment décrite, et des données de télédétection à Très Haute Résolution Spatiale (THRS). Les données THRS qui ont été exploitées incluent une image satellitaire et des données acquises par un laser aéroporté, en l occurrence un LiDAR (Tableau 7). L image satellitaire a été acquise par le capteur KOMPSAT et présente des résolutions spatiales et spectrales comparables aux images enregistrées par les capteurs tels que Quickbird, Pléiades, ou encore Worldview. Les données acquises par le LiDAR sont d une tout autre nature, puisqu il s agit de données altimétriques permettant de déterminer la hauteur et la forme des objets à la surface de la terre (Lefsky et al., 2002). Ces données permettent de représenter la matrice paysagère en trois dimensions et d identifier ainsi avec précision les éléments qui la composent. Tableau 7. Données utilisées pour cartographier les corridors à l échelle communale/infra-communale Capteur Résolution spatiale (en m) Date d acquisition Bandes spectrales KOMPSAT /09/08 Bleu, Vert, rouge, PIR Répétitivi 26 jours LIDAR /04/09 Vert Sur deman Les éléments boisés ont été extraits de l image KOMPSAT avec une approche orientée objet (Logiciel Ecognition) incluant une phase de segmentation et une phase de classification des objets segmentés par arbre de décision (Friedl et Brodley, 1997) basée sur des critères de texture et de forme. Dans le cas des données LiDAR, un certain nombre de prétraitements ont été nécessaires avant de réaliser la classification des éléments boisés: réalisation et correction du Modèle Numérique deterrain (MNT), normalisation en Z (altitude) du
17 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 17 nuage de points, réalisation du Modèle Numérique d Elévation (MNE). Une fois ces différents prétraitements réalisés, les données ont été classées selon une approche orientée objet en utilisant les images d intensité (intensité du signal rétrodiffusé capté par le LiDAR), le MNE et la pente dérivée du MNE. Le niveau de précision des données utilisées à cette échelle étant très élevé, la carte des éléments boisés dérivée de ces données, très détaillée, devrait faire apparaître les continuités écologiques. Nous avons donc considéré qu il n était a priori pas nécessaire de calculer un indice de connectivité des boisements. A ce niveau scalaire, nous avons donc seulement cherché à comparer les classifications effectuées avec les trois types de données THRS décrits ci-dessus Analyse comparative des cartes La comparaison des cartes des espaces boisés produites à partir des trois types de données montre la supériorité des données LiDAR sur l image satellitaire THRS et la BD TOPO VEGETATION (Figure 6). Les données LiDAR permettent de détecter la totalité des éléments boisés existants sans générer d erreurs de sur ou de sous-estimation. Le LIDAR permet en effet d extraire de manière très fiable l ensemble des éléments arborés et de les caractériser par strate. Il offre ainsi la possibilité de détecter les arbres présentant une faible canopée (jeunes arbres ou arbre émondée) et qui les rendent plus difficilement identifiables, voire non détectables, avec des données de télédétection acquises en 2D. A contrario, les cartes produites à partir de l image KOMPSAT et de la BD TOPO VEGETATION Niv. 1 présentent un certain nombre d erreurs (Figure 6 et Tableau 8). La classification effectuée avec l image KOMPSAT présente un taux de sur-détection assez important du à une confusion entre les surfaces boisées et les ombres portées qui peut s expliquer par les conditions d acquisition de l image et sa résolution spatiale (l image KOMPSAT utilisée a une résolution de 1m. obtenue par la fusion de la bande panchromatique à 1m avec les bandes multi spectrales à 4m) qui entraîne une non détection des arbres émondés et des jeunes arbres. La classification réalisée avec la BD TOPO VEGETATION Niv. 1 présente un niveau de sur-détection inférieur a celui de la classification obtenue à partir de l image KOMPSAT en raison d une meilleure résolution spatiale, mais un taux de sous détection nettement supérieur. Ceci confirme les résultats obtenus par Vannier et al. (2011) qui ont montré que des images ayant une résolution spatiale moins élevée que d autres images présentant par ailleurs une résolution spectrale plus élevée permettent une meilleure détection des éléments linéaires boisés. Il apparaît donc que LiDAR est le capteur à privilégier pour cartographier les continuités écologiques à des échelles fines. Cependant, l acquisition de données LiDAR représente encore un coût assez élevé et des compétences spécifiques pour
18 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 18 leur traitement. L utilisation des images satellitaires THRS du type KOMPSAT présente de réels avantages pour l identification des corridors boisés : elles permettent de produire des cartes assez précises, dont la mise à jour est assez aisée au regard de la répétitivité des capteurs qui acquièrent ce type d images. La BD TOPO VEGETATION présente l avantage de couvrir tout le territoire national, mais est plus difficilement exploitable à une échelle territoriale fine de par sa plus faible précision (le seuil de détection est de 500m²), qui entraîne l omission d une partie du réseau linéaire boisé, en particulier les haies dont les arbres sont émondés. BD TOPO VEGETATION Niv. 1 KOMPSAT LiDAR M BD TOPO VEGETATION KOMPSAT comparé au Niv.1 comparé au LiDAR LiDAR Bonne détection Sur-détection Sous-détection Figure 6- Identification des surfaces boisées à l échelle infra-communale à partir de la couche extraite de la couche BD TOPO VEGETATION de l IGN et des classifications des images KOMPSAT et LiDAR : classe des éléments boisés en rouge sur l orthophotoplan de l IGN (en haut) ; carte évaluant la qualité de la classification des éléments boisés détectés à partir de la couche BD TOPO VEGETATION de l IGN et de l image KOMPSAT par rapport à la classification effectuée à partir des données LiDAR (en bas) Tableau 8- Comparaison des surfaces boisées détectées avec les classifications dérivées de l image KOMPSAT et de la couche BD TOPO VEGETATION de l IGN (la classification effectuée à partir des données LiDAR est la donnée de référence) KOMPSAT (ha) BD TOPO VEGETATION IGN (ha) Sous-détection Bonne détection Sur-détection
19 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale Conclusions Perspectives La cartographie des corridors écologiques effectuée dans cette étude visait à contribuer à répondre à deux questions régulièrement posées aux scientifiques dans le cadre de la mise en œuvre de la trame verte et bleue sur le territoire national : Quelles sont les données disponibles pour cartographier les corridors? A quelles échelles ces données sont-elles exploitables? Les cartes des continuités écologiques produites à partir des données extraites de bases de données nationales, Corine Land Cover et les BD CARTO et BD TOPO de l IGN, et d une base de données régionale, la BD COSTEL LAND COVER, toutes accessibles en ligne, ont été analysées aux échelles régionale, intercommunale et communale/infracommunale. L approche méthodologique mise en œuvre a permis d évaluer comparativement la précision de ces cartes et de montrer l intérêt et les limites de chaque type de données selon l échelle considérée. A l échelle régionale, la couche CoLC permet de mettre en évidence la plupart des boisements de petite taille qui influent sur la circulation des espèces, tandis que ces boisements ne sont pas identifiés à partir des bases Corine Land Cover et BD CARTO. A l échelle intercommunale, les informations dérivées de la BD CoLC permet de faire ressortir les principales continuités écologiques boisées, qui peuvent potentiellement impacter la circulation de certaines espèces, tandis que la BD TOPO, à travers sa couche VEGETATION, met en évidence les continuités générées à partir de la quasi-totalité des éléments boisés présents dans le paysage, faisan ainsi ressortir les continuités écologiques potentiellement utilisables pour les espèces à faible mobilité. A l échelle communale/infracommunale, la BD TOPO VEGETATION apparaît peu adaptée à la cartographie des continuités écologiques, contrairement aux données de télédétection THRS. Les résultats obtenus montrent aussi l intérêt d effectuer des analyses multiscalaires des corridors écologiques : à l échelle régionale, les continuités potentiellement utilisables par les espèces à forte dispersion sont mises en évidence, tandis qu aux échelles inter et infra-communale, ce sont les continuités potentiellement utilisables par les espèces à faible dispersion. Ces cartes des corridors écologiques réalisées dans le cadre de cette étude représentent les limites des corridors boisés potentiellement utilisables pour les espèces. Elles mériteraient d être enrichies par la caractérisation interne de ces corridors, ce qui est dors et déjà envisageable avec la base de données COSTEL Land Cover à une échelle régionale, et avec des données de télédétection THRS à des échelles plus fines. L amélioration prochaine des bases de données disponibles sur l ensemble du territoire national devrait aussi y contribuer.
20 Cartographie des corridors écologiques de l échelle régionale à l échelle infra-communale 20 Remerciements : Cette étude a été réalisée dans le cadre du programme ANR «Villes Durables» pour le projet «Evaluation des trames vertes urbaines et élaboration de référentiels : une infrastructure entre esthétique et écologie pour une nouvelle urbanité» et du programme du MEDDTL «DIVA, Action Publique, Agriculture et Biodiversité» pour le projet «Continuités écologiques dans les paysages agricoles» (Agriconnect). 6. Bibliographie Amsallem, J., Deshayes, M., Bonnevialle, M., 2010, Analyse comparative de méthodes comparatives d élaboration de trames vertes et bleues, Sciences Eaux et Territoires, n 3, pp consulté le 28/05/2012 Beier, P., Noss, R. F., 1998, Do habitat corridors provide connectivity? Conservation Biology. 12(6): Bennett, A. F. 1991, Roads, roadsides and wildlife conservation: a review, in D. A. Saunders and R. J. Hobbs, eds., Nature Conservation 2: The Role of Corridors, Surrey Beatty & Sons Pty Limited, Chipping Norton, Pages Bennett, A. F., Radford, J. Q., Haslem, A., 2006, Properties of land mosaics: Implications for nature conservation in agricultural environments, Biological Conservation, 133, Berthoud, G., Lebeau, R. P., Righetti, A., 2003, Réseau écologique national REN, Une vision pour l interconnexion des espaces vitaux en Suisse, Office fédéral de l environnement, des forêts et du paysage OFEFP, Rapport final, 132 p. Coudercy, L., 1997, Cohérence entre Corine Land Cover et la BDCARTO, Centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques, Ministère de l'aménagement du Territoire et de l'environnement, rapport d étude, 60 p. Charrier, S., Petit, S., Burel, F., 1997, Movements of Abax parallelepipedus (Coleoptera, Carabidae) in woody habitats of a hedgerow network landscape: a radio-tracing study, Agric. Ecosyst. Environ., 61, Deshayes M., 2006, Projet d expertise : Réalisation d une cartographie des espaces naturels terrestres non fragmentés, UMR TETIS CEMAGREF, CIRAD, AgroParisTech-ENGREF Fahrig, L., Baudry, J., Brotons, L., Burel, F., O. Crist, T., J. Fuller, R., Sirami, C., M. Siriwardena, G., Martin, J.L., 2010, Functional landscape heterogeneity and animal biodiversity in agricultural landscapes, Ecology Letters, 14, 2, Forman, R.T.T., Godron, M. 1986, Landscape Ecology, John Wiley & Sons, New York. François, E., Amsallem, J., Deshayes, M., 2010, L intégration du principe de continuité écologique dans les schémas de cohérence territoriale (SCOT) Analyse de 21 expériences de SCOT, Sciences Eaux et Territoires, n 3, p
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