Etude du générique et de l ouverture du film Gente de bien

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Pascale Villeneuve
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1 Etude du générique et de l ouverture du film Gente de bien par Evelyne Larousserie, professeure-relais pour collège au cinéma 77 Générique : Le générique se construit sur une scène du film, et permet de découvrir Eric : - On a l impression que la vie est prise sur le vif - On a l impression que la vie déborde du film On découvre Eric avant le titre du film : c est une manière de montrer qu il est le protagoniste. La première image montre une rue pauvre, et marque l Identité sociale du petit garçon. On découvre aussi que c est une bouteille de plastique qui sert de ballon de foot (cela souligne la pauvreté). Il y a de la pauvreté certes, mais pas de misérabilisme : ce sont des enfants qui s amusent. Eric : il est avec les autres mais il ne fait pas vraiment partie du groupe. On le voit toujours à part. - Il cherche à s élever : il donne des ordres, il indique comment se comporter. Mais les autres ne semblent pas l écouter. Il monopolise tout de même la scène. On peut mettre cette scène en rapport avec la scène (plus tard) où Eric joue au basket avec Francisco et monopolise la balle. - Si on regarde bien, on découvre qu il ne touche pas souvent «la balle». Son seul moyen d être avec les autres est de participer à la frappe d un des garçons. En plus du jeu, c est la violence sous-jacente qui ressort de cette scène : sous couvert de s amuser, on frappe. Cette violence n est que suggérée (pas de pathos), mais elle donne une indication sur le milieu dans lequel vit l enfant. Eric parle plus qu il n agit. Cela est à mettre en opposition avec son rapport à ses parents où la communication est impossible. La scène est filmée caméra à l épaule. On est au plus près des personnages. Il y a l idée d images prises sur le vif ; un travelling accompagne l enfant.

2 Séquence d ouverture : Départ de la maison On peut montrer aux élèves que le début du film contient tout le thème du film : un enfant qui n est pas à sa place. On note le côté autobiographique ; en effet, Franco Lolli déclare : «Je viens d un milieu plutôt bourgeois. Mais j ai toujours été le pauvre parmi les bourgeois. Je m identifie davantage avec l enfant défavorisé qu avec celui de la femme riche, même s il y a de moi dans des deux personnages de Gente de bien». On peut faire chercher aux élèves tous les éléments qui prouvent que le personnage n est pas à sa place. 1 er plan : Eric est presque prostré : il est seul, face à un mur. C est un plan rapproché, en cadrage serré. On est avec lui. Eric est filmé avec son chien qu on découvre à peine. On peut relever le lien chromatique : les couleurs sont ternes, et cela accentue le côté dramatique de la scène. 2 plan : On a la confirmation que le film va prendre le parti de l enfant. On ne voit pas le visage de la mère, on distingue mal les adultes. Cela renforce aussi l idée qu Eric est tout seul. On peut souligner avec les élèves le surcadrage très important. L appartement exigu : les personnages sont enfermés. C est une métaphore : ils sont enfermés dans leur propre vie. Les lignes droites (le mur, la chaise, les tableaux au mur) abondent. Les personnages envahissent le cadre Il y a une agitation autour de l enfant : encore une fois, Eric est exclu de la vie qui se déroule autour de lui : - il ne fait pas partie de cette agitation. Les personnages se déplacent, s activent alors qu Eric reste statique et ne parle pas. On comprend sa désapprobation silencieuse. - On peut noter le champ lexical du départ dans les propos des adultes : «sac», «valise». - Eric est exclu de la conversation : on parle de sa sœur, pas de lui. 3 plan : Il y a toujours un surcadrage : les murs qui enferment, le chien qui fait une barrière entre l enfant et le reste de la famille ; chien agit comme une protection, aussi. C est le chien qui lui sert de famille : les autres sont ensemble, lui est avec le chien. Eric est en dehors de tout : la vie se fait à l écart de lui.

3 4 plan : on retrouve le surcadrage. On passe devant Eric sans faire attention à lui, sans lui parler. 5 plan : l enfermement d Eric est plus poignant encore. Le surcadrage est toujours présent. La porte s ouvre sur un mur : métaphore d un avenir bouché? d un manque de perspectives? Cela est à mettre en rapport avec l air buté de l enfant. Eric est au même niveau que les meubles qu on déménage : lui aussi est l élément qu on va déplacer. On peut relever la symbolique de la porte. On ne verra pas vraiment le passage de cette porte car ce n est pas vraiment là que commence l histoire d Eric. Avec la phrase «Ton papa arrive», on comprend l idée d une famille recomposée, dont Eric est exclu. 6 plan : Le départ d Eric est accompagné par un mouvement de caméra : le travelling. Le fait que la scène se passe de nuit n est pas innocent : les repères sont brouillés, la situation dramatisée. Mais en même temps, on remarque des lumières de fête dont Eric et sa mère sont exclus : ils ne font que passer devant, elle n est pas pour eux. 7 plan : Dans le bus. On imaginait plutôt un départ en voiture. On devine qu Eric ne fait pas partie du déménagement de la famille. Le cadrage est intéressant : tout est serré autour d Eric, filmé à hauteur d enfant. Le bus fait un bruit un peu agressif, qui souligne le côté désagréable du départ. Encore une fois, Eric n est pas à sa place : il n a pas de place assise dans le bus, il est coincé entre plusieurs adultes. On ne distingue toujours pas le visage de la mère, et cela n est pas innocent. On a deux solitudes : la solitude de la mère et la solitude de l enfant. Il n y a pas d échange entre les deux personnages. 8 plan : On découvre enfin la mère. Le cadrage est significatif : un surcadrage enferme la mère ; les barres du bus dessinent des barreaux, comme si la mère était en prison. Le but est de montrer subtilement son tourment intérieur. On voit que le film ne juge pas ses personnages. 9 plan : Il réunit la mère et le fils pour mieux montrer leurs solitudes : non seulement ils ne se regardent pas, mais ils regardent dans deux directions opposées. Les visages sont fermés.

4 10 plan : Passage de la porte du bus. C est important : Eric va passer dans un autre monde. Par deux fois la mère souligne l importance de la chienne. Eric va en devenir responsable. A comparer avec la fin du film. 11 plan : Eric et sa mère ne sont pas à leur place. Ils n ont pas droit au banc. Ils attendent, mais personne n est là pour les accueillir. On peut faire remarquer aux élèves que les valises sont en fait un carton, un sac poubelle, comme Eric n avait pas le droit à un départ digne. C est aussi le signe d un départ précipité, d un manque d argent. Ce qui n est pas innocent non plus, c est que même s ils sont dehors, ils sont tout de même enfermés : on note la présence de stores avec des barreaux sur le côté, de personnages qui envahissent l écran en arrière-plan. Personnages en attente, qui semblent abandonnés. Arrivée du père / Départ de la mère La scène importante dans la mesure où elle lie l arrivée du père et le départ de la mère. On peut citer une phrase de Franco Lolli pour comprendre l arrivée du père : «Je n ai jamais connu mon père, mais j ai imaginé 1000 fois ma rencontre avec lui.» - Il n y a pas de mise en valeur particulière de cette arrivée. Le père surgit un peu d on ne sait où. Il a le visage un peu fermé. Dès son arrivée, on sent que la famille est désunie : il n y a pas d effusions, Eric ne court pas vers son père. - Le père arrive en retard. C est évidemment une métaphore : il est en retard sur la vie de son fils. Le surnom qu il lui donne montre que les liens se sont distendus : il ne connaît plus son fils. On voit aussi l absence de communication et la réprobation d Eric par son mutisme appuyé. Mais encore une fois, il n y a pas de jugement : le père fait ce qu il peut pour établir un contact avec son fils. Eric est exclu (encore une fois) de la discussion entre les parents. Ils ne parlent que du matériel. Eric est coupé de ce qui le rattache à son enfance. Il n a pas de jouets, seulement des vêtements, des draps. Les élèves seront peut-être frappés par l absence d effusions, de sentiments affichés. Il faut attendre longtemps pour avoir un geste de tendresse de la mère. La scène filmée à hauteur d enfant : on prend le parti d Eric ; le visage de la mère est coupé, comme si elle avait déjà disparu. Il y a beaucoup de sensibilité dans la façon de filmer la scène : mutisme de l enfant mais pas de pleurs. La tristesse n en est que plus accentuée.

5 Le départ de la mère est également filmé avec beaucoup de subtilité. On peut imaginer que c est le point de vue d Eric : on ne voit la mère que de dos. La scène est filmée caméra à l épaule : un tremblotement marque le tourment des personnages. Il n est pas innocent de filmer la mère qui se dirige vers un car : cela accentue l idée d une mère qui part, et loin. Cette scène permet aussi de voir que le réalisateur ne juge pas les personnages (c est important à montrer aux élèves qui pourraient être tentés de juger). Les personnages sont mis sur le même pied d égalité. La mère ne se retourne pas : on a l impression qu elle abandonne son enfant. Mais cela est contrebalancé par le plan suivant qui la montre de face, émue. On voit tout son tourment intérieur. Elle n abandonne pas son enfant, elle part parce qu elle est obligée. Cette fois, c est elle qu on suit. Encore une fois elle est filmée au milieu des voitures, en partance.

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