QUELS SONT LES OBSTACLES A LA GESTION DE LA DOULEUR PERCUS PAR LES INFIRMIÈRES?

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1 Master ès Sciences en sciences infirmières Master conjoint UNIVERSITE DE LAUSANNE Faculté de biologie et de médecine, Ecole de médecine et HAUTE ECOLE SPECIALISEE DE SUISSE OCCIDENTALE Domaine santé QUELS SONT LES OBSTACLES A LA GESTION DE LA DOULEUR PERCUS PAR LES INFIRMIÈRES? PAR FABIENNE TEIKE LUETHI DIRECTRICE DE MÉMOIRE PROF. ANNE-SYLVIE RAMELET, PhD Juillet 2013

2 Composition du jury Prof. M. Eicher, PhD, Présidente du jury Doyenne de la Recherche appliquée et du Développement, Haute Ecole de Santé, Fribourg Prof. A.S. Ramelet, PhD, Directrice de mémoire Professeure associée, Institut universitaire de formation et de recherche en soins, Faculté de biologie et de médecine, Université de Lausanne Mme Y. Bangala Experte externe Responsable du programme institutionnel «douleur», Centre Hospitalier Universitaire Vaudois, Lausanne Mémoire déposé le 12 juillet 2013 Mémoire soutenu le 28 août 2013

3 Sommaire De nombreuses études démontrent que la prévalence de la douleur chez les patients hospitalisés est élevée, pouvant atteindre des taux allant jusqu à 80%, avec des conséquences tant sur la santé des personnes qu en termes de santé publique. Les infirmières, confrontées quotidiennement à cette problématique de soin, représentent un pilier essentiel pour son soulagement puisque la gestion de la douleur est aussi liée à leurs évaluations, leurs soins et leurs décisions. Elles sont cependant confrontées à des obstacles classifiés en trois catégories : liés au patient, au système et aux soignants. Le but de cette recherche descriptive transversale est d identifier les obstacles à une gestion optimale de la douleur des patients hospitalisés en milieu hospitalier aigu, perçus par les infirmières. L échantillon non probabiliste de convenance inclut 70 infirmières travaillant dans quatre services de médecine et de chirurgie d un centre hospitalier universitaire de Suisse romande. Le lien électronique pour accéder à la version française du Nurses Perceived Obstacles to Pain Assessment and Management Practices tool, questionnaire en cours de validation de 40 énoncés, a été envoyé par courriel aux infirmières travaillant dans le milieu de l étude depuis au moins trois mois et parlant français. Sur les 107 questionnaires envoyés, 70 ont été retournés ce qui correspond à un taux de participation de 65,4%. Les résultats montrent que 24 obstacles prioritaires interfèrent dans la prise en charge de la douleur. Neuf d entre eux concernent la dimension patient, plus spécifiquement leurs difficultés à utiliser les outils d évaluation, leurs craintes par rapport aux traitements, leur volonté de ne pas déranger et les problèmes d observance médicamenteuse ; sept sont liées au système et aux problématiques de manque de temps, de collaboration insatisfaisante avec les médecins ou au manque de connaissance des médecins ; enfin, huit touchent la dimension infirmière

4 iv et plus particulièrement leurs connaissances et attitude en lien avec l évaluation, la gestion médicamenteuse et la documentation. Cela confirme la complexité des enjeux du processus d évaluation et de soulagement de la douleur infirmant la cause unique du manque de connaissance des infirmières comme seul responsable de cette problématique. Ces résultats invitent les institutions et les centres de formation à repenser leurs stratégies afin d améliorer la qualité des prestations infirmières et ainsi offrir aux patients un confort maximal. Des futures recherches disciplinaires et interprofessionnelles sont justifiées pour dépasser le constat de l existence de ces obstacles et faire des recommandations pour des actions concrètes à mettre en œuvre pour les supprimer.

5 Summary As shown by numerous studies, pain prevalence is high amongst hospitalized patients; up to 80% as mentioned in some studies. There are consequences for people s health, as well as public health. Nurses who are daily confronted with this care issue, play a major role in pain management as it is strongly influenced by their assessments, their care and their decisions. They however, face barriers to optimal pain management that can be linked to the patient, to the system or to the caregivers. The objective of this descriptive, cross-sectional study is to identify the barriers to optimal pain management for patients in acute care settings, as perceived by nurses. The convenience sample included 70 nurses working in four different medical and surgical wards of a university teaching hospital in Western Switzerland. An electronic link to a 40-item questionnaire (Nurses Perceived Obstacles to Pain Assessment, translated in French, not validated yet) was sent to French speaking nurses working for at least three months. Participation rate was 65.4%. The results show that 24 obstacles influence clinical practice. Out of these 24, nine are linked to the patient, more specifically to their difficulties to use assessment scales, their fears regarding treatments, their reluctance to disturb the healthcare team and their problems with treatment adherence. Seven out of 24 are related to the system, such as lack of time, unsatisfactory interprofessionnal collaboration, and physicians lack of knowledge. The eight obstacles related to nurses concern their knowledge and attitudes regarding assessment, the drug management and the transmissions. This confirms the complexity of evaluating and relieving pain, and contradicts the nurses lack of knowledge as the unique cause for poor pain management. Health institutions and education centres are encouraged to think about other strategies in order to improve nursing care quality and provide optimal comfort to

6 vi patients. Further nursing and interprofessional research is warranted, aiming at removing these obstacles and making recommendations for concrete actions to be implemented.

7 Table des matières Composition du jury... ii Sommaire... iii Summary... v Table des matières... vii Liste des tableaux... xii Liste des figures... xiii Remerciements... xiv Introduction... 1 Problématique... 2 Prévalence... 3 Conséquences... 5 Obstacles à la gestion de la douleur... 6 Obstacles liés aux patients... 7 Obstacles liés au système... 8 Obstacles liés aux soignants... 8 Justification... 9 But et question de recherche Recension des écrits Perspective générale La douleur Définition... 13

8 viii Evaluation Obstacles à la gestion de la douleur Obstacles liés aux patients La crainte de déranger les soignants La dépendance, les effets secondaires et la progression de la maladie L observance thérapeutique médicamenteuse Obstacles liés aux soignants L évaluation et les troubles cognitifs Les connaissances et attitudes Les antalgiques en réserve La relation infirmière-patient Obstacles liés au système Le manque de temps Le soutien du système La collaboration intra et interprofessionnelle Cadre Théorique Perspective théorique Modèle théorique Lien du modèle avec cette étude Intérêt pour la discipline infirmière Métaparadigme et courants de pensée Méthode... 53

9 ix Devis Milieu Echantillonnage Instruments Justification du choix Présentation de l instrument Traduction du questionnaire Cohérence interne du NPOP version française Données démographiques Déroulement de l étude Analyses statistiques Description de l échantillon Obstacles à la gestion de l antalgie Considérations éthiques L enquête auprès du personnel soignant Information et consentement Traitement des données personnelles Evaluation des risques Plan de financement et rétribution Résultats Echantillon Caractéristiques sociodémographiques des participants... 72

10 x Description des obstacles à la gestion de la douleur Comparaison des caractéristiques démographiques Discussion Mise en perspective Echantillon Obstacles à la gestion de la douleur Obstacles liés aux patients Obstacles liés au système Obstacles liés aux infirmières Influence des caractéristiques démographiques Pertinence du cadre théorique pour l étude Forces et limites de l étude Méthodologie Instrument de mesure Echantillon Implication pour la pratique, la formation et la recherche infirmière Pratique clinique Formation Recherche Conclusion Références Appendice B

11 xi Appendice C Appendice D Appendice E Appendice F Appendice G

12 Liste des tableaux Tableau 1 Cohérence interne de la version française du NPOP Tableau 2 Caractéristiques sociodémographiques des participantes 73 Tableau 3 Obstacles interférant avec la gestion de l antalgie Tableau 4 Moyennes des obstacles à la gestion de l antalgie par caractéristiques démographiques Tableau 5 Moyenne des obstacles à la gestion de l antalgie par dimension et par service Tableau 6 Moyenne des obstacles à la gestion de l antalgie par caractéristiques démographiques et dimensions... 83

13 Liste des figures Figure 1. L évaluation de la douleur en tant que transaction Figure 2. Cadre de recherche : Adaptation du modèle de l évaluation de la douleur en tant que transaction à une étude sur les obstacles à la gestion de la douleur perçus par des infirmières Figure 3. Diagramme de recrutement Figure 4. Diagramme de rangs des obstacles à la gestion de la douleur limité aux 24 énoncés les plus souvent identifiés Figure 5. Distribution des moyennes par dimension Figure 6. Diagramme des trois dimensions des obstacles à la gestion de la douleur... 87

14 Remerciements Mes remerciements les plus chaleureux vont à : Prof. Anne-Sylvie Ramelet, ma directrice de mémoire, pour son accompagnement motivé et motivant tout au long de ce parcours de master. Serge Gallant, mon directeur, pour son encouragement à réaliser cette formation et pour croire toujours en moi. Christophe, mon compagnon de mémoire, pour ses différences complémentaires indispensables. Nathalie et Corinne, mes précieuses amies relectrices, pour leur temps offert et cet art du français qui a rendu ce mémoire meilleur. Corinne, thank you also for the summary. Jenny, Sandra et Yves, mes amis de route, pour le soutien mutuel, les rires et les partages vrais qui ont allégés ces deux années de formation. Aux cadres des services qui ont soutenu ce projet de recherche en nous ouvrant les portes de leurs services ; aux 70 infirmières qui nous ont permis d augmenter notre savoir ; à la Fondation Pallium pour sa bourse d étude. Boris, mon meilleur ami, pour être toujours là, pour le soutien indéfectible, pour m aider à penser et pour accompagner mes rêves. Matthias & Tom, mes hommes, pour m encourager à aller toujours plus loin avec autant d amour, de patience et de foi ; pour ce chemin de vie ensemble.

15 Introduction

16 Les personnes hospitalisées dans des services de soins aigus présentent fréquemment des douleurs d étiologie diverse. Les infirmières 1, grâce à leur proximité avec les patients, jouent un rôle prépondérant dans la gestion de l antalgie. En effet, les douleurs pouvant avoir des conséquences non négligeables sur la santé des personnes, il est de la responsabilité des infirmières de s engager pour le soulagement de ce symptôme délétère. Cependant, malgré l amélioration des connaissances dans le domaine ces dernières décennies, la douleur reste sous-évaluée et sous-traitée. Cette étude descriptive vise à évaluer les obstacles à la gestion de la douleur perçus par les infirmières. Le premier chapitre de ce mémoire présente la problématique, la justification de l étude, ainsi que le but et la question de recherche. La recension des écrits aborde, dans le deuxième chapitre, l état des connaissances sur la douleur, son évaluation, ainsi que les différents obstacles à sa gestion. Le modèle théorique qui a servi d assise à l étude est présenté dans le troisième chapitre, alors que le quatrième décrit la méthode utilisée pour réaliser l étude, ainsi que les spécificités de l instrument d évaluation choisi. Les résultats obtenus sont présentés dans le cinquième chapitre. Le sixième et dernier chapitre comporte une discussion de ces résultats, fait état des limites et des forces de l étude, et énonce des perspectives pour la suite à offrir à cette recherche. 1 Le féminin est utilisé dans ce travail à titre épicène

17 Problématique

18 La douleur aiguë est le motif le plus fréquent de demande d aide aux professionnels de la santé et un symptôme très répandu chez les personnes hospitalisées (Watt-Watson & McGillion, 2010). Ce chapitre présente la problématique de la gestion de la douleur ainsi que les obstacles à son soulagement. Un bref constat sur l état des connaissances est proposé suivi de la justification à entreprendre une étude sur ce sujet. Enfin, le but de l étude et la question de recherche concluent ce chapitre. Prévalence Comme le montrent de nombreuses études, la douleur est un phénomène fréquemment expérimenté par les patients hospitalisés. Cette réalité a été dénoncée pour la première fois en 1973 par Marks et Sachar (cités dans Wells, Pasero, & McCaffery, 2008) dans une recherche qui signalait que 73% des patients hospitalisés dans un service de médecine souffraient de douleurs modérées à sévères. Ce problème reste d actualité avec des chiffres atteignant encore 84% selon deux études récentes (Gerbershagen et al., 2009; Sawyer, Haslam, Daines, & Stilos, 2010). La prévalence de la douleur en milieu intra-hospitalier ou extra-hospitalier varie en fonction de la population concernée, du type de pathologies et des traitements suivis. Dans un hôpital universitaire de Suisse romande, les enquêtes de satisfaction réalisées en 2008 (ESOPE, 2008) révèlent que plus de 53% des patients déclarent avoir éprouvé des douleurs durant leur séjour hospitalier et que celles-ci était modérées (45,3%) à fortes (46,9%). Une étude menée dans une unité d hospitalisation aiguë de gériatrie démontre que 67,3% des patients

19 4 présentent des douleurs à plus de 4 sur 10 sur une échelle numérique (0 = absence de douleur, 10 = douleur maximale imaginable), et que seulement 49% de ces patients bénéficient d un traitement antalgique adéquat (Gianni et al., 2010). De même, dans une étude auprès de patients atteints de démence avancée, Husebo, Strand, Moe-Nilssen, Husebo, et Ljunggren (2010) ont mis en évidence que la douleur atteint une prévalence de 81%. Une revue de la littérature récente de Sinatra (2010) démontre que plus de 80% des patients en situation postopératoire expérimentent une douleur modérée à sévère. Brink-Huis, van Achterberg, et Schoonhoven (2008) signalent une prévalence de la douleur chez les patients atteints d un cancer oscillant entre 30 et 90% suivant le type de cancer, le stade de la maladie et les traitements reçus. Il ressort d une revue de la littérature que 43% des patients atteints d un cancer ont un traitement antalgique inadéquat (Deandrea, Montanari, Moja, & Apolone, 2008). Certaines études montrent que les patients reçoivent moins d antalgiques que prescrits. Lorentzen, Hermansen, et Botti (2012) restituent par exemple que 45,5% des patients opérés avaient une douleur non contrôlée dans les 24 heures post-opératoires, et que chez les patients qui expérimentaient une douleur sévère, seuls 50% des opioïdes forts étaient administrés. Ils constatent que si 99% des antalgiques d office ont été administrés, seules 25% des prescriptions en réserves ont été données. D autres auteurs évoquent que seuls 14% des patients ayant reçu une antalgie bénéficient d une réévaluation par les infirmières (Manias, Bucknall, & Botti, 2005).

20 5 Conséquences La douleur, si elle n est pas prise en charge correctement, peut avoir des conséquences importantes, que ce soit en termes de santé pour la personne et/ou de santé publique. Ces conséquences sont d abord physiologiques. Le stress généré par une douleur aiguë non contrôlée s accompagne de modifications cardiovasculaires pouvant entraîner des complications allant jusqu à l infarctus du myocarde (Dunwoody, Krenzischek, Pasero, Rathmell, & Polomano, 2008). De même, la douleur provoque des perturbations hormonales qui peuvent causer des hyperglycémies et une immunosuppression générant des complications post-opératoires infectieuses (Dunwoody et al., 2008), ou une progression tumorale (Page & Ben-Eliyahu, 1997). Les complications liées aux douleurs non soulagées sont également d ordre physique. Par exemple, la diminution de certains mouvements limitant l amplitude respiratoire et la toux peut occasionner des atélectasies voire des pneumonies ; le retard de la reprise de la fonction gastro-intestinale peut avoir comme effet secondaire un iléus (Dunwoody et al., 2008). Les conséquences sont aussi sociales et psychologiques avec une diminution de la qualité de vie et des fonctions sexuelles, un impact sur la vie familiale et l altération des relations pouvant causer un isolement social (Dunwoody et al., 2008; Helms & Barone, 2008; Sinatra, 2010; Wells et al., 2008). La douleur chronique peut également engendrer une dépression (Breivik, Collett, Ventafridda, Cohen, & Gallacher, 2006; Brown, Kirkpatrick, Swanson, & McKenzie, 2011; Wells et al., 2008). Dans une étude européenne de prévalence de la douleur chronique,

21 6 21% des 4839 répondants signalent avoir un diagnostic de dépression lié à leurs douleurs chroniques (Breivik et al., 2006). Enfin, la douleur est reconnue comme une cause importante de prolongement de la durée de séjour hospitalier (Wells et al., 2008) et comme le motif le plus important de réadmission postopératoire (Dunwoody et al., 2008), avec une augmentation des coûts de la santé estimée à plusieurs milliards de dollars par an aux Etats-Unis (Duignan & Dunn, 2009). La prise en charge de la douleur devient donc aussi une responsabilité sociale afin de participer à la lutte contre la hausse des coûts de la santé. Obstacles à la gestion de la douleur Etant donné la prévalence élevée de la douleur chez les patients hospitalisés, les infirmières sont confrontées quotidiennement à cette problématique de santé. Bien que l offre en soins visant à soulager la douleur engage la responsabilité de l équipe interdisciplinaire, l infirmière assume une grande part de cette responsabilité, notamment par l évaluation, la documentation, l administration de l antalgie prescrite et la transmission aux différents membres de l équipe (Saint-Arnaud, 2009; Van Niekerk & Martin, 2003). L infirmière met en place et utilise différents moyens nonpharmacologiques pour soulager le patient 2 (Wells et al., 2008), mais souvent cela ne suffit pas. Elle recourt alors aux prescriptions médicales d antalgiques, 2 Le masculin est utilisé dans ce travail à titre épicène

22 7 que ce soit des traitements prescrits d office ou en réserve. La gestion des antalgiques fait appel au raisonnement clinique et à la prise de décision infirmière. Cela demande des compétences, de l autonomie professionnelle et une certaine flexibilité dans l administration des traitements afin d individualiser la prise en charge du patient (American Society for Pain Management Nursing & American Pain Society, 2004; Gordon, Dahl, Phillips, et al., 2005; Gordon, Pellino, Higgins, Pasero, & Murphy-Ende, 2008). Cependant, il arrive que même lorsque suffisamment d antalgiques sont prescrits, leur administration reste insuffisante ou inadéquate (Manworren, 2006). La crainte de surmédication et la surestimation du risque de dépression respiratoire et de dépendance liées aux opioïdes sont prépondérantes dans le sous-traitement de la douleur (Manworren, 2006). Afin d améliorer la prise en charge de la douleur et assurer le confort des patients, il est nécessaire d identifier les différents obstacles à l antalgie qui sont liés au patient, au système et aux soignants. Obstacles liés aux patients Cette catégorie est associée aux limites psychologiques, sensorielles, cognitives, sociales et/ou physiques des patients. Ces obstacles peuvent être certains troubles du langage ou sensoriels, des difficultés à comprendre et à remplir les échelles d évaluation (Coker et al., 2010; Hadjistavropoulos et al., 2007), ou encore la crainte d être jugé ou de recevoir des médicaments en réponse à la plainte (Fox, Solomon, Raina, & Jadad, 2004). Ils touchent aussi à tout ce qui concerne les craintes en lien avec les effets secondaires des médicaments, les risques de dépendance, de tolérance ou encore la

23 8 progression de la maladie (Oldenmenger, Sillevis Smitt, van Dooren, Stoter, et van der Rijt, 2009). Obstacles liés au système L obstacle prioritaire de cette catégorie semble être celui de la charge de travail trop importante, que ce soit en lien avec un ratio patients/infirmière trop élevé (Elcigil, Maltepe, Esrefgil, & Mutafoglu, 2011), une surcharge de travail (Manias et al., 2005) ou les sollicitations interrompant l infirmière entre la demande du patient et le moment où elle va administrer les soins (Rejeh, Ahmadi, Mohammadi, Kazemnejad, & Anoosheh, 2009). Les difficultés relationnelles et collaboratives intra et interprofessionnelles sont aussi considérées comme des obstacles (Manias et al., 2005; Powell & Davies, 2012; Rejeh et al., 2009; Van Niekerk & Martin, 2003). Obstacles liés aux soignants Les obstacles liés aux soignants concernent essentiellement leurs connaissances et attitudes face à la gestion de l antalgie. La majorité de la recherche réalisée à ce sujet s intéresse aux infirmières. Quels que soient les services hospitaliers où se sont déroulées les études à ce propos, et malgré l augmentation de la formation dans le domaine, les résultats sont loin d être optimaux et démontrent que ces obstacles restent toujours d actualité pour les infirmières, mais également pour les médecins dans le peu d études à disposition (Bernardi, Catania, Lambert, Tridello, & Luzzani, 2007; Lui, So, & Fong, 2008; Tse & Chan, 2004; Zhang et al., 2008; Zuccaro, Vellucci, Sarzi- Puttini, Cherubino, Labianca, & Fornasari, 2012). Cette catégorie d obstacles

24 9 comprend aussi les difficultés relationnelles entre le patient et l infirmière et plus particulièrement les difficultés qu a l infirmière à établir un lien permettant l évaluation correcte de la douleur de la personne soignée. Justification La douleur est aujourd hui reconnue comme une problématique dont il faut s occuper prioritairement tant en milieu hospitalier qu en ambulatoire. Si les connaissances et attitudes des infirmières dans le domaine ont fait l objet de nombreuses recherches, celles relatives aux autres obstacles sont plus rares. De plus, l identification des obstacles en lien avec les connaissances et attitudes ne suffit pas à la compréhension de la problématique, car d autres facteurs entrent en jeu, ce qui sera démontré avec la présentation du modèle théorique servant de cadre de référence à ce mémoire. Afin d améliorer la prise en charge de la douleur, l augmentation du savoir dans ce domaine est importante pour faire évoluer les pratiques soignantes dans le domaine ; pour développer des stratégies autres que la formation classique puisque celle-ci ne semble pas générer des résultats satisfaisant ; et pour cibler de nouvelles thématiques de recherche plus spécifiques à l activité clinique infirmière. À notre connaissance, le problème des obstacles à la gestion de la douleur perçus par les infirmières n a pas encore été étudié en Suisse romande. Au sein de l hôpital où se déroule cette étude, un programme institutionnel d amélioration de prise en charge de la douleur des patients est en plein essor. L institution reconnaît en effet qu il est de la responsabilité des soignants de prévenir, évaluer et gérer la douleur des patients ; cette

25 10 responsabilité est inscrite dans le cahier des charges de tous ces professionnels de la santé. De plus, les services où se déroule cette étude souhaitant améliorer leur pratique dans ce domaine pourront, grâce aux résultats obtenus, cibler des pistes allant dans ce sens. But et question de recherche Cette recherche a pour but d identifier les obstacles à une gestion optimale de la douleur des patients hospitalisés en milieu hospitalier aigu, tels que perçus par les infirmières ; le but ultime étant d améliorer la prise en charge et le confort de ces patients. Les questions qui en découlent sont : Quels sont les obstacles à la gestion de la douleur perçus par les infirmières de quatre services de soins aigus d un hôpital tertiaire? Les infirmières perçoivent-elles une des trois dimensions du questionnaire comme étant une plus grande source d obstacles? Certaines caractéristiques démographiques sont-elles associées à une perception d obstacles différente? Suite à l exposition de la problématique, le chapitre suivant approfondit l état actuel des connaissances en rapport avec le sujet d étude.

26 Recension des écrits

27 Après une brève introduction, ce chapitre débute par un rappel de la physiologie et des différentes composantes de la douleur. Les recommandations actuelles en termes d évaluation sont ensuite évoquées. Les connaissances concernant les différents types d obstacles rencontrés dans la gestion de l antalgie terminent le chapitre. Perspective générale Si la douleur est un concept qui fait l objet de publications depuis de nombreuses années, les obstacles à la gestion de l antalgie apparaissent plus récemment dans les écrits scientifiques. Les obstacles les plus investigués sont ceux qui touchent aux connaissances et aux attitudes des infirmières, aspect qui ne sera traité que brièvement dans ce travail car il fait l objet d un mémoire réalisé conjointement à celui-ci (Gueniat, 2013). Les études de qualité concernant les autres types d obstacles perçus par les infirmières sont rares. Afin de décrire l état actuel des connaissances dans le domaine, cette recension a été élargie à des études portant également sur les obstacles identifiés par les patients (Fortin & Gagnon, 2010). La population des patients hospitalisés dans les services où se déroulent l étude étant hétérogène, les articles retenus s intéresseront alors autant aux personnes ayant subi une intervention chirurgicale, qu à celles atteintes d un cancer ou aux personnes âgées. La recherche documentaire a été réalisée sur les bases de données suivantes : PubMed, CINHAL, Cochrane et JBI. Les mots clés et/ou

28 13 descripteurs/mesh utilisés sont pour la population : nur* 3, nursing assessment, advanced practice nursing, clinical nursing research et patientrelated barriers, inpatients, elderly ; pour le phénomène d intérêt : pain, acute pain, postoperative pain, cancer pain, pain perception, pain management, pain assessment, pain measurement, analgesia, analgesics, PRN, pro renata, as needed, treatment related pain ; et pour le résultat : difficult*, barriers, communication barriers. La recherche bibliographique s est faite pour les articles publiés entre janvier 2005 et avril Les articles concernant la néonatologie, la pédiatrie, les soins intensifs, les urgences et les soins de longue durée ont été exclus car ne correspondaient pas à la population étudiée. Les filtres NOT critical care, NOT emergency, NOT pediatrics et NOT long term care ont été utilisés. Les articles publiés en anglais et en français ont été retenus. Le système de cross-referencing a servi à compléter la recension. La douleur Définition En 1979, L International Association for the Study of Pain (IASP) définit la douleur comme «une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, liée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle ou décrite en des termes évoquant une telle lésion» (Société Française d'etude et de Traitement de la Douleur, 2011). Cette définition rédigée sur la base de la théorie du portillon, ou gate control, de Melzack et Wall (1965) enrichit les connaissances 3 * = troncature

29 14 physiologiques de la douleur à cette période. Pour ces auteurs, la douleur n est pas qu une expérience sensorielle, mais l intégration de dimensions sensorielles, affectives et cognitives complexes (Watt-Watson & McGillion, 2010). Selon cette théorie, la stimulation sélective des grosses fibres afférentes Aα (fibres conduisant les influx non douloureux) situées au niveau cutané, envoie un influx nerveux relayé par trois systèmes situés dans la moelle épinière : la substance gélatineuse de la corne dorsale, les fibres du cordon dorsal et les cellules de transmission centrale. Ces trois systèmes vont bloquer les petites fibres nociceptives Aδ (de gros diamètre et myélinisées qui transportent l information rapidement) et C (plus fines et amyélinisées qui transmettent le message plus lentement et plus longtemps) au niveau de la substance gélatineuse de la moelle, la zone du portillon. L'intégration médullaire des messages excitateurs et inhibiteurs s'achemine ensuite vers les cellules localisées concernées, ce qui génère une antalgie locale par un système de modulation interne (Melzack & Wall, 1965). Cette théorie du portillon, largement reconnue depuis les années 1970, laisse des questions sans réponse concernant les différences de vécu entre les sexes, les effets du stress ou des expériences antérieures et surtout la problématique de la douleur chronique (Helms & Barone, 2008). La théorie de la neuromatrice élaborée quelques années plus tard par Melzack apporte des réponses complémentaires. En effet, sur la base de travaux réalisés pour mieux comprendre le phénomène de la douleur fantôme, Melzack (1999) a mis en évidence un réseau neuronal complexe - la

30 15 neuromatrice - entre le cortex, le thalamus et le système limbique, sorte de construit génétique propre à chaque individu et sculpté par l expérience personnelle. Ce réseau produirait de façon constante un schéma caractéristique d influx : la neurosignature. Mais la neuromatrice fonctionnerait également en l absence d influx sensoriels provenant de la périphérie du corps, ce qui pourrait créer l impression d avoir une douleur même en l absence d un membre. De même, une expérience douloureuse permettrait à la matrice d emmagasiner la neurosignature de cette douleur, et expliquerait la réapparition de la douleur y compris en l absence de nouveaux stimuli (Melzack, 2001). Cette théorie infirme la relation simple de cause à effet entre un dommage tissulaire et la sensation douloureuse (Helms & Barone, 2008). La modulation de la douleur par le système nerveux central et périphérique est aujourd hui mieux connue : le thalamus et la région souscorticale permettent de localiser et de percevoir l intensité du message douloureux ; la formation réticulée et la région limbique, centre des émotions, influencent quant à elles la perception individuelle des stimuli nociceptifs et leur interprétation (Helms & Barone, 2008) ; enfin, les voies descendantes inhibitrices empêchent la transmission continue de la douleur, en partie grâce à l action des endorphines qui peuvent également être sécrétée par des processus cognitifs tels que la distraction (Smeltzer, Brunner, & Suddarth, 1994). Ces différentes découvertes ont établi que la perception de la douleur, tout comme la réponse au stimulus, est individuelle, variable et non-prédictible.

31 16 La définition de l IASP, en plus de mettre en perspective la subjectivité du ressenti, aborde aussi l aspect multidimensionnel du phénomène, la dissociation de l objectivation de l origine douloureuse par rapport à son intensité, ainsi que son impact sur la qualité de vie de la personne. La douleur est donc plus qu un stimulus nociceptif délétère (Watt-Watson & McGillion, 2010), elle est en réalité faite de plusieurs composantes : sensoridiscriminative, affectivo-émotionnelle, cognitive et comportementale (Boccard, Deymier, & Institut UPSA de la douleur - France, 2006). La composante sensori-discriminative correspond aux mécanismes neurophysiologiques vus précédemment. Elle permet de donner des informations sur la localisation, l intensité, la durée et la qualité du message douloureux. L origine d une douleur est nociceptive, neuropathique ou mixte (Boccard, 2006). Les douleurs par excès de nociception sont dues à des lésions tissulaires provoquant une libération de médiateurs inflammatoires qui, par stimulation des nocicepteurs, vont générer un message douloureux. Les douleurs neuropathiques sont, quant à elles la conséquence de lésions telles pression, blessure ou dégénération de structures nerveuses du système somato-sensoriel. Les douleurs mixtes sont composées des deux précédentes. Le décodage du message nociceptif n est pas forcément proportionnel au stimulus et varie d un individu à l autre, ou d une expérience à l autre. De plus la douleur peut ne pas apparaître où elle est pressentie et être présente sans lésions apparentes (Boccard, 2006).

32 17 La composante affectivo-émotionnelle représente les facteurs liés à l environnement influençant le vécu de l expérience et lui donnant sa tonalité pénible ou désagréable, ainsi que son côté supportable ou non. La signification de la maladie, l incertitude quant à son évolution viennent moduler le vécu douloureux. Cet aspect émotionnel fait partie intégrante du phénomène et peut avoir un impact délétère sur l individu par l anxiété et la dépression qu il peut entrainer. C est en grande partie à cause de cet impact sur la personne que la douleur doit être soulagée (Boccard, 2006). La composante cognitive évoque les processus mentaux donnant du sens à une perception et capables de l influencer, comme les stratégies de diversion, d anticipation et de mémorisation par exemple. C est ici qu intervient la maîtrise du langage permettant de nommer le ressenti de l expérience douloureuse et ainsi de le transmettre à autrui en vue de son évaluation. Enfin, la composante comportementale intègre les manifestations verbales et non verbales du vécu douloureux, ainsi que les réponses végétatives et réflexes. Ces manifestations sont le plus souvent réactionnelles à une douleur perçue et proportionnelles à l importance de celle-ci. Mais elles ont aussi une fonction de communication avec l entourage (Boccard, 2006). C est là qu interviennent les influences culturelles, sociales, familiales, du sexe et de l âge. Tous ces éléments concordent avec ce que McCaffery définissait en 1968 déjà (cité dans Yin, Tse, & Wong, 2012, p. 1233) : «La douleur est l expérience que la personne dit qu elle est, elle existe dès lors que la personne le dit» (traduction libre).

33 18 La douleur est aussi classifiée par sa durée. Il est communément admis de parler de douleur aiguë lorsqu elle est ressentie durant une période inférieure à trois mois et de douleur chronique lorsqu elle s étend au-delà de trois à six mois (Boccard, 2006). Si la douleur aiguë a un rôle d alarme pour l organisme et stimule le système nerveux sympathique pour répondre au symptôme, la douleur chronique n a pas de fonction protectrice physiologique (Delorme, 1999). Les mécanismes de la douleur chronique sont encore mal compris. La réponse du système nerveux diminue au fil du temps modifiant les comportements de la personne. La prise en soins devient complexe car elle nécessite l intégration des composantes affectives et cognitives (Helms & Barone, 2008). Dans ce passage de la «douleur symptôme à la douleur maladie» (Delorme, 1999, p. 57), il est nécessaire que le modèle de référence de gestion de la douleur change. Il ne faut plus chercher à tout prix la cause de la douleur mais accompagner la personne dans toutes les dimensions touchées par cette souffrance. Evaluation La prise en charge de la douleur passe immanquablement par son évaluation qui, malgré les nombreux outils à disposition, reste souvent lacunaire (Watt-Watson & McGillion, 2010). La douleur étant un phénomène subjectif, son évaluation est complexe et multidimensionnelle. Les recommandations de l American Pain Society (Gordon, Dahl, Miaskowski, et al., 2005) et de l Association des infirmières et infirmiers autorisés de l'ontario (2002), visant une gestion de la douleur de haute qualité, insistent sur l identification et le traitement précoce de ce symptôme, ainsi que sur une

34 19 évaluation et une réévaluation quotidienne en cas de douleur. L utilisation d outils validés et adaptés aux différentes dimensions de la douleur est également préconisée. Les processus et résultats doivent être documentés de manière rigoureuse afin que le relais au sein de l équipe soignante puisse se faire aisément. Il est du rôle infirmier de pouvoir demander, au nom du patient, des modifications de son traitement, en argumentant de manière raisonnée et claire (Hazard Vallerand, Musto, & Polomano, 2011; Salinas & Abdolrasulnia, 2011). Enfin, il s agit d une responsabilité éthique que de signaler toute douleur non soulagée (Conseil International des Infirmières, 2006). Concernant les populations ne pouvant s auto-évaluer facilement, une procédure de hiérarchie d évaluation est proposée par Herr, Coyne, McCaffery, Manworren, et Merkel (2011) dans leur prise de position. Ils recommandent en premier lieu de tenter une auto-évaluation par des moyens simples comme une réponse oui/non ou un signe (p. ex. clignement d œil), puis d examiner les causes possibles de douleur et d observer le comportement des patients. Ils précisent que l utilisation d outils adaptés est nécessaire, et que le score obtenu par ce type d évaluation ne peut être comparé à celui qui serait obtenu par une auto-évaluation. En effet, les échelles comportementales permettent d identifier la présence ou non de douleur, mais n en mesurent pas l intensité (Lukas, Niederecker, Gunther, Mayer, & Nikolaus, 2013). Selon Herr et al. (2011), les étapes complémentaires consistent à s enquérir de l avis des proches lorsque c est possible et à réaliser un test à l analgésie. Pesonen et al. (2009) ont réalisé

35 20 une étude auprès de 41 patients de plus de 76 ans hospitalisés avec une douleur aiguë ; 31 d entre eux avaient un état cognitif altéré (Mini Mental State Examination (MMSE) inférieur à 24). Le but de l étude était d évaluer l adéquation de différents outils d auto-évaluation dans cette population : l échelle visuelle analogique, la verbale en 5 énoncés, celle des visages et la red wedge scale. Les auteurs démontrent que chez les patients avec des scores MMSE inférieurs à 17 (signe de démence confirmée), l échelle verbale en cinq points est utilisable avec un degré de satisfaction raisonnable (64% pour les personnes avec un score MMSE égal ou inférieur à 10 - démence sévère - et jusqu à 85% pour celles entre 11 et 16 démence modérée). Les trois autres échelles de douleur atteignent des scores avoisinant les 70% pour les personnes avec un MMSE inférieur à 17 et seulement entre 25 et 35% pour celles avec un MMSE inférieur à 10. Lukas et al. (2013) ont mené une étude auprès de 178 patients algiques, hospitalisés dans un hôpital gériatrique, pour déterminer jusqu à quand un outil d auto-évaluation peut être utilisé, et dans quelles situations une hétéro-évaluation est préférable. Ils constatent qu entre 57,5% et 75,5% des patients ayant un MMSE entre 11 et 24 peuvent utiliser l échelle numérique, et entre 87,8% et 90% l échelle verbale en quatre énoncés. Des recommandations plus détaillées concernant la population âgée et les personnes souffrant de démence invitent à utiliser les échelles d autoévaluation aussi longtemps que possible (Hadjistavropoulos et al., 2007). Ceci en les couplant avec des échelles d hétéro-évaluation, en aménageant l environnement dans lequel cette évaluation est réalisée, en tenant compte

36 21 des déficits sensoriels de la personne, et en donnant des consignes simples évaluant le ressenti sur le moment. L Oncology Nurse Society (2008) relève spécifiquement l importance d adapter les stratégies d évaluation aux particularités des populations plus vulnérables, à savoir : les enfants, les personnes âgées, d autres cultures, présentant des troubles cognitifs ou des abus de substances, ainsi que celles de langue étrangère. Dans une méta-synthèse portant sur 65 études concernant l évaluation et le traitement de la douleur chez des patients adultes atteints d un cancer, Luckett et al. (2012) relèvent l importance d adopter un modèle de soins centré sur les besoins du patient et de ses proches. L universalité de la douleur en tant qu expérience humaine représente un des problèmes que les infirmières ont en commun avec les patients. Ceci explique en partie que les croyances, valeurs et expériences personnelles viennent interférer dans l évaluation et la prise en charge de ce symptôme (Alspach, 2010). La capacité des infirmières de saisir et de réellement comprendre la douleur des patients va donc dépendre de ces éléments. Mais la gestion de l antalgie va également être soumise à d autres contraintes qui ne dépendent pas uniquement de l infirmière. L ensemble de ces différents obstacles est abordé dans le chapitre suivant. Obstacles à la gestion de la douleur Comme évoqués précédemment, les obstacles au soulagement de la douleur sont nombreux et variés. En 1994, l Agency for Health Care Policy and

37 22 Research (cité dans Borneman et al., 2011) les a classifiés en trois catégories distinctes : les obstacles liés au patient, aux soignants et au système. Constatant que les recommandations pour une bonne évaluation et gestion de la douleur ne sont pas forcément suivies par les infirmières, Coker et al. (2010) ont réalisé une étude séquentielle exploratoire mixte, examinant comment les infirmières se situent par rapport à l adoption des dites recommandations, et déterminant les obstacles qu elles perçoivent à une évaluation et à une gestion optimale de la douleur chez la personne âgée. Cent quinze infirmières, soit 60%, ont répondu au Nurses Perceived Obstacles to Pain Assessment and Management Practices tool (Coker et al., 2010). Les questions, ayant été identifiées comme interférant fréquemment, très fréquemment ou toujours, ont été considérées comme des obstacles à une gestion optimale de l antalgie. Malgré une certaine incohérence dans la présentation des résultats entre le nombre total et le pourcentage d infirmières relatant ces obstacles, les données suivantes peuvent être retenues : 24 réponses (sur 40) représentent 80% des obstacles totaux perçus par les infirmières. Coker et al. (2010) s intéressent essentiellement aux 12 premiers obstacles identifiés. Les auteurs argumentent que ces obstacles représentant 50% du problème et qu ils nécessitent des actions prioritaires. Obstacles liés aux patients Sur les 12 questions qui arrivent en tête des résultats de Coker et al. (2010), 58% concernent les obstacles liés aux patients. Il s agit des patients rapportant plus leur douleur au médecin qu aux infirmières, de la difficulté que

38 23 les patients ont à remplir les échelles d évaluation de la douleur ; de leur volonté de supporter la douleur et leur réticence à prendre des médicaments à cause des effets secondaires (Coker et al., 2010). Les obstacles identifiés dans l étude précédente corroborent une recherche descriptive transversale réalisée dans les services de médecine interne, d oncologie et de chirurgie d un hôpital de soins aigus en Turquie (Elcigil et al., 2011). Les auteurs investiguent ces obstacles auprès de 114 infirmières, sur la base d une version modifiée du questionnaire de Coker et al. (2010). Les barrières liées au patient les plus fréquemment identifiées par les infirmières sont : les difficultés à compléter les échelles (56%), la peur de la dépendance (36%) et des effets secondaires (34%), le fait que les patients rapportent plus leurs symptômes aux médecins qu aux infirmières (31.6%) et leur réticence à prendre des opioïdes (28%). Ces derniers résultats sont à interpréter avec prudence car il s agit d une version modifiée du questionnaire et que les auteurs n ont donné aucune information sur le pourcentage total des 12 ou 24 premiers énoncés, ni sur le pourcentage total de l entier du questionnaire. Dawson et al. (2005) ont mené une analyse secondaire des données d une étude interventionnelle contrôlée multi sites auprès de 342 patients atteints d un cancer dont la douleur ne passe ni spontanément ni sous traitement. Une version courte du Barriers Questionnaire (Gunnarsdottir, Donovan, Serlin, Voge, & Ward, 2002) a été utilisée dans cette dernière recherche. Il s agit d un questionnaire évaluant sept obstacles perçus par les patients sur des échelles de Likert en cinq point : 0 = n est pas d accord

39 24 (l énoncé n est pas un obstacle), 5 = est tout à fait d accord (l énoncé est un obstacle majeur). Les auteurs concluent que les préoccupations concernant la douleur et les traitements sont plus fréquemment rapportées par les personnes de plus de 65 ans comparées à celles de moins de 65 ans (M = 2,43, ET = 1,17 vs M = 1,95, ET = 1,06, p < 0.01). Suite à la réalisation d une revue systématique sur les barrières concernant les patients atteints d un cancer (Jacobsen, Moldrup, Christrup, & Sjogren, 2009), une recherche descriptive transversale auprès de 33 patients atteints d un cancer suivis par une consultation d antalgie a été conduite, afin d analyser l'impact de ces barrières sur la gestion de la douleur (Jacobsen, Moldrup, Christrup, Sjogren, & Hansen, 2010). Malgré un petit échantillon rendant le risque d erreurs de type II plus élevé, ces auteurs ont mis en évidence que les barrières émotionnelles des patients (p. ex. l anxiété, la dépression, le stress) expliquent 15,1% de la variance de l intensité des douleurs (r 2 = 0,18, p = 0.05), alors que les barrières cognitives (p. ex. la crainte des effets secondaires, de la dépendance, être un bon patient) en explique 13,9% (r 2 = 0,18, p = 0.05). Ceci suggère que des interventions plus spécifiques sur ce type d obstacles pourraient réduire l intensité de la douleur. La crainte de déranger les soignants. Plus d un tiers des infirmières interrogées dans l étude de Coker et al. (2010) relatent comme obstacle interférant dans la gestion de l antalgie, le fait que les patients ne voulant pas déranger les infirmières ne leur signalent pas leur douleur (36%). Seulement 8,8% des infirmières sont d accord avec cette affirmation contre 12,3% qui ne

40 25 le sont pas et 78,9% qui ne savent pas (Elcigil et al., 2011). Ces résultats peuvent être mis en relation avec une précédente étude réalisée par Coker et al. (2008), dans les mêmes unités de soins, où 75% des infirmières déclaraient ne pas être sollicitées par les patients pour des problèmes de douleur, alors même que 57% des patients disaient leur en avoir parlé (Coker et al., 2008). Au vu de la différence de résultats entre ces trois études, il est difficile de savoir si cette perception des infirmières est liée au fait que les patients n expriment pas leur douleur, ou au fait que les infirmières ne prennent pas en compte les plaintes de ces derniers. La crainte de distraire les soignants, et plus particulièrement le médecin, est évoquée dans l étude d Edrington et al. (2009). Cette étude inclut 50 patients sino-américains atteints d un cancer et algiques depuis au moins 24 heures, dans le but de décrire les barrières perçues par ces patients, d évaluer la relation entre ces barrières et l évaluation de la douleur, s il y a des facteurs prédictifs de la douleur et si les patients issus de minorités ethniques ont plus de risque d être moins bien soulagés de leur douleur. Les résultats de cette étude soutiennent qu il y a des répercussions concrètes entre la crainte de déranger les soignants et l administration d antalgiques adaptés, puisque les scores du Pain Management Index (de Wit, et al., 2001) étaient moins bons chez les patients exprimant cette crainte que chez les autres (r = - 0,31, p = 0.03). La recherche qualitative de Fox et al. (2004), réalisée auprès de 54 professionnels de la santé travaillant en établissements de longue durée, démontre la difficulté que les patients ont à signaler leur douleur par crainte d être jugés. Cette crainte du jugement ressort également dans d autres études, tout comme la volonté

41 26 d être perçu comme un bon patient et la représentation que pour être un bon patient il ne faut pas se plaindre de douleur, ce qui engendre une forme de stoïcisme (Abdulla et al., 2013; Dawson et al., 2005; Hadjistavropoulos et al., 2007; Jacobsen et al., 2009). Pour Dawson et al. (2005), il apparaît en sus dans une version courte du Barriers Questionnaire (0 = n est pas d accord, 5 = est tout à fait d accord) que ce sont les personnes de plus de 65 ans qui ont le plus souvent la croyance «qu'un bon patient évite de parler de sa douleur» (M = 2,14, ET = 2,03 vs M = 1,21, ET = 1,66, p < 0.01). La dépendance, les effets secondaires et la progression de la maladie. Oldenmenger et al., (2009) ont réalisé une revue systématique, incluant 70 études publiées entre 1986 et 2007 sur les obstacles à l antalgie chez des patients atteints d un cancer. En fonction des études, la plupart des énoncés du Barriers Questionnaire (la peur de la dépendance, des injections ou de distraire le médecin, les préoccupations à propos de la tolérance ou des effets secondaires) ont un score total au moins une fois supérieur à trois sur cinq, cinq étant le score maximal. Seuls le fatalisme et le désir d être un bon patient obtiennent à chaque fois un score total inférieur à trois. D autres obstacles sont souvent cités : la méconnaissance des patients à propos des antalgiques et de leurs effets secondaires, une mauvaise adhésion au traitement, ainsi qu une peine à communiquer leur douleur et leurs préoccupations aux soignants. Malgré des tailles d échantillon souvent très petites dans les études recensée, et une qualité méthodologique très variable, les patients relatent des préoccupations semblables, même si plutôt faibles,

42 27 en ce qui concerne la crainte de la dépendance (M entre 1,39 et 4,17, ET entre 1,35 et 1,51) et l augmentation de la douleur signifiant une progression de la maladie (M entre 2,08 et 3,99, ET entre 1,54 et 1,61) ; cela les limite dans la verbalisation de leur douleur. Pour Dawson et al. (2005) la peur de la dépendance concerne 85% des patients atteints d un cancer interrogés (M = 3,05, ET = 1,80). Il en est de même à propos de la crainte que la douleur soit un signe de péjoration de la maladie (M = 2.93, ET = 1,81). De plus, près d un quart des 342 patients interrogés dans cette étude évoquent que la probabilité qu ils suivent leur traitement serait meilleure si le prescripteur leur expliquait qu il n y a pas de risque de dépendance. En effet, les croyances sur la dépendance sont inversement corrélées à la fréquence de prise des traitements opioïdes prescrits (r = - 0,19, p > 0,01). Dans une recension des écrits sur les causes et les conséquences d une gestion inadéquate de la douleur aiguë, Sinatra (2010) évoque que lorsque les patients peuvent choisir leur type d antalgiques, 72% préfèrent des traitement non opioïdes, et pour la moitié de ces patients ce choix se fait par crainte de dépendance. Dans l étude de Yin et al. (2012) réalisée auprès de 94 patients chinois opérés pour une thoracotomie, la crainte de la dépendance n arrive qu en huitième position avec un score moyen de 2,60 sur 5 (ET = 1,69), alors que la peur d une tolérance médicamenteuse arrive en tête de liste (M = 3,70 ET = 1,29). Ces données sont corroborées par celles d Edrington et al. (2009), où la peur de la tolérance arrive également en première place (M = 4,26, ET = 1,3), devant celle de la progression de la maladie (M = 3,47, ET = 1,8) et de la dépendance (M = 3,36, ET = 1,5). De plus, les patients qui reportent un score de peur d une

43 28 tolérance plus élevé sont ceux qui présentent une plus grande interférence dans leurs activités générales (r = 0,30, p = 0,034), dans leur travail (r = 0,45, p = 0,001) ou leur sommeil (r = 0,30, p = 0,029). Si une influence culturelle est possible face à ces représentations, ces données soulèvent surtout l importance de prendre en considération ces peurs dans la gestion de la douleur. L observance thérapeutique médicamenteuse. Les éléments vus précédemment peuvent influencer l observance des patients à leurs traitements. En effet, la recension des écrits de Sinatra (2010) révèle que les effets secondaires sont une cause possible d arrêt des traitements antalgiques ; les patients préférant avoir un moins bon soulagement de la douleur sans effet secondaire, qu une antalgie optimale avec des effets secondaires. Gan et al. (2004), dans une étude menée auprès de 50 patients hospitalisés pour une chirurgie abdominale, dont 96% présentaient au moins un effet secondaire sévère dû aux antalgiques reçus, rapportent une proportion d environ 60% de patients préférant une antalgie moins efficace mais sans effets indésirables, ce qui modifie leur prise d antalgiques. Les infirmières confirment que le manque d adhésion influence négativement la prise en charge de la douleur (Bell & Duffy, 2009; Elcigil et al., 2011; Herr et al., 2004). Pour Van Niekerk et Martin (2003), 49% des 1015 infirmières interrogées notent que le manque de collaboration des patients dans la prise de leur traitement est un obstacle à une antalgie efficace. Quatorze études recensées par Oldenmenger et al. (2009) ont montré que l'observance

44 29 thérapeutique médicamenteuse chez les patients atteints d un cancer varie entre 20% et 95%. De plus, les patients préférant une médication en réserve, au dépend d un traitement d office, reconnaissent plus de barrières que ceux qui prennent leur traitement d office ; et ceux pensant pouvoir gérer leur douleur par eux-mêmes adhèrent moins aux traitements prescrits que ceux qui reconnaissent avoir besoin d aide. A l opposé, dans l étude de Jacobsen et al. (2010), l adhésion des patients auto-évaluée sur l échelle the Medication Adherence Report Scale, dont le score total se situe entre 4 et 20, montre une moyenne de 17,8 (ET = 2,40), et une proportion de patients rapportant une observance de 85%. Les auteurs relatent que ces chiffres sont plus élevés que ceux habituellement trouvés dans la littérature. Ils expliquent que le suivi des patients par des spécialistes de l antalgie lors d utilisation d opioïdes forts est un élément prédictif d une meilleure adhésion thérapeutique. Obstacles liés aux soignants Si la littérature aborde la notion de soignants au sens large du terme, seuls les articles en lien avec les infirmières sont retenus ici. Dans l étude de Coker et al. (2010), le premier obstacle lié aux infirmières se situe en première position. Il concerne la difficulté à évaluer les patients atteints de troubles cognitifs (cité par 66% des infirmières). Une corrélation met en évidence que les infirmières les moins expérimentées identifient plus les troubles cognitifs comme étant un obstacle interférant fréquemment, ou très fréquemment avec la gestion de l antalgie en comparaison avec les autres obstacles (r = - 0,196, p = 0.04). La difficulté

45 30 d évaluer les patients ayant des troubles cognitifs, des problèmes sensoriels, de langue ou n arrivant pas à remplir les évaluations illustre, selon les auteurs, le besoin d offrir des alternatives aux moyens utilisés traditionnellement pour l évaluation de ce symptôme. En quatorzième position sur 40 les pratiques incohérentes dans l administration des médicaments en réserve pour un même patient sont évoquées par 35% des infirmières. Dans les 24 premiers énoncés, viennent ensuite le fait de ne pas connaître le niveau de douleur du patient par manque de temps passé avec lui (30%) ; le choix de l administration de psychotropes avant les antalgiques lors d agitation (30%) ; ne pas avoir une approche documentée de l évaluation de la douleur pour chaque patient (27%) et ne pas savoir s il faut plutôt croire l auto-évaluation du patient ou les perceptions que la famille en a (23%). Une seule infirmière sur 115 a répondu positivement à l énoncé concernant ses propres réticences à donner des opioïdes par craintes de surdosage. Cet élément est contraire à certaines études sur la morphinophobie. En effet, 30 à 74% des infirmières et des médecins craignent induire une sédation voire une dépression respiratoire avec les opioïdes. De plus, les connaissances tant sur les effets secondaires que sur les doses à prescrire et les associations possibles d antalgiques sont limitées (Murnion, Gnjidic, & Hilmer, 2010; Musi & Bionaz, 2005; Verloo, K Mpinga, Ferreira, Rapin, & Chastonay, 2010). Ces différents éléments démontrent que cet obstacle est essentiellement lié aux connaissances et aux attitudes des infirmières.

46 31 L évaluation et les troubles cognitifs. Dans une étude descriptive réalisée auprès de 709 patients de plus de 65 ans hospitalisés pour une fracture de hanche, et de 172 infirmières de 12 unités de soins aigus, Herr et al. (2004) reportent des résultats sur les pratiques courantes des infirmières en lien avec les données probantes de l'évaluation de la douleur aiguë chez les patients âgés. Ils constatent que si dans les premières 24 heures, les patients déments sont évalués plus régulièrement aux 4 heures que les patients non déments (25,4% vs 22,5%, p = 0,04), les patients atteints de démence sont moins souvent évalués avec un outil adapté (13,6%) que les personnes non démentes (86%, p < 0,0001). Bien que la population soit légèrement différente, des données similaires sont relevées par Kerner, Plakht, Shiyovich, et Schlaeffer (2011) dans leur étude observationnelle rétrospective auprès de 59 patients hospitalisés en médecine interne. Ces auteurs confirment que les patients avec un niveau de conscience altérés ou confus bénéficient d une évaluation de la douleur dans seulement 35% des situations où celle-ci est recommandée (OR 0,69, p = 0,05, IC 95% [0,53 0,9]). Si 93% des infirmières savent qu il faut utiliser un outil d évaluation de la douleur adapté à la personne âgée, seules 42% disent l utiliser toujours. Alors que 97,7% de ces mêmes infirmières reconnaissent qu il faut évaluer les patients déments toutes les 4 heures, 69,2% rapportent le faire toujours et 30,8% occasionnellement ; ce qui n est concrètement pas le cas, puisque l observation montre que seulement 37,2% des patients ont été évalués

47 32 chaque 4 heures (Herr et al., 2004). Dans la partie de l étude de Coker et al. (2010) sur le degré de perception des infirmières par rapport à l adoption des recommandations de bonnes pratiques, 76% savent que les patients avec troubles cognitifs doivent être évalués toutes les quatre heures, mais seulement 28% disent le faire à cette fréquence. Les connaissances et attitudes. Dans une étude réalisée dans un centre hospitalier universitaire italien auprès de 869 patients hospitalisés et de 115 infirmières, Melotti et al. (2009) constatent que 50 à 80% des situations de douleur sévère sont sous-estimées par les infirmières. Ce taux varie entre 40 et 60% lorsque la douleur est modérée. Cette sous-estimation est encore plus importante pour la population âgée (76%). Ce qui est également le cas chez Coker et al. (2008) où 67% des infirmières sous-estiment la douleur, ainsi que pour McNamara, Harmon, et Saunders (2012) où 64,4% des infirmières affirment que l équipe infirmière sous-évalue la douleur, pensant qu un patient qui ne se plaint pas est un patient qui n a pas mal (V de Cramer 4 = 0,53, p = < 0,01). Cette même étude longitudinale évaluant les connaissances de 59 infirmières ayant suivi un programme de formation sur la douleur relate que 11% des infirmières sont en désaccord avec le fait que la douleur est ce que le patient dit qu elle est, et 15% avec le fait que le patient est le plus qualifié pour évaluer l intensité de sa douleur. Dans une étude descriptive pour déterminer les connaissances et les attitudes de 287 infirmières en oncologie, Bernardi et al. (2007) déplorent un taux de réponses correctes de seulement 4 Le V de Cramer est un coefficient de mesure d association entre des variables qualitatives nominales (Taffé, 2011)

48 33 55% pour l entier du Nurses Knowlegde and Attitudes Survey. Dans une étude descriptive réalisée auprès de 129 infirmières d un hôpital aigu avec le Pain Management Knowledge Survey (Al-Shaer, Hill, & Anderson, 2011), 14% ont obtenu un score entre 90 et 100% de réponses correctes, 47% entre 80 et 89%, 30% entre 70 et 79% et 9% en dessous de 70%. Les connaissances les plus faibles sont celles en lien avec les traitements pharmacologiques. Les antalgiques en réserve. Les connaissances pharmacologiques des infirmières sont loin d être optimales (Al-Shaer et al., 2011; Lewthwaite et al., 2011). Si 79% des infirmières interrogées savent que l administration d antalgiques d office est préférable à celle des médicaments prescrits en réserve, seulement 15% des infirmières indiquent qu elles donnent toujours les traitements d office et 35% reconnaissent que les différentes pratiques dans l administration des médicaments en réserve sont des obstacles à la gestion efficace de l antalgie (Coker et al., 2010). Dans leur précédente étude, Coker et al. (2008) avaient constaté que 49% des patients hospitalisés en médecine ayant signalé leur douleur n avaient pas reçu les traitements prescrits en réserve. Ces résultats concordent avec ceux de Titler et al. (2003) qui ont constaté que durant les 24 heures suivant leur admission pour une fracture de hanche, seulement 22,3% des patients ont reçu régulièrement les opioïdes prescrits en réserve et 2,5% les traitements non opioïdes prescrits de la même manière. Dans cette même recherche (Titler et al., 2003), 172 infirmières ont répondu à un questionnaire sur les obstacles à l antalgie et sur leur degré de perception d adoption des recommandations de bonnes

49 34 pratiques. Alors que 150 d entre elles savent qu il est préférable de donner une antalgie d office, seules 58 sont persuadées que c est une recommandation valable et uniquement 25, soit 14%, appliquent toujours ce principe de base de l antalgie. Titler et al. (2003) concluent que bien que l antalgie en réserve permette une certaine flexibilité, elle mène en fait à un sous-traitement des patients âgés. Si l utilisation de médicaments en réserve est devenue familière, celle-ci est remise en question, car les études démontrent que les pratiques dans le choix des doses, et du temps entre les doses, sont dépendantes de chaque infirmière. Cette variabilité dans la manière d administrer les réserves est relevée comme une source d obstacle possible à la gestion de la douleur (Gordon et al., 2008). La formation. Si le niveau de formation n est pas significativement lié à une meilleure prise en charge de la douleur (Lui et al., 2008), la durée d expérience au sein d une unité peut par contre avoir une influence positive (Al-Shaer et al., 2011). McNamara et al. (2012), dans une étude descriptive longitudinale incluant 59 infirmières suivant un programme de formation sur la gestion de la douleur aiguë, démontrent une amélioration statistiquement significative des connaissances à la fin de la formation, les participants ayant donné les bonnes réponses entre 12% et 97% des fois avant la formation et entre 29% et 100% après la formation (p < 0.01). Dans une recherche quasi expérimentale longitudinale réalisée auprès de 206 infirmières d un hôpital aigu afin de mesurer l évolution des connaissances après une formation, Jarrett, Church, Fancher-Gonzalez, Shackelford, et Lofton (2013) démontrent

50 35 également que le niveau de connaissance augmente significativement en fin de formation et encore six mois plus tard ; pour les 164 infirmières qui ont répondu : la moyenne du Knowledge and Attitudes Survey Regarding Pain passant de 27,7 (ET 3,5) au début de la formation à 31,7 (ET 2,9) à la fin du cours, et à 36,5 (ET 2,7) à six mois (p < 0,017). De même, il semble que la formation rende les infirmières plus confiantes dans leur capacité de gérer la douleur (Salinas & Abdolrasulnia, 2011). La mise en œuvre de programmes éducationnels dès la formation de base (Abdalrahim, Majali, Stomberg, & Bergbom, 2011; Lui et al., 2008), puis lors de formations continues, semblent donc être une nécessité pour améliorer les prestations infirmières (Ene, Nordberg, Bergh, Johansson, & Sjostrom, 2008; Hansson, Fridlund, & Hallstrom, 2006; Zhang et al., 2008), même si cette démarche n est pas toujours suffisante (Lewthwaite et al., 2011). De plus, il est constaté que même en présence de données probantes concernant la gestion de la douleur, celles-ci restent difficiles à appliquer (Ene et al., 2008). La relation infirmière-patient. Un fait étonnant dans l étude d Elcigil et al. (2011) est la difficulté pour les infirmières de répondre aux questions concernant les obstacles patients. En effet, sur les neuf questions abordant cette thématique, la réponse «je ne sais pas» est donnée entre 26,3% et 78,9% des cas. Les auteurs expliquent cela par le manque de temps que les infirmières ont pour connaître les patients à cause d un ratio patients/infirmière particulièrement élevé, à savoir 8 à 10 patients par infirmière sans aide, dans les services de médecine, oncologie et chirurgie. Cet élément fait émerger la

51 36 problématique de la relation entre l infirmière et le patient. Dans une étude descriptive réalisée auprès de 1015 infirmières de tous les milieux de soins en Tasmanie (Australie), Van Niekerk et Martin (2003) soulèvent que 55% des infirmières perçoivent le manque de relation et de communication entre elles et le patient comme une barrière à la gestion de l antalgie. Cette notion apparaît aussi dans une étude qualitative explorant la perception des obstacles à l antalgie auprès de 26 infirmières de chirurgie (Rejeh et al., 2009). Dix-neuf d entre elles signalent en effet qu une relation limitée ne permet pas d avoir une réelle compréhension de l expérience douloureuse individuelle du patient et de ce fait limite les prises de décision optimales concernant les soins et traitements à offrir. Obstacles liés au système Le manque de temps. L obstacle lié au système qui semble prioritaire est celui du manque de temps à disposition des infirmières pour s occuper de la douleur des patients. Cette problématique est fréquemment expliquée par un ratio patients/infirmières trop élevé limitant la disponibilité des infirmières et donc la qualité de la relation établie avec le patient afin de permettre une évaluation et une prise en charge optimale de sa douleur (Elcigil et al., 2011; Rejeh, Ahmadi, Mohammadi, Anoosheh, & Kazemnejad, 2008; Van Niekerk & Martin, 2003). Le manque de temps ne permet pas non plus d offrir une approche non pharmacologique pour soulager la personne ou de réaliser de l éducation thérapeutique (Coker et al., 2010; Elcigil et al., 2011). Cette indisponibilité pour l éducation thérapeutique explique en partie la réticence des patients à prendre certains traitements. En effet, les méconnaissances et

52 37 les représentations qu ont les patients à propos des traitements et des effets secondaires génèrent des peurs qui limitent la plainte et la prise de médicaments. Ces aspects mériteraient d être abordés par le biais d enseignements personnalisés (Coker et al., 2010). Le manque de temps peut aussi s expliquer par le fait que d autres activités sont parfois perçues par les infirmières comme prioritaires par rapport au soulagement de la douleur, tels par exemple le suivi du pansement, des drains ou des signes vitaux postopératoires ou encore terminer la distribution des médicaments de l unité (Manias et al., 2005; Rejeh et al., 2009). Le soutien du système. Alors que seulement 10% des infirmières reconnaissent leur manque de connaissances comme un obstacle, le manque de soutien du système s avère être un problème majeur dans l étude d Elcigil et al. (2011), ce qui pourrait se comprendre en partie par un environnement culturel différent puisque cette étude a été menée en Turquie ; la généralisation de ce constat dans un contexte suisse est à faire avec prudence. D autres obstacles méritent d être soulignés car ils peuvent donner des pistes d amélioration des prestations : le manque de lignes directrices (65,8%), d'accès aux spécialistes (65,8%), ne pas avoir de planification antalgique documentée pour chaque patient (53,5%), ne pas avoir à disposition des moyens antalgiques non pharmacologiques (41%) et la désorganisation du système de soins (40%) (p. ex. trouver la clé des stupéfiants, les médicaments ou chercher quelqu un pour contresigner la prescription) (Coker et al., 2010; Elcigil et al., 2011).

53 38 La collaboration intra et interprofessionnelle. Une relation significative existe pour les infirmières entre le fait de se sentir consultées adéquatement par le médecin et les barrières à la gestion de la douleur (F (8.80) = 5.30, p = <0.001) (Van Niekerk & Martin, 2003). Le manque de coopération entre les infirmières et les médecins, ainsi que les difficultés communicationnelles avec ces derniers, s avèrent être des obstacles à la gestion de l antalgie pour plus de 60% des infirmières (Elcigil et al., 2011; Rejeh et al., 2009; Van Niekerk & Martin, 2003). L'impact des frontières interprofessionnelles sur la qualité de l antalgie, tout comme celui des frontières intra-professionnelles, est aussi constaté par Powell et Davies (2012) dans leur étude qualitative auprès de 71 professionnels de la santé travaillant en collaboration avec une équipe spécialisée d antalgie. Dans cette étude, il ressort que les infirmières recourent parfois à des consultants en antalgie pour se faire entendre par les collègues médecins de leur propre équipe, et ainsi améliorer l antalgie des patients. Les infirmières soulèvent également la problématique du manque de formation des médecins dans le domaine de l antalgie, qui rend leur évaluation inadéquate et leurs prescriptions inadaptées. Même si peu d études sont disponibles à ce sujet (Zuccaro et al., 2012), la réticence des médecins à prescrire une antalgie suffisante aux patients par peur de les sur-doser est vécue comme un problème sur lequel les infirmières ont peu d influence (Coker et al., 2010; Van Niekerk & Martin, 2003). En effet, si 89% des 188 infirmières membres de l American Society for Pain Management Nursing

54 39 Survey se sentent assez confiantes pour confronter le médecin et jouer ainsi leur rôle d avocat du patient (Ware, Bruckenthal, Davis, & O'Conner-Von, 2011), ceci est plus difficile pour les infirmières moins engagées et plus jeunes dans la profession (Van Niekerk & Martin, 2003). D autres problèmes dans la communication interprofessionnelle sont finalement soulignés, comme le fait que le physiothérapeute ne sache pas que le patient nécessite une antalgie avant sa séance, ou que certaines infirmières pensent que les assistantes en santé et soins communautaires ne doivent pas être formées à l antalgie, argumentant que c est un champ réservé aux infirmières (Manias et al., 2005; Powell & Davies, 2012). Comme cette recension l a démontrée, les études traitant des obstacles à la gestion de la douleur perçus par les infirmières sont encore peu nombreuses. De plus, leur qualité méthodologique est variable. Il est cependant possible de retenir en synthèse les quelques éléments suivants. Les patients algiques sont en situation de vulnérabilité et sont influencés par leurs représentations, leurs peurs et leur manque de connaissance dans leur choix de révéler ou non ce vécu, tout comme dans leur possibilité d adhérer ou non aux traitements proposés. Certains facteurs concomitants comme les troubles cognitifs ou l âge aggravent cette problématique. Les infirmières présentent encore des lacunes dans leurs connaissances sur la douleur et l antalgie. Elles sont aussi influencées par leurs propres représentations ce qui entraîne une sous-évaluation, une sous-estimation et un sous-traitement de ce symptôme. Le manque de temps à disposition des infirmières pour prendre

55 40 en charge la douleur correctement, tout comme les problèmes de collaboration interprofessionnelle viennent influencer négativement le soulagement des patients, engageant aussi la responsabilité des institutions de soins dans la persistance d une prévalence de la douleur encore trop élevée. Le non soulagement de la douleur est donc multifactoriel. Il nécessite une meilleure compréhension globale et des actions diversifiées et coordonnées pour y remédier ; ce que l identification plus précise des différents obstacles à la gestion de la douleur devrait favoriser. Ce chapitre a présenté les connaissances actuelles sur la douleur et son évaluation ainsi que sur les obstacles à une gestion optimale de l antalgie perçus par les patients et les infirmières. Le chapitre suivant expose le modèle théorique qui soutient la réflexion sur cette thématique.

56 Cadre Théorique

57 Ce chapitre présente le modèle théorique The Communication Model of Pain (Craig, 2009; Hadjistavropoulos et al., 2011; Schiavenato & Craig, 2010) choisi pour soutenir cette recherche. Après une explication du modèle, son lien avec l étude est justifié. Enfin, l intérêt du sujet pour la discipline est discuté et l intégration du modèle dans le métaparadigme et les savoirs disciplinaires est proposée. Perspective théorique Selon Jacobsen et al. (2009), le modèle biomédical traditionnel est limitant pour la gestion de la douleur. Les auteurs encouragent l utilisation de modèles issus de la psychologie afin de mieux comprendre la complexité du phénomène. Modèle théorique The Communication Model of Pain (Craig, 2009; Hadjistavropoulos et al., 2011; Schiavenato & Craig, 2010) est issu de la psychologie. Il représente une synthèse de nombreuses recherches empiriques et intègre des perspectives biologiques, psychologiques et sociales au niveau des interactions entre la personne vivant l expérience de la douleur et le soignant. Les travaux initialement réalisés en pédiatrie ont par la suite été adaptés à la population adulte et âgée. Ce modèle invite à comprendre la douleur de manière plus large que par ses seules composantes biologiques (Hadjistavropoulos et al., 2011). Cette perspective rejoint les définitions de la douleur abordées précédemment, mais également les propos de Saunders et Baines (1993), dont les travaux menés depuis les années 60 ont révolutionné

58 43 les soins palliatifs et selon qui «quand le contrôle de la douleur reste difficile, il faut explorer ses composantes mentales, sociales et spirituelles». Craig et son équipe réalisent différents constats sur le phénomène de la douleur, son vécu et son décodage. De manière théorique les principes «la douleur est ce que la personne dit», ainsi que «le gold standard de l évaluation est l auto-évaluation», semblent acquis et sont en adéquation avec le rôle d avocat du patient (Craig, 2009). Il n est cependant pas évident qu ils soient réellement intégrés dans la pratique clinique (Schiavenato & Craig, 2010). Craig (2009) remet en question l auto-évaluation de la douleur comme la mesure dite du cinquième signe vital (McCaffery & Ferrell, 1997). Bien que l idée de systématiser l évaluation soit noble, cet acte complexe ne peut être réduit au simple recueil d une donnée quantitative unidimensionnelle qui nécessite, de surcroît, des capacités communicationnelles importantes. Schiavenato et Craig (2010) précisent que passer de l expérience douloureuse à la verbalisation de sa douleur n est pas simple, et ne pas verbaliser sa douleur ne veut pas dire pour autant ne pas avoir mal. L évaluation de ce symptôme est donc basée sur une hypothèse de mutualité qui est : «le patient souhaite amoindrir sa douleur et dit toujours la vérité sur ce qu il ressent ; le soignant veut traiter cette douleur pour la diminuer» (Schiavenato & Craig, 2010, pp. 668, traduction libre). Or le patient ne peut pas toujours dire vraiment ce qu il ressent. Son vécu historique et personnel, son contexte social, son observation de la réaction des soignants à ses plaintes, le besoin de protéger ceux qui l entourent et lui-même, son état de vulnérabilité ainsi que ses

59 44 représentations vont en effet influencer l expression de son ressenti. De même, il serait naïf de croire qu un professionnel de la santé puisse toujours suspendre son scepticisme face aux dires du patient, surtout si ceux-ci ne correspondent pas à ce qu il se représente de l expression de la douleur. Enfin, il lui est parfois difficile de mettre de côté son propre vécu et ses représentations de la douleur pour être totalement réceptif à la problématique spécifique du patient ; quelle que soit sa charge de travail. Pour les auteurs, afin d avoir une chance de mieux saisir le phénomène expérimenté par la personne et ainsi de mieux la soulager, «l évaluation doit se faire sur la base d informations acquises tout au long de la transaction complexe entre le patient et le clinicien» (Schiavenato & Craig, 2010, traduction libre). Le but du modèle est donc de mettre en évidence les différents facteurs intra et interpersonnels, du patient et du soignant, susceptibles d influencer l évaluation de la douleur et de ce fait l action du soignant cherchant à améliorer le confort du patient. La Figure 1 résume l évaluation de la douleur comme une transaction entre le patient et le soignant dans le cadre de l hypothèse de mutualité évoquée précédemment.

60 45 Figure 1. L évaluation de la douleur en tant que transaction Issu de Pain assessment as a transaction, par M. Schiavenato, K. D. Craig, 2010, Clinical Journal of Pain, 26(8), p.672. Au centre du modèle se trouve le processus d évaluation qui est initié par un stimulus générant une sensation douloureuse que le patient expérimente. Il l exprime ensuite par différents signes verbaux et/ou non verbaux. Sur la base de ces signes, le soignant réalise avec le patient une évaluation de la douleur, puis pose un jugement clinique lui permettant de réaliser, ou non, une intervention antalgique. Cette intervention a un effet sur le ressenti douloureux du patient et une nouvelle transaction peut recommencer. Cette relation dyadique est influencée à chaque étape par des facteurs contributifs biologiques, socioculturels, développementaux,

61 46 psychologiques, expérientiels, empathiques, contextuels et situationnels qui peuvent devenir des obstacles. Ces facteurs permettent de mieux comprendre l expérience individuelle unique et complexe de chaque nouveau phénomène douloureux, ainsi que les enjeux majeurs pour décoder ce vécu. Chaque étape principale du processus d évaluation produit une étape intermédiaire d intensité variable qui influence la suite de la démarche. L expérience produit un gradient d expressions verbales et non-verbales influencées par divers facteurs cliniques tels que le niveau de conscience, l âge ou les capacités cognitives ; l expression engendre des démonstrations allant de la suppression à l exagération; l évaluation occasionne différents degrés de consensus entre le patient et le soignant oscillant entre dissonance et résonnance ; et le jugement clinique génère un résultat allant de la persistance de la douleur à la surmédication en passant par le soulagement. Lien du modèle avec cette étude. De manière plus détaillée, les obstacles interférant dans cette transaction sont les suivants : pour le patient, il y a tout d abord la manière verbale et/ou non verbale d exprimer son ressenti. Cette expression est influencée par des représentations personnelles telles que la peur de recevoir des médicaments en réponse à sa plainte, ou au contraire celle de ne pas en recevoir. Il y a également la crainte de ne pas être considéré comme un bon patient, que la maladie progresse, ou encore que la douleur ne puisse être soulagée. Cette expression est aussi influencée par les troubles moteurs, cognitifs, les déficits sensoriels ou les handicaps. De plus, le patient peut décider plus ou moins consciemment de ne pas exprimer sa douleur pour ne

62 47 pas inquiéter ses proches, ne pas recevoir de traitement délétère, ne pas devenir dépendant, ou au contraire de l exagérer pour être entendu et chercher une réponse empathique à sa plainte (Schiavenato & Craig, 2010). Du côté du soignant, Schiavenato et Craig (2010) évoquent des obstacles tels que la priorité donnée aux signes non verbaux et comportementaux de la douleur ainsi qu à la congruence des signes vitaux plutôt qu à l auto-évaluation du patient ; le fait de moins croire les personnes différentes de soi sur la plan ethnique, socio-économique, de l âge ou du sexe ; l influence des expériences antérieures ; la charge de travail ou la qualité de la communication interprofessionnelle. Ces différents obstacles influencent le niveau de consensus que le soignant et le patient atteignent, entre dissonance et résonnance. Ils ont un impact sur la suite du processus : si la concordance est mauvaise, l intervention ne sera pas suffisante au soulagement du patient. Les auteurs reconnaissent que malgré son intérêt, ce modèle théorique reste encore confiné au monde de la recherche (Hadjistavropoulos et al., 2011). Ils relèvent cependant l intérêt que les cliniciens peuvent y trouver, répondant au souci d utiliser des outils mieux adaptés au décodage des comportements non verbaux pour les patients déments, ou servant de base à une formation plus spécifique pour mieux comprendre cette transaction entre le patient et le soignant. Enfin, il leur paraît essentiel de mieux comprendre comment le soignant réussit, en étant témoin d une large gamme de signes générés par la personne vivant l expérience de la douleur, à poser un jugement clinique, décider du soin à délivrer et s assurer que cette intervention

63 48 soit adaptée aux besoins spécifiques de cette personne (Hadjistavropoulos et al., 2011). Pour cette étude, le modèle proposé par Schiavenato et Craig (2010) est enrichi des différentes variables issues du questionnaire de Coker (2010). La Figure 2 présente les obstacles investigués mis en contexte dans le cadre de la transaction entre le patient et l infirmière 5. Grâce à cela, il est possible de distinguer les facteurs contributifs impliqués, à quel moment de la relation dyadique ils le sont, et ainsi de mesurer la complexité et les enjeux du processus d évaluation. 5 Certains énoncés ont été regroupés au sein d une même thématique ; par exemple toutes les questions traitant des difficultés à évaluer la douleur se retrouvent sous «difficultés dans l évaluation».

64 Figure 2. Cadre de recherche : Adaptation du modèle de l évaluation de la douleur en tant que transaction à une étude sur les obstacles à la gestion de la douleur perçus par des infirmières. 49

65 50 Intérêt pour la discipline infirmière La présence 24 heures sur 24 des infirmières auprès des patients hospitalisés en fait les témoins privilégiés de l expérience de la douleur. Leur rôle d avocat du patient les invite à pouvoir défendre le soulagement de la douleur par une évaluation rigoureuse, la transmission des résultats obtenus à l équipe interdisciplinaire et le suivi attentif de l évolution de ce symptôme (Al-Shaer et al., 2011; Melotti et al., 2009; Van Niekerk & Martin, 2003). La douleur appartient aux diagnostics infirmiers, démontrant l importance de sa prise en charge pour la discipline (Carpenito, 1995; Doenges, Moorhouse, & Murr, 2012). De plus, l obligation morale de soulager la douleur est soutenue par diverses théories éthiques et déontologiques (Saint-Arnaud, 2009). Le modèle théorique de Schiavenato et Craig (2010) est emprunté à une autre discipline : la psychologie. Selon Dallaire et Blondeau (1999), la notion de théorie empruntée n est pas un vrai problème car le savoir n appartient à personne. Il doit juste être utilisé et appliqué aux phénomènes dans une perspective disciplinaire. Pour d autres auteurs l emprunt de théorie à d autres disciplines n est pas dénué de risques. Rodgers (2005) évoque celui d appliquer aux soins infirmiers des connaissances qui ont été développées pour d autres buts ou besoins. Elle clarifie cependant que les infirmières vont continuer à utiliser des connaissances issues d autres champs théoriques. L important est alors de s occuper de problème relevant de leur champ d action spécifique, en se sentant responsables de poursuivre le développement de la discipline et en faisant de la recherche dans une perspective infirmière (Rodgers, 2005). L emploi d une théorie empruntée est donc justifié, pour

66 51 autant que les chercheurs puissent rendre explicite la perspective conceptuelle dans laquelle ils réalisent leur étude (Pepin & Cossette, 2008). Métaparadigme et courants de pensée Une discipline professionnelle peut définir sa perspective grâce à un centre d intérêt spécifique. Ce centre d intérêt est redéfini par Pepin, Kérouac, et Ducharme (2010, p. 15) de la manière suivante : «la discipline infirmière s intéresse au soin, dans ses diversions expressions, auprès des personnes, des familles, des communautés et des populations qui, en interaction continue avec leur environnement, vivent des expériences de santé». Cette définition fait ressortir les quatre concepts centraux qui constituent le métaparadigme de la discipline : la personne, l environnement, la santé et le soin. Comme le précise encore Pepin et al. (2010), c est surtout la manière dont les infirmières abordent la relation entre ces concepts, ainsi que les liens qui les unissent, qui clarifie le domaine de la discipline infirmière. En ce sens, le modèle de Schiavenato et Craig (2010) peut tout à fait être lu dans une perspective infirmière. En effet, ce modèle demande de revoir la manière d appréhender l autre (la personne) dans sa souffrance face à l expérience de la douleur (la santé), phénomène influencé par le contexte dans lequel il se produit (l environnement), afin de pouvoir modifier la pratique (le soin) pour améliorer son bien-être par le soulagement de son inconfort (la santé). L importance des liens entre les concepts est valorisée et permet ainsi de renforcer l ancrage disciplinaire. Dans le modèle de Schiavenato et Craig (2010), la personne est considérée comme un être bio-psycho-social en interaction constante et réciproque avec l environnement spécifique dans lequel elle vit son expérience

67 52 douloureuse, expérience également nommée phénomène (Hadjistavropoulos et al., 2011). Ces éléments évoquent, en sciences infirmières, le paradigme de l intégration qui voit la personne comme un être biopsychosocial, culturel et spirituel en interaction avec son environnement. La notion d interaction et d influence réciproque entre le patient et l infirmière dans le modèle de Craig fait voir les prémisses du paradigme de la transformation. Ce modèle peut donc aussi être situé au cœur des principes régissant l école de l interaction et celle des effets souhaités (Pepin et al., 2010). Dans l école de l interaction le soin est perçu comme un processus interactif entre la personne et l infirmière qui s engage dans ce soin ; il nécessite des connaissances actualisées pour évaluer les besoins d aide, poser un jugement clinique approprié et planifier des interventions adéquates. Dans l école des effets souhaités, la personne est vue comme un système en quête d adaptation et d équilibre, le soin ayant pour objectif de favoriser l atteinte de ce but. Des liens peuvent donc être faits entre le modèle de Schiavenato et Craig (2010) et les valeurs et principes sous-jacents à ces différentes écoles. Si ce modèle peut s intégrer au métaparadigme infirmier et à cette recherche, c est parce qu il s intéresse à un phénomène de soin qui appartient à la discipline infirmière et qu il se centre sur la pratique du soignant dans l interaction avec la personne.

68 Méthode

69 Ce chapitre présente le devis de recherche, le milieu de l étude et l échantillonnage. Les particularités de l instrument de mesure du Nurses Perceived Obstacles to Pain Assessment and Management Practices tool (NPOP) et les tests de cohérence interne sont exposés. Le déroulement de l étude et les analyses statistiques sont détaillés. Les considérations éthiques ayant guidé l élaboration de la méthode sont relatées. Devis Il s agit d une étude quantitative descriptive transversale. Ce devis de recherche est justifié par la mise en évidence, dans la recension des écrits, du peu de connaissances actuelles sur la thématique explorée (Fortin & Gagnon, 2010). Milieu L étude a été réalisée dans quatre services de soins aigus (médecine et chirurgie) d un hôpital universitaire de Suisse romande. Le premier compte 58 lits et accueille environ 2250 patients par an ; les trois autres totalisent 69 lits et ont plus de 1750 patients hospitalisés chaque année. Echantillonnage Les infirmières et infirmières-assistantes exerçant dans ces quatre services représentent la population cible de cette l étude. Les critères d inclusion sont les suivants :

70 55 être active dans les soins aux patients ; avoir terminé leur temps d intégration de trois mois dans le service ; parler et lire le français. Le seul critère d exclusion est de faire partie du pool de remplacement de l institution. Les assistantes en soins et santé communautaire n ont pas été retenues. Bien que réalisant les évaluations de la douleur des patients dont elles prennent soin, elles doivent se référer aux infirmières pour la gestion de l antalgie et ne pouvaient donc pas répondre à une partie des questions. Cent sept infirmières répondent aux critères d inclusion : 54 dans le premier service et 53 dans les trois autres. Trois n y répondent pas, à savoir les cadres du service. Une infirmière clinicienne a répondu ne pas participer car occupant un poste de deuxième ligne. L échantillon est de type non probabiliste de convenance. Puisqu il s agit d une étude descriptive, le calcul d une taille d échantillon n a pas été nécessaire. En effet, pour ce type d étude, un petit échantillon suffit généralement pour obtenir l information souhaitée (Fortin & Gagnon, 2010). Ayant estimé un taux de réponse de 60%, la taille d échantillon souhaité correspondait à 74 infirmières, tous services confondus.

71 56 Instruments Justification du choix Comme évoqué précédemment, peu d études ont spécifiquement étudié la perception des infirmières concernant les obstacles à la gestion de la douleur. Les auteurs qui s y sont intéressés ont à chaque fois créé un questionnaire sans finaliser les différentes étapes de validation. Malgré sa fragilité psychométrique, le questionnaire Nurses Perceived Obstacles to Pain Assessment and Management Practices tool (NPOP) (Coker et al., 2010) est retenu en raison du large champ d investigation que ses 40 énoncés offrent et afin de poursuivre en partie la validation de cet outil. En effet, cette recherche permet de calculer l indice de fidélité pour l estimation de la cohérence interne par le biais d un coefficient α de Crohnbach (Fortin & Gagnon, 2010). Présentation de l instrument C est par le biais de plusieurs focus groups menés auprès d un échantillon de convenance de 36 infirmières, travaillant dans six unités de médecine, que le questionnaire a été créé en langue anglaise (Coker et al., 2010). Une validation de contenu (Coker et al., 2010; Fortin & Gagnon, 2010) a été testée par un groupe d experts académiques et cliniciens multidisciplinaires au fil de sa construction et à la fin de celle-ci. Il a ensuite été testé auprès d étudiants infirmiers en fin de formation. Le NPOP comprend 40 questions réparties autour des trois dimensions établies par l auteur du questionnaire sur une base théorique : les obstacles en lien avec le patient, le soignant ou le système. L évaluation de chaque

72 57 question est réalisée sur une échelle de Likert en sept points mesurant l intensité de l interférence de cet obstacle avec la gestion de l antalgie : 1 = n interfère jamais ; 2 = interfère très rarement ; 3 = interfère rarement ; 4 = interfère occasionnellement ; 5 = interfère fréquemment ; 6 = interfère très fréquemment ; 7 = interfère toujours. La réponse «ne s applique pas» = 0 a été ajoutée au questionnaire initial. Le score total du questionnaire peut se situer entre 0 (pas d interférence) et 280 (interférence maximale). Traduction du questionnaire Après autorisation d utilisation par les auteurs, l instrument a nécessité une traduction et une adaptation culturelle selon une méthode standard de traduction et d adaptation d outils de mesures de santé (Wild et al., 2005). Dans cette étude, la procédure a été modifiée. La troisième étape n a pas été réalisée car elle se justifie uniquement si les traductions sont faites à double par plusieurs personnes. Dans la méthode originale, dix étapes se succèdent pour la traduction et l adaptation culturelle: 1) la préparation (incluant les contacts avec l auteur pour la permission d utiliser le questionnaire) ; 2) la traduction de la version originale de l anglais au français ; 3) la réconciliation (entre la version originale et la traduction) ; 4) la traduction retour (du français à l anglais) ; 5) la révision de la traduction retour (pour s assurer de l équivalence conceptuelle des deux versions anglaises) ; 6) l harmonisation de toutes les versions ; 7) le débriefing cognitif auprès de la population cible (ou pré-test) ; 8) la revue du débriefing cognitif et finalisation de la version française ; 9) la relecture, et 10) le rapport final du processus. Les neuf étapes restantes ont été menées par l étudiante master en collaboration avec

73 58 différentes personnes en fonction des exigences de chaque étape. La traduction de l anglais au français a été effectuée par la directrice du mémoire, la traduction retour par un traducteur professionnel officiel. Les révisions et adaptations culturelles ont été accomplies par un groupe d infirmiers experts dans le domaine de la douleur (soins palliatifs, soins intensifs, antalgie, programme institutionnel de lutte contre la douleur) ou formateurs dans ce même domaine (formation continue ou postgrade universitaire) en leur soumettant le questionnaire pour des commentaires et suggestions qu ils ont réalisés de manière individuelle. Ces révisions ont ensuite été retravaillées par l étudiante master et la directrice de mémoire avant d être approuvées par l auteur principal du questionnaire. Avant son utilisation dans cette étude, la version française issue de cette traduction (Appendice A) a été soumise à un pré-test auprès de 11 infirmières provenant de services apparentés à ceux investigués. Les réponses à ce pré-test n ont pas été intégrées à l étude. Sur la base des commentaires des participantes lors du pré-test, les énoncés qui n étaient pas clairs ont été modifiés après concertation entre l étudiante, sa directrice de mémoire et l auteur principal du questionnaire. Le pré-test a aussi permis d évaluer le temps nécessaire au remplissage du questionnaire. Cohérence interne du NPOP version française. Les aspects de fidélité et de validité doivent être vérifiés autant pour des nouveaux instruments que pour des instruments traduits (Fortin & Gagnon, 2010). La cohérence interne sert à évaluer le degré de fidélité du

74 59 NPOP. Cette cohérence mesure la corrélation existante entre les énoncés afin de déterminer l homogénéité de l ensemble des énoncés mesurant les divers aspects d une même dimension (Fortin & Gagnon, 2010). «La corrélation des énoncés est proportionnelle à la cohérence interne de l instrument» (Fortin & Gagnon, 2010, p. 408). Deux approches sont retenues pour apprécier cette cohérence interne : la corrélation interénoncés et le coefficient alpha de Cronbach. La corrélation interénoncés consiste à établir le degré de corrélation entre chaque énoncé et le score total de la même dimension. Cette statistique se calcule au moyen du coefficient de corrélation r de Pearson ou de Spearman en fonction de la distribution (Fortin & Gagnon, 2010). Les énoncés dont le score est inférieur à 0,20 doivent être éliminés ou réécrits (Streiner & Norman, 2008). Le coefficient α de Cronbach est l indice de fidélité privilégié lorsqu il existe plusieurs choix de réponses, comme c est le cas avec une échelle de Likert (Fortin & Gagnon, 2010). Cette statistique permet de déterminer à quel point les énoncés mesurent un concept donné de la même manière. Ce coefficient est influencé par le nombre d énoncés d une échelle : plus il y a d énoncés, plus il est élevé. En effet, plus le nombre de questions sur la thématique est grand plus la chance d évaluer le concept de manière précise est élevé. La valeur du coefficient varie entre 0 et 1. Plus la valeur est élevée, plus la cohérence interne est grande et plus l instrument est fidèle (Fortin & Gagnon, 2010). Un coefficient entre 0,75 et 0,85 est considéré comme bon, il est excellent s il se situe entre 0,85 et 0,95 (Fortin & Gagnon, 2010).

75 60 Les données issues des réponses «non applicables» n ayant pas été remplacées, le calcul de cohérence interne a été réalisé sur la moyenne des scores et non sur les scores totaux. Un test non paramétrique de Kolmogorov- Smirnof a été réalisé. Une valeur de p < 0,05 indique que la distribution s écarte de la normalité (Ancelle, 2006). Ce test posant l hypothèse nulle (Ho) que les distributions sont normales confirme que la distribution des énoncés ne répond pas à une loi normale ; une corrélation de Spearman a donc été effectuée pour évaluer le lien que chaque énoncé présente avec la moyenne de la dimension à laquelle il est rattaché (Tableau 1) (Taffé, 2011). Cette analyse montre un Rho allant de 0,34 à 0,79, sauf pour l énoncé 40 qui présente un Rho de 0,14 non statistiquement significatif, ce qui laisse supposer que la mesure réalisée avec cette question n est pas fiable et devrait être enlevée ou réécrite. Il a cependant été décidé de la garder afin de pouvoir réaliser des comparaisons avec l étude de Coker et al. (2010). La distribution des dimensions et du score total répond à une loi normale, ce qui a été confirmé par un test de Kolmogorov-Smirnof. Un coefficient α de Cronbach a été établi pour chacune des dimensions ainsi que pour la moyenne du score total du NPOP. Le score pour l ensemble du questionnaire atteint 0,92.

76 61 Tableau 1 Cohérence interne de la version française du NPOP Dimensions Enoncé Rho de Spearman Alpha de Cronbach Patient Système 1 0,36** 2 0,58* 3 0,64* 4 0,60* 5 0,67* 6 0,49* 7 0,52* 15 0,59* 17 0,65* 20 0,34** 24 0,61* 8 0,46* 9 0,54* 10 0,52* 11 0,66* 12 0,64* 13 0,57* 14 0,64* 23 0,60* 30 0,53* 31 0,60* 32 0,79* 33 0,69* 36 0,39* 37 0,61* 38 0,53* 39 0,48* 0,79 0,86

77 62 Dimensions Enoncé Rho de Spearman Alpha de Cronbach Infirmière 16 0,41* 18 0,44* 19 0,39* 21 0,55* 22 0,48* 25 0,80* 26 0,53* ,67* 28 0,79* 29 0,61* 34 0,61* 35 0,68* 40 0,14 Alpha de Cronbach total 0.92 * p < 0,001. ** p < 0,01. Données démographiques En préambule à ce questionnaire, les infirmières ont complété des données démographiques incluant : le sexe, l âge, les années ou mois de pratique depuis l obtention du diplôme et au sein du service, le pourcentage de travail actuel, le niveau de formation actuel (infirmière assistante ou diplômée, infirmière spécialisée, infirmière de pratique avancée), le suivi de cours de formation continue sur la douleur, ainsi que la date où ces derniers ont été suivis (Appendice B). Le choix des variables de ce questionnaire démographique a été réalisé sur la base des données issues de la littérature afin de pouvoir comparer les résultats obtenus avec les études menées dans ce domaine.

78 63 Déroulement de l étude Cette étude s inscrit dans un projet plus grand de prévalence de la douleur (PréDATA, mené par la directrice de mémoire) au sein de la même institution. Son but est de décrire les pratiques en lien avec la prise en charge de la douleur des patients hospitalisés dans les mêmes services de cet hôpital tertiaire, incluant : 1) une étude de prévalence de la douleur chez les patients hospitalisés, 2) la description des modes de prescription et d administration des antalgiques en lien avec l intensité de la douleur du patient estimée par les infirmières, et 3) l identification des obstacles à la prise en charge de la douleur perçus par les infirmières. Cette recherche s insère dans le troisième volet de l étude principale et se déroule conjointement à un autre mémoire qui s intéresse plus spécifiquement aux connaissances et attitudes des infirmières sur la gestion de la douleur (Gueniat, 2013). Après un avis présidentiel positif de la Commission cantonale (VD) d éthique de la recherche sur l être humain (protocole 326/12) (Appendice C), des séances d informations au sujet de l étude ont été réalisées lors des colloques d équipe de chaque service. Elles avaient pour but d expliquer la méthode de recueil de données et de susciter l intérêt des infirmières à participer à cette recherche. Toutes les infirmières répondant aux critères d inclusion ont reçu une lettre d information dans leur casier-courrier leur présentant les buts de l étude, son déroulement et une invitation à y prendre part de manière volontaire (Appendice D). La même information a été adressée à chaque collaborateur

79 64 par le biais de leur messagerie informatique institutionnelle. Enfin, des posters (Appendice E) ont été affichés à titre d information et de rappel dans les endroits stratégiques des différents services (p. ex. la salle de pause, le bureau infirmier). Le temps pour répondre aux questionnaires a été estimé à 30 minutes. Afin de ne pas prétériter les soins aux patients, les directrice/directeur de département et infirmière/infirmier chef-fe de service ont accordé ce temps en heures supplémentaires si les infirmières ne parvenaient pas à remplir ce questionnaire durant leur horaire de travail. L étudiant master, réalisant l étude sur les connaissances et attitudes, s est occupé de l envoi des questionnaires par le biais du module Déclic de la plateforme informatique SphinxOnline Manager (2012), qui permet la réalisation d enquête à partir du navigateur internet. Après avoir inséré les questionnaires, des contrôles de saisie ont été programmés pour que les participants répondent à toutes les questions (réponses obligatoires) et que les questions soient correctement remplies (contrainte d intégrité qui indique un minimum et un maximum qui ne peut être dépassé, ou un choix de réponses possibles en fonction du type de questions). A la fin de la programmation, le module Déclic a créé une adresse «url» transmise aux infirmières. Lors de la création de l enquête, un mot de passe a été généré par le module pour empêcher des accès inopportuns. Seuls l étudiant master et la directrice de mémoire sont en possession de ce mot de passe. Cette plateforme informatique permet de suivre le retour des questionnaires de manière anonyme. Elle génère des rappels ciblés automatiques sans qu il soit

80 65 possible d identifier les personnes recevant ce rappel. C est ainsi que deux messages de relance ont été envoyés aux personnes n ayant pas encore répondu aux jours 14 et 26 de l étude. Un pré-test d administration informatique du questionnaire a été réalisé par deux infirmières de l institution. Analyses statistiques Les données ont été transférées de la plateforme SphinxOnline Manager (2012) à une base de données Microsoft Excel (2010) puis au programme informatique STATA (2012) pour l analyse. Vu la plateforme informatique utilisée pour le recueil des données, aucune donnée manquante n était possible. Un test d absence d erreurs a été réalisé conjointement par les deux étudiants pour vérifier l absence de données aberrantes. Ainsi, il a été vérifié que la pratique totale des infirmières soit supérieure ou égale à celle dans le service, et inférieure ou égale à l année de réalisation de l étude moins l âge minimal pour l obtention du diplôme. De même, il a été contrôlé que la date de suivi de cours sur la douleur ne soit pas antérieure à l entrée en pratique, et que le total de chaque questionnaire ne soit pas supérieur à 280. Enfin, les réponses «ne s applique pas» n ont pas été remplacées par la moyenne des scores calculés car, représentant moins de 0,1% des données totales, elles ont été considérées comme non significatives.

81 66 Description de l échantillon. Compte tenu du caractère de l étude, des statistiques descriptives sont utilisées pour traiter les données démographiques de l échantillon. Des mesures de tendance centrale et de dispersion sont réalisées. Les variables continues sont présentées par la moyenne et l écart-type lorsque les distributions répondent aux caractéristiques d une loi normale ou, si elles n y répondent pas, par la médiane et l intervalle interquartile. Les variables catégorielles sont quant à elles résumées par la fréquence et le pourcentage. Obstacles à la gestion de l antalgie. Pour chaque question et chaque dimension du NPOP, les mêmes démarches de contrôle de normalité que celles décrites ci-dessus sont menées. Malgré une controverse à ce sujet, les échelles de Likert en sept points sont traitées comme des données continues (Johnson & Creech, 1983; Zumbo & Zimmerman, 1993). À travers une distribution de fréquence, les obstacles sont classés par rangs, soit de celui qui interfère le plus à celui qui interfère le moins. Afin de décrire et d identifier de manière précise les obstacles prioritaires sur lesquels il faudrait pouvoir agir, les 24 premiers énoncés retenus comme interférant avec la gestion de la douleur sont mis en évidence car ils représentent, selon le principe de la loi de Pareto et des pourcentages cumulés, 80% des obstacles perçus par les infirmières (Coker et al., 2010). Pour réaliser cette démarche, l énoncé le plus souvent perçu comme un obstacle à la gestion de la douleur est additionné avec le deuxième, donnant ainsi un premier pourcentage cumulé. Le troisième énoncé est ensuite ajouté à ce premier résultat permettant d obtenir un

82 67 deuxième pourcentage cumulé. La démarche est ensuite réalisée avec autant d énoncés nécessaires permettant d atteindre au moins 50%, puis au moins 80% de la problématique. Afin de suivre une procédure semblable à celle des auteurs (Coker et al., 2010), les variables sont ensuite dichotomisées en obstacles n interférant pas avec la gestion de la douleur pour les réponses allant de 1 à 4 sur l échelle de Likert, et interférant avec la gestion de la douleur pour celles entre 5 et 7. Le pourcentage d énoncés interférant ainsi que le score moyen de ces obstacles sont calculés sur cette base pour les trois dimensions. Bien que le devis de cette étude soit transversal, un test ANOVA de mesures répétées est établi sur le score moyen des obstacles afin de confirmer ou non l hypothèse nulle d égalité entre les trois dimensions. Ce test est adapté pour mesurer les observations de plusieurs infirmières sur un même énoncé en un temps déterminé et non sur celles d une infirmière réalisant plusieurs mesures a des temps répétés. Enfin, des comparaisons entre les variables démographiques de l échantillon et les obstacles perçus sont réalisées afin d identifier si certaines caractéristiques génèrent des valeurs plus grandes que d autres. Au vu du devis descriptif et de la distribution des variables, les tests de statistiques non paramétriques de Wilcoxon Mann-Whitney (deux échantillons) sont effectués après comparaison d égalité des variances (Taffé, 2011).

83 68 Considérations éthiques L enquête auprès du personnel soignant Une des premières responsabilités du chercheur est l attention portée aux participants de l étude (Fortin & Gagnon, 2010). Si la plupart des codes légaux et éthiques réglementent la recherche auprès de patients, les lignes directrices internationales d éthique qui régissent la recherche sur les êtres humains peuvent également être appliquées au personnel soignant. Ces principes ont trait au respect de la personne et de sa vie privée, à la confidentialité des données et aux principes de justice et de bienfaisance (UNESCO, 2006). Le principe de proportionnalité entre ce qui est demandé à la personne et que ce l on prétend rechercher par l étude réalisée peut encore être ajouté. De plus, les personnes qui acceptent de participer à une étude le font de manière volontaire, elles doivent se sentir libre d accepter ou de refuser de s engager dans cette démarche et peuvent se retirer en tout temps (Centre Hospitalier Universitaire Vaudois, 2010). Information et consentement En Suisse, la recherche est réglementée par la loi fédérale relative à la recherche sur l être humain ("Loi relative à la recherche sur l'être humain (LRH)," 2011) qui stipule dans son article 7, que la recherche ne peut être pratiquée qu après avoir reçu le consentement éclairé de la personne. L information est alors une étape essentielle qui permet à la personne de donner, ou non, son consentement. Les équipes infirmières ont été informées de l étude par l étudiante master lors de colloques d équipe dans les différents

84 69 services entre septembre et octobre Une feuille d information leur a ensuite été distribuée selon les modalités vues précédemment. Cette feuille leur signalait l intérêt de l étude, les consignes pour remplir les questionnaires, la personne de référence en cas de besoin d informations complémentaires, et portait une attention particulière à la confidentialité des données. Le retour du questionnaire était considéré comme leur consentement à participer à la recherche, ce qui était clairement explicité dans le document d information. Traitement des données personnelles Les données électroniques auxquelles seuls l étudiant réalisant l étude sur les connaissances et attitudes et la directrice de mémoire ont eu accès sont protégées par un mot de passe, et l étudiante n a pas de moyen de remonter aux personnes sources. Toutes ces données sont traitées confidentiellement par l étudiante (Fortin & Gagnon, 2010; "Loi relative à la recherche sur l'être humain (LRH)," 2011) et ne seront pas transmises aux chefs hiérarchiques autrement que sous la forme de résultats agrégés. Selon l Ordonnance sur les essais cliniques de produits thérapeutiques (OClin, 2001), tous les documents en lien avec cette étude seront archivés pendant 10 ans. Evaluation des risques Vu la nature descriptive de cette étude impliquant les infirmières, il n existe pas de risque connu ni pour ses participants ni pour les patients dont elles s occupent. Il n a donc pas été nécessaire de contracter une couverture d assurance ("Loi sur la santé publique," 1985). L enjeu éthique principal de

85 70 cette étude se déroulant dans plusieurs services différents de l institution est de ne pas stigmatiser un département ou un service. Les résultats seront donc anonymisés dans ce travail en nommant les différents services A, B, C et D. Il en sera de même lors des présentations publiques et des publications. Cependant, afin de pouvoir adapter les recommandations à développer spécifiquement dans les services, ces derniers auront accès à leurs résultats individuels de manière anonyme. C est-à-dire qu aucune donnée ne pourra être mise en relation avec un-e participant-e. Plan de financement et rétribution Cette étude entre dans le cadre du programme master ès sciences infirmières de l Institut universitaire de formation et recherche en soins. L étudiante a été soutenue par la Fondation Pallium pour réaliser sa formation. Il n y a pas de rétribution des participants à l étude. Ce chapitre a présenté les différentes étapes de la méthode, ainsi que l instrument de mesure et les opérations statistiques prévues. Le prochain chapitre présente les résultats obtenus sur la base des questionnaires remis.

86 Résultats

87 72 Ce chapitre présente les résultats des analyses descriptives réalisées dans cette étude. Il comprend une description des données sociodémographiques des participants et les résultats du questionnaire des obstacles à l antalgie perçus par les infirmières. Echantillon La collecte de donnée a eu lieu du 31 octobre au 5 décembre Durant cette période, et grâce aux deux rappels effectués, 70 infirmières sur les 107 qui remplissaient les critères d éligibilité ont répondu au questionnaire (Figure 3), ce qui correspond à un taux de réponse de 65,4%. Au vu du mode anonyme d administration du questionnaire, aucune information sur les non répondants n a été obtenue. Evalués pour éligibilité (n = 116) Questionnaires envoyés (n = 107) Exclus (n = 9) : Pas achevé le temps d intégration de trois mois dans le service (n = 6) Pas actives régulièrement dans les soins directs aux patients (n = 3) Décline l offre de participation (n = 1) Questionnaire incomplet (n = 7) Non réponse (n = 29) Questionnaires analysés (N = 70) Figure 3. Diagramme de recrutement. Caractéristiques sociodémographiques des participants Les principales caractéristiques des infirmières ayant pris part à cette étude sont présentées dans le Tableau 2.

88 73 Tableau 2 Caractéristiques sociodémographiques des participantes 6 N = 70 Caractéristiques n % Sexe Femme 56 80,0 Homme 14 20,0 Service A 46 65,7 B 7 10,0 C 7 10,0 D 10 14,3 Formation De base 58 82,9 Post diplôme 8 11,4 Post grade universitaire 4 5,7 Formation continue douleur Oui 27 38,6 Non 43 61,4 Date de la formation continue >1 an 7 25,9 1-2 ans 18 66,7 3-5 ans 2 7,4 Mdn (IQR) Min-max. Age 30 (11) Taux d activité 100 (10) Nombre de mois de pratique Au total 54,5 (117) Dans le service 36 (41) L échantillon est composé d une majorité de femmes (n = 70, 80%). La distribution de l âge indiquant une légère déviation à gauche (Skewness - 0,84) et des queues de probabilités un peu fines (Kurtosis 2,59), un test de 6 Le féminin est utilisé dans ce travail à titre épicène

89 74 Kolmogorov-Smirnof contrôle la normalité de cette distribution. Il confirme une courbe non gaussienne en rejetant l hypothèse nulle de normalité (p corrigée = 0,017). L âge médian est donc de 30 ans (IQR 11). Le taux d activité médian est de 100% (IQR 10). Les participants travaillent pour 65,7% d entre eux dans le service A, et pour les 34,2% restant dans les services B-C-D. La médiane de l expérience professionnelle est de 4,5 ans ; celle du temps de travail au sein du service actuel de 3 ans. Une minorité d infirmière a réalisé une formation post diplôme (11,4%), ou post grade universitaire (5,7%). Moins de la moitié de l échantillon (38,5%) a suivi une formation continue sur le thème de la douleur ; pour 66,6% de ces personnes, la formation a été réalisée entre 1 et 2 ans avant l étude et pour 25,9% moins d un an auparavant. Il y a plus d infirmières issues du service A (n = 21) qui ont suivi ces formations continues comparé aux trois autres services réunis (n = 6). Description des obstacles à la gestion de la douleur Les 40 obstacles ont été ordonnés en fonction du nombre d infirmières les ayant identifiés comme interférant avec la gestion optimale de la douleur (Tableau 3).

90 75 Tableau 3 Obstacles interférant avec la gestion de l antalgie N = 70 Rang Obstacle (énoncé du NPOP) Dimension n (%) 1 La difficulté à évaluer la douleur chez les personnes à cause des troubles cognitifs La difficulté des patients à remplir les échelles de douleur Le manque de temps pour offrir des approches non pharmacologiques pour soulager la douleur La réticence des patients à prendre des antalgiques par peur de devenir dépendant La volonté des patients à tolérer la douleur chronique Les patients ne voulant pas déranger les infirmières 5 La réticence des médecins à prescrire un traitement adéquat pour soulager la douleur par peur de sur-doser les patients atteints de démence ou de délirium La difficulté de croire la douleur rapportée par les patients parce qu ils sont incohérents d une fois à l autre, et que leurs propos ne correspondent pas à leur comportement non verbal La réticence des patients à prendre des antalgiques à cause des effets secondaires Ne pas savoir à combien la douleur est acceptable pour chaque patient Ne pas connaître l intensité de la douleur des patients à cause du manque de temps passé avec eux Les pratiques incohérentes autour des doses de réserve pour un patient La tendance à documenter seulement si le soulagement de la douleur n est pas atteint ou si le patient refuse ses antalgiques Infirmière 46(65,71) Patient 38(54,29) Système 29(41,43) Patient 22(31,43) Patient 20(28,57)* Patient 20(28,57)* Système 20(28,99)* Patient 19(27,14) Patient 18(25,71) Infirmière 17(24,29) Système 17(24,29) Infirmière 16(23,19)* Infirmière 16(22,86)*

91 76 N = 70 Rang Obstacle (énoncé du NPOP) Dimension n (%) 14 La difficulté à évaluer la douleur chez les personnes à cause de la barrière de la langue Patient 15(21,43) 14 La difficulté à évaluer la douleur chez les personnes à cause des troubles de l humeur Le manque de temps pour l enseignement thérapeutique des patients Les antipsychotiques sont envisagés avant les antalgiques chez les patients agités Les patients rapportant leur douleur au médecin, mais pas à l infirmière La difficulté à évaluer la douleur chez les personnes à cause de problèmes sensoriels Le manque de connaissance et d expérience des médecins dans la prescription d antalgiques Evaluer la douleur de manière variable d une fois à l autre chez un même patient 20 Etre concentré sur l administration de la médication prescrite d office et ne pas vérifier ni proposer d antalgique en réserve tant que le patient n en demande pas La difficulté à contacter ou à communiquer avec les médecins pour discuter des traitements de la douleur des patients La difficulté à contacter ou à communiquer avec les médecins pour parler des résultats des évaluations de la douleur des patients Infirmière 15(21,43) Système 15(21,43) Infirmière 13(18,57) Patient 12(17,14) Patient 12(17,14) Système 11(15,71)* Infirmière 11(15,71)* Infirmière 11(15,94)* Système 10(14,29)* Système 10(14,49)* * Malgré un n similaire, le pourcentage varie car il est calculé sur la base du nombre total de répondants à la question, celui-ci changeant en fonction des données «non applicables». Seuls les 24 premiers obstacles sont présentés dans cette section, l entier du tableau se trouvant en appendice (Appendice F). Un diagramme de Pareto (Figure 4) présente le pourcentage cumulé déterminant le nombre de questions comptant pour 80% de la problématique des obstacles perçus : les 24 premiers énoncés totalisent 81,2% de ces obstacles. Sur cette base, les

92 77 questions totalisant 50% des obstacles ont été retenues comme nécessitant des actions prioritaires, il s agit des 12 premiers énoncés qui représentent 52,9% des obstacles totaux. Figure 4. Diagramme de rangs des obstacles à la gestion de la douleur limité aux 24 énoncés les plus souvent identifiés Deux énoncés (la difficulté à évaluer la douleur chez les personnes à cause des troubles cognitifs et celle des patients à remplir les échelles de douleur) ont été relevés par plus de la moitié des participants, respectivement 65,7% pour le premier et 54,2% pour le deuxième. Les deux énoncés suivants (le manque de temps pour offrir des approches non pharmacologiques pour soulager la douleur et la réticence des patients à prendre des antalgiques par peur de devenir dépendant) sont encore identifiés par plus de 30% des participants. Entre 21,4 et 28,5% des infirmières nomment les 12 obstacles qui viennent après comme interférant dans leur pratique. Les obstacles arrivant

93 78 entre la dix-septième et la vingt-neuvième position ont été identifiés comme interférant dans la gestion de la douleur dans 18,4% à 11,4% des cas. Les neuf derniers ne concernent que 10,6%, ou moins, des infirmières. Sur les 12 premiers énoncés qui représentent 50% de la problématique, six sont liés à la dimension du patient, trois à celle du système et trois à celle des infirmières ; alors que pour les 24 obstacles retenus, neuf concernent le patient, sept le système et huit l infirmière. Les deux obstacles arrivant en tête des résultats sont en rapport avec la dimension de l infirmière et celle du patient. Elles touchent toutes les deux aux problématiques d évaluation, que ce soit en raison de la difficulté d évaluer un patient présentant des troubles cognitifs, ou de la difficulté de ce dernier à remplir les échelles. Les cinq obstacles liés au patient qui viennent ensuite concernent le manque de connaissances sur les antalgiques et les effets secondaires, les représentations du vécu de la douleur, la volonté de ne pas déranger les infirmières et le fait de ne pas avoir des propos cohérents entre deux évaluations ou de démontrer une dissonance entre l expression verbale et non verbale de leur douleur. Les obstacles liés à l infirmière se situent ensuite entre la onzième et la douzième place. Ils se rapportent au fait de ne pas bien connaître les patients, et donc leur vécu douloureux, et l absence de rigueur dans la manière de documenter le suivi de la gestion de la douleur. Enfin les trois obstacles liés au système qui émergent en premier sont ceux se rapportant au manque de temps pour proposer des alternatives aux traitements pharmacologiques, aux peurs des médecins concernant les

94 79 antalgiques appropriés pour les personnes atteintes de troubles cognitifs et au manque de temps que les infirmières peuvent passer avec le patient pour réaliser leur évaluation de la douleur. S agissant des 12 obstacles suivants, la répartition des dimensions est donc différente, avec trois obstacles liés à la dimension du patient, quatre à celle du système et cinq à celle des infirmières. Les obstacles concernant la dimension du patient sont majoritairement générés par une difficulté communiquer leur douleur à cause de problèmes de langue ou sensoriels et au fait que les patients rapportent plus leur douleur au médecin qu à l infirmière. Les obstacles se rapportant à la dimension infirmière abordent différentes problématiques : les pratiques variables dans l administration des réserves ; le fait de donner en premier lieu un psychotrope à la place d un antalgique chez les patients agités ; le manque de standardisation dans les pratiques évaluatives ; l importance mise surtout sur l administration des traitements d office tant que les patients ne se plaignent pas spontanément. Les quatre obstacles de la dimension du système abordent quant à eux le manque de temps que les infirmières ont pour réaliser de l enseignement thérapeutique, les difficultés communicationnelles entre les infirmières et les médecins et le manque de connaissances de ces derniers. Les variables dichotomisées ont ensuite été classées au sein des trois dimensions par ordre décroissant (Appendice G) afin d identifier la proportion d obstacles interférant pour chaque dimension. L analyse des données issues de l échantillon indique que les obstacles à la gestion de la douleur perçus par

95 80 les infirmières se concentrent surtout autour de la dimension du patient, même si les proportions d obstacles considérés comme interférant avec la gestion de l antalgie restent faible : 27% pour la dimension patient, 15% pour la dimension infirmière et 12% pour la dimension système (les distributions ne suivent pas une loi normale). Une distribution des moyennes par dimension a été réalisée pour identifier la dimension des obstacles perçus par les infirmières la plus hautement cotée (Figure 5). Un test ANOVA de mesures répétées (un même énoncé mesuré par plusieurs infirmières) a été réalisé. Il confirme que l hypothèse nulle : les 3 dimensions sont égales, peut être rejetée (Huynh-Feld epsilon = 0,96, p < 0,001 ; Greenhouse-Geisser epsilon = 0,93, p < 0,001) Moyennes dimension patient Moyennes dimension infirmière Moyennes dimension système Figure 5. Distribution des moyennes par dimension

96 81 Les scores moyens sont inférieurs à 5, valeur seuil pour juger que l obstacle interfère ou non. L étendue de la dimension du patient est celle qui est la plus ramassée des trois. Il peut encore être souligné qu aucune valeur n a atteint le score minimal ou maximal. Comparaison des caractéristiques démographiques De manière générale, les différences de valeurs entre les caractéristiques démographiques ne sont pas très importantes que ce soit pour la moyenne du score total du questionnaire ou pour les différentes dimensions (Tableau 4). Tableau 4 Moyennes des obstacles à la gestion de l antalgie par caractéristiques démographiques Catégorie Caractéristiques démographiques N = 70 M (ET) des obstacles Service A 46 3,2 (0,6)* B 7 3,4 (0,5)* C 7 3,7 (0,4)* D 10 3,7 (0,8)* Formation De base 58 3,3 (0,6) Continue et post grade 12 3,5 (0,6) Formation continue Oui 27 3,4 (0,6) Non 43 3,3 (0,6) Années de pratique totale < ,4 (0,6) = ou > ,3 (0,6) Années de pratique service < ,4 (0,6) * p < 0,01. = ou > ,2 (0,6)

97 82 Concernant l ensemble du questionnaire, seule une différence entre les services a été identifiées comme statistiquement significative. Les infirmières du service A ont identifiés moins d obstacles interférant avec la gestion de la douleur (M = 3,2, ET = 0,6) comparé aux autres services (M entre 3,4 et 3,7, ET entre 0,4 et 0,8), et cette différence est statistiquement significative (p = 0,001). Cette différence se retrouve également dans les trois dimensions du questionnaire prises séparément (Tableau 5). Tableau 5 Moyenne des obstacles à la gestion de l antalgie par dimension et par service Dimension Service n M (ET) Patient A 46 3,6 (0,6)** B 7 3,8 (0,8)** C 7 4,2 (0,2)** D 10 3,8 (0,7)** Système A 46 3,0 (0,7)** B 7 3,5 (0,6)** C 7 3,5 (0,5)** D 10 3,7 (1,0)** Infirmière A 46 3,0 (0,6)* B 7 3,0 (0,6)* C 7 3,6 (0,5)* D 10 3,6 (0,9)* * p < 0,01. ** p < 0,05 Aucune autre caractéristique démographique ne montre des valeurs statistiquement plus élevée (Tableau 6).

98 83 Tableau 6 Moyenne des obstacles à la gestion de l antalgie par caractéristiques démographiques et dimensions Caractéristiques démographiques Dimensions M(ET) Formation de base/ continue et post grade Formation continue Oui/ Non Années de pratique totale < 5/= ou > 5 Années de pratique service < 5/= ou > 5 * p < 0,05. Patient 3,7(0,6) - 3,7(0,7) Système 3,4(0,6) - 3,1(0,8) Infirmière 3,3(0,8) - 3,0(0,7) Patient 3,8(0,7) - 3,6(0,6) Système 3,3(0,7) - 3,1(0,8) Infirmière 3,0(0,8) - 3,1(0,7) Patient 3,7(0,7) - 3,7(0,6) Système 3,3(0,8) - 3,2(0,7) Infirmière 3,1(0,7) - 3,1(0,7) Patient 3,7(0,7) - 3,7(0,7) Système 3,3(0,8) - 3,0(0,6) Infirmière 3,2(0,7) 2,9(0,7) Ce chapitre a exposé les résultats qui répondent aux questions de recherche posées dans la problématique. Le chapitre suivant présente une discussion de ces résultats en regard des écrits scientifiques.

99 Discussion

100 Ce chapitre présente la mise en perspective des résultats avec les connaissances abordées dans la recension des écrits. Les limites et les forces de l étude sont ensuite soulignées. Enfin, la portée des résultats est discutée pour évaluer leur implication pour la pratique clinique et la recherche infirmière. Mise en perspective Echantillon Il n existe pas de données statistiques spécifiques sur la population infirmière de l hôpital où s est déroulée cette recherche. Les informations les concernant sont regroupées dans la catégorie «soin», incluant d autres professionnels. Une approximation peut être faite avec des données nationales. Sur les 70 participantes, 80% sont des femmes, ce qui correspond aux données fédérales. En effet, dans le domaine de la santé, toutes professions confondues, la proportion de femmes est de 72%. Cette proportion augmente à 81% chez les infirmières (Office Fédéral de la Statistique, 2007). Le taux d activité médian des participantes est de 100%. Ce taux est supérieur à la moyenne nationale dans les hôpitaux universitaire où elle est de 83% (Jaccard Ruedin, Weaver, Roth, & Widmer, 2009). Aucune information n est à disposition concernant l âge moyen des infirmières travaillant dans ce type de service. Sur la base de ces informations, l échantillon de cette étude est

101 86 considéré comme représentatif de la population des services de l hôpital où cette recherche a été menée. Obstacles à la gestion de la douleur Avant d entrer dans la discussion des résultats, il est nécessaire d apporter quelques éléments complémentaires concernant la répartition des obstacles dans les trois dimensions préalablement décrites. En effet, si de manière théorique il parait aisé de procéder à une telle démarche, cette vision linéaire n est pas compatible avec la complexité de la réalité clinique. Elle ne l est pas non plus avec cette notion de transaction interpersonnelle que représente le processus d évaluation de la douleur proposé par Schiavenato et Craig (2010). Les trois dimensions sont très étroitement inter-reliées et s influencent en permanence. Il semblerait alors plus à propos de les présenter sous forme d un diagramme de Venn (Figure 6) afin de mieux visualiser cette interaction réciproque et ainsi de mieux imaginer les défis que cela engendre. Il semblerait aussi plus pertinent de ne pas classer les obstacles au sein d une seule dimension au risque de les figer, mais plutôt de les répartir par thématique (p.ex. évaluation, représentations, organisation, etc.) afin de conserver cette dynamique relationnelle qui est au cœur de la problématique de la gestion de la douleur.

102 87 Figure 6. Diagramme des trois dimensions des obstacles à la gestion de la douleur Malgré ce commentaire, la suite de la discussion va s articuler autour des trois dimensions pour rester en harmonie avec la recension des écrits. En premier lieu, il est à relever que les scores moyens des obstacles par dimension sont inférieurs à quatre (entre 3,1 et 3,7), ce qui correspond aux obstacles interférant entre jamais et occasionnellement dans la pratique. Ces chiffres sont relativement proches de ceux de Coker et al. (2010). Il serait possible de conclure qu aucun de ces 40 obstacles n interfère dans la gestion de la douleur. Cependant, les résultats par énoncé démontrent que certains obstacles sont perçus comme interférant dans cette gestion de l ordre de 15% à 65% des cas. De plus, Oldenmenger et al. (2009) constatent que la plupart des études investiguant la perception des soignants sur ce type d obstacles sont réalisées au travers d'enquêtes par listes d'énoncés à quantifier. Cette approche représente selon eux un biais dans l objectivation des obstacles à l activité clinique réelle, laissant supposer, vu les prévalences de douleur

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