LE RENSEIGNEMENT ADMINISTRATIF EN LIGNE
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- Judith Lucile Bureau
- il y a 8 ans
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1 LE RENSEIGNEMENT ADMINISTRATIF EN LIGNE La messagerie est une fonction fondamentale de l internet, l une de celles qui sont le plus couramment utilisées par les internautes et même, selon de récentes enquêtes, l une des principales motivations des foyers pour la connexion à l internet. Tout navigateur est doté d une fonction de messagerie et il est d usage que tout site internet comporte, ne serait-ce que sous la forme d une boîte à lettres pour le webmestre, la possibilité d adresser un message à l un de ses responsables. Les administrations n échappent pas à ces pratiques courantes. En outre, aux termes du programme d action gouvernemental «Préparer l entrée de la France dans la société de l information» (PAGSI), les fonctionnaires ont été progressivement dotés d adresses personnelles sur l internet. Ces outils étant disponibles, la fonction de messagerie est devenue, par la pratique et sans que, dans un premier temps, l on ne cherche à l organiser, un nouveau mode d échange entre l usager et l administration. Les formes de cet échange et son contenu sont multiples, notamment lorsqu il est personnalisé. Cependant une demande spécifique est rapidement apparue dans les courriers adressés aux webmestres des sites publics : celle de renseignements administratifs. Il s agit de la recherche, sur une boîte à lettres impersonnelle, celle du webmestre d un site, par exemple, d une information, souvent juridique, quelquefois simplement pratique, destinée à faciliter une démarche auprès de l administration ou à connaître les règles applicables à une situation sommairement décrite. Face à la demande spontanée des usagers, l administration a dû mettre en place des procédures de traitement des messages et définir des règles de comportement qui allient le souci de répondre à la question posée à celui de préserver en toute situation la sécurité juridique et les compétences des services administratifs. Tous les sites publics n ont pas encore, à ce jour, adopté des principes explicites, pas même, parfois, celui d une réponse systématique au courrier électronique. On ne s attachera donc, ici, qu à retracer quelques expériences qui, sans prétendre à l exhaustivité, représentent l essentiel du renseignement administratif en ligne dispensé par les administrations centrales de l Etat. Il s agit de la messagerie des sites Légifrance et Service-public.fr dépendant d organismes rattachés au secrétariat général du Gouvernement, ainsi que de l activité de messagerie qui se rapporte aux domaines de la fiscalité et de l emploi, dépendant respectivement du ministère de l économie, des finances et de l industrie et de celui de l emploi et de la solidarité. I. LES PRATIQUES A. Les attentes des usagers L absence de formalisation préalable de l offre de service a eu l avantage de laisser se développer de manière spontanée la demande des usagers, de sorte que l on ne se trouve pas dans l une de ces situations où, l offre ayant précédé la demande, elle en détermine peu ou prou la nature et le volume, mais bien dans un cas où la demande s exprime en premier lieu et détermine les caractéristiques de l offre.
2 L ouverture, en 1998, du site juridique Legifrance.gouv.fr a immédiatement donné lieu à un flux régulier de messages des internautes, alors même qu aucun dispositif particulier n avait été mis en place pour les traiter. La boîte à lettres du site était seulement conçue en vue de recueillir les remarques et suggestions des usagers sur le site lui-même. C est un courrier d une nature bien différente qui est en réalité parvenu : certes, quelques messages concernaient les fonctions de webmestre, mais l essentiel du flux consistait en demandes d informations que l on peut subdiviser en deux tiers de demandes de renseignements confinant parfois à la consultation et un tiers de recherche de documents juridiques. Dans la même période, des demandes équivalentes furent observées sur le site Admifrance.gouv.fr. Lorsqu en 2000, le site Service-public.fr a remplacé Admifrance, une boîte à lettres dédiée au renseignement administratif a été ouverte. Elle a immédiatement suscité un flux de questions important. En premier lieu, il convient de souligner que la demande des usagers est volumineuse. Ainsi, Service-public.fr traite environ demandes de renseignements par mois, le centre d appel de la direction générale des impôts et Info-emploi en traitent chacun un millier et Légifrance près de 500. Cette demande est saisonnière et très liée à l actualité. Ainsi, la période de la déclaration de revenus voit le trafic multiplié par 30 sur le site de la direction générale des impôts et la réduction du temps de travail constitue près de 90 % des préoccupations de ceux qui s adressent à Infoemploi. De plus, le volume de la demande est très flexible au regard de la facilité d accès à la messagerie. Ainsi, on a pu observer sur Légifrance et sur Service-public.fr que le fait de retirer un clic entre la page d accueil et l entrée de la boîte à lettres ou de placer celle-ci dans la partie haute d un écran au lieu de la mettre en bas de page pouvait faire croître le trafic dans des proportions considérables. Sur le fond, les usagers perçoivent avec clarté la nature du service que la messagerie permet de leur apporter. En effet, la plupart des messages concernent une demande d information juridique ou administrative, ou une recherche de documents. Il arrive que la demande aille au delà, par exemple en sollicitant une véritable consultation ou une expertise, mais il n arrive jamais que l usager imagine que, par la voie d une messagerie, son dossier pourra être traité, ni qu il sollicite une intervention auprès de l administration qui en a la charge sur le fond. La question de la répartition des compétences administratives, en revanche, est moins clairement perçue. Bien entendu, le caractère généraliste de sites Légifrance et Service-public n incite pas à des distinctions selon les matières, mais il semble aussi que l usager ne perçoive pas toujours avec précision ce qui relève de l Etat et ce qui relève des collectivités locales. A ce titre, le courrier électronique manifeste, s il en est encore besoin, la nécessité d un point d accès unique -et non exclusif- aux informations administratives de toute nature. Il arrive également que l usager recherche dans la messagerie le moyen de vérifier les dires de l administration, ou qu il s adresse à plusieurs sites afin de contrôler la qualité de l information reçue. Cette démarche de «benchmarking administratif», qui manifeste une certaine défiance de l usager vis-à-vis de l administration, rend nécessaire un effort de coordination des réponses et une répartition claire des compétences. Enfin, l attente des usagers est forte en matière de délais. En effet, si par courrier classique, l administration peut répondre dans un délai voisin du mois, il n en est pas de même pour le courrier électronique. On voit des relances au bout de quelques heures, mais elles sont rares. En revanche, un courrier laissé sans réponse pendant plus de 48 heures appelle souvent une relance et un délai supérieur à une semaine laisse croire à une absence définitive de réponse qui peut donner lieu à un message de protestation parfois très critique. 2
3 B. Les réponses de l administration Quoique significatif, le flux des messages sur Légifrance et sur Admifrance restait modéré au point d être susceptible d un traitement dans la journée par un seul agent qui ne s y consacrait pas à temps complet. C est sur la base de ces deux expériences, qu il fut décidé, fin 2000, que le portail Service-public.fr devrait comporter un service de messagerie consacré au renseignement administratif et organisé de manière à répondre aux demandes des usagers selon des méthodes plus professionnelles et susceptibles d autoriser une progression en volume. Trois principes furent retenus pour le fonctionnement de ce service : le premier était celui d une réponse systématique sous 48 heures ; le second celui d un adossement de la fonction de renseignement en ligne à un service déjà expérimenté dans le renseignement administratif au téléphone ; le troisième, celui d une montée en puissance progressive adaptée à la progressivité des demandes, elle-même liée à l élargissement de la notoriété du site. C est aux CIRA (centres interministériels de renseignements administratifs) que fut confiée la charge du traitement des messages afin que, dans un premier temps, ceux-ci soient gérés par une cellule spécialisée rattachée au secrétaire général des CIRA et que, progressivement, un réseau soit constitué autour de cette cellule, d abord au sein des neuf centres répartis sur le territoire, ensuite dans les ministères. Des systèmes spécialisés de même nature ont été développés par la direction générale des impôts, qui a eu recours à son centre d appel pour traiter, en même temps que les demandes téléphoniques, les demandes de renseignements fiscaux qu elle recevait par la messagerie du site internet du ministère de l économie, des finances et de l industrie, ainsi que par le ministère des affaires sociales qui, disposant d un centre d appel téléphonique -Info-emploi- l a également utilisé pour traiter des demandes de renseignement parvenues par la messagerie. Seul Légifrance a confié au service producteur du site, et non au service de renseignement téléphonique de la direction des Journaux officiels, la mission de répondre aux messages. Dans les autres administrations, le traitement des messages envoyés sur les sites internet demeure inégal et reste parfois inexistant. Ils peuvent être traités par le webmestre qui rencontre souvent des difficultés pour identifier l information pertinente ou faire valider une réponse, ou quelquefois répartis entre les divers bureaux de l administration auquel cas ils ne font l objet d aucun suivi systématique, de sorte que la réponse n est jamais garantie. Le support original que constitue la messagerie a contraint les administrations à définir un formalisme particulier pour les réponses. La principale option est l alternative entre une réponse qui prendrait simplement la forme d une liste de liens vers des ressources pertinentes mais préexistantes et une réponse rédigée spécifiquement pour la question traitée. Dans ce dernier cas se présente en outre la question du choix entre un style impersonnel et un style personnalisé pouvant aller jusqu à l adaptation du langage administratif au langage concis et direct en usage sur internet. On voit bien quels enjeux se cachent derrière ces questions de forme. La réponse par une liste de liens ne saurait engager l administration que sur l exactitude des données transmises, ce qui est une garantie minimale et nécessaire. Dès lors que l on entre dans une forme de réponse personnalisée, se pose la question de l opposabilité de cette réponse au service chargé du traitement des dossiers. On conçoit bien que l administration se doit de garantir l exactitude du droit qu elle mentionne et de son interprétation, mais que cette garantie ne saurait s étendre au fait que ce droit est applicable à la situation de l internaute dès lors que celle-ci n a fait l objet d aucun examen contradictoire. 3
4 Une telle distinction est facile à concevoir en théorie, mais elle est moins claire au cas par cas et, en outre, il n est pas certain que l administré soit volontiers enclin à en partager la logique. Il convient donc que la réponse à l usager ne puisse en aucune manière être prise pour une réponse écrite de l administration sur une situation particulière. Dans toutes les matières, des précautions doivent être prises à cet égard, mais plus encore dans le domaine fiscal, où l administration est tenue par ses courriers alors même que ceux-ci comporteraient une erreur, dès lors que celle-ci est favorable au contribuable. Les services de messagerie ont apporté aux questions qui viennent d être évoquées des réponses diverses. L expérience primitive sur Légifrance et Admifrance donnait lieu à des réponses rédigées en mode personnel, souvent selon le style très direct en usage entre les internautes, surtout pendant la période pionnière. En 2000, pour Service-Public, un protocole de rédaction des réponses a été adopté. Il prévoit que soit privilégié un mode de réponse par envoi de liens vers des ressources pertinentes déjà existantes et un style impersonnel. Le site Info-emploi a adopté une forme de réponse fondée sur une rédaction adaptée à chaque cas, mais selon un style impersonnel. Le message adressé à l usager comporte un avertissement précisant qu il n est pas opposable à l administration faute d un examen contradictoire des faits invoqués. La direction générale des impôts va plus loin : elle adresse à l usager un message rédigé dans un style personnel plus proche de celui qui est en usage habituellement sur le web que de la formulation administrative classique. Comme Info-emploi, elle avertit l usager que la réponse qui lui est adressée n est pas opposable à l administration chargée d instruire le dossier. Enfin, la question de savoir si les messages adressés aux internautes doivent être signés a été posée. La loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations dispose que les usagers de l administration doivent connaître les nom, prénom, qualité et adresse administrative de la personne chargée de traiter leur dossier. Appliquée à la messagerie, cette exigence présente trois particularités. En premier lieu, on ne saurait assimiler le fait de donner un renseignement à celui de traiter un dossier. En second lieu, on doit tenir compte de la tradition selon laquelle le renseignement téléphonique est anonyme, et du fait que les agents, au moins dans les CIRA sont très attachés à cet anonymat. Enfin, on doit noter une singulière absence de symétrie entre la situation de l internaute qui n a pas à se présenter et peut faire usage d un pseudonyme et celle du fonctionnaire qui doit s identifier face à un interlocuteur anonyme. Pour autant, la signature des messages, sans être imposée aux agents, a été recommandée ; elle s étend progressivement sans que cela présente de difficulté particulière. II. BILAN ET PERSPECTIVES A. Le développement du renseignement administratif en ligne La messagerie de renseignement administratif apparaît désormais clairement comme l objet d une attente croissante des usagers de l administration. A ce titre, son développement et son enrichissement sont nécessaires. La simple observation de la forte augmentation du volume des questions posées, lorsque l on rend plus visible la boîte à lettres, permet de croire à une importante attente non satisfaite. L augmentation du nombre des internautes, notamment des visiteurs des sites publics, confirme la perspective d une croissance importante du nombre des demandes de renseignements administratifs dans les années à venir. 4
5 Quels que soient les moyens d automatisation que l on peut mettre en place, la gestion d une messagerie demeure fondamentalement une activité de main d œuvre qui comporte, à ce titre, une part essentielle de coûts variables. Bien entendu, la mise en place de serveurs de messagerie dont la technologie se développe, sera de nature à faciliter le traitement des messages en automatisant une part des tâches, mais l'intervention humaine, au moins pour valider une réponse proposée automatiquement, demeurera nécessaire. Cette question du volume de travail lié au développement de la messagerie milite fortement pour une organisation en réseau du traitement des messages. L expérience des CIRA peut à ce titre servir d exemple : la cellule initialement chargée de répondre aux messages fut conçue comme un organisme destiné à conserver une petite taille. Pour cette raison, elle a été progressivement conduite à déléguer une grande partie de la tâche de rédaction des réponses aux neuf CIRA et se concentre sur des fonctions de gestion et de validation. A terme, grâce à un outil logiciel adapté, le réseau interne des CIRA devrait être à même de traiter l ensemble des messages, permettant ainsi à la cellule centrale de conserver sa taille modeste. La généralisation des fonctions de messagerie sur les sites publics demeure nécessaire. En effet, en dépit des dispositions de la circulaire du 7 octobre 1999 relative aux sites internet des services et des établissements publics de l État, bien des sites n ont pas mis en œuvre les moyens nécessaires à une gestion satisfaisante de cette fonction. C est l importance des moyens à mettre en place pour un traitement systématique des messages qui présente le principal obstacle. C est pourquoi, il faut rechercher dans un fonctionnement en réseau le moyen de pallier cette difficulté. A moyen terme, il est souhaitable que le réseau des CIRA soit complété par un réseau de correspondants dans les ministères. Au delà des soucis de gestion, des impératifs de sécurité juridique rendent nécessaire la spécialisation des centres de réponse et la capitalisation des connaissances pour qu au minimum, chacun des opérateurs dispose d une base de connaissances commune afin d éviter toute contradiction. L association d une extension du réseau et d une généralisation de la fonction de messagerie devra être accompagnée d une harmonisation des méthodes de traitement des demandes et une rationalisation de l organisation. Plusieurs modes d organisation sont envisageables (reroutage, mise en commun des connaissances, adoption d un protocole commun ). De même, il sera nécessaire, en vue de la généralisation de la messagerie, que les administrations qui ne seraient pas en mesure de consentir les moyens nécessaires au traitement des messages qui leur sont adressés puissent bénéficier d une assistance. Aujourd hui, les technologies du web permettent de multiples formes de coordination de cette fonction de sorte qu il n est pas nécessaire que toutes soient uniformes. Les modalités de la coordination devront donc être conçues différemment selon les matières, les caractéristiques de la demande et la répartition des moyens publics. On ne saurait envisager les perspectives d enrichissement des messageries de renseignement administratif sans évoquer la perspective encore un peu lointaine de l alliance entre la technologie du web et celle du téléphone. Elle permettrait l enrichissement du renseignement téléphonique par l envoi de formulaires ou de documents juridiques, d une part, l orientation, l explication et l assistance à la navigation, d autre part. Ces perspectives font indubitablement partie du futur des messageries administratives, mais on ne doit pas se masquer les difficultés qu il convient de résoudre avant de les mettre en place : l une est liée à la définition de l étendue du service qui doit être rendu par l'administration, une autre se rapporte à la spécialisation des opérateurs, enfin, et peut-être surtout, une troisième difficulté porte sur le volume des moyens nécessaires, plus importants encore que pour la simple messagerie. Ces difficultés conduisent aujourd hui à penser que ce n est pas sur des services généralistes que pourra être développée l alliance du web et du téléphone, mais plutôt sur des services spécialisés ou dépendant de collectivités locales, c est-àdire visant un public moins nombreux et susceptible d une assistance plus personnalisée. 5
6 B. Les conséquences des messageries sur les relations de l administration et de ses usagers Si la messagerie est d abord conçue pour répondre aux usagers de l administration, elle est aussi, à l inverse, à l origine de deux améliorations notables de la qualité du service rendu par l administration aux usagers. Il s agit, d une part, de l harmonisation des pratiques des guichets, d autre part, de l amélioration des instruments permanents d information du public. La dispersion des services d accueil du public a engendré au fil du temps des pratiques diversifiées reposant sur des interprétations locales de la réglementation souvent formulées dans le souci d optimiser les moyens de contrôle ou d information de l administration. Ainsi, on a vu fleurir des formulaires locaux comportant des champs non prévus par le formulaire national ou des exigences de pièces justificatives non prévues par la réglementation. Il convient de ne pas sous estimer l importance de cette question puisque l exigence d une pièce supplémentaire non nécessaire peut aboutir à la suppression illégale d un droit pour celui qui serait incapable de la présenter. C est là une difficulté qui, le plus souvent, apparaît et se résoud au guichet de l administration, de sorte qu elle est peu visible. La création de fiches descriptives de démarches et la mise en ligne de formulaires administratifs sur le site Service-public.fr ont eu pour effet d unifier l information donnée au public et de répandre sur tout le territoire des formulaires identiques et validés. Le décret du 2 février 1999 relatif à la mise en ligne des formulaires administratifs fait obligation à toute administration d instruire les demandes présentées au moyen de ces formulaires. C est par la messagerie que sont apparus les freins locaux à cette harmonisation. En effet, des messages qui furent nombreux mais tendent à devenir plus rares, ont fait état du refus, au guichet, des formulaires téléchargés ou de l exigence de formalités non prévues par la réglementation. C est par ce canal qu il a été possible d identifier les difficultés et d appeler sur elles l attention des ministères concernés. La messagerie est également le canal par lequel on peut, comme on le fait depuis plus de trente ans avec le téléphone, observer les lacunes ou les imprécisions des instruments permanents d information du public. Le passage des pratiques du téléphone à celles du web fut, sur ce point encore, progressif. Le décret du 5 mai 1995 relatif à l organisation des CIRA prévoit parmi leurs missions celle de «contribuer à l amélioration des relations entre les usagers et les services publics en proposant des mesures de simplifications administratives». Jusqu à l arrivée d internet, cette fonction prenait la forme de propositions assez rares. Dès 1997, les CIRA ont été chargés de participer plus directement à l information du public par la création d une base de données de questions fréquentes aujourd hui diffusée sur Service-public.fr. Il s agissait de créer un instrument d information permanent fondé sur les attentes des usagers telles qu elles étaient perçues au téléphone. D autres pays, notamment le Danemark, ont eu des démarches identiques pour construire leur site officiel d information administrative. La messagerie qui, grâce à la forme écrite et à l archivage des questions, autorise un classement rigoureux des priorités des usagers et la capitalisation des réponses qui leur sont adressées donne un essor nouveau à l interaction entre la demande de l usager et l amélioration permanente des sites internet. En effet, les enseignements tirés de la messagerie sont aujourd hui utilisés, non seulement pour créer des «questions fréquentes», mais aussi pour amender lorsque c est nécessaire les autres outils d information administrative, notamment les sites internet. C. Les limites du renseignement administratif en ligne Pour nécessaire qu il soit, le développement de la messagerie doit être envisagé avec mesure et surtout rester cantonné dans son activité de renseignement. A cet égard, deux illusions sont possibles : celle qui consisterait à vouloir donner aux usagers un service si personnalisé qu il passerait du simple renseignement au conseil, et celle qui tendrait à imaginer une continuité entre l échange de messages et la téléprocédure. 6
7 Le passage du renseignement administratif au conseil ou à la consultation est une sollicitation fréquente. En effet, il correspond à la demande des usagers qui, parfois, souhaitent qu au travers de la messagerie soit analysée une situation de fait ou leur soit indiquée une conduite à tenir. Même s il peut-être séduisant de satisfaire ces demandes, on ne doit pas se dissimuler les dangers d une telle tentation. En premier lieu, elle tendrait à substituer un service de renseignement, éloigné de l usager par sa nature même, à une administration de proximité qui est compétente à la fois pour conseiller et pour traiter les dossiers. En second lieu, on voit bien les dangers de contradiction entre services publics que pourraient engendrer des réponses qui entreraient dans la voie d une application du droit aux situations de fait. Enfin, on doit, sur ce point encore, souligner que l importance des moyens qu il conviendrait de mettre en place serait injustifiée pour une fonction qui pourrait faire double emploi avec celle des services de proximité. Afin de prévenir la tentation d une dérive du renseignement vers le conseil, quelques principes simples paraissent devoir être retenus : le caractère impersonnel des réponses et l absence de dialogue durable entre le service de renseignement et l usager sont les principaux. La distinction du renseignement administratif en ligne et de la téléprocédure est également un principe auquel il convient de se tenir. En effet, on ne peut pas imaginer que le développement des téléprocédures résultera d un élargissement et d un enrichissement progressif de la messagerie, ni qu à l inverse, la mise en place de téléprocédures pourra un jour rendre obsolète la fonction de renseignement administratif en ligne. La distinction des deux fonctions est claire : la demande de renseignement est souvent imprécise, elle est multiforme et s adresse par nature à un service généraliste susceptible de donner une réponse sommaire et de réorienter l usager vers un autre service compétent au fond. La téléprocédure, à l inverse, est une démarche précisément encadrée, souvent liée à un abonnement ou à une identification préalable et adressée à un service précisément individualisé qui ne se dessaisira pas du dossier. Si le développement du renseignement administratif et celui des téléprocédures sont l un et l autre nécessaires, on voit bien qu ils ne peuvent être que parallèles et non associés ou interdépendants. * En conclusion, il convient de souligner que le renseignement administratif en ligne est devenu l un des accès pluriels à l administration que préconisait en 1999 le rapport Lasserre. La forte attente des usagers imposera dans les prochaines années de consentir des moyens significatifs à cette fonction. Il est probable que son organisation en réseau sera le meilleur moyen d assurer à la fois une mobilisation rapide et peu onéreuse des ressources nécessaires, et une coordination suffisante entre les réponses fournies aux usagers. Enfin, il faut insister sur le caractère modeste que doit conserver cette fonction : celui d une information précise mais sommaire, cantonnée à un renseignement de premier niveau. 7
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