Ecrit par : M. BOULERIS Relu par : A Oslo, le 16/05/2017. De l énergie dans les poubelles norvégiennes

Transcription

1 AMBASSADE DE FRANCE EN NORVÈGE SERVICE ÉCONOMIQUE D'OSLO Ecrit par : M. BOULERIS Relu par : A Oslo, le 16/05/2017 De l énergie dans les poubelles norvégiennes En 2014 (derniers chiffres disponibles), ce sont tonnes de déchets qui ont été produites en Norvège. Afin de limiter le stockage des déchets dans des sites d enfouissement et dans une optique d économie circulaire et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, la Norvège a développé une politique de revalorisation énergétique de ses ordures par la production de biocarburants de seconde génération et l incinération des résidus ménagers. Afin de rentabiliser ses centrales d incinération, elle est aujourd hui contrainte d importer les déchets de ses voisins. I. L émergence du recyclage en Norvège La Norvège a instauré en 2004 sa première réglementation nationale visant à favoriser le recyclage des déchets (Avfallsforskriften). C est en 2006 que la ville d Oslo a adopté son premier plan de gestion des déchets afin de s inscrire non plus seulement dans une optique de destruction des ordures mais plutôt de revalorisation maximale de celles-ci. En 2014, tonnes de déchets 1 ont été produites en Norvège et traitées suivant le processus de gestion instauré 10 ans plus tôt. Les ordures ménagères représentaient cette année-là 20% ( tonnes) du total des déchets produits en Norvège, soit presque autant que les déchets issus de l industrie manufacturière ou de la construction avec respectivement 22% et 21% du total. Ce chiffre est en hausse de 57% depuis le début des années II. Un système de tri efficace permettant un traitement spécifique des déchets Les ordures ménagères sont, à Oslo, séparées à la source et collectées selon leur nature afin d avoir des flux de déchets homogènes qui puissent suivre le système de valorisation des ordures. Les déchets alimentaires et les emballages plastiques sont triés par les habitants dans deux sacs de couleurs différentes (respectivement vert et bleu), le reste étant placé dans un sac en plastique aléatoire. Les déchets qui n ont pu être ni recyclés ni valorisés sous forme de matière, dits combustibles solides de récupération (CSR), sont ainsi conduits jusqu aux stations d incinération afin d y être utilisés comme source d énergie 1 Source : SSB, derniers chiffres disponibles

2 renouvelable. Les déchets alimentaires sont traités séparément pour la production de biocarburants. Par ailleurs, depuis 2009 et la transposition de la directive européenne relative à la gestion des déchets, ensevelir des déchets biodégradables est désormais interdit en Norvège. III. Le traitement des déchets alimentaires Le Plan National des Transports, qui porte sur la période place les biocarburants comme un des principaux leviers d action pour atteindre les objectifs de réduction des gaz à effet de serre du pays (-40% d ici à 2030). D ici là et conformément aux chiffres actuels, ce sera 1,7 milliards de litres par an de carburants fossiles qui devront être remplacés par des biocarburants. La quantité de déchets alimentaires produite par habitant en Norvège était de 25 kg sur l année 2015 ; dans la municipalité d Oslo, les ordures organiques sont traitées par la station de production de biogaz Romerike (construite par Cambi AS), possédant une capacité de plus de tonnes de déchets. Cette station peut produire jusqu à m 3 par jour de biométhane. Ces ordures sont transformées en biocarburants liquéfiés 2 (LBG), qui alimentent les bus (12,5% du parc de la ville d Oslo, soit 150 véhicules) et les camions poubelles (100% du parc, soit 42 véhicules au tota)l, ainsi qu en engrais liquides à destination des exploitations agricoles locales. Les émissions de CO 2 ont ainsi diminué de tonnes par an 3 depuis la mise en place du traitement. Selon SSB, ce sont tonnes de déchets 4 qui ont été transformées en biogaz en Norvège en IV. La production d énergie grâce aux centres d incinération Les combustibles solides de récupération (CSR) permettent de produire de la chaleur et/ou de l électricité, se substituant ainsi aux ressources fossiles telles que le charbon ou le gaz naturel. La valorisation énergétique des CSR permet de trouver une issue autre que le stockage aux déchets non recyclables. On compte une vingtaine de centres d incinération en Norvège, par exemple le centre d incinération situé à Borregaard, géré par Østfold Energi, et possédant une capacité annuelle de tonnes. La combustion des déchets remplaçant l utilisation de carburants fossiles pour la production d énergie des environs, ce procédé permet de réduire les rejets de CO 2 dans l air de tonnes par an. En 2015, les deux stations d incinération d Oslo, Haraldrud et Klemetsrud, ayant respectivement des capacités de tonnes/an et de tonnes/an et étant gérées par l Agence de Transformation des Déchets en Energie de la commune d Oslo (EGE 5 ), générèrent annuellement 905 GWh d énergie utilisée pour le chauffage et 140 GWh d électricité. L énergie produite par ces deux stations couvre les besoins de habitants, soit 20% de la demande totale du réseau de chauffage urbain de la ville. 2 Le biogaz issu de la fermentation organique des déchets dans les installations peut être valorisé après épuration poussée, en tant que biocarburants. 3 Source : BIOMASSMagazine 4 Source : SSB 5 Energigjeninvenningsetaten

3 Afin de limiter la production de gaz à effet de serre issu de la combustion, un projet de capture de CO 2 a été testé à Klemetsrud en 2016 en collaboration avec Aker Solutions. Les émissions de la centrale représentent en effet 10% du total des émissions de gaz à effet de serre de la municipalité d Oslo, comparable annuellement aux émissions de plus de voitures 6. Le test a été un succès, démontrant qu une capture à plus de 90% du CO 2 est possible. Des accords avec le gouvernement sont attendus afin de mettre en place ce dispositif de façon permanente. Ce projet permettrait à la municipalité d Oslo d atteindre ses objectifs ambitieux en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre. En outre, cela fera de Klemetsrud un des premiers centres d incinération à bilan carbone négatif. Ce sont en 2014 au total tonnes de déchets qui ont été incinérées et transformées en source d énergie en Norvège. V. Vers un business des déchets? Lors de la «crise des ordures» ayant touché la ville de Naples en 2010, la Norvège avait proposé à la municipalité napolitaine de racheter une partie de ses déchets (environ tonnes par jour). La transaction ne s était pas finalisée et la Norvège s était alors tournée vers le Royaume-Uni pour importer ses déchets. Un accord avec la ville de Leeds concernant les ordures ménagères a été signé en octobre Des accords avec les villes de Bristol et de Manchester ont ensuite vu le jour tonnes 8 de déchets ont été importées en 2014 de Grande-Bretagne par la ville d Oslo pour alimenter ses centrales d incinération. La surtaxation des décharges au Royaume-Uni explique cette orientation, les villes mentionnées cidessus préférant payer la Norvège afin d éliminer leurs déchets. *** COMMENTAIRES La Norvège, à l instar de ses voisins Scandinaves et plus particulièrement de la Suède, représente à l échelle internationale un exemple à suivre en termes de gestion des déchets. La région d Oslo a cependant encore un faible taux de recyclage (environ 30%) par rapport à d autres parties du pays (environ 53% au Hedmark et Oppland) ce qui peut justement s expliquer par la présence de centrales d incinération. Dans une optique de développement durable, l accent devrait sans aucun doute davantage porter sur le recyclage et la limitation du gaspillage alimentaire et de la consommation, tel que le prévoit la directive-cadre européenne de 2008, plutôt que sur une incitation à l incinération des déchets parfois excessive et qui émet, malgré tout, des gaz à effet de serre. 6 Source : Zero.no 7 Source : SSB 8 Source : Economie circulaire: Système économique et finitude des ressources, Vincent Aurez,Laurent Georgeault

4 Rédactrice : Margaux BOULERIS

5 Annexe 1 : Traitement des déchets

6 Annexe 2 : Déchet par nature et mode de gestion en 2014