Grand débat. Atelier 1. Rapport final 20 juillet

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1 Le Grand débat Atelier 1 Rapport final 20 juillet

2 Un Grand Débat, pour quoi faire? Parce que le poste «carburant» tient une place importante dans le budget des ménages réunionnais ; parce qu il apparaît également que le mécanisme de fixation des prix est complexe et soumis à des déterminants mondiaux ; parce qu enfin, la relation que les consommateurs entretiennent avec les matières premières, et notamment les hydrocarbures, doit évoluer dans une économie mondiale ou les énergies fossiles se raréfient, Monsieur le Préfet a décidé d organiser avec la société civile réunionnaise, le monde économique et les collectivités locales un Grand Débat sur les prix des carburants à La Réunion. Il est extrêmement complexe de relier des contingences mondiales ou réglementaires à des gestes quotidiens. Comment en effet croire qu au moindre incident, qu à la moindre crise, les marchés pétroliers de Londres, de New-York ou de Singapour puissent s emballer à la hausse ou à la baisse et que cela impacte le montant de son plein de carburant? Cette difficulté peut créer, et de manière légitime, le sentiment que le consommateur n est pas suffisamment protégé. La mise en œuvre de ce Grand Débat nourrit l ambition de s assurer en toute transparence, que la régulation locale du marché permette un prix juste du carburant à La Réunion. Ces moments d échanges sont également l occasion d explorer des pistes permettant d envisager la transition énergétique du territoire pour pouvoir demain l accompagner vers une utilisation rationnelle et contrôlée des énergies fossiles. Aussi, ce Grand Débat s appuie sur 3 ateliers traitant de thématiques complémentaires : La formation des prix des carburants à La Réunion La fiscalité des carburants à La Réunion et son impact sur le développement économique La politique de déplacement et la relation de la société aux carburants Rapport final 20 juillet

3 Sommaire du document Le PRÉSENTATION DE L ATELIER N 1 ET ORGANISATION DES DÉBATS LES POINTS CLÉS DU DÉBAT LES FAITS SAILLANTS LES PRÉCONISATIONS LE CONTEXTE GÉNÉRAL LE CONTEXTE INTERNATIONAL LE CONTEXTE LOCAL LE COÛT ASSURANCE FRET COMMENT FONCTIONNENT LES CONTRATS DE NÉGOCE : DU MARCHÉ AU PRIX F.O.B.? COMMENT EST CONSTRUIT LE POSTE FRET? DU PRIX F.O.B. AU PRIX C.A.F EXEMPLE DE CALCUL DU PRIX C.A.F LES QUESTIONS EN SUSPENS ACHETER LE PÉTROLE DIFFÉREMMENT LA QUALITÉ DES CARBURANTS ET LES NORMES EUROPÉENNES QUELLES SONT LES ZONES D APPROVISIONNEMENT POSSIBLES? LA POSSIBILITÉ DES ACHATS GROUPÉS DE CARBURANTS LES COÛTS DE DISTRIBUTION DES CARBURANTS À LA RÉUNION COMPRENDRE LA FONCTION DE STOCKISTE COMPRENDRE LA FONCTION DE GROSSISTE DISTRIBUTEUR LE MODÈLE PARTICULIER DE LA STATION SERVICE RÉUNIONNAISE LE DÉBAT SUR LA LIBERTÉ DES PRIX : VERS UNE REMISE EN CAUSE DU DÉCRET DE 2010? Rapport final 20 juillet

4 1. PRÉSENTATION DE L ATELIER N 1 ET ORGANISATION DES DÉBATS L Atelier n 1, orienté sur la formation des prix des carburants à La Réunion, tente d apporter au plus grand nombre des éléments de compréhension sur des thématiques aussi essentielles que la méthode de construction du prix CAF (Coût-Assurance-Fret), que les mécanismes d achat des carburants et les alternatives possibles, que l organisation de la distribution et ses coûts et sur le débat fondamental de l organisation du marché des carburants à La Réunion et du régime de prix (liberté ou réglementation). Placées sous la présidence de Madame Marie Christine TIZON, présidente de l Observatoire des Prix et des Revenus de La Réunion, 8 réunions ont été organisées, auxquelles ont été invités: les membres de l OPR (parlementaires, collectivités, chambres consulaires, syndicats, associations de consommateurs, personnalités ) ; les représentants des organisations de transporteurs ; les responsables des compagnies pétrolières ; les représentants du syndicat des exploitants de stations services ; les services de l Etat concernés. Ces réunions se sont tenues aux dates suivantes : Jeudi 8 mars : définition de la méthode de travail du groupe et d un programme de rencontres. Mardi 27 mars : Exposé sur le tanker Le Tamarin. Vendredi 6 avril : Commentaires et discussions sur le décret du 8 novembre 2010 et les modalités d achat des carburants, ainsi que l acheminement des carburants vers La Réunion. Mardi 17 avril : «Acheter le carburant différemment», avec la participation par visioconférence de M. Yves LEMAIRE (raffinage et biocarburant) et de Madame Nadine DELMESTRE (marché des produits pétroliers) tous deux de la Direction Générale Energie et Climat (DGEC) du MEDETEL. Jeudi 26 avril : Rencontre et discussion avec Madame Anne BOLLIET, inspectrice générale des finances, auteur du rapport sur la fixation des prix des carburants dans les départements d outre mer (mars 2009). Vendredi 4 mai et mercredi 9 mai : visite des installations de la Société Réunionnaise des Produits Pétroliers. Mardi 15 mai : «Quels coûts de distribution?». Mardi 26 juin : Réunion de conclusions, synthèse. Le rapporteur de cet atelier est Gérard CHERRIER, responsable du pôle C de la DIECCTE. Ce rapport est un résumé complet des thèmes abordés lors de ces différentes rencontres ainsi que les synthèses et propositions qui ont émergé des interventions de l ensemble des participants. Rapport final 20 juillet

5 Les principales contributions des différents participants, communiquées pendant ce débat, sont jointes en annexe. Ce rapport est une synthèse des débats. Il ne peut représenter ni la position officielle de l Observatoire des prix et des revenus ni celle de l Etat. Rapport final 20 juillet

6 2. LES POINTS CLÉS DU DÉBAT 2.1. Les faits saillants Sur le marché des carburants Le marché des carburants est un marché mondial côté en dollars, ses contingences sont fortes et ses déterminants tiennent compte, outre des ressorts classiques des marchés de commodités, aussi bien de phénomènes climatiques (vague de froid, canicule ) que d évènements géopolitiques avérés ou supposés. Par ailleurs ce marché est un marché de majors, son accessibilité est donc réservée à des entreprises ou groupements d entreprises crédibles du point de vue de leur surface financière. Bien qu il soit très difficile de prédire les évolutions des cours des matières premières, rien ne semble plaider pour une baisse durable des prix des ressources hydrocarbures. Sur la décomposition du coût L analyse de la formation des prix démontre que la somme totale payée par le consommateur pour l achat d un litre de carburant résulte de l addition d un certain nombre de coûts individualisés et transparents. Ces coûts regroupés en grands agrégats sont les suivants : Prix CAF : prix d importation à l arrivée au Port de La Réunion Frais de port : redevances perçues par la CCI pour financer le débarquement du carburant Impôts et taxes : perçues essentiellement par la Région (pour son propre compte ou pour celui des communes OM-) et minoritairement par l Etat Frais de stockage : somme perçue par la SRPP pour financer l activité de stockage de carburant dans ses installations du port Marge de gros : marge perçue par les importateurs-grossistes Marge de détail : marge perçue par les détaillants, exploitants des stationsservice Le bloc regroupant les impôts et taxes sera détaillé lors de l atelier 2 présidé par la Région Réunion. Rapport final 20 juillet

7 A titre d exemple, le tableau ci-dessous retrace dans le détail l ensemble des coûts, des prix, des taxes et redevances qui composent les prix des carburants au 1 juin 2012 en euro par hectolitre de carburant. Sans-plomb Gazole Prix CAF Moyenne des cotations ($/Bbl) 126,98 127,94 Moyenne des cotations ($/HL) 79,868 80,4719 Supplément qualité et commission d achat ($/HL) 2,2671 0,2943 Prix FOB ($/HL) 82, ,7662 Fret ($/HL) 2,0857 2,3343 Assurances ($/HL) 0,2106 0,2078 Coulage ($/HL) 0,0653 0,1182 Prix CAF ($/HL) 84, ,4265 Cours moyen du $ en 1,2911 1,2911 Prix CAF ( /HL) 65, ,6166 Frais de port (CCI) Prestation déchargement 0,097 0,1115 Prestation d entretien des ouvrages 0,0755 0,0820 Taxe sur les marchandises débarquées 1,8383 0,8791 Total frais de port 2,0135 1,0726 Impôts et taxes Octroi de mer 14,7252 3,2308 FIRT 58,24 36,13 Tarif Extérieur Commun 3, Certificats d Economie d Energie (CEE) 0,2602 0,2602 Total fiscalité 76, ,6210 Passage en dépôt Prix du passage en dépôt 1,9949 1,9949 Marge Gros Marge brute importateur 8,8501 8,8501 Marge Détail Marge brute de détail 10, ,8109 Prix Total Hors arrondi 165,4162 /hl 127,4365 /hl Le graphe ci-dessous illustre la décomposition des prix du super sans-plomb et du gazole et le poids des différentes composantes du prix dans le prix payé par le consommateur Rapport final 20 juillet

8 Constitution du prix des carburants (pour un hectolitre) , , , , Pric CAF 2,01351,0726 Redevance CCIR Fiscalité 1,9949 1,9949 Frais de pass age 8,8501 8,8501 Marge gross is te 10, ,8109 Marge détaillant Super s ans plom b Gazole Sur le fret Le poste fret impacte assez peu le prix des carburants, il est donc peu probable que ce dernier puisse, dans le cas ou il serait modifié générer une baisse des prix à la pompe visible. Cependant, une vigilance particulière devra être apportée lors de la conclusion du prochain contrat d affrètement. Il s agira alors de s assurer que les aides nationales ou locales soient impactées en totalité sur les coûts d amortissement, en minorant le cas échéant, d autant ces dernières. Par ailleurs, il est important de s assurer que la question du fret ne sera pas traitée indépendamment de celle du stockage, ou de la gestion des infrastructures portuaires. Sur la qualité des carburants L appartenance de notre territoire à l espace intégré de l Union Européenne impose le respect des normes communes à tous. La qualité des carburants en fait parti et il semble peu envisageable, tant du point de vue technique (du fait des spécificités des moteurs et échappements dédiés à cette qualité de carburant) que politique (La Réunion est un territoire français de l Union Européenne) qu une décision puisse être prise en ce sens. Sur le monopole du stockage La fonction de stockiste des carburants à La Réunion est assurée par la SRPP, qui dispose d un monopole de fait, celui-ci conférant à ces installations la caractéristique d une «facilité essentielle», au regard du droit de la concurrence. La rémunération de cette fonction s appuie sur 2 coûts, les coûts d amortissement des matériels et les coûts de fonctionnement. Rapport final 20 juillet

9 Comme pour le fret, ce poste impacte peu la formation des prix des carburants, cependant, la position monopolistique d une société de droit privé sur une «fonction essentielle» participe à nourrir des doutes liés à la transparence des prix au sein de l opinion. Sur la liberté des prix La formation des prix des carburants à La Réunion et dans les autres DOM est encadrée par un décret qui détermine les modalités de fixation d un prix plafond mensuel par arrêté préfectoral. Les prix sont donc réglementés jusqu'à l étape de la distribution aux automobilistes. Ce modèle, ainsi que celui de la station service réunionnaise, n a pas été remis en cause par les participants à l atelier Les préconisations Conserver les modalités de cotation La méthode d achat est efficace et garantit un approvisionnement régulier aux meilleures conditions d achat pour la Réunion, compte-tenu de la modicité des quantités achetées Sécuriser le fret en optimisant son coût Le maintien d un contrat de fret à moyen terme (5ans) permet la sécurisation de l approvisionnement de La Réunion en carburants. Il semble nécessaire de maintenir ce dispositif. En revanche, la fin du contrat d affrètement du navire «Tamarin» en 2013 doit être l occasion de s assurer que le contrat sera négocié aux conditions du marché. Revoir les cotations prises en compte Il a été évoqué contre les préconisations des différents rapports existants sur les sujets des carburants à La Réunion, que les cotations permettant la fixation des prix maximums des carburants puissent correspondre exactement avec la réalité des achats à Singapour. Outre que cela nécessiterait de modifier le décret, il n est pas certain que cette option soit toujours favorable aux consommateurs. Réviser la gouvernance de la fonction de stockiste Un grand nombre de participants à l atelier souhaite que la gouvernance de la fonction de stockiste soit révisée en permettant à la puissance publique d intervenir, soit par le biais de Délégation de Service Public, soit par une entrée au capital de la structure de stockage. Dans tous les cas un dénouement des activités d importation, de stockage, et de distribution est attendu à court terme. Rapport final 20 juillet

10 Supprimer la gestion de l arrondi Chaque mois le calcul des prix réalisés en hl fait ressortir un arrondi positif ou négatif qui est incorporé ou déduit pour aboutir à un chiffre rond avec une deuxième décimale au litre. L arrondi est compensé d un mois sur l autre et est totalement neutre pour le consommateur. Cependant, on observe qu en Métropole, les prix sont affichés à la 3 décimale après la virgule, par exemple 1,299 /l. Il est proposé que ce même système de prix à la 3 décimale soit mis en œuvre à La Réunion. Cette solution ne pose pas de problèmes techniques a priori pour les pétroliers et les stations-service et permettra de gommer l effet arrondi chaque mois tout en améliorant la transparence des prix. Défendre le modèle de distribution réunionnais Le modèle de distribution local, basé sur un réseau dense de stations services et laissant perdurer la fonction de pompiste notamment, qui représente près de 1500 postes à l échelle du territoire, semble devoir être défendu. Outre ce point non négligeable, le modèle actuel permet de disposer d une grande quantité de stations services (148 sans les projets en cours) ce qui autorise une "irrigation" bénéfique de toutes les zones y compris les Hauts et les écarts. Ce maillage territorial est un atout non négligeable en période de gestion de crise tant pour les populations que pour l approvisionnement des services publics notamment de secours. Rapport final 20 juillet

11 3. LE CONTEXTE GÉNÉRAL 3.1. Le contexte international Le marché des carburants à La Réunion s insère dans le contexte du marché mondial des hydrocarbures et ne peut s étudier sans référence aux caractéristiques et aux contraintes du marché international. Avant d analyser en profondeur la formation des prix des carburants à La Réunion, il est nécessaire de rappeler le contexte international et ses récentes évolutions qui ont affecté les cours mondiaux du pétrole et par voie de conséquence le prix du carburant à La Réunion. Il apparaît que l évolution récente et conséquente des prix du pétrole puisse être considérée comme un véritable troisième choc pétrolier affectant l économie mondiale. Moins brutal que les précédents, mais tout aussi inéluctable, ce dernier est qualifié de «rampant» par les spécialistes. Dans ce contexte, la facture énergétique de la France a doublé en moins de 10 ans. Celle-ci est passée de 30 à 63 milliards d Euro. L impact en termes de déficit de la balance commerciale, de croissance et de répartition de la valeur est immense. A La Réunion, cette augmentation des prix à la production s est traduite par un doublement des prix CAF en 3 ans comme le montre le graphique suivant. Evolution des Prix CAF ( /hl) mai-09 nov-09 mai-10 nov-10 mai-11 nov-11 Gazole Super sans Plomb Rapport final 20 juillet

12 Cette tendance semble durable sur le long terme. En effet, elle est la résultante d une offre qui s appuie sur des ressources qui se raréfient et de fait deviennent de plus en plus coûteuses et sur une demande en progression constante portée notamment par le dynamisme des pays émergents. S ajoutent des phénomènes conjoncturels (tension avec l Iran) ou plus structurels (évolution défavorable de l Euro par rapport au dollar) qui peuvent amplifier le phénomène. Le rapport que notre société entretient avec les ressources énergétiques fossiles semble donc devoir se modifier en profondeur (nouvelles technologies, nouveaux usages, nouveau mode de vie ) Le contexte local Après une année d augmentation continue, les prix des carburants ont connu une nouvelle hausse significative au premier février 2012 (+ 9 centimes par litre pour le super sans plomb et + 4 centimes par litre pour le gazole). Cette hausse est une des causes de la crise sociale qu a connu le territoire au début de l année. Cet épisode est récurrent et le coût des carburants représente une source majeure de conflits sociaux potentiels. Ainsi, La Réunion et les autres DOM ont connu une crise majeure en 2009 dont l origine était également l augmentation des prix du carburant. Cette crise avait conduit le gouvernement de l époque à commander plusieurs rapports (IGF, Autorité de la Concurrence, Parlementaires) qui ont permis de faire une analyse en profondeur des mécanismes de formation de prix des carburants dans les DOM. Il ressort de ces rapports une donnée qui semble cardinale : tout doit être mise en œuvre par la puissance publique pour améliorer la transparence de la formation des prix afin de définir un prix qui soit «juste» pour l ensemble des parties. Ces propositions ont été concrétisées par deux décrets dont un spécifique à La Réunion, le décret n du 8 novembre Depuis cette date, les prix maximum des hydrocarbures sont fixés chaque premier jour du mois par arrêté préfectoral en s appuyant sur une méthodologie de calcul incluant entre autres les cotations internationales des matières premières, les coûts de stockage et de distribution dûment constatés par l autorité administrative et les rapports de parité euro/dollar. Afin d aller dans le sens d une plus grande transparence, chaque modification mensuelle de prix est soumise pour information à l Observatoire des Prix et des Revenus et fait l objet d un communiqué détaillé expliquant les causes des modifications de ces prix en détaillant les cotations, les postes de coûts et les formules de calcul. (mis en ligne régulièrement sur le site Internet de la préfecture) Cependant, si ces modifications réglementaires semblent avoir amélioré la transparence en garantissant la détermination d un prix «juste», elles n avaient cependant pas pour objectif de bloquer les prix ou d empêcher la répercussion des évolutions des cours à la production. Rapport final 20 juillet

13 Suivant donc la tendance mondiale, les prix des hydrocarbures ont de fait évolué à la hausse depuis la mise en œuvre du décret en décembre Evolution des prix de vente des carburants 1,8 1,7 1,6 1,5 1,4 1,3 1,2 1,1 1 avr-11 juin-11 oct % +18% Super SP Gazole Rapport final 20 juillet

14 4. LE COÛT ASSURANCE FRET Dans cette partie, les participants à l atelier ont tenté de répondre aux questions posées sur les relations et contingences qui permettent l élaboration d un prix C.A.F. (Coût Assurance Fret). Les interrogations se portaient sur l accès aux hydrocarbures, sur le rôle des intermédiaires, leur rémunération, etc Comment fonctionnent les contrats de négoce : du marché au prix F.O.B.? Afin que la demande atteigne une taille critique suffisante qui permette d en optimiser l achat, les 4 importateurs pétroliers de La Réunion (SRPP, TOTAL Réunion, OIL LIBYA Réunion et ENGEN) regroupent leurs besoins annuels et lancent une consultation commune auprès des offreurs potentiels, c est à dire capables de fournir en quantité suffisante et avec la régularité nécessaire, les produits demandés au niveau de qualité voulu. Depuis de nombreuses années, du fait des spécificités techniques des produits imposées par la norme européenne Euro 5 notamment, la seule ressource disponible se trouve à Singapour où 3 raffineries et plusieurs sociétés de stockage sont capables de répondre à la demande exprimée. Les contrats d approvisionnement ont été conclus avec les raffineries suivantes au cours des cinq dernières années : 2008 : CHEVRON 2009 : SHELL 2010 : TOTAL 2011 : SHELL 2012: SHELL Les besoins annuels exprimés par La Réunion sont à l échelle du monde assez modestes, ils ne représentent que quelques jours production de l une des raffineries de Singapour. Aussi, afin de crédibiliser la demande, de garantir l achat auprès du vendeur et d optimiser la fourniture des produits, les compagnies pétrolières passent par l intermédiaire d un «trader» (coordinateur d achat) qui met en concurrence les différentes raffineries ou compagnies pétrolières à même de fournir qualité et quantité de produit. Chaque année, à tour de rôle, c est un coordinateur d achat issu d une des quatre compagnies, qui prend en charge l achat de matière et lance l appel à la concurrence. Le coordinateur d achat régule également les approvisionnements, en maintenant des niveaux de stocks locaux pour chacun des produits qui soient conformes aux exigences réglementaires et aux contraintes liées au mode d approvisionnement par bateau. Rapport final 20 juillet

15 Cette pratique est réputée vertueuse au regard du droit de la concurrence. De plus, la présence de «majors» mondiaux dans le groupe d acheteurs (TOTAL, SHELL, ENGEN, OILIBYA) semble être de nature à rassurer les vendeurs et à faciliter la signature de contrats satisfaisants, notamment en terme de conditions de paiement. Les plis contenant les réponses à cet appel à concurrence sont ouverts en présence d un huissier et le choix s effectue en fonction de plusieurs critères dont le prix est prédominant, mais également en fonction du respect de l ensemble des préconisations imposées (quantités, régularité, spécificités qualitatives ). Sauf en période de crise ou d incertitude, le marché est en principe conclu pour 12 mois. Il constitue un achat à terme susceptible de couvrir l ensemble des besoins de La Réunion en carburant et exclut de ce fait tout achat «spot». Ce choix a été fait pour assurer et garantir la sécurité de l approvisionnement à La Réunion et respecter les obligations en matière de stocks stratégiques. (voir présentation sur ce thème en annexe) Les offres sont basées sur les cotations en vigueur à Singapour pour les produits et les qualités concernées. Ces cotations ont été précisées dans les arrêtés préfectoraux dits méthodologiques qui définissent de manière précise certains paramètres de fixation des prix, en application du décret du 8 novembre 2010 (arrêté n 2859 du 02/12/2010 abrogé et arrêté n 463 du 29/03/2011 en vigueur). Il s agit des cotations PLATTS Asia-Pacific : MOPS Singapour 10 ppm pour les gazoles MOPS Singapour 97 UNLD pour les supercarburants sans plomb La réponse des offreurs s exprime par une remise ou une prime (surcoût) par rapport à ces cotations. Ces propositions, prime positive ou remise, sont fonctions du marché c est-à-dire de la confrontation de l offre et de la demande. Classiquement, si l offre est supérieure à la demande, on aura une remise (minium), inversement, si la demande est supérieure à l offre, on aura une prime (premium). Ainsi depuis 2008, et compte tenu de la demande mondiale, le supercarburant sans plomb est affecté systématiquement d une prime positive (surcoût allant de 2,55$/baril à 5,89$/baril selon les contrats) alors que le gazole a toujours bénéficié d une remise (allant de 0,09$/baril à 0, 29$/baril selon les contrats). A ce prix, est ajoutée une commission de service de 5$/Tm, qui rémunère la prestation de l acheteur. Cette commission a fait l objet de questions lors des débats de l atelier, mais il semble difficile de la remettre en cause, compte-tenu des quantités considérées et en l absence d éléments précis sur le niveau de ces commissions sur ces marchés. Ces différents éléments liés à la détermination du prix d achat, prix résultant de l appel d offres auquel est ajoutée la prestation de trading, constituent le prix F.O.B. (Free On Board). Les compagnies pétrolières sont facturées, conformément aux pratiques internationales régissant le marché des hydrocarbures raffinés, par les fournisseurs sur la base de la moyenne de la cotation du jour du chargement des produits et des 2 jours précédant et suivant ce chargement. La matière est donc payée par les importateurs réunionnais au prix moyen sur ces 5 jours. Rapport final 20 juillet

16 Le décret n du 8 novembre 2010 impose une autre méthodologie, basée sur une moyenne calculée sur les 15 premiers jours ouvrés du mois précédant le mois de fixation du prix. Ainsi pour exemple, les prix du mois de juin 2012 seront calculés sur la base de la moyenne des 15 premiers jours ouvrés à Singapour (jours où il existe une cotation) du mois de mai Ce mode de calcul, s appuyant sur une moyenne large et plus étendue que celle retenue pour la facturation a été choisi pour lisser les effets éventuels de fluctuations importantes des cours et déconnecter le calcul du coût par l Administration du prix réellement payé par les opérateurs pétroliers. Il résulte de cette différence de mode de calcul une différence sur les prix CAF entre les prix réellement facturés et soumis aux services des douanes et les prix théoriques pris en compte, sur la base du décret, pour calculer le prix CAF. En 2011, en période de hausse régulière et continue des cours, cette différence a surtout bénéficié aux importateurs Comment est construit le poste fret? Le transport des carburants, de Singapour à La Réunion, est assuré principalement par un bateau dédié. Jusqu en 2008 il s agissait du navire «Cilaos» qui, à cette date, a été remplacé par le navire «Tamarin». D une capacité de Tm (50 000m3), supérieure de Tm, à celle du Cilaos et plus rapide que ce dernier, ce bateau mis en service en 2008 devait répondre aux besoins croissants de La Réunion en carburant et permettre une baisse du nombre de navires «spot». On constate cependant un maintien des bateaux «spot» (4 à 5 par an) en raison de l accroissement permanent des besoins en carburant à La Réunion. La taille du bateau était limitée par les capacités de réception du port pétrolier de La Réunion qui ne permettaient pas de recevoir des navires d un tonnage beaucoup plus important. Aujourd hui, des solutions existent pour une utilisation de bateaux d un plus fort tonnage. Ce point devra être examiné dans le cadre des perspectives à moyen terme. Le navire «Tamarin», d une valeur de 61 M$ soit environ 45 M, a été acheté en 2008 par un groupe d investisseurs, composé essentiellement de caisses régionales du GROUPE BANQUE POPULAIRE, réuni au sein d un GIE, dénommé GIE TAMARIN. Il a été financé par un apport en fonds propre de 40% et par des emprunts à hauteur de 60%. Le navire a été mis à disposition de la SAS SOCATRA Réunion, filiale de la société SOCATRA (société spécialisée dans l affrètement de navire et le transport maritime ou fluvial de personnes ou de marchandises dont le siège se trouve à Bordeaux), pour une période de 5 ans dans le cadre d un contrat d affrètement coque nue conclu avec le GIE. Rapport final 20 juillet

17 La SOCATRA Réunion exploite ce navire et le met à disposition des compagnies pétrolières implantées à La Réunion dans le cadre d un contrat d affrètement pour une durée de 5 ans, renouvelable ensuite année après année sur option des affréteurs pétroliers. Le GIE a consenti à la société SOCATRA une promesse unilatérale de vente du navire à l issue de la période de 5 ans de location à un prix basé sur l encours des prêts bancaires majoré du capital du prêt subordonné. L investissement concernant le «Tamarin» a bénéficié des dispositions relatives à la défiscalisation (prévu au 1 du III de l article 217 undecies du code général des impôts) et, à ce titre, est soumis à certaines conditions d exploitation : Immatriculation sous pavillon français au registre de Wallis et Futuna ; Aucune escale entre Singapour et La Réunion (navire intégralement dédié au transport de carburant pour La Réunion) ; Engagement de la SOCATRA à conserver et exploiter le navire pendant 2 ans au terme des 5 premières années dans l hypothèse où les compagnies pétrolières ne prorogeraient pas le contrat ; Création par la SOCATRA Réunion d un emploi direct net à temps plein pendant la durée de l exploitation ; Création par la SOCATRA de 31 emplois directs nets à temps plein, dont 5 navigants français, pendant la durée de l exploitation. Le coût du transport par le «Tamarin» a été fixé dans le contrat initial conclu en mars L agrément fiscal délivré par la Direction Générale des Impôts prévoyait que le GIE pouvait percevoir des loyers permettant de couvrir exactement, en principal et en intérêts, le montant de la dette souscrite. La constitution du prix facturé du «Tamarin» repose quatre éléments distincts : Des frais de port tant à La Réunion qu à Singapour, évalués autour de $ ; Un loyer établi à $/jour correspondant au financement de l investissement auquel s ajoute des frais de /jour correspondant au fonctionnement du bateau (salaires, fournitures et autres), soit environ $/ jour ou /jour. La durée moyenne d un voyage étant de 30 jours, le coût de ce poste peut être évalué à $ ; Des frais de soutes correspondant au carburant utilisé pour la marche du bateau, estimé à $ par voyage ; De frais de coordination répartis entre la société coordinatrice (Head Charterer) pour 0,62 /TM et la SRPP, société réceptionnaire à hauteur de 0,23 /TM, soit un total d environ $/voyage ou cargaison. Rapport final 20 juillet

18 La somme globale facturée pour un voyage aller-retour Singapour/La Réunion s élève donc environ à $ soit environ (pour une parité euro/dollar à 1,32). En 2008, et dans un contexte ou les cours mondiaux du fret étaient élevés, le rapport de l IGF avait constaté que le recours à un bateau dédié, affecté exclusivement et à l année au transport de carburant vers La Réunion, était pertinent et efficace dans la mesure où les recours aux bateaux «spot» s effectuaient, à cette époque, à un prix supérieur. Depuis 2009, la situation du fret mondial a changé, les prix des bateaux «spot» sont alors systématiquement moins élevés que les prix facturés pour le Tamarin dont le contrat de 5 ans ne prévoit pas de révision des prix. L analyse des écarts réalisée sur 2010 et 2011 fait ressortir une différence moyenne évaluée à 0.28 /hl pour le supercarburant et 0.43 /hl pour le gazole, soit une différence moyenne de 26%. Si cette différence, certes sensible, mais dont la répercussion est quasiment invisible dans le prix à la pompe, devait remettre en cause une solution telle que celle existant avec le «Tamarin», il serait alors permis de s interroger sur le risque qu induirait un recours systématique et unique à des bateaux «spot» au regard de la sécurité des approvisionnements. Il semble plus judicieux dans ce contexte de revoir les conditions financières de l exploitation du Tamarin plutôt que de recourir à des transports occasionnels dont ni le coût, ni la régularité ne peut être maîtrisé Du prix F.O.B. au prix C.A.F. Le prix C.A.F. est la somme du prix F.O.B., du prix des assurances, du prix du fret et des frais de coulage. Concernant la détermination du prix de l assurance, la valeur retenue, non contestée a priori, est de 0,25% sur le prix FOB + Fret. Les frais de coulage, évalués avant le rapport de l IGF à 1% de la valeur CAF, sont désormais pris en compte en fonction de la perte réellement constatée au cours de l année précédente. Cette disposition a été inscrite dans l arrêté préfectoral n 463 du 29/03/2011 précité Exemple de calcul du prix C.A.F. Les modalités de fixation du prix CAF sont strictement définies par le décret n du 8 novembre 2010 et l arrêté préfectoral d application n 463 du 29/03/2011. La valeur des cotations Plats prises en compte sont la moyenne des valeurs des 15 premiers jours ouvrés à Singapour. Il en est de même pour les valeurs de la parité Rapport final 20 juillet

19 euro/dollar. Le cours du dollar retenu est celui publié au JORF (article 3 de l arrêté n 463 du 29/03/2011). A cette moyenne, il est rajouté la prime (surcoût) ou la remise issue du contrat résultant de l appel d offres et la rémunération du trader. A ce prix FOB est rajouté le fret, puis sur ce prix FOB+fret est imputé l assurance (0,25% du prix FOB+fret) et le coulage (aujourd hui 0,0774% pour le super carburant et 0,1419% pour le gazole du prix FOB + fret). Le tableau ci-dessous montre un exemple réel de prix CAF : Super carburant en avril 2012 Cours moyen de l'us $ en (15 j ouvrés) 1,3165 pour 1$ MOPS Moyenne 1 à 15 ($/Baril 1 ) Moyenne cotation + premium (3,00 USD/Baril) Moyenne cotation + premium ($/hl) Supplément qualité premium ($/Tm) Supplément qualité Premium ($/hl 2 ) Prix FOB cargaison ($/hl) FRET cargaison ($/hl) Prix FOB + FRET ($/hl) Assurances (sur coût et fret) cargaison ($/hl) Coulage Océan (sur CAF) cargaison (0,0774 %) CAF cargaison ($/hl) CAF plus coulage ( /hl) 139,06 $/Bbl 142,06 $/Bbl 89,3524 $/hl 5,0000 $/Tm 0,3775 $/hl 89,7299 $/hl 2,3045 $/ hl 92,0344 $/hl 0,2301 $/hl 0,0714 $/hl 92,3359 $/hl 70,1374 /hl 4.5. Les questions en suspens Le rapport de l Inspection Général des Finances, de même que ceux de l Autorité de la Concurrence et de l Assemblée Nationale, avaient fait l objet d un certain nombre de préconisations qui ont pour certaines été prises en compte dans l élaboration du décret en vigueur actuellement, et donc traduites dans l arrêté préfectoral d application du décret. Prix de référence : les missions ont toutes recommandé le recours à des cotations indépendantes reflétant la réalité du marché. Elément pris en compte dans le décret et l arrêté ; Mutualisation des achats et recours à l appel à la concurrence : ce système est le seul capable de garantir un prix compétitif et conforme à la réalité du marché ; Coulage : prise en compte du coût réel de l année n-1 au lieu d un forfait élevé ; Fret : le recours à un transport mutualisé commun à l ensemble des pétroliers est le seul système garantissant à la fois la sécurisation des approvisionnements et des coûts de transport maîtrisés. 1 1 baril : 1,58987 HL 2 Densité super carburant= 0,755 Rapport final 20 juillet

20 Rémunération des importateurs concernant le fret : cette commission de 2$/Tm a été supprimée suite aux préconisations des différents rapports. Pour autant, dans le cadre du débat sur les prix CAF, deux questions ont été soulevées auxquelles il conviendra de répondre : Commission de négoce : A hauteur de 5$/TM, cette commission de trading génère un CA et un coût de 1,8 M. Un syndicat pose la question de sa suppression, l autre s interroge sur son montant. Rappelons que la mission de l IGF avait validé le montant de cette commission qui rémunère un service indispensable. Le coût du fret : Le contrat d approvisionnement du «Tamarin» sécurise l acheminement du carburant vers La Réunion mais se révèle légèrement plus coûteux que le recours à des bateaux «spot». La différence entre les deux prix se situe autour d un tiers de centimes d euro par litre. L échéance du contrat avec le Tamarin en 2013 permet d envisager sereinement le débat, qui peut être posé en ces termes : soit rompre le contrat et tenter de bénéficier de prix compétitifs au risque de rupture d approvisionnement, soit renégocier le contrat en s approchant au plus près des cours mondiaux en vigueur, avec éventuellement des clauses de révision ou d indexation des prix. Rapport final 20 juillet

21 5. ACHETER LE PÉTROLE DIFFÉREMMENT 5.1. La qualité des carburants et les normes européennes L importation et la vente de produits hydrocarbures en France sont soumises à des normes strictes, issues principalement de la réglementation européenne. L Union Européenne (UE) a introduit des spécifications environnementales applicables aux carburants pour réduire les émissions polluantes des voitures: interdiction de la commercialisation de l essence plombée et obligation de disponibilité de carburants sans soufre dans le territoire de l UE. Ainsi la directive 98/70/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 1998, concernant la qualité de l essence et des carburants diesel et modifiant la directive 93/12/CEE du Conseil vise à répondre à l engagement de la directive 94/12/CE, qui a prévu l adoption ultérieure de valeurs cibles comportant une réduction substantielle des émissions polluantes des véhicules à moteur. Cette directive a été transposée en droit français par des arrêtés du modifiés en permanence pour adapter les textes aux évolutions de normes décidées au niveau européen. Les teneurs en soufre sont ainsi passées de 350mg/kg avant le , à 150mg/kg au , à 50mg/kg au et enfin à 10mg/kg au La principale des caractéristiques est donc aujourd hui l obligation de ne pas dépasser une teneur en soufre supérieure à 10ppm. Parallèlement, la législation européenne est de plus en plus sévère en ce qui concerne les rejets des moteurs à explosion. Les normes d émissions «Euro N» se succèdent et sont de plus en plus contraignantes. Depuis le 1 janvier 2011, la norme en vigueur est la norme «Euro 5» qui prévoit les limites suivantes (mg/km): Norme Euro 5 Véhicules à moteur diesel Oxydes d azote (Nox) Monoxyde de carbone (CO) Hydrocarbures (HC)+ NOx Particules (PM) 5 5 Véhicules à moteur essence A l'heure actuelle, les véhicules livrés neufs disposent des dernières technologies disponibles pour respecter le cahier des charges de la norme EURO 5 en particulier avec les pots catalytiques, les filtres à particules et les absorbeurs d'azote. Une qualité des carburants revue à la baisse pourrait avoir des conséquences dommageables sur la durée de vie de ces dispositifs qui seraient alors sollicités plus durement, favorisant de fait leur usure. Rapport final 20 juillet

22 Par ailleurs, les garanties proposées par les constructeurs sur leurs modèles dépendent des carburants utilisés. Une dégradation de la qualité des carburants entraînerait de fait la caducité de ces garanties. Enfin, le carburant normalisé à 10 ppm est celui qui a été utilisé pour justifier la conformité des émissions polluantes des véhicules; si ce taux est augmenté alors les taux admissibles d'émissions de polluants des véhicules ne seront plus garantis. Il semble donc délicat d envisager des importations de carburants à des normes dégradées par rapport à la norme européenne. Cette norme est la plus contraignante au monde et quasiment aucun pays hors de l UE ne l utilise. Cela obère les opportunités d économie d échelle qui auraient pu être envisagées dans le cas d achats regroupés dans la zone (Maurice, Madagascar...) Quelles sont les zones d approvisionnement possibles? L obligation d importer du carburant conforme aux normes européennes limite fortement les zones d approvisionnement possibles. Pour ce qui concerne La Réunion, le seul territoire en mesure de garantir un approvisionnement régulier, constant et conforme aux spécifications européennes pour tous les produits demandés est Singapour. Des possibilités d approvisionnements partiels semblent exister en Inde, mais sans que soit garantit la fourniture de la totalité des produits demandés ni la régularité et la sécurité des approvisionnements. Les évènements récents qu a connu l île Maurice (rupture d approvisionnement de la raffinerie indienne de Mangalore qui a failli provoquer une pénurie de carburants) doit inciter à la prudence en ce domaine. A moyen terme, il est possible que d autres pays tels que l Afrique du Sud ou certains Emirats arabes soient en mesure de répondre à la demande de La Réunion. Mais ces choix industriels représentent des investissements colossaux et les débouchés de ces productions spécifiques ne sont pas évidents dans la zone, ce qui réduit d autant la probabilité de cette perspective à court terme La possibilité des achats groupés de carburants En 2011, quelques professionnels de la route notamment ont créé la Coopérative des Carburants d Intérêt Régional et des Produits Pétroliers (CCIRPP). Cette initiative visait à démontrer qu il n existait pas de barrière réglementaire à l importation de carburants par des voies tierces. Sur ce point l opération fut concluante. En revanche, l accessibilité au marché mondial du pétrole impose de disposer d une surface financière conséquente et d apporter toutes les garanties permettant d effectuer des achats dans des contrats à terme. C est là une des barrières les plus importantes à la mise en œuvre de ce type de projet. Rapport final 20 juillet

23 6. LES COÛTS DE DISTRIBUTION DES CARBURANTS À LA RÉUNION 6.1. Comprendre la fonction de stockiste La fonction de stockiste des carburants à La Réunion est assurée par la SRPP, qui dispose d un monopole de fait, celui-ci conférant à ces installations la caractéristique d une «facilité essentielle», au regard du droit de la concurrence. 1) Eléments concernant la SRPP La SRPP est une société de droit privé, détenue à 50% par TOTAL et à 50% par SHELL. Son activité est double, celle de stockiste des carburants et celle d importateurgrossiste. Elle emploie plus de 100 personnes. La SRPP exerce son activité de stockage dans la zone d activité portuaire de la ville du Port sur un terrain de 17ha, appartenant au domaine public maritime. Pour lui permettre de financer ses investissements et de leur garantir leur amortissement, l Etat a conclu avec la SRPP une convention d occupation temporaire du domaine public portuaire concédé à la CCIR de longue durée, qui arrive à échéance au 31 décembre Ses capacités de stockage sont de m3 pour le carburant et m3 pour le gaz (GPL). La répartition des carburants stockés dans les réservoirs de la SRPP est la suivante : Gazole : 42% Kérosène : 28% Sans-Plomb : 15% FOD/GNR : 11% Autres produits: 4% Les plus vieux réservoirs datent de 1956, mais plus de la moitié des capacités de stockage a moins de 15 ans. Le parc de stockage est performant, bien entretenu et semble conforme à toutes les exigences environnementales ou de sécurité. 2) La prestation de stockage ou prestation de passage La Convention d Occupation Temporaire prévoit que les investissements réalisés et services associés fassent l objet d une prestation de passage qui consiste principalement à : Recevoir les produits : Il s agit ici de reconnaître et transférer les produits par pipeline du bord du bateau au dépôt. Les carburants sont débarqués au port Est puis acheminés à la SRPP par un pipe-line de 4,5 km. Le gaz est débarqué du navire gazier «le Maido» au port ouest et acheminé à la SRPP par un pipe-line de 800 m de long. Rapport final 20 juillet

24 Entreposer les produits : Les produits reçus sont ensuite recensés (déterminés les quantités reçues) et répartis dans les différents réservoirs, en fonction de leur catégorie ou de leur qualité. Les produits ne sont pas différenciés en fonction de leur propriétaire. Remettre les produits à disposition : Les carburants sont ensuite mis à disposition des propriétaires et livrés au poste de chargement des camions-citernes. Rendre compte des opérations : La SRPP doit ensuite produire tous les états statistiques et comptables relatifs aux stocks et aux mouvements de produits. La SRPP exerce par ailleurs l activité d embouteillage pour le gaz. 3) Les frais de stockage ou frais de passage Les frais de stockage sont constitués de deux termes (l immobilisation et l exploitation) comprenant l ensemble des éléments concourants directement ou indirectement aux prestations de passage. Ils constituent la rémunération de l opérateur. Ils sont calculés chaque année sur la base de paramètres liés aux immobilisations et aux investissements réalisés et du coût d exploitation constaté l année n-1 valorisé par l indice INSEE du coût des services à La Réunion. Le tableau ci-dessous reprend les taux pratiqués depuis 2000 (prix en /hl pour le carburant et en /bouteille pour le gaz). ESSENCE PB SUPER SPB GAZOLE GAZ JET 01/02/2000 1,6693 1,6693 1,6693 3, /02/2001 1,7257 1,7257 1,7257 3, /02/2002 1,7330 1,7330 1,7330 3,7625 0, /02/2003 1,7800 1,7800 3,6969 0, /02/2004 1,7800 1,7800 3,5606 0, /05/2004 1,8150 1,8150 3,5606 0, /02/2005 1,8150 1,8150 3,5425 0, /02/2006 1,8150 1,8150 3,6150 1, /02/2007 1,8500 1,8500 3,9225 1, /02/2008 1,8250 1,8250 3,8000 1, /02/2009 2,0950 2,0950 3,5375 1, /02/2010 2,0407 2,0407 3,5000 2, /04/2011 1,9949 1,9949 3,4933 1,9949 Le tableau ci-dessus fait apparaître une évolution des coûts pour le carburant de 19,5% de 2000 à 2011 soit une moyenne annuelle de hausse de 1,8% et une évolution pour le jet de 167% de 2002 à 2009 soit une moyenne annuelle de hausse de 18%. Jusqu en 2005, le coût de passage du jet était largement sous-évalué et était de fait financé par le coût du stockage des carburants automobiles. A partir de 2006, la Rapport final 20 juillet

25 décision a été prise de parvenir en 5 ans à la parité des tarifs, ce qui a occasionné une forte augmentation pour le jet et une augmentation moindre pour le carburant. Le coût de passage a baissé en 2010, cette baisse étant la résultante de l application des recommandations du rapport de l IGF qui préconisait une baisse de la rémunération de l opérateur. Les frais de stockage pour les carburants se partagent presque à égalité entre la rémunération des immobilisations (51 %) et celle de l exploitation (49 %), le partage étant de 1/3 et 2/3 pour le gaz (immobilisations : 32 % et exploitation : 68 %). Le calcul des frais relatifs aux immobilisations se fait par l application d un taux différencié sur une durée de 15 ans qui couvre les amortissements et un taux fixe net de 7 % qui assure la rémunération des capitaux investis sur une durée de 18 ans en 2011, ramenée à 17 ans en Le coût d exploitation est calculé sur la base des charges constatées l année n-1 sur lesquelles on applique l indice INSEE des prestations de service à La Réunion. A ce chiffre est appliqué un taux de 9 % assurant la rémunération nette de la société. Il est à remarquer que toute modification des règles de calcul des frais de passage, par exemple par une diminution de la rémunération de l opérateur, n aurait aucun effet sur le consommateur, la modification se situant au centième de centimes. La rémunération de la prestation de stockage semble donc établie en fonction de critères objectifs, fondés sur des éléments justifiés qui permettent la rémunération du capital investi et le financement des coûts d exploitation à un niveau qui peut-être discuté, mais qui parait ne pas s éloigner de ce qui peut être observé dans des cas similaires. Rappelons que ce coût est environ de 2 centimes par litre soit environ 1,26 % en valeur pour un litre de super sans plomb à 1,58 et 1,65 % en valeur pour un litre de gazole à 1,21. Ce facteur d échelle laisse penser que toute modification du coût de stockage serait neutre pour l usager. 4) La gouvernance de la SRPP L activité de stockage des carburants, exercée sur un seul site à La Réunion, dans le cadre d une Convention d Occupation Temporaire délivrée par l Etat, constitue, au sens du droit de la concurrence, une «facilité essentielle» qui doit être régulée. C est le sens de la réglementation du coût du stockage qui permet à l Etat de s assurer que le prix fixé est adapté, c est-à-dire est fixé selon des critères parfaitement définis et connus permettant d assurer une juste rémunération à l exploitant et n est pas appliqué de manière discriminatoire à l égard de certains opérateurs. La SRPP qui gère cette activité de stockage exerce également la fonction d importateurgrossiste. Cette situation particulière a attiré l attention de l Autorité de la Concurrence et de l IGF qui ont tous deux recommandé une séparation de ces deux activités ou tout au moins une filialisation de l activité de stockage. Ces modifications n ont à ce jour pas encore été mises en œuvre. Rapport final 20 juillet

26 Pour autant, la question de la gouvernance de la société qui gère cette activité «essentielle» a été posée. Plusieurs solutions ont été évoquées qui vont de la prise en charge pure et simple de cette activité par les Pouvoirs Publics à l entrée de capitaux publics (nationaux ou locaux) minoritaires dans le capital de la société privée afin de peser sur les décisions stratégiques et la politique de prix. La gestion de cette fonction par le biais d une Délégation de Service Public a également été évoquée. Lors des débats, les dirigeants de la SRPP ont rappelé que seuls les actionnaires de cette entreprise privée peuvent décider d une modification de ses statuts. 5) Le deuxième terminal pétrolier Lors des débats, des voix ont exprimé le souhait de la construction d une deuxième zone de stockage pétrolier. Cette nouvelle installation aurait l avantage de permettre de casser le monopole de la SRPP et sécuriserait davantage l approvisionnement de La Réunion en carburant. La mise en œuvre de cette proposition, qui nécessiterait une importante mobilisation de capitaux, impose la conduite d études préalables approfondies sur les champs économiques et environnementaux afin d en évaluer l impact éventuel. Rapport final 20 juillet

27 6.2. Comprendre la fonction de grossiste distributeur Le rôle des importateurs-grossistes dans leur fonction de grossiste consiste à approvisionner et à maintenir aux normes leur réseau. A La Réunion, 4 entreprises assument cette fonction et disposent d un réseau de 148 stations. La SRPP : société dont le capital est détenu à 50% par SHELL et 50% par TOTAL. Cette société dispose d un seul réseau de distribution mais sous deux enseignes différentes, SHELL et ELF. Elle gère 28 stations-service sous la marque SHELL et 25 sous la marque ELF, soit 53 stations au total. TOTAL : TOTAL REUNION est une filiale du groupe français TOTAL. Elle gère 34 stations-service sous la marque TOTAL. ENGEN : Cette société, à capitaux sud-africains, a repris en 2010 le réseau CALTEX. Elle gère 33 stations-service à l enseigne ENGEN. LIBYA OIL REUNION : Cette société est une filiale de la société libyenne pétrolière d Etat OILIBYA CORPORATION et gère 28 stations-service à enseigne TAMOIL. Les importateurs revendent le carburant par l intermédiaire de leur propre réseau dans le cadre de deux formes de gestion, la location-gérance et les revendeurs de marque. 1) Les locataires-gérants Ils sont les plus nombreux, 109 sur 148 soit près des trois-quarts du parc. Dans ce cas de figure, les pétroliers sont propriétaires ou locataires du terrain et des murs et propriétaires du fonds de commerce. La gestion de la station-service est confiée à un locataire-gérant qui en exerce l exploitation sous sa propre responsabilité. Le locatairegérant est soumis à une redevance contractuelle portant sur la location des moyens d exploitations mis à sa disposition par le pétrolier mais est un commerçant totalement indépendant. 2) Les revendeurs de marque Au contraire des locataire-gérants, les revendeurs de marque sont propriétaires du terrain, des murs et des moyens d exploitations. Ils concluent avec le pétrolier un contrat d achat de fourniture exclusif pour une durée déterminée, le plus souvent 5 ans. Dans cette situation, c est le pétrolier qui rétribue par une remise l exploitant de la station-service. Rapport final 20 juillet

28 3) La rémunération de la fonction de distribution La rémunération accordée aux importateurs-grossistes, aujourd hui de 8,85 /hl, permet de financer les investissements réalisés (en partie car une partie peut être payée par les locataires-gérants), les coûts de transport du carburant (soit réalisé en direct par la propre flotte du grossiste soit sous-traité), les coûts de maintenance du réseau (qui sont par ailleurs supportés en partie par les locataires-gérants) et les coûts généraux de gestion de l entreprise (frais de siège, administratifs, financiers ). Cette rémunération a été baissée en 2010 suite au rapport de l IGF pour atteindre une valeur de rémunération du capital investi ne dépassant pas les 15%. Cette baisse de près de 15% a été réalisée à l occasion de la mise en œuvre du décret du 8 novembre Une analyse financière des comptes des entreprises concernées sur les trois dernières années doit permettre de valider la justesse de cette rémunération. 4) L analyse des contrats Les termes des contrats définissent la réalité du rapport de force existant dans la relation entre les grossistes et leurs clients, les stations-service. Ces rapports dépendent bien évidemment de la nature de la relation contractuelle et du statut du revendeur, soit locataire-gérant en position de faiblesse et de forte dépendance vis-à-vis du pétrolier, soit revendeur de marque en position de force ou de relative indépendance vis à vis du pétrolier. Les redevances perçues par les pétroliers sont de 3 ordres : Droit d utilisation de la marque: 2 opérateurs facturent un tel droit, l un aux locataires-gérants, l autre aux revendeurs indépendants pour un montant symbolique. Redevances liées aux volumes : celles-ci ne sont acquittées que par les locataires-gérants ; elles peuvent être fixées en pourcentage du volume vendu ou par forfait jusqu à un certain seuil et en pourcentage au-delà. Un opérateur fixe des forfaits en fonction de la taille de la station. Redevances liées à la boutique ou aux autres prestations (lavage) : Ces redevances ne concernent là encore que les locataires-gérants : elles sont fixées soit en pourcentage de chiffre d affaires, soit par un forfait jusqu à un certain seuil et en pourcentage au-delà. Un seul opérateur fixe une redevance mensuelle forfaitaire. En toute hypothèse, les locataires-gérants voient leurs marges de détail amputées d une part significative au titre de l utilisation des installations techniques ou commerciales appartenant au pétrolier et mises à leur disposition. Certains opérateurs accordent une remise aux revendeurs-indépendants en cas de dépassement d un objectif chiffré de vente. La durée des contrats est variable et s étale de 3 ans à 10 ans en fonction de l ancienneté et de l enseigne. Seuls deux opérateurs mentionnent les conditions de renouvellement. Rapport final 20 juillet

29 Celles ci sont tacites pour les revendeurs indépendants et explicites pour les locatairesgérants. Les conditions de paiement sont assez uniformes quel que soit le statut des stationsservice, la pratique couramment observée est en effet le paiement à la livraison des carburants par le chauffeur. Le paiement du gaz se fait par décade et celui des lubrifiants à 30 jours. Le paiement s effectue au prix fixé réglementairement diminué de la marge détaillant fixée également réglementairement. Tous les contrats de locataires ou de revendeurs font mention explicite de l exclusivité d approvisionnement et d une obligation de tenue des stocks. L analyse des contrats d exclusivité entre les pétroliers et les gérants de stations-service, qu ils soient revendeurs indépendants ou locataires-gérants montre que la ventilation des marges n est pas aussi claire que ce qui est prévu dans le décret de 2008, tout en restant dans le cadre régulier des relations commerciales contractuelles. En effet, l Etat définit deux marges distinctes, l une pour les pétroliers, l autre pour les détaillants. Mais l application des contrats d exclusivité et le jeu des rapports de forces, rendent ces marges fongibles au profit de l un ou de l autre des opérateurs. La distinction entre ces deux marges devient donc relativement théorique dans la mesure où les pétroliers, notamment dans leur rapport avec les locataires-gérants en prélèvent une part qui peut être importante. Ce transfert de marge peut être justifié par la nécessaire rémunération des investissements réalisés ou par la location ou la mise à disposition de locaux ou de matériels. Mais il ne doit pas être excessif car les gérants peuvent supporter une part non négligeable des frais d entretien des matériels mis à leur disposition. Par ailleurs, il faut pouvoir éviter que les gérants n aient à se retourner vers l Etat pour exiger des augmentations de marge afin de pouvoir répondre à la sollicitation financière des pétroliers. En droit de la concurrence, il peut être considéré, au vu de l exclusivité des contrats et la nature des relations entre les pétroliers et les locataires-gérants que ces derniers sont dans une position de dépendance économique vis-à-vis des premiers dans la mesure où ils n ont aucune solution alternative en cas de conflit avec le fournisseur. Les dispositions de l article L alinéa qui stipule : «Est en outre prohibée, dès lors qu'elle est susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises de l'état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur». De même, l article L I du code de commerce stipule : «Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : 2 De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties». Rapport final 20 juillet

30 Dans ce contexte, l équilibre des contrats et des rémunérations qui y sont liées doit donc faire l objet d une attention particulière de la part des autorités compétentes même si les opérateurs concernés peuvent agir directement dans le cadre des textes ci-dessus Le modèle particulier de la station service réunionnaise Il existe 148 stations-service de distribution de carburant sur le territoire de La Réunion. Ce nombre est relativement stable depuis quelques années, les fermetures étant compensées par l ouverture de stations sur de nouveaux axes (Route des Tamarins). Le document joint en annexe au présent rapport rédigé par le Syndicat Réunionnais des Exploitants de Stations-Service (SRESS) et présenté lors d une réunion le 15 mai 2012 fait état de la situation de ce secteur d activité et de la problématique qui y est liée. Les stations sont nombreuses, réparties sur l ensemble du territoire et assurent un service de proximité qui va bien au-delà de la simple fourniture de carburant. Elles emploient surtout un personnel nombreux (estimé à 1500 postes) qui assure un véritable service pour l usager. Un peu partout, les stations-service sont devenues des lieux de proximité et de convivialité qui allient un service de qualité (amplitude de l ouverture, diversité des fournitures ) à une dimension sociale de rencontres et d échanges. A chaque station-service est associée une boutique de taille variable selon la station mais dont la présence apparaît nécessaire à la rentabilité de l activité globale de la station. Le SRESS a ainsi évalué, sans que cela ait été vérifié et attesté par un organisme indépendant, que les charges liées à la seule activité de la vente de carburant étaient supérieures à la rémunération accordée. Dans ce calcul, il apparaît que l activité «boutique» permettrait de financer l activité «carburant». La marge des détaillants est de 10,81 /hl et n a pas évolué depuis Le débat sur la liberté des prix : vers une remise en cause du décret de 2010? Les enjeux du débat sur la liberté des prix, déjà posés en 2009 lors de la production des rapports de l IGF et de l Autorité de la Concurrence, ont été exposés par Mme Bolliet, Inspectrice Générale des Finances, lors de sa venue à La Réunion le 26 avril Il apparaît que la question de la régulation des prix ne se pose pas au stade de l amont, c est-à-dire de l importation et du stockage. A ces stades opèrent soit un seul (stockage), soit un nombre très limité (importation) d intervenants. Rapport final 20 juillet

31 Dans ces conditions, la régulation exercée par l Etat est impérative et permet de contrôler que les carburants sont importés et mis à disposition des consommateurs à un coût qui soit juste. Au stade de la distribution et de la mise à disposition aux consommateurs, la situation est différente. D une part, les quatre importateurs se trouvent en concurrence sur le marché du détail, chacun pouvant souhaiter, selon sa stratégie, maintenir ou augmenter ses parts de marché. D autre part, leurs clients sont des petites et moyennes entreprises nombreuses qui sont elles aussi potentiellement en situation de concurrence. Les relations contractuelles entre fournisseurs et acheteurs sont dépendantes directement de la modalité de gestion et de la structure capitalistique de la station (revendeur indépendant ou location-gérance) et conséquemment des rapports de force entre les uns et les autres. Le versement de redevances ou l attribution de remises qui concrétise ces rapports de force démontre l absence d étanchéité entre les marges de gros et les marges de détail, voire leur fongibilité. Cela fragilise l effet de la réglementation des marges à ce stade. Plusieurs questions posées dès 2009 semblent alors toujours d actualité. La suppression de la réglementation des marges de distribution serait-elle envisageable? Si oui, serait-elle de nature à dynamiser le marché en permettant une baisse sensible des prix, évaluée par certains entre 4 et 5 centimes d euro par litre? La distinction des marges de gros et de détail n est-elle pas factice proposant de fait un rapport de force? Ne vaudrait-il pas mieux, dans l hypothèse d un maintien de la réglementation, n encadrer qu une seule marge, laissant ainsi les opérateurs économiques décider de la répartition à leur niveau? De telles hypothèses ont manifestement rencontré peu d enthousiasme parmi les débatteurs. L encadrement d une seule marge est rejeté par les exploitants de stations-service euxmêmes qui considèrent que le déséquilibre du rapport de force entre eux-mêmes et les grossistes jouerait en leur défaveur et pourrait être de nature à perturber le fonctionnement du marché. Il est clair qu au vu de la structure du marché et du nombre important de locataires-gérants, le rapport de force apparaît déséquilibré et totalement en faveur des pétroliers. Tous les intervenants au débat ont souhaité le maintien de ce qui est nommé «le modèle réunionnais» à savoir le maintien d une réglementation des prix et des marges qui assure une égalité de prix entre toutes les stations et permet le maintien de petites stations dans des endroits isolés, en garantissant l emploi, l équilibre des territoires et les impératifs de sécurité des approvisionnements. Il est possible d envisager en effet que la liberté des prix au stade de la vente au détail puisse avoir comme conséquence une guerre des prix entre les réseaux et les stations, au détriment de celles qui réalisent les plus faibles volumes. Cette situation pourrait avoir pour conséquences la mise en œuvre de mesures de rationalisation ou de modernisation, à savoir l automatisation des stations et la fermeture des stations les moins rentables, Rapport final 20 juillet

32 avec la baisse de l emploi et des possibles phénomènes de concentration qui en résulteront. Cette évolution a par ailleurs été observée en métropole depuis la libération des prix au début des années 1980 et pourrait se reproduire à La Réunion. Elle ne serait pas par ailleurs sans poser la question de la sécurisation des approvisionnements en cas de crise, comme cela a été exposé lors du débat. Les grossistes indiquent qu ils ont la capacité à s adapter à tout nouveau système de fixation des prix des carburants y compris à la libéralisation, mais précisent que, par expérience, cela ne pourra pas se faire sans conséquences sur le mode de gestion des stations et donc sur l emploi. Au vu du contexte de l emploi à La Réunion et du coût élevé pour la collectivité que représenterait la libération des prix des carburants, tous les participants au débat (associations de consommateurs, responsables syndicalistes, acteurs du transport, responsables politiques ) s opposent tous à la modification du système en place et préconisent donc le maintien de la réglementation des prix.. Certains animateurs au débat proposent cependant des pistes pour tenter de rééquilibrer les relations grossistes-détaillants et pour limiter les effets d aubaine liés à la réglementation des prix. La première piste consisterait à séparer réellement l activité de gros de l activité de détail, en transférant notamment aux exploitants de stations-service la propriété pleine et entière des installations. Au-delà des nécessités juridiques qu une telle décision imposerait, il n est pas certain que tous les exploitants aient les capacités financières de devenir propriétaires de leurs installations. Cette suggestion parait donc peu réaliste pour des raisons juridiques et financières. La seconde piste consisterait, sachant que les marges sont calculées de façon à permettre le maintien sur le marché de stations peu rentables et donc pour limiter l effet d aubaine pour les grandes stations, à différencier le niveau de marges en fonction du volume vendu tout en maintenant un prix à la pompe identique. Tout en s interrogeant sur le devenir ou la destination de la réduction de marges, cette solution serait de nature à créer des effets de seuil difficilement gérables et compréhensibles, la rendant difficile à mettre en oeuvre. Rapport final 20 juillet

33 Listes des annexes au rapport 1. Documents de base a. Rapport IGF/IGA sur la fixation des prix des carburants dans les départements d outre-mer (mars 2009) b. Rapport de l Autorité de la concurrence (Avis n 09-A-21 du 24 juin 2009 relatif à la situation de la concurrence sur les marchés des carburants dans les départements d'outre-mer) c. Rapport parlementaire sur les prix des carburants dans les DOM (juillet 2009) d. Décret n du 8 novembre 2010 réglementant les prix des produits pétroliers et du gaz de pétrole liquéfié dans le département de La Réunion e. Arrêté 463 du 29 mars Powerpoint de présentation générale 3. Compte rendu de la réunion du 8 mars Powerpoint : «Le Coût Assurance Fret» 5. Relevé de conclusions de la réunion du 27 mars 2012 (Visite du Tamarin) 6. Visite du Tamarin : Questions complémentaires 7. Powerpoint : «Acheter le pétrole différemment» 8. Compatibilité carburants et émissions des polluants de véhicules 9. Powerpoint : «Les frais de passage» 10. Les stocks stratégiques 11. La distribution au détail (SRESS - Syndicat réunionnais des exploitants de station-service) 12. Mémoire de la FNTR 13. Contribution du syndicat Solidaires (1) 14. Contribution du syndicat Solidaires (2) 15. Contribution du syndicat Solidaires (3) 16. Contribution de M. Hugues ATCHY 17. Contribution de la SRPP Rapport final 20 juillet

34 Annexe 1 a Rapport IGF /IGA sur la fixation des prix des carburants dans les départements d outre-mer (mars 2009)

35 Inspection générale des Finances Conseil Général de l Industrie, de l Énergie et des Technologies Inspection générale de l Administration N 2008-M N 23/2008 N RAPPORT sur la fixation des prix des carburants dans les départements d outre-mer Établi par Anne BOLLIET Gilles BELLEC Jean-Guy de CHALVRON Inspectrice générale Ingénieur général Inspecteur général de des Finances des Mines l Administration Thomas CAZENAVE Thibaut SARTRE Inspecteurs des Finances Nicolas CLOUET Inspecteur de l administration - MARS

36 SOMMAIRE INTRODUCTION... 1 I. LE FONCTIONNEMENT DU MARCHE DES CARBURANTS DANS LES QUATRE DOM EST PERTURBE DEPUIS L ETE A. LE MARCHE DES CARBURANTS DANS LES QUATRE DOM EST SOUS CONTRAINTES...3 B. LES BESOINS DES DOM EN CARBURANTS ROUTIERS SONT SATISFAITS PAR QUELQUES COMPAGNIES PETROLIERES QUI INSCRIVENT LEUR ACTIVITE DANS UN CONTEXTE MONDIALISE Aux Antilles et en Guyane A la Réunion Dans les quatre DOM...6 C. LE PRIX DES CARBURANTS DANS LES DOM DEROGE AU PRINCIPE DE LA LIBERTE DES PRIX...8 D. AVANT L ETE 2008, LE PRIX DES CARBURANTS ETAIT, DANS LES DOM A L EXCEPTION DE LA GUYANE, ASSEZ PROCHE DE CELUI EN VIGUEUR EN METROPOLE...9 E. A PARTIR DE L ETE 2008, DES CRITIQUES CROISSANTES SUR LE PRIX DES CARBURANTS METTENT EN EVIDENCE LA COMPLEXITE ET L OPACITE DU SYSTEME D ADMINISTRATION DES PRIX...10 II. L ANALYSE DE LA STRUCTURE DE PRIX FAIT APPARAITRE DES LIGNES DE PRIX SUREVALUEES AINSI QUE DES SURCOUTS...12 A. CONCERNANT L APPROVISIONNEMENT EN PETROLE BRUT OU EN PRODUITS RAFFINES, CERTAINS FRAIS ACCESSOIRES SEMBLENT SUREVALUES Les approvisionnements en pétrole brut et en produits raffinés Certains coûts de transport pourraient être réduits La mutualisation des coûts de transport qui existe entre la Guadeloupe et la Martinique pourrait être étendue à la Guyane Aux Antilles, une question est en voie de règlement, celle de la récupération et du traitement des huiles usagées...14 B. DANS LES DEPARTEMENTS FRANÇAIS D AMERIQUE (DFA), LE COUT DU RAFFINAGE PAR LA SARA EST PLUS ELEVE QUE CELUI D UNE RAFFINERIE STANDARD EUROPEENNE ET EST REPARTI DE MANIERE DESEQUILIBREE ENTRE LES PRODUITS Le prix de sortie SARA est difficile à piloter et ne donne pas satisfaction Ce «prix de sortie SARA» est plus élevé, en moyenne sur la période de 19 centimes (supercarburant) et 11 centimes (gazole) par rapport à une raffinerie standard européenne Le surcoût de la SARA qui n est actuellement supporté que par les carburants routiers pourrait être mieux réparti...17 C. LE COUT DE PASSAGE DANS LES DEPOTS EST FIXE A UN NIVEAU TROP ELEVE PAR RAPPORT AUX COUTS REELLEMENT SUPPORTES Le coût de passage en dépôt pourrait être revu à la baisse dans les quatre départements La mutualisation des coûts de transport entre les Antilles et la Guyane pourrait être étendue au coût de passage dans les dépôts SARA...19 D. LA MARGE DE DISTRIBUTION EST SURESTIMEE PAR RAPPORT AUX COUTS ET POURRAIT ETRE REVUE A LA BAISSE La marge de gros est surévaluée Le niveau de la marge de détail s explique principalement par le niveau des charges salariales...22 E. A L AVENIR, CERTAINS FACTEURS POURRAIENT CONTRIBUER A LA HAUSSE DU PRIX DES CARBURANTS La taxation générale sur les activités polluantes (TGAP) Les modalités de calcul de l octroi de mer aux Antilles La taxe additionnelle à la taxe spéciale de consommation...24

37 III. DES EVOLUTIONS SONT ENVISAGEABLES DANS LE CADRE D UN SYSTEME DE PRIX ADMINISTRES...25 A. IL EST INDISPENSABLE D AMELIORER LA TRANSPARENCE DU SYSTEME ET DE CLARIFIER LES REGLES D ADMINISTRATION DES PRIX...26 B. POUR LES DFA, LA MISSION PROPOSE UNE NOUVELLE FORMULE DE CALCUL DU «PRIX DE SORTIE SARA» C. IL EST POSSIBLE DE RENDRE LE SYSTEME DE PRIX PLUS REACTIF EN REDUISANT LE DECALAGE TEMPOREL ENTRE LE PRIX DU CARBURANT OUTRE-MER ET LES COURS MONDIAUX...28 D. LA MISSION A ETUDIE LA POSSIBILITE DE TRANSFERER LA COMPETENCE DE FIXATION DES PRIX DES CARBURANTS Aux collectivités territoriales A une autorité indépendante...29 IV. AU-DELA DES AJUSTEMENTS PROPOSES SUR LA STRUCTURE DE PRIX, LA MISSION A EXAMINE DES PISTES D EVOLUTION PLUS STRUCTURELLES...30 A. LA LIBERALISATION DES PRIX DES CARBURANTS OUTRE-MER NE SEMBLE ENVISAGEABLE QU AU STADE DE LA DISTRIBUTION La libéralisation de l approvisionnement et du stockage n est pas possible en raison de leur caractère monopolistique La libéralisation de la distribution peut être envisagée mais il ne faut pas sous-estimer les conséquences sociales...31 B. LE STOCKAGE CONSTITUE UNE FACILITE ESSENTIELLE, DONT IL FAUT TIRER TOUTES LES CONSEQUENCES...32 C. LE SCENARIO D UN APPROVISIONNEMENT EN PRODUITS RAFFINES DEPUIS L EUROPE DU NORD ALTERNATIF A L ACTIVITE DE RAFFINAGE DE LA SARA...33 D. LA VOIE D UN APPROVISIONNEMENT EN CARBURANTS ISSUS DE ZONES GEOGRAPHIQUES PLUS PROCHES DES DOM N EST PAS ENVISAGEABLE A COURT/MOYEN TERME ET UNE DEROGATION AUX NORMES EUROPEENNES EST INCERTAINE Les possibilités d approvisionnement en carburants aux normes européennes depuis des Etats proches des DOM sont inexistantes actuellement La mission a examiné la possibilité d une dérogation aux normes européennes...34 E. UNE PEREQUATION DES PRIX DES CARBURANTS ENTRE LA METROPOLE ET LES DOM COMPORTERAIT BEAUCOUP DE DIFFICULTES...34 V. SYNTHESE DES ECONOMIES POTENTIELLES SUR LE PRIX DES CARBURANTS...36

38 - Rapport, page 1 - INTRODUCTION Le ministre d Etat, ministre de l écologie, de l énergie, du développement durable et de l aménagement du territoire, la ministre de l intérieur, de l outre-mer et des collectivités territoriales, la ministre de l économie, de l industrie et de l emploi, le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et le secrétaire d Etat chargé de l outre-mer ont demandé une mission sur le système d administration des prix des carburants dans les départements d outre-mer. Ils ont également demandé à la mission de formuler des préconisations sur les évolutions possibles du dispositif, sans exclure une éventuelle libéralisation des prix. Cette mission a été confiée conjointement à l inspection générale des finances, au conseil général des mines et à l inspection générale de l administration. Conformément aux demandes des ministres (cf. lettre de mission du 4 décembre 2008 en pièce jointe n 1), la mission porte sur les carburants «routiers» (supercarburant et gazole) dont les prix sont administrés par les préfets dans les quatre départements d outre-mer (DOM). Ainsi, le prix du gaz ne figurait pas dans le champ de la mission. La mission s est déplacée dans chacun des quatre DOM entre le 8 décembre 2008 et le 13 février 2009, après que des manifestations se sont déjà produites contre le niveau jugé élevé des prix des carburants. Elle y a rencontré les élus, des représentants des consommateurs et des professionnels, en particulier ceux pour lesquels le carburant constitue une charge importante (pêcheurs, transporteurs ) ainsi que l ensemble des acteurs de la filière (raffineur, importateurs, distributeurs et gérants de stations-services), soit plus de 300 personnes (cf. programmes des déplacements en pièce jointe aux annexes thématiques). Elle a eu de nombreuses réunions de travail avec les entreprises pétrolières (la société anonyme de la raffinerie des Antilles SARA et toutes les compagnies pétrolières intervenant dans les DOM) qui lui ont communiqué, à sa demande, les documents nécessaires à l expertise demandée. Elle s est appuyée sur les services de l Etat plus particulièrement concernés par le marché des carburants et l administration de leurs prix, tant au niveau central que déconcentré (préfectures, DGCCRF, DGDDI, DRIRE et DGEC en particulier). Elle a par ailleurs mobilisé d autres services de l Etat pour recueillir des éléments d expertise juridique et des informations sur la production et la disponibilité de carburants dans les zones Caraïbes et Océan Indien. Elle a enfin recherché des éléments de comparaison avec d autres régions ultra-périphériques (RUP) ou d autres économies insulaires (cf. pièce jointe n 2). Au terme de ses entretiens, la mission constate que l attente principale de tous ses interlocuteurs, quel que soit le DOM, porte sur la transparence, la plus complète possible, du mécanisme de formation des prix. L absence de transparence a en effet favorisé l émergence d une certaine suspicion à l égard de ce dispositif. La mission avait comme premier objectif d éclairer ses commanditaires sur la formation des prix des carburants outre-mer et de faire le maximum de transparence pour les consommateurs ultra-marins. Ce faisant, elle devait rechercher si les coûts qui entrent dans la structure de prix administrés sont correctement évalués et ne recèlent pas des prix excessifs ou non justifiés, voire d abus. Elle avait aussi comme objectif l identification de surcoûts éventuels. Elle rappelle enfin que les conséquences éventuelles des mesures de baisse du prix des carburants prises ces derniers mois par les représentants de l Etat dans le cadre des protocoles de sortie de crise ne relèvent pas de sa lettre de mission.

39 - Rapport, page 2 - Le présent rapport constitue la synthèse des constats et propositions présentés dans quatre annexes thématiques traitant de la Guyane (annexe I), des Antilles (annexe II), de la Réunion (annexe III) et de la SARA (annexe IV). Il comporte : - le rappel des éléments de contexte (I) ; - les constats mis en évidence par l analyse de la structure de prix et les propositions d ajustement, à court terme, de certaines lignes de prix (II) ; - des propositions d évolution des modalités d administration des prix, en vue notamment d une plus grande transparence (III) ; - des pistes d évolution du dispositif plus structurelles (IV).

40 - Rapport, page 3 - I. LE FONCTIONNEMENT DU MARCHE DES CARBURANTS DANS LES QUATRE DOM EST PERTURBE DEPUIS L ETE A. Le marché des carburants dans les quatre DOM est sous contraintes Les caractéristiques spécifiques aux économies ultra-marines constituent des contraintes fortes au fonctionnement du marché des carburants. L étroitesse du marché de consommation, en raison d une faible population dans chacun des quatre DOM, se traduit par des niveaux de consommation également faibles. Tableau 1 : consommation des carburants en 2008 et comparaison avec la métropole (carburants en m 3 ) Martinique Guadeloupe Guyane ensemble Ensemble Réunion des DFA DOM Métropole Population Supercarburant Gazole routier Carburants routiers Source : INSEE pour la population, directions régionales des douanes et des droits indirects pour les volumes de carburants Sur l ensemble des quatre DOM, la consommation de carburants routiers s élève à un peu moins de 1,2 million de m 3, dont plus de 60% de gazole. Comme en métropole, la «diesélisation» du parc automobile s est fortement accrue. La consommation des quatre DOM représente un peu moins de huit jours de consommation (2,2%) de la métropole pour une population représentant 2,9% de celle de la métropole. Les évolutions démographiques ne sont pas susceptibles de modifier significativement cet état de fait d autant que le vieillissement de la population s accompagne d une mobilité plus faible : - les populations de la Martinique et de la Guadeloupe sont en voie de stabilisation, avec une faible croissance démographique et un début de vieillissement. La consommation de carburants a d ailleurs peu augmenté depuis 2003 (+2,2% en Martinique et +8% en Guadeloupe) ; - la population de la Réunion continue à croître mais à un rythme moindre qu auparavant et avec un accroissement significatif de son vieillissement lorsque le département atteindra le million d habitants vers 2030 (un quart de la population ayant alors plus de 60 ans). La consommation de carburants augmente encore actuellement à un rythme de 3%, beaucoup plus faible qu auparavant ; - seule la Guyane, avec un taux de croissance démographique de 3,9%, représente encore un potentiel de croissance importante de la consommation puisque sa population pourrait doubler d ici à 2030 ( habitants) avec une faible part de plus de 60 ans (10%). L éloignement de la métropole et l insularité renforcent les contraintes d approvisionnement : en l absence de ressources pétrolières propres, les besoins en carburants des DOM doivent être satisfaits par des importations de pétrole brut (pour approvisionner en carburants les Antilles et la Guyane) ou de produits raffinés (dans les quatre DOM).

41 - Rapport, page 4 - D un point de vue communautaire, les DOM sont des régions ultrapériphériques (RUP) dans lesquelles s appliquent, sauf dérogation, les directives et règlements européens. Sont donc en vigueur, comme en métropole, les normes prévues par la directive carburants 98/70 CE en cours de modification, qui fixe notamment le taux de teneur en soufre des carburants routiers (50 ppm puis 10 ppm depuis le 1 er janvier 2009). Actuellement, les Etats proches des départements français d Amérique (DFA) - les Etats de la Caraïbe, le Venezuela et les Etats-Unis - appliquent des normes beaucoup moins strictes. Il en est de même des Etats de l Océan Indien (Madagascar, Maurice, Afrique du Sud). A ce jour, les raffineries de ces zones ne produisent pas de carburants aux normes européennes. Pour disposer de carburants aux normes européennes, seule la raffinerie de la SARA en Martinique est en mesure, dans la région, d approvisionner les Antilles et la Guyane. Pour la Réunion, la zone d approvisionnement la plus proche se situe à Singapour. Les DOM sont distants de la métropole et de l Europe de km pour les départements français d Amérique (DFA) et de plus de km pour la Réunion. De plus, ils ne sont pas situés sur les grandes routes maritimes. Par conséquent la desserte en carburants est effectuée par des navires de taille petite ou moyenne ( tonnes par exemple pour le Tamarin qui dessert la Réunion), ce qui ne permet pas d optimiser les chaînes logistiques et accroît les coûts unitaires de transports. L exigence de sécurité des approvisionnements conduit les compagnies qui approvisionnent les DOM à conclure des contrats d affrètement de moyenne et longue durée (5 ans par exemple pour le Tamarin) et à disposer de navires dédiés 1, disponibles 365 jours par an, de manière à réduire les risques de rupture d approvisionnement. Ainsi, l acheminement des carburants ne peut profiter de l importante baisse des taux de fret constatée depuis l été 2008 même si cette forme de contrat prémunit contre des hausses éventuelles. Les accès portuaires peuvent être difficiles. A Degrad des Cannes en Guyane, la capacité du bateau (le Kerfons) est limitée à tonnes. A Pointe-à-Pitre, seuls des navires de tonnes environ peuvent accéder. Au total, l étroitesse actuelle du marché qui, à l exception de la Guyane, devrait se pérenniser, conjuguée à l éloignement de la métropole et à l impossibilité de s approvisionner dans la zone géographique constituent des contraintes fortes à un fonctionnement optimum du marché des carburants. Par ailleurs, dans les DOM, le poids des dépenses afférentes à l automobile 2 dans le budget des familles est souvent plus élevé qu en métropole : 19% en Guadeloupe, 18,3% à la Réunion et 17,6% en Guyane pour 13,3% en métropole. Ces chiffres traduisent un effet de rattrapage par rapport à la métropole, qui n est pas encore complètement achevé, notamment pour les familles les plus modestes 3. Ils traduisent aussi la quasi-absence de transport collectif, rendant indispensable le recours à son véhicule particulier, notamment pour les déplacements domicile / travail. 1 Sauf pour l approvisionnement en brut de la SARA. 2 Ces dépenses comprennent l achat et l entretien du véhicule ainsi que le carburant (INSEE, enquête budget des familles 2006). 3 Pour les familles les plus modestes (1 er quintile de niveau de vie), le poids des dépenses automobiles est de 17,3% du budget en Guadeloupe, 13% en Martinique et 11,3% en Guyane et à la Réunion, à comparer à 7,8% et 9% pour les familles les plus modestes de métropole (1 er et 2 ème déciles de niveau de vie).

42 - Rapport, page 5 - B. Les besoins des DOM en carburants routiers sont satisfaits par quelques compagnies pétrolières qui inscrivent leur activité dans un contexte mondialisé Les DOM sont desservis par un nombre limité de compagnies pétrolières qui exercent leur activité à différentes étapes de la filière pétrolière : approvisionnement, raffinage, distribution et réseau de stations-services. Cette desserte est réalisée selon deux modalités différentes : dans les DFA, le carburant routier aux normes européennes est raffiné sur place par la SARA ; à la Réunion, il est importé déjà raffiné. 1. Aux Antilles et en Guyane Dans les départements français d Amérique, la Société Anonyme de la Raffinerie des Antilles (SARA), installée en Martinique, constitue le pivot de l organisation industrielle de la filière carburants. Créée à l initiative du gouvernement français, elle a été mise en service en Elle dispose d une capacité de raffinage de tonnes environ et produit notamment du supercarburant, du gazole, du carburéacteur 4, du fioul domestique et du fioul lourd. La SARA est détenue par Total (50%) et trois autres compagnies (Rubis, ExxonMobil et Chevron-Texaco). Outre l activité de raffinage, la SARA a une activité de stockage puisqu elle possède la quasi-totalité des capacités de stockage des DFA, soit près de m 3, ainsi que d autres activités accessoires (embouteillage de gaz, production d électricité pour les besoins de la raffinerie essentiellement, ). La capacité de production de la SARA en carburants routiers est inférieure d un tiers environ à la consommation des DFA, si bien qu elle est obligée d importer des produits déjà raffinés pour combler cet écart. Pour son approvisionnement, la SARA recourt aux sociétés de négoce (trading) de ses quatre actionnaires, chacun à tour de rôle en fonction de sa part de marché, pour rechercher le brut convenant aux spécifications techniques de la SARA. Celui-ci est alors vendu et facturé à la SARA par la société de négoce qui obtient le marché. En règle générale, le pétrole brut vient de mer du Nord. La SARA est donc propriétaire du pétrole brut ainsi acquis et des produits raffinés qui sortent de la raffinerie. Ces produits sont ensuite stockés par la SARA dans ses cuves, en Martinique et en Guadeloupe, puis vendus aux distributeurs. Dans chaque département, la distribution de gros est alors assurée, après mise à la consommation à la sortie des cuves de stockage, par : - six grossistes en Martinique, les quatre actionnaires de la SARA (Total via Total- Caraïbes, Rubis, Exxon-Mobile et Texaco-Chevron) et deux indépendants : WIPCO (Western Indies Petroleum Company, filiale du groupe Loret) et CAP (compagnie antillaise de pétrole, filiale du groupe Barbotteau) ; - sept grossistes en Guadeloupe, les quatre actionnaires de la SARA et trois indépendants : WIPCO, CAP et GPC (Guadeloupe Petroleum Company, filiale du groupe Gaddarkhan) ; - trois grossistes en Guyane, actionnaires de la SARA, Total, via Total Caraïbes, Texaco- Chevron et Rubis. A la différence de la Guadeloupe, les grossistes de Guyane affrètent ensemble un bateau (le Kerfons) et stockent dans les cuves de la SARA en Guyane des carburants qui leur appartiennent. Enfin, la distribution de détail est assurée dans ces trois départements par un réseau de stations-services qui sont presque toutes la propriété des distributeurs de gros précités ou en contrat d exclusivité avec ceux-ci. 4 A partir de 2009, la SARA envisage de ne plus produire de carburéacteur.

43 - Rapport, page 6 - Tableau 2 : nombre et répartition des stations-services, propriétés des groupes pétroliers (DFA) ou en contrat d exclusivité au 1 er janvier 2009 Martinique Guadeloupe Guyane Ensemble % Total ,1 % Rubis-Vito ,2 % Exxon-Mobile / 40 16,6 % Texaco-Chevron ,2 % WIPCO 1 5 / 6 2,5 % CAP 1 6 / 7 2,9 % GPC / 1 / 1 Ns Ensemble % Source : DRCCRF 2. A la Réunion L approvisionnement en carburants est effectué directement depuis Singapour en produits raffinés par quatre importateurs : la Société Réunionnaise de Produits Pétroliers (SRPP), Total- Réunion, Chevron-Texaco et Tamoil. Ces importateurs se groupent pour mutualiser les coûts d approvisionnement et de fret. A tour de rôle, c est la société de négoce (trading) de l un des importateurs qui recherche les produits, aux normes européennes, permettant d approvisionner la Réunion. Un contrat est alors conclu entre le groupe qui va fournir les produits celui-ci peut être ou non un des quatre importateurs et la société de négoce précitée, pour le compte des quatre importateurs. Actuellement, c est le trading de Chevron Texaco qui est en charge de l approvisionnement. A compter du 1 er avril 2009, cette responsabilité est assurée par Total. Le stockage est effectué depuis 1955 par la SRPP qui possède les cuves à Port Réunion mais chaque importateur reste propriétaire des carburants qu il y stocke. La SRPP est détenue à parts égales par Total et par Shell. Elle exerce plusieurs activités : elle est à la fois importateur et distributeur de carburants, aux côtés de trois autres compagnies ; elle est aussi opérateur unique du stockage ; elle assure enfin le remplissage des bouteilles de gaz. La distribution de détail est assurée par un réseau de 148 stations services réparties sous cinq enseignes, le groupe Total étant directement ou indirectement présent dans 84 stations (56%) : Tableau 3 : nombre et répartition des stations-services à la Réunion Enseigne Nombre de stations Total-Réunion 32 Caltex (livré par Chevron-Texaco) 36 Tamoil 28 Elf (livré par la SRPP) 25 Shell (livré par la SRPP) 27 Ensemble 148 Source : DRCCRF 3. Dans les quatre DOM Au total, dans les DFA comme à la Réunion : - l approvisionnement est mutualisé entre tous les importateurs qui se regroupent pour confier à l un d entre eux, à tour de rôle, la responsabilité d acheter les carburants pour le compte de tous et pour affréter ensemble un pétrolier unique dédié. Compte tenu de l étroitesse et des caractéristiques du marché, cette mutualisation est nécessaire pour ne pas multiplier les coûts fixes. En pratique, elle correspond à un opérateur unique en situation de monopole ;

44 - Rapport, page le stockage du carburant est un monopole de fait, assuré par la SARA dans les DFA et la SRPP à la Réunion ; - la distribution de carburants fait intervenir plusieurs distributeurs dans chaque DOM (de trois à sept) et un réseau assez dense de stations-services. Dans les DFA comme à la Réunion, le nombre de stations est assez stable depuis une dizaine d années : cette stabilité peut témoigner d une faible concurrence ou d une fermeture du marché, alors même que c est à ce stade de la filière carburants qu on pourrait attendre une réelle concurrence. A la différence de la métropole, le service des carburants est systématiquement assuré par un personnel de piste important. Les compagnies pétrolières, présentes dans les DOM, exercent leur activité comme elles le font ailleurs dans le monde. Elles sont organisées avec de nombreuses filiales ou unités de gestion spécialisées qui interviennent à la demande des unités géographiques, Total-Caraïbes, Total- Guadeloupe et Total-Réunion, par exemple, filiales de Total Outre-mer. Le fonctionnement de ces grands groupes fait intervenir un double système de responsabilité : - une organisation juridique et financière, avec des filiales à 100% qui assurent la facturation ; - en parallèle, une organisation plus matricielle, autour des produits, des unités géographiques ou d activités spécialisées. Ainsi, les approvisionnements en pétrole sont effectués pour le compte de la SARA ou des importateurs de la Réunion, par la filiale en charge du négoce (trading) de l importateur ou de l actionnaire de la SARA dont c est le tour de réaliser l approvisionnement. Cette filiale lance un «appel d offres» 5 pour spécifier les quantités et la qualité recherchées. A l issue de la consultation, elle achète les produits et les refacture à la SARA ou aux quatre importateurs de la Réunion. Des unités de gestion spécialisées interviennent également en matière d expertise ou de transport du carburant (shipping). Cette organisation, complexe, se retrouve pour chacun des opérateurs pétroliers, ce qui explique que l approvisionnement des DOM en carburants fasse intervenir de nombreux acteurs localisés à Londres, Bruxelles, Genève ou Singapour. Leur activité est retracée dans des organigrammes et des comptes d entreprises, qui ne sont pas tenus dans les DOM. Les activités et acteurs qui concourent à l approvisionnement des DOM en carburants sont rémunérés : - soit par des commissions. C est le cas par exemple des commissions de trading prévues dans les formules permettant de calculer les coûts d approvisionnement (inclus dans le prix de sortie SARA ou dans le prix d approvisionnement à la Réunion) ; - soit par des participations et contrats d assistance. Ainsi, la SARA a un contrat d assistance avec Total sur plusieurs aspects, notamment techniques (sécurité, inspection, entretien, formation ). 5 Il ne s agit pas d un appel d offres au sens où on l entend dans la commande publique mais d une consultation des actionnaires ou d autres partenaires, effectuée sous forme orale et dématérialisée et sur une très courte période.

45 - Rapport, page 8 - C. Le prix des carburants dans les DOM déroge au principe de la liberté des prix Depuis l ordonnance du 1 er décembre 1986, les prix des biens et services sont «librement déterminés par le jeu de la concurrence» au lieu de l être par l autorité administrative. Cependant, cette ordonnance prévoit que les prix puissent être réglementés dans certaines zones ou secteurs, par décret en Conseil d Etat pris après avis du conseil de la concurrence, «quand la concurrence par les prix est limitée», en raison notamment de «difficultés durables d approvisionnement». Le conseil de la concurrence a considéré 6 que cette situation s appliquait au marché des produits pétroliers dans les quatre départements d outre-mer, dans la mesure où «l approvisionnement en produits pétroliers est assuré par une seule entreprise qui contrôle à la fois les opérations en raffinerie, d importation et de stockage» et où «l absence de concurrence au stade des prix de gros limite la concurrence par les prix dans la distribution de détail». Suite à cet avis, le Gouvernement a instauré une réglementation du prix de certains produits pétroliers, par décrets du 17 novembre 1988 (un décret par département), ultérieurement modifiés (pour les Antilles en 2003) et complétés par des arrêtés ou des protocoles. Il s agit notamment, dans les quatre DOM du supercarburant et du gazole. Par ces décrets, le préfet fixe, dans chaque département et pour chaque catégorie de produit réglementé, le prix de vente maximum en gros et au détail. Outre la marge maximum de gros (consentie aux compagnies pétrolières distributrices) et la marge maximum de détail (consentie aux gérants de stations-services), le préfet détermine les autres composantes du prix : le taux de passage dans les cuves de stockage, le coût de transport entre, par exemple, la Martinique et la Guadeloupe ou la Guyane, et, selon les départements, des frais divers. Enfin, le prix maximum de détail, arrêté par le préfet et publié, incorpore des éléments de coût qui ne dépendent ni des pétroliers ni de la négociation conduite sous l égide du préfet, tels que les droits et taxes votés par le conseil régional sur les produits pétroliers réglementés (octroi de mer, octroi de mer régional et taxe spéciale de consommation, dont le produit revient aux collectivités territoriales) ou, dans certains départements, les droits de ports ou redevances perçus par la chambre de commerce et d industrie. Conformément à la réglementation, le préfet modifie les différents éléments du prix maximum de vente pour tenir compte : - à tout moment, d une part, de l évolution du prix des produits importés (bruts ou raffinés), et prendre ainsi acte de l évolution des cours mondiaux, d autre part, de la variation des droits et taxes décidée par le conseil régional ; - une fois par an, en fonction des «variations justifiées des salaires et des autres éléments du prix de revient». 6 Avis 88-A-04 du 16 mars 1988.

46 - Rapport, page 9 - La structure de prix des carburants routiers comprend les principales rubriques suivantes, avec des variantes selon les départements : Schéma 1 : Structure de prix type dans les DOM Source : Mission D. Avant l été 2008, le prix des carburants était, dans les DOM à l exception de la Guyane, assez proche de celui en vigueur en métropole Sur les cinq dernières années, les prix des carburants aux Antilles et à la Réunion étaient globalement proches de ceux de la métropole, un peu plus élevés pour le supercarburant mais inférieurs pour le gazole. En Guyane, les prix des carburants ont été supérieurs à ceux de la métropole. Globalement, les faibles écarts s expliquent par une taxation plus modérée qui contrebalance les surcoûts d approvisionnement. Le niveau de taxation 7 pesant sur les carburants est moins élevé qu en métropole : - de manière générale, la taxe spéciale sur la consommation (TSC) est moins élevée dans les DOM que la taxe intérieure de consommation (TIC) en métropole sauf en Guyane et pèse moins sur le gazole que sur le supercarburant ; - l octroi de mer (OM) et l octroi de mer régional (OMR), représentent 7 à 7,5% environ de la valeur en douane des carburants mis à la consommation en Guadeloupe et en Guyane. En Martinique et encore plus à la Réunion, cette taxation est différenciée, le gazole étant moins taxé que le supercarburant. 7 La fiscalité sur les carburants est différente dans les DOM de celle en vigueur en métropole : ainsi, la taxe intérieure de consommation (TIC, anciennement TIPP) et la TVA ne sont pas applicables. S appliquent en revanche aux carburants, des impôts de droit commun outre-mer (l octroi de mer et l octroi de mer régional) ainsi qu un impôt spécifique, la taxe spéciale sur la consommation (TSC). Celle-ci est calculée sur le volume de carburant mis à la consommation et son tarif ne peut excéder celui de la TIC métropolitaine. Les taux et tarifs de ces impôts sont votés par les conseils régionaux, leur produit est affecté aux collectivités territoriales.

47 - Rapport, page 10 - Tableau 4 : montant des taxes dans le prix du super carburant au 1 er décembre 2008 et comparaison avec la métropole Taux Taux OM OMR Guyane Guadeloupe Martinique Réunion 4,5 % 2,5 % 5 % 2,5 % 7 % 2,5 % 21 % 2 % Equivalent Métropole TVA = 19,6 % Tarif TSC en /l 0,6396 0, , ,582 TIC = 0,6396 Montant des 3 taxes en /litre 0,6966 0,5507 0,5411 0,7061 0,784 Prix de détail en /l 1,47 1,36 1,32 1,39 % des taxes dans le prix de vente/détail 47,4 % 40,5% 40,9 % 50,8% 72 % Source : DRDDI. Traitement mission. Tableau 5 : montant des taxes dans le prix du gazole au 1 er décembre 2008 et comparaison avec la métropole Guyane Guadeloupe Martinique Réunion Equivalent Métropole Taux OM 4,5 % 5 % 0 3 % TVA = 19,6 % Taux OMR 2,5 % 2,5 % 1,5 % 2 % Tarif TSC en /l 0,4169 0,2809 0,2212 0,3613 TIC = 0,4284 Montant des 3 taxes en /litre 0,4750 0,3333 0,2317 0,3938 0,594 Prix de détail en /l 1,25 1,19 1,06 1,10 % des taxes dans le prix de vente / détail 37,6 % 28 % 21,8% 35,8 % 59,7 % Source : DRDDI. Traitement mission. Au total, le poids de la fiscalité dans le prix de vente au détail est, comme en métropole, plus faible pour le gazole que pour le supercarburant. La fiscalité représente entre le quart et la moitié du prix du gazole sauf en Martinique où elle est plus faible. La fiscalité représente environ 40% du prix du supercarburant aux Antilles et atteint la moitié de ce prix environ à la Réunion et en Guyane, en raison notamment du taux de l octroi de mer à la Réunion, de celui de la TSC en Guyane. E. A partir de l été 2008, des critiques croissantes sur le prix des carburants mettent en évidence la complexité et l opacité du système d administration des prix La baisse brutale du prix du baril de pétrole au niveau mondial s est traduite par une diminution rapide du prix des carburants en métropole, où les prix moyens du litre de supercarburant ou du gazole étaient descendus à respectivement 1,15 et 1,11 en novembre 2008, contre 1,47 et 1,42 en juillet Cette baisse n étant répercutée qu avec retard dans les DOM, les révisions de prix intervenant entre tous les mois et tous les trois mois, un écart est apparu et s est même amplifié entre l été et l automne 2008, entre les prix des carburants vendus dans les DOM et ceux de métropole. Des protestations et manifestations ont eu lieu à la Réunion dès septembre 2008 puis en Guyane et en Guadeloupe en décembre Des premières baisses des prix des carburants ont alors été décidées par le préfet le 1 er octobre 2008 à la Réunion et le 1 er décembre 2008 en Guadeloupe.

48 - Rapport, page 11 - En Guyane, la situation avait été rendue plus complexe et plus difficilement supportable par le consommateur du fait d un changement d approvisionnement. Suite à une action en justice engagée par certains importateurs d automobiles contre les compagnies pétrolières qui importaient des carburants ne respectant pas les normes européennes (depuis Trinidad-et-Tobago), les importateursdistributeurs ont été condamnés (référé du 17 novembre 2006) à approvisionner la Guyane en carburants respectant ces normes. Dans l impossibilité de trouver des carburants aux normes européennes à proximité de la Guyane, ils ont importé du carburant auprès de la SARA. Ce changement d approvisionnement devait se traduire par un prix de détail plus élevé, correspondant à une hausse de 25,6 centimes pour le super et 20,5 centimes pour le gazole. De plus, intervenait au même moment une hausse de la taxe spéciale de consommation décidée par le conseil régional. Au total, les prix de détail auraient dû être augmentés de 31 centimes (super) et 27 centimes (gazole). De telles augmentations ont été jugées difficilement supportables pour le consommateur. Elles ont fait l objet d une mise en œuvre progressive à partir de février 2007, le lissage devant se terminer fin En novembre 2008, les prix du litre de super et de gazole étaient respectivement de 1,77 et 1,55, soit une différence de 62 et 44 centimes par rapport aux prix métropolitains. Cette situation a déclenché une vague de protestations et un blocage du département pendant une dizaine de jours, à la suite duquel une baisse du prix des carburants a été décidée par l Etat. Par la suite, de nouvelles baisses de prix ainsi que le gel des hausses prévues ont été décidés par les préfets, dans l attente de la remise du présent rapport. Ces dispositions ont été prises en charge de plusieurs manières, selon les moments et les départements, notamment par des avances consenties par l AFD et les collectivités territoriales. En tout état de cause, la poursuite attendue de la baisse du prix du pétrole sur le marché mondial devait permettre de prendre en charge tout ou partie des conséquences financières de ces baisses. Ces évènements ont mis en évidence la méconnaissance du dispositif d administration des prix et l incompréhension des consommateurs et des acteurs socioprofessionnels devant les écarts de prix des carburants, apparus entre l outre-mer et la métropole. Cette incompréhension a engendré de nombreuses questions et des doutes à l encontre des compagnies pétrolières : certains ont vu, dans des dispositifs considérés comme obscurs, parce que peu ou mal expliqués, une source de possibles abus. Face à cette situation, des enquêtes et audits 8 ont été conduits localement, à l initiative de responsables politiques et acteurs socioprofessionnels, pour essayer de comprendre ce qui se passait sans toutefois parvenir à faire la transparence totale sur le système de prix. Lorsque le système d administration des prix a été mis en place, il y a une vingtaine d années, il s agissait pour les pouvoirs publics de répondre à une situation de monopole, à différents stades de la filière (approvisionnement, importation, stockage, distribution de gros) et à l absence de concurrence par les prix qui en résultait au niveau de la distribution de détail. Or, le fonctionnement de la structure de prix a conduit à empiler, en même temps que des éléments de prix représentatifs des coûts supportés par chaque acteur, plusieurs objectifs : le soutien à l emploi et la réalisation, à chaque niveau de la structure de prix, d une marge suffisante permettant à chacun des intervenants de se maintenir et se développer dans la filière (marge du raffinage, marge de stockage, marge du grossiste, marge du gérant de station service). L addition de ces marges, auxquelles s ajoutent les coûts salariaux des emplois, a conduit à ce que l objectif initial une pression suffisante sur les prix de vente au consommateur final soit en partie perdu de vue. Il semble opportun que, à l occasion d une réforme, les pouvoirs publics précisent le ou les objectifs qu ils entendent aujourd hui poursuivre et si les modalités actuelles d administration des prix constituent le moyen de régulation le plus adéquat pour les atteindre. 8 On citera en particulier l étude analytique sur le coût des carburants en Guyane, à l initiative de la CGPME, le rapport de l observatoire des prix à la Réunion, le rapport de l observatoire des prix de la région Guadeloupe et du conseil économique et social régional.

49 - Rapport, page 12 - II. L ANALYSE DE LA STRUCTURE DE PRIX FAIT APPARAITRE DES LIGNES DE PRIX SUREVALUEES AINSI QUE DES SURCOUTS Dans chacun des DOM, la mission a audité chaque ligne de coût figurant dans la structure de prix, de manière à apprécier si le coût mis à la charge du consommateur était ou non surévalué. A partir de ses principaux constats 9, elle a formulé des propositions de réduction de certains postes, dans le cadre actuel d administration des prix des carburants. Tableau 6 : rappel des prix de vente au détail des carburants routiers au 1 er mars 2009 (en /litre) Guyane Guadeloupe Martinique Réunion Essence prix à la pompe 1,27 1,08 1,08 1,24 Gazole prix à la pompe 1,05 0,89 0,84 0,99 Source : DGCCRF Depuis les décrets du 17 novembre 1988 qui organisent la dérogation au principe de liberté des prix, le cadre réglementaire a évolué de manière spécifique dans chaque département si bien qu aujourd hui, il est hétérogène sur l ensemble des DOM. En pratique, ce cadre réglementaire n est pas toujours mis à jour ni actualisé et est parfois incomplet ou caduque. A. Concernant l approvisionnement en pétrole brut ou en produits raffinés, certains frais accessoires semblent surévalués. 1. Les approvisionnements en pétrole brut et en produits raffinés L approvisionnement en pétrole brut ou en produits raffinés s effectue selon les usages de la profession : les actionnaires de la SARA ou les quatre importateurs / distributeurs à la Réunion assurent à tour de rôle cet approvisionnement en fonction de leur part de marché. Ceux-ci recourent aux sociétés de négoce (trading) du groupe auquel ils appartiennent pour trouver les produits demandés dans le cadre d un appel d offres (Cf. I). Cette organisation se traduit par une formule de prix qui garantit que le prix du produit importé est très proche de celui du marché international, dans la mesure où il repose sur une moyenne de cotations sur un index de référence : - en Martinique, le prix du brut importé est calculé à partir de la moyenne des 20 cotations du pétrole brut (Brent daté FOB) autour de la date de chargement du bateau. S y ajoutent deux primes techniques 10 et une prime de trading ; - à la Réunion, le prix des carburants importés (directement intégré dans la structure de prix puisqu il n y a pas de raffinage), repose sur une formule qui résulte de l appel d offre effectué tous les six à douze mois environ. La référence au prix de marché à Singapour est une moyenne calculée sur cinq jours autour du départ du bateau, à laquelle s ajoutent une prime (premium) et une commission de négoce. Ces formules de prix prévoient une commission de négoce. A la Réunion, une commission de 5 $/tonne qui a un impact respectivement d environ 0,25 et 0,29 centime le litre pour le gazole et le supercarburant rémunère la fonction de trading et les risques qui y sont liés (coordination des approvisionnements, délais de règlements). Elle figure explicitement dans la formule de prix depuis le mois d octobre En Martinique, la commission de négoce (0,25 $/baril) est incluse dans le coût d approvisionnement en brut de la SARA. 9 On se reportera aux annexes par département pour connaître les sources des informations, la méthode de calcul et les échantillons retenus, pour chaque département et chaque ligne de coût, ainsi que le cadre réglementaire par lequel le préfet fixe le prix de vente maximum des carburants routiers dans chaque DOM. 10 Une prime est destinée à tenir compte de l écart entre le brent daté et le brent livré, la seconde vise à neutraliser la qualité des bruts fournis.

50 - Rapport, page 13 - Ces formules de prix, fondées sur des références connues de tous les professionnels sur le marché des carburants, ont semblé pertinentes à la mission dans la mesure où elles sont facilement auditables et cohérentes avec la réalité économique des approvisionnements. Deux difficultés pourraient toutefois être soulevées. En premier lieu, il est possible que la société, en charge des approvisionnements, achète à un prix inférieur à celui auquel elle le revend et qui figure dans la formule de prix mais l impact est très faible et cet écart peut jouer en sens inverse. En second lieu, l approvisionnement en produits est de fait réparti entre actionnaires ou entre importateurs/distributeurs, le groupement des approvisionnements pour cause d étroitesse du marché pouvant aller jusqu à une forme de fermeture de marché, empêchant de nouveaux entrants de prendre des parts de marché. Compte tenu de la saisine de l Autorité de la concurrence par le Gouvernement, la mission n a pas examiné les conditions de réalisation des appels d offres. Pour la Réunion, la mission a comparé l approvisionnement en provenance de Singapour avec un approvisionnement en mer du Nord. Une telle solution serait défavorable au consommateur : si le prix du gazole est à peu près identique, le prix du supercarburant est légèrement inférieur à Singapour, et surtout, cet approvisionnement entraînerait des coûts supplémentaires de fret et d assurance (distance et zones à risques à l entrée en mer Rouge). 2. Certains coûts de transport pourraient être réduits. A la Réunion, les coûts d acheminement des carburants sont établis à partir de prix de marché et paraissent, de ce point de vue, justifiés. L approvisionnement en carburants raffinés est assuré par un bateau dédié (le Tamarin, qui a pris la suite du Cilaos). Il est affrété auprès de la Socatra par les quatre importateurs / distributeurs, dans le cadre d un contrat de long terme. Au cas particulier de la Réunion, on constate que cette formule se révèle plus avantageuse que les affrètements «spot» (sur le marché en dehors du contrat de long terme) auxquels recourent les importateurs de temps à autres. Ce système permet de se couvrir contre des évolutions brutales à la hausse. A l inverse, en cas de baisse des cours mondiaux de fret comme c est le cas actuellement, l approvisionnement ne peut en profiter. Les frais de transport retenus dans la structure de prix paraissent donc justifiés, à l exception de deux postes : - le «coulage en mer» dont l impact est très faible. La mission propose une réduction du taux de coulage en mer de 1% à 0,2%, plus conforme aux données qu elle a pu obtenir, ce qui se traduit par un impact d environ 0,21 /hl (supercarburant) ou 0,29 /hl (gazole) ; - la rémunération des importateurs (2$/TM 11 ) qui apparaît dans la formule de fret et qui est redondante avec celle incluse dans la formule du produit. Aux Antilles, les coûts de fret sur les produits raffinés sortis de la raffinerie de la SARA devraient être réduits de 0,36 /hl : - le coût de transport du carburant entre la Martinique et la Guadeloupe est mutualisé entre les deux départements ; cette mutualisation doit être maintenue. Pour autant, la ligne de coût correspondante devrait être réduite d un quart (0,760 /hl au lieu de 1,02 /hl) au regard des coûts effectivement engagés ; - le coût de la desserte des îles de Guadeloupe, non inclus dans la mutualisation Martinique-Guadeloupe, devrait être revu à la baisse pour la même raison. En Guyane, le coût de transport des produits raffinés importés des Antilles devrait être diminué de 1,22 /hl (3,78 /hl au lieu de 5 /hl) au regard des coûts réellement engagés. 11 Tonne Métrique.

51 - Rapport, page 14 - En Guyane également, la structure de prix fait apparaître des «frais amont» dont une partie n est plus justifiée depuis le changement d approvisionnement (exemple : commission de trader). En conséquence, la mission propose de ramener cette ligne de coût de 2,2% du prix plancher SARA à 0,45% (pertes en mer et assurance) soit un impact sur la structure de prix de l ordre de 1,3 /hl. 3. La mutualisation des coûts de transport qui existe entre la Guadeloupe et la Martinique pourrait être étendue à la Guyane Depuis 2003, les coûts de transport des carburants routiers entre la Guadeloupe et la Martinique sont mutualisés entre ces deux départements. La Guyane qui n est approvisionnée que depuis 2007 en produits raffinés par la SARA ne bénéficie pas de cette mutualisation. Il est légitime que cette mutualisation des coûts de transport soit aujourd hui organisée sur l ensemble des DFA et donc étendue à la Guyane. Il en résulterait une baisse sensible pour le consommateur guyanais (-3,8 centimes / litre) et, en contrepartie, une hausse somme toute réduite pour le consommateur antillais (+0,17 centime /litre). 4. Aux Antilles, une question est en voie de règlement, celle de la récupération et du traitement des huiles usagées En l absence de dispositif de récupération adapté dans les deux départements antillais, la collecte des huiles usagées et leur retraitement en métropole sont financés par un prélèvement (0,1 /hl) sur la vente des carburants depuis le 21 juin La SARA assure la collecte de ce prélèvement et en reverse le produit à un collecteur agréé, qui procède à cette récupération. Ce dispositif était un palliatif. A compter du 1 er janvier 2010, l ADEME devrait reprendre la responsabilité de la filière «huiles usagées» en Guadeloupe. Le prélèvement de 0,1 /hl peut donc être supprimé à compter de cette date. Dans les deux autres départements (Martinique et Guyane), l excédent de trésorerie collecté par la SARA permet de couvrir les coûts pendant plusieurs années. Il est donc proposé de supprimer ce prélèvement dès maintenant, la SARA pouvant financer le collecteur jusqu à fin 2009 en Guadeloupe et au-delà en Martinique et en Guyane 12. B. Dans les départements français d Amérique (DFA), le coût du raffinage par la SARA est plus élevé que celui d une raffinerie standard européenne et est réparti de manière déséquilibrée entre les produits Dans l ensemble des DFA, la structure de prix comporte un prix plancher SARA, prix maximum fixé par les préfets, auquel la SARA vend ses produits aux importateurs-distributeurs. Il représente le poste le plus important entrant dans la composition du prix des carburants (entre 40% et 60% selon les carburants et les départements). 1. Le prix de sortie SARA est difficile à piloter et ne donne pas satisfaction Le prix de sortie SARA repose aujourd hui sur deux éléments : un prix fixé par le décret du 23 décembre 2003 et un dispositif permettant de prendre en compte d une part l évolution du coût des approvisionnements, d autre part, celle des autres facteurs de production (logistique, fret, masse salariale, productivité, coûts de sécurité ) au travers de la marge sur coûts variables de raffinage (MCVR). Le prix plancher fixé en 2003, qui comprend plusieurs paramètres (coût des approvisionnements, fret, droits de ports, assurances ) dont la part respective n est pas détaillée dans le décret, ne peut plus aujourd hui être audité. 12 L ADEME a donné son accord au préfet de Guadeloupe sur son intervention à compter de 2010, la question de la Martinique n étant pas encore réglée, lors du déplacement de la mission.

52 - Rapport, page 15 - Le coût des approvisionnements n a pas appelé d observations majeures de la mission. Il obéit à une formule qui, derrière une apparence complexe, repose sur les cotations observées sur les marchés internationaux. Mais, étant prévu par une circulaire non signée et non publiée, il paraît obscur, ce qui alimente les soupçons d abus et les incompréhensions. A cet égard, la mission a examiné avec une particulière attention le rapport entre les importations de pétrole brut et celles de produits raffinés, notamment en Guadeloupe, étant rappelé que la capacité de la raffinerie en produits raffinés est insuffisante au regard de la consommation des DFA, ce qui la conduit à devoir importer des produits raffinés. Elle a effectivement constaté que le poids du pétrole brut dans les approvisionnements avait été plus faible en 2005 et 2006 (supercarburant) et 2007 (gazole) que les années précédentes. Cette situation s explique cependant par les grands arrêts techniques de la raffinerie qui ont contraint la SARA à importer davantage de produits déjà raffinés. La marge sur coûts variables de raffinage (MCVR) est la différence entre son chiffre d affaires et le coût de ses approvisionnements (brut et produits raffinés) que doit dégager la SARA pour atteindre l objectif de marge accepté par les services de l Etat, après prise en compte des coûts fixes, des dotations aux amortissements et provisions et des impôts. A cet effet, la SARA dépose chaque année auprès de la DDCCRF une demande de détermination de la MCVR, qui est discutée avec les services de l Etat. L objectif de MCVR, retenu par l Etat, sert au pilotage du prix plancher de la SARA. Le fonctionnement de ce mécanisme, complexe et opaque, connaît beaucoup de difficultés. Le pilotage de la MCVR est très délicat. L objectif de MCVR étant rarement atteint (une fois en cinq ans), cela a conduit à rattraper le retard l année suivante ou à réduire l objectif à atteindre. Ainsi, pour rattraper le retard constaté sur 2006, un objectif plus élevé de rentabilité avait été accepté par l Etat pour 2007 mais le balancier a été trop loin si bien qu une réduction de cet objectif a été mise en œuvre en Il s ensuit que le prix de sortie SARA est de plus en plus déconnecté des prix constatés sur les marchés internationaux. Par ailleurs, en couvrant tous les coûts fixes, la MCVR n incite pas aux gains de productivité. Or, le décret de 2003 précité prévoyait que le prix de sortie pouvait être révisé pour tenir compte des efforts de productivité. Les services de l Etat n ont pas les moyens de les apprécier. Enfin, le prix de sortie pouvant être modifié dans chaque département par arrêté préfectoral, il peut y avoir plusieurs «prix de sortie SARA». Même si cela s est rarement produit jusqu aux évènements récents, cette possibilité achève de rendre le système incompréhensible. 2. Ce «prix de sortie SARA» est plus élevé, en moyenne sur la période de 19 centimes (supercarburant) et 11 centimes (gazole) par rapport à une raffinerie standard européenne. La mission a été conduite à approfondir les raisons d un tel surcoût. Sur la période , le taux de rentabilité des capitaux engagés de l ensemble de la SARA a fortement fluctué. En moyenne sur la période, il s est élevé à 9,1%. Le taux supérieur à 20% pour l année 2007 s explique par des résultats en très forte hausse pour cet exercice venant, entre autres, compenser la faible rentabilité des exercices précédents.

53 - Rapport, page 16 - Graphique 1: Evolution du taux de rentabilité (résultat opérationnel net sur capitaux engagés) de la SARA (toutes activités) entre 2004 et 2008 (en %) 25,0 20,0 15,0 10,0 5,0 0, Source : SARA En tout état de cause, le taux de rentabilité pèse beaucoup moins dans la formule de prix que les coûts fixes de la raffinerie : 1,6 centime /litre en moyenne contre 8,5 centimes /litre. Si une baisse «à caractère administratif» de la rentabilité de la SARA était mise en œuvre, le «gain» pour le consommateur final serait limité puisque celui-ci gagnerait au maximum 1,6 centime/litre (soit la différence d impact entre une rentabilité de 9% et une rentabilité réduite à 0). Le surcoût s explique essentiellement par la taille de la raffinerie, la plus petite des raffineries françaises, avec une capacité de tonnes, soit cinq fois moins que la plus petite des raffineries métropolitaines. Les coûts fixes étant amortis sur un volume de carburants trop faible, le coût de sortie du produit raffiné est plus élevé. La technologie selon laquelle est construite la raffinerie ne permet pas de compenser cette faible productivité. De type «hydroskimming» (distillation sans craquage), cette raffinerie ne peut pas raffiner des pétroles trop lourds, ce qui a plusieurs inconvénients. Elle ne peut 13 importer les pétroles bruts, trop lourds, du Venezuela ou des Caraïbes, ce qui l oblige à s approvisionner quasiexclusivement en Mer du Nord. Elle produit du fuel lourd bien davantage qu une raffinerie standard et n a qu un seul acheteur pour ce produit, EDF, pour la centrale thermique. Avec la consolidation en cours dans le secteur du raffinage conduisant à une augmentation des capacités moyennes de raffinage, les surcoûts actuels de la SARA devraient s accentuer dans les prochaines années. Il n apparaît pas possible, sauf investissements très longs et coûteux, de modifier la technologie de la raffinerie de la SARA. 13 Elle a exceptionnellement, au cours de la période examinée, pu se procurer du brut suffisamment léger provenant du gisement de Santa-Barbara (Venezuela), mais celui-ci a été jusqu à présent rarement disponible pour l exportation.

54 - Rapport, page Le surcoût de la SARA qui n est actuellement supporté que par les carburants routiers pourrait être mieux réparti La SARA réalise l essentiel de sa marge sur le supercarburant et le gazole. Or, elle produit aussi d autres carburants, le carburéacteur et le fioul lourd, en particulier. Jusqu à présent, elle les a vendus à un prix inférieur. C est le cas du fioul lourd que la SARA produit en quantités importantes, compte tenu de sa technologie, et qui est vendu au seul acheteur potentiel en Martinique, EDF, qui se trouve ainsi en position favorable pour négocier. Pourtant, le fioul lourd est un produit réglementé pour lequel le préfet fixe également un prix maximum. La SARA pratique un prix systématiquement inférieur. La comparaison des prix de vente de la SARA aux cours mondiaux fait apparaître un écart moyen sur de 1c /l sur le carburéacteur et de -1,35 c /l sur le fioul lourd. Cet écart est en fait plus important car le prix sortie SARA pour ces deux produits intègre déjà la facturation par cette dernière du taux de passage, qui est distinct dans le cas des carburants routiers. A titre d illustration, si on appliquait le taux de passage en vigueur en mars 2009 aux Antilles sur le gazole, l écart réel serait en fait de -4,5 c /l environ pour le carburéacteur et de -5c /l environ pour le fioul lourd. Graphique 2 : Ecart prix sortie SARA cotations Platts Cargoes CIF (moyenne ) (c /l) 25,00 20,00 15,00 10,00 5,00 0,00-5,00 Supercarburant Gazole Carburéacteur Fuel lourd Source : SARA. Traitement mission

55 - Rapport, page 18 - Dans l hypothèse du maintien de l activité de raffinerie de la SARA, son surcoût de raffinage pourrait être réparti de manière plus équilibrée entre tous les produits vendus par celle-ci. Si cette répartition était effectuée au prorata des volumes vendus, l impact sur le prix de sortie SARA serait le suivant : Tableau 7 : impact sur le prix de sortie SARA d une répartition plus équilibrée du surcoût de raffinage Produits Impact sur le prix de sortie SARA (en centimes /litre) Supercarburant - 11 Gazole - 3 Fioul vendu à EDF + 9 Carburéacteur + 9,3 Source : mission Par ailleurs, il pourrait être nécessaire d instaurer un prix minimum pour le fioul lourd, dont le prix est déjà réglementé, ainsi que pour le carburéacteur dont le prix est libre. Une modification du décret de 2003 devrait être alors envisagée. Une période transitoire pourrait aussi être prévue pour faciliter la négociation à engager avec les clients de la SARA concernant le fioul et le carburéacteur. Une partie de ce réajustement pourrait porter sur le taux de passage pratiqué pour le carburéacteur et le fioul lourd. C. Le coût de passage dans les dépôts est fixé à un niveau trop élevé par rapport aux coûts réellement supportés Le stockage est effectué par un seul opérateur à la Réunion, la SRPP, et par un seul opérateur pour l ensemble des DFA, la SARA, qui possèdent les installations de stockage. Le coût de passage dans ces stocks est répercuté dans la structure de prix, sans que les décrets de 1988 précisent le mode de calcul et l évolution de ce coût. A la Réunion où le taux de passage est le plus faible, celui-ci est révisé tous les ans au 1 er février, à l inverse des DFA : en Martinique et en Guadeloupe, le taux est inchangé depuis 2003 ; en Guyane, département où le taux de passage est le plus élevé des quatre DOM, celui-ci est toujours le taux fixé en Tableau 8 : taux de passage dans les stocks (en /m 3 ) figurant dans la structure de prix de chaque DOM au 1 er février 2009 Guyane Guadeloupe Martinique Réunion 33,53 (gazole) 33,53 (gazole) 62,35 35,82 (super) 35,82 (super) 20,95 Les écarts de tarif (de 1 à 3 environ) sont corrélés à la taille des marchés de consommation : 21 /m 3 pour habitants à la Réunion et 63 /m 3 en Guyane pour 3 à 4 fois moins de population.

56 - Rapport, page Le coût de passage en dépôt pourrait être revu à la baisse dans les quatre départements En premier lieu, le stockage fait l objet de pratiques défavorables aux consommateurs de gazole et de supercarburant : - en Guyane, les taux de passage pratiqués sont différents selon les carburants. Ainsi, le taux de stockage du carburéacteur est deux fois moins élevé que celui du gazole ou du super, celui du fioul vendu à EDF 50% moins cher et le taux de stockage du gazole-pêche six fois moins cher. Cette pratique, analogue à celle constatée dans la répartition du surcoût SARA, revient à défavoriser les carburants routiers ; - aux Antilles, le taux de passage pour le fioul lourd et le carburéacteur est compris dans le prix facturé par la SARA ; - à la Réunion, le même phénomène a existé au profit du carburéacteur. Mais, les services de l Etat ont demandé un rattrapage depuis quatre ans, qui devrait être terminé en En deuxième lieu, la rémunération des capitaux engagés est actuellement de 21% à la SRPP et d environ 17% pour l activité stockage de la SARA. La mission s est interrogée sur le niveau adéquat de rentabilité qui pourrait être retenu pour cette activité administrée peu risquée, en situation de monopole. La rentabilité du stockage est supérieure à l objectif global fixé à la SARA pour l ensemble de son activité (12%). Une autre référence est fournie par l un des actionnaires de la SARA qui constate, dans les comptes 2008, pour sa branche stockage en Europe, une rémunération de 12,2%. Il est donc proposé de revoir à la baisse le coût de passage en dépôts à la SARA comme à la SRPP. Les taux de passage ont été recalculés. L écart entre le chiffre d affaires réel actuel et un chiffre d affaires recalculé à partir de deux hypothèses de rémunération, 12% et 8%, permet de proposer des taux de passage plus faibles que ceux actuellement en vigueur. Tableau 9 : proposition de réduction des taux de passage dans les stocks avec un taux de rémunération des capitaux engagés de 12% et 8% (en centimes /hl) Taux de passage avec 12% % de réduction -17,7 % Taux de passage avec 8% Guyane Guadeloupe (a) Martinique (a) Réunion 5,128 2,45 2,45 1,785-26,9% (gazole) - 31,6 % (super) - 26,9% (gazole) -31,6% (super) -14,8% 4,824 2,22 2,22 1,65-38 % (gazole) - 38% (gazole) % de réduction -22,6% - 33,8% (super) - 33,8 % (super) Source : Mission. (a) : unification des taux de passage du gazole et du super aux Antilles - 21,3% 2. La mutualisation des coûts de transport entre les Antilles et la Guyane pourrait être étendue au coût de passage dans les dépôts SARA Actuellement, le taux de passage dans les dépôts de la SARA est identique en Guadeloupe et en Martinique. L élargissement de la mutualisation à la Guyane permettrait une diminution significative du taux de passage en Guyane (entre -2 et -2,2 centimes /litre s ajoutant à la baisse liée à la révision des taux de passage) en contrepartie d un effort de faible ampleur du consommateur antillais (+0,4 centime /litre).

57 - Rapport, page 20 - Tableau 10 : Evolution du taux de passage en Guyane et aux Antilles après mutualisation des coûts de stockage(en /hl) Guyane Guadeloupe Martinique Taux de passage avec 12% 2,84 2,84 2,84 % de réduction par rapport à la valeur -55% -18% -18% actuelle Taux de passage avec 8% 2,6 2,6 2,6 % de réduction par rapport à la valeur -59% -25% -25% actuelle Source : mission D. La marge de distribution est surestimée par rapport aux coûts et pourrait être revue à la baisse En application de la réglementation, la structure de prix fait apparaître distinctement dans chaque DOM : - la marge de gros, qui rémunère l approvisionnement des stations-services par les compagnies pétrolières, depuis les cuves de stockage de la SARA ou de la SRPP ; - et la marge de détail, qui rémunère la vente de carburants au détail, par ces stationsservices. La marge totale de distribution est partout supérieure à ce qu elle est en métropole. Tableau 11 : marges de distribution accordées par l Etat dans la structure de prix des carburants de chaque DOM et comparaison avec la métropole (en /hl) au 1 er janvier 2009 Guyane Réunion Martinique Guadeloupe Métropole Marge de gros 9,085 11,5 (super) 5,940 (super) 10 (gazole) 6,260 (gazole) 6,068 / Marge de détail 10 10,649 9,08 12,584 / Marge totale de distribution 19,085 20,92 15,02 18,652 10,5 Source : DRRCRF et UFIP pour la métropole La marge de gros et la marge de détail ne correspondent pas à ce que perçoivent respectivement les grossistes et les détaillants, compte tenu des flux financiers entre eux. En effet, les locataires-gérants versent aux grossistes des loyers qui comportent une part variable, fonction du carburant vendu par la station. En Guadeloupe, depuis 2002, les grossistes versent aux gérants de stations-services, au terme de leur contrat, une «indemnité de fin de gérance», prévue par l accord interprofessionnel du pétrole (AIP). L indemnité est fixée à chaque fin de contrat, y compris en cas de renouvellement. Ce dispositif a été mis en œuvre en Martinique en février Son financement, inclus dans les charges des grossistes en Guadeloupe et dans le prix de sortie SARA pour la Martinique, représente 0,609 /hl en Guadeloupe et 0,685 /hl en Martinique. Le montant de l indemnité serait de l ordre de en moyenne, réparti en plusieurs versements.

58 - Rapport, page La marge de gros est surévaluée Au titre de leurs recettes, outre la marge de gros fixée par les préfets, les distributeurs bénéficient des loyers versés par les gérants des stations-services, et de l effet dilatation des carburants. En effet, lorsque les grossistes achètent les carburants, ceux-ci leur sont facturés à la température réglementaire de 15. Ces carburants sont revendus aux détaillants à la température ambiante. Or, avec l augmentation de la température, le volume des carburants se dilate ce qui explique que les quantités vendues par les grossistes sont supérieures aux quantités achetées. Ce phénomène, bien connu de la profession 14, est également connu des services de l Etat et intégré dans le total des recettes du grossiste pour en déduire ensuite le montant de la marge de gros. Au titre de leurs charges, les grossistes financent l approvisionnement des stationsservices à leur enseigne ainsi que les investissements dans le réseau (dotations aux amortissements) et leur maintenance. Ils ont également des frais généraux, supportent les impôts et taxes et, en Guadeloupe, versent des indemnités de fin de gérance (AIP). Enfin le résultat net dégagé par les grossistes doit assurer une certaine rémunération des capitaux engagés. Dans les quatre DOM, la plupart des importateurs/distributeurs ont indiqué à la mission que l objectif de rentabilité des capitaux engagés fixé par leurs actionnaires était de 15% environ. Or, dans tous les départements, la rentabilité effective, telle qu elle ressort des données supra, dépasse largement l objectif de 15% (environ 25% aux Antilles et 39% en moyenne pour deux distributeurs à la Réunion). Le niveau de la marge de gros est donc fixé à un niveau trop élevé du point de vue de l intérêt des consommateurs. La mission s est interrogée sur le niveau adéquat de rentabilité qui pourrait être retenu pour calculer la marge de gros sur un marché administré : d une part, la comparaison avec un taux de rentabilité en usage dans la profession est difficile compte tenu de la spécificité des marchés des DOM et de l absence de données disponibles en métropole; d autre part, il existe une limite inférieure que la mission ne saurait déterminer en deçà de laquelle les distributeurs pourraient considérer être insuffisamment rémunérés, ce qui pourrait les conduire à interrompre leur activité. La mission a donc présenté un résultat correspondant à deux hypothèses de rentabilité, 15% et 8%. Le tableau 12 fait apparaître, pour chaque DOM, l excès de marge de gros dans les deux hypothèses de rentabilité des capitaux engagés qui pourrait faire l objet d une réfaction par rapport au niveau actuel. Tableau 12 : calcul de l excédent de marge de gros (en c par litre) par référence à deux hypothèses de rentabilité des capitaux Guyane Réunion Martinique Guadeloupe Total des recettes 11,907 12,79 9,096 8,727 Total des charges 8,81 8,33 6,57 6,67 (a) Résultat moyen effectif 3,097 4,46 2,526 2,057 (b) Calcul d un résultat correspondant à un taux de rentabilité - de 15% - de 8% Excès de marge (a b) = - Hyp. de 15% - Hyp de 8% Source : Mission 1,2 0,64 1,9 2,45 1,704 1,03 2,75 3,43 1,2 0,64 1,32 1,88 1,082 0,577 0,956 1,461 Ainsi, la marge de gros est surévaluée d environ 1 à 3,4 centimes par litre selon le département et l hypothèse de rentabilité retenus. 14 Le coefficient de dilation est de 0,084% par degré Celsius pour le gazole et de 0,11% pour le super, ce qui permet de déterminer le litrage supplémentaire vendu par les grossistes.

59 - Rapport, page Le niveau de la marge de détail s explique principalement par le niveau des charges salariales L appréciation du niveau de la marge de détail est complexe du fait de l existence de l activité boutique des stations-services (vente de tabac et d alcool, alimentation, journaux, pain, cafétéria- sandwicherie, produits auto ) qui complète la distribution de carburants et explique une partie de leur rentabilité. La marge de détail est, dans tous les DOM, fréquemment revalorisée, sur demande des représentants des gérants de stations-services ce que permet la réglementation selon un processus quasiment immuable jusqu à maintenant : la perspective d une marge élevée constitue une incitation à l installation de nouvelles stations-services, contribuant ainsi à une baisse des volumes moyens de carburants vendus. Pour éviter une dégradation de leur rentabilité, les gérants de stations-services revendiquent alors auprès des services de l Etat une marge de détail plus élevée. Dans les quatre DOM, le réseau des stations-services est dense, avec des volumes de carburants distribués plutôt inférieurs en moyenne à ceux de la métropole. Le «modèle de distribution ultra-marin» est plus coûteux pour le consommateur final que le mode de distribution métropolitain : les stations-services sont très peu automatisées et privilégient le service au client. Elles emploient donc beaucoup plus de personnel qu en métropole. L effectif moyen par station est de l ordre de sept à dix salariés, ceux-ci étant occupés à la distribution du carburant et à la boutique. Nombre de stations au 1/1/2009 Nombre moyen de salariés par station Nombre de salariés pompistes par DOM Poids de la masse salariale carburants / litre de carburant Source : mission Tableau 13 : mesure de l emploi salarié dans les stations-services des DOM Guyane Réunion Martinique Guadeloupe 5,3 centimes par litre ,5 9 10,2 8, ,3 centimes par litre 4,4 centimes par litre 8 centimes par litre Malgré le poids des charges salariales, ces stations-services (activité carburants et boutique) dégagent un résultat qui varie, selon le carburant et selon la station, de 5 à 10% de la marge commerciale. La masse salariale représente, en moyenne, près de la moitié de la marge commerciale des stations-services. La rémunération des salariés est très variable d un réseau à l autre, d un département à l autre : si certains pompistes sont rémunérés au SMIC, ce n est pas le cas de tous, notamment en Guadeloupe où une convention collective appliquée depuis 2007 prévoit des progressions de salaire en fonction de l ancienneté. Le niveau de la marge pose aussi la question de la rémunération des gérants. Selon les documents transmis à la mission, certains peuvent avoir une rémunération brute annuelle pouvant dépasser , hors distribution du résultat, et de l indemnité de fin gérance (AIP) s il y a lieu. A titre de comparaison, en métropole, d après les éléments communiqués par le conseil national des professions de l automobile (CNPA), la rémunération brute annuelle de référence des gérants de stations-services s élève à pour une personne seule et à moins de pour un couple. Il est évidemment normal que les gérants aient une rémunération conforme à leur responsabilité mais comme celle-ci s inscrit dans un système de prix administré dans l intérêt du consommateur, un équilibre devrait être trouvé. A cet effet, il serait souhaitable que la DDCCRF, à partir de la comptabilité des stationsservices, examine si de tels niveaux de rémunération sont courants.

60 - Rapport, page 23 - Ainsi, le niveau de la marge de détail s explique bien sûr par le maintien d un grand nombre d emplois dans les stations services mais aussi par la rémunération du locataire-gérant, qu il convient de ne pas occulter. Dans l appréciation de la marge de détail, il est donc nécessaire de distinguer : - le coût des emplois de salariés, qui correspond à la part la plus importante de la marge de détail. La remise en cause éventuelle de ce choix d exploitation des stations services qui repose sur un consensus très fort dans chaque DOM des élus et représentants des acteurs socioprofessionnels, auditionnés par la mission nécessiterait un débat public qui sort du périmètre de la mission. Il s agit d arbitrer entre des économies qui pourraient être réalisées au bénéfice des consommateurs et le maintien des emplois dans le secteur ; - du coût résultant de la rémunération du locataire-gérant. Si des niveaux excessifs de rémunération des gérants s avéraient courants, il paraîtrait cohérent, dans un système d administration des prix, d encadrer aussi la rémunération du locataire-gérant et de prévoir à cet effet une ligne de coût dans la marge de distribution. Cette solution aurait le mérite d être plus transparente en évitant de faire porter le poids de la marge de détail sur les seuls salariés pompistes et plus favorable au consommateur dans la mesure où elle pèserait sur les rémunérations actuelles. Elle pose néanmoins beaucoup de difficultés de principe, dès lors qu il s agit de fixer une rémunération par voie d arrêté, et de mise en œuvre (clé de partage avec l activité boutiques, modalités de contrôle...). E. A l avenir, certains facteurs pourraient contribuer à la hausse du prix des carburants 1. La taxation générale sur les activités polluantes (TGAP) Désormais des biocarburants doivent être incorporés aux carburants routiers mis à la consommation en France. Un prélèvement supplémentaire de TGAP sanctionne le non-respect de cette disposition. Ce dispositif qui, actuellement n est pas applicable dans les départements d outre-mer, le deviendra à compter du 1 er janvier A titre d illustration, l impact en métropole de toute incorporation est évaluée entre 6 et 7 centimes d par litre pour l année Les modalités de calcul de l octroi de mer aux Antilles En Guadeloupe et en Martinique, le calcul de l octroi de mer et de l octroi de mer régional n est pas conforme à la réglementation. Dans les déclarations en douane déposées par les opérateurs, l assiette de ces taxes est le «prix normal d importation (PNI)», mentionné dans les arrêtés qui règlementent les prix des carburants, et non la valeur en douane à laquelle renvoie la loi de 2004 sur l octroi de mer. Les produits d octroi de mer et d octroi de mer régional perçus par les collectivités territoriales s en trouvent minorés de 10 à 15% selon les mois 15. Cependant, si elle est défavorable aux collectivités territoriales, cette pratique, qui minore le poids des taxes dans la structure de prix, a été favorable au consommateur. Il convient de revenir à la valeur en douane, ce qui devrait se traduire par une augmentation du prix de détail des carburants. Si les collectivités territoriales ne réduisaient pas les taux d octroi de mer et d octroi de mer régional pour compenser l élargissement de l assiette, cela aurait pour conséquence une hausse des prix pour le consommateur final limitée (de 0,10 à 0,84 /hl selon le carburant et le département, soit moins de 1 centime /litre). 15 Par exemple, sur la base du mois d octobre 2008, le manque à gagner annuel s établirait à environ 1,3 M pour les collectivités de Martinique et à 1,8 M pour celles de Guadeloupe. Les collectivités territoriales pourraient être amenées à demander une révision de l assiette de l octroi de mer et de l OMR pour le passé.

61 - Rapport, page La taxe additionnelle à la taxe spéciale de consommation En Guyane, dans le cadre du lissage de l augmentation due à la fourniture de carburants aux normes européennes, une avance de trésorerie avait été consentie (par l intermédiaire de l Agence française de développement) aux entreprises pétrolières pour compenser leur manque à gagner. Elle devrait être remboursée par le produit d une taxe, additionnelle à la taxe spéciale de consommation, de 4 à 8 centimes par litre. Cette taxe doit être mise en place à compter du 1 er avril 2009, la date initiale du 1 er janvier 2009 ayant été repoussée. Au total, une diminution des prix de détail, de l ordre de 5 à 18 centimes selon le département, pourrait être réalisée à court terme. Cette diminution proviendrait essentiellement du stockage et de la marge des distributeurs et, pour ce qui concerne les DFA, d un rééquilibrage du surcoût de la SARA sur l ensemble des produits de la SARA.

62 - Rapport, page 25 - III. DES EVOLUTIONS SONT ENVISAGEABLES DANS LE CADRE D UN SYSTEME DE PRIX ADMINISTRES Outre les observations sur les différentes lignes de coût, justifiant les ajustements proposés au II, le système actuel d administration des prix comporte des effets négatifs : - il a un effet anticoncurrentiel en fixant un prix maximum sur les marges de gros et de détail sur lequel s alignent tous les distributeurs et les gérants de stations-services. Il n incite pas 16 à des politiques commerciales de baisse des prix ; - il a un effet d aubaine, le mode de rémunération (la même marge pour tous) favorisant les opérateurs de taille importante ; - il créé des distorsions entre les carburants routiers et d autres produits comme le fioul lourd et le carburéacteur; - il est déresponsabilisant pour l ensemble des acteurs : pour les opérateurs, qui ne sont pas incités à faire des gains de productivité, leurs coûts étant intégralement répercutés sur le prix de vente, quelle que soit l évolution des coûts de production ; pour le budget des collectivités territoriales, du fait de l augmentation «automatique» du prix des carburants, l octroi de mer et l octroi de mer régional étant calculés en pourcentage des prix plafond. L accroissement des recettes fiscales de ce fait ne nécessite donc pas de décision explicite d augmentation des taux ; pour les distributeurs et les gérants de stations-services. En arrêtant la marge de chacun, le préfet arbitre en effet la répartition de la marge de distribution au lieu de laisser distributeurs et gérants négocier directement loyers, prix et redevances. Il s agit de relations commerciales dans lesquelles l intervention de l Etat n apparaît pas justifiée ; pour le préfet, enfin, qui intègre dans le prix à la pompe l impact d impôts dont il ne maîtrise pas les composantes, ceux-ci étant de la responsabilité des collectivités territoriales ; - il est inflationniste du fait notamment de l existence de prix maximum et d une facturation de l ensemble des coûts sans gain de productivité au coût complet. La mission a recherché les moyens d atténuer, surmonter ou faire totalement disparaître ces effets négatifs soit à court terme dans le cadre du système actuel soit dans le cadre d évolutions plus structurelles. Dans le cadre du maintien d un système d administration des prix, la mission formule des propositions susceptibles d améliorer son fonctionnement, de le rendre plus réactif par rapport notamment à l évolution des prix mondiaux des carburants et de répondre aux demandes de transparence qui se sont fortement exprimées auprès de la mission. 16 Sauf à la marge, avec quelques clients, des entreprises essentiellement, à qui sont consentis des rabais pour achats en gros ou qui réalisent, dans leurs locaux, des cuves privées alimentées directement par les grossistes.

63 - Rapport, page 26 - A. Il est indispensable d améliorer la transparence du système et de clarifier les règles d administration des prix. Les demandes de transparence exprimées par les élus, les acteurs socioprofessionnels et les consommateurs sont pleinement justifiées. Dans plusieurs départements, l observatoire des prix et des revenus a montré qu il pouvait être un lieu de débat pour l ensemble des acteurs. Il est donc proposé de faire de cet observatoire l outil de la concertation et d une plus grande transparence. Celui-ci pourrait être réuni par le préfet et consulté à l occasion d un changement des règles de calcul et lors de chaque modification du prix des carburants. A cette occasion, l observatoire émettrait un avis qui serait rendu public. Il pourrait auditionner les opérateurs présents dans le département. La transparence passe aussi par des règles plus rigoureuses du système d administration des prix. Un certain nombre d insuffisances ont été constatées : texte de référence non publié et caduc (exemple du protocole de 1998 avec les distributeurs à la Réunion), arrêté non actualisé (arrêté de 2004 non actualisé en Guyane suite au changement d approvisionnement en carburants en 2007), etc. Il convient donc d adopter des règles claires, avec notamment l obligation de publication des textes sur lesquels est fondée la réglementation des prix (arrêtés mais aussi circulaires et protocoles). Leur actualisation devrait être systématique. Un avis de l observatoire des prix et des revenus devrait précéder leur mise en œuvre. Dans l objectif d un système d administration des prix plus transparent, le degré d automaticité de certaines règles et donc le degré de liberté laissé au représentant de l Etat doivent être utilisés à bon escient, selon le niveau de la structure des prix : - l automaticité peut être maximale, avec compétence liée du préfet (dans le prix d approvisionnement en particulier) et le système permet alors de maintenir un lien étroit avec les cours mondiaux des carburants ; - le dispositif réglementaire peut offrir davantage de liberté au préfet, ce qui confère à celui-ci des marges de manœuvre, notamment en cas de crise ou dans la négociation annuelle avec les distributeurs. La transparence passe enfin par une amélioration des conditions d administration des prix et de contrôle par les services de l Etat. Plusieurs lignes de coûts, auditées par la mission, sont sensibles à l évolution de certains paramètres (charges, rentabilité, volumes mis à la consommation ). Un audit annuel de ces lignes de coûts devrait être réalisé, de manière à s assurer, chaque année, de l adéquation aux coûts réels des lignes de coûts les plus sensibles (coût du fret, taux de passage dans les stocks et marges de distribution). Les entreprises devraient fournir à cet effet les éléments (comptes et factures) constatés l année précédente. La mission a constaté que les services de l Etat ne disposaient pas toujours des éléments, permettant d auditer chacun de ces coûts. Ainsi, ceux-ci n avaient pas d éléments sur le coût réel du fret entre la Martinique et la Guadeloupe ou à destination des îles de ce département. Ils ne disposaient pas non plus de la comptabilité analytique de la SARA permettant d identifier les charges réelles de stockage. Ces services ont donc besoin d une comptabilité analytique permettant de décrire les charges et les produits pour chaque carburant et chaque activité s il y a lieu (raffinage, stockage, distribution ). La transmission, en plus des liasses fiscales et des comptes, de la comptabilité analytique devrait être prévue par la réglementation. A cet égard, s agissant de la SARA, de la SRPP, des importateurs-distributeurs et des détaillants, les commissaires aux comptes pourraient donner un avis d expert sur le caractère fiable et documenté de la comptabilité analytique ainsi que sur le caractère raisonnable et pérenne des hypothèses et conventions sur lesquelles celle-ci est fondée, L administration devrait aussi disposer de tous les contrats liant un opérateur avec un prestataire ou un sous-traitant (ex. contrat d affrètement des navires dédiés ). Enfin, il pourrait être opportun que des échanges comparatifs se nouent entre les services déconcentrés des départements d outre-mer, confrontés aux mêmes difficultés.

64 - Rapport, page 27 - Pour autant, même si les services de l Etat disposent d informations plus nombreuses et d outils plus précis, l administration des prix restera un exercice difficile. Les éléments de référence permettant de comparer et d apprécier la rentabilité d un opérateur sont peu disponibles, compte tenu de la spécificité du système d approvisionnement des DOM. B. Pour les DFA, la mission propose une nouvelle formule de calcul du «prix de sortie SARA». A la place de la formule actuelle de calcul du prix de sortie SARA construite à partir du prix du brut importé et dont l évolution dépend de la «marge sur coûts variables de raffinage», très difficile à piloter la mission propose de substituer une formule de prix plus transparente, élaborée à partir du prix de marché des produits raffinés. Dans le cadre du maintien des prix administrés, les objectifs d une nouvelle formule devraient être notamment : - de permettre une meilleure adéquation avec le prix des carburants sur les marchés internationaux ; - d inciter les opérateurs à faire des gains de productivité, qui pourraient être répercutés sur le consommateur ; - de mieux répartir les surcoûts de la SARA entre tous les produits issus de la raffinerie ; - d être plus facilement auditable par les services de l Etat, chargés de l administration des prix. A cet effet, la mission propose une formule alternative comportant trois termes : - le prix de marché défini, pour chacun des deux produits raffinés (super et gazole), à partir des cotations à la source d approvisionnement à Rotterdam (incluant la prime de trading). Une moyenne de cotations autour de la date de chargement du bateau pourrait être retenue ; - le coût du fret (+ assurance + pertes en mer), au coût réel, régulièrement contrôlé ; - un élément représentatif du coût de maintien de la raffinerie (au prorata du volume des carburants routiers, de manière à répartir de manière équilibrée le surcoût de la SARA entre les carburants routiers et les autres carburants) 17. Ce troisième élément pourrait faire l objet d une contractualisation pluriannuelle entre la SARA et l Etat, de manière à inscrire dans la durée, autant que faire se peut, la stabilisation voire la réduction de ce surcoût. Cette formule pourrait être actualisée à chaque arrivée de bateau, sauf l élément de surcoût SARA qui serait défini une fois par an. L intérêt principal de la nouvelle formule de calcul est de donner une information précise et régulièrement actualisée sur les conditions de prix et de marché dans lesquelles les DFA sont approvisionnés en carburants raffinés et d éclairer le consommateur sur le surcoût de la SARA et son impact sur le prix de vente à la pompe. Cependant, cette formule, si elle permet de faire la transparence sur le coût lié au choix de raffiner du pétrole brut sur place en Martinique, pourrait être plus volatile que la formule précédente compte tenu de la variabilité du facteur lié au coût de la SARA calculé à partir des prix de marché des produits raffinés. 17 Cette répartition équilibrée aura comme effet d augmenter le prix de vente du carburéacteur vendu aux compagnies aériennes (mais cette production pourrait fortement décliner à compter de 2009) et du fuel lourd vendu à EDF.

65 - Rapport, page 28 - En outre, la mission propose, à des fins de simplification et de cohérence tant avec la nouvelle formule de calcul proposée qu avec la mutualisation du transport et du stockage sur l ensemble des trois DFA d avoir un prix plancher de référence dans les trois DOM approvisionnés par la SARA, fixé par le préfet de la Martinique. C. Il est possible de rendre le système de prix plus réactif en réduisant le décalage temporel entre le prix du carburant outre-mer et les cours mondiaux Le dispositif d administration des prix se traduit par un décalage important entre l évolution des cours mondiaux du pétrole et celle des prix à la pompe dans les DOM. L importance de ce décalage, à compter d août 2008, en période de chute brutale des cours mondiaux, a contribué aux protestations contre les prix encore élevés des carburants dans les DOM et contre l opacité de la méthode de calcul des prix. Ce décalage découle des dispositions mêmes des décrets et circulaires en vigueur. Ainsi en 2008, on constate que le prix de détail répercute avec retard les évolutions des cours mondiaux, avec un décalage qui peut aller jusqu à six mois à la Réunion, trois mois aux Antilles et cinq mois en Guyane. Le décalage entre le prix des carburants outre-mer et les cours mondiaux, instauré de fait par la réglementation mise en place depuis 1988, répondait à un objectif de lissage au bénéfice du consommateur, le décalage permettant de ne répercuter que progressivement la hausse des cours mondiaux. Il est vrai qu en période de baisse des cours, ce lissage conduisait à n en faire profiter le consommateur que progressivement, sauf si les préfets s écartaient de la formule de prix. Actuellement, suite aux manifestations du second semestre 2008 et à l incompréhension par le consommateur des mécanismes en jeu, la demande de transparence prévaut sur toute autre considération. Cet objectif conduit à réduire le plus possible l écart entre le prix arrêté par le préfet et les prix sur le marché mondial et donc à privilégier la réactivité par rapport aux tendances du marché plutôt que la progressivité par recours à un lissage qui aboutit à faire perdre de vue le prix réel du marché, à la hausse comme à la baisse. C est la raison pour laquelle la mission propose de caler strictement les délais d actualisation sur les données physiques, la date d arrivée du bateau et le temps d acheminement des carburants, bruts ou raffinés selon le cas : - à la Réunion, où le préfet a déjà ramené le délai d actualisation à deux mois, il est proposé d aller plus loin et de procéder à cette actualisation lors de chaque arrivée de bateau, soit tous les 20 jours ou, par souci de simplification, tous les 1 er du mois ; - aux Antilles, la nouvelle formule proposée par la mission (Cf. point B, supra) pour le prix de sortie raffinerie permettrait une meilleure corrélation avec les mouvements de prix sur les marchés internationaux, à la hausse comme à la baisse, une actualisation étant proposée lors de chaque arrivée de pétrole brut à la raffinerie ; - en Guyane, la mission propose de conserver la modification mensuelle des prix en fondant celle-ci sur les coûts d approvisionnements des bateaux arrivés en Guyane au cours du mois précédent.

66 - Rapport, page 29 - D. La mission a étudié la possibilité de transférer la compétence de fixation des prix des carburants. 1. Aux collectivités territoriales A la différence de la situation en métropole, l Etat ne tire aucune ressource fiscale des carburants outre-mer. Par contre, les collectivités territoriales sont directement concernées par le prix des carburants, qui constitue l assiette d une part importante de leurs ressources fiscales, l octroi de mer, l octroi de mer régional et la TSC. Les collectivités régionales votent d ailleurs le taux des ces impôts. Le transfert de la compétence de fixation des prix des carburants aux collectivités régionales leur confèrerait davantage de responsabilités en leur permettant d arbitrer entre l intérêt financier et budgétaire des collectivités et celui des consommateurs de carburants. Juridiquement, un tel transfert serait conforme à la Constitution mais nécessiterait une loi pour inscrire la fixation des prix des carburants dans les compétences des régions (Cf. en pièce jointe n 3, l analyse de la direction des affaires juridiques du ministère de l économie, de l industrie et de l emploi, saisie par la mission). On notera que cette compétence a été transférée aux collectivités de Polynésie Française et de Nouvelle-Calédonie, il est vrai dans un cadre juridique et institutionnel très différent de celui des DOM (Cf. pièce jointe n 2). Le recours à l article 73 de la Constitution qui crée une procédure d adaptation aux lois et règlements nationaux pourrait être envisagé mais les adaptations fondées sur ce dispositif (en l occurrence, ici, la fixation des prix des carburants) sont pérennes et aucun retour en arrière n est prévu si celui-ci ne donne pas satisfaction. Les collectivités d outre-mer (sauf la Réunion) pourraient d ailleurs décider elles-mêmes de cette adaptation si elles y sont habilitées par une loi. Dans la perspective d un transfert à une collectivité territoriale, il semblerait plus judicieux de prévoir un dispositif expérimental (ce qui nécessite une loi) assorti d une évaluation, pour en mesurer les difficultés et les conditions de mise en œuvre (mise à disposition de services instructeurs, gestion des conflits et des revendications de l une ou l autre des catégories d opérateurs etc..). Il est en effet probable que, en cas de conflit, les différents acteurs ne continuent à en appeler à l Etat et à demander son arbitrage. 2. A une autorité indépendante La compétence de fixation des prix des carburants pourrait également être transférée à une autorité indépendante, éventuellement à la commission de régulation de l énergie (CRE), sous réserve d un examen approfondi. Un décret pris après avis de l autorité de la concurrence, serait dans ce cas suffisant. Il est cependant probable que le recours à l Etat, en cas de conflit et de demande d arbitrage, se manifeste de la même manière que dans le cas d un transfert à une collectivité territoriale. Si la piste d un transfert de compétences devait être examinée, elle pourrait être soumise au débat public et approfondie au cours des Etats-Généraux de l outre-mer.

67 - Rapport, page 30 - IV. AU-DELA DES AJUSTEMENTS PROPOSES SUR LA STRUCTURE DE PRIX, LA MISSION A EXAMINE DES PISTES D EVOLUTION PLUS STRUCTURELLES L examen de la structure de prix (Cf. II) a montré que des marges d ajustement pouvaient représenter 10% environ du prix de vente TTC, sans modifier significativement le système d administration des prix. La lettre de mission a demandé que soit examinée une alternative à ce système, avec une éventuelle libéralisation des prix. Au cours des entretiens avec les élus et acteurs socioprofessionnels des quatre DOM, d autres pistes d évolutions et de réformes ont été évoquées, et notamment l importation de carburants raffinés provenant d Europe du nord, l approvisionnement, dans la zone géographique, en carburants ne respectant pas les normes européennes, la mise en place d un mécanisme de péréquation entre la métropole et l outre-mer. Pour chaque piste d évolution, la mission présente l impact financier sur le prix de vente au consommateur des carburants routiers, les contraintes juridiques quand elles existent et les conséquences sociales. De manière générale, ces propositions, quels que soient leurs avantages ou leurs inconvénients, ne sauraient être mises en œuvre à court terme. A. La libéralisation des prix des carburants outre-mer ne semble envisageable qu au stade de la distribution 1. La libéralisation de l approvisionnement et du stockage n est pas possible en raison de leur caractère monopolistique La suppression de tout prix administré apparaît difficilement envisageable, compte tenu des caractéristiques actuelles du marché : - dans une situation de droit commun, analogue à celle de la métropole, il est probable que les prix de détail seraient plus réactifs et suivraient davantage l évolution des cours mondiaux et des prix de la métropole. Il y aurait des gains incontestables en termes de simplicité et de transparence, souhaités par l ensemble des acteurs. Pour autant, il est tout aussi probable que le niveau des prix pour le consommateur ne serait pas significativement réduit, en raison d une situation monopolistique sur les approvisionnements ; - l étroitesse du marché de consommation et l obligation de livrer des carburants aux normes européennes, au milieu de zones géographiques qui n y sont pas soumises, sont à l origine de monopoles de fait à l entrée de la filière carburants, cette situation étant pérennisée même en cas de suppression de tout encadrement des prix : au niveau de l approvisionnement, la libéralisation n aurait pas pour effet d ouvrir le marché à la concurrence. La mutualisation et le partage des achats entre les importateurs se poursuivraient dans la mesure où le marché est trop petit et trop contraignant pour justifier plusieurs approvisionnements. L entente entre importateurs serait pérennisée, avec un prix d approvisionnement monopolistique et élevé, qui serait répercuté sur le prix de détail. Cette situation caractériserait aussi bien le regroupement des importateurs / distributeurs à la Réunion, que les distributeurs des Antilles et de Guyane qui sont les actionnaires de la SARA ; au niveau du stockage, les capacités de stockage sont exclusivement détenues par un seul opérateur par département. En cas de libéralisation complète des prix, ce monopole de fait pourrait conduire à la détermination d un prix monopolistique élevé, le coût d entrée pour un second stockage étant disproportionné par rapport au marché. Ainsi, dans l état actuel du marché, la mission préconise de ne pas libéraliser les prix au stade de l approvisionnement et du stockage.

68 - Rapport, page La libéralisation de la distribution peut être envisagée mais il ne faut pas sousestimer les conséquences sociales Dans chaque DOM, la distribution est assurée par plusieurs opérateurs (de 3 en Guyane à 7 en Guadeloupe) et plusieurs dizaines de stations-services. Il n y a donc pas de monopole de droit ou de fait à ce stade de la filière carburants. A la différence de l approvisionnement ou du stockage, en situation de monopole, la réglementation des prix au niveau de la distribution des carburants n a pas de fondement économique : il s agit d une situation héritée de la période antérieure à 1986 au cours de laquelle avait été mise en place (en métropole) une marge de détail spécifique destinée à protéger les indépendants. Avec la libéralisation de la distribution, l Etat continuerait à fixer le prix à la sortie des dépôts (SARA ou SRPP) mais il cesserait de fixer le prix maximum des marges de gros et de détail : les prix d approvisionnement des stations-services et de vente au détail s ajusteraient librement sur le marché. Le parallélisme des comportements entre les opérateurs autour du «prix unique» fixé par le préfet serait remis en cause. Chacun des opérateurs pourrait être incité à gagner des parts de marché en baissant ses prix, que ce soit dans la distribution de gros ou celle de détail. On pourrait donc assister à l apparition d une certaine concurrence 18 par les prix. En pratique, deux types de comportements pourraient apparaître dans la distribution de détail : d un côté, le détaillant souhaitant accroître ses parts de marché en abaissant ses prix le plus possible serait amené à développer le libre-service et à automatiser la distribution du carburant ; de l autre, le maintien d un service à la pompe irait de pair avec un prix de vente plus élevé. Il serait légitime que le consommateur qui aujourd hui n a pas l occasion d exprimer son choix, puisse choisir entre ces deux modèles de distribution, et arbitrer entre le maintien du service à la pompe et un prix moins élevé des carburants. Il est possible qu à terme, comme en métropole, le consommateur choisisse le niveau de prix, ce qui se traduirait par une réduction progressive du nombre d emplois. La mission a considéré que 80 % des emplois actuels, soit personnes environ pour les quatre DOM, pourraient être concernés à l issue de la convergence vers le système de distribution en vigueur en métropole. Une partie des emplois serait en effet conservée dans les boutiques et certaines activités associées à la vente des carburants (maintenance, direction notamment). Le processus, qui a duré moins d une dizaine d années en métropole, pourrait être un peu plus long dans les DOM dans la mesure où la distribution de carburants par les supermarchés, qui était très largement développée en métropole quand a démarré la libéralisation, n existe pas encore dans ces départements. Si les prix au niveau de la distribution étaient libéralisés, il serait indispensable de l accompagner de mesures d information des consommateurs et de contrôle des conditions de mise en œuvre de la concurrence : affichage des prix de vente dans les stations-services (ce qui n existe pas aujourd hui avec le prix unique), relevés de prix réguliers par les services de la DDCCRF et publication sur internet de leurs résultats, enquêtes régulières pour s assurer que ne se mettent pas en place des ententes ou des abus de positions dominantes. Tableau 14 : impact théorique sur le prix du litre de carburant d une généralisation du libre-service dans les stations-services, à l issue du processus (en centimes /litre) Supercarburant et gazole Source : mission Guyane Guadeloupe Martinique Réunion - 4,3-6,4-3,5-4,3 18 Il existe quelques pratiques concurrentielles avec des remises sur le prix de gros et l existence de cuves privées approvisionnées directement par les grossistes.

69 - Rapport, page 32 - Si la perspective d une libéralisation totale de la distribution paraissait politiquement et socialement difficile, une solution intermédiaire pourrait être plus facilement mise en œuvre : au lieu de fixer la marge de gros et la marge de détail, l Etat pourrait administrer une seule marge de distribution, résultant de la fusion des marges de gros et de détail. Des relations de marché pourraient commencer à s instaurer entre les distributeurs et les gérants de stations-services et se substitueraient progressivement aux demandes d arbitrage régulièrement adressées à l Etat par ces derniers. En effet, la mission ayant constaté que les rémunérations des grossistes et des détaillants ne correspondaient pas aux marges de gros et de détail arrêtées par le préfet, il apparaît préférable de renvoyer à la négociation entre grossistes et détaillants la répartition de la marge globale de distribution. Cette négociation devrait aussi permettre de régler le niveau de la rémunération du gérant de station-service, ce qui apparaît préférable à la solution d un encadrement qui devrait être mis en place si les deux marges de distribution restaient administrées. Enfin, les schémas de libéralisation totale de la distribution ou de fusion de la marge de gros et de détail pourraient être mis en œuvre au cas par cas, département par département. B. Le stockage constitue une facilité essentielle, dont il faut tirer toutes les conséquences Dans chacun des DOM, le stockage constitue un monopole de fait, opéré par la SARA dans les trois départements des DFA et par la SRPP à la Réunion. Dans ce département, le stockage pose une difficulté particulière puisque la SRPP est à la fois le stockeur unique et le concurrent de ses clients dans la distribution. La création d un stockage concurrent se traduirait par un «ticket d entrée» très élevé (duplication des coûts fixes), non justifié par les volumes mis à la consommation dans chaque département. A ce titre, le stockage est une facilité essentielle puisqu il n est pas reproductible à un coût acceptable tout en étant indispensable à l exercice d une activité de distribution. Dès lors, des garanties doivent être mises en place pour éviter toute discrimination à l égard d éventuels nouveaux entrants : - la tarification des prestations doit être transparente, publique, calculée à partir des coûts, et non discriminante ; - l accès aux capacités de stockage doit être équitablement réparti entre tous les opérateurs, notamment les nouveaux entrants. S agissant de la capacité des cuves de stockage qui est actuellement strictement ajustée tant à la Réunion que dans les DFA, à la taille et au nombre de rotations du pétrolier deux éléments tendent à montrer qu elle n est sans doute pas optimum : - l obligation de stockage stratégique, fixée dans les DOM à 20% des quantités mises à la consommation (soit 73 jours de stocks) n est pas pleinement respectée, notamment pour le gazole 19, ce qui peut laisser penser que la capacité de stockage n est pas totalement suffisante ; - certains opérateurs ont indiqué à la mission que des difficultés d accès au stockage limitaient leur entrée sur le marché. En fait, la mission n a pas eu connaissance de démarche formelle de demande d accès au dépôt ni, a fortiori, de décision de refus. Cette question a cependant été évoquée à plusieurs reprises, en Guadeloupe et à la Réunion notamment. S agissant de la tarification, celle-ci doit reposer sur une comptabilité qui permette de distinguer les activités de stockage des autres activités (raffinage à la SARA, distribution et embouteillage du gaz à la SRPP) de manière à vérifier la vérité des coûts et, en particulier, que le stockage ne finance pas pour partie d autres activités. Dès lors, dans cette situation de monopole, l activité de stockage devrait disposer d une comptabilité séparée, facilement auditable. 19 Les stocks de gazole étaient de 36 jours aux Antilles et 31 jours en Guyane lorsque la mission a commencé ses travaux (début décembre 2008). Ils étaient respectivement de 51 et 63 jours pour le supercarburant.

70 - Rapport, page 33 - Au-delà de cette séparation comptable il est possible de filialiser l activité de stockage, comme cela a pu être fait dans d autres secteurs, comme le gaz, par exemple. Cette filialisation pourrait aussi être assortie d obligations de services publics de manière à favoriser l arrivée sur le marché de nouveaux distributeurs. Le président de l Autorité de la concurrence a été récemment saisi pour avis par le ministre en charge de l outre-mer sur les problèmes de concurrence dans les DOM. Dans ce cadre, il pourrait rendre un avis plus documenté sur ces différentes possibilités et recommander la solution qui lui paraîtrait la plus adaptée face à ce risque concurrentiel. Les solutions pourraient d ailleurs être différentes pour la SRPP à la Réunion et la SARA dans les DFA. C. Le scénario d un approvisionnement en produits raffinés depuis l Europe du Nord alternatif à l activité de raffinage de la SARA Le coût du raffinage effectué par la SARA est plus élevé que celui d une raffinerie européenne de taille standard (Cf. supra, II). Ce surcoût résultant des coûts fixes de la raffinerie, liés à sa petite taille et à sa situation ultra-marine, a été évalué, en moyenne sur la période , à 19 centimes/litre environ pour le supercarburant et 11 centimes/litre pour le gazole, soit un surcoût annuel pour les consommateurs antillais et guyanais de l ordre de 100 millions. Dans ces conditions, la mission a évalué le gain que représenterait pour les consommateurs un approvisionnement direct en produits raffinés issus de mer du Nord, en utilisant un mécanisme analogue à l approvisionnement réalisé à la Réunion (cotation Rotterdam + fret + prime de trading) sur la base de laquelle serait établi le nouveau «prix de sortie SARA». Il en résulterait, pour le consommateur final, un gain de l ordre de 15 à 17 centimes pour le supercarburant et de 7 à 9 centimes pour le gazole, compte tenu d un coût moyen du fret et des coûts d approvisionnement. En cas de fermeture de l activité de raffinage qui serait, à moyen terme, la conséquence d un approvisionnement à moindre coût en produits directement raffinés les emplois de la raffinerie (soit 190 emplois directs en 2007) ne pourraient être maintenus. Seuls seraient conservés les emplois du stockage soit environ 70 personnes sur les trois DFA. Si l activité de raffinage est conservée, le coût annuel par emploi direct de raffinage et indirect, est estimé entre et Au demeurant, si la solution d une fermeture de la raffinerie devait être privilégiée, elle ne pourrait être mise en œuvre qu à moyen terme et entraînerait des coûts 20 de fermeture et de reconversion. Il conviendrait en effet de reconvertir l entreprise en centre de stockage, de reclasser les personnels et de remettre en état et requalifier le site. D. La voie d un approvisionnement en carburants issus de zones géographiques plus proches des DOM n est pas envisageable à court/moyen terme et une dérogation aux normes européennes est incertaine 1. Les possibilités d approvisionnement en carburants aux normes européennes depuis des Etats proches des DOM sont inexistantes actuellement Dans les Etats proches de la Réunion (Kenya, Tanzanie, Maurice), les normes applicables sont très éloignées des normes européennes. La teneur en soufre, pour ne prendre que ce critère, y est comprise entre 500 et ppm. Il ne peut donc être envisagé de recourir à un approvisionnement commun, par exemple, avec Maurice. 20 Le chiffre de 123 M a été évoqué par Total qui avait étudié, en 2002, un tel scénario.

71 - Rapport, page 34 - Les raffineries des Etats proches des Antilles et de la Guyane (Brésil, Venezuela, Curaçao, Surinam et Trinidad-et-Tobago) produisent des carburants qui, actuellement, ne sont pas aux normes européennes (cf. pièce jointe n 4). Aux Etats-Unis, certaines raffineries produisent des carburants proches de ces normes mais divergent sur certaines spécifications (teneur en soufre et indice de cétane par exemple pour le gazole), avec des conséquences défavorables sur les moteurs des automobiles disponibles aux Antilles. Cependant, dans un avenir assez proche, la situation pourrait évoluer pour la zone Antilles Guyane : certaines raffineries (Venezuela et Trinidad et Tobago) pourraient produire des carburants avec une teneur en soufre de 10 ppm à l horizon 2010 ; des raffineries vénézuéliennes s aligneraient sur les normes américaines d ici 6 à 8 ans puis sur les normes européennes d ici 10 ans. Dans ces conditions, il pourrait être opportun de mettre en place un dispositif de veille sur l évolution des carburants disponibles dans la zone. S agissant de la Réunion, la mission n a pas eu connaissance d une évolution des conditions d approvisionnement en carburants aux normes européennes dans les prochaines années. En tout état de cause, l approvisionnement en produits raffinés ne répondant pas aux normes européennes ne présenterait pas d avantage significatif en termes de coût 21 sauf à accepter des produits très éloignés de ces normes (5 000 ppm). 2. La mission a examiné la possibilité d une dérogation aux normes européennes La directive «carburants» 98/70 CE modifiée le 17 décembre 2008 dispose que «les Etats membres peuvent prévoir, pour les régions ultrapériphériques, des dispositions spécifiques pour l introduction d essence d une teneur en soufre maximale de 10mg/kg» sous réserve qu ils en informent la Commission européenne. Dans la mesure où les normes européennes sont aussi définies à partir d autres spécifications que le soufre, la mission s est interrogée sur la portée de la dérogation définie par la directive précitée. Compte tenu des informations fournies par la Commission européenne et la représentation permanente de la France auprès de l Union européenne, des incertitudes subsistent. La mission considère que seule une saisine de la Commission par le Gouvernement pourrait permettre de clarifier cette question, s il apparaissait opportun de poursuivre dans la voie de la dérogation aux normes européennes. Les avantages et inconvénients d une telle dérogation, si celle-ci s avérait juridiquement possible au regard des règles communautaires, devraient en effet être pesés : protection de l environnement et compatibilité avec les objectifs du Grenelle de l environnement, possibilité d extension aux autres DOM, conséquences sur l activité de raffinage de la SARA,, protection de la santé publique, impact sur le parc automobile existant, conséquences sur le niveau des prix. E. Une péréquation des prix des carburants entre la métropole et les DOM comporterait beaucoup de difficultés. Un certain nombre d interlocuteurs de la mission ont évoqué l idée d une péréquation entre la métropole et les départements d outre-mer, pour répondre à l objectif de continuité territoriale, qui prévaut déjà dans la tarification de l électricité ou la desserte aérienne. L idée consisterait à définir un prix à la pompe identique outre-mer et en métropole. Elle se heurterait à de très lourdes difficultés de mise en œuvre : - un prix de référence unique en métropole ne peut être défini dans la mesure où, les prix étant libres, des écarts très importants existent entre les différents points de vente. On ne peut donc définir de prix à la pompe identique outre-mer et en métropole, sauf à passer par des prix moyens ; 21 Par exemple, les prix moyens du gazole 50 ppm à Singapour entre Janvier 2005 et octobre 2008 ont été presque identiques à ceux du gazole 500 ppm coté dans le golfe Persique.

72 - Rapport, page la vente du carburant outre-mer à un prix unique, identique à ce prix moyen, comporterait un risque majeur la contagion de la demande de péréquation aux zones métropolitaines où le carburant est vendu avec un écart par rapport à ce prix moyen et une difficulté méthodologique, la fréquence d actualisation de ce prix moyen, les prix variant quotidiennement en métropole ; - les structures de prix des carburants étant hétérogènes entre la métropole et l outre-mer, un système de compensation complexe devrait être mis en place pour tenir compte, à chaque stade de la structure de prix, de la compression des rémunérations et marges de chacun. Ces compensations prendraient la forme de subventions aux opérateurs. Elles seraient vraisemblablement qualifiées d aides d Etat et devraient être notifiées à la Commission. La compatibilité avec le droit communautaire n irait pas de soi ; - si la péréquation consistait, pour contourner les difficultés précitées, à fixer un prix unique hors-taxes, le prix à la pompe outre-mer serait la plupart du temps inférieur à celui de la métropole, dans la mesure où le niveau des taxes y est inférieur ; - l écart de prix à compenser (sur la base des écarts de prix moyens hors-taxes constatés en 2008) serait de l ordre de 276 millions par an, pour les quatre départements d outremer. Un grand nombre des pistes de propositions décrites dans le présent chapitre ont des implications financières pour le consommateur final mais aussi des conséquences sociales et politiques pour les salariés ou certains intervenants protégés de la concurrence par le système des prix administrés. Dans ces conditions, ces pistes de proposition pourraient faire l objet de débats publics dans le cadre des prochains Etats-Généraux de l outre-mer et donner l occasion de confronter le point de vue des professionnels engagés dans la distribution des carburants avec celui des consommateurs, plus rarement entendus.

73 - Rapport, page 36 - V. SYNTHESE DES ECONOMIES POTENTIELLES SUR LE PRIX DES CARBURANTS Tableau 15 : synthèse des économies potentielles sur le prix des carburants en Guyane (en c /l) En c /l Supercarburant Gazole Révision des différentes lignes de prix sans Entre -6,3 et -7,2 Entre -5,9 et -6,8 mutualisation (1) Révision des différentes lignes de prix avec Entre -11,2 et -12 Entre -10,8 et -11,6 mutualisation (2) Répartition du surcoût SARA (3) Economies minimales à court terme sans Entre -17,3 et -18,2 Entre - 8,9 et - 9,8 mutualisation (1) +(3) Changement du mode d approvisionnement (4) Changement du mode de distribution (5) - 4,3-4,3 Economies maximales à moyen terme si réformes et Entre -32,5 et -33,3 Entre -24,1 et -24,9 mutualisation (2)+(4)+(5) Source : mission Tableau 16 : Synthèse des économies potentielles sur le prix des carburants pour la Guadeloupe (en c /l) En c /l Supercarburant Gazole Révision des différentes lignes de prix sans Entre -2,5 et -3,3 Entre -2,3 et -3,1 mutualisation (1) Révision des différentes lignes de prix avec Entre -1,7 et -2,4 Entre -1,5 et -2,4 mutualisation (2) Répartition du surcoût SARA (3) Economies minimales à court terme sans Entre -13,5 et -14,3 Entre -5,3 et -6 mutualisation (1) + (3) Changement du mode d approvisionnement (4) Changement du mode de distribution (5) -6,4-6,4 Economies maximales à moyen terme si réformes et Entre -25,2 et -25,9 Entre -16,9 et - 17,8 mutualisation (2)+(4)+(5) Source : Mission.

74 - Rapport, page 37 - Tableau 17 : Synthèse des économies potentielles sur le prix des carburants pour la Martinique (en c /l) En c /l Supercarburant Gazole Révision des différentes lignes de prix sans Entre -2,8 et -3,6 Entre -2,6 et - 3,4 mutualisation (1) Révision des différentes lignes de prix avec Entre - 2 et -2,8 Entre -1,7 et - 2,7 mutualisation (2) Répartition du surcoût SARA (3) Economies minimales à court terme sans Entre -13,8 et 14,6 Entre -5,6 et -6,4 péréquation (1)+(3) Changement du mode d approvisionnement (4) Changement du mode de distribution (5) -3,5-3,5 Economies maximales à moyen terme si réformes et Entre -22,5 et -23,3 Entre -14,2 et -15,2 mutualisation (2)+(4)+(5) Source : Mission Tableau 18 : Synthèse des économies potentielles sur le prix des carburants à la Réunion (en c /l) Supercarburant Gazole Révision des différentes lignes de la structure de prix Entre -3,4 et -4,2 Entre -3,5 et -4,3 Changement du mode de distribution -4,3-4,3 Economies minimales à court terme après révision de la structure des prix Entre -3,4 et -4,2 Entre -3,5 et -4,3 Economies maximales à long terme si réformes Entre -7,7 et -8,5 Entre -7,8 et -8,6 Source : mission Paris, le 31 mars 2009 L Inspectrice générale des finances L Ingénieur général des Mines L Inspecteur général de l administration Gilles BELLEC Jean-Guy de CHALVRON L Inspecteur des finances L Inspecteur des finances L inspecteur de l Administration Thomas CAZENAVE Thibaut SARTRE Nicolas CLOÜET

75 Annexe 1 b Rapport de l Autorité de la concurrence (Avis n 09-A-21 du 24 juin 2009 relatif à la situation de la concurrence sur les marchés des carburants dans les départements d'outre-mer)

76 Avis n -A-21 du 24 juin 2009 relatif à la situation de la concurrence sur les marchés des carburants dans les départements d outre-mer (1) L Autorité de la concurrence (section 1A), Vu la lettre enregistrée le 18 février 2009, sous le numéro 09/0014 A, par laquelle le Secrétaire d Etat à l outre-mer a saisi l Autorité de la concurrence pour avis sur la situation de la concurrence dans les départements d'outremer (DOM), et plus particulièrement dans le secteur des carburants et de l'importation et la distribution des produits de grande consommation ; Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence ; Le rapporteur, le rapporteur général adjoint, et la commissaire du Gouvernement entendus au cours de la séance du 16 juin 2009 ; Les représentants des sociétés Total Outremer, Compagnie Antillaise des Pétroles (CAP) et West Indies Petroleum Company (WIPCO), ainsi que Mme Anne Bolliet, inspectrice générale des finances et M. Thibaut Sartre, inspecteur des finances, entendus sur le fondement des dispositions de l article L du code de commerce ; Est d avis de répondre à la demande présentée dans le sens des observations suivantes. (1) VERSION NON CONFIDENTIELLE : les passages en blanc ou entre crochets sont protégés par le secret des affaires. 1

77 SOMMAIRE I.Introduction... 5 II.I. La réglementation des prix des carburants dans les DOM... 5 III.II. Description des marchés des carburants dans les DOM... 5 A.Le fonctionnement du segment amont L approvisionnement de marchés de taille réduite Les limitations au développement du stockage Le caractère de monopoles naturels des activités amont... 6 B.Le fonctionnement du segment aval Les réseaux de distribution dans la zone Caraïbes Les réseaux de distribution à La Réunion L évolution des marges de distribution La situation des grossistes IV.Ratios de gestion des grossistes-importateurs dans les DOM La formation des prix de détail a)un système de prix imposés b)les rabais accordés aux indépendants c)des redevances variables pour les stations en location-gérance d)les disparités entre locataires-gérants en concurrence e)les disparités entre indépendants et locataires- gérants f)la politique de remontée des recettes B.Appréciation globale sur le système actuel La régulation actuelle a échoué à maîtriser les marges La régulation actuelle perturbe la fiscalité des DOM V.III. Il faut réformer et rendre plus efficace la régulation des prix A.Le marché amont de l approvisionnement L approvisionnement aux Antilles a)le raffinage local b)les achats de produits raffinés L approvisionnement à La Réunion a)l achat des produits b)le fret Conclusion sur l approvisionnement B.Le stockage

78 1.Le stockage aux Antilles et en Guyane Le stockage à La Réunion a)la clarification de la situation de la SRPP b)le stockage du carburéacteur Conclusion sur le stockage C.Le segment aval de la distribution La régulation des prix de gros Le marché de détail a)les conséquences des prix de détail imposés b)la proposition de l Autorité Les obstacles structurels à la concurrence a)les marchés de gros aux Antilles et en Guyane b)les marchés de gros à La Réunion c)les risques de dominance sur les zones de chalandise d)le rôle d aiguillon de la concurrence des stations indépendantes e)l approvisionnement des zones peu peuplées ou isolées Les obstacles comportementaux à la concurrence a)libre-service et automates b)l arrivée de la grande distribution sur ce marché c)le niveau d emploi n est pas régulé d)la concurrence par la qualité du service e)une période transitoire permettant l observation du marché VI.IV. Synthèse des propositions L achat des produits Le fret Les mesures structurelles sur le stockage Les mesures destinées à maintenir la fluidité des réseaux Les prix de gros La mise sous surveillance des prix de détail Une expérimentation pendant trois ans VII.Conclusion

79 I. Introduction Par lettre enregistrée le 18 février 2009 sous le numéro 09/0014 A, le Secrétaire d État à l outre-mer a saisi l Autorité de la concurrence pour avis sur la situation de la concurrence dans les départements d'outremer (DOM), et plus particulièrement dans le secteur des carburants et de l'importation et la distribution des produits de grande consommation. Le Gouvernement relève, en effet, que les économies locales des territoires ultra-marins se caractérisent par «des marchés naturels étroits, éloignés de la métropole, peu ouverts sur leur environnement régional, très cloisonnés», et que «les économies insulaires se prêtent ainsi à deux types d'organisation de marchés qui ne se retrouvent pas dans les économies d'europe continentale à un même degré de sensibilité : d'une part des monopoles ou oligopoles liés à l'étroitesse du marché (grande distribution, transport aérien, carburants, oxygène médical...) ; d'autre part des monopoles ou oligopoles liés aux réseaux d'acheminement (fret, port, grossistes et importateurs...). En conséquence, les conditions d'une concurrence saine peuvent être affectées tant d'un point de vue horizontal par la présence de peu d'acteurs sur un même marché que d'un point de vue vertical par ce même phénomène qui se retrouve à plusieurs étapes d'une même filière». Il s agit donc d une saisine extrêmement large puisqu elle vise les mécanismes de formation des prix sur un grand nombre de marchés de détail sur l ensemble des départements d outre-mer. Compte-tenu de l ampleur de la matière, l Autorité a décidé de traiter séparément la question des carburants, ce secteur présentant des spécificités qui ne se retrouvent pas sur les autres marchés de biens, principalement le fait que les prix de ventes au détail des carburants routiers dans les DOM sont réglementés par l Etat. Les analyses ont porté sur les départements de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane et de La Réunion ; en revanche, Mayotte et St-Pierre-et-Miquelon n ont pas fait l objet d études particulières. II. I. La réglementation des prix des carburants dans les DOM Les marchés de carburants dans les DOM dérogent au principe général de la liberté des prix instauré par l ordonnance du 1er décembre 1986 et codifié à l article L du code de commerce qui dispose que : «Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les prix des biens, produits et services relevant antérieurement au 1er janvier 1987 de l'ordonnance n du 30 juin 1945 sont librement déterminés par le jeu de la concurrence.». Il est possible de déroger à ce principe dans des conditions très limitées décrites au même article dans les termes suivants : «Toutefois, dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de monopole ou de difficultés durables d'approvisionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d'etat peut réglementer les prix après consultation de l'autorité de la concurrence». En l espèce, le Conseil de la concurrence avait considéré dans un avis 88-A-04 du 16 mars 1988 que cette réglementation des prix était possible du fait que dans les différents DOM «l approvisionnement en produits pétroliers est assuré par une seule entreprise qui contrôle à, la fois les opérations en raffinerie [cas des Antilles], d importation [cas des Antilles et de la Guyane] et de stockage [cas des Antilles, de la Guyane et de la Réunion] / et où l absence de concurrence au stade des prix de gros limite la concurrence par les prix dans la distribution de détail.». Il faut relever que cet avis, plutôt succinct, avait pour unique objet de 4

80 vérifier que le projet de décret présenté par le Gouvernement entrait dans les prévisions de la loi. Il ne présentait pas une analyse concurrentielle détaillée des marchés concernés. En s appuyant sur cet avis, le gouvernement a instauré, par plusieurs décrets du 17 novembre 1988, une réglementation des prix de gros et de détail de certains produits, dont le super carburant, l essence et le gazole, à l exception notable du carburéacteur acheté par les compagnies aériennes pour leurs avions. Cette réglementation s applique également aux prix de gros et de détail de la bouteille de gaz domestique (GPL) de taille standard (12,5 kg), produit de consommation courante également distribué par les compagnies pétrolières. Ces prix sont des maxima qui sont remis à jour dans les différents départements par des arrêtés préfectoraux, avec une périodicité trimestrielle ou parfois mensuelle, en fonction de l évolution des coûts sous-jacents. Pour les Antilles, un décret du 23 décembre 2003, pris après l avis du Conseil de la concurrence 02-A-09 du 25 juin 2002, est venu renforcer sensiblement cette réglementation en fixant la structure de coût à prendre en compte, notamment la cotation du brut de référence pour la matière importée, le taux de change du dollar américain, le coût du fret et la masse salariale. Ce décret donne plus de marge d initiative au préfet et, surtout, modernise quelque peu l approche de la régulation des prix puisqu il demande que les variations du prix maximum autorisé tiennent compte «des efforts de productivité consentis par les grossistes et les détaillants», exigence désormais classique dans une régulation de type «price cap» qui ne se contente pas de fixer un prix destiné à systématiquement couvrir l ensemble des coûts exposés par l entreprise régulée, mais essaye de donner une incitation à la diminution de ces coûts. Toutefois, en 2003, le Conseil de la concurrence s est borné, comme en 1988, à donner un avis sur le projet de décret qui lui était soumis sans analyser la situation de la concurrence sur les marchés destinés à être régulés. On peut, à ce stade, faire une première remarque générale : la situation de monopole n a été identifiée que sur le marché de gros au stade de l approvisionnement des départements concernés, donc à l amont du circuit de distribution, alors que la régulation des prix a été, dès l origine, appliquée aux prix de détail. Certes, certains coûts amont relevant de situations de monopole sont régulés, comme les tarifs de passage dans les installations de stockage, les tarifs de cabotage entre les îles antillaises ou les prix de sortie de la raffinerie de la Martinique, mais l architecture de la régulation repose in fine sur la régulation des prix de détail. Dans ces conditions, la fixation de certains prix de gros n a pas d autre effet, et d ailleurs pas d autre objectif avoué, que d assurer une certaine répartition des revenus entre les opérateurs de la chaîne verticale de distribution, sans conséquence pour le consommateur final puisque l empilement de ces coûts intermédiaires sera, au bout du compte, toisé par la fixation d un prix de détail maximum. Le dispositif est donc paradoxal puisque le marché de détail, qui apparaît potentiellement concurrentiel, est maintenu sous une régulation stricte alors que la régulation des marchés de gros, dont la justification économique est la plus forte, ne joue qu un rôle subsidiaire. Ce choix se justifie d autant moins que la régulation classique des prix de détail - tarifs des services publics, prix des médicaments, tarif horokilométrique des taxis, par exemple prend souvent la forme d une indexation qui suit plus ou moins la dérive des coûts, ce qui permet à l État de ne réviser ces prix qu annuellement ou semestriellement à partir de données produites par ses propres services, comme les indices de l INSEE. Tout au contraire, les prix de détail des carburants sont assez volatils, particulièrement ces dernières années. Pour être efficace, la régulation tarifaire des carburants doit donc intégrer les fluctuations quotidienne après écoulement des stocks, des prix des produits pétroliers et du cours du dollar, monnaie de facturation de ces produits, ou se résoudre à procéder périodiquement à des lissages de prix suivis de mouvements de rattrapage, qui conduisent l administration à intervenir dans un 5

81 contexte difficile, marqué notamment par une forte asymétrie d information vis-à-vis des entreprises régulées. Dans ce contexte de réglementation des prix, l Autorité n a pas pour objectif d apprécier, dans son avis, le niveau absolu des prix des carburants et encore moins leur niveau relatif par rapport au pouvoir d achat dans les départements concernés. Son rôle est d examiner leur mode de formation actuel et son évolution possible dans l hypothèse d une modification de la réglementation. III.II. Description des marchés des carburants dans les DOM Les volumes de carburants distribués dans les DOM se répartissent de la façon suivante : Volumes en m³ * Gua delo upe Population hab Gazole (dont 267 FOD **) 000 Super sans 135 plomb 000 Sous-total 402 réglementé (dont carburants routiers) Mar tiniq ue hab Guy ane hab Réu nion hab Carburéacteur Total nc *les quantités exprimées en tonnes sont plus faibles car la densité moyenne de carburants est environ de 0,8 c est-à-dire qu un m³ ne pèse que 0,8 tonne. ** Le FOD est un gazole destiné à des usages professionnels ; lorsqu il est détaxé il a une couleur différente du gazole routier ordinaire pour éviter la fraude. Le rapport des volumes de gazole et de super, en comptant le gazole détaxé, est de deux tiers/ un tiers à la Guyane et La Réunion, qui ont les deux territoires les plus étendus, alors que la Guadeloupe et surtout la Martinique ont un ratio encore inférieur à 60% de gazole, la Martinique étant même proche de la parité 50/50, hors gazole détaxé. On note aussi que la consommation de carburants routiers par habitant en Guyane est nettement plus faible qu aux Antilles et à La Réunion, qui se rapprochent de plus en plus de la situation de la métropole, malgré des distances de parcours bien moindres, ce qui dénote un usage intensif de l automobile dans ces départements. La particularité des DOM est la proportion très importante du carburéacteur dans l ensemble des carburants vendus en comparaison d un département métropolitain standard. Cette exception 6

82 traduit le fait que ces départements accueillent, du fait de l insularité ou de l isolement, un aéroport international. A. Le fonctionnement du segment amont Dans tous les DOM, l approvisionnement en carburants se fait au travers de mécanismes de monopole : monopole de l achat et de l acheminement des produits, monopole du raffinage dans le cas de la Martinique, monopole du stockage. Ce sont ces situations de monopole qui ont justifié la régulation des prix. Mais cette situation générale ne doit pas masquer des situations particulières à chaque DOM, ce qui rend l analyse de l amont relativement complexe. 1. L approvisionnement de marchés de taille réduite Les Antilles disposent d une raffinerie installée en Martinique et exploitée par la Société Anonyme de la Raffinerie des Antilles (SARA), filiale de quatre distributeurs locaux (Total, Rubis-Vito, Exxon et Chevron) qui est approvisionnée en pétrole brut principalement depuis l Europe du Nord avec des prix calés sur les cotations de la zone Rotterdam. Cette production locale ne couvrant qu une partie de la consommation, la SARA importe également des produits raffinés qui sont achetés, pour des raisons liées aux normes environnementales communautaires, à des raffineries de la zone européenne. La raffinerie de la SARA est de petite taille par rapport aux normes de rentabilité de ce type d équipement. Le rapport sur les prix des carburants dans les DOM de la mission conjointe menée par l Inspection générale des finances, l inspection générale de l administration et le Conseil général des mines (ci-après la Mission IGF-IGA-CG Mines) fournit une analyse très complète des handicaps structurels de cette raffinerie en termes de coûts de production. Malgré ses modernisations successives et ses efforts de productivité, une raffinerie de petite taille, sans autre débouché qu un marché captif également limité, est aujourd hui un outil obsolète qui contribue au renchérissement des prix. Il est donc admis que le raffinage local, lorsqu il existe, n est pas un secteur potentiellement concurrentiel et la question posée est donc plutôt celle de sa pérennité. Une fois les carburants sortis de la raffinerie, les circuits de livraison vers chaque île présentent des différences. La Martinique est approvisionnée directement grâce à la production locale puisque la raffinerie se trouve sur son sol. La Guadeloupe et les îles rattachées (Marie-galante, Désirade, les Saintes) sont approvisionnées pour partie par cabotage depuis la Martinique et pour partie par livraison directe au port pétrolier de Pointe-à-Pitre de produits raffinés importés sans passage par la Martinique. La Guyane est approvisionnée en carburants routiers depuis la Martinique par un bateau dédié, le Kerfons, affrété en commun par les trois distributeurs locaux (Total, Chevron et Rubis). Ce bateau de faible tirant d eau peut seul accéder au port de Degrad des Cannes, près de Cayenne, dont la configuration et la profondeur ne permettent pas d accueillir des tankers classiques. L approvisionnement en produits non soumis aux normes environnementales européennes, comme le carburéacteur, se fait toujours depuis Trinidad et Tobago avec le même navire dédié. La Réunion, qui ne dispose pas de raffinerie, est approvisionnée directement depuis Singapour par un bateau dédié, affrété en commun ou plus exactement à tour de rôle, par les quatre importateurs locaux (Total, Shell, Chevron et Tamoil) et, à titre exceptionnel, par quelques navires spot pour des achats complémentaires. Jusqu en 2008, le bateau utilisé était le Cilaos (environ tonnes). Il a été remplacé en 2009 par un tanker neuf, le Tamarin (43000 tonnes). 7

83 Dans tous les cas, même dans celui de La Réunion qui, avec habitants constitue le plus gros marché des DOM, le fret des carburants est une activité qui a les caractères d un monopole naturel. En effet, compte-tenu des évolutions démographiques et des politiques nationales d économie d énergie, on peut considérer que la consommation de carburants, qui stagne actuellement, restera à moyen terme de l ordre d un million de tonnes pour les Antilles et la Guyane et de tonnes pour La Réunion. De tels approvisionnements ne peuvent se faire de manière rentable avec des trop petits bateaux, par exemple des tankers de moins de tonnes. Il faut, en outre relever que la profondeur des ports pétroliers actuels de Fortde-France et de Port Réunion leur permettrait d accueillir des tankers de plus grande taille, de ou tonnes. Si tous les distributeurs, qui sont actuellement entre 4 et 6 selon les DOM, devaient gérer leurs approvisionnements séparément, seuls les plus gros pourraient affréter régulièrement des bateaux de cette taille mais la majorité ne pourrait en affréter que deux ou trois par an. Un opérateur indépendant ou un nouvel entrant aurait même du mal à en remplir un seul dans l année. Une fois livré par le bateau qu il aurait affrété seul, un distributeur de taille insuffisante devrait supporter des frais très importants pour stocker à terre sa réserve semestrielle de carburants. En outre, il s exposerait à un risque sur la valeur de ce stock en cas de baisse des prix. Sur un marché aussi volatil que celui du pétrole, les achats réguliers donnent plus de souplesse pour suivre les prix de marché. On peut donc raisonnablement admettre que la mutualisation de la logistique pour l approvisionnement des DOM en carburants raffinés est le système le moins coûteux, ce qui conduit à sortir ce service du champ concurrentiel en s assurant que les tarifs du service commun de fret sont bien orientés vers les coûts. 2. Les limitations au développement du stockage En plus des cuves destinées à recevoir le pétrole brut qui sert d intrant à sa raffinerie aux Antilles, la SARA dispose d installations de stockage de produits raffinés de m³ en Martinique, de m³ en Guadeloupe et de m³ en Guyane. A la Réunion, la Société Réunionnaise de produits pétroliers (SRPP), filiale à parité de Total et Shell, dispose de m³ de stockage de produits raffinés à Port-réunion près de St-Denis. Des stockages annexes sont également installés dans les aéroports pour le carburéacteur, en particulier à La Réunion où le port pétrolier et l aéroport sont assez distants et séparés par la ville de Saint- Denis. Ces installations sont complétées par des oléo-réseaux (pipe-line) qui permettent de relier les zones portuaires de déchargement aux cuves généralement à proximité de la zone portuaire et les cuves de stockage à certains points de livraison comme les aéroports aux Antilles. Ces installations sont soumises à des obligations de sécurité publique consistant à maintenir des stocks stratégiques représentant environ deux mois de consommation. La SRPP remplit cette obligation avec des stocks de 70 jours mais, selon les administrations concernées et les opérateurs pétroliers, ce n est pas le cas aux Antilles où la SARA devrait augmenter ses capacités pour répondre complètement à ses obligations. Le gestionnaire perçoit des droits de passage sur les carburants qu il stocke. Ces tarifs sont approuvés par l Etat puisqu il s agit d activités gérées en monopole du fait des contraintes foncières et règlementaires qui limitent l installation de concurrents. Il faut indiquer ici, que dans un arrêt du 4 mai 2009, la cour d appel de St-Denis de la Réunion a considéré que les installations de stockage de Port-réunion constituaient une facilité essentielle et que les tarifs de passage devaient être orientés vers les coûts. Elle a ordonné une expertise comptable pour vérifier que tel était bien le cas. 8

84 3. Le caractère de monopoles naturels des activités amont La dépendance vis-à-vis des importations, pour les produits raffinés comme pour le pétrole brut à La Martinique, et la petite taille des marchés concernés donnent aux services logistiques le caractère de monopoles naturels. Il est, en effet, peu rentable de multiplier les canaux d approvisionnement avec des navires de faible capacité, comme le démontre d ailleurs le cas particulier de la Guyane. De même, il ne serait pas rentable que chaque distributeur entretienne ses propres installations de stockage, d autant que de fortes barrières à l entrée existent pour cette activité : s agissant de sites classés, les emplacements propices sont rares et demandent des autorisations administratives. De plus, l obligation de maintenir des stocks stratégiques de sécurité renforce l intérêt d une mutualisation du stockage. En revanche, il n est pas démontré que la mutualisation des achats, opérée aussi bien aux Antilles qu à La Réunion, soit indispensable. En dehors du cas particulier de la SARA qui constitue un acheteur unique pour les divisions trading de ses actionnaires, ce qui incite à des achats en commun, elle ne serait économiquement justifiée que si l augmentation des quantités achetées en groupement permettait systématiquement d obtenir de meilleurs prix. Compte tenu de l absence d informations disponible sur les conditions d achat de produits raffinés, il n est pas possible de conclure sur ce point. L Autorité relève néanmoins que sur le marché des carburéacteurs où les prix sont libres, les différents distributeurs achètent séparément leurs produits et limitent la mutualisation au fret et au stockage commun. B. Le fonctionnement du segment aval 1. Les réseaux de distribution dans la zone Caraïbes La zone Antilles-Caraïbes compte trois réseaux de distribution adossés à des groupes pétroliers, Total, Chevron et Esso, et un adossé à un grand distributeur spécialisé, le groupe Rubis, qui a racheté l ancien réseau Shell et l exploite sous l enseigne Vito. Il compte aussi trois réseaux non intégrés, appartenant à des groupes locaux : WIPCO (West Indies Petroleum Company), CAP (Compagnie Antillaise des pétroles) et GPC (Groupement des Pétroles des Caraïbes). Ces indépendants sont essentiellement présents en Guadeloupe. La structure des réseaux de détail en nombre de stations services est présentée dans les tableaux suivants, en distinguant les stations en location-gérance, dites «officielles» car le fonds de commerce appartient à la compagnie pétrolière, et les stations indépendantes propriétaires de leur fonds de commerce. Guadeloupe situation fin 2008 off ici ell es indé pend ants en se m ble TOTAL VITO (ex Shell) ESSO CHEVRON p d m 4 5 % 2 0 % 1 4 % 9 % 9

85 WIPCO/CA P/GPC global % % Martinique situation fin 2008 off ici ell es indé pend ants en se m ble TOTAL VITO (ex Shell) ESSO CHEVRON WIPCO/CA P/GPC global p d m 4 8 % 2 2 % 1 7 % 1 1 % 2 % % 10

86 Guyane situation fin 2008 off ici ell es indé pend ants en se m ble TOTAL VITO (ex Shell) CHEVRON global p d m 4 1 % 2 8 % 3 1 % % Sur la zone Antilles-Guyane situation fin 2008 off ici ell es indé pend ants TOTAL en se m ble s 10 3 VITO (ex Shell) ESSO CHEVRON WIPCO/CA P/GPC global p d m 4 6 % 2 2 % 1 3 % 1 3 % 6 % % Le décompte précis des stations officielles et indépendantes est délicat puisque, dans certains cas, l enseigne est locataire de la station ou du terrain et la met en gérance. Le contrat est donc de location-gérance, mais la station est potentiellement une station indépendante au sens où elle pourrait changer d enseigne en fin de bail. Cette situation de sous-location est le reflet de l histoire de chaque station et son occurrence est assez variable suivant les réseaux. 11

87 On note que les stations indépendantes sont largement minoritaires et ne représentent que 20% des points de vente, tous réseaux et tous départements confondus, et que c est le réseau Total qui en compte le plus grand nombre, une trentaine, alors que le réseau Chevron n en comprend plus qu une et le réseau Esso aucune. On observe aussi que la Guadeloupe est le département qui compte le plus grand nombre de stations : il en possède 25% de plus que la Martinique alors que sa population est plus importante de 10%, mais il est vrai que l île est un peu plus étendue et compte un archipel. Le département compte d ailleurs 8 stations marines, qui fournissent les ports de pêche et de plaisance, soit un nombre plus important que dans les autres DOM, si bien que le nombre de stations est un peu surévalué. Un document du Syndicat des gérants de stations services de la Guadeloupe écrit néanmoins qu il «est établi que la Guadeloupe est le département français où il y a la plus grande concentration de stations services au km²». Sans pouvoir vérifier cette affirmation, on relève que le département compte plus de 24 stations pour habitants (22 hors stations marines) contre 21 en Martinique. C est d ailleurs dans ce département que les réseaux indépendants WIPCO, CAP et GPC ont développé leur activité. La Guyane possède, au regard de sa population ( habitants), un nombre de stations par habitant inférieur à ceux des Antilles, seulement 15 stations pour habitants, et assez faible par rapport à l étendue de son territoire. Mais le département est majoritairement couvert de forêt et la population est très concentrée dans quelques zones urbanisées, notamment autour de Cayenne. Le secteur de la distribution de détail a subi plusieurs changements importants ces dernières années : le rachat d Elf par Total en 2000, l arrivée des indépendants en 2006, la vente du réseau Shell au groupe Rubis en Il faut noter que le groupe Rubis, s il n est pas un major du secteur comme les pétroliers intégrés sur l amont (exploration-production-raffinage), est un acteur de taille nettement plus importante (1,2 Md de CA) que les autres distributeurs indépendants des Antilles, puisqu il est présent dans plusieurs pays, a une position significative dans le GPL domestique qui était son métier historique (Vitogaz) et gère des activités de stockage à grande échelle avec une capacité d environ 2 millions m³. On relève aussi la rationalisation des réseaux Esso et Chevron dont le nombre de stations a sensiblement diminué depuis dix ans, les plus petites stations étant fermées ou passant sous une autre enseigne. Cette différences des politiques suivies par les différents réseaux, certains se concentrant sur les stations les plus rentables alors que d autres entretiennent un maillage plus complet avec le maintien en activité de stations de petites tailles conduit à des parts de marché en volume différentes des parts de marché en nombre de stations. Les résultats sont présentés dans les tableaux ci-dessous pour les années , les montants exacts sont occultés pour préserver le secret commercial des opérateurs, qui ont demandé une telle protection : Guadeloupe TOTAL [ ] [ ] [ ] VITO (ex Shell) [ ] [ ] [ ] ESSO [ ] [ ] [ ] moy pd /stati m on [ %] [ ] [ %] [ ] [ %] [ ] 12

88 CHEVRON [ ] [ ] [ ] WIPCO/CAP/ GPC [ ] [ ] [ ] global [ %] [ ] [ %] [ ] % TOTAL [ ] [ ] [ ] VITO (ex Shell) [ ] [ ] [ ] ESSO [ ] [ ] [ ] CHEVRON [ ] [ ] [ ] WIPCO/CAP/ GPC [ ] [ ] [ ] global moy pd /stati m on [ %] [ ] [ %] [ ] [ %] [ ] [ %] [ ] [4 % < ] [ ] 10 0 % TOTAL [ ] [ ] [ ] VITO (ex Shell) [ ] [ ] [ ] CHEVRON [ ] [ ] [ ] global moy pd /stati m on [ %] [ ] [ %] [ ] [ %] [ ] 10 0 % TOTAL [ ] [ ] [ ] VITO (ex Shell) [ ] [ ] [ ] ESSO [ ] [ ] [ ] CHEVRON [ ] [ ] [ ] moy pd /stati m on [ %] [ ] [ %] [ ] [ %] [ ] [ [ ] 13

89 WIPCO/CAP/ GPC [ ] [ ] [ ] global %] [3-7 % ] [ ] % 949 Le ratio de volume de carburant vendu par station, en moyenne pour les trois départements, toutes stations confondues, est d environ 3000 m³. En Guadeloupe, il n est que de 2700 m³, ce qui est inférieur de 20% à celui de la Martinique (3300 m³), et même inférieur à celui de la Guyane (2800 m³). Une trentaine de stations guadeloupéennes vendent sensiblement moins de 2000 m³ de carburant par an, notamment l ensemble des stations marines. Pour bien mesurer la faiblesse de ces volumes, il faut noter que beaucoup de grandes stations vendent 5000 m³ ou 6000 m³ par an et que la plus importante vend 9000 m³ par an. 2. Les réseaux de distribution à La Réunion La Réunion compte quatre réseaux de distribution adossés à des groupes pétroliers, la SRPP, Total, Chevron et Libyan Oil, qui a racheté le réseau Esso en 2007 et l exploite sous l enseigne Tamoil. La SRPP présente la particularité d exploiter deux enseignes, Elf et Shell, appartenant à ses deux actionnaires qui sont, par ailleurs, des groupes concurrents sur les autres marchés. Cette situation résulte de la fusion Total-Elf de 2000 qui a permis à Total d entrer au capital de la SRPP alors qu il disposait déjà d un réseau de détaillants sous son enseigne. Les implications de cette situation pour le fonctionnement du marché seront examinées plus loin. A la différence des Antilles, il n existe, à La Réunion, aucune enseigne qui ne soit adossée à une compagnie pétrolière. Les quelques stations installées dans les supermarchés généralistes ne dépendent pas de la grande distribution mais restent sous l enseigne des pétroliers qui les approvisionnent. La structure des réseaux de détail est présentée dans le tableau suivant, en nombre de stations services, en distinguant les location-gérances et les indépendants. situation fin 2008 offici elles indépe ndant s glo bal pdm SRPP Elf % SRPP Shell ,4% SRPP global ,4% Total ,4% Chevron ,1% Tamoil (ex- Esso) ,1% Global % On note d une part que les stations officielles sont majoritaires et représentent les trois-quarts des stations et d autre part que la proportion d indépendants est plus importante à La Réunion qu aux Antilles, puisque l île en compte 39, soit autant que les trois départements des Caraïbes réunis. Le nombre de stations par habitant est plus faible qu aux Antilles : 18 stations pour habitants contre 23, pour une population équivalente. 14

90 Comme aux Antilles, le secteur de la distribution de détail a été marqué ces dernières années par des changements : le rachat d Elf par Total en 2000 et la vente du réseau Esso au groupe Lybian Oil en Mais sur le long terme, le nombre total de stations et leur répartition par enseigne reste stable. L île comptait 150 stations en 1991 contre 147 aujourd hui, avec des parts de marchés identiques entre les cinq enseignes, sauf une légère érosion du réseau Esso, aujourd hui repris par Tamoil. Cette situation se retrouve dans les parts de marché en volume présentées ci-dessous, les montants en valeur absolue ayant été occultés pour préserver le secret des affaires : SRPP Elf SRPP Shell Sous-total SRPP Total Chevron Tamoil (ex-esso) Ensemble [ ] [ ] [ ] [ ] [ ] [ ] [ ] [ ] [ ] [ ] [ ] [ ] pdm [ [17- ] 21%] [ [17- ] 21%] [ [35- ] 40%] [ [20- ] 25%] [ [20- ] 25%] [15- [ 20% ] ] % mo y/st atio n [ ] [ ] [ ] [ ] [ ] Le ratio de volume de carburant vendu par station est, en moyenne, à La Réunion d environ 3140 m³, soit un niveau intermédiaire entre celui de la Martinique et celui de la Guadeloupe. [ ]. 3. L évolution des marges de distribution On distingue traditionnellement dans les DOM la marge de distribution de gros et la marge du détaillant car les chaînes de distribution qui sont verticalement intégrées au sens commercial, ne le sont pas, à proprement parler, au plan juridique. Les groupes pétroliers ne sont, en effet, qu indirectement présents sur le marché de détail puisque leurs enseignes sont toujours exploitées par des sociétés distinctes. Bien qu ils possèdent leurs propres fonds de commerce, ils ont tous choisi de ne pas les exploiter eux-mêmes et les placent en location-gérance, système qui laisse une autonomie de gestion assez grande aux détaillants, notamment pour fixer leurs prix. Ils exploitent aussi leurs enseignes à travers des contrats de fourniture en gros à des détaillants indépendants propriétaires de leurs fonds de commerce. La fixation de ces marges de gros et de détail prend une forme différente selon les DOM. Aux Antilles, en application du décret de 2003, la réglementation est très détaillée puisque les arrêtés préfectoraux ne fixent pas moins d une douzaine de prix pour les seuls gazole et supercarburant (prix normal d importation, prix plancher, prix de passage en dépôt, prix limite de facturation SARA, marge de gros, marge de détail, prix maximum de vente au détail) et 15

91 plus du double si on prend en compte les mêmes composantes de prix pour le fioul industriel, le FOD détaxé, le pétrole lampant ou la bouteille de gaz. En revanche, en Guyane et à La Réunion, où les décrets de 1988 sont toujours en vigueur, le préfet ne fixe que les prix de distribution en gros maximum et les prix de détail maximum, ce qui revient implicitement à fixer une marge de détail maximum pour les carburants et la bouteille de gaz. La marge de gros maximum n apparaît pas explicitement dans les arrêtés et se déduit par soustraction entre le prix d importation constaté et le prix de gros maximum. Lorsque le préfet décide de ne pas répercuter sur le prix de distribution en gros une hausse du prix des carburants importés, comme à La Réunion à l été 2008, ou une baisse pour procéder à un rattrapage comme au printemps 2009, il écrase ou augmente implicitement la marge de gros, mais il ne prend aucun texte pour cela. En revanche, lorsqu il veut modifier la marge de détail, il doit prendre un arrêté et décider lui-même de fixer les deux prix, gros et détail, de manière à obtenir l évolution souhaitée sur la marge de détail. Bien que non régulée à proprement parler, la marge de distribution de gros à La Réunion avait fait l objet d un protocole d accord entre l État et les pétroliers qui en fixait le niveau et l évolution entre juillet 1998 et juillet Ce protocole a, de fait, servi de référence pour le pilotage de cette marge après 2002 mais avec une certaine élasticité. La marge de gros constatée ex post a été légèrement supérieure à celle qui aurait résulté de l application mécanique du protocole après Elle s est maintenue autour de 10 ct/litre en moyenne jusqu au décrochage de fin Ces marges ont augmenté depuis dix ans dans des proportions variables suivant les DOM comme on le constate sur les tableaux ci-dessous qui retracent les principales augmentations. Le cas de La Réunion est particulier puisque les marges pour le gazole et le super sont différentes bien que proches, mais on peut faire une moyenne pondérée en fonction des volumes vendus. Évolution des marges de gros : En /hl ou ct/litre Gua delo upe Marti nique Guy ane Réuni on* ,03 5,18 8,1 5, ,79 5,35 8,1 5, ,79 5,85 8,1 8, ,79 5,85 9,1 8, ,79 5,85 9,1 9, ,07 6,12 9,1 10,1 Variation 2009/ % *Réunion : marge de gros implicite dans la formule d évolution du prix maximum (moyenne pondérée gazole 65% - super 35%) Évolution des marges de détail : En /hl ou ct/litre Gua delo upe + 18 % Marti nique + 12 % Guy ane + 98 % Réuni on* ,93 7,47 6,2 6, ,23 8,08 8 7, ,38 9,08 8 8, ,88 9,08 9 9, , ,5 8 9, ,54 9, ,76 16

92 Variation 2009/ % +21% +61 % +60% *(Réunion : moyenne pondérée gazole 65% - super 35%) On peut faire le constat que les marges de gros aux Caraïbes restent constantes en valeur réelle puisqu elles évoluent au plus comme l indice des prix des services qui est leur index de référence, mais l augmentation est beaucoup plus importante à La Réunion après l abandon du protocole avec le préfet. Leurs niveaux actuels sont très différents suivant les départements, puisqu ils sont 75% plus élevés en Guyane et à La Réunion qu aux Antilles. Une partie de cet écart s explique par le fait qu aux Antilles, les distributeurs ne sont pas propriétaires des carburants conservés par la SARA dans ses cuves de stockage et que leur marge de gros n a donc pas à couvrir le tarif de passage, alors que cette prestation est payée à la SRPP par les importateurs propriétaires de leurs produits. Mais cette différence qui porte sur 2 ct/litre n explique pas la totalité de l écart des marges de gros. Au contraire, les marges de détail sont plus convergentes, autour de 10 ct/litre, mais augmentent beaucoup sur la période puisque elles ont connu une hausse de 60% depuis 2001, sauf en Martinique où la hausse a été en gros celle de l indice de l INSEE pour les prix dans le secteur des services (+21%). Si l on cumule les deux marges, l on fait apparaître des marges totales de distribution avec des écarts très importants avec la métropole, où elles sont généralement considérées comme inférieures ou égales à 10 ct /litre, mais aussi entre la Martinique et les trois autres départements, celle de la Réunion étant la plus élevée (20,9 ct/litre). Sur la période , seule la Martinique a vu ses marges de distribution augmenter comme l indice INSEE de référence. La dérive des marges a été particulièrement nette à La Réunion et à la Guadeloupe. En /hl ou ct/litre Marge totale de distribution 2001 Marge totale de distribution 2009 Guad eloup e Augmentation + 44 % Mar tiniq ue 12,95 12,6 5 18,65 15, % Guy ane R é u n i o n 14,3 1 1, 8 19,1 2 0, ,5 % % 17

93 4. La situation des grossistes Le marché de gros aval est l échelon de la distribution compris entre la mise à disposition des carburants à la sortie des cuves après importation des produits et leur revente aux détaillants. Les prix et les marges de cette activité sont réglementés et doivent couvrir les prestations de transport par camion, la couverture de coût fixe de structure, le coût et le financement des immobilisations, notamment le matériel technique des stations et des frais divers d animation commerciale du réseau, ainsi que les tarifs de passage du stockage à La Réunion. On peut essayer de donner une idée de la rentabilité de cette activité à travers des moyennes observées sur plusieurs années (généralement ) pour tous les réseaux confondus. Certes les moyennes peuvent cacher des écarts entre les réseaux ou des années plus défavorables, mais les fourchettes présentées ci-après permettent de tenir compte de ces variations. Pour l année 2008, la moyenne a été faite hors provisions exceptionnelles pour paiement de sanctions pécuniaires. IV. Ratios de gestion des grossistes-importateurs dans les DOM Marge de gros réglementée, niveau fin 2008 (en ct /l) Taux de marge commerciale Gua delo upe * Martini que* 6,1 6,1 (moyen ne super et gazole) [7% à 11% ] Résultat courant /CA [2% à 4%] Résultat net / CA [1% à 3%] [7% à 11%] [2% à 4%] [1% à 3%] Gu ya ne * 9, 1 nc nc nc Réunio n 10,6 (moyen ne super et gazole) [10% à 15%] [3% à 8%] [2% à 5%] * les ratios de gestion ne sont pas calculables à partir des comptes annuels pour la Guyane car aucun pétrolier n a de filiale dédiée à ce seul département. Les ratios Guadeloupe et Martinique sont identiques par construction puisque tous les pétroliers, sauf Total, opèrent sur les Antilles avec une même filiale. On constate tout d abord, la meilleure rentabilité moyenne de l activité à La Réunion par rapport aux Antilles, avec des ratios de gestion supérieurs, ce qui correspond au fait que les marges de gros à la Réunion sont à un niveau supérieur de 60% à ceux des Antilles et même de 10% supérieur à celui de la Guyane où les coûts logistiques sont pourtant plus élevés. Pour bien apprécier ces ratios, il faut rappeler que les importateurs-grossistes qui alimentent à titre exclusif leur réseau de distribution ont une activité qui se rapproche du pur négoce. En effet, à part la SRPP, propriétaire des installations de stockage à la Réunion mais dont le chiffre d affaires sur le stockage reste modeste en comparaison de ses activités de vente en gros, et dans une moindre mesure Total Caraïbes, présent sur deux départements et qui détient des actifs matériels plus importants que les autres grossistes, les filiales locales des groupes pétroliers inscrivent essentiellement en immobilisations à leur bilan des terrains et les 18

94 installations techniques des stations-services de leur réseau, dont la valeur est souvent largement amortie. Leur masse salariale est faible en valeur relative, quelques millions d euros pour des chiffres d affaires annuels compris entre 100 M et 250 M, puisque ces sociétés n emploient que quelques dizaines de salariés. Près de 90% de leurs charges sont des achats de produits et 98% des recettes proviennent de leur revente. Si l on considère que ces activités de négoce sont peu risquées puisque la demande est stable, que les marchés sont relativement fermés aux nouveaux entrants, que les capitaux immobilisés sont modestes au regard des chiffres d affaires et qu il n y a pas de concurrence en prix, les résultats nets observés sont loin d être négligeables. Il faut toutefois nuancer cette analyse globale dans la mesure où les filiales locales des groupes pétroliers ont de multiples activités, même si la distribution de carburants routiers est la principale. Sans aller jusqu à une véritable comptabilité analytique, une analyse plus fine par activité permettrait de mieux cerner les marges brutes par métier. Il faudrait aussi faire une analyse par département car certains distributeurs, comme Rubis aux Antilles ou la SRPP à La Réunion, ne sont pas actifs sur le marché des carburéacteurs, d autres qui sont présents aux Antilles ne sont pas actifs en Guyane, comme Esso Antilles-Guyane malgré son nom, d autres sont très actives sur les marchés du GPL ou sur les ventes hors réseau. Ces analyses comptables, qui ne sont pas l objet du présent avis, trouveraient leur limite dans l appréciation du bon taux de rentabilité attendu par les actionnaires, critère sur lequel l Autorité n entend pas se prononcer. 1. La formation des prix de détail a) Un système de prix imposés Le prix régulé réputé être un prix maximum est, en fait, un prix imposé. D ailleurs, aucune station n affiche ses prix sur un panneau ou un «totem» visible à distance par les automobilistes tant la pratique du prix unique est ancrée dans les habitudes des consommateurs qui n imaginent même pas que les prix pourraient être inférieurs dans certaines stations. Cette transformation du prix maximum en prix unique est renforcée par la rédaction des contrats de fourniture des détaillants qui prévoient que les carburants leur sont vendus au prix de gros réglementé, avec des formulations diverses mais qui sont toutes équivalentes : «Tant que les prix seront fixés par les pouvoirs publics, le tarif de gros correspondra au prix de gros tels qu ils sont déterminés par l administration». Une formule est également utilisée : «Les carburants seront vendus au locataire gérant,, au «prix officiel détail à la pompe» diminué de la «marge officielle revendeur» tel que ces éléments apparaissent dans la structure de prix fixée par les pouvoirs publics». Parfois, la formulation est plus brutale : «Le prix de vente par la SOCIETE au détaillant est fixé par arrêté préfectoral», affirmation erronée puisque les prix ne sont pas déterminés par l administration mais seulement plafonnés. Même lorsque le distributeur reconnaît le caractère de prix maximum des prix régulés, le résultat est identique : «Les carburants seront facturés au prix limite de vente au détail minoré de la marge détaillant telle que définie par les pouvoirs publics». L ensemble des fournisseurs dans tous les DOM calent leur prix de gros sur le prix maximum ou sur le prix de détail maximum minoré de la marge de détail maximum, ce qui tend à supprimer toute incitation aux détaillants pour qu ils pratiquent un prix inférieur au prix de détail maximum. Toutefois, ce système connaît des aménagements pour les stations indépendantes. 19

95 b) Les rabais accordés aux indépendants Beaucoup de stations indépendantes bénéficient d un rabais sur le prix de gros des carburants, notamment justifié par les économies faites par l enseigne qui ne supporte pas le coût de certains investissements. Mais les investissements sont rarement financés par le détaillant qui bénéficie d avances de son grossiste. Dans un tel cas, les remises ultérieures sont imputées sur l avance de trésorerie faite par l enseigne à son détaillant, ce qui en permet le remboursement. La formule la plus largement répandue est celle d une remise variable qui prend le plus souvent la forme d un rabais sur le prix de gros exprimé en /m³. Dans certains cas, ce montant est implicite car le contrat prévoit un volume cible pour chaque année et une remise annuelle globale. Par exemple, une remise de par an pour une estimation des ventes annuelles de 2000 m³ revient, si le volume vendu est proche du volume contractuel, à accorder une remise variable de 5 /m³. Par ailleurs, certaines enseignes accordent au détaillant indépendant, en plus des remises sur le prix de gros, des redevances forfaitaires mensuelles. Dans certains cas, ces redevances sont payées intégralement en début de contrat, ce qui constitue un avantage de trésorerie considérable. D autres contrats prévoient un prêt sans intérêt pour procéder à des travaux de rénovation. D autres encore, plus anciens, accordent la livraison gratuite du carburant. Sous une assez grande variété des termes contractuels accordant ces remises, on observe un résultat assez convergent avec des montants annuels de plusieurs dizaines de milliers d euros pour les stations que l enseigne veut conserver dans son réseau. Les avantages sont plus modestes, voire nuls pour les petites stations. En contrepartie de ces avantages, les fournisseurs obtiennent des contrats exclusifs généralement d une durée de 10 ans, qui a été être réduite à 5 ans dans les contrats les plus récents de certaines enseignes. Les montants annuels de ces avantages accordés aux détaillants propriétaires sont du même ordre de grandeur que ceux des redevances reversées par les gérants non propriétaires à leurs fournisseurs et que les bénéfices nets moyens de l ensemble des stations services. Autrement dit, ces remises sont de nature à modifier sensiblement la rentabilité d une station indépendante par rapport à une station en gérance. Le tableau ci-dessous 81 donne la situation de ces remises en Ces données relèvent du secret commercial, néanmoins, afin de donner une idée des montants en jeu, les remises annuelles maximales et minimales constatées ont été laissées apparentes. Pour éviter tout risque d identification des sociétés concernées, les réseaux des Antilles et de La Réunion sont mêlés et présentés dans le désordre. 20

96 Redevances et remises versées par le fournisseur et reçues par le détaillant M ont ant de la re mi se var iab le [.] [. ] [.] [. ] [.] [. ] [.] [. ] [.] [. ] [.] [. ] Rede vance forfait aire reçue P ai e m e nt d a v a n c e [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] Re mi se an nu ell e la pl us éle vé e Re mis e ann uell e la moi ns élev ée d u r é e [. ] [. ] [. ] [. ] [. ] [. ] Certes, ces remises pourraient correspondre à des coûts supportés par la station indépendante et non pas imputés sur la marge du grossiste comme pour les stations en location-gérance. Seule une étude exhaustive des comptes de l ensemble des détaillants permettrait de vérifier si ces écarts de marges correspondent réellement à des écarts de charges d exploitation dus à la différence du mode de gestion. Les échantillons examinés à la Guadeloupe et à La Réunion conduisent plutôt à écarter cette hypothèse et à conclure que les avantages obtenus par les exploitants propriétaires résultent simplement d un rapport de force plus favorable avec leurs fournisseurs. c) Des redevances variables pour les stations en location-gérance A la différence des stations indépendantes qui reçoivent des redevances des fournisseurs, les stations en location-gérance en versent à leur fournisseur qui est aussi propriétaire du fonds de 21

97 commerce, ce qui est le principe même d un contrat de location. Le système de redevance est plus ou moins détaillé suivant les enseignes et peut comporter plusieurs éléments. Les contrats plus anciens, ou plus rudimentaires, ne mentionnent qu un loyer fixe mensuel, généralement de faible montant pour les petites stations et plus élevé pour les points de vente importants, plus rémunérateurs. Les contrats plus récents prévoient généralement une redevance variable en plus de la redevance fixe, exprimée en par m³, ou parfois une redevance variable au-dessus d un certain volume de vente de carburants. Mais certaines enseignes ont fait le chemin inverse et abandonnent les redevances variables dans les contrats renouvelés en 2008 et Le cas échéant, une redevance variable distincte est payée par le détaillant sur le chiffre d affaires des installations de lavage de voitures. Enfin, l enseigne touche également une redevance sur les achats par carte professionnelle ou par carte d entreprise qui représentent entre 10% et 15% des volumes de carburants vendus. Pour les stations qui en possèdent une, il est généralement prévu une redevance sur le chiffre d affaires de la boutique, avec des taux qui peuvent distinguer les marchandises ordinaires, sur lesquelles le prélèvement est plus élevé et les ventes de tabacs, cartes téléphoniques et jeux, sur lesquelles il est plus faible. Il est difficile de connaître le chiffre d affaires des boutiques qui concernent des dizaines, voire des centaines, de références et ne peuvent pas être suivies comme les carburants. Mais on peut, à partir des liasses fiscales des détaillants et des montants globaux des redevances, estimer que les boutiques de stations peuvent brasser des chiffres d affaires allant de pour les plus petites à plus d un million d euros pour les plus grandes qui fonctionnent comme de véritables supérettes où les consommateurs viennent faire régulièrement des courses. Sauf évènement exceptionnel, les modifications importantes du montant des redevances ne se produisent qu à la date de renouvellement des contrats, les évolutions en cours de contrat restent limitées à des clauses d indexation. Les comparaisons entre stations sont, pour cette raison, difficiles à faire car les contrats n ont pas tous la même échéance. Si on écarte les contrats trop anciens, comme certains contrats de 10 ans en fin d application qui ne sont plus représentatifs des nouvelles conditions commerciales, on peut comparer ces différents éléments de redevance payés par les stations en location-gérance. Pour pouvoir examiner ensemble les petites et les grandes stations, on peut ramener le montant des redevances au volume moyen vendu ces trois dernières années pour avoir une redevance par m³ vendu. Les stations bénéficiant toutes du même taux de marge commerciale (total des ventes - total des achats) pour les carburants, puisque les opérateurs appliquent tous les prix maximum, il est facile de connaître le montant de cette marge pour chaque station-service lorsqu on connaît son volume de carburants vendus. Il est alors possible de calculer un taux de prélèvement moyen du fournisseur sur la marge carburant du détaillant. Afin d éviter tout risque d identification des sociétés concernées, les réseaux des Antilles et de La Réunion sont mêlés dans le tableau ci-dessous et présentés dans le désordre : Redevances reçues par le fournisseur et payées par le détaillant Réseau Re de va nc e fix e pa r Redeva nce variabl e contrac tuelle (taux récent) Redeva nce carbura nt la plus élevée (par an) Taux de prélèv ement sur la marge de détail Rede vanc e sur le CA de la bouti que 22

98 m³ ve nd u (m oy en ne ) [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [9% - 18%] [6% - 12%] [12% - 30%] [6% - 11%] [7% - 16%] [9% - 14%] [14% - 22%] [9% - 18%] [9% - 23%] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] *Certains contrats sont manquants S agissant des évolutions entre enseignes sur un même département, on relève des disparités mais qui restent dans des proportions limitées. La grande variété des contrats demande une certaine prudence dans la présentation des chiffres. Il n est, par exemple, pas possible d ajouter la moyenne de la redevance variable et celle de la redevance fixe sans précaution car les contrats sans redevance variable ou à taux faible ont des redevances fixes plus élevées et aucun contrat ne cumule les taux maximum des deux redevances. Du point de vue des réseaux qui les encaissent, ces redevances ne sont pas des recettes nettes mais des recettes brutes qui servent pour partie à couvrir les loyers versés aux propriétaires des terrains ou des immeubles où sont implantées certaines stations. Le montant de redevance nette se déduit par soustraction du montant des loyers payés. De ce point de vue, les situations sont très différentes selon les réseaux qui sont propriétaires de leurs terrains dans des proportions variables. La plupart des réseaux payent un montant de loyers inférieur à [.] des redevances brutes mais avec des situations extrêmes : [..]. Compte-tenu des politiques de chaque grossiste, les comparaisons entre réseaux ne sont pas toujours pertinentes puisque la taille des stations et le nombre de boutiques sont différents selon les 23

99 enseignes. Une enseigne avec de grandes stations et de nombreuses boutiques aura nécessairement un montant de redevances plus élevé. Par contre, la structure des réseaux étant relativement stable dans le temps, les évolutions de redevance entre différents exercices pour un même réseau sont une information utile. De ce point de vue, on observe que le montant des redevances, tous réseaux confondus, a augmenté d environ 7% en 2007 et 11% en L augmentation des montants nets est encore plus élevée à la Réunion, ce qui montre que ce n est pas la pression des loyers des propriétaires des terrains et immeubles qui explique la progression des redevances. Redevances payées par les détaillants (en ) Antilles- Guyane Réunion Aug ment ation 2007 /06 + 4,3% + 9,4% Aug ment ation 2008 /07 + 8,8% + 12,9 % Ramenés aux volumes vendus, ces redevances brutes se trouvent dans une zone comprise entre [.], avec des niveaux et des évolutions variables selon les distributeurs. Chevron Réunion a reçu un montant de redevances de ses stations-services de [ ]. Par contre, Total Réunion a reçu un montant de redevance de [ ]. Au contraire, la SRPP [ ]. Aux Antilles, Esso Antilles-Guyane [ ]. On peut faire le même constat pour l ensemble formé par Total Caraïbes et Total Guadeloupe puisque ses redevances sont passées [ ]. S agissant de la répartition de ces prélèvements, on constate que les redevances les plus élevées sont payées par les grandes stations et les plus faibles par les plus petites, mais que cette hiérarchie n est pas rigoureusement respectée pour la masse des stations moyennes, pour lesquelles les inversions sont fréquentes et peuvent conduire à des taux de redevance par rapport à la marge commerciale plus élevés que pour des stations plus importantes. La maturité des contrats joue également un grand rôle dans ces disparités puisque les écarts de charges peuvent être considérables entre un gérant qui jouit d un contrat ancien et un autre qui vient de renouveler le sien. En effet, les redevances sont fixées pour de longues périodes, entre 3 et 10 ans, pendant lesquelles leurs montants font l objet d une simple indexation. Lors de leurs renouvellements, les contrats peuvent voir les redevances revues à la hausse. Or, les échéances des contrats ne sont pas harmonisées. La régulation des prix touche donc des entreprises qui font face à des conditions économiques plus ou moins difficiles selon la maturité de leur contrat de location-gérance. La présentation de ces quelques éléments n a pas pour objet de laisser entendre que certains réseaux sont plus généreux que d autres ou que des stations sont moins bien traitées que d autres, mais bien de constater que cette diversité, quelles qu en soient les justifications, rend difficile la régulation administrative des marges de gros et de détail qui apparaissent en réalité ajustables et fongibles dans des proportions variables selon les contrats. d) Les disparités entre locataires-gérants en concurrence Il faut rappeler que le potentiel de vente d une station est assez rigide quels que soient les mérites du gérant car le facteur principal qui explique le chiffre d affaires d une station est son emplacement. De plus, les disparités de chiffres d affaires entre stations résultent en large partie de la présence ou non d une boutique et de son activité, cet élément pouvant modifier 24

100 très sensiblement le montant de la redevance. Ces deux éléments expliquent que, faute d une concurrence en prix, c est la qualité du service qui est actuellement le seul facteur de concurrence. Les enseignes sont, dans un tel contexte, très attachées à la propreté et à l attractivité des stations à leurs couleurs qui est, sauf extension du réseau, le seul moyen de préserver ou d augmenter leurs ventes. Dans ce contexte où les prix pratiqués et les marges des pompistes sont les mêmes, le taux de redevance pratiqué par l enseigne est un élément décisif de la rentabilité. Or, on constate que la diversité des conditions contractuelles fait que des stations opérant sur le même bassin de chalandise peuvent connaître des situations d exploitation très différentes. On peut mesurer l étendue de ces écarts de conditions de concurrence à partir des exemples cidessous pris à La Réunion: Nom de la station Volume annuel Contrat revu en Redevance annuelle [.] 2560 m³ [.] 2660 m³ [.] 8400 m³ [.] 8900 m³ [.] 6400 m³ [.] 4600 m³ On voit que les écarts de redevance vont du simple au double pour des stations qui ont un volume d activité comparable et que l ancienneté du contrat joue un rôle important dans ces divergences. On peut faire un constat identique sur d autres exemples à la Martinique Nom de la station Volume annuel Contrat revu en Redevance annuelle [.] 5090 m³ (indexé 2008) [.] 4400 m³ [.] 3600 m³ [.] 4500 m³ La différence des volumes vendus par chaque station ne justifie pas les écarts de redevances, hors boutique. Les divergences seraient encore plus importantes avec les boutiques, par exemple [ ]. On pourrait trouver des exemples comparables dans les deux autres départements. Or, ces stations doivent équilibrer leurs comptes avec le même prix de détail et la même marge de détail réglementés. Ces prix et ces marges si elles permettent d assurer le maintien en activité des stations les plus défavorisées, sont nécessairement très favorables à toutes les autres. e) Les disparités entre indépendants et locataires- gérants Comme on l a vu plus haut (voir Beaucoup de stations indépendantes bénéficient d un rabais sur le prix de gros des carburants, notamment justifié par les économies faites par l enseigne qui ne supporte pas le coût de certains investissements. Mais les investissements sont rarement financés par le détaillant qui bénéficie d avances de son grossiste. Dans un tel cas, les remises ultérieures sont imputées sur l avance de trésorerie faite par l enseigne à son détaillant, ce qui en permet le remboursement. à Certes, ces remises pourraient correspondre à des coûts supportés par la station indépendante et non pas imputés sur la marge du grossiste comme pour 25

101 les stations en location-gérance. Seule une étude exhaustive des comptes de l ensemble des détaillants permettrait de vérifier si ces écarts de marges correspondent réellement à des écarts de charges d exploitation dus à la différence du mode de gestion. Les échantillons examinés à la Guadeloupe et à La Réunion conduisent plutôt à écarter cette hypothèse et à conclure que les avantages obtenus par les exploitants propriétaires résultent simplement d un rapport de force plus favorable avec leurs fournisseurs.), à ces écarts de traitement entre gérants s ajoute le fait qu ils sont en concurrence avec des indépendants qui ne sont liés à la compagnie que par un contrat d approvisionnement exclusif. Ils ne payent donc pas de redevance et, au contraire, bien souvent en reçoivent une sous forme de rabais sur le prix de gros. Certes, ils doivent assumer des dépenses qui sont prises en charge par les propriétaires des fonds de commerce dans la formule de location-gérance, mais ce point mériterait d être systématiquement vérifié. La lecture des liasses fiscales de quelques unes de ces stations indépendantes montre d ailleurs qu elles ont une structure de bilan très favorable avec des immobilisations largement amorties, dont la valeur nette comptable inscrite à l actif est très modeste, des dettes à long terme tout aussi modestes et une trésorerie abondante, souvent de plusieurs centaines de milliers d euros. Les exploitations de l échantillon examiné n ont, la plupart du temps, aucun besoin en fonds de roulement et un résultat financier positif. Très peu ont des emprunts bancaires inscrits à leur passif. Il n est donc pas démontré que les charges et le risque financier lié à la propriété du fonds de commerce ou des actifs justifient des écarts de rentabilité. De plus, la justification des remises par l aide à l investissement consentie par les grossistes ne vaudrait que si ces rabais étaient exceptionnels ou toujours liés à la réalisation de travaux bien identifiés, ce qui n est pas le cas pour plusieurs enseignes qui accordent des remises systématiques et uniformes sans mentionner de travaux. Au demeurant, le financement d investissements par des avances remboursables sur des rabais futurs représente bien un avantage financier puisque les actifs ainsi constitués restent la propriété du détaillant indépendant qui bénéficie d un crédit gratuit, voire d un actif gratuit, si on considère que la remise ne serait pas accordée en l absence d investissement. D ailleurs, certains contrats désignent explicitement ces remises de gros par les termes de «prime d exclusivité» ou de «prime d objectif», ce qui confirme le caractère de «marge arrière» de cet avantage et relativise beaucoup le lien avec le financement de l investissement. Or, ces «marges arrières» ne sont jamais restituées au consommateur puisque la réglementation sur les prix de détail est interprétée comme imposant un prix unique. f) La politique de remontée des recettes Ces disparités entre les stations conduisent l État régulateur à affronter des difficultés insurmontables lorsque les stations les plus faibles sont en difficulté. La politique de prix unique ne permet pas de rétablir l équilibre d exploitation en augmentant les prix dans certaines stations et l alternative est alors simple : ou bien laisser la station non rentable disparaître ou bien diminuer le montant des redevances. Bien que plusieurs avenants de contrat montrent que les réseaux sont conscients de cette difficulté et acceptent de baisser les redevances en cas de difficulté importante d une station qu ils veulent maintenir en activité, ces deux options sont rarement mises en œuvre. Les fermetures et les baisses de redevance sont exceptionnelles. Le plus souvent, la menace de fermeture de petites stations est agitée publiquement et l ensemble de la profession fait pression sur le préfet pour demander une revalorisation des marges qui a l avantage ou l inconvénient, selon le point de vue où on se place, de bénéficier à tous. Cette demande de hausse collective pour remédier à des problèmes individuels transparait à la lecture d un courrier de novembre 2005 du Syndicat réunionnais des stations-services qui se plaignait au préfet d une dégradation de la trésorerie de ses adhérents dans les termes 26

102 suivants : «Ceci est d autant plus aggravant que la rentabilité de nos affaires s est sensiblement dégradée ces dernières années. Afin d éviter l avènement de situations catastrophiques pour certains d entre nous, nous sommes à la recherche de piste qui nous permettrait de retrouver une rentabilité correcte.» (soulignement ajouté). La solution trouvée en janvier 2006 a été une revalorisation de 0,44ct/litre de la marge de détail qui s est appliquée à tous et pas seulement aux stations supposées être en situation catastrophique. Ce coup de pouce a représenté une recette supplémentaire de , en moyenne par station (vente moyenne de 3000 m³/an) mais le double pour une grande station. Les liasses fiscales 2006 qui ont pu être consultées, montrent que les stations de l échantillon ont affiché des résultats courants de et des bénéfices nets de : elles ont pourtant bénéficié de la hausse comme les autres. Ces hausses générales touchent tous les contrats et abondent les comptes d exploitation des stations les plus rentables au profit du gérant, avec un risque de déséquilibre du contrat de location. Les réseaux sont alors tentés de durcir les taux de redevance pour capter une partie de la «rente» ainsi créée. La mise à jour périodique des contrats arrivant à échéance permet à cette hausse des redevances de se propager, ce qui à terme peut engendrer de nouvelles revendications des détaillants. Ainsi, un an après la hausse de la marge de détail de janvier 2006 à la Réunion, une seconde crise conduit le préfet à accorder une nouvelle augmentation de 1,44 ct/litre au premier semestre Comme l a reconnu sans détour un des pétroliers lors de son audition : «Il y a eu une revendication forte des syndicats de gérants pour une baisse des loyers et des redevances en 2007 ( / ). L affaire s est réglée par une hausse de la marge de détail décidée par le préfet». Plusieurs éléments démontrent la réalité de ce phénomène. Tout d abord la hausse des redevances à La Réunion après le conflit de 2007 (1,44 ct/litre) a représenté un montant global de recettes d environ 6,5 M injecté chez les détaillants, mais les redevances qui étaient de 6,25 M en 2006 et de 6,85 M en 2007 sont passées à 7,7 M en 2008, soit une hausse de 23% en deux ans. On peut donc considérer qu une partie de la hausse accordée par le préfet aux détaillants a été captée par les enseignes, alors même qu une minorité de contrats a pu être réactualisée. On peut trouver un autre indice de cette remontée des recettes consécutive aux hausses des marges de détail en Guadeloupe en [ ]. Cette situation des stations de Guadeloupe est confirmée par l évolution des redevances d une enseigne concurrente : [.] Un des pétroliers a décomposé l augmentation de 16 % du montant de ses redevances en deux ans dans un des DOM où il est présent. Il a ainsi indiqué que 38% de la hausse s expliquait par l augmentation du prélèvement sur la marge de détail. Cette augmentation n était justifiée par aucune augmentation de ses charges de distribution en gros, mais avait bien pour effet de ne pas laisser les détaillants bénéficier de la totalité des augmentations accordées par le préfet. La transmission rapide des hausses des redevances s explique aussi par la rédaction de certains contrats qui prévoient explicitement cette ponction sur la marge de détail. Ainsi, tous les contrats de [ ], dont certains sont très anciens, ce qui montre la pérennité de la pratique, précisent que le gérant payera une redevance variable «égale à 9% de la moyenne arithmétique des marges de détail du mois considéré». De même, un contrat récent, de 2004, pour une station de Guyane prévoit que [ ] recevra une redevance variable sur les carburants «égale à 0,8 ct/litre, soit 10% de la marge-détaillant fixée par les autorités publiques, en cas d augmentation de la marge la redevance évoluera de même.». Enfin, les contrats [ ] prévoient que de la redevance variable sera révisée chaque année et que «le taux de révision sera égal à 5% de la variation de la marge de détail fixée par arrêtée préfectoral». Ce qui signifie que lorsque le préfet accorde 1ct/litre de marge de détail supplémentaire, soit 10 /m³, la redevance variable augmente de 0,5 /m³. Ce taux de 5% est du même ordre de grandeur 27

103 que les taux contractuels de redevance variable. Ainsi, le contrat de la station [ ] mentionne à son article 5.3 le versement mensuel d une «redevance proportionnelle aux quantités de carburant vendues au cours du mois. Cette redevance correspondra au produit des litrages vendus par 5% de la marge de détail indiquée à l article 3.1[ ]». Même si elles ne sont pas générales, ces clauses sont révélatrices de la manière dont est conçu l équilibre des contrats. Si ces clauses ont un simple effet d indexation, il faut rappeler que la plupart du temps, le rééquilibrage du contrat se fait par une augmentation des redevances au moment d un renouvellement. On peut mesurer l effet des révisions brutales des contrats sur une même station sur les exemples suivants pris à la Guadeloupe : Révision des contrats Station n 1 en 2006 Station n 1 en 2007 Station n 1 en 2008 Station n 2 en 2007 Station n 2 en 2008 Nom de la Volume Redevance station annuel annuelle [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] [.] On peut certes considérer que pour la station n 1, de grande taille, la redevance était faible en 2006 et que l augmentation de 2007 se justifiait, il n en demeure pas moins que les conditions d exploitation ont complètement changé d une année sur l autre et que, malgré une baisse de 8% des volumes vendus en 2008, le montant des loyers versés a encore augmenté du fait d un nouveau réajustement à la hausse des taux de redevances fixes et variables. Le constat est le même pour la station n 2, qui est une station moyenne et qui a vu sa redevance augmenter de 60% alors que le volume de ses ventes baissaient de 5%. Dans tous ces cas, les grossistes considèrent que l équilibre du contrat ne doit pas permettre au détaillant d augmenter artificiellement ses revenus et que, propriétaires du fonds de commerce et des installations qu ils ont financées, ils peuvent légitimement prélever une part plus importante de la marge de détail réglementée et bénéficier indirectement des décisions des pouvoirs publics prises en faveur des détaillants. Il faut bien mesurer que la situation inverse, dans laquelle l enseigne laisse la rente au détaillant n est pas plus satisfaisante, comme on peut le voir sur les deux exemples suivants : Ex erc ice Nom de la station V o l u m e a n n u e l R e d e v a n c e a n n u el le R ed ev an ce pa r m 3 M oy en ne de l e ns eig ne Sa lai re br ut an nu el du gé ra nt 28

104 St ati on n 3 en St ati on n 3 en St ati on n 4 en [.] [.] [.] [.] [.] [.] , 7 / m 3 12,5 / m 3 9, 8 / m 3 16 / m 3 16 / m 3 16 / m nc On voit que la hausse de la redevance en 2008 ne fait que réduire l aisance financière de la station n 3 qui vivait très confortablement avec un contrat avantageux et une marge captée par le gérant. En 2008, l enseigne a encore une marge de progression si elle voulait aligner complètement les conditions de redevance sur la moyenne de son réseau. Ce qu elle fera peutêtre aussi pour la station n 4, qui bénéficie aussi d une marge très confortable. Certes, il ne s agit pas d une situation générale et seule une étude exhaustive permettrait de donner un tableau plus complet des revenus globaux des détaillants. Toutefois, il a été possible d examiner un certain nombre de liasses fiscales de stations services de La Réunion et de la Guadeloupe. L Autorité attire toutefois l attention sur le fait qu il s agit d un échantillon d une trentaine de stations pour lequel certaines liasses fiscales étaient incomplètes, les éléments manquants étant précisément ceux relatifs à la rémunération des dirigeants. Son examen a toutefois permis de déterminer des ordres de grandeur. Beaucoup de rémunérations annuelles de gérants majoritaires sont comprises entre et Les deux salaires les plus importants versés à des gérants, parmi ceux qui ont pu être relevés, sont de bruts annuels [ ] et de bruts annuels, montant qui atteignait même en 2007 avec les avantages en nature [ ]. Le montant le plus faible qui a pu être relevé est de bruts annuels en 2007 [ ]. Mais cette rémunération salariale directe du gérant n est qu un élément des revenus globaux plus importants après distribution des bénéfices. Ainsi, une station [ ], pour laquelle le gérant majoritaire détenteur de 98% des parts de la SARL a touché au titre de ses salaires en 2007, a réalisé un bénéfice net après impôts de en 2004, de en 2006 et de en Ce dernier résultat net est d ailleurs non significatif car grevé d une charge exceptionnelle de alors que le résultat courant était de , du même ordre de grandeur que les années précédentes. En tout état de cause, le revenu moyen sur ces exercices a été proche de

105 On peut aussi comparer les résultats de deux stations en concurrence directe dans la même ville. Pour la première [ ], le gérant majoritaire détenteur de 90% des parts de la SARL a touché au titre de ses salaires et des avantages en nature en 2007, a réalisé un bénéfice net après impôts de en 2004, de en 2006 et de en Le revenu moyen est proche de et on constate que l augmentation de la marge réglementée en 2007 a permis de franchir ce seuil. La seconde, de taille comparable mais vendant sous une enseigne concurrente [ ], présente un cas intéressant car les deux associés, visiblement de la même famille au vu de leur patronyme et de leur adresse personnelle, ont reçu respectivement et bruts annuels en 2007, alors que leur SARL réalisait un bénéfice net après impôt de en 2004, de en 2006 et de en Encore faut-il préciser qu un membre de la famille du gérant est employé de la SARL avec un salaire brut annuel de On ne peut pas dire que la pression concurrentielle ait beaucoup pesé sur le niveau des résultats de ces deux stations situées sur la même zone de chalandise en conduisant ses gérants à modérer le niveau des salaires. Cette configuration d entreprise familiale n est pas isolée. On relève ainsi le cas d une autre SARL qui présente un actionnariat familial réparti entre trois personnes (45%, 22% et 8%) dont deux sont les cogérants de la station service [ ] avec des salaires de et Cette station affichait un bénéfice net après impôt de en Il faut rappeler que l année 2007 a été marquée par une très forte hausse de la marge de détail en Guadeloupe (+2,4 ct/litre) et à la Réunion (+1,4 ct/litre). Ces décisions du régulateur ont mécaniquement créé des rentes dans les stations déjà bénéficiaires, permettant aux gérants de se réserver, à eux-mêmes ou à des proches, la part principale des salaires versés et les bénéfices de la société. Sans qu il soit besoin d attendre les résultats d une étude exhaustive, il apparaît, au vu de ces exemples, que la hausse de la marge de détail dans les deux départements concernés n a pas eu pour seul effet de soulager les comptes de stations en difficulté financière, mais qu elle a bien créé une rente captée par les stations les plus favorisées et, dans un second temps, par les pétroliers eux-mêmes. L Autorité réaffirme que cette remontée de recettes n est pas critiquable en soi dans un marché concurrentiel et qu il n y a pas de raison a priori d empêcher un distributeur de moduler les redevances que lui payent ses détaillants en fonction de son intérêt économique, notamment pour capter une partie de l excédent d exploitation aval plutôt de le laisser se développer au profit de ses locataires. Mais ce phénomène est d autant plus préoccupant lorsqu il se produit à l abri de décisions des pouvoirs publics qui sont précisément chargés de lutter contre la création de telles rentes. B. Appréciation globale sur le système actuel 1. La régulation actuelle a échoué à maîtriser les marges Sous une apparence égalitaire, renforcée par la pratique de prix imposés qui uniformise les situations sur le marché de détail, le système actuel est en fait assez inégalitaire puisque les conditions d exercice des détaillants sont très différentes, y compris entre ceux qui exploitent des stations de taille comparable. Ce constat est vérifié pour tous les DOM. L Autorité n a, par principe, pas d opinion sur ce que pourrait être un bon niveau des redevances et des remises qui structurent les relations commerciales entre grossistes et détaillants. Elle considère que ces redevances participent à l équilibre des contrats, que leur fixation relève de la liberté des opérateurs économiques et que les pouvoirs publics ne devraient pas s immiscer 30

106 dans la répartition de ces marges, surtout sans disposer d un minimum d information sur les coûts et les recettes des entreprises et les revenus de leurs gérants. Force est de constater qu en voulant régler des oppositions banales dans les activités de distribution, l État régulateur a été amené à décider des augmentations générales de marge qui n étaient pas toujours justifiées. Alors que le décret du 23 décembre 2003 demandait que la régulation des marges tienne compte «des efforts de productivité consentis par les grossistes et les détaillants», la marge de distribution a augmenté de 44% en Guadeloupe et de 77% à La Réunion, soit bien plus que l indice des prix des services sur lequel ces marges auraient dû être indexées par défaut, hors gain de productivité. L ensemble des éléments présentés dans la partie B) ci-dessus montre que la régulation actuelle ne remplit plus son rôle. Conçue comme un dispositif de prix maximum pour lutter contre la hausse des prix, elle s est transformée en un dispositif de prix minimum destiné à assurer la pérennité ou l extension des réseaux de stations services sans considération de leur rentabilité. Les véritables rentes créées par ce système au profit des points de vente les mieux placés et les plus rémunérateurs sont ignorées ou font l objet d une large tolérance alors que les difficultés des moins rentables sont systématiquement mises en avant et présentées comme le reflet d une situation générale. Enfin, le caractère «aveugle» de la régulation des prix de détail n est pas compatible avec son caractère permanent. Dès lors que les prix sont des prix imposés et non des prix plafonnés seulement à certaines périodes pour faire face à un fonctionnement anormal du marché, on devrait les déterminer avec le même soin que les tarifs des activités en monopole, en prenant en compte le taux de rentabilité interne des entreprises régulées, ce qui demanderait la surveillance des comptes de 223 stations aux Caraïbes et 147 à la Réunion. Un tel programme de travail serait très consommateur du temps des fonctionnaires de l État, lesquels seraient mieux utilisés à renforcer la régulation des activités en monopole. 2. La régulation actuelle perturbe la fiscalité des DOM D un point de vue macroéconomique, on pourrait objecter que la régulation a atteint son objectif général de modération des prix de détail sur des marchés où auraient pu s exercer des pouvoirs de monopole. A cela, on peut opposer deux constats simples qui permettent de poser clairement le problème de l efficacité de la régulation actuelle. Le premier, apparemment favorable, est que le niveau moyen des prix des carburants dans les DOM n a pas été, sur une longue période, supérieur au niveau moyen constaté en métropole. Plus précisément, les prix du gazole, carburant majoritairement consommé, ont été plutôt inférieurs, alors que ceux du supercarburant ont été légèrement supérieurs comme le montre le tableau cidessous qui retrace, pour la période , l écart moyen de prix entre chaque DOM et la métropole en centime d euro par litre. Ec art en ct G az ol e Su pe r G ua de lo up e 0 10 M art ini qu e , 7 G uy an e 7, 4 16,5 Ré uni on - 7,6 Moy enne non pond érée -3 Mo yen ne pon déré e ,6 10,2 8,5 31

107 La situation n est complètement défavorable que pour la Guyane. Mais lorsqu on ramène ce département à son poids économique réel par une pondération à partir des volumes consommés, la situation apparaît relativement équilibrée : les gains sur le gazole, qui est le carburant majoritairement consommé, compense les pertes sur le super. A l exception de la Guyane, l idée que ces départements souffrent de prix de détail anormalement élevés est une idée fausse. Si on ne retient que ce seul critère de parité globale avec la métropole, on pourrait considérer hâtivement que la régulation des prix a eu un résultat convenable. On relèvera toutefois que ce résultat de long terme n est pas correctement perçu par le consommateur qui observe plus aisément les variations de prix de court terme. Or, la régulation publique, contrainte par le rythme administratif des arrêtés préfectoraux et parfois soumise à la tentation du lissage des prix, introduit des décalages temporaires dans les ajustements tarifaires par rapport aux évolutions du marché. Ces «décrochages» périodiques avec les prix de la métropole sont socialement acceptés par les consommateurs lorsque les variations de prix restent modérées ou lorsque le retard d ajustement leur est favorable, par exemple en différant une hausse, mais sont très critiqués en cas de forte volatilité des prix sur le marché de l approvisionnement, ce qui a été le cas pendant l année 2008 et au début 2009, notamment lorsque le dispositif légal d ajustement des prix régulés à mis plusieurs semaines pour intégrer des baisses déjà constatées en métropole où les prix sont libres. Certes, cette situation n est pas propre aux DOM et la volatilité des prix des carburants suscite également des critiques en métropole où les consommateurs reprochent périodiquement aux compagnies pétrolières de répercuter immédiatement les hausses de prix de gros constatées sur les marchés mondiaux d approvisionnement et de ne répercuter les baisses qu avec retard. Mais, dans les DOM, le reproche ne vise pas directement les pétroliers ou les pompistes, puisque ces opérateurs ne fixent pas eux-mêmes leur prix, mais l État régulateur qui se retrouve comptable de ces dysfonctionnements réels ou supposés. Le second constat amène à relativiser le premier : cette relative parité des prix de détail entre les DOM et la métropole sur le long terme n est obtenue qu au prix d une fiscalité plus basse, comme le montrent les tableaux suivants (pour la métropole on ne peut pas donner de prix unique puisque les prix sont libres, mais seulement des fourchettes de prix) : Gazole (décembre 2008) Total des taxes en /l Prix à la pompe en /l M ar ti ni qu e 0, 23 1, 06 G ua de lo up e 0, 33 1, 19 G u y a n e 0, 4 7 1, 2 5 R é u n i o n 0, 3 9 1, 1 1 Métro pole déc. Métro pole oct. 0,60 0,63 [0,98-1,04] [1,12-1,16] Super 95 (décembre 2008) M ar ti ni qu G ua de lo up G u y a n R é u n i Métro pole déc. Métro pole oct. 32

108 Total des taxes en /l Prix à la pompe en /l e e e 0, 54 1, 32 0, 55 1, 36 0, 7 0 1, 4 7 o n 0, 7 2 1, 4 7 0,79 0,85 [1,10-1,14] [1,25-1,30] La photographie des prix en décembre 2008 présente la situation la plus défavorable aux DOM, puisque la baisse du cours du brut n a pas encore été répercutée dans les prix de détail alors que c est déjà le cas en métropole. Les écarts sont donc surévalués. Mais si on fait le rapprochement des prix de décembre dans les DOM avec les prix d octobre en métropole, qui leur sont directement comparables du fait du décalage trimestriel de la régulation, on retrouve une situation plus équilibrée. Au-delà de l écart conjoncturel entre octobre et décembre, on observe une relative parité du prix de détail pour le gazole, mais elle n est obtenue qu au prix d une moindre recette publique. En revanche, lorsque la fiscalité locale se rapproche de celle de métropole, comme pour le super en Guyane ou à la Réunion, les prix de détail y sont sensiblement plus élevés. De fait, les prix hors taxes étaient, en décembre 2008, au moins le double de ceux de la métropole, comme le montre le tableau ci-dessous qui retrace l ordre de grandeur des prix hors taxes dans les différents DOM en comparaison des prix HT en métropole : prix HT en /l Super Gazol e M art ini qu e 0, 78 0, 83 Gu ade lou pe 0,8 1 0,8 6 G u y a n e 0, 7 7 0, 7 8 R é u n i o n 0, 7 5 0, 7 2 Métro pole [0,27-0,32] [0,30-0,35] On peut donc légitimement se demander si le maintien de cette parité relative des prix de détail ne se fait pas à un coût trop élevé pour les collectivités publiques, dont la relative modération fiscale «financerait» par un mécanisme de vases communicants, des surcoûts sur le prix hors taxes, comme on le voit sur les deux schémas ci-dessous : Structure du prix TTC du litre de gazole Structure du prix TTC du litre de super 33

109 Certes, une partie des surcoûts du prix hors taxes résulte de causes objectives, principalement les difficultés d approvisionnement de marchés isolés et étroits en carburants aux normes européennes, mais les écarts sont suffisamment importants avec la métropole mais aussi entre les différents départements d outre-mer pour que se pose la question de la formation de ce prix hors taxes et de l efficacité de sa régulation. V. III. Il faut réformer et rendre plus efficace la régulation des prix La régulation doit agir efficacement à deux niveaux : d une part, sur la formation du prix à l amont qui comprend l achat des produits raffinés et leur mise à disposition à la sortie des cuves de stockage ou, dans le cas de la Martinique, l achat du pétrole brut destiné à la raffinerie et la sortie des cuves de stockage et, d autre part, sur la formation du prix à l aval entre les cuves de stockage et la pompe. Le dispositif actuel instauré par les décrets de 1988 et de 2003 n est, dans les textes, pas très éloigné de cette approche mais il a été détourné de son objet. Conçue initialement comme une simple dérogation au principe général de la liberté des prix, la régulation des prix des carburants dans les DOM n est justifiée que par l existence de monopoles sur les échelons amont du circuit de distribution. Le plafonnement des prix de détail est destiné à éviter que les acteurs en monopole n imposent des prix trop élevés. L objectif de cette régulation n a jamais été de supprimer toute concurrence en prix, ou toute possibilité pour les acteurs d ajuster leurs prix, en fonction de leurs contraintes économiques. Or, elle s est transformée en un système de fixation administrative des prix de détail. Ces prix administrés sont considérés par les distributeurs comme des prix minimum, et non des prix maximum, permettant de préserver leurs marges dont le niveau a augmenté plus vite que les coûts de distribution. Cette disparition de toute concurrence par les prix est d autant moins justifiée que les réseaux de distribution sont nombreux et fournis, la densité de détaillants dans les zones de population principales permettant un véritable choix des consommateurs. L Autorité propose donc de redonner une cohérence au système de régulation en renforçant, en amont, la régulation des monopoles qui s est relâchée au fil des ans et en assouplissant, en aval, la régulation des prix qui est devenue trop rigide par rapport aux besoins des entreprises en concurrence sur le marché de détail, moyennant un certain nombre de réglages initiaux de nature à éviter la création ou le renforcement d éventuelles positions dominantes. Cette évolution serait cohérente avec la doctrine des régulateurs économiques sectoriels qui veillent au bon fonctionnement des industries de réseaux, par exemple les télécoms, l énergie ou les transports, et qui s efforce de cantonner leur action aux marchés de gros et aux échelons en monopole, et de limiter les entraves des entreprises sur les marchés de détail. A. Le marché amont de l approvisionnement Hors fiscalité et droits de port, l analyse de la structure des prix du segment amont se décompose en un prix d achat des produits raffinés, un prix de fret/assurance et un prix de stockage. 1. L approvisionnement aux Antilles a) Le raffinage local La question centrale, au niveau de la formation des prix, est celle du maintien du raffinage local qui conduit à des tarifs de fourniture plus élevés que les prix de marché. Il est moins cher, et avec un écart moyen très important de 15 ct/litre, d acheter du gazole et du super en Europe que de 34

110 le produire sur place à partir de pétrole brut importé. Or, cette question de la pérennité des activités de raffinage ne relève pas d une analyse concurrentielle mais d autres considérations de nature économique, industrielle ou d emploi, sur lesquelles l Autorité n est pas compétente. L Autorité attire néanmoins l attention du Gouvernement sur une difficulté juridique. La viabilité de la raffinerie de la SARA exige qu elle ne soit pas concurrencée par des importations pour l approvisionnement des Antilles et c est pour cette raison que cette société bénéficie d un monopole de fait sur l importation des produits : elle ne peut ainsi qu acheter les quantités complémentaires nécessaires pour servir le marché au-delà de ses capacités de raffinage, soit un rapport d environ deux tiers de raffinage local et un tiers d importations en moyenne sur la période récente. Ce monopole d importation résulte lui-même de son monopole de fait sur l utilisation de ses installations de stockage qu elle réserve à ses actionnaires. Or, il est probable que le refus d accès de ces installations aux importateurs non actionnaires de la SARA pose quelques problèmes au regard des règles de concurrence. Le Conseil de la concurrence a, en effet, condamné par une décision du 19 octobre 1993 Total et Elf pour abus de position dominante conjointe et entente, pour s être réservé l utilisation des installations de stockage de l'aéroport de Saint-Denis de La Réunion, détenues en commun dans un GIE, et avoir ainsi fait obstacle à l arrivée sur le marché d entreprises concurrentes. Cette décision a été confirmée par la cour d appel de Paris dans un arrêt du 6 juillet 1994, frappé d un pourvoi rejeté par la Cour de Cassation dans un arrêt du 5 mars Certes, on pourrait envisager de contourner l obstacle en prenant un texte pour réserver le monopole des importations de produits raffinés à la SARA, mais la création d un monopole de droit poserait une sérieuse difficulté de compatibilité avec le droit communautaire et notamment l'article 31 du Traité CE. Une question tout à fait identique s était posée pour le maintien en activité de la raffinerie de Whitegate en République d Irlande. Pour pouvoir concurrencer les raffineries du Royaume- Uni, le gouvernement irlandais avait imposé aux distributeurs une obligation d achat à la raffinerie locale pour environ 40% de leurs besoins. Saisie par voie de question préjudicielle par la High Court d Irlande, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) avait notamment estimé dans un arrêt du 10 juillet 1984 que ces restrictions n étaient pas nécessairement contraires au Traité mais que «le pourcentage des besoins totaux des importateurs qui peuvent être soumis à une obligation d achat ne doit pas être supérieur au pourcentage des quantités ci-dessus précisées par rapport à la consommation globale actuelle de l État membre concerné en produits pétroliers» (CJCE, affaire 72/83, Campus Oil Limited, point 49). En outre, la Cour avait estimé, à propos de la justification du maintien de la raffinerie locale pour assurer la sécurité des approvisionnements en cas de crise, que «les quantités de produits pétroliers couvertes par un tel système ne sauraient dépasser les limites de l approvisionnement minimal sans lequel la sécurité publique de l État concerné n est pas assurée» (CJCE, point 51). Toutefois, dans un arrêt du 13 décembre 1990, la CJCE a condamné pour manquement aux obligations du Traité la République hellénique qui avait adopté une loi prévoyant des restrictions injustifiées aux importations d hydrocarbures (CJCE, affaire C , Commission contre République hellénique). Le contrôle des conditions de conformité à l article 31 n est donc pas de pure forme et peut conduire à la condamnation de dispositifs disproportionnés ou insuffisamment justifiés par des impératifs de sécurité publique. La voie consistant à instaurer un monopole légal d importation aux Antilles semble donc également périlleuse, d autant qu il faudrait alors justifier pour quelles raisons d intérêt public, autres que la gestion d une situation héritée de l histoire de ces départements, une telle restriction du commerce est nécessaire aux Antilles et ne l est pas à La Réunion. 35

111 Il semble donc prudent d explorer des scénarios de reconversion de la SARA vers une simple activité de gestion des installations de stockage et utiliser les économies ainsi dégagées sur le prix d approvisionnement des carburants pour financer la reconversion des emplois industriels, vers d autres filières, par exemple les énergies renouvelables, comme le biocarburant à base de canne, le solaire ou l éolien. Si le système actuel est maintenu à moyen terme, il va de soi que la raffinerie actuelle restera en monopole et que la régulation de ses prix de sortie et de ses prix de produits importés devra être maintenue. Les analyses du rapport de la mission IGF-IGA-CG Mines, notamment sur la difficile question du taux de rentabilité du capital qu il convient d accepter, éclairent suffisamment le gouvernement sur les voies d amélioration de cette régulation pour qu il ne soit pas utile d y revenir ici. b) Les achats de produits raffinés Pour les achats résiduels actuellement non couverts par la production locale, l on se trouve déjà dans la situation de La Réunion, ce qui serait complètement le cas dans l hypothèse d une fermeture à terme de la raffinerie de la SARA, puisque les départements des Antilles et la Guyane seraient obligés d importer la totalité des produits raffinés. L Autorité renvoie donc aux analyses ci-après sur la situation des importations à La Réunion pour analyser les problèmes concurrentiels posés par les importations de produits raffinés. 2. L approvisionnement à La Réunion a) L achat des produits La fixation du prix de détail des carburants routiers doit prendre en compte le prix d achat des produits qui varie en permanence sur les marchés mondiaux. Il s agit donc du segment a priori le plus difficile pour l État régulateur puisque les prix varient en permanence sur les marchés mondiaux et que l administration est démunie face à l absence totale de transparence sur les coûts d achat réels. La solution pour concilier un prix d achat fluctuant et un prix régulé plus stable est d indexer le prix d approvisionnement sur un prix de marché dont la cotation est publique et de convenir que ce prix servira de référence au moment de calculer le prix régulé du mois ou du trimestre. En général, on choisit la cotation Platt s de la zone d approvisionnement. Il s agit donc d un prix variable qu on ne peut pas anticiper puisqu il n est pas relié à des coûts, mais qui reste un prix objectif puisqu il reflète la moyenne d un très grand nombre de transactions. S agissant de La Réunion, ce système n a pas fonctionné de manière totalement satisfaisante car le principe de la référence à un prix de marché objectif n a pas été véritablement respecté. On relève, tout d abord, que la cotation Platt s de la zone Singapour, où sont effectivement achetés les produits, n est utilisée que depuis octobre 2008 alors que Singapour est la zone d approvisionnement depuis mars On note ensuite que le montant de la prime est très instable au cours du temps, puisque le couple index de cotation/prime a connu six versions différentes entre 2003 et 2009 pour la même zone d approvisionnement. Pour autant, la prime affichée n est pas un prix de marché mais un montant conventionnel, alors que la société Platt s publie des fourchettes quotidiennes de premium pour les principales cotations des carburants. La justification des différents suppléments de prix (prime de qualité, prime de rareté, honoraires de trading, honoraires de fret) est donc relativement incertaine, alors que la gestion en commun des achats par les quatre compagnies pétrolières actives sur le marché de détail devrait conduire à une parfaite transparence des conditions d achat. Deux réformes pourraient être envisagées qui régleraient ce problème. La première solution serait de demander la production de factures d achat pour chaque cargaison pour calculer le prix 36

112 d importation régulé. Ce système paraît a priori le moins contestable et le plus transparent, mais il présente l inconvénient d engager la régulation des prix sur la voie d une couverture systématique des coûts d achat même si le prix payé est plus élevé que le prix de marché. Ce système est donc peu incitatif pour acheter au meilleur prix. Face à des fournisseurs verticalement intégrés, y compris sur le segment de la production et du raffinage, et qui peuvent donc s acheter les produits à eux-mêmes ou entre eux et se les facturer comme des prix de transfert, il n est guère prudent de garantir la couverture des prix d achats sur facture. La seconde solution, qui paraitrait préférable, serait de payer un prix de marché convenu à l avance, en laissant les acheteurs prendre leurs risques s ils font moins bien que le prix du marché ou conserver leur bénéfice s ils font mieux que le marché. La justification implicite d un tel système est que l administration, qui n est pas spécialiste du trading des produits pétroliers, ne saurait pas acheter mieux que la cotation Platt s incluant le premium moyen si elle décidait de s auto-approvisionner. Elle ne peut donc pas réguler les prix d importation en ayant des exigences plus fortes. Cette réforme serait de nature à introduire un élément concurrentiel sur l amont. En effet, les importateurs auraient une incitation à acheter le moins cher possible dans la zone d approvisionnement choisie puisqu ils sauraient que leur prix de gros régulé sera calé sur un prix de marché connu de tous. En achetant au meilleur prix, ils bénéficient d un avantage qui leur permet de baisser leur prix sur le marché de détail. Au contraire, s ils achètent au-dessus du prix moyen du marché, ils doivent soit essuyer une perte sur l amont, soit la compenser en augmentant leurs recettes sur le marché de détail et donc être confrontés à un désavantage concurrentiel. Cette observation vaudrait aussi pour les Antilles si le monopole d importation accordé de fait à la SARA était modifié pour tenir compte des observations faites sur la compatibilité du système actuel avec le droit communautaire ( Une question tout à fait identique s était posée pour le maintien en activité de la raffinerie de Whitegate en République d Irlande. Pour pouvoir concurrencer les raffineries du Royaume-Uni, le gouvernement irlandais avait imposé aux distributeurs une obligation d achat à la raffinerie locale pour environ 40% de leurs besoins. Saisie par voie de question préjudicielle par la High Court d Irlande, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) avait notamment estimé dans un arrêt du 10 juillet 1984 que ces restrictions n étaient pas nécessairement contraires au Traité mais que «le pourcentage des besoins totaux des importateurs qui peuvent être soumis à une obligation d achat ne doit pas être supérieur au pourcentage des quantités ci-dessus précisées par rapport à la consommation globale actuelle de l État membre concerné en produits pétroliers» (CJCE, affaire 72/83, Campus Oil Limited, point 49). En outre, la Cour avait estimé, à propos de la justification du maintien de la raffinerie locale pour assurer la sécurité des approvisionnements en cas de crise, que «les quantités de produits pétroliers couvertes par un tel système ne sauraient dépasser les limites de l approvisionnement minimal sans lequel la sécurité publique de l État concerné n est pas assurée» (CJCE, point 51). à La voie consistant à instaurer un monopole légal d importation aux Antilles semble donc également périlleuse, d autant qu il faudrait alors justifier pour quelles raisons d intérêt public, autres que la gestion d une situation héritée de l histoire de ces départements, une telle restriction du commerce est nécessaire aux Antilles et ne l est pas à La Réunion. ci-dessus). Sauf à apporter la démonstration que le groupement des achats aboutit à des économies de coûts dûment chiffrées, l actuelle coordination des achats entre les importateurs deviendrait alors inutile et même inopportune. b) Le fret Le prix du fret est également un prix de monopole dont l État vérifie qu il est fixé en fonction des coûts. Néanmoins, deux éléments de coûts ont fait l objet de critiques. Le premier est 37

113 l introduction d une prime de 2 $/tonne sur tout le chargement, à l occasion du changement de navire en décembre Ces honoraires doublent d autres honoraires de 5 $/tonne facturés sur le prix d achat des produits. Interrogés sur la justification de cette prime, les pétroliers ont été incapables de la justifier. Le second est la surévaluation du coulage en mer dont le taux a été fixé par les pétroliers à 1% de la cargaison alors que les normes de la profession seraient plutôt de l ordre de 0,2% ou 0,25%. Bien qu ils aient un impact sur le prix de détail inférieur à 1ct/litre, la mission IGF-IGA-CG Mines a demandé, à juste titre, la suppression de ces deux surcoûts injustifiés. Ils génèrent, en effet, des recettes qui sont loin d être négligeables lorsqu on les rapporte aux quantités en jeu, de l ordre de tonnes de carburants par an. La prime de 2 $/tonne génère $ par an, soit environ , et la surévaluation du coulage, qui dépend de la valeur de la cargaison, a récemment varié entre 3,5 et 5 par tonne transportée, ce qui représente 1,4 M à 2 M (montant qui a pu varier dans le passé en fonction du cours des produits raffinés). 3. Conclusion sur l approvisionnement L Autorité propose de renforcer la régulation dans le sens d un plafonnement des prix d importation qui ne pourraient être supérieurs aux prix de marché constatés sur la zone d achat pendant la période d achat et calés sur un index de cotation public indépendant des acheteurs, éventuellement majoré des primes techniques constatées sur ce marché et à cette période par le même index de cotation public et indépendant. Il convient d ajouter à ce prix la prestation d assurance-fret facturée à prix coûtant. B. Le stockage Il n est pas contestable que les installations de stockage dans les DOM sont en situation de monopole de fait. Dans ces conditions leur «caractère de facilité essentielle» paraît vraisemblable, mais seule une procédure contentieuse contradictoire permettrait de l affirmer. Les questions de concurrence se réduisent donc à celles de la tarification et de l accès. La tarification des facilités de stockage doit essentiellement répondre à la question difficile de la juste rémunération de l investissement puisque les autres coûts sont objectifs et assez bien connus. Elle ne peut pas être traitée convenablement sans une séparation comptable très stricte des activités, séparation qui est un pré-requis minimum mais qui pourrait être insuffisant s il apparaissait que l activité commerciale concurrentielle peut être affectée par une absence de séparation fonctionnelle des activités en monopole et des activités en concurrence. La garantie de l accès demande aussi que soit vérifié le caractère complet de la régulation puisque certaines prestations, pourtant exercées en monopole, ne sont pas ouvertes à tous mais semblent être réservées à certains opérateurs et que la régulation tarifaire est plus ou moins précise suivant les prestations. Ces deux points seront examinés successivement pour les différents DOM. 1. Le stockage aux Antilles et en Guyane La question de la séparation fonctionnelle est réglée aux Antilles puisque la SARA est une filiale qui n est pas active sur le marché aval. La question des subventions croisées entre activité en monopole et activité en concurrence ne se pose pas et la vérification de l orientation des prix vers les coûts peut être facilement traitée au plan méthodologique puisque les deux activités de cet opérateur, le raffinage et le stockage sont assurées en monopole. Il faudrait néanmoins regarder plus précisément ce point si l activité de stockage était ouverte à des tiers non actionnaires de la SARA. 38

114 C est donc essentiellement l accès qui pose un problème puisque la SARA bénéficie de fait d un monopole d importation et que les grossistes qui ne sont pas actionnaires ne peuvent bénéficier des facilités de stockage moyennant le paiement d un tarif de passage : ils doivent acheter à la SARA. Or, il n y a aucune raison que l utilisation des cuves de stockage soient réservées aux actionnaires de la SARA. Même en considérant comme remplies les conditions posées par la CJCE dans l affaire de la raffinerie irlandaise (voir Une question tout à fait identique s était posée pour le maintien en activité de la raffinerie de Whitegate en République d Irlande. Pour pouvoir concurrencer les raffineries du Royaume-Uni, le gouvernement irlandais avait imposé aux distributeurs une obligation d achat à la raffinerie locale pour environ 40% de leurs besoins. Saisie par voie de question préjudicielle par la High Court d Irlande, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) avait notamment estimé dans un arrêt du 10 juillet 1984 que ces restrictions n étaient pas nécessairement contraires au Traité mais que «le pourcentage des besoins totaux des importateurs qui peuvent être soumis à une obligation d achat ne doit pas être supérieur au pourcentage des quantités ci-dessus précisées par rapport à la consommation globale actuelle de l État membre concerné en produits pétroliers» (CJCE, affaire 72/83, Campus Oil Limited, point 49). En outre, la Cour avait estimé, à propos de la justification du maintien de la raffinerie locale pour assurer la sécurité des approvisionnements en cas de crise, que «les quantités de produits pétroliers couvertes par un tel système ne sauraient dépasser les limites de l approvisionnement minimal sans lequel la sécurité publique de l État concerné n est pas assurée» (CJCE, point 51).), on arriverait au mieux à une obligation d achat des distributeurs indépendants à hauteur de l approvisionnement local par la raffinerie, c est-à-dire entre 60% et 70% de leurs besoins, le reste pouvant être librement importé. Cette ouverture serait encore plus nécessaire dans l hypothèse du passage à un système d importation plus large ou total de produits raffinés et d une fermeture de la raffinerie, la SARA devenant simple gestionnaire des installations de stockage. Afin de prévenir des contentieux futurs et de préparer une reconversion probable de la raffinerie des Antilles, l Autorité propose de revoir les statuts de la société ou les règlements existants de manière à s assurer de l accessibilité totale et non discriminatoire de ces installations aux opérateurs tiers, non actionnaires de la société, tout en maintenant une obligation d achat à proportion de la part de marché de la raffinerie sur le marché pertinent, conformément à la position prise par le juge communautaire. Cette adaptation ne mettrait pas en péril l équilibre économique de la raffinerie dont les débouchés et les revenus seraient préservés, et créerait un certain espace de concurrence sur les achats de produits raffinés. Toutefois, l Autorité ne se prononce pas à ce stade sur la pertinence des achats groupés, organisés aujourd hui par les actionnaires de la SARA dans la mesure où les pétroliers ne donnent aucune information sur les prix d achat réels des produits raffinés et où il n est pas possible de savoir si le groupement des achats permet des économies par rapport à des achats en concurrence, ni a fortiori de chiffrer ces économies éventuelles. Il conviendrait de s assurer que la réglementation garantisse qu un certain nombre de prestations annexes gérées en monopole et indispensables aux grossistes concurrents, comme l utilisation des pipe-lines ou des navires de cabotage, soient également régulées dans le sens d un accès effectif à des tarifs transparents et non discriminatoires. 2. Le stockage à La Réunion a) La clarification de la situation de la SRPP La question de la séparation fonctionnelle des activités de la SRPP en monopole se pose de manière aigue à La Réunion à un double titre : la SRPP est active sur le marché aval avec deux enseignes Elf et Shell et, en outre, elle entretient des liens structurels avec un troisième réseau, 39

115 celui de Total, qui appartient au même groupe pétrolier. Cette situation rend difficile la vérification de l absence de subventions croisées entre les deux types d activité. Elle entretient aussi une asymétrie sur le marché entre Chevron et Tamoil, d une part, et l ensemble Total- SRPP, d autre part, donnant aux seconds un avantage informationnel indéniable. L Autorité de concurrence n a pas examiné le mode de calcul des tarifs de passage et leur niveau, question qui n entrait pas dans le champ de sa saisine puisque la régulation de ce prix par l État n est pas contestée. Il note que le niveau actuel de ce tarif est jugé trop élevé par Chevron et Tamoil, distributeurs qui ne sont pas actionnaires de la SRPP, et que la cour d appel a ordonné une expertise comptable de ces tarifs dans le cadre d un contentieux engagé par Chevron. La mission IGF-IGA-CGMines a également proposé une baisse des tarifs de passage en jugeant le taux de rentabilité des capitaux investis trop favorable pour une telle activité en monopole. Il appartient à l État régulateur de déterminer le bon niveau des tarifs, mais l Autorité observe que la SRPP, a réalisé des bénéfices nets après impôt de [ ], et a versé des dividendes de [ ] La situation financière de la SRPP autoriserait donc une régulation plus stricte de ses tarifs. En toute hypothèse, elle considère que Total et Shell doivent procéder à la filialisation complète des activités en monopole : le stockage des hydrocarbures liquides, le transport par pipe-line de ces hydrocarbures, le stockage et l embouteillage du gaz liquéfié. Cette filialisation sera de plus rendue nécessaire pour dénouer les liens structurels qu entretiennent ces deux groupes sur le marché de détail comme cela sera expliqué ci-après (voir La situation des distributeurs a pris une forme tout à fait inhabituelle avec la fusion Total-Elf en 2000, du fait des liens existants entre Elf et Shell. Ces deux sociétés étaient, en effet, coactionnaires à 50%/50% de la Société Réunionnaise des Produits pétroliers (SRPP), gestionnaire des installations de stockage sur le site de Port-Réunion. Elles avaient également choisi de faire gérer par leur filiale commune leurs réseaux respectifs de stations-services. La SRPP, regroupant sous sa bannière les enseignes Elf et Shell, était donc en 2000 le concurrent direct du réseau Total sur le marché de la distribution des carburants. et suivants). Il conviendra, comme pour les Antilles de vérifier que les statuts de la société permettent l accessibilité totale et non discriminatoire de ces installations aux opérateurs tiers, non actionnaires de la société. Il faudrait de surcroit vérifier qu un certain nombre de prestations annexes indispensables aux grossistes concurrents, comme l utilisation des pipe-lines soient également régulées dans le sens d un accès effectif à des tarifs transparents et non discriminatoires. b) Le stockage du carburéacteur Il apparaît nécessaire de ne pas négliger la question du stockage du carburéacteur également géré en monopole, la SARA bénéficiant de plus d un monopole d importation aux Antilles. Cette question des cuves de stockage est particulièrement sensible à La Réunion puisque les volumes vendus sont très importants (environ m³), que l aéroport est assez éloigné du port pétrolier, qu il n est pas relié à ce port par un pipe-line et que les camions citernes doivent traverser l agglomération de Saint-Denis d ouest en est pour alimenter les cuves de l aéroport. Cette régulation du monopole amont est d autant plus nécessaire que les prix du carburéacteur sont libres et que le segment aval est concurrentiel. Or le GIE gestionnaire des cuves est en voie de dissolution et la Chambre de commerce doit lancer un appel d offres, en 2009, pour revoir les conditions de gestion de ces installations. Il serait opportun de profiter de cette remise à plat pour réguler de manière efficace ces installations qui ont donné lieu par le passé à de multiples difficultés, notamment en clarifiant la question de la rentabilité interne accordée à l investisseur retenu et en garantissant l accès à des tarifs non discriminatoires. 40

116 Par ailleurs, le retrait de certains fournisseurs du marché du carburéacteur dans les DOM amène à poser la question de la possibilité d auto-approvisionnement des compagnies aériennes. Ces acheteurs, peu nombreux pourraient en effet eux-mêmes acheter, séparément ou réunis en centrale d achat, sur le marché et importer directement leurs produits. Cela nécessite de leur ouvrir l accès au fret commun assuré par le bateau dédié à un tarif non discriminatoire et aux installations de stockage dans les mêmes conditions que les autres importateurs. Il faut relever que des possibilités d importation locale pour un tel auto-approvisionnement existent, par exemple à l île Maurice pour La Réunion, puisque les produits sont à des normes internationales à condition que les installations de stockage soient totalement accessibles. 3. Conclusion sur le stockage L Autorité propose, pour les Antilles et la Guyane, une ouverture progressive des facilités de stockage aux distributeurs non actionnaires de la SARA et la limitation des obligations d achat de produits raffinés localement à la part de marché que peut effectivement fournir la raffinerie locale, le reste de l approvisionnement étant laissé à l initiative des grossistes-importateurs. Elle propose également l extension, au besoin, des prix réglementés à toutes les activités annexes gérées en monopole et qui échapperaient encore à la régulation. Elle propose, pour La Réunion, une mesure structurelle consistant à filialiser les activités en monopole de la SRPP, sur le modèle de ce qui existe aux Antilles pour la SARA, afin que le gestionnaire des installations indispensables à tous les distributeurs (stockage, pipe-line, embouteillage) ne soit pas lui-même présent sur le marché de la distribution en gros et au détail. Elle propose également l extension, au besoin, des prix réglementés à toutes les activités annexes gérées en monopole et qui échapperaient encore à la régulation. C. Le segment aval de la distribution 1. La régulation des prix de gros Le problème principal qui a été identifié est la fongibilité de la marge de gros et de la marge de détail par le jeu des redevances. On peut donner un éclairage sur les effets de ces versements croisés en relevant la progression des redevances brutes payées par les stations. Les données fournies par les pétroliers ne permettent pas de distinguer les trois départements de la zone américaine qui sont présentés ensembles : Redevanc es brutes encaissée s Antilles- Guyane Réunion Augmentat ion 2008/ ,5% ,5% On observe que ces redevances brutes sont en progression constante et évoluent nettement plus vite que l inflation, les salaires ou l indice des prix des services. Il y a donc un accroissement des prélèvements sur les gérants (particulièrement élevé en 2008 à La Réunion). Ces montants représentent en moyenne, pour les grossistes, [ ] de leur chiffre d affaires en carburants routiers, avec des écarts allant de [ ]. Sachant que la marge de détail est inférieure de 10% à ce chiffre d affaires, on mesure que ce prélèvement n est pas négligeable, même si ces redevances sont également assises sur le chiffre d affaire des boutiques. 41

117 Ces redevances ne sont pas des revenus nets pour les réseaux qui assument des charges de propriétaires, dont la fiscalité, ou de locataires lorsqu ils louent eux-mêmes certains terrains. La situation est, de ce point de vue, différente à La Réunion, où on note une augmentation des redevances nettes qui viennent s ajouter aux marges de gros garanties par la régulation, et aux Antilles, où les redevances nettes sont stables du fait d une augmentation des loyers versés par les distributeurs aux propriétaires : Redevance s nettes Augmentation 2008/06 Antilles- Guyane ,1 % Réunion ,8% Il est très difficile de mesurer l impact de ces prélèvements station par station sans procéder à un audit de leurs comptes, compte tenu de la variété des conditions d exploitation. Les redevances sont essentiellement liées aux volumes vendus, qui peuvent varier dans des proportions de un à cinq pour une même enseigne dans un même département, voire dans une même zone de chalandise. Elles sont également liées à l existence ou non d une boutique et à sa taille. En l absence de boutique les redevances chutent rapidement. Néanmoins, pour donner une idée de cet impact, on peut indiquer le montant moyen des redevances versées par station pour les trois années considérées : on constate que c est à La Réunion que les redevances sont les plus élevées, environ à par an et par station, y compris les redevances des boutiques, alors qu elles le sont un peu moins à la Martinique, entre et , en Guadeloupe, entre et et surtout en Guyane, où elles se situent nettement en dessous de Ces ordres de grandeur sont ceux des résultats nets de beaucoup de stations dont les liasses fiscales ont été examinées. La conclusion que l on peut tirer de ces éléments est qu il n est pas pertinent, au plan économique, de distinguer la marge de gros de la marge de détail et de la soumettre à une régulation uniforme en considération des coûts supportés par le grossiste. Les coûts réels de distribution sont en réalité répartis de manière variable entre les détaillants ou les grossistes en fonction de la situation foncière et du contenu de chaque contrat, voire tout simplement de la politique de l enseigne qui peut, par exemple, augmenter ou diminuer et même supprimer les redevances variables sur les volumes vendus et s appuyer sur des redevances fixes ou moduler les redevances des boutiques. Les résultats d exploitation des détaillants peuvent être gonflés ou annulés selon la politique de redevance menée par l enseigne. L Autorité propose donc de ne plus réguler la marge de distribution de gros en tant que telle et, par conséquent de ne plus fixer non plus de prix de gros du carburant distribué en se limitant à fixer le prix de gros du carburant importé. 2. Le marché de détail a) Les conséquences des prix de détail imposés La régulation des prix de détail par un prix unique se heurte à une difficulté structurelle qui n a pas assez été prise en compte jusqu à présent : la rentabilité des stations est tellement variable que la recherche d un «juste prix» de vente est illusoire. De plus, la régulation actuelle prive le marché de la souplesse minimale à son bon fonctionnement et rend inopérant l outil naturel à utiliser en priorité pour préserver la rentabilité des petites stations : la variation des prix. Il serait en effet moins coûteux pour la collectivité et moins pénalisant pour le consommateur de laisser les petites stations moduler leur prix en fonction de 42

118 leur situation financière et de la demande plutôt que de relever les marges de l ensemble du secteur pour atteindre le même objectif. Le prix unique du carburant n a de sens que dans une logique de mutualisation des coûts de distribution entre les points de vente. Ces coûts sont assez différents en fonction de deux critères principaux : les volumes vendus et l éloignement par rapport à la zone de stockage qui entraîne des coûts de transport plus élevés. Accessoirement ces deux critères sont cumulatifs pour les petites stations puisque la taille des cuves détermine la fréquence de l approvisionnement. Si le prix de vente unique était un prix moyen représentatif des coûts moyens sur l ensemble du département et qu existait un gestionnaire unique couvrant l ensemble des charges avec l ensemble des recettes, le prix unique serait l équivalent d une tarification de service public puisque sa fixation en fonction du coût moyen reviendrait à faire subventionner les plus petites stations par les plus grandes. Cette «mutualisation» est implicite au sein d un même réseau pour les coûts de d approvisionnement par camion puisque les prix de gros sont les mêmes. Les stations les plus éloignées de la zone du port peuvent être, à travers les comptes du grossiste, de fait subventionnées par les économies faites sur l approvisionnement des stations proches du port ou de plus grande taille. Mais ce mécanisme ne peut fonctionner avec plusieurs enseignes concurrentes qui disposent de réseaux plus ou moins rentables dont les coûts ne peuvent être mutualisés Au stade du détail, les gestionnaires des stations doivent couvrir leurs charges avec une marge uniforme. Si cette marge était calée sur un coût moyen, elle ne suffirait pas pour faire vivre les stations les moins rentables qui devraient fermer. La marge de détail est donc fixée pour permettre à ces entreprises de se maintenir sur le marché, ce qui dégage une possibilité de rente pour les stations les plus favorisées qui auraient pu pratiquer des prix plus bas si elles avaient été mises en situation de concurrence. Ce défaut de régulation est encore accentué par les différences importantes entre locataires-gérants et indépendants. Les premiers payent des redevances dont le niveau a une justification économique incertaine et qui prennent souvent la forme d une simple ponction des recettes par le réseau qui cherche à améliorer sa propre rentabilité. Les seconds reçoivent des redevances dont la justification économique s apparente au prix à payer par le grossiste pour conserver la station dans son réseau. b) La proposition de l Autorité Le prix unique agit donc aveuglément sur des situations économiques différentes et prive de toute marge d adaptation les entreprises qui en auraient besoin. En outre, ce prix devient un enjeu en soi qui focalise toutes les demandes faites aux pouvoirs publics qui ne peuvent, sauf situation exceptionnelle, procéder à des réallocations de marges sous plafond. La pente naturelle est de relever le plafond pour gérer les conflits. L Autorité propose donc de modifier l angle d approche de la régulation : plutôt que de prévoir une régulation permanente et rigide qui évolue par crises successives, elle propose de passer à une régulation temporaire justifiée par un fonctionnement anormal du marché. Cela revient, tout en restant dans le cadre du deuxième alinéa de l article L du code de commerce qui mentionne «des situations de monopoles» à ne plus prévoir un plafonnement permanent des prix puisque l existence de monopoles, qui continuent à être régulés de manière permanente, n a qu un effet indirect sur la distribution de détail, mais à s inspirer du troisième alinéa de cet article qui autorise l État à s opposer à des hausses excessives de prix en prenant «des mesures temporaires motivées par ( / ) une situation manifestement anormale du marché dans un secteur déterminé». 43

119 Dans ce schéma, il conviendrait de laisser au préfet son pouvoir permanent de prendre par arrêté des mesures de plafonnement mais de limiter l exercice de ce pouvoir au cas où il peut constater de manière objective une dérive des marges de distribution caractéristique d une situation anormale sur le marché à partir de critères définis par un décret en Conseil d État pris après avis de l Autorité de la concurrence. Logiquement ces mesures de plafonnement des prix de détail seraient temporaires et limitées aux périodes de dysfonctionnement du marché. 3. Les obstacles structurels à la concurrence Il s agit principalement des risques de position dominante. Si des telles situations existent sur les marchés de gros ou de détail, la concurrence en prix pourrait être faussée et les rivaux de l entreprise dominante dissuadés de s engager dans une politique commerciale agressive. Cela pose la question de la position prééminente du groupe Total avec des risques de dominance simple ou collective. Lors de la fusion Total-Elf en 2000, ni la Commission européenne, ni le ministre de l économie n ont examiné les conséquences de cette opération sur les marchés des DOM. La raison principale en est probablement que ces marchés étaient soumis à une réglementation des prix de gros et de détail et que les autorités de concurrence n ont pas considéré que l examen de la situation de ces départements était prioritaire ou même pertinent. Pourtant, les changements provoqués par cette concentration sur les marchés de gros et de détail méritent d être examinés dans la perspective d un assouplissement de la régulation des prix de détail, pour lequel un certain équilibre initial du marché serait souhaitable. a) Les marchés de gros aux Antilles et en Guyane Le marché fonctionnant selon le principe qu un distributeur a l exclusivité de la fourniture de carburants aux stations à ses couleurs, les parts de marchés de gros s apprécient en fonction de la taille et des ventes de chaque réseau. La société Total a pu doubler la taille de son réseau en absorbant le réseau Elf aux Antilles d après les chiffres de 2000 du Groupement professionnel de l Industrie du pétrole aux Antilles (GPP). Aujourd hui, Total est le premier distributeur de carburants, routiers ou marines, dans les trois départements des Caraïbes : en Guadeloupe avec 49 stations, soit une part de marché de 45% en nombre de stations et de [38%-42%] en volume, en Martinique avec 40 stations, soit une part de marché de 47% en nombre de stations et de [ ] en volume, en Guyane avec 12 stations, soit une part de marché de 41% en nombre de stations et de [ ] en volume. Sa présence globale sur la zone est de 45% environ aussi bien en volume vendu qu en nombre de stations. La structure du marché est également déséquilibrée en sa faveur puisque le second réseau sur la zone est celui de Rubis-Vito (ancien réseau Shell) qui ne représente qu environ 22% du marché en nombre de stations et moins de 20% en volume vendu. Mais ce «challenger» n est pas un major du secteur pétrolier et n est donc pas intégré vers l amont comme Total. Les deux autres groupes pétroliers, Chevron et Esso, sont certes intégrés à l amont mais ont une part de marché plus modeste et mènent une politique de rationalisation de leurs réseaux qui a progressivement ramené leur part de marché à un niveau de 12%-15% aussi bien en nombre de stations qu en volume vendu, soit le tiers de la position de Total. De plus, le nombre de stations de Total a progressé sur deux départements ces dernières années puisque l enseigne a gagné, en Guadeloupe en 2008, une station indépendante, précédemment sous contrat de fourniture avec Chevron, et trois en Guyane en 2006 et 2008, également aux dépens de Chevron. Enfin, Total, avec la fusion avec Elf, est devenu l actionnaire majoritaire de la SARA avec 50% des parts. 44

120 Pour l ensemble de ces raisons, on ne saurait exclure, sous réserve d une instruction approfondie qui dépasse le cadre de cet avis, que Total soit en position dominante sur le marché de gros des carburants routiers aux Antilles et en Guyane. b) Les marchés de gros à La Réunion La situation des distributeurs a pris une forme tout à fait inhabituelle avec la fusion Total-Elf en 2000, du fait des liens existants entre Elf et Shell. Ces deux sociétés étaient, en effet, coactionnaires à 50%/50% de la Société Réunionnaise des Produits pétroliers (SRPP), gestionnaire des installations de stockage sur le site de Port-Réunion. Elles avaient également choisi de faire gérer par leur filiale commune leurs réseaux respectifs de stations-services. La SRPP, regroupant sous sa bannière les enseignes Elf et Shell, était donc en 2000 le concurrent direct du réseau Total sur le marché de la distribution des carburants. Après la fusion, Total s est trouvé propriétaire de deux enseignes Elf et Total tout en devenant coactionnaire de la SRPP à parité avec Shell, gestionnaire des réseaux Elf et Shell. Total, à la différence de ce qu il a fait aux Antilles en fusionnant les réseaux Total et Elf, n a pas choisi de sortir Elf de la SRPP pour placer ses deux réseaux sous la responsabilité de sa filiale à 100% Total Réunion plus utile. Certes, la SRPP est présentée comme une filiale commune de plein exercice et les réseaux de stations-services sont réputés être concurrents, mais le lien structurel que constitue la SRPP conduit à poser la question d une dominance collective de l ensemble Total / SRPP en retenant plusieurs indices. En premier lieu, la SRPP bénéficie depuis plusieurs années d une mise à disposition de salariés par Shell ou Total pour sa direction générale. [ ] La SRPP est donc, de fait, placée sous la direction de deux cadres liés à Total par un contrat de travail et mis à disposition de la filiale. Toutes les données financières et de gestion, toutes les décisions stratégiques et les secrets commerciaux de la SRPP sont donc non seulement connus de Total, mais décidés par des salariés du groupe Total mis à disposition de la SRPP. En deuxième lieu, la SRPP a deux fournisseurs pour ses produits pétroliers : la filiale trading de Shell pour la zone Moyen-Orient et Total Outremer, filiale à 100% de Total SA. Or, Total Outremer est également le fournisseur unique de Total Réunion. Les deux «concurrents», Total Réunion et SRPP, ont donc pour partie le même fournisseur qui connaît les prix de transfert de ses deux filiales, mais aussi les prix de transfert de Shell à la filiale commune. Les conditions de concurrence entre les trois réseaux de détail Total, Elf et Shell sont donc fortement compromises, notamment dans l hypothèse d une plus grande liberté des prix de détail. Les deux enseignes de Total, Total et Elf, rassemblent 58 stations sur 147, soit 39% de part de marché, ce qui correspond en volume à une part de marché de [ ]. Mais si on considère que la gestion du réseau Shell est intimement liée à celle du réseau Elf au sein de la SRPP, alors la part de marché de l ensemble Total-Elf-Shell représente 58% des stations et [ ] des volumes vendus. Compte-tenu de ces parts de marché et de la gestion en monopole des installations de stockage, on ne peut exclure que l ensemble formé par Total Réunion et SRPP, deux sociétés liées par un actionnaire commun, soient en position de dominance collective sur les marchés de gros et de détail des carburants à La Réunion. Interrogé lors de la séance, la société Total Outremer n a pas contesté le caractère anormal de la situation créée au sein de la SRPP par la fusion Total-Elf de 2000 et a indiqué que le groupe Total ne voyait pas d objection à dénouer les liens structurels avec Shell mais que cela demandait de trouver un accord avec cet actionnaire, détenteur de 50% du capital. L Autorité prend acte de cette position et réaffirme qu il est nécessaire de sortir à bref délai de cette confusion d intérêt sur le marché de détail. Dans ces conditions, on peut considérer que les conséquences de la fusion entre Total et Elf en 2000 n ont pas été correctement prises en 45

121 compte sur le marché de La Réunion et qu il est opportun de demander à Total et Shell de dénouer leurs liens structurels. Cette clarification devrait prendre deux formes : la filialisation de l activité de stockage déjà mentionnée, afin de prendre en compte la gestion monopolistique d une facilité essentielle, et le regroupement de la gestion des enseignes Elf et Total sous l égide d une filiale du groupe Total et non d une filiale commune avec Shell. Cela permettrait, en amont, d améliorer la régulation des prix de la SRPP, sans préjudice de l expertise judiciaire en cours sur la facturation équitable des coûts de passage, et de rétablir, en aval, les conditions de concurrence directe entre Shell et Total. Au terme de ce dénouement des liens entre les deux groupes, Total deviendrait, assez largement, l opérateur le plus puissant voire l opérateur dominant de La Réunion avec environ 40% de part du marché de détail et la détention de 50% des parts chez l opérateur de stockage, alors que le deuxième réseau de l île, celui de Chevron, serait limité à [20-24%] de part de marché sans participation dans les installations de stockage. c) Les risques de dominance sur les zones de chalandise La dominance sur les marchés de détail est plus difficile à examiner car il s agit de marchés locaux, sauf pour l approvisionnement occasionnel lors de déplacements plus longs. Compte-tenu de la taille des îles, du nombre des enseignes et de la densité des réseaux, on peut faire l hypothèse qu il n y a moins de risque de dominance sur une zone de chalandise donnée. Sauf le cas particulier des stations marines, l Autorité n a pas détecté de stations en monopole, du point de vue géographique, aux Antilles. Il y en existe quelques unes, mais il s agit de points de vente isolés distribuant de faibles volumes. La question de l existence de positions dominantes sur les marchés de détail se pose de manière plus sérieuse à La Réunion compte-tenu de l étendue de ce territoire et de l éloignement des bassins de population. Il faut à cet égard distinguer deux situations. La première est celle dans laquelle les liens structurels entre Total et Shell ne sont pas dénoués, ce qui conduit à apprécier une possible dominance collective en comptabilisant ensemble les stations Total, Elf et Shell dans chaque bassin de chalandise. La seconde est celle dans laquelle Shell reprend son autonomie, Total récupérant la gestion directe de l enseigne Elf, ce qui conduirait à comptabiliser uniquement les stations Total et Elf dans l examen des dominances locales. La première option est très défavorable puisque l ensemble Total-Elf-Shell atteindrait des parts de marchés de 70% à 75% dans plusieurs zones de chalandise, ce qui poserait naturellement des problèmes de coordination des prix en cas d allègement de la réglementation. La seconde option conduit à des résultats qui, sous réserve d une instruction plus détaillée, semblent plus acceptables, les dominances n étant éventuellement observées qu en retenant des périmètres très étroits. En toute hypothèse, ces quelques cas ne constitueraient pas des obstacles insurmontables et pourraient être réglés en autorisant, dans les zones concernées, la création de quelques stations dont l attribution serait réservée aux concurrents de Total. A ce stade et en l absence de la démonstration d abus, il n est pas possible d envisager, ni aux Antilles, ni à La Réunion, une mesure autoritaire de réallocation de stations pour corriger, dix ans après, les conséquences de la fusion entre Total et Elf sur les marchés de détail. L Autorité relève néanmoins que le réseau Total aux Antilles est celui qui compte le plus grand nombre de stations indépendantes et que celui de la SRPP à la Réunion en comprend également un nombre significatif. Les contrats de fourniture exclusive de plusieurs de ces stations arrivant à échéance prochainement, il existe donc des possibilités de changement d enseignes. d) Le rôle d aiguillon de la concurrence des stations indépendantes Une autre question importante posée par structuration du marché est donc le maintien des indépendants et les possibilités de changement d enseigne en fin de contrat. A cet égard, les réseaux ont des politiques très différentes : certains conservent un nombre important 46

122 d indépendants comme Chevron à La Réunion ou Total aux Antilles, d autres affichent leur volonté de consolidation de leur réseau par rachat des indépendants et généralisation de la gestion en location-gérance, comme Esso aux Antilles ou Total à la Réunion. Comme on l a vu, ces stations jouent un rôle particulier sur les marchés de détail des DOM car elles sont susceptibles d exercer une pression concurrentielle sur les grossistes en menaçant de changer de fournisseur en fin de contrat si elles n obtiennent pas des conditions de prix satisfaisantes pour leur approvisionnement. Les pétroliers sont effectivement prêts à consentir des conditions de vente avantageuses aux propriétaires indépendants qui possèdent une station à fort potentiel. Ce constat est encore plus net lorsqu un réseau a l occasion de gagner une station nouvellement créée ou d obtenir un changement d enseigne pour une station perdue par un concurrent. Les réseaux qui souhaitent s étendre peuvent alors se livrer à une concurrence très intense pour capter un nouveau point de vente, comme on l a vu pour l attribution des stations de la route des Tamarins à La Réunion, ou la lutte entre Rubis et Total pour capter les indépendants qui ont quitté Chevron ou Esso. On peut, à cet égard, mentionner le transfert récent de la station Matoury, située à Cayenne, qui est passée de Chevron à Total en mars A cette occasion, [.] Ces efforts financiers s expliquent par le fait, que cette station, avec un volume vendu [ ] est une des principales de Guyane et la seule importante parmi les stations indépendantes. On peut faire le même constat pour la station Marigot en Martinique, passée de Chevron à Rubis en décembre Il s agit d une station moyenne [ ] Les risques d une disparition rapide des indépendants sont assez faibles car, en matière de distribution de carburants, la ressource rare est le foncier. Celui qui est propriétaire d une station ou d un terrain susceptible d accueillir une station, surtout si elle est bien placée, bénéficie d une forme de rente de situation. Cette position est renforcée par la grande stabilité du nombre des stations et la réticence des autorités publiques à autoriser de nouvelles ouvertures pour ne pas mécontenter les titulaires. Les contrats de fourniture prévoient d ailleurs une clause de préférence en faveur de l enseigne cocontractante si l exploitant indépendant décidait de mettre son fonds de commerce en vente ou en location gérance. Cette situation n est pas théorique puisque plusieurs pétroliers ont indiqué exploiter en locationgérance des stations ou fonds de commerce pris par eux-mêmes en location. La présence des indépendants peut donc contribuer à animer la concurrence en poussant les fournisseurs à baisser leurs prix de gros. Inversement, le maintien de réseaux intégrés peut limiter le pouvoir des marchés des indépendants et les pousser à restituer aux consommateurs les «marges arrières» qu ils conservent actuellement pour eux. L Autorité propose donc de garantir les conditions de sortie des indépendants pour conserver une fluidité du marché en agissant sur plusieurs clauses qui limitent actuellement ces possibilités. En premier lieu, il faudrait limiter la durée des contrats exclusifs à cinq ans au lieu de dix ans, de manière à ce que les possibilités de changement d enseigne soient plus fréquentes. Cette modification devrait être immédiate moyennant l adaptation de certaines clauses financières des contrats qui sont calées sur une durée dix ans. En deuxième lieu, il faudrait clarifier les conditions de sortie en prévoyant la possibilité de rachat des installations fixes à des conditions équitables au bout des cinq ans, c est-à-dire avec un échéancier d amortissement des matériels de manière à ce que le prix à payer en cas de changement d enseigne soit calculé à partir de la valeur nette comptable de ces immobilisations avec le cas échéant un coefficient de vétusté. Ces conditions de sortie devraient être fixées dans le contrat de fourniture, de manière à ce que le coût de sortie puisse être calculé dès la signature du contrat. 47

123 En troisième lieu, il faudrait interdire les clauses de préférence qui prévoient que le fournisseur dispose d une priorité pour racheter le fonds de commerce en cas de retrait d activité de l indépendant. e) L approvisionnement des zones peu peuplées ou isolées. Un sujet qui n est pas central pour la structure du marché mais qui a été souvent évoqué devant l Autorité est celui du sort des petites stations qui ont un rôle social important lorsqu elles approvisionnent des zones isolées. L assouplissement de la fixation des prix pourrait conduire les réseaux, selon un argument souvent répété, à privilégier leur rentabilité immédiate et à remettre en cause le maintien des petites stations. Il s en suivrait une dégradation du service aux consommateurs. L Autorité observe, à titre liminaire, que les points de vente qui pourraient se trouver réellement dans cette situation sont très peu nombreux. La plupart des stations potentiellement concernées sont nécessairement en monopole dans leur zone, sinon le problème ne se poserait pas. Or, du fait de ce monopole local, certaines d entre elles ont des volumes de ventes acceptables et semblent viables. Par exemple, la station Elf Sainte-Rose à La Réunion, seule dans sa zone, vend [3000 m³/an], la station Shell Plaine des Palmistes, seule sur la partie nord de la route nationale qui passe entre les massifs du Piton des Neiges et du Piton de la Fournaise, vend [2500m³/an], la station Tamoil Salazie seule dans la zone du cirque Salazie vend [3200 m³], enfin, la station Total St-Philippe, isolée sur la cote sud, vend [ 2100 m³/an]. On ne peut pas dire que l existence de ces stations soit menacée du fait de l insuffisance de leur chiffre d affaires. Seule la station Caltex-Cilaos, isolée dans le cirque Cilaos, est nettement endessous de la moyenne avec [1500 m³/an] sans être la plus petite du réseau Caltex, ni de l île puisqu une douzaine de stations appartenant à d autres enseignes vendent des quantités inférieures. Ces autres stations à faible activité sont dans des zones urbaines et les consommateurs auraient, en cas de fermeture, la possibilité de se fournir auprès des autres points de vente. De même, en Guyane, seules les stations Total Saint-Georges avec [600 m³/an], Total Iracoubo à [800 m³/an] et Total Sinamary à [900 m³/an] entreraient dans cette catégorie. Les petites stations de Rubis et Chevron sont dans des zones urbaines à Cayenne et Kourou et ne sont pas en monopole. On ne voit pas, sous réserve d un examen plus détaillé des zones de chalandises, de stations qui se trouveraient dans une situation de monopole local avec un volume faible aux Antilles. C est donc au plus une ou deux stations à La Réunion et trois en Guyane qui pourraient poser un problème et apparemment aucune aux Antilles. L Autorité relève ensuite qu on été constituées quelques fermetures de stations ces dernières années mais qu elles sont restées exceptionnelles et que les évolutions des réseaux ont plutôt pris la forme de transferts de stations d une enseigne à une autre. Elle a également observé deux cas de vente de station à leur gérant. Il est donc possible, voire probable compte-tenu de la rareté des créations de points de vente nouveaux, que le retrait d un grossiste souhaitant fermer une station se traduise par le rachat du fonds de commerce par un concurrent ou par un indépendant. Si, malgré tout, on se trouvait face à la perspective d une fermeture sèche d une station non rentable assurant un service particulier à des populations sans solution alternative pour s approvisionner en carburant, il serait alors plus efficace et moins coûteux pour la collectivité que cette station relève ses prix pour les adapter à la réalité des coûts supportés, plutôt que de remonter les marges de toutes les stations du département pour régler ce cas isolé. Il n apparaît donc pas que cet argument du maintien en activité des petites stations soit de nature à justifier le statu quo. 48

124 4. Les obstacles comportementaux à la concurrence La principale objection qui peut être faite à l adaptation de la régulation des prix proposée par l Autorité, à savoir recentrer la régulation sur les tarifs et les goulets d étranglement des marchés de gros et passer d une réglementation permanente des prix de détail à une régulation de ceux-ci limitée au cas de dérive anormale des prix, est qu elle réintroduirait une certaine dose de concurrence en prix entre les stations et que la situation du marché pourrait ne pas s y prêter. Si les incitations à baisser ses prix pour gagner des parts de marché sont trop faibles, la concurrence en prix pourrait être inexistante. Cette objection s appuie sur plusieurs constats : l accoutumance des opérateurs et des consommateurs à un prix unique, la stagnation de la demande, la densité réseaux déjà installés et la rareté des autorisations nouvelles. Cet argument est essentiellement développé autour de l idée que les charges de personnel sont le principal poste sur lequel des gains de productivité pourraient être faits au stade de la distribution. Les incitations à baisser les prix ou à ne pas les augmenter alors même qu ils ne seraient plus plafonnés tout en augmentant la rentabilité des stations, pourraient conduire les distributeurs à supprimer des emplois. L ensemble des opérateurs insiste sur la défense du modèle de distribution en outre-mer qui a choisi de préserver l emploi des pompistes en refusant le libre-service. Ce sujet est présenté comme lié au maintien d un système de prix unique afin que la baisse des prix qu entraînerait la mise en concurrence des stations ne remette en cause ces emplois protégés. Le même argument peut être présenté comme un risque de concurrence faussée entre des gérants qui décideraient de maintenir les emplois et ceux qui les supprimeraient. Mais cette présentation qui suppose un lien mécanique entre la modulation des prix et la suppression des emplois n apparaît pourtant pas pleinement convaincante. a) Libre-service et automates La première objection à ce raisonnement est qu il entretient une confusion entre les pompes en libreservice et les pompes automatisées avec paiement par carte bancaire. Les stations actuelles dans les DOM n ont pas d automates acceptant le paiement par carte mais fonctionnent déjà avec des pompes qui acceptent le libre-service. Ce sont en effet des pompes qui se bloquent lorsqu on raccroche le pistolet et que le caissier débloque après avoir encaissé le paiement de l automobiliste. Elles peuvent donc fonctionner en libre-service puisqu un automobiliste pressé peut parfaitement se servir à la pompe et payer à la caisse, comme beaucoup de témoignages l ont confirmé, même si la majorité des clients préfèrent être servis. C est aussi en libre-service que fonctionne le service de nuit, le caissier débloquant la pompe depuis son poste après avoir encaissé, parfois par un système de prépaiement. Le choix d employer des pompistes relève de la décision du gérant et ne résulte pas d une contrainte technique puisque les volucompteurs actuels permettent les deux modes de service. Seule la décision d installer des automates avec paiement par carte bancaire nécessiterait des investissements nouveaux qui entraîneraient nécessairement une diminution des emplois dans les stations. Or, cette décision relève des enseignes et non des seuls détaillants puisque les contrats de gérance comme de fourniture ne leur donnent pas la liberté de modifier les installations sans l accord de l enseigne. De plus, compte-tenu des modes de financement des investissements dans les stations-services, seuls les pétroliers ont le pouvoir réel de basculer vers un système de pompes automatiques avec paiement par carte. Ils ne semblent pas prêts à faire le choix compte-tenu de la diffusion insuffisante des cartes bancaires parmi les consommateurs. A cet égard, l Autorité relève que la société Total Outremer a indiqué, lors de la séance, qu elle employait des pompistes dans toutes les stations de ses réseaux présents dans divers pays et 49

125 qu elle n avait pas l intention d installer des automates dans les DOM. Interrogé sur le même sujet, les distributeurs indépendants WIPCO et CAP ont fait la même réponse. b) L arrivée de la grande distribution sur ce marché En réalité, c est l arrivée de la grande distribution sur le marché des carburants qui serait le seul déclencheur crédible d un passage aux automates. En effet, le modèle des hypermarchés et supermarchés avec stations-service est entièrement appuyé sur les prix bas sans prestation de service et donc sans personnel. Or, la grande distribution n est pas présente sur ce marché alors que son modèle de distribution est compatible avec la réglementation en vigueur. Puisque les prix de détail régulés ne sont que des prix maximum, rien n empêcherait une enseigne de grande distribution d ouvrir une station et de pratiquer des prix plus bas que le prix maximum en installant des automates et des pompes en libre-service. Les enseignes de grande distribution interrogées lors de l instruction ont toutes indiqué qu elles ne souhaitaient pas entrer sur ce marché pour plusieurs raisons dont les principales sont les suivantes. Tout d abord, le modèle de prix bas pratiqué en métropole n est viable que parce que les grandes enseignes ont leurs propres sociétés de trading et achètent directement les produits raffinés sans passer par les compagnies pétrolières. Ce modèle n est pas exportable dans les DOM compte-tenu des volumes réduits et des contraintes d approvisionnement. Revendre des carburants à des prix très bas au détail sans maîtriser l amont ne serait pour elles pas intéressant. Ensuite, la contrainte foncière est très importante. La taille des grandes surfaces généralistes dans les DOM est en moyenne plus petite qu en métropole et beaucoup de grandes surfaces sont des supermarchés urbains enclavés, ce qui n est pas toujours compatible avec l emprise au sol que demande l installation de station d essence en libreservice. En toute hypothèse et quelles que soient les vraies raisons, dont certaines sont peut-être liées à la crainte de remettre en cause un certain modèle social, force est de constater qu aucun projet de station en libre service sous enseigne de la grande distribution n est en projet. L Autorité considère donc que l hypothèse d une concurrence frontale entre stations avec pompistes et stations avec automates n est fondée sur aucun élément tangible. c) Le niveau d emploi n est pas régulé. Au-delà de ces prévisions sur les effets sur le marché de la sortie des prix imposés, sur lesquels les avis peuvent diverger, il faut rappeler les critiques objectives, exposées plus haut, sur le système actuel de régulation qui aboutit de fait à protéger les revenus des compagnies pétrolières qui sont dispensées de se faire concurrence et peuvent ponctionner les marges de détail régulièrement augmentées par les pouvoirs publics. En outre, les données comptables disponibles montrent que la régulation des prix de détail est loin d être uniquement protectrice des emplois mais qu elle est aussi protectrice de la situation des gérants qui peuvent librement décider d utiliser les marges de détail pour embaucher ou pour augmenter leurs propres revenus. La réglementation qui conduit au prix unique ne fixe aucune norme sur le nombre des emplois optimal par station-service et on constate, là encore, de grandes disparités. En examinant une vingtaine de liasses fiscales, on s aperçoit que des stations ayant des activités comparables ont des taux de charges de personnel par rapport au chiffre d affaires ou par rapport à la marge commerciale très variables. Sur l échantillon considéré en 2007, les charges de personnels représentent en moyenne 45% de la marge commerciale (total des ventes-total des achats). Mais on trouve des points bas à 23% et des points hauts à 63% de la marge. Ce résultat est assez constant d une année sur l autre puisque le même échantillon donne, pour l exercice 2006, des résultats comparables : des 50

126 moyennes à 43%, des points bas à 25% et des points hauts à 61%. Une étude de l administration locale sur l exercice 2004 donne, pour les mêmes stations-services, les résultats suivants : des moyennes à 45,2%, des points bas à 35,1% et des points hauts à 57%. Autrement dit, sous couvert de l argument de la défense de l emploi, le système permet donc des comportements dits de «passager clandestin» avec des stations qui limitent leur masse salariale et arbitrent en faveur de leurs revenus. Ceci est d autant plus vrai que les charges de personnels comprennent les salaires versés aux gérants ou à des salariés qui peuvent avoir avec eux des liens familiaux. Or, ces salaires viennent s ajouter aux bénéfices de la société pour rémunérer les détaillants qui en bénéficient et font masse avec les revenus d exploitation. On pourrait tout aussi bien considérer que ces stations dont la masse salariale est inférieure à la moyenne sont les seules à avoir une gestion efficace et que ce sont les autres qui entretiennent un effectif trop important par rapport aux besoins. Quoi qu il en soit, il n est nullement démontré que les marges de détail servent uniformément et uniquement à protéger des emplois indispensables au bon fonctionnement des stations. Lors de la séance, la société Total Outremer a ainsi indiqué que l enseigne Total mettait en avant la qualité de son service, ce qui demandait de maintenir le niveau des effectifs. D autres enseignes peuvent faire un choix différent. Les charges de personnel sont donc une variable ajustable dont le niveau peut faire varier considérablement les bénéfices de l entreprise sans nuire sensiblement à leur fonctionnement. Une station bien gérée qui maîtrise ses charges de personnel ne vend pas moins qu une autre. d) La concurrence par la qualité du service Actuellement, le seul facteur de concurrence est la qualité du service, qui s appuie sur l étendue et la qualité des prestations : accueil, propreté, service à la pompe, boutique, dépannage et entretien. Toutes ces prestations et pas seulement le service du carburant demandent du personnel. En cas d abandon du prix unique, le choix de maintenir ou non des pompistes ne résout donc qu une partie du problème, la véritable option étant d abandonner toute concurrence par la qualité au profit de la concurrence en prix. Cela dépendra essentiellement du choix des gérants qui seront attentifs à la demande des clients. Il est donc pour le moins paradoxal d affirmer que l emploi de pompistes correspond à une demande des clients, qui préfèrent être servis pour des raisons liées aux particularités de ces départements, et de considérer que cette préférence disparaîtra immédiatement en cas d allègement de la réglementation des prix. Il est fort probable au contraire que, compte-tenu de la culture et des habitudes de consommation locales, l absence de service du carburant détourne certains consommateurs vers des stations qui le maintiennent. Certes, cette préférence pour le service pourrait être surmontée si l écart de prix avec une station en libre-service était suffisamment important et que l élasticité-prix de la demande le permette. Mais ce point reste douteux au regard des ordres de grandeur en jeu. En effet, la diminution de masse salariale n aurait qu un effet de baisse de 3 à 4 centimes sur le prix du litre. Il n est donc pas assuré que cet écart soit suffisant pour attirer une part substantielle de la clientèle vers les stations dont les prestations se seraient dégradées, s il est exact que la clientèle locale marque une préférence pour le service. e) Une période transitoire permettant l observation du marché Il est particulièrement significatif que les opérateurs, interrogés sur les effets potentiels d une suppression du prix unique, n évoquent jamais un risque de hausse des prix mais un risque de baisse des prix. Dès lors que les risques de hausse des prix sont considérés comme faibles, la régulation des prix de détail par un plafond unique s imposant à tous deviendrait inutile. 51

127 Compte-tenu de l importance des évolutions structurelles proposées par l Autorité (définition d un plan stratégique pour la SARA, dénouement des liens structurels entre Total et Shell, filialisation des activités en monopole de la SRPP, mise à jour des contrats de fourniture exclusifs), celles-ci n auront pas un effet immédiat. Il serait donc opportun de donner un délai pour procéder à ces ajustements et prévoir une clause de rendez-vous pour faire le point sur les évolutions du marché. Cette période devrait être utilisée pour mettre sous une surveillance plus efficace les prix de détail, ce qui suppose d introduire des mesures de transparence. Pour que tous les acteurs et les consommateurs puissent en effet participer eux-mêmes à une telle surveillance, les pouvoirs publics devraient publier régulièrement, tous les mois par exemple, les prix d importation toutes taxes comprises du carburant afin que les observateurs puissent voir si les évolutions des prix au détail sont la simple répercussion de fluctuation du cours des produits ou si une dérive des marges apparaît. VI.IV. Synthèse des propositions L Autorité de la concurrence propose de réformer en profondeur le système actuel en formalisant des objectifs de politique publique et une stratégie à moyen terme s appuyant sur trois axes : - renforcer la régulation amont pour mieux encadrer les monopoles en amont et garantir des approvisionnements au meilleur prix ; - assouplir la régulation de détail en passant d une fixation administrative des prix à un contrôle administratif avec plafonnement en cas de dérive des marges ; - prévoir une période d expérimentation de trois ans afin d observer les évolutions réelles du marché et procéder aux ajustements nécessaires. 1. L achat des produits L Autorité propose de réguler le prix d approvisionnement en produits raffinés en adoptant le principe de leur cotation à l aide d index public de la zone d achat réelle, aujourd hui les index Platt s Rotterdam aux Antilles et Platt s Singapour à la Réunion. Dans l hypothèse où le carburant, acheté dans une qualité conforme aux normes techniques et environnementales européennes, ne serait pas directement coté mais serait acheté en référence à un autre carburant coté, prix auquel s ajouterait une prime de qualité elle-même cotée, il faudrait retenir la cotation moyenne de la prime de qualité. Dans tous les cas, seule la référence à des prix de marché, indépendants des importateurs, est de nature à assurer le caractère objectif et transparent de la régulation des prix d approvisionnement des carburants raffinés. L importation des carburants doit être ouverte aux opérateurs qui ne sont pas des compagnies pétrolières intégrées, notamment les distributeurs indépendants de carburants routiers, dont certains sont déjà implantés aux Antilles, et les compagnies aériennes qui souhaiteraient s auto-approvisionner par des achats directs. 2. Le fret L Autorité propose de maintenir et de renforcer le contrôle du système de régulation actuel qui repose sur la mutualisation des coûts de transport par affrètement de navires communs à tous les importateurs et, le cas échéant, par affrètement d un navire dédié comme c est le cas à La Réunion ou pour le cabotage aux Antilles et en Guyane. Ce système apparaît le meilleur en termes de coût de fret, de sécurité et de régularité des approvisionnements et de contrôle de prix par l administration. 52

128 S agissant d une activité en monopole, les prix du fret doivent, comme c est le cas aujourd hui, être orientés vers les coûts en intégrant les taux d assurance et de coulage en mer réels et conformes aux taux moyens de la profession. L administration devra néanmoins s assurer que les importateurs indépendants ou les compagnies aériennes puissent charger les quantités qu elles achètent directement sur le navire commun, sans barrière à l entrée et à des prix non discriminatoires. 3. Les mesures structurelles sur le stockage L Autorité propose de maintenir le système de régulation actuel qui repose sur la mutualisation du stockage et la régulation des tarifs de passage. Mais elle demande que soit garanti l accès à ces facilités essentielles de tout distributeur de carburant, y compris les opérateurs qui ne sont pas des filiales de groupes pétroliers. Ces principes de régulation, garantie d accès et paiement d un tarif de passage approuvé par l administration, devraient être appliqués à toutes les installations, y compris les pipe-lines, les installations pour le service du carburant de soute des navires, les cuves de stockage intermédiaire du carburéacteur à proximité ou dans l enceinte des aéroports, et de manière générale à toute activité exercée en monopole qu elle serve à la vente de carburants dont les prix sont réglementés ou à celles de prestations non réglementées. L Autorité souhaite qu il soit interdit à un gestionnaire de facilité essentielle d exercer une activité de distributeur aval au sein d une même structure commerciale, ce qui devrait conduire à filialiser les activités de stockage ou à leur imposer une séparation fonctionnelle et comptable très stricte. Compte-tenu des liens entre Shell et Total au sein de la SRPP, la simple séparation fonctionnelle apparait insuffisante pour la gestion du stockage portuaire à La Réunion et il convient, pour ce cas particulier, d une part d imposer la filialisation complète, d autre part de dénouer les liens structurels entre les réseaux de détaillants de Total et Shell qui devraient se retrouver en concurrence frontale sur le marché de la distribution. 4. Les mesures destinées à maintenir la fluidité des réseaux L Autorité propose de limiter à 5 ans les contrats de fourniture exclusive passés avec les détaillants indépendants (stations services dont le fonds de commerce n est pas la propriété de l importateur-grossiste) et mettre à jour rapidement les contrats en cours afin d y inclure cette disposition. Les contrats devraient permettre, en cas de non renouvellement, le rachat des installations techniques par les détaillants indépendants à la valeur nette comptable de ces immobilisations à partir d un échéancier d amortissement préalablement inscrit dans le contrat et demander la mise à jour immédiate des contrats en cours afin d y inclure cette disposition L Autorité propose de supprimer les clauses de rachat préférentiel ou de mise en location-gérance préférentielle en faveur du fournisseur sortant dans les contrats de fourniture aux stations indépendantes. 5. Les prix de gros L Autorité propose d abandonner la distinction artificielle entre marge de distribution de gros et marge de détail pour les activités situées en aval des installations de stockage. Dès lors que leurs montants sont modifiés par des redevances fixes ou variables payées par les détaillants aux grossistes et par des remises quantitatives ou forfaitaires payées par les grossistes aux détaillants, remises qui ont la nature de «marges arrières» non répercutées au consommateur, la fixation uniforme de ces deux marges par la puissance publique, qui la conduit à s immiscer 53

129 dans l équilibre des contrats, n a plus de signification économique claire et il convient de rendre leur liberté commerciale aux opérateurs. L Autorité propose en revanche de réguler les prix d importation des carburants à chaque livraison de produits raffinés dans le département. Il s agirait du prix CAF incluant les droits de douanes et les redevances portuaires de toute nature. Ce prix CAF TTC devrait être le seul prix de gros régulé périodiquement par les préfets. Il serait égal à la somme des éléments suivants : 1) + prix de marché de la zone d achat, incluant au besoin la prime de marché 2) + coût du fret et de l assurance 3) + droits de douanes, taxes et droits de port. Ce prix d importation doit être rendu public afin de permettre aux usagers, aux associations de consommateur et à toutes les parties prenantes d être informés des fluctuations du prix des produits avant imputation des marges de distribution. 6. La mise sous surveillance des prix de détail L Autorité propose de modifier les décrets de 1988 et de 2003 pour prévoir que le prix maximum de détail fixé par le préfet ne s applique que temporairement pendant les périodes de fonctionnement anormal du marché. Un observatoire local des prix et des marges de distribution des carburants devrait être crée pour permettre une surveillance des marchés de détail. 7. Une expérimentation pendant trois ans L adaptation proposée de la réglementation, qui demande des mesures structurelles dont certaines n auront pas d effet immédiat, devrait faire l objet d un bilan au bout de trois ans. Des rapports d étape pourraient être produits et il conviendrait d établir au terme de chacune des deux premières années d application un rapport d étape sur l évolution des prix et la situation des réseaux de détaillants. VII. Conclusion L Autorité attire l attention du Gouvernement sur le fait que la seule alternative aux mesures proposées serait de renforcer significativement la réglementation afin de prévenir le maintien ou l apparition de rentes, risque inhérent au système actuel dans lequel des prix de détail identiques sont imposés à des détaillants placés dans des situations de rentabilité économique très différentes. Pour atteindre ces objectifs, cette régulation ne pourrait faire l économie d une surveillance très étroite des revenus de tous les opérateurs, c est-à-dire de plusieurs centaines de petites sociétés, ce qui constituerait une mission lourde et délicate à la charge des services de l État. L Autorité rappelle enfin que, derrière ses propositions, réside un enjeu de politique publique qui lui paraît majeur. Les handicaps objectifs qui pèsent sur les marchés des carburants dans les DOM, mais aussi l absence de concurrence en prix augmentent les prix hors taxes des carburants, ce qui conduit les collectivités locales à absorber une partie du surcoût en consentant des pertes de recettes fiscales par rapport à la norme en métropole. De ce fait, les recettes manquantes sont compensées par la taxation d autres produits, notamment des produits de consommation courante frappées par l octroi de mer, dont l impact sur le pouvoir d achat des populations est loin d être négligeable. On peut, à cet égard, rappeler que les carburants sont le premier produit importé en valeur. Chaque centime par litre qui est gagné sur le prix hors taxe représente un montant de 12 M sur 54

130 l ensemble des DOM, dont environ 5 M à La Réunion, 3 M en Martinique et en Guadeloupe et 1 M en Guyane. Or, l écart des prix hors taxes avec la métropole est en moyenne de 40 centimes par litre. Certes cet écart résulte de surcoûts objectifs sur les produits importés ou raffinés et de surcoût de distribution, mais le présent avis montre qu il existe des marges de manœuvres qui permettraient d accroitre la fiscalité locale sur les carburants sans augmenter les prix de détail actuel. Délibéré sur le rapport oral de M. Thierry Dahan et sur l intervention de Mme Virginie Beaumeunier, rapporteure générale, par M. Bruno Lasserre, président, président de séance, Mmes Françoise Aubert, Anne Perrot, Elisabeth FlüryHérard et M. Patrick Spilliaert, vice-présidents, Mme Laurence Idot, MM. JeanBertrand Drummen, Pierre Godé et Thierry Tuot, membres La secrétaire de séance Le président Marie-Anselme Lienafa Bruno Lasserre 55

131 Annexe 1 c Rapport parlementaire sur les prix des carburants dans les DOM (juillet 2009)

132 1 N 1885 ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 TREIZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'assemblée nationale le 23 juillet 2009 RAPPORT D INFORMATION DÉPOSÉ en application de l article 145 du Règlement PAR LA MISSION D INFORMATION COMMUNE (1) sur le prix des carburants dans les départements d outre-mer, ET PRÉSENTÉ PAR MM. JACQUES LE GUEN ET JÉRÔME CAHUZAC, Députés. (1) La composition de cette mission figure au verso de la présente page.

133 2 La mission d information commune sur le prix des carburants dans les départements d outre-mer est composée de : M. Patrick Ollier, président ; M. Alfred Almont ; Mme Christiane Taubira, vice-présidents ; MM. Jérôme Cahuzac ; Jacques Le Guen, rapporteurs ; MM. Jérôme Bignon ; Jean-Claude Fruteau ; Jean-Claude Lenoir ; Alfred Marie-Jeanne.

134 3 SOMMAIRE Pages INTRODUCTION... 7 I. LES SPÉCIFICITÉS DES MARCHÉS DES CARBURANTS DANS LES DÉPARTEMENTS D OUTRE-MER A. DES MARCHÉS ÉTROITS, ULTRAPÉRIPHÉRIQUES, MAIS OÙ S APPLIQUENT LES NORMES EUROPÉENNES Des marchés étroits et ultrapériphériques a) L éloignement de la métropole b) Des marchés étroits L application des normes européennes B. DES PRIX ADMINISTRÉS PAR LE PRÉFET Les prix des produits pétroliers outre-mer sont fixés par le Préfet a) La nécessité d une administration des prix des carburants et du gaz b) La détermination d une structure de prix Les prix des carburants outre-mer sont globalement proches de ceux de la métropole a) Des droits et des taxes inférieurs à leurs équivalents en métropole b) Des prix de détail globalement équivalents à ceux de la métropole II. LES VARIATIONS BRUTALES DES PRIX DU PÉTROLE EN 2008 ONT RÉVÉLÉ LES DYSFONCTIONNEMENTS DU MARCHÉ DES CARBURANTS DANS LES DÉPARTEMENTS D OUTRE-MER A. LA CHRONOLOGIE DE LA CRISE B. LA MISE À JOUR DES DYSFONCTIONNEMENTS DU MARCHÉ DES CARBURANTS La fixation du prix des carburants, caractérisée par l absence de transparence, échappe largement au contrôle du Préfet a) La structure de prix s impose dans une large mesure au Préfet b) L absence générale de transparence et de contrôle La position dominante des compagnies pétrolières a) Une position dominante et une organisation opaque b) Les relations complexes entre les gérants et les compagnies pétrolières... 38

135 4 III. LES SPÉCIFICITÉS LOCALES ONT AGGRAVÉ LA HAUSSE DES PRIX ET LES DYSFONCTIONNEMENTS DU MARCHÉ DES CARBURANTS A. LA RÉUNION Le cas de la Société réunionnaise de produits pétroliers (SRPP : une rentabilité très élevée malgré une dégradation en La marge de gros : l effet de périmètre ne doit pas masquer la confortable rentabilité des distributeurs B. LES DÉPARTEMENTS FRANÇAIS D AMÉRIQUE L épineuse question des stocks stratégiques a) La réglementation b) La situation des stocks stratégiques dans les départements d outre-mer La Martinique, le cas de la SARA a) La SARA : une société héritière de son histoire liée à l indépendance énergétique nationale b) La SARA un acteur économique, social et sociétal de la vie non seulement Martiniquaise mais des trois départements français d Amérique c) La SARA, importateur, raffineur, stockeur et, temporairement collecteur d huiles usagées La Guadeloupe a) Un réseau de stations-service important et structuré b) L engagement de l État par la signature du protocole d accord du 4 mars La Guyane a) L application des normes européennes à compter d avril 2007 a obligé la Guyane à s approvisionner exclusivement auprès de la SARA b) L'importance de la fiscalité c) Les contraintes géographiques d) Le stockage IV. LES PROPOSITIONS DE LA MISSION D INFORMATION A. LE RENFORCEMENT DE LA TRANSPARENCE Associer l ensemble des parties prenantes via un comité de suivi à la détermination du prix des carburants Informer le consommateur en station-service Régler le problème des cuves privées Assurer le respect des règles de la concurrence B. DES BAISSES DE PRIX SONT ENVISAGEABLES TOUT EN PRÉSERVANT L EMPLOI, LA SÉCURITÉ DE L APPROVISIONNEMENT ET LES RESSOURCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES D OUTRE-MER... 74

136 5 1. Le maintien d un système de prix administrés par le Préfet a) Le choix de maintenir l administration des prix b) Simplifier la formule de prix L approvisionnement Le fret Le raffinage a) Préserver les emplois de la SARA b) Préparer l avenir de la SARA Le stockage Les marges de distribution a) Paraissant pouvoir être réduites, les marges de distribution doivent cependant garantir l emploi et la continuité de l approvisionnement en carburant b) Renforcer la position des propriétaires-gérants face aux compagnies pétrolières La sortie de crise a) L État doit régler sa dette aux compagnies pétrolières b) Le retour au prix «réel» des carburants est nécessaire C. DÉVELOPPER LES ÉNERGIES RENOUVELABLES Le prix des énergies fossiles est voué à augmenter Anticiper la fin des énergies fossiles en développant des énergies renouvelables a) L énergie solaire : l avenir b) L énergie éolienne : la contrainte des cyclones c) Les biocarburants : la contrainte foncière V. EXAMEN EN RÉUNION COMMUNE SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS DE LA MISSION LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

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138 7 MESDAMES, MESSIEURS, Ces dernières années, le prix des carburants n a pas été un sujet dans les départements d outre-mer. Alors que la «vie chère», c'est-à-dire le surcoût de nombreux produits de consommation courante par rapport aux mêmes produits distribués en métropole, est malheureusement une réalité que supportent nombre de nos concitoyens ultramarins, le prix des carburants (essence et gazole) a longtemps été plus ou moins équivalent au prix métropolitain, certes élevé lorsque les prix du pétrole étaient à la hausse, mais sans la forte distorsion qu il est possible d observer s agissant, par exemple, des médicaments, de l accès à Internet ou des denrées alimentaires. C est ainsi que le prix des carburants dans les départements d outre-mer n a pas suscité d attention particulière de la part de l État et des services préfectoraux, lesquels se contentaient de l administrer sans chercher à lever le voile sur les dysfonctionnements d un marché qui, en apparence, fonctionnait à la satisfaction générale. Les prix des carburants dans les départements d outre-mer sont, en effet, fixés par les Préfets. Si l article 1 er de l ordonnance du 1 er décembre 1986 dispose que «les prix des biens produits et services [ ] sont librement déterminés par le jeu de la concurrence», le prix des carburants a continué à être administré en raison des spécificités de ces marchés. L intérêt général est à l origine de la décision de créer, en 1964, la Société Anonyme de Raffinage des Antilles (SARA), volet outre-mer de la politique du Général de Gaulle visant à assurer à la France son indépendance énergétique. En effet, sans raffinerie sur leur territoire, l approvisionnement de la Martinique et de la Guadeloupe en carburants reposait sur le bon vouloir des pays voisins (de leurs raffineries et des compagnies pétrolières qui les exploitaient) et des caprices de la météo, avec le risque évident d une rupture des importations dont les conséquences seraient catastrophiques. Cependant, la SARA étant l une des plus petites raffineries du monde, ses coûts de production sont tels que le «prix de sortie raffinerie» du carburant dans ces départements est bien plus élevé que le serait celui d importations directes depuis les pays voisins (s ils étaient aux normes européennes), voire depuis l Europe.

139 8 Enfin, alors que les stations-service sont, en métropole, totalement automatisées, celles des départements d outre-mer, bien souvent transformées en supérettes, ont recours à un personnel nombreux qui justifie, au nom de l emploi dans des territoires particulièrement frappés par le chômage, des marges de détail bien plus élevées qu en métropole. L ensemble de ces surcoûts auquel il faut ajouter ceux de la marge de gros, du fret et du stockage n a été supportable qu en raison du choix des conseils régionaux de Martinique et de Guadeloupe de maintenir à un niveau relativement bas les taxes sur les carburants. Si celles-ci étaient, comme c est légalement possible, fixées au même niveau qu en métropole, le prix des carburants outre-mer serait comparativement bien plus élevé. En outre, jusqu à très récemment, la Guyane ne subissait pas les surcoûts de la SARA puisqu elle importait ses carburants de la raffinerie de Trinidad dont les faibles coûts compensaient des taxes régionales très élevées. Quant à La Réunion, enfin, n ayant pas de raffinerie sur son sol, elle s approvisionnait en carburants à Singapour au prix du marché mondial, soit environ 70$ le baril au début de l année Structurellement plus élevé qu en métropole du fait de l étroitesse de chacun des marchés, le prix des carburants était maintenu à un niveau compatible d une part avec les exigences de rentabilité de tous les acteurs de la filière pétrolière et, d autre part, avec la capacité des consommateurs (particuliers et entreprises) à pouvoir accepter ces prix. La très forte hausse du prix du baril, à partir de 2007 et, en France dans un contexte politique connu, a rompu cet équilibre. La répercussion à la pompe de la hausse du prix du brut a été jugée, à l époque, incompatible avec le maintien de la paix sociale. Le mécanisme des prix administrés a permis aux préfets de garantir cette paix sociale en conservant des niveaux de prix compatibles avec celle-ci jugée prioritaire par rapport aux demandes des acteurs de la filière pétrolière. Ces niveaux de prix étaient en revanche, à structures d achat, de fret, de raffinage, de stockage et de distribution de produits pétroliers identiques, incompatibles avec les exigences de rentabilité des acteurs de la filière d approvisionnement en produits pétroliers. La conséquence inéluctable de cette décision politique était que ces niveaux de prix resteraient les mêmes nonobstant la baisse, prévisible à terme, du prix du baril : le lissage à la hausse des prix entraînait nécessairement, à structures constantes, le lissage à la baisse de ces mêmes prix! La baisse du prix du baril est intervenue, et comme cela était prévisible, il n y eut pas de modification à la baisse des prix à la pompe pour les consommateurs et les entreprises. Le constat qu en a fait la population, à laquelle rien n avait été expliqué lors du lissage des hausses de prix à partir de 2007, fut à l origine du mécontentement puis des troubles qu ont connus les territoires et départements d outre-mer. La Réunion fut la première touchée, dès l été 2008, par la forte hausse du prix des carburants que ses taxes très élevées ne pouvait compenser comme en Martinique et en Guadeloupe. Mais ces deux départements subissaient quant à eux les surcoûts de la SARA, leur faible fiscalité n a pu contrebalancer l explosion des

140 9 prix à la pompe. Enfin, la Guyane cumulait des taxes régionales «au taquet» et des surcoûts de la SARA l application sur décision de justice des normes européennes de qualité ayant entraîné un changement d approvisionnement ainsi qu un lissage de la hausse des prix découlant de ce changement, dont les conséquences furent la poursuite de l augmentation du prix des carburants alors même que le cours du baril plongeait sur les marchés internationaux C est d ailleurs à ce moment que la crise a véritablement éclaté, à l automne 2008, lorsque le cours du baril a commencé à refluer. Les troubles qu ont connus notamment la Guyane et La Réunion trouvaient en effet leur origine dans le constat que la baisse rapide du prix du pétrole que les médias ne se privaient pas de commenter ne se traduisait pas par une baisse des prix à la pompe, voire que ceux-ci continuaient à augmenter! Comment ne pas comprendre alors la suspicion et l exaspération de nos concitoyens d outre-mer et le sentiment largement répandu que, sous couvert d intérêt général, s était constitué, dans la plus totale opacité, un système de rente qui fonctionnait à leur détriment. La crise s est partiellement réglée en décembre 2008 par la baisse unilatérale du prix administré des carburants ; pour nécessaire qu elle soit, cette mesure ne peut être que temporaire et son coût est élevé puisque c est l État qui supporte, in fine, les pertes des compagnies pétrolières. Surtout, elle ne dispense pas de poser les deux questions, liées entre elles, qui sont à l origine la crise : d une part, le prix élevé des carburants outre-mer découle-t-il de surcoûts objectifs ou constitue-t-il une rente au bénéfice de quelques-uns? D autre part, si rente il y a, comment l administration des prix a-t-elle pu la tolérer? Conscient que nos concitoyens d outre-mer exigent que la lumière sur la formation du prix des carburants, le Gouvernement a chargé de hauts fonctionnaires de l Inspection des finances, de l Inspection générale de l Administration, du Conseil général de l Industrie, de l énergie et des technologies (IGF/IGA/CGIET) d une part, et de l Autorité de la concurrence d autre part, d analyser le marché des carburants outre-mer et de formuler des propositions dans le but d en améliorer le fonctionnement et de faire baisser les prix. Ce travail d analyse et de proposition soit de très haute qualité, il n en reste pas moins que des décisions devront être prises afin de régler la question du prix des carburants outre-mer. Or, ces décisions seront politiques, au sens le plus fort du terme, c'est-à-dire qu elles engageront les populations et les territoires, leur économie et leur avenir ; c est donc au Parlement qu il revient de porter des propositions et d éclairer le Gouvernement sur les meilleurs moyens de répondre aux légitimes aspirations de nos concitoyens d outre-mer. C est pourquoi, à l initiative de son président Patrick Ollier qui souhaitait répondre aux demandes de l opposition comme à celles des députés ultra-marins, la commission des Affaires économiques a décidé, dès le 6 janvier 2009, de créer une mission d information. Celle-ci a, bien volontiers, été élargie à la commission

141 10 des Finances comme le souhaitait le président Didier Migaud. Cette mission d information commune sur le prix des carburants dans les départements d outre-mer est composée de députés de la majorité et de l opposition, de métropole et d outre-mer. La mission a organisé au total plus de 60 auditions, tant à Paris que dans les quatre départements d outre-mer où elle s est rendue pour rencontrer l ensemble des acteurs du marché des carburants : services de l État (préfet, DRCCRF, douanes, DRIRE), élus, compagnies pétrolières, gérants de stations-service, consommateurs, CCI, représentants des entreprises La mission d information a mené ces auditions, poursuivi ses réflexions et rédigé son rapport avec un double objectif : d une part, faire toute la transparence sur la formation des prix et, en particulier, sur les dysfonctionnements du marché des carburants et du système d administration des prix et, d autre part, concilier dans ses propositions les nécessaires baisses de prix avec la préservation de l emploi et le développement des départements d outremer.

142 11 I. LES SPÉCIFICITÉS DES MARCHÉS DES CARBURANTS DANS LES DÉPARTEMENTS D OUTRE-MER A. DES MARCHÉS ÉTROITS, ULTRAPÉRIPHÉRIQUES, MAIS OÙ S APPLIQUENT LES NORMES EUROPÉENNES 1. Des marchés étroits et ultrapériphériques a) L éloignement de la métropole Les départements d outre-mer ont en commun d être très éloignés de la métropole et cet éloignement n est pas sans exercer une influence certaine sur leurs conditions de développement. La Réunion a une superficie totale de km 2 et une population estimée en 2008 de habitants, soit une densité d environ 319 habitants/km 2. L île de la Réunion est située dans l océan indien, plus précisément dans l archipel des Mascareignes, à environ 700 kilomètres à l est de Madagascar et 200 kilomètres au sud-ouest de l île Maurice, au large de la côte sud-est du continent africain. Sa préfecture, Saint-Denis se situe à km de Paris. La Guyane, d une superficie de km 2 (dont 96 % couvert par une forêt équatoriale), pour une population estimée à habitants en 2008 (soit une densité de l ordre de 2,5 habitants au km 2 ), constitue un territoire du continent sud-américain. Elle est frontalière du Brésil (sur 730 km) et du Suriname (sur 510 km). Sa préfecture, Cayenne se situe à km de la capitale métropolitaine. Par ailleurs, située en zone de forêt dense, la Guyane échange avec la métropole et les Antilles voisines essentiellement par voie maritime pour tout ce qui concerne le fret en produits pétroliers. La Guadeloupe constitue un archipel (formé de la «Guadeloupe continentale» regroupant Basse-Terre à l ouest et Grande-Terre à l est et de la «Guadeloupe insulaire» englobant La Désirade, Petite-Terre, Marie-Galante et les sept îlets des Saintes) des petites Antilles, d une superficie de km 2, pour une population estimée à habitants en 2008, soit une densité d environ 249 habitants au km 2. Elle se situe à 600 km au nord des côtes de l Amérique du Sud, à 700 km à l est de la République dominicaine et à km au sud-est des États-Unis. Enfin, Pointe-à-Pitre se trouve à km de Paris. La Martinique est la troisième île par la superficie des petites Antilles, avec km 2. Selon les estimations de l INSEE, sa population s élevait, en 2008, à habitants, soit une densité de l ordre de 357 habitants au km 2. Située, elle aussi dans la mer des Caraïbes, elle est distante de 450 km au nord-est des côtes de l Amérique du Sud et environ 700 km au sud-est de la République dominicaine. Fort de France est éloignée de km de Paris.

143 12 Les départements d outre-mer constituent, avec les régions portugaises des Açores et de Madère ainsi que la région espagnole des Canaries, les Régions Ultra-Périphériques (RUP) de l Union Européenne identifiées par l article du Traité de l Union européenne. Ce sont les seules régions de l Union européenne qui n appartiennent pas à l espace géographique européen. Enfin, du fait même de leur position géographique, ces départements français présentent des caractéristiques physiques et climatiques très différentes de la métropole : un relief accidenté et pour trois d entre elles (Guadeloupe, Martinique et La Réunion) une exposition importante aux risques sismiques en raison de la présence d une activité volcanique ; ces quatre régions sont par ailleurs soumis à des conditions climatiques de type tropical ou équatorial et sont fréquemment victimes de catastrophes naturelles, séismes, cyclones ou inondations. Du fait de ces particularités géographiques (insularité pour trois de ces régions et dimension avec une population concentrée sur une seule partie de son territoire pour la Guyane) et de l absence de ressources pétrolifères propres, l approvisionnement en pétrole brut ou en produits raffinés s effectue exclusivement par la voie maritime. b) Des marchés étroits Comme le notait le rapport de l IGF/IGA/CGIET «les caractéristiques spécifiques aux économies ultra-marines constituent des contraintes fortes au fonctionnement du marché des carburants», et «l étroitesse du marché de consommation, en raison d une faible population dans chacun des quatre DOM, se traduit par des niveaux de consommation également faibles». CONSOMMATION DES CARBURANTS EN 2008 DANS LES DOM (EN M 3 ) Martinique Guadeloupe Guyane Ensemble des DFA Réunion Ensemble DOM Population Supercarburant Gazole routier Carburants routiers Source : rapport de l IGF/IGA/CGIET La consommation totale (supercarburant et gazole routier) des quatre départements d outre-mer s élève à environ 1,2 million de m 3, pour une population totale de 1,8 million d habitants. Afin de mieux apprécier le volume réel de ce marché dont l ensemble des personnes auditionnées par la mission d information a souligné l étroitesse, il convient de rapporter ces chiffres à l ensemble de la consommation et de la population française. Ainsi, la consommation totale des DOM représente approximativement 2,14 % de la consommation totale de la France (métropole et DOM), pour une population représentant 2,86 % de la population totale de la France.

144 13 Bien que la plupart de ces territoires partagent l éloignement des sites d exploitation des gisements de pétrole, il convient, s agissant de leur approvisionnement en produits pétroliers, de distinguer la situation de La Réunion, d une part, et, d autre part, celle des départements français d Amérique (Guadeloupe, Guyane et Martinique). La Réunion ne dispose pas d unité de raffinage. Elle s approvisionne donc sur le marché de Singapour en produits raffinés aux normes européennes par l intermédiaire de quatre importateurs (Société Réunionnaise de Produits pétroliers SRPP, Total-Réunion, Chevron-Texaco et Tamoil). Les départements français d Amérique s approvisionnent, quant à eux, en produits raffinés auprès de la Société Anonyme de raffinerie des Antilles (SARA), petite unité de raffinage installée dans la baie du Lamentin en Martinique depuis Dès 1964, à l instigation des pouvoirs publics (lettre du Premier ministre du 27 mai 1964) et sous l impulsion du Général de Gaulle, plusieurs compagnies pétrolières Shell, Exxon et Texaco ainsi que Total et Elf alors curieusement absentes des DFA, ont proposé un projet de construction d une raffinerie et d unités de stockage des produits pétroliers sur un site unique, instituant un système de mutualisation de l ensemble des opérations encore en usage aujourd hui. Il convenait, en effet, dans un contexte international fondamentalement différent de celui que nous connaissons maintenant : d assurer la sécurité et l indépendance des approvisionnements des départements français des Antilles (la production de produits raffinés n était pas alors commercialisée en Guyane) en produits pétroliers en permettant de couvrir les besoins locaux en carburants et en combustibles pétroliers ; de garantir une capacité de stockage ; de créer un pôle de développement industriel et d emplois qualifiés. C est dans ce contexte qu est intervenu le lancement de la construction en Martinique de la SARA en 1969 à proximité de la rade de Fort de France ainsi que l installation de capacités de stockage en Guadeloupe, dans la zone portuaire de Jary. La Martinique fut d ailleurs choisie, à l époque, comme l a précisé M. Alfred MARIE-JEANNE, député et président du conseil régional de la Martinique, en raison d une répartition, entre les deux départements antillais d outils de développement local communs : la raffinerie en Martinique et les établissements de meunerie en Guadeloupe. Il convient de rappeler ici, que cette unité simple de raffinage du pétrole, de type «hydroskimming» (distillation atmosphérique, reformage catalytique et hydrodésulfuration de distillats moyens) a été dimensionnée aux marchés antillais, ce qui en fait l une des plus petites raffineries du monde. Ce n est qu en 1982 que la SARA a repris en Guyane la gestion des dépôts de carburants de Degrad-des-Cannes. Puis, en raison de l application à l ensemble

145 14 des départements français d Amérique des normes européennes en matière de carburants, l approvisionnement en carburants de ce département (voir infra). 2. L application des normes européennes Les départements d outre-mer, appartiennent, au même titre que la métropole à l espace communautaire, même s ils sont considérés comme des régions ultrapériphériques. En conséquence, sauf dérogation, les directives et règlements européens s y appliquent. Ainsi, les règles et normes définies en matière de carburants pour satisfaire à des exigences environnementales, notamment la réduction des émissions de gaz à effet de serre, fixées par la directive carburants 98/70 CE sont applicables depuis le 1 er janvier 2009 dans l ensemble de ces départements. Sans entrer dans le détail de l évolution de la réglementation européenne visant à réduire les émissions des véhicules à moteur, il paraît souhaitable de procéder à un bref rappel historique. Depuis la directive 70/220/CEE du Conseil du 20 mars 1970 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux mesures à prendre contre la pollution de l air par les émissions des véhicules à moteur, l Union européenne a constamment cherché à améliorer la protection de la santé et de l environnement à travers un renforcement de la réglementation en matière de normes applicables aux carburants. C est ainsi que dès 1975, ont été introduits des seuils maximaux concernant la teneur en soufre de certains carburants, seuils qui ont été depuis abaissés. La réglementation telle qu elle découle de la directive 98/70/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 1998 concernant la qualité de l essence et des carburants diesel, outre la teneur en souffre s applique à d autres paramètres, notamment l émission des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), celle des oxydes d azote, des composés organiques volatils, de dioxyde de carbone et les émission de particules fines (PM). Une révision de la directive 98/70/CE a eu lieu entre 2007 et 2008 pour aboutir à une nouvelle directive, adoptée le 26 mars 2009, modifiant cette fois plusieurs paramètres et non plus uniquement la teneur en soufre qui est maintenue à son niveau antérieur (fixé par la directive 2003/17/CE). Jusqu à une période récente, les départements d outre-mer, sur la base d éléments collectés par les autorités françaises, bénéficiaient, en application d une possibilité de mesures dérogatoires spécifiques aux régions ultrapériphériques, de dérogations accordées par la Commission européenne : autorisation de commercialiser de l essence plombée jusqu au 1 er janvier 2005 pour les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion ;

146 15 exemption des spécifications de la teneur en soufre de l essence et du carburant diesel dans le département de la Réunion jusqu au 1 er janvier La directive 2003/217/CE a exigé l introduction sur le marché de carburants ayant une teneur en soufre égale ou inférieure à 10 ppm (10 parties par millions, soit l équivalent de 10 grammes par tonne), à compter du 1 er janvier 2005, sur une base géographique équilibrée. Sur ce point, à la demande de la France, une dérogation a été introduite pour les régions ultrapériphériques, valable jusqu au 1 er janvier 2009, date à laquelle la réglementation européenne s applique intégralement à l ensemble du territoire européen, y compris aux RUP. Il convient toutefois de souligner qu en Guyane, suite à une action en justice des concessionnaires de véhicules dont la motorisation conçue en application du respect des normes européennes souffrait de l utilisation de carburants «non conformes» à ces normes, a conduit les distributeurs à s approvisionner auprès de la SARA qui produisait des carburants «vertueux» dès Enfin, la directive adoptée le 26 mars 2009 a conservé la possibilité de dérogation pour les régions ultrapériphériques. Au vu des éléments collectés par le ministère de l Énergie, de l environnement, du développement durable et de l aménagement du territoire, lors de la négociation (qui suivait de peu la décision judiciaire applicable sur le territoire guyanais), il ressortait qu une telle dérogation n était pas nécessaire pour les carburants commercialisés dans les départements d outre-mer : pour les DAF, car la SARA avait réalisé des travaux sur son unité de raffinage permettant de produire des carburants répondant aux exigences de la directive 98/70/CE révisée ; l approvisionnement de la Réunion, dés lors qu il était effectué à partir de raffineries situées à Singapour et en Australie, était conforme aux spécifications européennes. B. DES PRIX ADMINISTRÉS PAR LE PRÉFET 1. Les prix des produits pétroliers outre-mer sont fixés par le préfet a) La nécessité d une administration des prix des carburants et du gaz L article 1 er de l ordonnance n du 1 er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, qui dispose que «les prix des biens produits et services [ ] sont librement déterminés par le jeu de la concurrence», a mis fin à l administration des prix qu avait connue la France en application de l ordonnance n du 30 juin Cependant, le même article 1 er précise que «dans des secteurs ou des zones où la concurrence par les prix est limitée en

147 16 raison soit de situations de monopole ou de difficultés durables d approvisionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d État peut réglementer les prix après consultation du Conseil de la concurrence». Dans son avis n 88-A-04 du 16 mars 1988, le Conseil de la concurrence a considéré que le marché des produits pétroliers dans les quatre départements d outre-mer était caractérisé par une concurrence limitée dans la mesure où «l approvisionnement en produits pétroliers est assuré par une seule entreprise. Pour les DAF, la Société anonyme de raffinage des Antilles (SARA) qui contrôle à la fois les opérations en raffinerie, d importation et de stockage». De même à La Réunion, une seule entreprise la Société Réunionnaise de Produits pétroliers (SRPP) a le monopole de l activité de stockage sur l île et assure une part substantielle de la distribution. Le Conseil note en outre que, dans tous les cas, «l absence de concurrence au stade des prix de gros limite la concurrence par les prix dans la distribution de détail». En effet, l étroitesse du marché limite le nombre de grossistes à quelques compagnies pétrolières entre lesquelles une entente aurait été aisée à mettre en œuvre. Par conséquent, la libéralisation des prix des produits pétroliers dans les départements d outre-mer aurait très probablement entraîné une forte hausse de ceux-ci, au détriment des populations et des entreprises locales. C est pourquoi les prix des produits pétroliers ont continué à être administrés dans les départements d outre mer alors qu ils étaient libéralisés en France métropolitaine. Les décrets n , , et du 17 novembre 1988 (un décret par département d outre-mer) ultérieurement modifiés et précisés par le décret n du 23 décembre 2003 (pour la Guadeloupe et la Martinique), ont confié au préfet de chaque département la responsabilité de fixer, par arrêté, les prix de ces produits, c'est-à-dire le supercarburant, le gazole, le butane, le pétrole lampant (1), le fioul domestique et le fioul lourd (2). Le préfet ne fixe ainsi que les prix d une liste limitée d ailleurs variable selon les départements de produits pétroliers, et non ceux de l intégralité des produits pétroliers du tableau B du 1 de l article 265 du code des douanes. En particulier, les prix du carburéacteur sont librement déterminés par le jeu de la concurrence. Il convient cependant de souligner que le décret n précité n a modifié que les décrets n et applicables à la Guadeloupe et à la Martinique, la Guyane et La Réunion continuant à relever du régime institué par les décrets n et , lesquels sont bien moins précis. (1) Le pétrole lampant est utilisé comme combustible pour les installations de chauffage et d éclairage. (2) Le fioul lourd est un produit final du processus de raffinage, généralement utilisé comme combustible dans des centrales électriques.

148 17 b) La détermination d une structure de prix C est donc au Préfet qu appartient la responsabilité, dans chacun des départements d outre-mer, de fixer via un arrêté généralement trimestriel, le prix des carburants. Plus précisément, et la mission d information tient à souligner ce point, le Préfet ne fixe qu un prix maximal auquel les acteurs du marché, en particulier les distributeurs, peuvent déroger à la baisse. Mais cette faculté n est jamais utilisée et le prix maximal s impose dans les faits comme le prix de vente au détail. Le consommateur ultramarin n a donc pas à se poser de question quant au prix que pratique telle ou telle station-service ; il est identique et elles se dispensent même de l afficher de manière visible comme c est le cas en métropole où les prix sont libres. La France, dans son ensemble, connaît depuis 1981 le prix unique du livre, les départements d outre-mer expérimentent quant à eux le prix unique du litre. C est ainsi que dans les départements d outre-mer, les automobilistes ont le choix de l enseigne (sept en Guadeloupe, trois en Guyane, six en Martinique et cinq à La Réunion) ; mais la diversité n est qu apparence puisque la totalité des stations-service affichent en pratique les mêmes prix. Cependant, les règles de fixation des prix ne sont pas les mêmes aux Antilles, en Guyane et à la Réunion, en raison de la présence, à la Martinique, d une raffinerie la SARA qui dispose d un monopole sur l importation, le raffinage et le stockage du carburant à la fois pour Martinique et la Guadeloupe (et, depuis 2007, également pour la Guyane). Les règles applicables en Martinique et en Guadeloupe Aux Antilles, la détermination du prix des produits pétroliers découle du décret n , lequel fixe une formule très précise, adaptée à la spécificité de la Guadeloupe et de la Martinique qui s approvisionnent en carburants exclusivement via la SARA. Ce décret a également modernisé l approche de la régulation. En effet, en précisant que les prix administrés tiennent compte «des efforts de productivité» consentis par les entreprises de raffinage et de stockage, la régulation ne se borne plus à couvrir les coûts exposés par les entreprises concernées mais doit aussi les inciter à les réduire. Le préfet fixe donc un prix maximum «hors taxes de sortie raffinerie, hors passage en dépôt» des produits pétroliers, modifié à chaque livraison de matières premières pour tenir compte, en proportion des quantités importées : du coût de la matière première importée, calculé en fonction des cotations de brut de référence (brent daté) et du cours moyen du dollar, sur une période de vingt jours comprenant les dix jours ouvrés et cotés précédant et suivant la date du connaissement maritime (1), c'est-à-dire le départ du navire ; (1) Le connaissement est émis en exécution d'un contrat de transport. Sur présentation d un des originaux à l agent de la ligne au port de destination, il donne droit à la délivrance et donc à la remise des marchandises à destination. Il constitue le support matériel du contrat de transport.

149 18 du coût des produits finis et semi-finis importés (c'est-à-dire les carburants), calculé en fonction du cours des produits pétroliers sur l un des marchés de référence de la zone Amérique et du cours du dollar à la date du connaissement maritime. Ce prix maximum «hors taxes de sortie raffinerie, hors passage en dépôt» tient également compte, une fois l an : de l évolution des coûts de transport maritime et de logistique ; de l évolution de la réglementation en matière de spécifications des produits, de sécurité et de protection de l environnement ; des efforts de productivité consentis par la SARA ainsi que des variations justifiées de sa masse salariale. Le prix maximum hors taxes de passage en dépôt est quant à lui modifié une fois l an afin de tenir compte : d une part, de l évolution des coûts des entreprises chargées du stockage des produits pétroliers due, notamment, à l évolution de la réglementation en matière de sécurité ; d autre part, des efforts de productivité consentis par ces entreprises. Enfin, le prix maximum de vente en gros et au détail, toutes taxes comprises, de produits pétroliers est modifié : à chaque variation des droits et taxes assis sur ces produits ; à chaque modification des autres prix de la structure susmentionnés ; une fois l an, pour tenir compte, d une part, de l évolution des coûts de transport, de stockage et de distribution due, notamment, à l évolution de la réglementation en matière de sécurité et de protection de l environnement et, d autre part, des efforts de productivité consentis par les grossistes et les détaillants. Les règles applicables à La Réunion Les règles applicables à la Réunion sont plus simples dès lors qu il n y a pas de raffinerie sur l île et que la totalité des carburants est importée directement depuis Singapour. Elles sont également bien moins précises que celles applicables en Guadeloupe et en Martinique puisque le décret n du 17 novembre 1988 novembre e de fixer le prix de vente en gros et le prix de vente au détail (en francs) que le préfet modifie : en fonction de l évolution du prix des produits importés et de la variation des droits et taxes assis sur ces produits ;

150 19 une fois l an, en fonction des variations justifiées des salaires et de tous autres éléments du prix de revient. Les règles applicables en Guyane Le décret n du 17 novembre 1988 applicable à la Guyane est aussi laconique que son équivalent réunionnais. Comme lui, il se contente de fixer en francs le prix de vente en gros et le prix de vente au détail des carburants, prix que le préfet modifie : en fonction de l évolution du prix des produits importés et de la variation des droits et taxes assis sur ces produits ; une fois l an, en fonction des variations justifiées des salaires et de tous autres éléments du prix de revient. En revanche, afin de tenir compte de la géographie du territoire guyanais, le prix administré est majoré des frais de transport pour la distribution des carburants en dehors des grandes agglomérations que sont Cayenne, Kourou et Saint Laurent-du-Maroni. Ces frais sont également fixés par le préfet. En définitive, les arrêtés de fixation du prix des carburants dans les départements d outre-mer sont publiés tous les trois mois par le préfet après avis de la direction régionale de la concurrence, de la consommation et la répression des fraudes (DRCCRF) avec, en annexe, un tableau détaillant les différents éléments qui composent la structure de prix et la part qu ils représentent dans le prix total des carburants. Cette structure de prix peut être présentée selon le schéma suivant :

151 20 Guadeloupe, Martinique et Guyane Achat du pétrole brut + Fret + Raffinage + Stockage + Droits et taxes + Sociétés de trading des compagnies pétrolières Armateurs SARA SARA SARA SRPP Conseils régionaux La Réunion Achat des produits raffinés + Fret + Stockage + Droits et taxes + Marge de gros Distributeurs grossistes Marge de gros + + Marge de détail Stations services Marge de détail = Prix de vente au détail des carburants = Prix de vente au détail des carburants 2. Les prix des carburants outre-mer sont globalement proches de ceux de la métropole a) Des droits et des taxes inférieurs à leurs équivalents en métropole Les produits pétroliers ne sont pas soumis, comme en France métropolitaine, à la taxe intérieure de consommation des produits pétroliers (TIPP). De même la TVA ne leur est pas applicable. En revanche, ils supportent, en application de l article 266 quater du code des douanes, une taxe spéciale de consommation (TSC) dont les taux sont fixés par chaque conseil régional et le produit versé au budget régional puis réparti avec le département et les communes. Les taux de la TSC ne peuvent excéder les taux applicables en métropole aux mêmes carburants, soit : 63,96 /hl pour le supercarburant ;

152 21 41,69 /hl pour le gazole. Les taux de la TSC s établissent comme suit : Supercarburant Gazole Guyane 63,96 41,69 Guadeloupe 49,937 28,09 Martinique 47,613 22,12 La Réunion 58,20 36,13 (En /hl) Par conséquent, les taux de la TSC dans les départements d outre mer sont substantiellement inférieurs aux taux de TIPP en vigueur en France métropolitaine, à l exception de la Guyane où ils sont équivalents. Le produit de cette TSC peut différer selon les départements. A La Réunion, par exemple, il est affecté en totalité au FIRT (Fonds d investissement pour les routes et le transport) puis réparti entre les collectivités territoriales. Les produits pétroliers supportent en outre l octroi de mer et l octroi de mer régional (équivalents de la TVA pétrolière), dont les taux sont également fixés par les conseils régionaux. Ils sont affectés au budget des collectivités territoriales. Les taux de l octroi de mer et de l octroi de mer régional s établissent comme suit : Octroi de mer Octroi de mer régional Supercarburant Gazole supercarburant Gazole Guyane 4,5 % 4,5 % 2,5 % 2,5 % Guadeloupe 5 % 5 % 2,5 % 2,5 % Martinique 7 % 0 2,5 % 1,5 % La Réunion 21 % 3 % 2 % 2 % Le taux des octrois de mer applicable au gazole est ainsi systématiquement inférieur ou égal à celui applicable au supercarburant. En outre, la Réunion se distingue par un octroi de mer très élevé pour le supercarburant, justifié par d importants investissements en matière d infrastructures routières. Le préfet n a par conséquent aucune responsabilité dans la fixation des droits et taxes applicables aux produits pétroliers dans les départements d outre-mer, lesquels sont, globalement et dans la totalité des cas (sauf en Guyane), inférieurs à leurs équivalents en France métropolitaine. b) Des prix de détail globalement équivalents à ceux de la métropole C est un fait que les prix des carburants outre-mer ont toujours été plus ou moins équivalents à ceux en vigueur en métropole ces dernières années, un peu plus élevés pour le supercarburant, mais souvent très inférieurs pour le gazole, sauf en Guyane où les prix sont toujours supérieurs. En effet, la relative faiblesse des taxes (TSC, octroi de mer et octroi de mer régional) par rapport à leurs équivalentes métropolitaines (TVA et TIPP)

153 22 compense les surcoûts d approvisionnement. Dans le cas particulier de la Guyane, où les taxes sont à leur maximum légal, ce département avait l avantage de pouvoir s approvisionner, jusqu en 2007, non pas à la SARA mais à Trinidad où le «prix de sortie raffinerie» du carburant était bien plus bas, pour une qualité environnementale inférieure. Au total, avant que la crise ne se déclenche à l été 2008, dans un contexte de très forte hausse des prix du pétrole depuis un an, les prix des carburants dans les départements d outre-mer et en métropole s établissaient comme suit : PRIX DE VENTE AU DÉTAIL DES PRODUITS PÉTROLIERS AU 1 ER AOUT 2008 (En /hl) Guyane Guadeloupe Martinique La Réunion Métropole Supercarburant 1,68 1,53 1,44 1,48 1,46 Gazole 1,47 1,33 1,14 1,18 1,37 Dans la période , le niveau moyen des prix des carburants dans les départements d outre-mer n a pas été supérieur au niveau moyen constaté en métropole. Plus précisément, les prix du gazole, carburant majoritairement consommé, ont plutôt été inférieurs alors que ceux des supercarburants ont été légèrement supérieurs comme le montre le tableau cidessous qui retrace l écart moyen de prix entre ces départements et la métropole Écart en centimes par litre Guadeloupe Martinique Guyane La Réunion Moyenne non-pondérée Moyenne pondérée Gazole ,4-7, ,6 Supercarburants ,7 + 16,5 + 8,6 + 10,2 + 8,5 Source : Autorité de la concurrence La situation n est complètement défavorable que pour la Guyane. Mais lorsque l on pondère à partir des volumes consommés, les gains sur le gazole compensent les pertes sur les supercarburants. A l exception de la Guyane, l idée que les carburants sont plus chers dans les départements d outre-mer qu en métropole est une idée fausse. Dans ces conditions, il faut considérer que la modération fiscale des conseils régionaux compense, au bénéfice des consommateurs ultramarins, le prix structurellement élevé des carburants. En revanche, lorsque les prix du pétrole augmentent brutalement, la faiblesse des taxes ne suffit plus à contrebalancer les surcoûts : la hausse des prix du pétrole les révèle alors dans toute leur ampleur et le prix à la pompe est porté à son niveau de métropole, voire bien au-delà! C est ce qui s est passé à compter du deuxième semestre 2008.

154 23 II. LES VARIATIONS BRUTALES DES PRIX DU PÉTROLE EN 2008 ONT RÉVÉLÉ LES DYSFONCTIONNEMENTS DU MARCHÉ DES CARBURANTS DANS LES DÉPARTEMENTS D OUTRE-MER En apparence, le système d administration des prix dans les départements d outre-mer semblait parfaitement fonctionner puisque, dans ces marchés contraints, où toute concurrence est jugée impossible, les prix des carburants et du gaz étaient globalement inférieurs (sauf en Guyane) à ceux de la métropole. Cependant, la hausse brutale puis la baisse rapide des prix du pétrole en 2008 ont démontré que les apparences étaient fausses : seule la fiscalité expliquait le niveau relatif des prix ; celle-ci n ayant évidemment pas diminué puisque les besoins de financement des collectivités locales étaient identiques, les conséquences de la décision politique prise en 2007 de ne pas répercuter à la pompe les hausses du prix du baril ainsi que les dysfonctionnements, consécutifs à cette décision, du marché et du système d administration des prix sont alors apparus, provoquant une grave crise politique et sociale dans ces départements. A. LA CHRONOLOGIE DE LA CRISE Dès que l on remet en cause son pouvoir d achat, le consommateur ultramarin manifeste, comme le consommateur métropolitain, un fort mécontentement. Le prix des carburants, dans la mesure où l automobile a conquis une place importante dans la vie quotidienne, cristallise l attention du citoyen, par ailleurs automobiliste. Toute augmentation du prix des carburants, que ce soit dans les DOM comme en métropole, est aussitôt ressentie comme une atteinte, voire une amputation du pouvoir d achat. Dans un monde médiatique, le consommateur est informé quotidiennement des variations des cours du pétrole. S il accepte volontiers que les hausses du baril ne soient pas répercutées immédiatement à la pompe, il s insurge facilement quand les baisses ne le sont pas. La question du prix des carburants revêt une particulière acuité dans l ensemble des DOM, même si les mouvements sociaux auxquels ils ont été confrontés, n y ont pas tous eu la même ampleur qu en Guadeloupe. Cette sensibilité spécifique s explique par un niveau de vie moyen des habitants de ces départements inférieur à celui des métropolitains, d où une importance plus grande du poste carburant dans le budget des ménages. De plus, les transports en commun n y sont pas ou que très peu développés. Successivement, les départements d outre-mer ont été le théâtre de mouvements revendicatifs, parfois d une extrême violence, dont l élément déclencheur a été le prix considéré excessif des prix à la pompe des carburants. Les causes de ces mouvements qui se sont propagés d un département à l autre, s analysent aisément. En effet, alors qu en métropole, les prix des carburants répercutaient la baisse brutale du baril, ils augmentaient sensiblement dans les départements ultramarins en raison de l existence d un décalage d ajustement. Il est vrai que le système d administration des prix des

155 24 carburants dans les DOM, étroitement lié aux approvisionnements, ne présente pas la souplesse nécessaire à la répercussion rapide des cours du pétrole. C est à la Réunion, dès septembre 2008, que sont nées les premières protestations contre les tarifs élevés des carburants. Le mouvement s est, par la suite, étendu à la Guyane en novembre, puis à la Guadeloupe et à la Martinique au début de l année Il convient toutefois de souligner que le prix des carburants a constitué très probablement une sorte de catalyseur à une crise plus profonde portée par un ensemble de revendications d ordre social et économique. Les récriminations initiales qui visaient essentiellement les prix des carburants se transformèrent progressivement en des manifestations contre «la vie chère» et la «profitation». En Guyane, par exemple, il paraissait difficilement compréhensible au consommateur de devoir acquitter 1,77 par litre de supercarburant et 1,55 par litre de gazole, alors que ces mêmes produits pétroliers coûtaient respectivement, à l automne 2008, 1,18 et 1,02 le litre à l automobiliste métropolitain. S il ne paraît pas indispensable de rappeler jour après jour le déroulement d événements qui ont pu connaître des épisodes tragiques, il semble à tout le moins nécessaire de dire ici qu ils ont été d une ampleur et d une durée jusque là inconnues, par la mobilisation forte des populations ultramarines. Force est de constater que durant cette crise, les départements d outre-mer ont connu, pour certains une situation quasi insurrectionnelle les condamnant à une quasi paralysie économique et sociale. Pour tenter de sortir de cette crise, le Gouvernement et le Président de la République durent s impliquer eux-mêmes dans les négociations. Le retour au calme ne fut rétabli qu à partir du moment où le Gouvernement lança un vaste mouvement de concertation, notamment à travers l institution d états généraux de l outre mer dont le périmètre dépasse le seul aspect des prix des produits pétroliers. Parallèlement, les préfets baissèrent, unilatéralement et contre toute logique économique à système de distribution constant, les prix des carburants, en fixant d ailleurs des tarifs proches de ceux ayant cours en métropole et n ayant plus aucun rapport avec la réalité économique. B. LA MISE AU JOUR DES DYSFONCTIONNEMENTS DU MARCHÉ DES CARBURANTS Il faut reconnaître au système actuel d administration des prix un mérite : depuis qu il a été mis en place, jamais les départements d outre-mer n ont connu de ruptures dans l approvisionnement en carburant (sauf, bien sûr, les ruptures volontaires liées aux grèves et blocages divers). La continuité de l approvisionnement a donc été assurée. Mais à quel prix! Sans la crise suscitée outre-mer par la non-répercussion à la baisse des prix des carburants, jamais la lumière n aurait été faite sur les dysfonctionnements graves tant du marché des

156 25 carburants et que du système d administration des prix. Ce sont ces dysfonctionnements que la mission d information s est donnée pour objectif de révéler et, à partir du constat ainsi fait, d analyser leur responsabilité dans le prix élevé des carburants dans les départements d outre-mer. 1. La fixation du prix des carburants, caractérisée par l absence de transparence, échappe largement au contrôle du préfet a) La structure de prix s impose dans une large mesure au Préfet Si l on en croit les textes et l idée communément admise outre-mer, c est au préfet qu il appartient de fixer le prix des carburants et du gaz. Cependant, nombre d éléments du prix de structure sont fixés soit par le marché (prix des carburants, du gaz ou du pétrole brut) soit par les collectivités territoriales et autres organismes publics (taxes des chambres de commerce et d industrie, TSC, octroi de mer). Les prix des carburants échappent donc largement au contrôle du préfet qui se borne à fixer le prix de sortie raffinerie (pour la SARA), les droits de passage et la marge de distribution sans réellement piloter les deux premiers ni la répartition entre marge de gros et marge de détail de la seconde. Une influence très limitée sur le prix d achat des carburants et du pétrole et le «prix de sortie raffinerie». En Guadeloupe, en Martinique et en Guyane (dès lors qu elle s approvisionne auprès de la SARA), le «prix de sortie raffinerie» de la SARA est déterminé, pour une large part, à partir d éléments objectifs, détaillés dans le décret du 23 décembre 2003 précité, que sont, d une part, l évolution du coût des approvisionnements et, d autre part, celle des autres facteurs de production (logistique, fret, masse salariale ). S agissant du prix du pétrole, celui-ci est calculé à partir de la moyenne des dix cotations du pétrole brut (Brent daté FOB) avant et après la date de chargement du navire, auquel s ajoutent le premium (qui représente le surcoût découlant de la qualité demandée) et une commission de trading. L évolution du coût de l approvisionnement est donc totalement dépendante du prix du marché sur lequel le préfet n a aucune influence. Il en va de même s agissant des produits raffinés que la SARA est amenée à importer, lors d arrêts techniques notamment, ceux-ci sont achetés sur le marché mondial au cours du jour. En revanche, une négociation s engage entre la SARA et l État afin de déterminer la marge sur coûts variables de raffinage (MCVR) qui sert de base au calcul du «prix de sortie raffinerie». Cette marge fait l objet d une négociation directe annuelle entre les responsables de la SARA et ceux de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du ministère de l Économie, des finances et de l emploi. Les services locaux, en particulier les DRCCRF sont bien évidemment consultés sur les

157 26 propositions de la SARA, mais la décision est prise en réalité par le ministère des finances et s impose dans les départements d outre-mer. En outre, on ne peut pas dire que le pilotage de cette marge ait été particulièrement efficace au cours des dernières années. Comme l a relevé le rapport de l Inspection générale des finances (IGF), de l Inspection générale de l administration (IGA) et du Conseil général des mines (CGM) sur la formation du prix des carburants, l objectif de MCVR a été rarement atteint, dans un sens ou dans un autre, obligeant à des mouvements de balancier qui affectent directement un «prix de sortie raffinerie» de plus en plus déconnecté des prix constatés sur les marchés internationaux. A la Réunion, il n y a pas de prix de sortie raffinerie mais un prix d achat des carburants et du gaz importé depuis les raffineries de Singapour. Cependant, comme dans les départements français d Amérique, la marge du Préfet est nulle : le prix de l approvisionnement est calculé à partir d une formule comprenant le prix de marché à Singapour (moyenne calculée sur cinq jours autour du départ du bateau), le premium et la commission de négoce de 5$ par tonne laquelle rémunère la société de trading. Le Préfet ne peut qu enregistrer les évolutions du marché. Le préfet enregistre tels quels dans la structure de prix les droits et taxes fixés par le conseil régional et la chambre de commerce et d industrie La fiscalité au sens large, c'est-à-dire la TSC, l octroi de mer, l octroi de mer régional et les droits des chambres de commerce et d industrie, relèvent des conseils régionaux et des CCI régionales Elles s imposent en tant que telles dans la structure de prix. Or, la seule fiscalité régionale représente une part considérable du prix des carburants, comme le montre le tableau suivant, même si elle est inférieure à celle de la métropole : MONTANT DES TAXES DANS LE PRIX DES CARBURANTS AU 1 ER DÉCEMBRE 2008 % des taxes dans le prix de vente au détail du gazole % des taxes dans le prix de vente au détail du supercarburant Source : rapport IGF/IGA/CGIET Guyane Guadeloupe Martinique La Réunion Métropole 37,6 % 28 % 21,8 % 35,8 % 59,7 % 47,4 % 40,5 % 40,9 % 50,8 % 72 % L existence d une fiscalité représentant entre 40 et 50 % du prix des carburants et, relevant de la seule compétence des collectivités territoriales et autres organismes publics, limite donc considérablement les marges de manœuvre du préfet. Marges de distribution : la foire d empoigne En pratique, la compétence du préfet en matière de fixation du prix des carburants et du gaz ne porte que sur les droits de passage et les marges de

158 27 distribution, c'est-à-dire à la fois la marge de gros et la marge de détail. C est somme toute logique puisque c est au niveau de la distribution que l absence de concurrence pourrait entraîner une entente sur les prix et les pousser à la hausse. Quant au stockage, une seule société, la SARA dans les départements français d Amérique et la SRPP à La Réunion, détient le monopole de cette activité dont l impact dans le prix des carburants est limité, comme le montre le tableau suivant. DROITS DE PASSAGE DANS LA STRUCTURE DES PRIX DES CARBURANTS EN 2009 ( /HL) Guyane Réunion Martinique Guadeloupe Gazole 3,353 3,353 6,35 2,095 Supercarburant 3,582 3,582 Source : arrêtés préfectoraux Même en Guyane où ils sont pourtant trois fois plus élevés qu à La Réunion, les droits de passage ne représentent guère plus de 5 % du prix des carburants et moins de 2 % dans les autres départements d outre-mer. En revanche, les marges de distribution représentent une part substantielle du prix des carburants, comme le montre le tableau suivant. MARGES DE DISTRIBUTION DANS LA STRUCTURE DE PRIX DES CARBURANTS EN 2009 ( /HL) Guyane La Réunion Martinique Guadeloupe Marge de gros Supercarburant 11,5 5,940 9,085 gazole 10 6,260 6,068 Marge de détail 10 10,649 9,08 12,584 Marge totale 19,085 20,92 15,02 18,652 Source : rapport IGF/IGA/CGIET Si les marges de distribution font l objet d une véritable foire d empoigne, c est que le préfet a une réelle liberté pour accorder ou refuser l augmentation de marge que lui réclament les distributeurs ou les gérants de stations-service. Alors qu il refuse régulièrement l augmentation de la marge de gros, la marge de détail est très régulièrement augmentée. En effet, la fixation des prix des carburants n est pas seulement un acte administratif mais également un acte politique et social dès lors qu elle détermine les revenus de milliers de personnes dans les départements d outre-mer. Dans ces conditions, le niveau de la marge de détail est le prétexte à de nombreux conflits avec les détaillants. Bien souvent, la hausse est la seule porte de sortie lorsque les détaillants baissent le rideau, paralysant en quelques jours des économies insulaires fortement dépendantes de l automobile. La latitude de manœuvre du préfet en matière de marge de détail, si elle est réelle, ne joue en fait que dans un seul sens. En outre, comme le prix maximal des carburants est un prix unique, forcément moyenné, certaines stations ne sont pas rentables et ne peuvent le devenir qu en augmentant des prix qui sont fixes. C est ainsi que la menace de

159 28 fermeture des petites stations est agitée régulièrement par l ensemble de la profession afin d obtenir du préfet une revalorisation de la marge de détail applicable alors à toutes les stations-service y compris celles qui n en ont nul besoin. Or, si ces revalorisations de la marge de détail permettent la survie des stations les plus fragiles, elles bénéficient également aux stations les plus rentables dont les bénéfices augmentent encore, au détriment des consommateurs ultramarins. C est le premier inconvénient du manque de souplesse du système d administration des prix et de l absence totale de la moindre concurrence par les prix. Deuxième inconvénient, corollaire du premier, nombreux sont les gérants de stations-service qui, locataires, versent mensuellement un loyer et des redevances aux compagnies pétrolières propriétaires du fond de commerce. La tentation est donc grande, pour celles-ci, de capter une partie de la revalorisation de la marge obtenue par les détaillants, d autant plus que leur propre marge a tendance à stagner. Cette «remontée des marges» est même parfois institutionnalisée dans les contrats, c'est-à-dire que les redevances versées par le locataire-gérant augmentent mécaniquement lorsqu augmente la marge de détail. Dans son avis précité, l Autorité de la concurrence cite ainsi l exemple du contrat d une station-service guyanaise qui stipule que le distributeur recevra une redevance variable sur les carburants «égale à 0,8 centime par litre, soit 10 % de la marge-détaillant fixée par les autorités publiques ; en cas d augmentation de la marge, la redevance évoluera de même». Les compagnies pétrolières peuvent également capter la marge des transporteurs routiers de carburants. Les représentants martiniquais de cette profession ont ainsi affirmé à la mission d information que la hausse de 4,64 % de la marge de gros prévue par l arrêté de juin 2008 était destinée à financer le transport, mais que les prix du transport n ont pas été réévalués. Les compagnies pétrolières ont donc «empoché» la différence. Interrogée, la DRCCRF a indiqué être actuellement en train d expertiser la question Par conséquent, sans toucher à la marge de gros, en augmentant la marge de détail, le préfet augmente aussi, via une remontée des recettes, les marges des grossistes. Ceux-ci ont peut-être fini par comprendre qu il ne servait à rien de demander au préfet une augmentation de la marge de gros qu il refuse quasisystématiquement. Mieux vaut augmenter les redevances et les loyers pesant sur les locataire-gérants et laisser ceux-ci exiger une augmentation à due concurrence de leur marge de détail avec des moyens de pression autrement plus forts que ceux dont les grossistes disposent. Pour les compagnies pétrolières, le résultat est le même, mais pour le consommateur, c est une hausse des prix de détail.

160 29 b) L absence générale de transparence et de contrôle Du point de vue juridique, les règles semblent clairement établies. Le préfet fixe le prix des carburants sur la base d une structure de prix transparente, prenant en compte l ensemble des coûts de la filière, de l approvisionnement en brut à la marge de détail. Cependant, la transparence affichée cache mal l opacité généralisée. Lorsque le prix des carburants a brutalement augmenté à partir de 2008, puis s est maintenu à un niveau élevé malgré la baisse des cours, les tensions économiques et sociales en découlant ont été aggravées voire suscitées par la suspicion entourant l élaboration des prix et les marges réelles des différents acteurs de la filière. Des textes inadaptés, voire non publiés L opacité commence avec les règles mêmes. A première vue clairement établies par des décrets dont la mission d information a cependant relevé le laconisme, elles ont dû parfois, de ce fait, être précisées par des textes qui, bien qu engageant l État, n ont jamais été publiés, demeurant ainsi ignorés de l immense majorité de la population. C est ainsi que le décret n du 23 décembre 2003 précité a fait l objet d une circulaire ministérielle qui, pour des raisons inconnues, n a jamais été signée ni publiée, mais appliquée! Or, ladite circulaire est néanmoins appliquée pour la détermination du prix des carburants en Guadeloupe et en Martinique (et en Guyane depuis qu elle s approvisionne à la SARA), et fixe notamment une formule mathématique de variation du «prix de sortie raffinerie» (hors passage en dépôt) dont la mission d information a pu apprécier l apparente clarté : TM n = TM n-1 + [(y B n + (1 y) P n ) (y B n-1 + (1 y) P n-1 )] De même, afin d encadrer l évolution des différentes marges à la Réunion, l État a signé en 1998 avec les compagnies pétrolières, les détaillants et la SRPP un protocole d accord qui s est appliqué formellement jusqu en La mission d information, qui s est fait communiquer ledit protocole, n a rien à redire à des dispositions techniques que le laconisme du décret de 1988 avait probablement rendues nécessaires. Cependant, le fait qu il n a jamais été publié et qu il a en outre continué à s appliquer après 2002 n a pu que renforcer la suspicion, au sein de la population, d une collusion entre les services de l État et les acteurs de la filière. Enfin, bien que n ayant pas été modifiée suite au changement d approvisionnement découlant de l application obligatoire des normes européennes en 2007, l arrêté préfectoral du 11 juin 2004 est toujours applicable en Guyane. Il se réfère toujours, pour la fixation du prix des carburants importés, aux «cotations de référence afférentes à la zone Trinidad» alors qu est désormais applicable le prix de sortie raffinerie de la SARA.

161 30 La discrète négociation des marges Au secret des règles s ajoute également la discrétion qui entoure la négociation des marges. Loin de la transparence souhaitée, la fixation des prix des carburants repose sur une négociation directe et informelle entre les différents acteurs de la filière (gérants, compagnies pétrolières, SARA, transporteurs, stockeurs ) et la direction régionale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DRCCRF), à la préfecture, voire à Paris dans le cas de la marge de raffinage de la SARA. Les seules fois où la population est prise à témoin de ces négociations sont les conflits qui éclatent périodiquement et dont elle se retrouve l otage. S il est naturel qu une négociation avec les acteurs économiques précède la fixation des prix, la mission d information s étonne toutefois qu une question aussi sensible que le prix des carburants soit débattue dans le secret d une enceinte administrative. Une telle opacité est propre à susciter tous les fantasmes et toutes les suspicions de collusion et d entente qui ont largement pesé dans la crise de l automne Pourtant, des organismes de concertation ou des interlocuteurs existent : observatoires des prix, fédérations professionnelles (MEDEF, CGPME) et associations de consommateurs dont la mission d information a pu apprécier leur connaissance du sujet. Aucun d entre eux n a d ailleurs jamais été consulté lors de l élaboration de la structure de prix. Les citoyens comme les entreprises découvrent, sans avoir leur mot à dire, le jour de la publication de l arrêté, le prix des carburants pour les trois prochains mois. Il est vrai que les textes n imposent aucune concertation préalable à l adoption des arrêtés. Cependant, ce qui est vrai pour les citoyens et les entreprises l est également pour les distributeurs et les gérants de stations-service. Ils sont pourtant étroitement consultés. On peut objecter qu ils sont directement intéressés à la question du prix des carburants. Mais l ensemble de la population et des acteurs économiques l est également! Le difficile contrôle des DRCCRF L absence de transparence, c est enfin la réelle difficulté, pour les services de l État, d assurer un contrôle efficace sur certains éléments de la structure de prix, jetant ainsi le doute sur le bien-fondé des marges pratiquées. Ces difficultés sont d autant plus ardues à surmonter que ces services de l État manquent cruellement, comme la mission a pu le constater, de moyens et de compétences. Ainsi en est-il du prix d achat des carburants et du brut. Celui-ci est un mystère que malgré sa persévérance, la mission d information n a pu totalement éclaircir. Le prix d achat du pétrole brut et des carburants intégré dans la structure de prix est établi de manière incontestable par une formule reposant sur les cours mondiaux. Mais ce prix d achat est en pratique le prix auquel ils sont facturés par les sociétés de trading, pas celui auquel elles l ont réellement payé. Personne, à part les sociétés de trading intermédiaires pour le compte de la SARA et des

162 31 importateurs réunionnais ne sait à quel prix les produits ont été acquis sur le marché international. Il semble évident à la mission d information qu une marge est faite sur l achat du carburant et du pétrole brut par les sociétés de trading dont c est le rôle d acheter moins cher que le marché ; mais personne n a été en mesure de l éclairer sur ce point. La raison en est la structure particulière des compagnies pétrolières qui s organisent autour de fonctions dédiées à des filiales spécialisées, géographiquement et juridiquement autonomes les unes par rapport aux autres. C est ainsi qu à la question du prix d achat du carburant, les responsables de la SARA ou d une filiale locale d une compagnie pétrolière internationale ont renvoyé la mission d information vers les sociétés de trading, installées à Dubaï, Houston ou ailleurs et avec lesquelles ils n ont d autres contacts que la facture que celles-ci leur adressent et qu ils n auraient pas les moyens pas plus que la DRCCRF si elle en avait l intention de contrôler. Pour le reste, les DRCCRF se font communiquer, dans chaque département, l ensemble des éléments nécessaires à la fixation des marges de stockage et de distribution. Cependant, sans remettre en cause la compétence et le sérieux des personnels maintenus dans ces directions, la mission d information a toutes les raisons de douter qu elles aient les moyens de contrôler et d expertiser réellement ceux-ci. Les paramètres sont si nombreux, si instables et l asymétrie d information est telle avec les acteurs de la filière que le contrôle ne peut être que superficiel, d autant plus que bien souvent, un seul agent est chargé de la régulation du secteur des carburants. Ce manque de moyens explique probablement pourquoi les droits de passage dans les stocks de la SARA et de la SRPP, non seulement ne baissent jamais, mais semblent fixés pour l éternité. En effet, comme le relève le rapport IGF/IGA/CGIET, à La Réunion, il est révisé annuellement en fonction de l évolution de l indice INSEE des prix des services, aux Antilles, il n a pas bougé depuis 2003 et en Guyane, où il est particulièrement élevé, il est inchangé depuis 2000 Or, les investissements comptent pour une large part dans le niveau des droits de passage et la mission d information a quelques difficultés à croire que certains n ont pas été amortis au cours de cette période. Mais encore faut-il avoir le temps d analyser précisément la comptabilité des entreprises concernées et de calculer l impact des investissements et des dotations aux amortissements sur les droits de passage Enfin, les DRCCRF ne pratiquent pas le contrôle d opportunité et ne peuvent légalement le pratiquer. Elles jugent à partir des éléments dont elles ont connaissance et ne s interrogent pas sur la possibilité d avoir un prix plus bas. Pour justifier ses coûts de transport, la compagnie pétrolière présente les factures de son transporteur routier (si elle a externalisé le transport terrestre de carburant) et celles de son armateur pour son approvisionnement. Il n entre pas dans les attributions des DRCCRF ni même du préfet de juger du prix payé. Il leur

163 32 appartient seulement de vérifier, dans la mesure du possible, que la marge demandée se justifie par des coûts réellement exposés. Dès lors que c est le consommateur qui paie et que les éventuels surcoûts sont intégrés dans la structure de prix, il n y a aucune raison de rechercher le prix le plus bas ni de faire des gains de productivité, alors même que le décret de 2003 impose qu elle tienne compte de ceux-ci. D ailleurs, comment les services de l État pourraient-il réellement mesurer les gains de productivité possibles? Le contrôle des DRCCRF s apparente ainsi au contrôle de légalité en matière administrative. Il faut que les règles aient été respectées et les justifications produites. Le reste n est pas de sa compétence. 2. La position dominante des compagnies pétrolières a) Une position dominante et une organisation opaque La coopération étroite entre les grandes compagnies pétrolières Certes des plus grandes compagnies pétrolières internationales (majors) ont des filiales dans les départements d outre-mer, dont elles dominent totalement le marché des carburants. L organisation de ce marché a cependant évolué récemment dans deux sens contradictoires : d une part, un indépendant français Rubis a repris en 2007 le réseau de stations-service de Shell en Martinique et en Guadeloupe et un groupe libyen Tamoil a repris la même année le réseau d Exxon-Mobil à La Réunion, réduisant ainsi le poids des majors sur le marché des carburants des départements d outre-mer ; d autre part, en rachetant Elf-Aquitaine en 1999, le groupe Total est non seulement entré au capital de la SRPP mais il a accru une emprise historiquement très forte sur ce marché, comme le montre le tableau suivant : NOMBRE ET RÉPARTITION DES STATIONS SERVICE PROPRIÉTÉS DES GROUPES PÉTROLIERS OU EN CONTRAT D EXCLUSIVITÉ AU 1 ER JANVIER 2009 Martinique Guadeloupe Guyane La Réunion Ensemble % des stations Total (et Elf) ,3 % Texaco-Chevron ,6 % Rubis-Vito ,4 % Exxon-Mobil ,1 % Tamoil ,5 % Shell ,3 % Autres (1) ,8 % Ensemble % (1) Sont regroupés dans cette catégorie WIPCO, CAP et GPC Source : Autorité de la concurrence Présent dans les quatre départements, le groupe Total y contrôle plus de 43 % des stations-service et pèse quasiment autant que ses quatre principaux

164 33 concurrents réunis. Les quatre majors contrôlent ainsi ensemble près de 75 % des canaux de distribution des carburants. Le terme de «concurrents» n est cependant pas tout à fait pertinent, à la fois parce que les prix sont administrés supprimant toute concurrence par les prix et parce que la coopération entre les grandes compagnies pétrolières est étroite (1) ; en effet, en raison de la taille réduite du marché des carburants dans les départements d outre-mer, celles-ci ont mutualisé un certain nombre d activités afin de dégager des économies d échelle. C est ainsi qu au-delà de leur personnalité juridique distincte, il faut considérer qu un monopole de fait s exerce à la fois sur l approvisionnement, le transport, le raffinage et le stockage : l approvisionnement en pétrole brut, en produits raffinés ou semiraffinés aux Antilles, en Guyane et à La Réunion est mutualisé pour l ensemble du marché. La SARA utilise les sociétés de trading de ses quatre actionnaires (Total, Rubis, Texaco-Chevron et Exxon), à tour de rôle, pour rechercher les produits répondant à ses spécifications techniques ; de même, à La Réunion, les quatre importateurs (SRPP, Total, Chevron-Texaco et Tamoil) confient à la société de trading de l un d entre eux l approvisionnement en produits pétroliers pour l ensemble du marché depuis Singapour ; de même, afin de transporter les produits pétroliers jusqu à La Réunion et de la SARA à la Guyane, chaque ligne (Singapour Le Port, Martinique Guyane) dispose d un seul et même navire, spécialement dédié et exploité exclusivement pour l approvisionnement de chacun de ces marchés. De plus, s agissant de la Réunion, où les importateurs sont à la fois les affréteurs et les distributeurs, le coût est directement partagé entre eux au prorata des volumes de carburants qu ils ont acquis. L affrètement est mutualisé et organisé par les départements Shipping des compagnies pétrolières ; la SARA raffine le pétrole brut pour l ensemble des compagnies pétrolières présentes aux Antilles et en Guyane, y compris les distributeurs indépendants que sont Wipco, CAP et GPC. En raison des faibles volumes consommés sur ces marchés, ces sociétés indépendantes éprouvent de réelles difficultés à s approvisionner directement sur le marché spot ; le stockage, enfin, constitue un monopole tant dans les départements français d Amérique qu à La Réunion ; la SARA est la seule à disposer d installations de stockage en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane ; de même, la SRPP dispose des seules cuves de la Réunion. En revanche, si la SARA reste propriétaire des produits stockés dans ses cuves qu elle vend aux distributeurs, la SRPP n assure que le stockage de carburants dont les propriétaires sont les importateurs-distributeurs. (1) On peut également relever que les trois majors présentes dans les départements français d Amérique se sont réparties géographiquement les sièges de leur direction régionale. Le siège de Texaco-Chevron est en Guyane, celui de Total en Martinique et celui d Exxon-Mobil en Guadeloupe.

165 34 Dans tous les cas, le monopole est naturel et résulte des spécificités du marché des carburants dans les départements d outre-mer. La mutualisation de l approvisionnement, du transport, du raffinage et du stockage est le système le moins coûteux pour l ensemble des acteurs. Il serait en effet peu rentable de multiplier les canaux d approvisionnement avec des navires de faible capacité ; de même, les fortes contraintes d entrée sur l activité de stockage interdit à chaque opérateur de construire ses propres cuves. Les liens contractuels entre compagnies pétrolières se doublent de nombreux liens capitalistiques, à travers des filiales communes souvent dominées par Total, lequel est l acteur majeur de la filière pétrolière dans les départements d outre-mer, comme le montre le schéma ci-après.

166 35 Total SA 100 % 100 % 100 % 100 % 31,3 % 31,6 % 68,4 % 25 % 50 % Vend 100 % Vend 25 % Total Caraïbes 27 Shell Total France Total Raffinage marketing Total outre-mer Total Trading SARA Guyane 100 % SARA Total Réunion SRPP Rubis 68,7 % Approvisionne et exploite 50 % Shell Vend 11,5 % Total Guadeloupe Stocke Stocke Chevron Stocke Approvisionne et exploite 14,5 % Exxon Approvisionne et exploite 29 stations services 108 stations services 88 stations services 147 stations services 28 Tamoil 34 Coltex 58 Total Elf 1 CAP 1 Wipco 10 Texaco 15 Exxon 19 Rubis 42 Total 1 GPC 6 CAP 5 Wipco 10 Texaco 15 Exxon 22 Rubis 49 Total 12 Total 9 Rubis 8 Texaco Réunion Martinique Guyane Guadeloupe

167 36 Un tel enchevêtrement de relations, outre qu il est difficilement compréhensible pour l observateur extérieur qui pourrait à juste titre le considérer avec suspicion, aurait pour objet, selon l un des responsables auditionnés par la mission d information, de «limiter la responsabilité juridique de chacune des entités». Il réduit ainsi considérablement l information dont disposent les responsables des filiales locales des compagnies pétrolières et leur permet de justifier de leur ignorance lorsqu ils sont interrogés, par exemple, sur le prix d achat du carburant (qui relèvent des sociétés de trading) ou le transport de celuici (à la charge des départements shipping). Le difficile développement des distributeurs indépendants Si les compagnies pétrolières internationales présentes dans les départements d outre-mer coopèrent entre elles parfois jusqu à l entente illégale (1) il n en va pas de même avec les distributeurs locaux de carburants qui tentent de se développer depuis quelques années aux Antilles, les marchés guyanais et réunionnais restant la chasse gardée des majors. Ceux-ci sont au nombre de trois WIPCO (2), CAP (3) et GPC (4) et s appuient sur des groupes locaux souvent implantés de longue date en Guadeloupe et en Martinique. Ces trois distributeurs occupent une place encore marginale sur les marchés guadeloupéen et martiniquais, comme le montre le tableau suivant. Martinique Guadeloupe Ensemble % des stations Total ,4% Rubis ,9 % Exxon-Mobil ,3 % Texaco-Chevron ,3 % WIPCO % CAP ,6 % GPC ,5 % Ensemble % Source : Autorité de la concurrence La mission d information a rencontré les responsables de ces nouveaux distributeurs, qui se sont regroupés afin de mieux résister aux compagnies pétrolières ; ils ont en effet dénoncé vigoureusement l action des majors et en particulier de la SARA qui, cherchant à verrouiller le marché antillais, entraverait considérablement leur développement. (1) C est ainsi que le Conseil de la concurrence a condamné, par sa décision n 09-D-30 du 4 décembre 2008, les filiales locales de Total, Shell, Exxon-Mobil et Chevron-Texaco à une amende globale de 41,2 millions d euros pour une entente sur le marché des carburéacteurs. (2) La société WIPCO est une filiale du groupe Loret, qui est un groupe guadeloupéen diversifié, notamment dans le secteur automobile, la location de voitures et les nouvelles technologies. Le secteur pétrolier, qui est un secteur nouveau dans ses activités, représente, en 2007, un chiffre d affaires de 15 millions d euros sur 650 millions d euros total. (3) La Compagnie Antillaise des Pétroles est une filiale du groupe Barboteau, présent aux Antilles depuis (4) GPC appartient au groupe de BTP Gaddarkan. Il est entré sur le marché en 2008.

168 37 Pour se développer sur un marché contraint, ils n ont souvent d autres possibilités que de convaincre les propriétaires-gérants de signer avec eux un nouveau contrat d approvisionnement exclusif ; or, à les entendre, Total n a reculé devant rien pour les en dissuader, allant jusqu à faire poser des scellés sur les cuves qu un propriétaire voulait racheter, l obligeant à les faire enlever par huissier de justice. Plus insidieusement, les compagnies pétrolières actionnaires de la SARA auraient, selon les mêmes responsables, multiplié les gestes commerciaux vis-à-vis des propriétaires gérants dont le consommateur n a bien entendu jamais profité. Ces largesses sont rendues financièrement possibles du fait des bénéfices dégagés sur le raffinage et sur les locataires-gérants. La mission d information n a pas à se prononcer sur la véracité de ces faits évoqués devant elle. Il appartiendra à l Autorité de la concurrence, saisie d une plainte de WIPCO et de CAP, de les vérifier et de sanctionner, le cas échéant, les responsables. Maltraités selon eux par les compagnies pétrolières, les distributeurs indépendants sont également mal vus des gérants, notamment en Guadeloupe qui constitue leur principale zone de développement. Les gérants estiment en effet que la Guadeloupe est d ores et déjà saturée de stations-service et que les multiplier, alors même que stagne la consommation de carburants, ne pourrait que réduire la rentabilité de chacune d entre elles. Ces gérants ont ainsi obtenu du secrétaire d État à l Outre-mer, M. Yves JEGO, de subordonner la création de toute nouvelle station à l autorisation d une commission sui generis qui, dans le contexte local, ne peut que favoriser le gel de leur nombre alors même que de nouveaux besoins pourraient apparaître. Bien que consciente du fait que le marché guadeloupéen des carburants n est pas infiniment extensible, la mission d information ne peut qu être critique face à une restriction supplémentaire de concurrence sur un marché où elle est déjà quasi-inexistante. Elle estime au contraire que l arrivée de nouveaux distributeurs sur le marché antillais ne peut qu être favorable aux consommateurs et qu ils doivent pouvoir se développer librement dans le respect des règles de la concurrence. Les gérants reprochent également aux distributeurs indépendants, le fait qu ils encourageraient les entreprises, notamment dans le secteur du transport et du BTP, à installer des cuves privées. L avantage qu ils retirent des cuves privées est en effet évident : ils peuvent les approvisionner directement et, ainsi, réduire leur prix à due concurrence de la marge de détail. Les gérants s élèvent contre ce qu ils considèrent comme de la concurrence déloyale qui, en outre, soulève de réelles questions de sécurité s agissant de la qualité et de l entretien de ces cuves que personne ne recense ni ne contrôle mais qui pourraient représenter jusqu à 20 % du marché des carburants aux Antilles. Cependant, si la mission d information est consciente des problèmes de sécurité qu entraîne la multiplication des cuves privées, elle ne peut manquer de

169 38 relever le caractère contradictoire du discours des gérants guadeloupéens qui ont évoqué la possibilité de baisser le rideau de leurs stations-service s ils n obtenaient pas leur interdiction. Or, ce sont justement les mouvements sociaux incessants frappant la distribution au détail de carburants qui poussent les entreprises à assurer la régularité de leur approvisionnement via des cuves privées. b) Les relations complexes entre les gérants et les compagnies pétrolières Après avoir analysé le fonctionnement de la distribution de gros, la mission d information s est intéressée à la distribution au détail des carburants et aux relations complexes entre les gérants de stations-service et les compagnies pétrolières : complexes parce qu il est difficile d y voir clair dans des relations couvertes par le secret professionnel. En outre, les contrats qui lient les gérants avec leur fournisseur sont très différents les uns des autres et il est malaisé de dresser un tableau exhaustif d une accumulation de situations individuelles. Enfin, la population des gérants de stations-service présente par un clivage majeur qui interdit de la considérer comme homogène (propriétaires ou locataires). Lors de ses déplacements outre-mer, la mission d information a rencontré les représentants des gérants de stations-service dont l audition lui a permis de mieux appréhender la réalité des relations entre les gérants et les distributeurs. Elle est désormais convaincue que la marge de détail porte, bien plus que la marge de gros, une lourde responsabilité dans la hausse continue des prix des carburants dans ces départements. Le modèle économique de la station-service outre-mer Le modèle économique de la distribution au détail de carburant outre-mer diffère sur plusieurs points du modèle métropolitain : la sous-traitance de la distribution au détail par les compagnies pétrolières. Outre-mer, les compagnies pétrolières sous-traitent l intégralité de la distribution au détail des carburants à des gérants. Les compagnies concluent des contrats d approvisionnement exclusif avec les propriétaires-gérants ou possèdent des stations-service qu elles louent à des locataires-gérants. Tous les matériels (cuves, pompes, locaux, installation de lavage, gonflage des pneus ) sont fournis par les compagnies pétrolières qui se chargent également de l entretien de ceux-ci en échange du loyer et/ou de redevances versés par le locataire-gérant qui supporte également l entière responsabilité en cas d accident de pistolet ou de mauvais entretien des pistes et des cuves. Corollaire de ce modèle de la mise en gérance généralisée des stations-service, les filiales locales des compagnies pétrolières se composent de quelques dizaines de salariés, voire moins, essentiellement concentrés au siège ; le développement d une activité «boutique». Les marges sur l activité de distribution de carburants et de gaz, fixées par le Préfet, sont relativement faibles ; il est rare qu elles dépassent 10 % ; en revanche, les marges

170 39 sur l activité boutique peuvent être élevées, jusqu à attendre 40 % sur certains produits, notamment alimentaires. C est pourquoi les gérants sont fortement incités à développer, à côté de leur activité principale de distributeur de carburants, une activité boutique. Les stations-service, qui bénéficient d une large amplitude horaire, sont ainsi dans les départements d outre-mer des «lieux de vie» et considérées comme tels. L Autorité de la concurrence estime que les boutiques brassent un chiffre d affaires allant de euros pour les plus petites à plus d un million d euros pour les plus grandes qui fonctionnent comme des superettes ; l emploi de nombreux salariés. Contrairement aux stations-service métropolitaines qui ont automatisé leurs pompes, les pompistes sont encore présents en nombre outre-mer afin d assurer un service de qualité aux clients ; en effet, dès lors que la concurrence ne peut s exercer par les prix et que les stations se trouvent toutes dans un périmètre réduit, en particulier en ville, la différence ne peut se faire que sur le service, la propreté et la qualité de l accueil ; les emplois de pompistes s ajoutant à ceux de la boutique, les stations-service représentent au total plusieurs milliers d emplois dans les départements d outre mer et, de fait, les charges salariales jusqu à 60 % de la marge de détail d une station-service (qui emploie en moyenne entre 5 et 10 salariés et jusqu à 20 pour les grosses stations) ; une syndicalisation très forte : en nombre très réduit et se connaissant tous, les gérants se sont depuis longtemps regroupés dans un syndicat pour faire face aux compagnies pétrolières et peser sur le préfet à qui revient la charge de fixer la marge de détail. La quasi-totalité sinon la totalité (comme à la Réunion) des gérants en sont membres et ses mots d ordre sont généralement respectés. Lorsque les gérants décident d engager le bras de fer avec l État, c est l intégralité ou presque des stations-service qui peuvent être simultanément fermées. En outre, les pompistes eux-mêmes sont syndiqués (à l UGTG en Guadeloupe) et font pression sur les gérants pour obtenir des avantages salariaux comme une convention collective (en Guadeloupe encore) dont le surcoût est directement intégré dans la structure de prix via la marge de détail et pèse donc sur les automobilistes... La confortable «rente» des propriétaires-gérants Les propriétaires-gérants de stations-service qui possèdent le fonds de commerce ne sont pas à proprement parler des détaillants indépendants. Tous sont liés, par des contrats à long terme (souvent de dix ans) d approvisionnement exclusif à un distributeur dont ils affichent l enseigne dans leur station-service. La répartition en termes de nombre d exploitants entre les locatairesgérants et les propriétaires-gérants s établit comme suit.

171 40 Locataires-gérants Propriétaires-gérants Total Martinique Guadeloupe Guyane LaRéunion Total Total en %... 78,5% 21,5% 100% Source : Autorité de la concurrence Les gérants propriétaires de leur fonds de commerce, qui représentent environ un cinquième des gérants de stations-service outre-mer, sont plus ou moins nombreux selon les départements. Ils représentent ainsi plus d un tiers des gérants à La Réunion mais seulement 19 % à la Martinique. La Réunion compte ainsi quasiment autant de stations indépendantes que l ensemble Antilles-Guyane. Le nombre de propriétaires-gérants est également variable selon les enseignes. Sur la zone Antilles-Guyane, par exemple, la moitié des stations Total sont gérées par des indépendants alors qu Exxon-Mobil possède la totalité de ses trente stations. Les propriétaires-gérants sont, globalement, dans une situation très favorable, bien plus favorable que les locataires-gérants. En effet, agissant sur un marché où la concurrence par les prix est inexistante et la clientèle captive, ils bénéficient à plein d un système où la marge de détail est identique quelle que soit la forme juridique de la station-service. Or, contrairement au locataire-gérant, un propriétaire-gérant ne verse pas par définition de loyer ni de redevances à son grossiste auquel il se contente d acheter ses produits. En revanche, les investissements et l entretien sont à sa charge. Malgré tout, sa marge est souvent bien plus élevée puisqu il ne subit pas de «remontée de recettes» via les redevances (voir supra). Bien plus, dans un marché contraint, où le foncier est rare et où tous les bons emplacements sont déjà occupés, le seul moyen pour un grossiste de se développer est d intégrer toujours plus de stations indépendantes dans son réseau via des contrats d exclusivité. Non seulement les propriétaires-gérants ne paient ni loyer ni redevance à leur distributeur, mais ceux-ci leur accordent en plus des avantages que n ont pas les locataires-gérants qui peuvent, globalement, s élever à plusieurs dizaines de milliers d euros par an et par station : nombreuses sont les stations indépendantes qui bénéficient d un rabais sur les prix de gros des carburants, justifié notamment par les économies réalisées par le grossiste qui ne supporte pas le coût de certains gros investissements ni les charges d entretien ; dans certains cas, ces rabais sont payés intégralement en début de contrat, sorte de «golden hello» bien connu de certains chefs d entreprise et qui constitue un avantage de trésorerie appréciable ;

172 41 enfin, quelques contrats contiendraient également des clauses favorables comme la livraison gratuite du carburant ou des prêts sans intérêt lorsque le propriétaire-gérant souhaite rénover sa station-service. L avis de l Autorité de la concurrence donne une idée des montants des remises versées par les fournisseurs : entre euros pour les plus basses et euros pour les plus élevées. Cependant, rien ne dit que celles-ci soient d un montant strictement égal aux investissements effectués par le propriétaire ; le bon sens conduit à penser que c est le «prix de la fidélité». D ailleurs, certains contrats désignent explicitement ces remises par les termes «primes d exclusivité», ce qui les apparente à des marges arrières qui ne sont jamais restituées au consommateur puisque les prix de détail sont interprétés comme un prix unique. En outre, les stations-service exploitées par des propriétaires-gérants bénéficient d une structure de bilan favorable. En effet, les immobilisations sont totalement amorties, les dettes payées et la trésorerie abondante, souvent de plusieurs centaines de milliers d euros comme a pu le constater l Autorité de la concurrence. Il est cependant difficile de connaître la rémunération réelle des propriétaires de stations-service. Selon l Autorité de la concurrence, la majorité des rémunérations annuelles des propriétaires-gérants sont comprises entre et , avec des extrêmes à et brut et en Cependant, le salaire qu ils se versent ne constitue qu une partie parfois minoritaire de leur rémunération totale. En effet, ceux-ci, outre leur salaire, se distribuent les bénéfices. L Autorité de la concurrence cite ainsi l exemple d un gérant majoritaire d une station-service qui a touché, en 2007, au titre de salaire mais a réalisé un bénéfice net de en 2004, en 2006 et en 2007, en raison d une charge exceptionnelle de Le revenu moyen de ce propriétaire-gérant atteint donc De plus, les stationsservice étant souvent gérés par des familles, à cette rémunération du gérant s ajoutent ceux du conjoint et/ou des enfants. La situation plus difficile des locataires-gérants Alors que les propriétaires-gérants reçoivent, en contrepartie du contrat d exclusivité, des remises et autres avantages de leur grossiste, les locatairesgérants leur versent par définition un loyer qui, selon les mots de l un d entre eux, s apparente dans certains cas à un «mille-feuille» : un loyer fixe ; une redevance variable, exprimé en /m3, sur les volumes de carburants vendus (exigible ou non à partir d un certain seuil) ; une redevance variable sur le chiffre d affaires des installations de lavage des véhicules (lorsqu elles existent) ;

173 42 une redevance sur le chiffre d affaires de la boutique, dont le taux varie selon les produits vendus. Par conséquent, même lorsque les stations-service vendent des cartes téléphoniques, des journaux ou des produits alimentaires, les compagnies pétrolières touchent leur pourcentage. Cependant, les loyers et les redevances sont très variables selon les enseignes, dans leur montant bien sûr, mais également dans leur forme (variable ou forfaitaire). De plus, ils varient selon l ancienneté des contrats, les plus anciens se contentant parfois d un loyer fixe complété d une simple clause d indexation. Ces redevances et loyers ne constituent pas forcément des recettes nettes pour les compagnies pétrolières mais des recettes brutes qui servent en partie à couvrir les loyers versés aux propriétaires des terrains ou des immeubles où sont implantées certaines stations-service. Cependant, l augmentation très forte de ces redevances au cours des deux dernières années montre que ce ne sont pas les charges que supportent les grossistes qui expliquent une telle hausse mais, plus probablement, une «remontée des recettes» (voir supra) : Redevances payées par les détaillants Augmentation 2006/ Augmentation 2007/2008 Antilles-Guyane 7,570 M 7,897 M + 4,3% 8,590 M + 8,8% Réunion. 6,247 M 6,837 M + 9,4% 7,717 M + 12,9% Source : Autorité de la concurrence Ni les propriétaires-gérants ni les locataires-gérants n étant salariés des compagnies pétrolières, qui leur délèguent totalement la distribution au détail des carburants, la mission d information s est interrogée sur la plus-value réellement apportée par les compagnies pétrolières et la justification de leur marge. Celles-ci l ont justifiée par le coût de distribution des carburants aux détaillants, par les frais de personnel du siège ainsi que diverses actions de formation qu elles ont soutenu organiser. Sur ce point, la mission d information a cependant quelques doutes. En Guyane, Total mène certes des formations mais elles sont à la charge du gérant. Chez Rubis-Vito, le gérant est bien formé mais c est à lui, ensuite, de former ses pompistes. De même, l entretien des stations-service (pompes, climatisation, compresseur, cuves ) est le plus souvent mis à la charge du gérant alors même que les matériels appartiennent aux distributeurs et que des prestataires leur sont souvent imposés. Dans un système où les prix sont fixes et les marges identiques, le montant de ces redevances pèse fortement sur la rentabilité des stations-service. Les locataires-gérants qui sont à la merci d un non-renouvellement de leur contrat ne pouvant s opposer efficacement aux compagnies pétrolières, se retournent vers le préfet afin d obtenir une augmentation de la marge de détail. Face à la menace d une fermeture simultanée de toutes les stations du département, celui-ci n a souvent pas d autre choix que de céder. En conséquence, plus les compagnies pétrolières rognent la marge des détaillants, plus celle-ci augmente en valeur absolue afin de préserver, au moins partiellement, la rémunération des

174 43 locataires-gérants. Dans ce système, tant les grossistes que les détaillants peuvent trouver leur compte, et bien plus encore les propriétaires-gérants qui se comportent en «passagers clandestins», mais au détriment, une fois de plus, des consommateurs ultramarins. C est ainsi que la marge de détail a connu une très forte augmentation depuis 2001, beaucoup plus forte que la marge de gros (sauf à la Réunion, voir infra les spécificités de ce département), comme le montre le tableau suivant : (En centimes/litre) Guadeloupe Martinique Guyane La Réunion ,93 7,47 6,2 6, ,23 8,08 8 7, ,38 9,08 9 8, ,88 9,08 9 9, ,58 9, , ,58 9, ,76 Variation 2001/ % + 21% + 61% + 60% Source : Autorité de la concurrence La Martinique se distingue par une hausse très limitée de la marge de détail. Depuis 2003, en effet, les détaillants ont préféré à une hausse de celle-ci obtenir, à l instar de leurs homologues guadeloupéens, l application de l accord interprofessionnel pétrolier (AIP) qui leur garantit, à leur cessation d activité, une prime substantielle d environ euros. Cette prime a finalement été accordée en 2008 et s est traduite par une nouvelle ligne de 0,6854 /hl dans la structure de prix des carburants, payée une fois de plus par le consommateur. En conclusion, la mission d information constate les dysfonctionnements tant du marché des carburants que du système d administration des prix. Le préfet n est pas en mesure de contrôler la plupart des éléments de la structure des prix et pour la seule part qui relève de sa pleine compétence la marge de distribution il est soumis à des pressions telles qu il ne peut s en sortir que par des revalorisations sans fin de la marge de détail. Or, par le biais des relations financières croisées entre détaillants et grossistes, ces derniers captent une partie de la revalorisation ; de même les propriétaires-gérants profitent d une marge unique. Le manque de souplesse d un système opaque et incontrôlable, dominé par des compagnies pétrolières toutes liées entre elles et verrouillant le marché, explique pour une large part le fait que les coûts de distribution soient, outre-mer, deux fois plus élevés qu en métropole.

175 44 III. LES SPÉCIFICITÉS LOCALES ONT AGGRAVÉ LA HAUSSE DES PRIX ET LES DYSFONCTIONNEMENTS DU MARCHÉ DES CARBURANTS Vu de métropole, il est courant de considérer l outre-mer comme un ensemble homogène ; cependant, l homogénéité des structures administratives, identiques par ailleurs à celles de la métropole, ne doit pas masquer l extraordinaire diversité de ces territoires, diversité qu il est nécessaire de prendre en compte pour développer une analyse correcte de la situation de chacun d entre eux. C est pourquoi, à des dysfonctionnements du marché des carburants et du système d administration des prix qui sont communs aux quatre départements d outre-mer, s ajoutent des spécificités locales qui concourent également au prix élevé des carburants et expliquent notamment pourquoi la crise liée à celui-ci a pu connaître une intensité plus forte en Guyane qu ailleurs. A. LA RÉUNION 1. Le cas de la Société réunionnaise de produits pétroliers (SRPP) : une rentabilité très élevée malgré une dégradation en 2008 Installée à La Réunion depuis 1955, la Société réunionnaise de produits pétroliers est une société anonyme détenue à 50 % par Total France et à 50 % par Shell International Petroleum Company. La SRPP exerce cinq types d activité : l importation de carburants et de gaz butane via les sociétés de trading des compagnies pétrolières (dont celles de ses deux actionnaires) ; la réception des carburants et du gaz butane sur ses terminaux depuis deux navires spécialement dédiés : le Tamarin (pétrolier) et le Maïdo (butanier) ; le stockage des carburants et du gaz butane dans ses installations du Port, dont la capacité est de mètres cubes répartis sur trois cuves séparées ; la SRPP dispose ainsi de la quasi-totalité des capacités de stockage de carburant de la Réunion (1) et, à ce titre, est responsable des stocks stratégiques (le niveau de 73 jours est atteint). Cependant, chaque distributeur de carburant et de gaz reste propriétaire des produits qu il a importés ; le remplissage des bouteilles de gaz pour l ensemble des sociétés de distribution (soit environ 1,6 million de bouteilles par an) ; (1) En revanche, ce sont les compagnies pétrolières qui gèrent, via un GIE, le dépôt de carburéacteur de l aéroport de Saint-Denis.

176 45 la distribution de carburants, de gaz et de lubrifiants via son propre réseau de distribution (sous les enseignes Elf et Shell). Fort de cette diversification, le chiffre d affaires de la SRPP a connu une croissance régulière depuis 1999, passant de 150 millions d euros à 262 millions d euros en 2008, comme le montre le graphique suivant chiffres d'affaires Cependant, le cumul de ces activités place la SRPP dans une position singulière. Elle est à la fois le partenaire obligé de l ensemble des distributeurs de carburants de l île puisqu elle dispose d un monopole de fait sur le stockage des carburants et un concurrent de ceux-ci puisqu elle dispose d un réseau de distribution de 52 stations-service (sur 148) exploitées sous les marques Shell et Elf (dont 12 en location-gérance). La position particulière de la SRPP n a pas été sans susciter des soupçons, relayés auprès de la mission d information par divers intervenants, sur les éventuels abus que cette société ferait de son monopole de fait, s assurant ainsi une rente confortable par des droits de passage et de stockage plus élevés que nécessaires au détriment des distributeurs et, in fine, des consommateurs de gaz et de carburants. En outre, la société ayant plusieurs activités, des financements croisés entre le monopole qu est le stockage et la distribution de carburants via des investissements communs sont tout à fait possibles. La SRPP se défend en invoquant le fait que les droits de passage sont validés chaque année par la DRCCRF, laquelle se contente, en pratique, d appliquer auxdits droits l indice INSEE du prix des services... Afin de vérifier la véracité de ces allégations, la mission d information, qui a naturellement auditionné les responsables de la SRPP (son président, M. Ahmed ABZIZI, et son Directeur général, M. Daniel WERNERT), a demandé à se faire communiquer l ensemble de sa comptabilité pour les exercices 1999 à Si les bilans et les comptes de résultats ont bien été transmis, elle n a pu obtenir de la SRPP qu elle lui transmette également sa comptabilité

177 46 analytique, lui interdisant donc de vérifier la ventilation des charges, des produits et du résultat entre les différentes activités. La mission d information a constaté que la rentabilité de la SRPP reste à un niveau très élevé malgré une dégradation continue de celle-ci depuis 2006, comme le montre le graphique suivant. (en millions d'euros) Résultat net résultats d'exploitation Le rapport IGF/IGA/CGIET a été publié en mars 2009, soit avant l arrêté des comptes de l exercice Ses auteurs ne disposaient donc que du résultat de l année ,42 millions d euros qui équivalait effectivement à une rentabilité financière très confortable de 21 %. Cependant, l année 2008 fut moins favorable à la SRPP, qui a enregistré une chute de son bénéfice de moitié à 6,73 millions d euros et de sa rentabilité financière à 11,6 %. Les raisons en sont la comptabilisation de 26 millions d euros d investissement. Cependant, même si elle s est récemment dégradée, la rentabilité financière de la SRPP, appréciée sur longue période, est exceptionnelle, comme le montre le diagramme suivant : (en %) rentabilité financière (résultat net) (capitaux propres)

178 47 Depuis 1999, la SRPP a donc dégagé une rentabilité sur capitaux investis annuelle moyenne d environ 28 %. Enfin, la mission d information s interroge sur le comportement de la SRPP s agissant des nouvelles installations portuaires de la ville du Port. Le chenal ne pouvait en effet accueillir que des navires de moins de tonnes. La SRPP a estimé souhaitable qu à l avenir, il puisse être emprunté par des pétroliers de tonnes. Le chenal a donc été approfondi et de nouveaux quais ont été construits, spécialement dédiés au déchargement du carburant et du gaz, désormais séparés des quais affectés aux navires de commerce. Or, pour être opérationnels, il est nécessaire qu un pipeline les relie aux cuves de la SRPP situées de l autre coté de la ville. Pour des raisons de sécurité et de réduction de l emprise foncière, la CCI qui gère les installations portuaires a demandé que le pipeline soit sous-marin. En revanche, la SRPP lui préfère un tracé terrestre. Personne n ayant fléchi, le pipeline n a pas été construit et les nouveaux quais sont inutilisés. Les conséquences sont cependant limitées, au moins pour la SRPP qui a validé, avec les autres importateurs, l affrètement d un navire, le Tamarin, qui charge tonnes, qu il n est pas prévu de remplacer avant une dizaine d années 2. La marge de gros : l effet de périmètre ne doit pas masquer la confortable rentabilité des distributeurs La mission d information s est donnée comme objectif de faire toute la transparence sur la formation du prix des carburants et du gaz dans les départements d outre-mer. A ce titre, il lui appartient de pointer les dysfonctionnements de ces marchés, les marges excessives de certaines entreprises et les défaillances du mécanisme d administration des prix. Mais faire toute la transparence implique également de s interroger sur certaines rumeurs relatives aux marges excessives que certains acteurs feraient «sur le dos» des consommateurs réunionnais. Ces rumeurs sont d autant plus insistantes qu elles sont parfois étayées par un rapport officiel, comme celui de l Autorité de la concurrence. Celui-ci souligne en effet, sans plus de précision, la singularité de la marge de gros à La Réunion, non seulement la plus élevée en valeur absolue des départements d outre-mer mais également celle qui a connu la plus forte progression depuis 2001, comme le montre le tableau suivant : (En centimes/litre) Guadeloupe Martinique Guyane La Réunion ,18 8,1 5, ,35 8,1 5, ,85 8,1 8, ,85 9,1 8, ,79 5,85 9,1 9, ,07 6,12 9,1 10,1 Variation 2001/ % + 18% + 12% + 98% Source : Autorité de la concurrence

179 48 La Réunion se singularise donc par une marge de gros qui a quasiment doublé depuis 2001 alors qu aux Antilles et en Guyane, elle a connu une évolution beaucoup plus modeste, globalement la même que celle de l indice des prix des services qui est leur indice de référence. La mission d information s est donc rapprochée de la DRCCRF réunionnaise afin de comprendre les raisons d une telle explosion. Il lui a ainsi été confirmé que le brusque ressaut de la marge de gros en 2003 résultait d un changement de périmètre de celle-ci. En effet, à l expiration en novembre 2002 du protocole signé en 1998 entre l État, les grossistes, les détaillants et la SRPP et visant à encadrer l évolution de leurs marges, la DRCCRF a simplifié la structure de prix en intégrant dans la marge de gros des éléments qui, dans le protocole, lui étaient distincts. C est ainsi que la «nouvelle» marge de gros calculée à compter de 2003 intègre désormais les frais financiers, le transport routier et les investissements exceptionnels des compagnies pétrolières. Or, si ces éléments avaient été intégrés dans la marge de gros en 2002, celle-ci se serait élevée non plus à 5,2 ct/l mais à environ 8 ct/l. A partir de ce nouveau chiffre, l évolution de la marge de gros entre 2001 et 2009 s établit à environ 25 %, évolution toujours supérieure à celle des autres départements d outre-mer mais bien moins que les 98 % mis en avant par le rapport. Il n en reste pas moins qu à 10,1 ct/l, la marge de gros actuelle à la Réunion est la plus importante de l ensemble des départements d outre-mer et son rythme de progression le plus rapide. Il n est donc pas étonnant que l Autorité de la concurrence ait découvert que les taux de marge des distributeurs en gros de carburants à la Réunion soient plus élevés qu ailleurs, comme le montre le tableau suivant. Guadeloupe Martinique Guyane Réunion Marge de gros réglementée. 6,07 6,12 9,1 10,1 Taux de marge commerciale... 7 à 11 % 7 à 11 % nc 10 à 15 % Résultat courant/ca 2 à 4 % 2 à 4 % nc 3 à 8 % Résultat net/ca.. 1 à 3 % 1 à 3 % nc 2 à 5 % Source : Autorité de la concurrence Afin de faire toute la lumière sur la rentabilité des distributeurs de carburants à la Réunion, la mission d information s est fait communiquer les comptes de la société Total-Réunion qui, avec 40 % des stations-service, domine largement le marché réunionnais. Total-Réunion a connu, depuis 2002, une très forte et régulière augmentation de son chiffre d affaires (sauf en 2007) qui a quasiment doublé, passant de 95,942 millions d euros à 188,801 millions d euros en six ans, comme le montre le graphique suivant :

180 49 (en millions d'euros) Chiffre d'affaires S agissant plus précisément de la rentabilité de Total-Réunion, l activité de distribution de carburants dans ce département d outre-mer est, certes, rentable, mais moins que certains ont pu le prétendre, comme le montre le graphique suivant : (en millions d'euros) Résultat d'exploitation Résultat net Les brusques variations du résultat net résultent, à la baisse, des dotations exceptionnelles aux amortissements et de provisions (2,354 millions d euros en 2004 et 4,783 millions d euros en 2005) et, à la hausse, par la reprise en résultat de provisions constituées antérieurement (4,04 millions d euros en 2006). La rentabilité financière, qui mesure le rapport entre le résultat net et les capitaux investis c'est-à-dire concrètement la rémunération de l actionnaire, est encore plus pertinente :

181 50 (en %) Rentabilité financière De l analyse des comptes de Total-Réunion, la mission d information conclut que cette société est, certes, rentable, mais que sa rentabilité n a rien d excessive eu égard à la norme de retour sur investissement que les actionnaires exigent couramment pour un groupe coté comme Total, puisque, même en incluant la rentabilité exceptionnelle de 2006 résultant de la reprise de provisions antérieurement constituées, la rentabilité financière s est élevée, en moyenne entre 2002 et 2007, à 15,8 %. En effet, c est en tout cas bien moins que la SRPP qui, depuis dix ans, sauf en 2000, a toujours dégagé une rentabilité sur capitaux investis supérieure à 20 % (et même de près de 30% entre 2002 et 2008). En outre, en raison de la décision du préfet d abaisser le prix de vente du carburant en dessous de son prix de structure et d en faire porter la charge aux compagnies pétrolières, Total-Réunion a été lourdement déficitaire en 2008 (1) puisque ses pertes atteignent 3,948 millions d euros contre un bénéfice de 2,754 millions d euros en 2007 et de 7,357 millions d euros en 2006, soit une rentabilité financière négative de plus de 30 %. En d autres termes, si le groupe Total a dégagé en 2008 un bénéfice net (part du groupe) de 10,59 milliards d euros, la contribution de Total-Réunion à celui-ci fut négative. B. LES DÉPARTEMENTS FRANÇAIS D AMÉRIQUE 1. L épineuse question des stocks stratégiques Dès la fin de la première guerre mondiale, le caractère stratégique des produits pétroliers a conduit les autorités françaises à imposer aux opérateurs (principalement les compagnies pétrolières) la détention de stocks de réserves pour parer, outre les besoins des armées, aux conséquences d une pénurie d une source d énergie polyvalente indispensable à l économie. S agissant d une réglementation nationale, elle s applique naturellement, après adaptation, aux départements d outre-mer. (1) Les compensations de l Etat n ont été versées qu en 2009 et seront donc imputables sur l exercice afférent.

182 51 a) La réglementation Décidée unilatéralement au niveau national dès 1925, la réglementation relative aux stocks stratégiques est désormais mise en application dans un cadre international, depuis 1968 au sein de la CEE et depuis 1974 pour les pays membres de l Agence internationale de l énergie (AIE) (1). L importance des produits pétroliers, leur impact en matière de sécurité publique et d indépendance nationale, a conduit le législateur en 1992, dans le cadre de la refonte du régime pétrolier, à intégrer les engagements précités pour édicter de nouvelles règles en matière de stocks (loi n du 31 décembre 1992 portant réforme du régime pétrolier). Les stocks stratégiques concernent le fioul, le gazole, le supercarburant et le carburéacteur. Les stocks intermédiaires de pétrole avant raffinage peuvent être décomptés pour atteindre les volumes fixés. Le régime national prévoit deux types d obligations, l une pour les stocks stratégiques situés en France métropolitaine, l autre applicable à la France d outre-mer et aux collectivités territoriales. Les obligations nationales de la France au regard de la réglementation européenne sont globalement atteintes, par mutualisation des stocks sur l ensemble du territoire français (métropole et DOM). s agissant de la métropole, l obligation de chaque opérateur agréé (distributeur acquittant les droits de douanes) est de détenir 27 % du volume mis à la consommation l année civile précédente. Cette obligation est réalisée pour partie (56 % ou 90 %, au choix de l opérateur) par le Comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers (CPSSP), moyennant le paiement d une redevance, le solde étant garanti avec des stocks en propriété ou mis à disposition par l opérateur. Le CPSSP fait réaliser en partie ses stocks par la Société anonyme de gestion des stocks de sécurité (SAGESS), le solde de ses quotas étant réalisés par des mises à disposition de capacités de stockage par les opérateurs ; - s agissant des départements d outre-mer, pour tenir compte des infrastructures limitées, l obligation a été réduite à 20 % (soit 73 jours) des mises à la consommation réalisées sur le territoire dans les douze derniers mois. La répartition est différente de celle de la métropole, en effet les obligations sont assurées pour moitié par les opérateurs, par le CPSSP pour l autre moitié. Pour des raisons obscures et difficilement explicables, la SAGESS est étonnamment absente des DOM. De ce fait, pour couvrir ses obligations, le CPSSP a donc recours exclusivement aux contrats de mise à disposition des volumes disponibles dans les cuves des entreprises de stockage, moyennant une contribution financière, acquittée par le CPSSP. (1) Il convient d ailleurs de noter qu une nouvelle directive européenne devrait sensiblement élever les volumes des stocks stratégiques, ces dispositions devant entrer en vigueur avant le 31 décembre 2012.

183 52 Les dispositions particulières concernant les DOM sont définies dans l arrêté du 13 décembre 1993 qui complètent celles prévues par le décret n du 29 janvier 1993, désormais codifiées dans le code de la défense. Les opérateurs (CPSSP et compagnies pétrolières) sont tenus de déclarer mensuellement la situation de leurs stocks et les mises à la consommation réalisées. Ces déclarations sont adressées aux directeurs régionaux de l industrie et de la recherche. Des sanctions sont prévues en cas de manquement au respect des obligations. Il appartient au préfet de saisir la direction centrale ayant en charge les questions énergétiques (direction de l énergie du MEDDAD). La sanction est arrêtée par le ministre chargé des hydrocarbures. b) La situation des stocks stratégiques dans les départements d outremer Il ressort des dispositions susmentionnées que les stocks stratégiques dans les départements d outre-mer devraient s élever à 20 % de la mise à la consommation, soit 73 jours de stocks. La situation en 2008 au regard de cette obligation est assez contrastée selon les départements. En application de l article 13 de l arrêté du 13 décembre 1993 précité, l obligation de stockage doit être exécutée sur le territoire du département d outremer où a lieu la mise à la consommation ou la livraison de l avitaillement des aéronefs. Toutefois, pour le respect des obligations par les opérateurs pétroliers d outre-mer, et pour la part qui leur incombe directement, les départements de la Guadeloupe et de la Martinique sont considérés comme un même territoire. Si les obligations peuvent être considérées comme globalement respectées à la Réunion, il n en va pas de même dans les trois départements français d Amérique. Que ce soit pour la zone «Antilles» (Guadeloupe et Martinique) comme pour la Guyane, le niveau des stocks stratégiques reste, dans le meilleur des cas, inférieur à 50 jours de consommation, niveau se situant environ d un tiers en dessous des obligations devant être respectées par les opérateurs. Bien que la réglementation prévoit des sanctions en cas de non respect des obligations, il est étrange qu à ce jour aucune procédure de ce genre n ait jamais été engagée contre les opérateurs! Selon les informations recueillies, cette absence de réaction des pouvoirs publics trouverait son explication dans la responsabilité partagée des compagnies pétrolières et du CPSSP dans la mise en œuvre des obligations. En effet, la SAGESS n intervenant pas pour le compte du CPSSP dans les DOM, celui-ci a recours aux capacités de stockage de la SARA, pour le compte des compagnies pétrolières. L État considère donc, que les compagnies pétrolières remplissent leurs obligations et que le manquement est, par voie de conséquence, imputable au seul CPSSP, considéré comme un organisme chargé d une mission d intérêt public, alors que la réglementation prévoit une répartition moitié - moitié des obligations. Il apparaît pour le moins

184 53 indispensable qu en respect de ses obligations contractuelles, la SAGESS soit présente dans les DFA au même titre que sa présence en métropole. 2. La Martinique, le cas de la SARA Comme dans l ensemble des départements d outre-mer et sans doute plus que dans les autres DOM, le pétrole et les carburants tiennent en Martinique une place importante dans la vie des martiniquais et dans la vie économique du département. Entre la Martinique et la Société Anonyme de la Raffinerie des Antilles (SARA), il s agit d une déjà longue histoire, dans laquelle les acteurs, étroitement liés, constituent une sorte de vieux couple. Ils ont, certes, du mal à vivre ensemble mais toute forme de séparation aurait des conséquences fâcheuses pour chacun d eux. a) La SARA : une société héritière de son histoire liée à l indépendance énergétique nationale L implantation d une activité de raffinage aux Antilles a été décidée il y a maintenant quarante années, dans un contexte géostratégique et géopolitique fondamentalement différent de celui que connaît le monde aujourd hui. C est effectivement dans un contexte international de guerre froide, en 1969, que, sous l impulsion du général de Gaulle, soucieux d assurer les conditions d une indépendance énergétique des Antilles françaises, la SARA a été créée. Le général de Gaulle souhaitait notamment renforcer la présence nationale par l implantation sur le sol Antillais de compagnies pétrolières françaises (ELF et Total). L approvisionnement des Antilles françaises et de la Guyane dépendait en effet de sociétés étrangères (Esso, Shell et Texaco). La création de la Société Anonyme de la raffinerie des Antilles répondait donc à une double motivation, à la fois politique et stratégique. Pour assurer et permettre la présence des groupes pétroliers français aux Antilles, il convenait de constituer une structure industrielle originale dans laquelle les deux compagnies françaises participeraient au capital, sans pour autant léser les intérêts des sociétés étrangères qui avaient, jusqu alors approvisionné le marché local. Cette particularité originelle explique, aujourd hui encore, la répartition du capital de la SARA. A ce jour, le capital de la SARA est réparti entre quatre actionnaires : Total 50 % ; Rubis 24 % ; Exxon-Mobil 14,50 % et Chevron-Texaco 11,50 % (Total s étant substitué à Elf lors de la fusion des deux sociétés et Shell qui souhaitait se retirer ayant cédé ses parts à Rubis). Le choix de la Martinique répondait également à la volonté de mettre en place un outil important en faveur du développement économique local, que ce soit lors de la phase de construction de la raffinerie et de l unité de stockage sur le site du Lamentin, comme après sa mise en route, en raison des nombreux emplois directs et indirects, notamment qualifiés, indispensables à son

185 54 fonctionnement. Il convenait, en effet, que cet outil offre à la population martiniquaise des débouchés en matière d emploi, tout en favorisant la croissance économique d un département à la recherche d industries. Rien d étonnant donc, dans ces conditions que lors des événements de l automne et de l hiver derniers, la SARA, élément central de la chaîne pétrolière dans les départements français d Amérique, ait constitué un abcès de fixation du mécontentement des populations ultramarines et la cible des critiques face à la flambée des prix des carburants. Force est de reconnaître que la complexité de l organisation de la chaîne des produits pétroliers (structure intégrée en interaction et complexifiée par la présence au capital de trois grandes compagnies et d un distributeur) et l opacité qui entoure le mode de fixation des prix des carburants aient concouru à désigner la SARA, pièce centrale du dispositif ayant pour actionnaires les compagnies pétrolières à la fois fournisseurs et clients, comme le bouc émissaire, responsable à elle seule des hausses considérables subies. Ce phénomène se trouve alimenté par le fait que la SARA a dégagé, en moyenne depuis 2000 un résultat net moyen de 13,2 millions d euros et selon les chiffres qui ont été communiqués à la Mission, une rentabilité de 7 % sur la même période. Les résultats nets de l entreprise sur la période 2000 à 2008 sont retracés dans le tableau suivant : 55,0 50,0 50,8 45,0 40,0 35,0 30,0 25,0 20,0 15,0 10,0 5,0 9,0 25,4 21,2 17,3 5,2 14,4 13,2 0,0-5,0-10, Moyenne -1,1 10 ans -15,0-20,0-25,0-30,0-23,6 Selon le groupe Total, «L évolution du chiffre d affaires de la SARA n a qu une signification limitée. En effet, la valeur ajoutée est faible et l évolution du chiffre d affaires est directement liée à l évolution du cours du pétrole. En 2005 et 2006, le résultat net s est élevé à environ 10 millions d euros, à 54 millions en 2007 et le résultat 2008 fait apparaître une perte d environ 1 million d euros». Toutefois, une analyse des résultats de l entreprise permet de mesurer, eu égard

186 55 aux variations importantes, l inadaptation de la formule de fixation des prix qui répercute, avec un décalage important, les évolutions, à la hausse, comme à la baisse, des cours du pétrole, y compris dans la comptabilité de la SARA. La rentabilité se situe aux alentours d une moyenne annuelle de 7 %, chiffre non négligeable, bien qu inférieur semble-t-il à celui enregistré dans ce secteur d activité. Le retour sur investissement au profit des actionnaires a atteint, en 2007 le taux exceptionnel de 21 %, alors que, dans un même temps, les populations antillaise et guyanaise voyaient l emploi se dégrader et leur pouvoir d achat stagner, voire baisser du fait notamment de l augmentation des prix des carburants. 25% 21% 20% 15% 17% 15% 13% 10% 5% 0% -5% 6% 2% Moyenne 10 ans 6% 0% 7,0% -10% -15% -13% Il convient ici de noter que plusieurs personnes auditionnées ont indiqué que cette rentabilité moyenne était inférieure à la rentabilité fixée tacitement avec les pouvoirs publics à 12 %. Or, ces propos n ont pas été démentis, mais il n a pas été possible à la mission d information de déterminer par qui et quand cet accord tacite avait été conclu! Il est vraisemblable que cette décision politique ait été motivée par la volonté de ne pas léser les compagnies étrangères et d attirer les compagnies nationales lors de la création de la SARA. Compte tenu de la gravité des événements qui ont affecté les départements d outre-mer, la mission d information s interroge sur la pertinence actuelle d un tel accord tacite et sur sa pérennisation, qui paraît peu compatible avec les règles du marché. Dans un contexte économique et social tendu, l application de cet accord concourt inévitablement à entretenir, voire renforcer, le sentiment de «profitation» qui entoure le prix des carburants dans les trois départements approvisionnés par la SARA.

187 56 b) La SARA un acteur économique, social et sociétal de la vie non seulement Martiniquaise mais des trois départements français d Amérique Par l implantation de son activité principale en Martinique, la SARA est avant tout impliquée dans la vie quotidienne des Martiniquais. Toutefois, étant également présente en Guadeloupe et en Guyane, elle constitue un acteur important, voire majeur, de la vie locale dans la zone Antilles - Guyane. La SARA a un effectif de 270 employés sur les trois départements : une quarantaine de collaborateurs sur les sites de Guadeloupe et de Guyane, l ensemble des autres salariés est affecté en Martinique. Il convient de noter que cette présence sur les trois départements permet aux salariés d avoir une mobilité géographique interne, sans pour autant trop s éloigner de leur département d origine, particularité d autant plus importante que l entreprise recrute et forme principalement ses salariés localement. Au 28 février 2009, les effectifs de la SARA se répartissaient de la façon suivante : Ingénieurs et cadres 43 Contremaîtres et experts 32 Techniciens supérieurs 61 Techniciens 77 Ouvriers, employés et agents techniques 57 Outre ces emplois directs, l entreprise génère par les multiples sociétés dont elle induit l activité près de 330 emplois indirects, car la SARA effectue 50 % de ses achats auprès de prestataires locaux et de fournisseurs ayant une forte implantation locale. C est ainsi qu en 2008, elle comptait 330 fournisseurs en Martinique, pour un montant d achats d environ 12,2 millions d euros ; 130 fournisseurs en Guadeloupe, pour des achats se montant globalement à 3,5 millions d euros ; 100 fournisseurs en Guyane, pour un montant de 1,6 million d euros. La SARA a recours aux entreprises locales dans une large gamme d activités : gardiennage, transitaire, entretien de locaux et d espaces verts, hôtellerie, intérim, nettoyage industriel, mécanique, électricité, port autonome, produits chimiques Par sa présence elle assure également une contribution importante aux ressources des collectivités locales. Pour l ensemble de l année 2008, elle a acquitté prés de 9,260 millions d euros d impôts locaux, de taxes et de redevances : 3,53 millions de taxes professionnels ; 2,44 millions de taxes foncières ; 1,30 million de droit de port ; 0,49 million de redevances, 1,50 million de cotisations à l Organic.

188 57 Par ailleurs le montant de ses investissements (non liés directement à la production) dans les trois départements français d Amérique au cours des dix dernières années s est élevé à total de près de 168,6 millions d euros. (En millions d euros) ,5 6,9 15,6 8,3 4,1 12,6 30, ,3 15,1 Enfin, la SARA a un fort engagement sociétal dans la vie quotidienne des populations guadeloupéenne, guyanaise et martiniquaise. Elle s implique notamment dans le mécénat, le parrainage sportif et culturel, notamment dans le secteur de l éducation et de l emploi par l accueil de stagiaires, de visites scolaires et l attribution de bourses et de prix d excellence en faveur des élèves méritants. c) La SARA, importateur, raffineur, stockeur et, temporairement collecteur d huiles usagées Bien que l essentiel de son activité soit exercée sur le territoire de la Martinique, la SARA constitue le point de passage des approvisionnements en hydrocarbures de l ensemble de la zone Antilles-Guyane. A tour de rôle, chacun des ses quatre actionnaires achète, pour le compte de la société, du brut que la SARA raffine. Elle revend ensuite aux distributeurs de gros les produits finis en fonction de leurs parts de marché, à l exception du fuel lourd, résidu du raffinage. S agissant de ce marché particulier, Esso (enseigne de EXXON MOBIL) est le partenaire du contrat passé avec EDF seul utilisateur du fuel lourd dans ses centrales thermiques. Bien qu une parte des approvisionnements, environ le tiers soit assuré par Vitol, courtier helvetico-néerlandais en pétrole basé à Rotterdam, le paiement est effectué intégralement au profit d Esso. Le prix de ce produit est calculé par référence aux cotations du fuel sur le marché de New York et comprend, outre le prix du fioul, le premium correspondant à la marge de la SARA augmentée de la redevance pour usage de l oléoduc reliant la SARA à EDF et de la marge de Esso. Bien qu EDF procède par appel d offres, il est difficile d imaginer que d autres distributeurs puissent y répondre, compte tenu des spécificités locales du marché des carburants. L exercice de l activité de raffinage est directement lié aux mouvements tant des matières premières que des produits raffinés. Ainsi, toute raffinerie doit s alimenter en pétrole brut, l entreposer avant raffinage, le transformer et stocker les produits après raffinage. Compte tenu de son lieu d implantation, l approvisionnement en pétrole brut de la SARA s effectue exclusivement par voie maritime, le pétrole brut étant acheminé par un oléoduc de l appontement du navire de la Pointe-des-carrières vers la raffinerie. Les approvisionnements en brut de la SARA La SARA est avant tout une raffinerie dont la matière première de base est du pétrole brut. Cette matière première existe dans presque toutes les régions du

189 58 monde. Parmi les grandes régions productrices, on peut citer : le Golfe persique, l Afrique de l Ouest, la Mer du Nord, le Venezuela et le Mexique, la Russie et les États-Unis. Chacun des bruts de ces régions présente des spécificités physiques et chimiques différentes, d où un comportement différents lors de leur transformation et l obtention de produits raffinés aux caractéristiques différentes, dans quantités différentes, à des coûts différents. On distingue généralement deux grandes familles de brut : les bruts légers présentant des rendements inférieurs à 35 % de fuel lourds et dont la teneur en soufre est faible et les bruts lourds qui sont généralement plus soufrés. Le degré de complexité de la raffinerie permet alors de traiter des bruts de l une ou l autre famille en fonction des contraintes environnementales et des spécifications formulées par le marché. La SARA est une raffinerie simple et son marché est réglementé par les normes européennes, ce qui ne lui permet pas d envisager de traiter des bruts trop lourds, d où la nécessité de s approvisionner en bruts légers. Ceci a pour effet d écarter, par voie de conséquence, toute fourniture en provenance du Golfe persique, du Venezuela et de Russie, car celles-ci présentent des teneurs en soufre incompatibles avec la taille et le mode de raffinage. Si certains bruts produits aux États-Unis et au Mexique répondent aux spécifications exigées par l unité de raffinage, force est de constater qu ils ne sont pas proposés car les compagnies pétrolières les réservent aux raffineries américaines. Par ailleurs, la SARA est confrontée, en raison de ses capacités de stockage du brut, à des contraintes de volume. En effet, pour ces raisons logistiques, elle ne peut qu accepter des livraisons ne dépassant par barils ( tonnes). Or, les cargaisons en provenance de l Afrique de l Ouest s effectuent sur des bâtiments embarquant au minimum barils. Le surcoût potentiel lié au fait de sous charger un navire empêche d envisager ce type d approvisionnement. Tout achat de pétrole brut doit également de tenir compte du paramètre économique. Chacun des bruts s achète, en effet, sur le marché de référence auquel il est rattaché : brut DURBAN pour le Golfe persique, brut WTI (West Texas Intermediates) pour les États-Unis et le Venezuela, brut Brent pour l Europe et la Russie. Bien qu évoluant «indépendamment», ces marchés de référence sont sensibles aux mouvements et aux perturbations des autres marchés. Historiquement, le marché WTI est supérieur au marché Brent, l écart représentant les coûts occasionnés par la traversée de l Atlantique. En raison de ces différents paramètres et contraintes, la SARA est limitée dans ses approvisionnements. Elle ne peut alimenter sa raffinerie qu avec des bruts en provenance de la Mer du Nord ou en «Santa Barbara» mexicain, avec les réserves évoquées précédemment sur la disponibilité de ce brut léger.

190 59 Enfin, bien que dans l absolu, le brut en provenance du Venezuela soit moins cher que le pétrole en provenance de d Europe, si l on raisonne en terme de qualités équivalentes, les coûts sont quasiment semblables, le vendeur de pétrole ajustant son prix en conséquence. La production de la SARA doit être complétée par des importations de produits finis Outre le processus classique de production et de séparation de la matière première en divers hydrocarbures, par application du principe de la distillation atmosphérique, l obtention de produits finis suppose d autres étapes permettant, ensuite, la transformation des résultats de la distillation (élimination du soufre et des autres polluants). La production de la raffinerie comprend la quasi-totalité des produits de la distillation du pétrole : des gaz à usage domestique : butane et propane (gazinière et éclairage) réclamant des conditions particulières de stockage ; des carburants routiers (essence sans plomb et gazole) particulièrement volatils ; du carburant destiné aux avions (kérosène) ; du fioul servant de combustible pour la production d électricité et à celle de petites industries, ainsi que pour les moteurs des gros navires ; Tous produits confondus, la production annuelle de la SARA s élève à environ tonnes de produits finis, dont tonnes d essence et tonnes de diesel, soit tonnes de carburants routiers (74,5 %). Il convient de noter que la SARA, comme les autres raffineries, a dû s adapter à l évolution du marché et tenir compte de la «diésélisation» du parc automobile, tendance également enregistrée aux Antilles et en Guyane. Cette adaptation permanente au marché n est pas la seule à laquelle doit faire face la raffinerie. En effet, elle a dû modifier son appareil de production pour anticiper la future application de normes européennes afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre, contribuant ainsi aux engagements forts de la France en faveur de la protection de l environnement et renforçant la sensibilisation des États de la zone à la problématique environnementale. C est ainsi que la société a investi plus de 50 millions d euros entre 2005 et 2007 pour procéder à l adaptation de l unité de raffinage aux futures normes (soit près du quart de ses investissements au cours des dix dernières années).

191 60 INVESTISSEMENTS RÉALISÉS DE 1999 À 2008 en M (MQUE - GPE - GUY) Total général 10 ans Liquidations Un simple rapprochement entre les capacités de production de la SARA et les volumes de carburants consommés dans les départements français d Amérique fait apparaître que les capacités de la raffinerie, du fait d un dimensionnement défini pour un marché plus étroit, ne permettent pas de satisfaire les besoins du marché. De ce fait, la SARA importe des produits raffinés, pratique au demeurant normale pour une entreprise devant approvisionner sans rupture un marché, mais donnant lieu à controverses. En effet, au cours des déplacements de la mission d information dans les DFA, la question de l importation de carburants par la SARA a souvent été abordée, notamment par les associations de consommateurs, comme étant l une des causes essentielle de sa «profitation». Cette interprétation largement partagée par l ensemble des populations des Antilles et de la Guyane semble due, d une part, au défaut de communication des pouvoirs publics et, d autre part, à l absence de transparence couvrant les importations de la SARA. Les quelques initiés qui, au sein de l administration, ont accès aux formules mathématiques complexes qui permettent de calculer le prix des carburants ne pouvaient ignorer que les volumes importés sont pris en compte dans la fixation des prix. Ces volumes sont, en effet, inclus dans la détermination d un coefficient intervenant dans la fixation du prix des carburants, permettant ainsi d établir une pondération entre les volumes de produits raffinés par la SARA, donc au coût SARA, et les volumes de produits finis achetés par la SARA. Il paraît difficilement compréhensible que face à l importance que prenaient ces rumeurs de «profitation», rien ou peu de choses aient été faites en matières d information du public de manière à instaurer un minimum de transparence et à lever les ambiguïtés qui prospéraient. Force est également de reconnaître que, pour sa part, l entreprise n a guère brillé en matière communication sur sa politique d importation, entretenant ainsi les rumeurs et la vindicte populaire. Il est vrai que les explications permettant de relier les volumes de produits importés avec les fluctuations des cours en fonction des approvisionnements ne constituaient sans

192 61 doute pas la priorité d une société de raffinage dont l objectif principal consistait avant tout à faire en sorte que les territoires et les marchés à desservir ne connaissent pas de ruptures, tout en étant confrontée à la recherche des capacités de stockage supplémentaires nécessaires. La mission d information espère, toutefois, apporter à travers les éléments ci-après, un minimum de transparence, grâce paradoxalement aux informations recueillies, sans difficultés particulières, auprès de la SARA. Globalement, la part des importations de carburants routiers représentait, en 2008, 29,3 % des volumes de carburants transitant par la SARA. Les schémas, ci après, détaillent les volumes d importations de carburants par rapport au marché de l ensemble des départements français d Amérique. IMPORTATIONS ESSENCE % 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% marché ESS Bases ESS % import 0 0% S agissant des importations d essence, années 2005 et 2006 mises à part, on constate une baisse continue des quantités importées. Cette tendance s explique d une part, par la baisse du marché global en raison de la «diésélisation» du parc automobile, et, d autre part, par le résultat des investissements réalisés par l entreprise afin d accroître sa production. Afin de garantir un approvisionnement permanent, y compris pendant les périodes d arrêt annuel pour effectuer la maintenance de l outil industriel, la SARA est contrainte d importer entre 5 % et 10 % de l essence nécessaire à alimenter annuellement le marché des départements français d Amérique. Les importations d essence des années 2005 et 2006 correspondent pratiquement à la consommation de carburants. A cette période, la SARA a dû suspendre en partie ses activités de façon à apporter de profondes modifications technologiques à ses installations pour les rendre compatibles avec la production d essence correspondant aux spécifications édictées par les normes européennes.

193 62 Elle a dû s approvisionner en produits raffinés sur le marché européen et, compte tenu des quantités importantes des cargaisons disponibles, les stocker temporairement à Sainte Lucie, de façon à ne pas créer de rupture dans l approvisionnement en carburant des DFA. Cette délocalisation des stocks a alimenté involontairement la suspicion sur ses activités. Dés lors qu elle a eu recours à des unités de stockage situées en dehors des Antilles françaises, la SARA a été suspectée de tenter par la suite d accroître ses bénéfices en réalisant des profits indus par la vente de produits supportant un surcoût de fabrication alors qu il s agissait de produits déjà raffinés. IMPORTATIONS GAZOLE % 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% marché GO Bases GO % import 0 0% Le début des importations de gazole, en 2001, correspond au durcissement des spécifications en teneur en souffre de la réglementation et à l augmentation constante et rapide de la demande. Il convient de noter que la demande a doublé au cours des dix dernières années, notamment en raison de l extension imposée à la SARA de son marché à la Guyane. La forte augmentation des importations en 2007 est liée à un arrêt de la production pour des opérations de maintenance et au cyclone Dean qui a perturbé la marche de l usine. En 2008, les importations de gazole n ont que peu diminué par rapport à 2007 en raison d un arrêt de maintenance d environ deux mois. Contrairement à une idée largement répandue, les produits importés par la SARA ne permettent pas à la société de réaliser des bénéfices supplémentaires en étant commercialisés au même prix que les produits raffinés en Martinique. Il convient de rappeler que leurs volumes sont intégrés, sous la forme d un coefficient, révisé annuellement, dans le mode de calcul des prix par l administration. Sans doute serait-il nécessaire de réviser plus fréquemment la valeur de ce coefficient pour mieux tenir compte des volumes.

194 63 Enfin, la SARA n exporte qu exceptionnellement ses produits raffinés. Deux produits sont occasionnellement concernés : le fioul lourd et l essence légère (produits intermédiaires de la distillation, hors spécifications européennes), pour cause de surproduction ponctuelle. Au cours des six premiers mois de l année 2009, aucun fioul lourd n a été exporté et tonnes d essence ont été exportées vers les États-Unis, pour une valeur d environ dollars. Le stockage et la livraison des produits raffinés C est bien évidemment la SARA, qui entrepose dans ses cuves les différents carburants qu elle produit ou qu elle importe, que ce soit en Martinique, comme en Guadeloupe ou en Guyane. Ses capacités de stockage des produits finis, dans chaque département, figurent dans le tableau ci-dessous : Martinique Guadeloupe Guyane Total m m m m 3 Source : SARA De fait, le stockage est effectué pour le compte de chacun des actionnaires-grossistes qui, pour les carburants routiers, disposent de leurs propres flottes de camions citernes, ou en confient le transport à des sociétés privées, qui s approvisionnent directement à la SARA. Elle exploite également un réseau d oléoducs pour le transport d hydrocarbures liquides et gazeux, notamment pour le kérosène entre les dépôts et les aéroports. Enfin, la SARA réalise aussi des expéditions par voie maritime en direction de ses dépôts de Jarry en Guadeloupe, de Kourou et de Degrad-des-Cannes en Guyane, les bâtiments étant affrétés par les distributeurs grossistes. Si le rapport IGF/IGA/CGIET préconise assez clairement la filialisation de l activité stockage de la SARA, l Autorité de la concurrence ne se prononce pas aussi nettement pour cette solution. Toutefois, elle souligne que «puisque la SARA bénéficie de fait d un monopole d importation et que les grossistes ne peuvent bénéficier des facilités de stockage moyennant le paiement d un tarif de passage ; ils doivent acheter à la SARA. Or, il n y a aucune raison que l utilisation des cuves de stockage soit réservée aux actionnaires de la SARA». Elle indique même «afin de prévenir des contentieux futurs et de préparer une reconversion probable de la raffinerie des Antilles, l Autorité propose de revoir les statuts de la société de manière à assurer l accessibilité totale et non discriminatoire de ces installations aux opérateurs tiers». Il convient également de souligner que les obligations en matière de stocks stratégiques dans les DFA ne sont que partiellement remplies, notamment par l absence sur ces territoires de la SAGESS, société agissant pour le compte du CPSSP en métropole et dans le cadre d une mission d intérêt public. Dans ces conditions, il paraîtrait intéressant d envisager la création d une société spécialisée dans le stockage au capital de laquelle participerait

195 64 outre la SARA, l État et les collectivités territoriales qui le souhaiteraient, la SAGESS ainsi que les opérateurs tiers. Le traitement des huiles usagées Les huiles usagées, huiles noires (huiles de moteurs et certaines huiles industrielles) et huiles claires (transformateurs, circuits hydrauliques et turbines) sont considérées comme des produits polluants et, qu elles soient d origine minérales ou synthétiques, leur collecte et leur traitement sont réglementés sur l ensemble du territoire national. La collecte doit être assurée par un ramasseur, disposant de matériel adapté, agréé par la préfecture. C est également le cas des centres d élimination, qui recourent principalement à l incinération dans des unités spécialisées. Cette activité est par conséquent très éloignée des activités de raffinage, cœur de métier de la SARA. Pourtant, suite au renforcement de la réglementation nationale relative à l élimination des déchets non ménagers au débuts des années 1990, notamment l établissement de plans d élimination des déchets (décret du 3 février 1993 relatif aux plans d éliminations de déchets autres que les déchets ménagers et assimilés), les pouvoirs publics se sont tournés vers la SARA pour qu elle prenne en charge temporairement l activité d élimination des huiles usagées, en l absence de filière existante dans les départements français d Amérique. Toutefois cette dernière ne disposant pas des compétences requises l a confiée par voie d appel d offres à des prestataires agréés, parfois dans des conditions avantageuses pour la SARA. De façon à assurer une contrepartie financière à cette charge nouvelle, les préfets ont intégré un nouveau paramètre invariable dans la structure de prix. Cette ligne «récupération et expédition des huiles usées» est intégrée dans le passage en dépôt et s élève à 0,1 centime par litre, montant inférieur a-t-il été précisé au coût réel de la récupération et au traitement de ces huiles. Le reproche a été fait à la SARA d avoir perçu un excédent de recettes (le produit de la «taxe collecte et traitement» se révélant dans un premier temps supérieur au coût réel de l activité considérée). Les responsables de la SARA, interrogés sur cette question, ont déclaré à la mission d information qu effectivement, bien que la prestation soit depuis plusieurs années déficitaire, la société disposait encore d une réserve de trésorerie, globalement en diminution. Elle s engageait d ailleurs à la restituer, dés lors qu elle serait déchargée de la mission de collecte et de traitement.

196 65 ÉVOLUTION DE L ACTIVITÉ COLLECTE ET TRAITEMENT DES HUILES USAGÉES Martinique Guadeloupe Guyane Recettes (1) Volumes (2) Charge de l activité (3) Résultats Résultats cumulés (4) Source : SARA (1) : recettes perçues : 0,1 centime par litre de carburant en milliers euros ; (2) : volumes collectés et traités en tonnes ; (3) : coûts de la collecte, y compris coûts supportés par la SARA en milliers d euros ; (4) : montants cumulés des résultats présentant un excédent qui varie en fonction des résultats annuels en millier d euros. Le tableau ci-dessus fait apparaître une diminution progressive de l excédent perçu par la SARA (résultat cumulé) imputable aux résultats déficitaires de cette activité et à la diésélisation du parc automobile. Enfin, les agences départementales de l Agence de l Environnement et de la Maîtrise de l ÉNERGIE (ADEME) devraient reprendre, dès le 1 er janvier 2010, la gestion directe de l activité «huiles usagées» avec un financement qui lui sera propre. Actuellement, la SARA est en discussion avec l administration afin de définir les modalités de restitution de l excédent 3. La Guadeloupe Dans ce département, les mouvements initiaux de protestations contre le prix des carburants ont très vite muté en revendications contre la vie chère et la «profitation», déchaînant des manifestations atteignant parfois une rare violence. Lors de l audition d une délégation de représentants du LKP conduite par M. Elie DOMOTA, il est clairement apparu que la question du prix des carburants, bien que n étant pas le seul motif de mécontentement de la population guadeloupéenne, n en constituait pas moins un point central des revendications. Selon une étude de l Insee en 2006, les dépenses afférentes à l automobile dans le budget des familles en Guadeloupe atteignent 19 %, contre 13,3 % en métropole. La SARA, partie émergée de l iceberg que constitue la chaîne du pétrole dans les départements français d Amérique, a concentré l essentiel des critiques, notamment pour l opacité qui entoure ses activités, que ce soient ses comptes, ses relations avec l administration, sa gestion des huiles usagées où encore ses importations, comme ses relations complexes et obscures avec ses fournisseurs clients - actionnaires. Autre reproche adressé à la SARA, mais en porte-t-elle la responsabilité? (il est fait application d une réglementation européenne transposée dans le code des douanes), le phénomène de dilatation qui causerait, selon les interlocuteurs de la mission d information un préjudice conséquent aux finances des collectivités locales

197 66 a) Un réseau de stations-service important et structuré Des gérants de stations-service très organisés Les gérants de stations services de Guadeloupe se sont regroupés au sein d une organisation (OPGSS) afin de défendre les intérêts de la profession, tant auprès des pouvoirs publics que des distributeurs grossistes. Cette organisation a d ailleurs été particulièrement active lors des mouvements sociaux, elle était partie prenante à la réunion du 1 er octobre 2008 qui s est tenue à la préfecture, au cours de laquelle il a été notamment convenu de la création d un groupe de travail chargé : - d analyser les conditions de création des stations services ; - de préparer un schéma prospectif régional d implantation des stations services avant la fin de l année 2008 ; - d instaurer, dans l intervalle, un moratoire sur la création de nouvelles stations services, la suspension des travaux en cours et la suspension de l installation de cuves privées pour les véhicules roulants. Par la suite, après quinze jours de fermeture du réseau de stationsservice, elle obtenait du secrétaire d État chargé de l outre-mer, en contrepartie de la reprise de la distribution du carburant, la signature, le 3 février 2009, d un protocole par lequel l État s engageait à : assurer un moratoire de trois ans sur la construction de nouvelles stations services au-delà de 118 stations ; présenter un texte législatif soumettant à autorisation toute ouverture de station sur le mode de la commission départementale d aménagement commercial ; préserver un système administré de prix du carburant ; sous trois mois, procéder à un état des lieux des cuves privées existantes, en établir la carte, et vérifier leur conformité aux normes environnementales. Devra en outre être établie la liste des professions autorisées à installer des cuves nouvelles, cette liste devant s appuyer sur celles des professions bénéficiant de carburant détaxé. La mission d information ne peut qu être perplexe sur la portée d un tel protocole dont les termes semblent pour le moins en contradiction avec les principes consacrés dans le préambule de la constitution. Des employés bénéficiant d une convention collective avantageuse Depuis 1996, les salariés des stations services bénéficient des dispositions de la convention collective signée le 19 décembre 1996 entre le Syndicat des gérants de stations services (prédécesseur de l OPGSS) et l Union des travailleurs

198 67 des produits pétroliers (UTPP-UGTG), complétée par l accord collectif sur les salaires, la durée du travail, l emploi et la formation des stations services de Guadeloupe du 4 décembre Cette convention collective assure aux personnels salariés des stations services un statut attrayant, s agissant notamment des jours fériés chômés par an, sans réduction de salaire, des jours de congés supplémentaires en fonction de l ancienneté, pour événements familiaux et d une couverture sociale complémentaire avec l instauration d une mutuelle prévoyance dont le financement est pris en charge à hauteur de 60 % par les entreprises. b) L engagement de l État par la signature du protocole d accord du 4 mars 2009 Le 4 mars 2009, le préfet de la Guadeloupe M. Nicolas DESFORGES et M. Elie DOMOTA signaient, à l issue de 44 jours de grève générale un protocole d accord, les signataires appelant à la reprise de l activité dans l île. Sont parties prenantes à ce protocole : l État, la Région Guadeloupe, le département de la Guadeloupe, l association des maires de Guadeloupe, un certain nombre de communes et établissements de coopération intercommunale. Ce protocole d accord de portée générale comporte pas moins de 165 articles. Il porte sur douze points principaux : le niveau de vie et le pouvoir d achat, le logement, les transports, l éducation, la formation professionnelle, l emploi, les droits syndicaux et les libertés syndicales, les services publics, l agriculture, la pêche, l aménagement du territoire et les infrastructures, la culture, auxquels s ajoute un volet supplémentaire concernant son application. Six articles (articles 27 à 32) concernent le prix des carburants : les articles 27 et 28 constatent les baisses déjà intervenues à l initiative de l État, l article 29 annonce la mise en place par l État, en concertation avec les acteurs concernés, d un nouveau dispositif de gestion des carburants assurant plus de transparence et qui devra tenir compte de la problématique des emplois dans les stations service ; l article 30 porte sur la suspension immédiate dans la structure des prix des carburants de la taxe sur les huiles usagées ; l article 31 subordonne aux conclusions du rapport de l IGF/IGA/CGIET une éventuelle suppression du «prélèvement pour passage en dépôt» ;

199 68 l article 32 prévoit la mise à l étude par l État de dispositifs législatifs ou réglementaires sur l assiette véritable des taxes sur les carburants (prise en compte de la température dans la structure des prix). Enfin, l article 90, qui constitue un élément du dispositif concernant la formation professionnelle, stipule que «dans l hypothèse où la mission d inspection aura mis à jour la perception de sommes indues par l un ou l autre des acteurs de la filière pétrolière, ces sommes, susceptibles in fine d être reversées par ce ou ces acteurs, serviront à alimenter un fonds de formation professionnelle par la Région» 4. La Guyane La Guyane est le département d outre-mer où les prix du carburant ont atteint leur niveau le plus élevé. En décembre 2008, le supercarburant distribué dans ce département a même atteint le prix de 1,77 euro par litre, soit le plus cher d Europe! Une telle hausse et la gravité de la crise qu elle a entraînée ne peut être due qu à la seule augmentation du cours du pétrole. D autres facteurs ont également joué, découlant des spécificités nombreuses de ce territoire ainsi que d un mauvais concours de circonstances. a) L application des normes européennes à compter d avril 2007 a obligé la Guyane à s approvisionner exclusivement auprès de la SARA Le 17 novembre 2006, une décision de justice a fait droit à une plainte des concessionnaires automobiles guyanais. Ceux-ci dénonçaient le fait que la Guyane importait depuis Trinidad du gazole et de l essence qui ne respectaient pas les normes européennes normalement applicables en matière de qualité des carburants. Ces carburants abîmaient ainsi prématurément certaines pièces des véhicules, notamment les carburateurs, dont certains, encore sous garantie, devaient être réparés à leurs frais. Par conséquent, les distributeurs de carburant ont dû, à compter du 1 er avril 2007, s approvisionner auprès de la seule raffinerie de la zone Caraïbes à même de fournir du carburant aux normes européennes : la SARA. Or, non seulement le prix de sortie raffinerie de la SARA est bien plus élevé que celui de l énorme raffinerie de Pointe-à-Pierre, mais la Martinique est plus éloignée de la Guyane que Trinidad, avec pour conséquence des coûts de transport également plus élevés. Les prix des carburants étant administrés, c était au préfet de tirer les conséquences de ce changement d approvisionnement et d appliquer l augmentation des prix de vente qui en résultait. Ces prix auraient dû alors connaître une hausse brutale de 31 centimes pour l essence et de 27 centimes pour le gazole. Afin d éviter celle-ci, il a choisi de lisser cette augmentation sur une dizaine de hausses étalées entre février 2007 et janvier Par conséquent,

200 69 alors même que le prix du pétrole avait entamé sa décrue rapide, à partir de l été 2008, le prix des carburants en Guyane continuait à augmenter! b) L importance de la fiscalité Les taux de la taxe spéciale sur les carburants ne peuvent être supérieurs à ceux de la TIPP applicable en métropole. Si la région Réunion, la région Guadeloupe et, surtout, la région Martinique, ont des taux bien inférieurs, ce n est pas le cas de la région Guyane où les taux de TSC plafonnent au maximum légal. Le conseil régional de Guyane n a cependant guère le choix tant les besoins en investissements publics sont considérables, en particulier en matière d infrastructures routières. La Guyane ne dispose en effet que de 500 kilomètres de voirie nationale, 500 km de voirie départementale et seulement 7 km de voies rapides. Or, comme la dotation globale d équipement est calculée notamment sur la longueur des voiries, celle de Guyane euros en 2008 pour un département aussi vaste qu une grande région métropolitaine est la plus faible des quatre départements d outre mer et l une des cinq plus faibles de France (hors Paris, petite couronne et le Territoire de Belfort)! La faiblesse du réseau routier explique aussi l importance des liaisons aériennes internes et le fait que celles-ci soient largement subventionnées. Enfin, l accroissement démographique que connaît ce département oblige à construire de nouveaux lycées (trois en 2009). Pour l ensemble de ces raisons, présentées en détail à la mission d information, les collectivités territoriales guyanaises ont besoin de la totalité des ressources que peut apporter la taxe spéciale de consommation sur les carburants. c) Les contraintes géographiques La Guyane est un territoire immense où les communes ont parfois la taille d un département métropolitain. Dans ces conditions, les coûts de transport du carburant et des bouteilles de gaz dans les endroits les plus reculés sont tels que leur prix de vente est bien plus élevé que dans les communes côtières. La mission d information a ainsi appris que le prix du carburant pouvait atteindre 3 euros le litre à Maripasoula et celui de la bouteille de gaz, livrée par hélicoptère, 80 euros à Saul. Contrairement aux autres départements d outre-mer, il n y a donc aucune continuité territoriale des prix en Guyane, au détriment des consommateurs de l intérieur. Autre spécificité évidente de la Guyane, ce n est pas une île ; elle dispose de longues frontières terrestres avec le Brésil à l est et avec le Suriname à l ouest. Or, dans ces pays, le carburant est bien moins cher et même s il ne respecte pas les normes européennes, il peut être utilisé par les véhicules dont les propriétaires sont nombreux, dans les communes frontalières (Saint-Laurent du Maroni), à s approvisionner à l étranger, fragilisant l équilibre financier des rares stationsservice présentes. Les consommateurs, au moins dans les communes

201 70 frontalières, ne sont pas captifs des distributeurs locaux comme ils le sont dans les autres départements d outre-mer. En outre, la concurrence ne se limite pas aux seuls carburants. Dans le domaine du transport routier de marchandises, les entreprises guyanaises font face à une concurrence étrangère, notamment de chauffeurs brésiliens, qui est inexistante dans les îles. Cette concurrence devrait encore s accroître après la construction projetée du pont entre le Brésil et la Guyane. Le carburant représente 35 % de leurs charges et les contrats, notamment pour le transport des voyageurs, courent sur plusieurs années ; elles sont donc dans l impossibilité de répercuter la hausse du prix des carburants dans leurs prix de vente. d) Le stockage La SARA dispose en Guyane d un établissement qui assure le monopole du stockage du carburant. Ce ne fut pas toujours le cas puisque le stockage était, jusqu en 1982, assuré par Texaco-Chevron. Lorsqu il a fallu moderniser les installations, la SARA s est porté candidate pour construire de nouvelles cuves. Elle dispose aujourd hui de trois dépôts : Degrad-des-Cannes (près de Cayenne), Kourou et Larivo. Les capacités de stockage s élèvent à environ mètres cubes. La mission d information a pris connaissance de la comptabilité analytique de la SARA de 2006 à 2008 (1), qui isole l activité «stockage» de celle-ci en Guyane. Les principaux chiffres sont les suivants : (En millions d euros) Chiffre d affaires 8,68 8,76 8,56 Résultat net. 2,57 2,30 2,04 Source : SARA L activité «stockage» de la SARA en Guyane est donc largement bénéficiaire ; qu une entreprise soit bénéficiaire est dans l ordre des choses, mais qu elle le soit à hauteur de près 25 % de son chiffre d affaires n étonnera que ceux qui ignorent que les marges de stockage sont, en Guyane, deux fois plus élevées qu en Martinique et en Guadeloupe, comme le montre le tableau suivant. DROIT DE PASSAGE DANS LES STOCKS (EN /M3) FIGURANT DANS LA STRUCTURE DES PRIX AU 1 ER FÉVRIER 2009 Guyane Guadeloupe Martinique Réunion Gazole... 62,35 33,53 33,53 20,95 Supercarburant 35,82 35,82 Les investissements en matière de stockage en Guyane ont été réalisés il y a presque trente ans, et si des mises aux normes sont évidemment intervenues depuis lors, comme aux Antilles d ailleurs, la mission d information a du mal à croire qu elles puissent justifier des droits de passage qui sont le double de ceux applicables aux Antilles. (1) Les chiffres de l année 2008 sont encore provisoires.

202 71 IV. LES PROPOSITIONS DE LA MISSION D INFORMATION A. LE RENFORCEMENT DE LA TRANSPARENCE 1. Associer l ensemble des parties prenantes via un comité de suivi à la détermination du prix des carburants Depuis de nombreuses années, le prix des carburants dans les départements d outre-mer alimente les causes de mécontentements des populations locales ainsi que les archives des ministères et la réflexion des pouvoirs publics en rapport successifs, sans pour autant que les solutions retenues jusqu à ce jour aient empêché le développement de mouvements revendicatifs d une ampleur inégalée l hiver dernier. Que ce soit lors des auditions ou lors de leurs déplacements dans les départements d outre-mer, la mission d information a pu mesurer combien l incompréhension, liée principalement au manque d informations officielles crédibles (souligné d ailleurs par le rapport de l IGF/IGA/CGIET), laissait une large place aux désinformations les plus diverses générant ainsi des rumeurs incontrôlables qui en s amplifiant ne pouvaient qu avoir la suite que l on connaît. Il importe donc de mettre en place, dans chaque département une structure, qui associerait toutes les parties prenantes : représentants des consommateurs, représentants de l État et des collectivités territoriales (régions et département), des représentants des acteurs de la chaîne du carburant (compagnies pétrolières, gérants de stations services, transporteurs). Il convient en effet de disposer d une instance multipartite, indépendante du préfet (contrairement aux observatoires des prix), dédiée spécialement à la question cruciale des prix des carburants, dont les membres auront pour mission de lever l opacité actuelle et de créer les conditions d une transparence totale sur l ensemble des procédures de fixation des prix, le préfet et le directeur régional de la concurrence et de la répression des fraudes disposant chacun d une voix consultative. Ce «comité de suivi» donnera son avis préalablement à toute décision (nationale ou locale) touchant à la formation des prix des carburants, excepté la fiscalité qui restera de la responsabilité des collectivités territoriales. Ses avis seront rendus publics et annexés aux arrêtés préfectoraux de fixation des prix, sous peine de nullité de la décision administrative. Sa présidence sera confiée à une personne dont l indépendance ne saurait être mise en doute, par exemple un membre de l Autorité de la concurrence, appelé à présider les quatre comités de suivi.

203 72 Proposition n 1 : Créer un «comité de suivi» des prix des carburants permettant de consulter préalablement l ensemble des parties prenantes, préalablement à la publication de l arrêté de fixation des prix des carburants. 2. Informer le consommateur en station-service L information du consommateur doit être clarifiée de façon à renforcer son action sur la chaîne de distribution. Il importe en effet de donner aux associations de consommateurs, parties prenantes à la commercialisation, la possibilité de disposer en permanence de tous les éléments leur permettant de peser sur les circuits de distribution afin de pouvoir influer sur la tarification des produits qui sont proposés. Comment concevoir que dans les stations services des DOM, il ne soit nulle part fait mention que le prix pratiqué corresponde au prix maximum autorisé. C est pourquoi, si l on souhaite réintroduire une possibilité de faire jouer un minimum de concurrence, il semblerait logique que chaque station-service affiche clairement d une part le prix maximum autorisé et le prix à la pompe. Des différences de quelques centimes entre distributeurs concurrents ne devraient pas mettre en péril le système social protecteur que constitue le mode de commercialisation des carburants. Proposition n 2 : Imposer aux stations services l affichage visible des prix administrés, avec la précision du prix maximum. 3. Régler le problème des cuves privées Le stockage de produits pétroliers dans des «cuves privées» constitue actuellement dans les DOM une solution adoptée par les particuliers et les entreprises face aux mouvements fréquents des opérateurs de la distribution de détail et largement facilitée non seulement par les grossistes indépendants, particulièrement en Guadeloupe, de manière à s ouvrir des débouchés en raison de leur difficulté d approvisionnement auprès de la SARA, mais également par les compagnies pétrolières. Le développement rapide de cette forme de stockage (représentant jusqu environ 20 % de la distribution dans certains départements) est mal perçu par les distributeurs de détail qui y voient une forme de concurrence déloyale, susceptible de remettre en cause l originalité du système social de distribution des carburants. Cette forme de stockage est d ores et déjà réglementée. En effet en application de en application du décret n du 7 novembre 1962 et de l arrêté du 21 mars 1968 modifié fixant les règles techniques et de sécurité applicables au stockage et à l utilisation des produits pétroliers dans les lieux non visés par la législation des établissements dangereux, insalubres ou incommodes et

204 73 la réglementation des établissements recevant du public, le stockage dans des cuves particulières doit répondre à des spécifications précises. Si les citernes particulières d un volume inférieur à litres ne font pas l objet de règles précises, tout stockage supérieur à ce volume doit obligatoirement répondre, en raison de sa dangerosité, à des normes de sécurité particulières et faire l objet d une déclaration en préfecture. Or, d après les informations recueillies, il n existe, dans les départements d outre-mer, aucun recensement officiel du nombre et de l emplacement de ce type de stockage, ce qui pose de réels problèmes de sécurité dans des territoires où en raison des données climatologiques et sismiques, ces cuves peuvent poser de sérieux problèmes : risques d incendie, d explosion et de pollution. Compte tenu de ces risques particulièrement élevés, il apparaît souhaitable que toute installation de cuves d une capacité supérieure à litres soit soumise à une autorisation d installation préalable qui ne serait délivré qu après examen des risques sismiques et conformité du récipient et de son projet d installation. Proposition n 3 : Recenser les cuves privées et soumettre leur installation, à partir d une certaine capacité, à une autorisation administrative. 4. Assurer le respect des règles de la concurrence Lors de ses déplacements dans les DOM, la mission d information a eu accès à plusieurs contrats de location-gérance liant les gérants de stations service aux compagnies pétrolières propriétaires des stations services. Ceux-ci présentent un certain nombre de clauses dont la portée est particulièrement contraignante pour les locataires gérants. Les compagnies ont, en effet, une forte propension à transférer aux gérants, lors des renouvellements de contrats, une part importante des charges de maintenance des installations qu elles supportaient antérieurement. Par ailleurs les tournures juridiquement sibyllines de certaines clauses des contrats pourraient laisser entendre que le montant du loyer réclamé tiendrait compte d activités annexes (boutique notamment) non liées directement à la distribution de carburants, ce qui semble pour le moins surprenant. Dans ces conditions, il apparaît particulièrement important que les contrats et leurs éventuels avenants, soient, après signature par les parties, transmis aux directions régionales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes afin de s assurer de la conformité de leur contenu avec les dispositions législatives et réglementaires et qu ils ne comportent pas de transferts de charges abusifs. Proposition n 4 : Obliger les compagnies pétrolières à transmettre aux directions régionales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes les contrats signés avec les détaillants afin qu elles vérifient qu ils ne comportent pas de clauses abusives.

205 74 B. DES BAISSES DE PRIX SONT ENVISAGEABLES TOUT EN PRÉSERVANT L EMPLOI, LA SÉCURITÉ DE L APPROVISIONNEMENT ET LES RESSOURCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES D OUTRE-MER 1. Le maintien d un système de prix administrés par le préfet a) Le choix de maintenir l administration des prix Forte du constat de dysfonctionnements graves du système d administration du prix des carburants, des rentes qu il a contribué à créer et de la hausse des prix qu il n a pu empêcher, la mission d information s est interrogée sur la pertinence de maintenir un tel système et sur la possibilité de libéraliser, comme en métropole, les prix des carburants dans les départements d outre-mer. Une telle libéralisation des prix a été envisagée par le rapport IGF/IGA/CGIET. Cependant, dès lors que l approvisionnement, le raffinage et le stockage constituent des monopoles naturels découlant de l étroitesse du marché des carburants dans ces départements, la libéralisation des prix ne peut porter que sur la marge de distribution. Si les prix de détail étaient libres, les distributeurs en gros comme les détaillants pourraient être tentés de les baisser afin de gagner des parts de marché. Cependant, la concurrence n a pas que des vertus et, parfois, elle s exerce au détriment de l emploi. En effet, le moyen le plus simple et le plus rapide, pour une entreprise, de réduire ses coûts et donc ses prix de vente est de diminuer ses charges salariales et les stations-service ne font pas exception à la règle. C est pourquoi le risque est réel que la libéralisation des prix et la concurrence qu elle est susceptible d entraîner s accompagnent de l automatisation des pompes et de la généralisation du libre-service avec, par conséquent, des centaines de suppressions d emplois. C est pourquoi la mission d information, qui a fait de la préservation de l emploi une priorité de sa réflexion, ne peut soutenir l abrogation du système actuel d administration des prix. En outre, il n est pas évident que la libéralisation des prix se traduise par l accroissement de la concurrence entre les distributeurs et, partant, par une baisse des prix des carburants. C est ainsi que le Conseil de la concurrence a été saisi, le 14 janvier 2003 par Air France sur le prix du carburéacteur à l aéroport international de Saint-Denis de la Réunion tel qu il est fixé par un cartel de compagnies pétrolières rassemblées dans un GIE. Le Conseil de la concurrence a fait droit à la plainte et condamné, dans sa décision n 08-D-30 du 4 décembre 2008 les sociétés Total-Réunion, Total outre-mer, Chevron global aviation, SHELL SPS et ESSO SAF à des amendes pour un montant total de 41,2 millions d euros. Or, le carburéacteur est le seul carburant dont le prix ne

206 75 soit pas administré et c est le seul qui ait fait l objet d une entente entre les distributeurs Enfin, la libéralisation des prix des carburants risquerait de rompre la continuité territoriale. Aujourd hui, à La Réunion, les prix sont identiques à Saint-Denis et à Cilaos, isolé au milieu de son cirque. Si demain les prix sont libéralisés, non seulement il n est pas sûr qu ils baisseront à Saint-Denis à moins peut-être de sacrifier l emploi mais ils augmenteront certainement à Cilaos. Proposition n 5 : Maintenir dans les départements d outre-mer un système d administration des prix des carburants par le préfet. b) Simplifier la formule de prix Maintenir le système d administration des prix des carburants outre-mer a un corollaire : il doit être amélioré et cette amélioration objet de la plupart des propositions du présent rapport passe notamment par la simplification de la formule de prix elle-même. La structure de la formule de prix ne peut être modifiée en tant que telle. Calquée sur l organisation de la filière carburant, elle comporte autant de composantes qu il y a d étapes dans celle-ci. Ces composantes subsisteront quelle que soit la formule ce qui n empêche pas de modifier les prix eux-mêmes. En revanche, plusieurs composantes de la formule de prix apparaissent contestables. Par exemple, à La Réunion, le coût d assurance du «coulage en mer» à 1 % apparaît inutilement élevé par rapport aux coûts généralement constatés et c est à juste titre que le rapport IGF/IGA/CGM recommande de le réduire à 0,2 %. De même, toujours à La Réunion, les importateurs de carburants, c'est-à-dire les compagnies pétrolières et la SRPP, bénéficient d une rémunération de 2$ par tonne de carburants redondante avec la rémunération de 5$ par tonne que perçoivent déjà les sociétés de trading. L Autorité de la concurrence a chiffré le coût de ces deux anomalies à respectivement $ (soit euros) par an pour la première et entre 1,4 et 2 millions d euros pour la deuxième. La mission d information estime donc nécessaire que les DRCCRF d outre-mer procèdent sans délai à une analyse minutieuse de la formule de prix afin d en éliminer les composantes contestables, obsolètes ou redondants. De même serait-il souhaitable que les règles applicables en matière de fixation du prix des carburants soient cohérentes. Par exemple, en Guyane est toujours applicable l arrêté préfectoral du 11 juin 2004 qui, n ayant pas été modifié suite au changement d approvisionnement découlant de l application obligatoire des normes européennes en 2007, se réfère toujours, pour la fixation du prix des carburants importés, aux «cotations de référence afférentes à la zone Trinidad» alors qu est désormais applicable le prix de sortie raffinerie de la SARA. La transparence ne pourrait qu y gagner.

207 76 Proposition n 6 : Simplifier la formule de prix afin d en éliminer les composants contestables, obsolètes ou redondants. 2. L approvisionnement La crise qu ont affrontée les départements d outre-mer à partir de l été 2008 n a pas été qu une réaction «classique» à l envolée des prix du pétrole. Elle s est exacerbée lorsque les prix du pétrole ont commencé à chuter rapidement sur les marchés internationaux sans que cette baisse soit répercutée dans les prix à la pompe. La mission d information estime donc nécessaire que ceux-ci évoluent dans le même sens, à la hausse comme à la baisse, que le cours du pétrole. Proposition n 7 : Lier le prix à la pompe des carburants à l évolution (à la hausse comme à la baisse) du cours du pétrole sur les marchés internationaux. Actuellement, la formule de prix repose largement, s agissant de l approvisionnement en pétrole comme en carburants, sur les prix mondiaux qui garantissent une certaine objectivité. En effet, tant dans les départements français d Amérique qu à La Réunion, le prix administré est calculé à partir d une moyenne des cotations (Brent daté FOB pour la SARA et indice Platt s de Singapour pour La Réunion) autour de la date de chargement du bateau auquel s ajoute le premium («prime de qualité») et la prime de trading. Deux mesures sont cependant possibles afin d améliorer encore la liaison entre le prix du pétrole et le prix à la pompe : comme l a relevé l Autorité de la concurrence, le premium pris en compte dans la formule de prix n est pas celui que cote la société Platt s mais un premium conventionnel particulièrement instable dans le temps et déterminé on ne sait comment par la société de trading concernée sans que personne ne puisse évidemment vérifier son bien-fondé. La société Platt s publiant quotidiennement des fourchettes de premium pour les principales cotations de carburants, les DRCCRF pourraient utilement s en inspirer dans la détermination du prix d achat des produits pétroliers ; l administration des prix repose sur la publication régulière d arrêtés fixant, généralement pour trois mois, le prix des carburants dans le département d outre-mer concerné. Le lissage qui en résulte, à la hausse comme à la baisse, a pour conséquence de déconnecter le prix des carburants à la pompe du cours du pétrole, déconnection qui s est révélée particulièrement désastreuse lorsque le prix du pétrole s est effondré à partir de l été Rapprocher les prix à la pompe des prix du pétrole implique donc d accélérer la fréquence de publication des arrêtés, idéalement en les faisant coïncider avec l arrivée des bateaux.

208 77 3. Le fret Les trois départements français d Amérique sont tenus de s approvisionner en carburants aux normes européennes auprès de la SARA, seule raffinerie offrant sur leur marché des carburants présentant ces spécifications. D ores et déjà, le transport entre les deux départements antillais, très proches, fait l objet d une mutualisation. Les consommateurs, la chambre de commerce et d industrie et les élus guyanais, partant du principe que l approvisionnement en carburants auprès de la SARA leur a été imposé et que l essentiel de l activité raffinage profite principalement au développement économique de la Martinique, considèrent qu il y a lieu de mutualiser sur l ensemble des trois départements français d Amérique (DFA) le surcoût lié au transport, par bateau dédié, entre la Guyane et les entrepôts de stockage de la SARA en Martinique, au titre d une juste solidarité entre les trois départements. Cette question est d autant plus sensible que les populations antillaises voient dans cette solution une augmentation plus que probable du coût des carburants. Si l on raisonne par simple homothétie avec la situation en métropole, il n y aurait pas lieu de donner suite aux demandes formulées par la Guyane. En effet, les prix pratiqués dans les stations services se trouvant à proximité des raffineries sont généralement inférieurs de plusieurs centimes d euro à ceux des pompes qui en sont éloignées, en raison des coûts de transport supportés au final par les consommateurs. Toutefois, l argument avancé par les consommateurs et élus guyanais, selon lequel il leur est fait obligation de s approvisionner auprès de la SARA en Martinique ne saurait être facilement écarté. Enfin, il importe de prendre en compte le fait que toute modification de la structure des prix des carburants ne manquera pas d avoir un impact réel sur les ressources financières des collectivités territoriales, leurs recettes fiscales étant étroitement liée aux prix de gros des produits pétroliers. Cette question est d autant plus importante que certaines de ces collectivités doivent faire face à de lourds investissements afin de proposer à leurs populations des infrastructures éducatives, sociales et économiques plus en rapport avec leurs développements prévisibles et souhaités Dans l absolu, selon les informations recueillies par la mission d information, une telle mutualisation au titre de la solidarité entre les trois départements entraînerait un surcoût de l ordre du centime d euro dans les départements antillais. Toutefois ce chiffre ne repose à ce jour sur aucune estimation économique réelle et mérite, à tout le moins, d être mieux précisé. Avant de s engager, éventuellement, plus en avant sur cette voie, il convient que le Gouvernement procède à une étude approfondie et objective des effets réels qu entraîneraient une mutualisation des coûts de transports vers la

209 78 Guyane et engage une concertation dépassionnée avec et entre les collectivités territoriales concernées. Proposition n 8 : Engager une réflexion sur une éventuelle mutualisation des coûts du fret entre Antilles et Guyane. 4. Le raffinage a) Préserver les emplois de la SARA Suite à la publication du rapport IGF/IGA/CGM, qui faisait ressortir sans ambiguïté que le prix sortie SARA des carburants dans les DFA était plus élevé, en moyenne sur la période , de 19 centimes pour le supercarburant et de 11 centimes d euro pour le gazole par rapport à une raffinerie européenne standard, la tentation a été grande de faire en sorte que l approvisionnement en produits raffinés soit directement effectué sur le marché pétrolier européen, d autant qu une partie des importations de la SARA provient de ce même marché. Une telle voie, si elle était choisie sonnerait le glas non seulement de plusieurs décennies de la politique d indépendance voulue par le général de Gaulle, mais aussi de l une des sources de développement économique et social de la Martinique et des DFA. Les activités de raffinage et stockage de la société de la raffinerie des Antilles constituent, en effet, un pôle fondamental de l emploi dans la zone que ce soit par les emplois directs qu elle génère comme pour l ensemble des entreprises dont l activité est plus ou moins directement liée à l existence même de la SARA. Certes, l avenir de la SARA ne s annonce pas facile, mais, l outil industriel qu elle représente, notamment au regard du montant des investissements qui ont été consentis récemment pour sa modernisation, ne peut être ainsi sacrifié. Il importe de ne pas oublier que, malgré sa taille réduite, son maintien est stratégiquement important, ne serait-ce que parce qu elle constitue une source importante d approvisionnement d une partie non négligeable du territoire national en cas d apparition de tensions internationales. Qui plus est, toute décision visant à réduire brutalement le prix des carburants aurait inévitablement un effet immédiat sur l activité de la raffinerie et, par conséquent, sur le nombre de ses salariés et des emplois indirects, dans un département où le taux de chômage s élevait à 22 % en Proposition n 9 : Conforter la SARA, pour ne pas sacrifier l emploi et l outil industriel qu elle représente à une baisse de prix immédiate. b) Préparer l avenir de la SARA A travers les activités de raffinage, la SARA et la Martinique ont su développer un véritable savoir-faire dans le domaine du traitement des

210 79 hydrocarbures. Afin de procéder aux modifications de l outil industriel pour parvenir à produire des carburants respectant les normes environnementales européennes, les ingénieurs et techniciens de la SARA ont acquis de véritables compétences dans les adaptations technologiques indispensables à la compatibilité des carburants et la réduction des gaz à effet de serre. Il a même été rapporté à la mission d information que le laboratoire de la SARA était intervenu judicieusement dans l expertise de carburéacteur nonconforme livré en Guyane et que la raffinerie avait su trouver les solutions technologiques appropriées à son retraitement pour le rendre compatible avec les normes européennes. Par ailleurs, il convient de souligner que dans la zone géographique, au sens large, la SARA est le seul raffineur disposant d un savoir faire technologique en matière d adaptation de la production de carburants à la lutte contre le réchauffement climatique. Or, la lutte contre le réchauffement climatique est vouée à prendre une place de plus en plus importante dans notre économie et notre société. D européenne, la lutte contre le réchauffement de la planète est devenue une priorité mondiale. Récemment, le nouveau Président des États-Unis a résolument engagé son pays sur la voie de la lutte contre le réchauffement climatique, rejoignant ainsi les engagements de longue date des États européens. Lors du dernier sommet du G8 en Italie, les États membres ont adhéré aux objectifs du Groupe intergouvernemental d experts sur l évolution du climat visant à éviter que l augmentation globale de la température terrestre dépasse la température actuelle de deux degrés d ici la fin du siècle. Le G8 a donc proposé une réduction de moitié des gaz à effets de serre d ici De façon à atteindre l objectif de réduction de moitié des émissions de gaz à effet de serre, les pays industrialisés se sont engagés à faire baisser les leurs d environ 80 % d ici 2010, ce qui suppose l application, dans nombre de ces pays, de spécifications drastiques, proches, voire identiques, à celles des normes européennes prochainement applicables. Au premier rang des pays concernés figurent les États-Unis ce qui suppose que ce continent et ses fournisseurs en produits raffinés devront, dans un proche avenir, produire des carburants répondant à des spécifications équivalentes à celles des normes européennes. Cette perspective pourrait laisser augurer un développement futur de la seule unité de raffinage se situant à proximité de cette zone. Or, les capacités de production de la SARA ne suffisent pas à alimenter le marché des Antilles et de la Guyane, contraignant la SARA à importer annuellement des carburants. Par ailleurs, compte tenu de l implantation du site de production en zone urbaine, toutes possibilités d extension semblent compromises. Dans ces conditions, on ne peut que s interroger sur la stratégie future des compagnies pétrolières qui pourraient être tentées de se fournir sur des marchés de

211 80 carburants raffinés produits à proximité. Cette tentation sera d autant plus grande que ceux-ci devraient être offerts à un coût moindre du fait de la mutualisation des coûts, notamment de transport, et d une production dans des unités beaucoup plus importantes. Les actionnaires de la SARA, souhaiteront-ils, sans garanties sur les marges qu ils pourront réaliser, conserver un outil de production de petite capacité ou opteront-ils alors pour une restructuration de cet outil en fonction d objectifs différents? Ils pourraient notamment, profitant des compétences acquises en matière d expertise des carburants par le laboratoire de la SARA, envisager un recentrage stratégique par le développement des activités de recherche? Faut-il attendre que les compagnies développent leurs propres stratégies ou, en liaison avec l Union européenne, anticiper leurs éventuelles décisions? Ne conviendrait-il pas plutôt de rebondir en s appuyant sur l outil existant et de développer, autant que faire se peut, une opportunité pour la Martinique et les RUP, en facilitant, au plus vite, en liaison avec les acteurs pétroliers et les acteurs locaux un pôle de compétitivité européen notamment sur la pollution et les normes environnementales des carburants? Outre les impacts bénéfiques pour le développement des DFA, la création d un pôle de compétitivité de dimension européenne, centré sur la recherche et la mise au point de carburants d origine minérales susceptibles d atteindre les objectifs futurs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, constituerait une véritable vitrine des engagements européens en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique pour l ensemble du continent Nord et Sud américain. En lançant un tel projet, la France et l Europe démontreraient leurs engagements forts, en faveur de la réduction des gaz à effet de serre et de la lutte contre le réchauffement climatique, tout en marquant leur volonté de d appuyer le développement futur d un espace technologique européen innovant dans la zone Caraïbe. Ce pôle de compétitivité de dimension européenne, voire mondiale, pourrait utilement travailler en partenariat avec des organismes existant ayant une vocation voisine, tel que le CEDRE (Centre de documentation, de recherche et d expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux) de Brest, le pôle AVENIA en Aquitaine, renforçant ainsi les liens et les complémentarités entre la Martinique et la métropole. Une telle initiative, si elle était reprise, balancerait utilement la décision annoncée par Mme la secrétaire d État chargée de l outre-mer de saisir la Commission européenne d une demande de dérogation à l application à la Guyane des normes européennes en matière de composition des carburants. La Guyane constitue, certes, une enclave européenne sur un continent où les normes environnementales concernant les carburants sont nettement moins draconiennes. Toutefois, une telle demande parait peu en phase avec la politique environnementale dont la France entend être l un des fers de lance (la révision de

212 81 la directive carburants a eu lieu sous présidence française de l Union et la mise en œuvre du Grenelle de l environnement fait l objet d un large consensus national). Proposition n 10 : Créer en Martinique, autour de la SARA et en s'appuyant sur ses structures et ses compétences, un pôle de compétitivité européen sur la recherche de normes applicables aux hydrocarbures, compatibles avec les exigences de la réduction des gaz à effets de serre. 5. Le stockage La question du stockage se pose en des termes différents à La Réunion et dans les départements français d Amérique. La SRPP est une entreprise exceptionnellement rentable 28 % de rentabilité financière entre 1999 et 2008 dont la rentabilité même révèle qu une baisse des droits de passage est possible sans compromettre la pérennité de l activité de l entreprise. La mission d information estime donc nécessaire de calculer les droits de passage de la SRPP pour qu ils correspondent à une rentabilité maximale sur capitaux investis de 12 %, soit le niveau moyen de rentabilité des installations de stockage en Europe, visiblement suffisant pour assurer à la fois la rentabilité de l activité, les investissements nécessaires et le respect des normes de sécurité. Proposition n 11 : Abaisser les droits de passage de la SRPP pour qu ils correspondent à une rentabilité maximale sur capitaux investis de 12 %. Dans les départements français d Amérique, la situation est plus complexe qu à La Réunion. Deux problèmes différents se posent. En premier lieu, le développement des distributeurs indépendants aux Antilles est freiné par le fait que la SARA assure le stockage des produits raffinés pour le compte de ses actionnaires. Cette particularité rend particulièrement difficile l approvisionnement en carburant des membres du Groupement pétrolier des indépendants des Antilles, ceux-ci ne disposant pas de capacités de déchargement, de stockage et de chargement indépendantes. Cette situation, liée notamment à un volume de stockage insuffisant en Guadeloupe (les obligations relatives aux stocks stratégiques ne sont pas atteintes et l implantation de nouvelles unités de stockage se heurte à divers obstacles, officiellement d ordre foncier, ce, malgré les études conduites par le CPSSP faisant apparaître quelques possibilités), apparaît pour le moins contestable et conforte vos rapporteurs dans leur conviction qu il convient de dissocier l activité stockage de celle de la SARA en créant une société différente dont le capital serait ouvert aux nouveaux entrants. En deuxième lieu, les obligations relatives aux stocks stratégiques ne sont pas respectées et l accès au stockage pour les distributeurs indépendants n est pas garanti. La situation monopolistique de la SARA dans ce domaine et l absence de la SAGESS (société anonyme chargée de mettre en œuvre les obligations à la

213 82 charge du Comité Professionnel des Stocks Stratégiques Pétroliers) en constituent les principaux motifs. Il importe donc de remédier rapidement à une situation anormale, d autant plus que la réglementation européenne sur les volumes des stocks stratégiques a évolué à la hausse, les dispositions de la nouvelle directive européenne devant être transposées sous peu. Comme le recommande notamment le rapport de l IGF/IGA/CGIET, la filialisation de l activité stockage de la SARA constituerait la voie à suivre, sous réserve de l ouverture du capital de la future société à de nouveaux actionnaires. En raison des investissements nécessaires à l accroissement des capacités de stockage, il conviendrait que cette nouvelle société dispose d un panel d actionnaires important et diversifié, d autant que cette activité correspond par ailleurs à une mission d intérêt public. Ainsi, outre la SARA, l État et les collectivités territoriales, mais aussi les distributeurs indépendants et la SAGESS pourraient en constituer les principaux actionnaires. L une des premières missions de cette société consisterait, en liaison avec les pouvoirs publics, de rechercher de nouvelles implantations d unités de stockage des carburants. Peut-être, de manière à palier les difficultés liées à l absence des réserves foncières disponibles en Guadeloupe et en Martinique, conviendrait-il d explorer une extension des capacités de stockage en Guyane. Proposition n 12 : Créer une filiale dédiée au stockage avec prise de participation de l État, distincte de l activité raffinage de la SARA. 6. Les marges de distribution a) Paraissant pouvoir être réduites, les marges de distribution doivent cependant garantir l emploi et la continuité de l approvisionnement en carburant Refuser l automatisation des stations-service pour préserver l emploi dans les départements d outre-mer Si un point fait consensus outre-mer s agissant du marché des carburants, c est bien la priorité qui doit être donnée à l emploi. Quelle que soit la personne, l administration ou l institution auditionnée par la mission d information, la question de la préservation de l emploi était au cœur de toutes les réflexions. La mission d information ne peut donc que prendre acte de ce consensus sans perdre de vue, cependant, ce qu elle impose en contrepartie : la limitation des baisses possible de la marge de détail et de la marge de gros. Contrairement à la métropole, les stations-service outre-mer ne sont pas automatisées ; elles emploient donc de nombreux pompistes mais pas seulement.

214 83 Véritables «lieux de vie», elles disposent souvent d une boutique qui fournit aux consommateurs journaux, boulangerie et produits de première nécessité et emploient entre 5 et 10 salariés, jusqu à 20 pour les grosses stations ; en effet, dès lors que la concurrence ne peut s exercer par les prix et que les stations se trouvent toutes dans un périmètre réduit, la différence ne peut se faire que sur le service et la qualité de l accueil. Cependant, nos concitoyens outre-mer doivent être conscients que ce modèle de stations-service, aux emplois et services nombreux et de qualité, a une contrepartie : une marge de détail très élevée qui renchérit substantiellement le prix des carburants. Alors que la marge de distribution (marge de gros et marge de détail) en métropole ne dépasse pas 10 centimes par litre, la seule marge de détail en Guadeloupe et à La Réunion lui est supérieure, les coûts salariaux représentant plus de 50 % de celle-ci. Dans ces conditions, rien ne serait plus simple, sur le papier, que de réduire cette marge de distribution : il suffirait d automatiser les stations-service et de sacrifier des centaines d emplois pour obtenir une baisse du prix des carburants qui pourrait atteindre, selon le rapport IGF/IGA/CGM, jusqu à 6,4 centimes par litre en Guadeloupe. Telle n est pas la position de la mission d information. Celle-ci considère que les centimes d euros gagnés sur la marge des détaillants ne compenseraient pas le coût humain, social et économique de la suppression des emplois de pompistes dans des territoires particulièrement frappés par le chômage. Proposition n 13 : Maintenir autant que possible les emplois de pompistes dans les stations-service en refusant leur automatisation. Le refus de l automatisation des stations-service limite également la baisse possible de la marge de gros. En effet, si celle-ci devait être diminuée, il est évident que les compagnies pétrolières accapareraient une part plus importante de la marge de détail et, de fait, imposeront à leurs locataires-gérants, soucieux de maintenir leur rentabilité, de réduire leurs coûts fixes, c'est-à-dire les charges salariales, via l automatisation des pompes. Peut-être même qu elles reprendraient directement la gestion des stations-service afin d appliquer un plan de rationalisation des coûts avec pour conséquence des licenciements massifs. Le directeur général de Total-Réunion, M. Philippe BODILIS, a été très clair sur les conséquences sur l emploi qu aurait une éventuelle diminution de la marge de gros. Assouplir le prix maximum de vente au détail Le prix administré des carburants outre-mer est, en pratique et bien qu il se présente comme un prix maximum, un prix unique. Dès lors, il n est fait aucune différence entre les propriétaires-gérants et les locataires-gérants, entre les grosses

215 84 et les petites stations, entre les stations situées en centre-ville et celles qui assurent un véritable service public dans les régions isolées. Dans ces conditions, la marge de détail fixée par l arrêté préfectoral n est pas une marge moyenne mais une marge au coût marginal, celle qui est nécessaire afin d assurer la rentabilité des stations les moins rentables. Par conséquent, dès lors que les augmentations de la marge de détail s appliquent à toutes les stations, les plus rentables le deviennent encore plus! Les gérants ont ainsi beau jeu de mettre en avant la situation difficile de quelques petites stations, éloignées et peu rentables pour obtenir une revalorisation qui profitera à toutes, même aux plus rentables. Le seul moyen d éviter l effet pervers de cette marge unique est de permettre au préfet d autoriser les stations les moins rentables, qui sont souvent les plus petites et les plus isolés, à déroger au prix maximum de vente au détail. Bien sûr, ces stations devront fournir aux DRCCRF dont elles relèvent l ensemble des éléments prouvant la nécessité pour celles-ci d obtenir cette dérogation. Les cas devraient être peu nombreux et, in fine, le consommateur ultramarin a tout à gagner à ce que quelques stations qui assurent souvent une mission de service public en desservant et en animant des régions isolées puissent augmenter leur prix sans servir de prétextes à une augmentation générale de la marge de détail. Proposition n 14 : Permettre au préfet d autoriser certaines stations-service limitativement énumérées à déroger au prix maximum afin d assurer la continuité de l approvisionnement dans certaines régions isolées. Calculer au plus juste la marge de gros Il est évident que les marges de gros sont trop élevées dans les départements d outre-mer. La rentabilité financière des compagnies pétrolières est fréquemment supérieure à 15 % alors même que la mission d information n est pas convaincue de la plus-value qu elles apportent, notamment en matière de formation des gérants (voir supra). Il n en reste pas moins que l approvisionnement en carburant des départements d outre-mer repose exclusivement sur des entreprises privées soumises à une contrainte de rentabilité forte puisqu elles sont toutes cotées en bourse. C est un fait que l on peut regretter, mais il est impossible de mener une réflexion sur le prix des carburants outre-mer sans le garder à l esprit. Dès lors, proposer une réduction de la marge de gros n apparaît plus aussi simple. La réduire, c est prendre en effet le risque que les compagnies pétrolières se retirent, faute de rentabilité suffisante, d un marché qui ne représente quasiment rien pour ces multinationales. Déjà, les consommateurs ultramarins ont assisté ces dernières années à ce qu une personne auditionnée par la mission d information a appelé «une valse des enseignes» : Shell s est retiré de

216 85 Martinique et Guadeloupe (son réseau a été racheté par Rubis-Vito) comme Exxon-Mobil de La Réunion (son réseau a été racheté par Tamoil). Que se passera-t-il si ces groupes moins solides que les majors décident de se retirer, faute de rentabilité? Qui assurera alors la distribution des carburants? La baisse de la marge de gros se heurte à la contrainte de la continuité de l approvisionnement en carburant des départements d outre-mer. Le directeur général de Total-Réunion, M. Philippe BODILIS, a d ailleurs été très clair lors de son audition par la mission d information. S appuyant sur le rapport IGF/IGA/CGIET, qui préconise une baisse de 3 centimes de la marge de gros, il a souligné que la rentabilité de 5 % qui en résulterait, après une année 2008 déficitaire et une année 2009 qui s annonce catastrophique, pourrait apparaître insuffisante aux actionnaires et entraîner le retrait de Total de ce marché. Les DRCCRF devront donc calculer au plus juste la marge de gros, la réduisant autant qu il est possible, mais en gardant à l esprit que les consommateurs ultramarins se soucieront peu du prix des carburants s ils venaient un jour à en manquer, faute de distributeurs. Proposition n 15 : Calculer la marge de gros de manière à ce qu elle garantisse une rentabilité suffisante aux compagnies pétrolières, à même de garantir la continuité de l approvisionnement en carburant et en gaz des départements d outre-mer. b) Renforcer la position des propriétaires-gérants face aux compagnies pétrolières La mission d information a longuement analysé les relations complexes entre les compagnies pétrolières et les gérants de stations-service, qu ils soient propriétaires ou locataires. Elle est désormais convaincue que le moyen le plus efficace de réintroduire un peu de concurrence sur le marché contraint des carburants outre-mer repose sur le renforcement des propriétaires-gérants, les seuls à même de résister à la pression des compagnies pétrolières. En effet, si les locataires-gérants sont dans l étroite dépendance des compagnies pétrolières, lesquelles possèdent le fond de commerce et peuvent ne pas renouveler le contrat de location-gérance une fois celui-ci expiré, les propriétaires-gérants sont dans une position de force puisque le seul moyen pour un distributeur de se développer est d intégrer toujours plus d indépendants dans son réseau via des contrats d approvisionnement exclusif. Les propriétairesgérants sont donc en mesure de faire jouer la concurrence entre elles et, peutêtre, faire bénéficier les consommateurs des remises ainsi obtenues (voir supra). Plus ces contrats d approvisionnement exclusif seront renouvelés fréquemment, et plus la concurrence pourra s exercer. Il importe donc qu ils soient d une durée limitée, par exemple, à cinq ans au maximum.

217 86 En outre, les compagnies pétrolières sont toujours à l affût du propriétaire gérant qui cesse son activité, qu il se reconvertisse ou qu il parte à la retraite. Racheter une station indépendante et l intégrer à leur réseau de location-gérance est l autre moyen pour elles d agrandir leur réseau de distribution. Interdire dans les contrats d exclusivité la clause qui donne priorité au fournisseur pour le rachat du fond de commerce en cas de retrait de son propriétaire permettrait de maintenir une des rares pressions concurrentielles sur ce marché. Proposition n 16 : Limiter la durée des contrats d exclusivité entre les fournisseurs et les propriétaires de stations-service indépendantes et supprimer la clause donnant priorité au fournisseur pour le rachat du fond de commerce en cas de retrait du propriétaire. Enfin, dans la même perspective de renforcement de la concurrence, il convient d aider les locataires-gérants, via des prêts bonifiés, à devenir propriétaires de nouvelles stations-service, voire à les leur réserver. De même, lorsqu une compagnie pétrolière vend son réseau, on peut envisager un droit de préemption des locataires sur la station qu ils gèrent grâce, également, à des prêts bonifiés. Proposition n 17 : Faciliter l accession à la propriété des locataires-gérants. 7. La sortie de crise a) L État doit régler sa dette aux compagnies pétrolières La crise de l automne 2008 s est traduite, dans tous les départements d outre-mer, par une baisse unilatérale des prix des carburants décidée par les préfets. Ceux-ci ont donc délibérément écarté l application de la structure de prix issue des décrets précités et fixé un prix des carburants totalement déconnecté de celle-ci. Or, la marge des détaillants n ayant pas été diminuée, l effort financier a intégralement pesé sur les compagnies pétrolières et, dans les départements français d Amérique, sur la SARA qui, depuis lors, vendent en dessous de leur prix de revient tel qu il est fixé par la structure de prix. Certes, le prix du pétrole a fortement baissé jusqu à 35$ à l automne 2008, allégeant d autant leur facture, mais il est reparti à la hausse depuis le début de l année et atteint maintenant 65$. Si les compagnies pétrolières et la SARA ont accepté de poursuivre leur activité dans de telles conditions, c est qu elles ont obtenu l assurance, au plus haut niveau de l État, que leurs pertes seront compensées. La mission d information voit d ailleurs mal comment l État pourrait s exonérer de ses responsabilités. Si elles portaient l affaire en justice, la responsabilité de l État qui n a pas respecté ses propres décrets serait très certainement reconnue ; plus grave, si les pertes n étaient pas compensées, c est l approvisionnement même des départements d outre-mer en carburants qui serait remis en cause ; si la SARA

218 87 comme d autres compagnies pétrolières, appartiennent à des groupes puissants, à même de supporter des pertes récurrentes, ce n est pas le cas, notamment, de Rubis-Vito. En outre, rien ne dit que ces groupes ne choisissent pas de se retirer d un marché où il n y a que des coups à prendre L État devra donc payer. Mais il est difficile, aujourd hui, de savoir combien. Après avoir auditionné tant les responsables des compagnies pétrolières et de la SARA que les services préfectoraux et les chambres de commerce et d industrie, la mission d information est en mesure de donner au moins un ordre de grandeur de l ardoise. A la Réunion, où les prix sont déconnectés depuis le 1 er août 2008, elle s élèverait, à 30 millions d euros (soit 3 millions d euros par mois). En Guyane, le coût de la baisse de 50 centimes du prix des carburants serait, pour les compagnies pétrolières, de 15 millions d euros (1). Enfin, la SARA accumulerait, tous les mois une perte de 3,5 millions d euros pour la Martinique et de 4,5 millions d euros pour la Guadeloupe. La question est à ce point sensible que le décret n du 13 juillet 2009 a ouvert 44 millions d euros de crédits supplémentaires afin de financer les pertes des compagnies pétrolières et de la SARA jusqu en mai Il n est pas sûr que cette somme suffise, dans un contexte où le prix du pétrole repart à la hausse, d autant qu elle ne concerne pas La Réunion ; de plus, elle ne couvre que les pertes passées et les compteurs tournent toujours Dans ces conditions, la mission d information a réfléchi à un moyen de limiter le coût, pour l État, de l apurement de sa dette aux compagnies pétrolières et à la SARA. Elle l a trouvé dans le prélèvement institué sur les sociétés pétrolières (raffinage et distribution) par l article 67 de la loi de finances rectificative pour 2007 et destiné à financer «l aide à la cuve» de 150 en faveur des ménages modestes se chauffant au fioul domestique (2). Or, lorsqu elle a été décidée, le prix du pétrole atteignait 97$ le baril (le 21 novembre 2007, jour de la présentation du projet de loi de finances rectificative pour 2007) et 106$ lorsqu elle a été renforcée (le 26 septembre 2008, jour de la présentation du projet de loi de finances pour 2009). Si, d ici la fin de l année, le prix du baril de pétrole reste au niveau actuel, autour de 60$, une partie du produit du prélèvement 163 millions d euros pourrait être utilisée afin d apurer la dette de l État sans que le contribuable soit mis à contribution. Il va de soi que si les conditions ayant justifié l instauration de ces primes à la cuve en faveur des particuliers se vérifiaient à nouveau, c est bien cette (1) En outre, il ne faut pas oublier qu en Guyane, la hausse du prix des carbur ants résultant du changement d approvisionnement en 2007 a été lissée. Or, pour financer ce lissage dont le coût pèse sur les distributeurs de carburants, l AFD a consenti à ceux-ci une avance de trésorerie d un montant de 19,5 millions d euros, remboursable à compter du 1 er janvier 2009 par une taxe additionnelle à la TSC. En raison de la crise de l automne 2008, son entrée en vigueur, qui se serait traduite par une augmentation du prix de vente des carburants de 4 à 8 centimes par litre, a été repoussée au 1 er janvier 2010 par l article 28 de la loi de finances rectificative pour (2) Cette aide a été portée à 200 euros par l article 18 de la loi de finances pour 2009.

219 88 finalité qui serait alors privilégiée, à charge pour les pouvoirs publics de trouver une autre solution pour acquitter la dette de l État auprès des compagnies pétrolières. Cette solution pourrait être une augmentation du taux de cette même taxe prélevée auprès de ces compagnies. Ce sont elles en effet qui agrègent les bénéfices des différentes entités juridiques dont nous avons analysé le rôle et qui répercutent systématiquement et intégralement sur le consommateur les contraintes qui leur sont imposées. Proposition n 18 : Si le prix du pétrole le permet, utiliser une partie du produit du prélèvement finançant l aide à la cuve pour apurer le passif de l État vis-à-vis des compagnies pétrolières. A défaut, augmenter la taxe à due concurrence. b) Le retour au prix «réel» des carburants est nécessaire L affectation d une partie du prélèvement finançant l aide à la cuve pour apurer la dette de l État vis-à-vis des compagnies pétrolières n est qu un pis-aller qui ne règle pas le véritable problème qu est la déconnexion entre le prix de structure et le prix de vente des carburants dans les départements d outre-mer. Tant que ces deux prix ne coïncideront pas, la dette ne s étendra jamais. Il apparaît donc urgent, d une part, de couvrir les pertes réelles des compagnies pétrolières et de la SARA, après un audit précis de leurs comptes, mais également de rapprocher progressivement le prix de vente du prix tel qu il résulte de la formule, aménagée le cas échéant en application des propositions de la mission d information Cependant, un retour brutal à la réalité des prix doit être écarté pour des raisons évidentes. Il rappellerait de bien mauvais souvenirs aux consommateurs ultramarins. Lisser l augmentation des prix sur plusieurs mois, en faisant un effort particulier de pédagogie via le Comité de suivi que propose la mission d information, apparaît préférable. Les préfectures travaillent dès maintenant à plusieurs scenarii pour une mise en œuvre que la mission d information espère rapide. Proposition n 19 : Mettre en place rapidement un dispositif progressif de retour aux prix «réels» des carburants. C. DÉVELOPPER LES ÉNERGIES RENOUVELABLES 1. Le prix des énergies fossiles est voué à augmenter L augmentation régulière des prix du pétrole à compter de 2003 est allée de pair avec le développement économique rapide de la Chine, de l Inde et des autres pays émergents, dans un contexte de forte croissance mondiale. Elle s est accélérée en 2008 en raison d une poussée de fièvre spéculative qui s est rapidement éteinte avec la prise de conscience que le monde entrait en récession, à

220 89 commencer par les États-Unis, avec pour corollaire une diminution de la demande pour la première fois depuis Cependant, l effondrement du cours du baril jusqu à un plancher de 33,20$ le 15 janvier 2009 (à comparer aux 146,20$ atteints le 14 juillet 2008) ne doit pas faire illusion. Dès que la reprise économique fera sentir ses effets, la demande repartira à la hausse ; déjà, les divers plans de relance, notamment les 461 milliards de dollars du plan chinois, font sentir leurs effets, puisque le prix du baril est remonté autour de 65$ en juillet Lorsque la croissance mondiale sera revenue, la soif inextinguible de pétrole des grandes économies émergentes poussera les cours vers de nouveaux sommets, en raison notamment d une offre qui ne sera pas en mesure de suivre la demande. En effet, à court terme, l effondrement du prix du pétrole a gelé bon nombre d investissements des compagnies pétrolières, lesquels n étaient alors plus rentables. Lorsqu ils le redeviendront avec la hausse des cours, des années seront nécessaires avant qu ils se traduisent par un accroissement de l offre, seul à même de stabiliser les prix. Mais à plus long terme, c est la question de la disponibilité de la ressource qui est posée. Même si la question du «pic pétrolier» est controversée dans la communauté scientifique, il n en reste pas moins que les réserves de pétrole (et de gaz), créées il y a des centaines millions d années, ne sont pas inépuisables et qu un jour dont la date reste indéterminée arrivera où il n y aura plus de pétrole ni de gaz sur notre planète. De nouvelles découvertes de gisements, le progrès technique dans leur exploitation, des véhicules plus économes en carburant retarderont sans doute l échéance ; mais à terme, celle-ci est inéluctable. En outre, la contrainte environnementale pèse de plus en plus sur le prix des énergies fossiles. Le fait que celles-ci contribuent fortement à l effet de serre pousse les gouvernements à réfléchir à une «taxe carbone» qui renchériraient le prix de vente des carburants afin d orienter les acteurs économiques vers des comportements plus sobres et/ou des énergies alternatives. 2. Anticiper la fin des énergies fossiles en développant des énergies renouvelables Les départements d outre-mer sont soumis à une double contrainte : d une part, leur consommation d énergie augmente régulièrement (en particulier la consommation d électricité qui croît à un rythme bien plus rapide que celle de la métropole) et, d autre part, ils sont obligés, en l absence de ressources propres, d importer la totalité de leurs produits énergétiques d origine fossile, dont une large part (le fioul lourd) est d ailleurs utilisée à la production d électricité. Or, le prix des énergies fossiles est voué à augmenter fortement ; par conséquent, l activité économique des départements d outre-mer ne peut, à long terme, reposer exclusivement sur celles-ci ; les collectivités territoriales ont pris conscience des enjeux et toutes se sont mobilisées, à travers les Plans

221 90 énergétiques Régionaux pluriannuels de prospection et d exploitation des Énergies Renouvelables et d Utilisation Rationnelle de l ÉNERGIE (PRERURE) (1), afin de mettre les atouts de leurs territoires au service d une politique ambitieuse de développement des énergies renouvelables. L objectif économique de cette politique la réduction de la dépendance aux énergies fossiles afin d assurer la croissance à long terme se cumule en outre avec un objectif environnemental la réduction des émissions de gaz à effet de serre dont celles-ci sont responsables. Si des projets de géothermie et d utilisation de la biomasse sont à l étude (notamment à La Réunion), c est principalement dans le domaine de l énergie solaire qu a porté l essentiel des efforts. a) L énergie solaire : l avenir L énergie solaire est probablement l avenir dans les départements d outre-mer. Non seulement ils bénéficient toute l année d un fort ensoleillement, bien plus important qu en métropole, mais les investissements sont particulièrement rentables en raison des conditions de rachat de l électricité photovoltaïque par EDF (0,30 /kwh en application de l arrêté du 13 mars 2002) et de leur éligibilité au régime de défiscalisation de l article 199 undecies du code général des impôts. Dès lors, les investissements se sont multipliés ces dernières années afin d accroître la production d énergie d origine photovoltaïque, avec un effet d entraînement non négligeable sur l économie locale, notamment en matière d emplois. En décembre 2007, La Réunion s est ainsi dotée de la plus grande centrale photovoltaïque française, avec plus de panneaux répartis sur une surface de mètres carrés ; la centrale, installée sur les toits de la SAPRIM au Port, produira MWh d électricité par an. En 2008, une centrale encore plus grande (8 000 panneaux sur mètres carrés) a été inaugurée sur les toits de la SITAR à Saint-Pierre. Enfin, début 2009, Située sur les toits des bâtiments de la CILAM et de SODICO, une nouvelle installation photovoltaïque d'une capacité de 2 MW a été livrée, ce qui lui permettra à cette centrale de produire MWH par an, soit la consommation annuelle de foyers réunionnais et d'éviter le rejet de tonnes de CO2 dans l'atmosphère. En outre, en octobre 2007, M. Jean-Yves LANGENIER, Maire du Port, et M. Paul VERGES, Président de la Région ont signé l'officialisation du projet «Le Port, Ville Solaire» ( ), incluant notamment une unité de production d énergie solaire d une puissance de 30 MW. Au final, selon les chiffres de l Observatoire de l énergie de la Réunion, la puissance installée des sites (1) L article 50 de la loi d orientation pour l Outre-mer (loi n du 13 décembre 2000) prévoit l élaboration, l adoption et la mise en œuvre d un PRERURE par chacune des régions d outre-mer.

222 91 raccordés au réseau sur l île de La Réunion sera de 60 MW à fin 2009 (100 MW prévu fin 2010). Si La Réunion a, en matière de production d énergie photovoltaïque, une politique très ambitieuse (avec l objectif d une île dont 100 % de l énergie serait renouvelable en 2025), les autres départements d outre-mer ne sont pas moins actifs. En Guadeloupe, la centrale du Moule, première centrale photovoltaïque privée, a été inaugurée le 29 mai 2009, D une capacité initiale de 136 MWH par an, elle sera progressivement agrandie pour atteindre MWH/an en En Guyane, la première centrale photovoltaïque a été mise en service à Degrad-des- Cannes le 9 février 2009 permettra de produire 630 mwh d électricité et d éviter le rejet annuel dans l atmosphère de près de 450 tonnes de CO2. Enfin, l investissement en énergie solaire des particuliers est également encouragé. Les contribuables qui s équipent d un chauffe-eau solaire bénéficient d un crédit d impôt égal à 50 % de son coût (article 200 quater du code général des impôts). L incitation est même devenue une obligation Les chauffe-eau solaires, couvrant au moins 50 % des besoins, sont, en application du décret n du 17 avril 2009, désormais obligatoires lorsqu'un système de production d'eau chaude sanitaire est installé dans un logement neuf. b) L énergie éolienne : la contrainte des cyclones Autre atout des territoires d outre-mer, la présence des alizés qui balayent les territoires d'est en Ouest ; leur régularité est idéal pour l implantation de parcs éoliens, investissements également encouragés comme l énergie solaire fiscalement et via un prix de rachat de l électricité ainsi produite particulièrement favorable. Cependant, si quelques projets ont été menés à bien, notamment à La Réunion (centrale éolienne de la commune de Sainte Suzanne, dont la puissance atteint 3,85 MW) et surtout en Guadeloupe, le département le plus avancé dans ce domaine (l île de la Désirade est alimentée par une centrale éolienne depuis 1993), la Martinique n abrite qu une seule éolienne et la Guyane aucune. En effet, l un des obstacles au développement de l éolien est la récurrence des cyclones en région tropicale et subtropicale. Certes, il existe des modèles adaptés (mats haubanés basculants permettant de rabattre l éolienne) mais ce ne sont pas les plus performants. Actuellement, ne sont ainsi installées à La Réunion que des éoliennes de moyenne puissance (275 KW), bien que le PRERURE de la Réunion repose sur un objectif de 100 MW éoliens en c) Les biocarburants : la contrainte foncière Les centrales photovoltaïques et éoliennes produisent de l électricité ; or l essentiel des importations et des consommations d énergie fossiles est absorbé par le transport routier. L alternative à celles-ci pourrait être, comme en

223 92 métropole où leur incorporation dans les carburants est désormais obligatoire, le développement des biocarburants. Cependant, ceux-ci n ont pas, outre-mer, le même potentiel que l énergie solaire ou éolienne en raison de l exiguïté des territoires martiniquais, guadeloupéen et réunionnais (et, dans ce dernier cas, également de son relief). En revanche, la Guyane dispose des réserves foncières suffisantes pour produire, comme son voisin brésilien, de l éthanol à partir de la canne à sucre, à condition toutefois que soient assouplies les restrictions au défrichage dans ce département. Proposition n 20. Développer l énergie solaire outre-mer et expertiser les autres énergies renouvelables (biocarburants, géothermie, éolien). C est d ailleurs pour ces raisons, doublées de l absence, outre-mer, d installations de production de biocarburants, que ces départements ont été exonérés de la TGAP sur les carburants, applicable en métropole depuis le 1 er avril 2006, jusqu au 1 er janvier 2010 (article 19 de la loi de finances pour 2006). Les distributeurs de carburants outre-mer ne sont donc pas sanctionnés par une TGAP dissuasive s ils n incorporent pas, dans les carburants qu ils mettent à la consommation, le volume de biocarburants exigés par l article 266 quindecies du code des douanes. Presque quatre ans plus tard, la production de biocarburants n est pas plus développée et l échéance du 1 er janvier 2010 approche. L application automatique de la TGAP qui se profile aurait pour conséquence de renchérir encore le prix des carburants outre-mer ; dans ces conditions, la mission d information estime nécessaire de rendre cette taxe définitivement inapplicable dans les départements d outre-mer. Proposition n 21 : Supprimer l application dans les départements d outre-mer, prévues à compter du 1 er janvier 2010, de la TGAP relative aux carburants.

224 93 V. EXAMEN EN RÉUNION COMMUNE Lors de sa réunion du 23 juillet 2009, la commission des affaires économiques a examiné, conjointement avec la commission des finances, de l économie générale et du contrôle budgétaire, le rapport d information de la mission d information commune sur le prix des carburants dans les départements d outre-mer (DOM) (MM. Jérôme Cahuzac et Jacques Le Guen, rapporteurs). M. le président Patrick Ollier. La commission des finances et la commission des affaires économiques ont décidé conjointement de se réunir aujourd hui pour se prononcer sur la publication du rapport de leur mission d information commune sur le prix des carburants dans les DOM. Le choix de cette date vise à respecter l engagement pris au début des travaux de cette mission, que soient formulées avant la fin de la session, des propositions susceptibles de remédier à un problème dont les conséquences économiques et sociales ont été particulièrement graves dans l ensemble des départements d outre-mer. Ces propositions sont attendues par le Gouvernement qui doit prendre plusieurs décisions d ici la fin de l été. C est à La Réunion que ce problème a donné lieu aux premiers mouvements revendicatifs, en septembre 2008 ; ils se sont ensuite étendus à l ensemble des DOM à la fin de 2008 et au début de Ces mouvements ont trouvé leur origine dans les répercussions très tardives sur les prix des carburants à la pompe de l effondrement des cours mondiaux du pétrole après la flambée du début de l année Au début de cette année, j ai décidé de répondre favorablement aux demandes de Mme Christiane Taubira et de M. Alfred Almont tendant à créer une mission d information de la commission des affaires économiques sur cette question. C est bien volontiers que j ai accepté la demande de Mme Taubira que cette mission d information soit commune avec la commission des finances. Dans des délais relativement brefs, cette mission a accompli un travail important comportant en particulier une soixantaine d auditions dont la majorité a eu lieu dans les départements concernés. Ce travail débouche sur des propositions qui vont être présentées par les deux co-rapporteurs et qui revêtent un caractère définitif. Nos deux commissions se prononceront aujourd hui sur l autorisation de publier le rapport d information qui présentera ces propositions de manière détaillée. Je précise toutefois que cette publication, si elle est autorisée, n interviendra qu au cours de la première quinzaine du mois de septembre. Pour répondre à une préoccupation exprimée par Mme Christiane Taubira dans un courrier qu elle vient de m adresser, j indique enfin que si des membres de la mission d information souhaitent présenter des contributions, celles-ci seront bien entendu annexées à ce rapport. M. Michel Diefenbacher, président. Comme vient de le rappeler le président Patrick Ollier, les récents mouvements sociaux liés au problème du prix

225 94 des carburants dans les DOM trouvent leur origine dans une flambée du cours du pétrole sur le Brent puis dans le retard de la répercussion de l effondrement de ce cours sur le prix de l essence à la pompe. Le problème du prix des carburants revêt une particulière acuité dans ces départements même si les mouvements sociaux auxquels on vient d assister n ont pas tous eu la même ampleur qu en Guadeloupe. Cette sensibilité spécifique tient à l infériorité du niveau de vie des habitants de ces départements par rapport à ceux de la métropole, avec pour conséquence des dépenses de carburant y représentant une part plus importante du budget des ménages. Le système qui prévaut pour la fixation du prix des carburants est celui du contrôle administratif qui devrait théoriquement permettre une maîtrise de la situation. Or ce n est pas le cas comme le montre en particulier le récent rapport de l Inspection générale des finances et de l Inspection générale de l administration et du Conseil général des Mines. Ce rapport fait notamment ressortir, sur une longue période, un coût plus élevé des carburants dans les départements d outre-mer qu en métropole alors que la fiscalité qui les frappe y est moins lourde. Tout en indiquant que cette situation s explique en partie par des contraintes structurelles telles que l étroitesse des marchés, le même rapport met en évidence d autres motifs notamment liés à l organisation défectueuse du système de distribution. Sur le plan des principes, on peut y voir la preuve des défaillances de la réglementation administrative par rapport au jeu de la libre concurrence. Pour autant, il paraît difficilement envisageable que celle-ci soit mise en œuvre du jour au lendemain et il paraît préférable, au moins dans l immédiat, de maintenir le système actuel de réglementation en lui apportant de sensibles améliorations. J indique enfin que je donne mon assentiment à la procédure de publication du rapport d information proposée par le président Patrick Ollier. M. le président Patrick Ollier. Je donne maintenant la parole à MM. Le Guen et Cahuzac, leur laissant le soin d organiser la présentation de leurs propositions. M. Jacques Le Guen, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques. Je rappelle qu à la suite des événements survenus à l automne et en hiver derniers, vous avez, Monsieur le Président Ollier, en réponse à la demande de plusieurs députés ultramarins, pris l initiative de la création de la mission d information sur les prix des carburants dans les départements d outremer en y associant les deux commissions des affaires économiques et des finances. Il paraissait indispensable que le Parlement tente de cerner non seulement les mécanismes de formation des prix, mais aussi les causes plus profondes qui font l originalité de la chaîne du pétrole dans les DOM, en raison notamment des particularismes locaux.

226 95 Alors que le Gouvernement chargeait en décembre un groupe de hauts fonctionnaires appartenant à l inspection des finances, à l inspection générale de l administration et au conseil général des Mines d une mission d expertise et commandait à l Autorité de la concurrence un avis sur les pratiques concurrentielles dans ce secteur particulier, il nous appartenait de jeter sur cette délicate question un regard moins administratif, mais tout à la fois plus prospectif et plus politique. Malgré l urgence de la situation, il est apparu judicieux aux rapporteurs, en accord avec le président Patrick Ollier, de prendre le temps de la réflexion, de travailler sur le long terme et de tenter de faire coïncider la publication des propositions en cohérence avec l avancement des travaux des états généraux sur l outre-mer, de façon à compléter leur information et à éclairer les décisions politiques à venir. Notre rapport s articule autour de quatre parties principales : DOM, la première décrivant les spécificités des marchés des carburants dans les la deuxième, plus analytique, s efforçant de mettre à jour les dysfonctionnements des marchés des carburants, la troisième traitant les particularités propres à chaque département ; partie dans laquelle sont abordés les cas de la Société réunionnaise des produits pétroliers (SRPP) à La Réunion et de la Société anonyme de la raffinerie des Antilles (SARA) en Martinique, enfin une quatrième partie qui recense et argumente les propositions de la mission. Il nous est apparu nécessaire de rappeler en tout premier lieu que les marchés ultramarins sont des marchés de petite taille, mais où depuis peu, notamment pour la Guyane, s appliquent les spécifications réglementaires prévues par les normes européennes en matière de carburants ; normes particulièrement contraignantes visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à lutter ainsi contre le réchauffement climatique de la planète. Autre caractéristique commune aux quatre départements : l absence de concurrence réelle conférant au système de distribution de détail un rôle social particulier ; il n est pas rare que les stations-service, qui assurent un véritable service à la pompe, emploient, de ce fait, une dizaine de salariés, voire plus. L éloignement, les normes à respecter pour les carburants et le mode d approvisionnement par voie maritime expliquent notamment que les prix des carburants soient fixés administrativement. Ce sont en effet des arrêtés préfectoraux qui fixent un prix maximum des carburants sur lequel s alignent immanquablement les distributeurs de détail.

227 96 Les variations brutales des prix du baril, notamment la baisse enregistrée l année dernière, ont révélé les dysfonctionnements des marchés pétroliers ultramarins. En effet, le système de fixation des prix lié aux approvisionnements ne répercute qu avec retard les fluctuations des cours du brut. Face à une crise sociale dont le prix des carburants a été le catalyseur et qui s est propagée d un département à un autre (La Réunion dès septembre 2008, puis la Guyane, la Guadeloupe et la Martinique) les préfets ont procédé à une baisse unilatérale des prix des carburants, retenant d ailleurs un prix proche de celui du prix moyen en métropole, sans que celui-ci réponde à la moindre logique économique. Une étude approfondie des deux entreprises ultramarines, la SRPP pour La Réunion et la SARA pour les départements français d Amérique (DFA), fait apparaître une organisation complexe de structures d entreprises intégrées, dans lesquelles les compagnies pétrolières occupent une position dominante, dans une certaine opacité. La décomposition de la chaîne pétrolière met en évidence des relations complexes où les filiales des compagnies pétrolières se cèdent les unes aux autres les produits exploités, puis transportés, puis raffinés pour enfin qu une nouvelle filiale veille à sa distribution dans un réseau de stations-service à son enseigne données en location gérance selon des contrats aux clauses parfois sibyllines. À la suite des déplacements réalisés par la mission d information, il est apparu que chaque département avait ses spécificités propres. À La Réunion, la SRPP importe de Singapour des produits raffinés qu elle stocke pour le compte de ses actionnaires, qui sont également les grossistes distributeurs. Un examen des comptes de la société fait clairement apparaître que les bénéfices tirés de cette activité de stockage sont très élevés ; les marges des grossistes et des distributeurs de détail apparaissant elles aussi confortables. Enfin, il faut souligner que le coût du transport, du fait de la taille réduite des navires, dimensionnés aux accès du port, est relativement élevé. Toutefois, des travaux d aménagement du quai ont été entrepris afin d accroître le tonnage des approvisionnements sans que la SRPP ait réalisé les travaux nécessaires à sa mise en service. Les trois départements français d Amérique partagent un même problème, celui de ne pas respecter les obligations découlant de la réglementation européenne sur les volumes des stocks stratégiques pétroliers, les capacités de stockage étant insuffisantes. Cette situation est d autant plus préoccupante que cette réglementation va être prochainement rendue plus rigoureuse. En Martinique, la SARA, créée à l initiative du général de Gaulle en 1969 afin de garantir l approvisionnement des Antilles, constitue le pivot de la chaîne du pétrole. Comme pour la SRPP, ses actionnaires sont également les compagnies pétrolières qui organisent la distribution de gros et de détail dans leurs réseaux de

228 97 stations-service. Rien d étonnant donc que cette société ait focalisé les critiques et les accusations de «profitation» lors des événements qui ont paralysé les départements français d Amérique. Il faut bien reconnaître que, s agissant de ses activités, notamment l importation de produits raffinés, la SARA n a pas été d une transparence totale, alimentant ainsi les rumeurs à son encontre. La Guadeloupe, comme la Guyane, est approvisionnée en produits raffinés par la SARA. Contrairement à la Martinique, des distributeurs indépendants tentent de s implanter sans pour autant disposer de capacités de stockage, l ensemble des réservoirs implantés en Guadeloupe appartenant à la SARA, et le développement de nouvelles capacités se heurte à des difficultés liées à l insularité. Comme pour la Martinique, le réseau de stations-service présente une forte densité, à tel point que le secrétaire d État à l outre-mer a signé un protocole d accord avec les gérants visant à geler temporairement l ouverture de toute nouvelle station-service. Par ailleurs, les salariés des stations-service bénéficient d une convention collective départementale particulièrement favorable. Enfin, il convient de souligner qu en application du protocole d accord signé le 4 mars dernier entre le préfet, les élus territoriaux et les associations de consommateurs dont le LKP, l État s engage à mettre en place un nouveau dispositif de gestion des carburants assurant plus de transparence et tenant compte de la problématique des emplois dans les stations-service. De même, il entend suspendre dans la structure des prix des carburants la taxe sur les huiles usagées et «dans l hypothèse où la mission d inspection aura mis à jour la perception de sommes indues par l un ou l autre des acteurs de la filière pétrolière, ces sommes, susceptibles in fine d être reversées par ce ou ces acteurs, serviront à alimenter un fonds de formation professionnelle par la Région». Ce n est que récemment, en 2007, à la suite d une action en justice des concessionnaires automobiles, que les distributeurs guyanais qui s approvisionnaient précédemment à Trinidad et Tobago sont tenus de livrer des carburants aux normes européennes de ce fait plus onéreux et donc de s approvisionner auprès de la SARA. Un autre élément intervenant dans la cherté des prix des carburants est le poids d une fiscalité (la taxe spéciale sur les carburants) au taux maximum. Il faut toutefois convenir que les besoins en investissements publics sont considérables, en particulier en matière d infrastructures routières. La SARA n assure en Guyane qu une prestation de stockage dont elle a le monopole et qui est largement bénéficiaire. La mission d information a pu constater combien l incompréhension d un système de fixation des prix, au demeurant complexe, était à l origine du malaise exprimé tant par les élus et les acteurs économiques que par les consommateurs. Il lui est alors apparu que les mesures prioritaires à mettre en œuvre consistaient à établir les conditions d une transparence totale sur le régime des prix administrés afin de lever à l avenir toute forme d ambiguïté. C est dans cet esprit que la mission propose 21 mesures que mon collègue Jérôme Cahuzac et moi-même allons détailler.

229 98 La première proposition tend à créer un «comité de suivi» des prix des carburants permettant de consulter l ensemble des parties prenantes, préalablement à la publication de l arrêté de fixation des prix des carburants. En effet, il importe de mettre en place, dans chaque département une structure, associant toutes les parties prenantes : représentants des consommateurs, représentants de l État et des collectivités territoriales (régions et départements), et représentants des acteurs de la chaîne du carburant (compagnies pétrolières, gérants de stations-service, transporteurs). Il convient en effet de disposer d une instance multipartite, indépendante du préfet (contrairement aux observatoires des prix), dédiée spécialement à la question cruciale des prix des carburants, dont les membres auront pour mission de lever l opacité actuelle et de créer les conditions d une transparence totale sur l ensemble des procédures de fixation des prix. Ce «comité de suivi» donnera son avis préalablement à toute décision (nationale ou locale) touchant à la formation des prix des carburants, excepté la fiscalité qui restera de la responsabilité des collectivités territoriales. Ses avis seront rendus publics et annexés aux arrêtés préfectoraux de fixation des prix. Sa présidence sera confiée à une personne dont l indépendance ne saurait être mise en doute, par exemple un membre de l Autorité de la concurrence, appelé à présider les quatre «comités de suivi». La deuxième proposition a pour objet d imposer aux stations-service l affichage visible des prix administrés, avec la précision du «prix maximum». Le prix des carburants n est pas affiché dans les DOM. Le consommateur ignore donc qu il acquitte systématiquement le prix maximum autorisé. Rendre cet affichage obligatoire ainsi que celui du prix maximum autorisé pourrait se révéler susceptible de faire jouer un minimum de concurrence. Des différences de quelques centimes entre distributeurs concurrents ne devraient pas mettre en péril le modèle social protecteur que constitue le mode de commercialisation des carburants. La troisième proposition vise à recenser les cuves privées et à soumettre leur installation, à partir d une certaine capacité, à une autorisation administrative. Le stockage de produits pétroliers dans ces cuves privées constitue actuellement dans les DOM une solution adoptée par les particuliers et les entreprises, largement facilitée non seulement par les grossistes indépendants, mais également par les compagnies pétrolières. Le développement rapide de cette forme de stockage est mal perçu par les distributeurs de détail qui y voient une forme de concurrence déloyale. Cette forme de stockage est d ores et déjà réglementée et le stockage dans des cuves particulières doit répondre à des spécifications précises. Si les citernes particulières d un volume inférieur à litres ne font pas l objet de règles précises, tout stockage supérieur à ce volume doit obligatoirement répondre, en raison de sa dangerosité, à des normes de sécurité particulières et faire l objet d une déclaration en préfecture. Or, d après les informations recueillies, il semblerait qu il n existe, dans les DOM, aucun recensement officiel du nombre et de l emplacement de ce type de stockage. Compte tenu des risques élevés, il apparaît souhaitable que toute installation de cuve supérieure à

230 litres soit à l avenir soumise à une autorisation préalable délivrée après vérification de la prise en compte dans ses conditions d installation, des risques sismiques et climatiques. La quatrième proposition tend à obliger les compagnies pétrolières à transmettre aux directions régionales de la concurrence et de la répression des fraudes, les contrats signés avec les détaillants, permettant ainsi à l administration de vérifier qu ils ne comportent pas de clauses abusives. La mission a pu avoir accès à plusieurs contrats de location-gérance liant les gérants de stations-service aux compagnies pétrolières propriétaires. Ceux-ci présentent un diverses clauses dont la portée est particulièrement contraignante pour les locataires-gérants. Les compagnies ont, en effet, une forte propension à transférer aux gérants, une part importante des charges de maintenance des installations. Par ailleurs, les rédactions juridiquement sibyllines de certaines clauses pourraient laisser entendre que le montant du loyer réclamé tiendrait compte d activités annexes (boutique notamment) non liées directement à la distribution de carburants. Il apparaît donc important que les contrats et leurs éventuels avenants, soient transmis aux directions régionales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes afin de s assurer qu ils ne comportent pas de clauses exorbitantes. M. Jérôme Cahuzac, rapporteur au nom de la commission des finances, de l économie générale et du contrôle budgétaire. Les travaux de la mission d information se sont déroulés dans un laps de temps très réduit et ont été fort denses. De fait, sa création remonte au 18 février dernier, après les mouvements sociaux qui ont agité les DOM. Je rappelle que notre collègue Christiane Taubira avait demandé cette création dès le 5 décembre Si elle avait été entendue à l époque, nous n aurions pas été conduits à travailler dans des conditions aussi difficiles. Sur le fond, on constate que les responsabilités sont diluées entre tous les acteurs : tous se déclarent irresponsables, ce qui n empêche pas la concentration des profits. La cinquième proposition consiste à maintenir dans les DOM, un système d administration des prix des carburants et du gaz par le préfet. Il s agit, je le reconnais, d un système de prix administré et, sur ce point, mon avis diverge de celui du président Michel Diefenbacher. Cependant, je rappelle qu une amende de quarante millions d euros a été infligée par la justice à des compagnies qui s étaient livrées à des ententes sur les tarifs, cela démontre à l envi la nécessité d une maîtrise du système. La sixième proposition vise à simplifier la formule de prix afin d en éliminer les composants contestables, obsolètes ou redondants, par exemple la prise en compte du «coulage» lors du transport en mer. Ce critère est d autant moins pertinent que ce coulage survient, en fait, lors du transbordement au port.

231 100 La septième proposition consiste à lier le prix à la pompe des carburants à l évolution (à la hausse et à la baisse) du brut. À cet égard, je rappelle que le facteur déclenchant des mouvements de mécontentement a été le fait que les prix ont continué d augmenter à la pompe au moment même où celui du brut était à la baisse. Ce retard à la baisse a pour corollaire un retard à la hausse notamment dû à une instruction du ministre de l intérieur de l époque. Il faut donc vérifier le tarif à chaque livraison, il s agit là d un indispensable élément de transparence. M. Jacques Le Guen, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques. La huitième proposition consiste à engager une réflexion sur une éventuelle mutualisation des coûts du fret entre Antilles et Guyane. Le transport entre les deux départements antillais, très proches, fait déjà l objet d une mutualisation. Les consommateurs, la chambre de commerce et d industrie et les élus guyanais, partant du principe que l approvisionnement en carburants auprès de la SARA leur a été imposé et que l essentiel de l activité de raffinage profite principalement au développement économique de la Martinique, considèrent qu il y a lieu de mutualiser sur l ensemble des trois DFA le surcoût lié au transport, au titre de la solidarité entre les trois départements. Les populations antillaises voient dans cette solution une augmentation plus que probable du coût des carburants. En raisonnant par homothétie avec la situation en métropole, où les prix varient en fonction du coût du transport, il n y aurait pas lieu de donner suite aux demandes formulées par la Guyane. Par ailleurs, toute modification de la structure des prix des carburants ne manquera pas d avoir un impact réel sur les ressources financières des collectivités territoriales, leurs recettes fiscales étant étroitement liée aux prix de gros des produits pétroliers. Or certaines de ces collectivités doivent faire face à de lourds investissements liés à la réalisation d infrastructures éducatives, sociales et économiques. Une telle mutualisation entraînerait un surcoût de l ordre de centimes d euro dans les départements antillais, sans que cette estimation n ait fait l objet d une étude sérieuse. Avant de s engager éventuellement sur cette voie, il convient que le Gouvernement procède à une étude approfondie et objective des effets réels qu entraînerait une mutualisation des coûts de transports vers la Guyane et engage une concertation dépassionnée avec et entre les collectivités territoriales concernées. M. Jérôme Cahuzac, rapporteur au nom de la commission des finances, de l économie générale et du contrôle budgétaire. Cette mutualisation est légitime car une partie du surcoût résulte de l existence de la SARA, notamment à cause de la rémunération des quelques centaines d emplois qui y sont rattachés et qu il serait, au demeurant, bon de préserver. Demander aux Guyanais de payer pour la Martinique semble pour le moins délicat. En revanche, une mutualisation impliquerait un effort de la part des Antilles en faveur de la Guyane : il s agirait d une hausse de 17 centimes pour les Antilles et d une baisse de 40 centimes pour la Guyane. En tout état de cause, il est souhaitable de recourir à une politique volontariste afin de palier les difficultés rencontrées. À titre personnel, j y serais donc favorable.

232 101 M. le président Patrick Ollier. Les préoccupations exposées par M. Cahuzac sont parfaitement légitimes, cependant, je rappelle que le choix de la mission d information commune a été de ne pas supprimer la SARA, pour des raisons de maintien des emplois notamment. En revanche, et si cela peut vous agréer, le terme «éventuelle» pourrait être retiré de la proposition dans la mesure où, la semaine dernière, nous avons recueilli l assentiment de nos collègues ultramarins à ce sujet. M. Jacques Le Guen, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques. Je tiens à préciser qu il s agit de mutualiser les coûts du fret et non pas de la SARA. Nous avons toute latitude de conserver ou de retirer le terme «éventuelle». En ce qui concerne la neuvième proposition, il s agit de ne pas sacrifier l emploi et l outil industriel que représente la SARA à une baisse de prix immédiate. De fait, le rapport montre que le prix «sortie SARA» des carburants dans les DFA est plus élevé que celui d une raffinerie européenne standard. Cependant, supprimer cette structure reviendrait à rompre avec la politique d indépendance énergétique de ces parties du territoire national voulue par la France depuis le général de Gaulle. Il est vrai que le maintien de la SARA n est pas sans problème mais il constitue un élément stratégique en termes d emploi comme d indépendance. La dixième proposition vise à créer en Martinique, en s'appuyant sur les structures et les compétences acquises par la SARA, un pôle de compétitivité européen sur la recherche de normes applicables aux hydrocarbures, compatibles avec les exigences de la réduction des gaz à effets de serre. La SARA et la Martinique ont su développer un véritable savoir-faire dans le domaine du traitement des hydrocarbures, notamment pour parvenir à produire des carburants répondant aux spécifications des normes environnementales européennes. Les ingénieurs et techniciens de la SARA ont acquis de véritables compétences dans les adaptations technologiques indispensables à la compatibilité des carburants et la réduction des gaz à effet de serre. Le laboratoire de la SARA est intervenu dans l expertise de carburéacteur «non-conforme» livré en Guyane et la raffinerie a su trouver les solutions appropriées à son retraitement. Dans la zone géographique, au sens large, la SARA est le seul raffineur disposant d un savoir faire technologique en matière d adaptation de la production de carburants à la lutte contre le réchauffement climatique. Il importe donc de valoriser cette expérience et ce savoir. La création d un pôle de compétitivité de dimension européenne, centré sur la recherche et la mise au point de carburants d origine minérale susceptibles d atteindre les objectifs futurs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, constituerait une véritable vitrine des engagements européens en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique pour l ensemble du continent Nord et Sud américain. La onzième proposition tend à abaisser les droits de passage de la SRPP pour qu ils correspondent à une rentabilité maximale sur capitaux investis de

233 %. La mission s est fait communiquer les comptes de la SRPP. Ceux-ci font apparaître que cette société a dégagé une rentabilité financière de l ordre de 28 %, largement supérieure à celle pratiquée en Europe qui avoisine les 12 %. La douzième proposition consiste à créer une filiale dédiée au stockage avec prise de participation de l État, distincte de l activité raffinage de la SARA. Dans les DFA, les obligations relatives aux stocks stratégiques ne sont pas respectées et l accès au stockage pour les distributeurs indépendants n est pas garanti. La situation monopolistique de la SARA et l absence de la SAGESS (société anonyme chargée de mettre en œuvre les obligations à la charge du Comité Professionnel des Stocks Stratégiques Pétroliers) en constituent les principaux motifs. Il importe donc de remédier à cette situation, d autant que la réglementation européenne sur les stocks stratégiques a évolué à la hausse. Le rapport des Inspections recommande la filialisation de l activité stockage de la SARA. Celle-ci peut être envisagée sous réserve de l ouverture du capital de la future société à de nouveaux actionnaires. Il conviendrait que cette nouvelle société dispose d un panel d actionnaires important et diversifié, d autant que cette activité correspond par ailleurs à une mission d intérêt public. Ainsi, outre la SARA, l État et les collectivités territoriales, mais aussi les distributeurs indépendants et la SAGESS pourraient en constituer les principaux actionnaires. M. Jérôme Cahuzac, rapporteur au nom de la commission des finances, de l économie générale et du contrôle budgétaire. La treizième proposition envisage le maintien, autant que possible, des emplois dans les stations-service en refusant l automatisation complète des pompes. Il existe, en effet, un modèle social qui fait des stations-service des lieux de vie au sein desquels la population a pris l habitude de se retrouver. Les élus sont attachés à ce modèle social qui mobilise un personnel important. Dans ces conditions, l automatisation des pompes n est envisageable seulement que dans les points de vente excentrés ou la nuit. La quatorzième proposition devrait permettre aux préfets d autoriser certaines stations-service limitativement énumérées à déroger au prix maximum afin d assurer la continuité de l approvisionnement dans certaines régions isolées. Les conditions économiques de certaines stations justifient une marge pour le détaillant plus élevée qu ailleurs, en raison de frais de fonctionnement plus importants. Mais objectivement, cela n est pas valable pour toutes les stations et il devrait appartenir aux préfets de distinguer les points de vente autorisés à pratiquer des prix plus élevés et ceux ressortissant au droit commun. La quinzième proposition consiste à calculer la marge de gros de manière à ce qu elle garantisse une juste rentabilité aux compagnies pétrolières, à même de garantir la continuité de l approvisionnement des DOM. Cette marge est celle de l agent économique chargé d approvisionner les stations-service. Nous avons constaté des marges trop élevées, parfois supérieures à 20 %. Il s agit alors d une véritable rente et il n est pas normal qu elle soit prise en charge par le consommateur.

234 103 La seizième proposition entend limiter la durée des contrats d exclusivité entre les fournisseurs et les propriétaires de stations-service indépendantes et supprimer la clause donnant priorité au fournisseur pour le rachat du fond de commerce en cas de retrait du propriétaire. Il s agit d établir les conditions d un dialogue plus équitable. La dix-septième proposition vise à faciliter l accession à la propriété des locataires-gérants. Cette proposition est cohérente avec celle qui précède : elle est destinée à équilibrer le dialogue entre les détaillants et les grossistes, ces derniers possédant 80 % des stations. La dix-huitième proposition tend, si le prix le permet, à utiliser une partie des ressources finançant l aide à la cuve pour apurer le passif de l État vis-à-vis des compagnies pétrolières. Il y a une quinzaine de jours, la commission des finances a examiné un décret d avance qui avait notamment pour objet de verser 44 millions d euros aux compagnies pétrolières Total pour l essentiel. Si chacun s accorde sur la dilution des responsabilités, nous constatons en revanche une concentration des revenus. Il serait pour le moins curieux que ce système continue de fonctionner, d autant plus qu il contribue à creuser l endettement de notre pays. Nous proposons donc que la prime à la cuve soit destinée à apurer le passif de l État à l égard des compagnies pétrolières dont les revendications sont légitimes dans la mesure où la baisse des prix décidée autoritairement par les préfets n a pas respecté la loi. Au lieu de supprimer ce prélèvement, nous proposons donc de le maintenir au profit de l apurement des dettes publiques à l égard des compagnies pétrolières. Toutefois, si le prix du baril de brut devait augmenter, il appartiendrait à l État de trouver un autre système. La dix-neuvième proposition insiste sur la nécessité de mettre en place rapidement un dispositif progressif de retour aux prix réels des carburants. Tant que la formule de fixation des prix des carburants n est pas rénovée, l État est dans son tort à l égard des compagnies pétrolières et sa dette envers elles continue à gonfler. Il importe donc de revenir à plus transparence. M. Jacques Le Guen, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques. Enfin, soucieuse de préserver l environnement tout en explorant les voies énergétiques du futur susceptibles d assurer un développement économique harmonieux des DOM, la mission d information fait des sources d énergie renouvelables un axe important de la politique énergétique à mettre en œuvre à partir des potentialités existantes. Le président de la région de La Réunion, rencontré il y a peu, est très volontariste sur ce point d où une vingtième proposition encourageant le développement de l énergie solaire outre-mer et visant à expertiser les autres énergies renouvelables (biocarburants, géothermie, éolien). Face au développement de la demande énergétique, notamment en électricité, l énergie solaire représente sans conteste une voie d avenir dans les départements d outre-mer. Il convient de faciliter la production d énergie d origine photovoltaïque qui aura un effet d entraînement non négligeable sur l économie locale, notamment en matière d emplois. Autre atout des DOM, la

235 104 présence des alizés qui balayent les territoires d'est en Ouest. Leur régularité est idéale pour l implantation de parcs éoliens. Si l exiguïté des territoires martiniquais, guadeloupéen et réunionnais ne permet pas d envisager la production de biocarburants, en revanche, la Guyane dispose des réserves foncières suffisantes pour produire, comme son voisin brésilien, de l éthanol à partir de la canne à sucre, à condition toutefois que soient assouplies les restrictions au défrichage dans ce département. M. Jérôme Cahuzac, rapporteur au nom de la commission des finances, de l économie générale et du contrôle budgétaire. La vingt et unième et dernière proposition tend à supprimer l application dans les départements d outre-mer, prévue à compter du 1 er janvier 2010, de la TGAP relative aux carburants. Cette taxe qui doit inciter à produire des biocarburants, fait l objet d une exemption jusqu à la fin de l année pour les DOM, dans la mesure où ces collectivités n en produisent pas. Or, au 1 er janvier 2010, elles n en produiront pas davantage. Nous proposons donc de créer une 487 ème niche fiscale qui viendra s ajouter aux 486 autres. M. le président Patrick Ollier. Je vous remercie du travail réalisé. Contrairement à ce qui a pu être dit, nous n avons pas travaillé dans la précipitation. Bien au contraire, nous pourrions même soutenir que nous n avons pas travaillé assez vite. La demande de création de cette mission est intervenue le 5 décembre Entre cette date et le mois de février 2009, la suspension des travaux de l Assemblée nationale n a pas permis à la mission de se mettre plus tôt à la tâche. Je vous rappelle que le président Jean-Marc Ayrault a fourni sa réponse à la fin du mois de janvier seulement. Au terme de cette mission, j ai la conviction que s il y avait eu plus de transparence ce que nous demandons pour l avenir il n y aurait pas eu les incidents auxquels nous avons assisté. Si nous proposons la création de comités de suivi, c est parce que les observatoires des prix ont échoué dans leur mission. Il faut donc les supprimer pour les remplacer par d autres instances. Les comités de suivi auront notamment pour objet de justifier auprès de la population les hausses ou les baisses des prix. Par ailleurs, je vous rappelle que l ensemble des pays d Amérique du nord et des Caraïbes ont annoncé leur volonté de se rapprocher étroitement des normes européennes, plus contraignantes sur le plan environnemental, d ici trois ans. Cette décision pose la question du devenir de la raffinerie de la SARA à la Martinique qui est la plus petite du monde. Demander une dérogation pour la Guyane soulève un problème pour notre pays qui est en pointe en matière de lutte contre la pollution et qui a contribué à l adoption de ces normes. Je suis convaincu que nous ne devons pas demander de dérogation. M. Jacques Le Guen, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques. Il convient, en effet, de souligner les interrogations qui

236 105 pèsent sur le devenir de la SARA qui sera bientôt concurrencée notamment par une raffinerie moderne en projet au Suriname. C est la raison pour laquelle nous demandons que la SARA soit placée au cœur d un pôle de compétitivité lié au traitement des carburants qui pourrait être créé à la Martinique. M. Jean-Claude Lenoir. Je ferai plusieurs observations. Tout d abord, les propositions me semblent en adéquation avec la situation actuelle, notamment avec les prix à la pompe dans les DOM. Mais ce qui m a frappé, c est que le problème est avant tout guyanais car en Guadeloupe, Martinique et à La Réunion, les prix ne m ont pas semblé exorbitants. D autre part, personne ne contrôle vraiment la formule des prix réglementés ; or celle-ci comprend des éléments obsolètes. Par ailleurs, le prix est le résultat d une agrégation de calculs émanant de diverses administrations qui ne se coordonnent pas. S agissant des dérogations, je suis frappé par le décalage avec ce que nous ont dit nos interlocuteurs. Sur la mutualisation, il faut absolument la demander car les profits de certains ne doivent pas être payés par ceux qui payent plus cher en Guyane. Sur le fret, en Guyane, il existe un seul bateau dédié à ce transport, j estime qu il en faudrait davantage. Enfin, les prix de l électricité dans les DOM sont les mêmes qu en Métropole. La compensation est assurée par la contribution au service public de l électricité (CSPE). Le prix de l électricité augmentant avec le prix du fioul à la sortie de la raffinerie, il y a un risque que le coût de la baisse du carburant dans les DOM soit supporté par les consommateurs d électricité en métropole. M. Michel Diefenbacher, président. Je souhaiterais réagir aux propos de M. Lenoir. Tout d abord, le problème n est pas uniquement guyanais, car aux Antilles la fiscalité est de 40 à 50 % inférieure à celle de métropole, ce qui devrait avoir pour effet des prix largement inférieurs. Or, il y a des coûts structurels : rentabilité, éloignement, mais surtout marges indues qu il faudrait combattre. Il faut être en état de mesurer tous les coûts entre la livraison du bateau et la livraison au consommateur. Je voudrais dire un mot de la mutualisation particulièrement en Guadeloupe et en Martinique. Le consommateur martiniquais paie une part du coût du fret vers la Guadeloupe. Il serait souhaitable d étendre cette mutualisation vers la Guyane dans le cadre d un accord sur la mutualisation du fret entre Guadeloupe, Martinique et Guyane mais les élus guyanais freinent, soucieux de protéger leur département contre les importations antillaises. Il faudrait leur lancer un appel à la cohérence. M. le président Patrick Ollier. La taxe spéciale sur les carburants en Guyane est plus élevée qu aux Antilles. Il s agit d un choix des autorités locales pour dégager des marges de manœuvre, afin d accorder des subventions aux communes et pallier les insuffisances d une DGF défavorable.

237 106 Le rapport doit être publié d ici le mois de septembre, si la commission donne son autorisation, je vous suggère d ici là de vous rapprocher des rapporteurs afin d approfondir cette question avec eux. M. Louis-Joseph Manscour. Je félicite les membres de la mission pour la qualité du travail accompli. Je suis aujourd hui le seul représentant des DOM présent en commission ; toute mission d information qui contribue à informer mes collègues de l hexagone des problématiques ultramarines me paraît positive. Les rapporteurs de la mission ont rappelé d importants éléments de chronologie : leurs travaux ont débuté au début du mois de février, tandis qu une mission d inspection diligentée par le Gouvernement avait commencé à travailler dès la fin du mois de décembre. La grève avait quant à elle commencé au début du mois de février. Dans le cadre du pré-rapport des inspections, le secrétaire d État alors chargé de l outre-mer avait évoqué «l enrichissement sans cause des compagnies pétrolières», n excluant pas «des actions judiciaires de l État contre elles». La nouvelle secrétaire d État à l outre-mer, Mme Marie-Luce Penchard, a déclaré fort imprudemment, de mon point de vue, envisager une hausse des prix de l essence, hausse qui pourrait avoisiner les vingt centimes d euros par litre en Guyane. Pourtant le rapport de la mission des inspections soulignait que «les services de l État sont incapables de justifier la base de calcul sur laquelle repose l évaluation des prix». Cinq mois après, ce constat est toujours valable, et on nous annonce une nouvelle hausse des prix! La Secrétaire d État nous informe du lancement d une campagne d explication qui suivra cette augmentation des prix. C est dans l ordre inverse qu il faudrait procéder! Je crains que cela ne nous expose à de nouvelles manifestations de mécontentement. Pour rétablir la confiance, il est indispensable d établir la transparence des prix, tout le reste n est que balivernes. L État prévoit d affecter quarante-quatre millions d euros pour combler le manque à gagner de la SARA, et ce alors même que règne l opacité sur le mode de formation des prix. Cette contradiction, nos populations ne la comprennent pas. M. le président Patrick Ollier. J ai récemment rencontré Mme Penchard et je lui ai proposé la création d un comité expérimental de suivi. À l'issue des travaux de ce comité, une décision pourrait être prise. Je désapprouve les déclarations qui ont été faites. M. Hervé Mariton. Je remercie la mission pour son travail, et m associe à la question posée par Louis-Joseph Manscour, qui est essentielle. Sur le sujet de la fixation du prix, nous avons bien compris les écueils du mode de calcul actuel, mais quelle serait selon vous la bonne formule? S agissant de la transparence dans la formation des prix, le débat sur le lissage à la hausse et le lissage à la baisse est un débat qui n est pas propre à l outre-mer. La question de

238 107 la transparence des prix et celle de la juste définition du prix ne se confondent d ailleurs pas. Les deux rapporteurs ont tenu des propos qui n étaient pas exactement identiques : M. Le Guen a estimé que le prix affiché doit être le prix maximum, M. Cahuzac a moins insisté sur ce point. Quelle est la position de la mission sur ce sujet? Estime-t-elle qu il existe un espace de concurrence à faire prospérer? Estil possible d encourager la concurrence à la baisse, même modeste, ou cela lui paraît-il impossible? S agissant de la question du stockage en cuve privée, il existe un petit espace de concurrence qui a fini par s introduire. Est-ce cette forme de stockage que le rapport propose de supprimer? Si oui, une plus grande réglementation du stockage, ne va-t-elle pas réduire cet espace de concurrence? Vous employez par ailleurs le terme de «mutualisation», qui ne me paraît pas dépourvu d ambiguïté, ambiguïté qui concerne le fret et la question des coûts industriels de la SARA. Nous subissons en la matière les conséquences de l emploi du pluriel «les outre-mer», car si l on calcule l impact positif ou négatif dans chaque département, on entretient une méfiance généralisée qui me paraît redoutable pour l avenir. En fait de mutualisation, c est davantage de répartition des coûts qu il s agit, et je ne suis pas certain que l on mesure bien ce que cela signifie. Si la République demande à chaque collectivité ultra-marine de s appliquer un tarif en fonction de ces coûts, où va-t-on? Cela ne veut toutefois pas dire que je sous-estime le problème spécifique de la Guyane, qui exige une solution appropriée. M. François Goulard. Je dois vous faire part de ma perplexité. Le sujet que nous traitons constitue une démonstration du lien entre économie administrée et rentes scandaleuses. Quand on évoque une rentabilité de l ordre de 28 %, que l on se propose de ramener aux alentours de 12 %, tout cela sans risque, on est confronté à un exemple particulièrement éloquent de l inefficacité de l économie administrée et de la protection qu elle confère à la rente. Je me demande si l outremer ne tirerait pas un grand bénéfice d une libéralisation que nous avons pratiquée avec un certain succès dans l hexagone, même si celle-ci comporterait sans doute des inconvénients pour un petit nombre de personnes intéressées. M. Jérôme Cahuzac, rapporteur au nom de la commission des finances, de l économie générale et du contrôle budgétaire. En réponse à M. Lenoir, je tiens à préciser que le problème du coût du carburant n est pas seulement guyanais : il est principalement guyanais et réunionnais, ces deux départements ayant été les plus affectés par la forte hausse des prix enregistrée l année dernière. EDF est en position de force car il s agit du seul client susceptible d acheter le produit de résidu de raffinage qu il utilise pour faire fonctionner ses

239 108 centrales électriques. Par ailleurs, je fais confiance au sens de la stratégie bien connu de son président pour négocier les tarifs à son avantage. On a pu s étonner de l éventualité de suites judiciaires qui pourraient être engagées par des compagnies pétrolières. Mais les acteurs économiques ne font que demander l application des formules édictées par l État, même si les services préfectoraux, principalement pour des raisons d effectifs, sont dans l incapacité de procéder à une analyse économique des éléments de fixation des prix. Dans certains départements, un seul fonctionnaire (pas toujours à temps plein) gère cette question. Nous avons constaté que les préfets signent les arrêtés de fixation des prix en appliquant mécaniquement la formule sans aucune analyse, ni esprit critique. La mission propose notamment de simplifier et d actualiser la formule de prix en supprimant les éléments contestables, obsolètes ou redondants. À titre d exemple, il s agit des éléments relatifs au coulage, ou les références au brut acheté à Trinidad et au Surinam. Elle propose également de revoir les modalités de calcul du premium perçu par les acheteurs de brut. Nous nous sommes posé la question d une libéralisation des prix qui conduirait incontestablement à une baisse par le jeu de la concurrence. Mais une telle évolution aboutirait à la remise en cause d un modèle social auquel nos compatriotes d outre-mer sont profondément attachés. Elle se heurterait à une totale hostilité des élus locaux, tous favorables au maintien de prix administrés. Nous ne parviendrons pas à obtenir de concurrence en matière de stockage en raison de la lourdeur du coût des investissements. Enfin le système administré n est certes pas satisfaisant mais, par analogie à ce que disait Winston Churchill, c est le pire des systèmes à l exception de tous les autres. M. Jacques Le Guen, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques. En réponse à M. Jean-Claude Lenoir, je dirais, s agissant du fret, que nous avons obtenu du président de la SOCATRA, avec qui nous nous en sommes longuement entretenus, des garanties quant au respect de la procédure des appels d offre pour la passation des marchés. De même, il paraît sérieusement envisageable que le coût du fret soit appelé à diminuer dans un avenir proche tout en laissant subsister des marges significatives pour les armateurs. J approuve, sur le plan des principes, le propos de notre collègue concernant les marges «scandaleuses» des compagnies pétrolières. Pour autant, il convient de mesurer les conséquences catastrophiques d une cessation d activité de ces compagnies dans les DOM qui serait motivée par l absence de rentabilité des marchés en cause. Le régime d autorisation que nous proposons d instaurer pour l installation des cuves privées d une capacité supérieure à litres répond à des exigences de sécurité indispensables compte tenu des risques cycloniques et sismiques élevés

240 109 dans les territoires concernés. Notre proposition relative à la filialisation de l activité de stockage correspond, quant à elle, à la nécessité d accorder à l État un nécessaire droit de regard. L annonce d une hausse brutale des prix des carburants, de 20 centimes par exemple, serait à mes yeux tout à fait inadéquate et la progression vers des prix économiquement «réalistes» ne peut être que progressive comme le préconise la mission d information. J évoquerai enfin une exigence d ordre social en ce qui concerne la question des personnels des stations-service. L emploi d un personnel relativement nombreux par certaines d entre elles évite à une partie de ces salariés de connaître le chômage auquel les condamnerait presque inévitablement le passage à un système de «self-service», compte tenu notamment du contexte économique. M. le président Patrick Ollier. Je souhaiterais conclure nos travaux en insistant sur le fait que les exigences liées à l aménagement du territoire ont été un élément essentiel de notre démarche et qu il ne peut, à mon sens, en aller autrement dans des territoires aussi «contraints» sur les plans démographique et géographique que le sont les DOM. Le rôle de l État est déterminant pour répondre à ces exigences et il l a par exemple exercé, notamment à mon initiative, pour d autres territoires «contraints» tels les zones de revitalisations rurales. On ne peut s en remettre en l occurrence au jeu de la libre concurrence. Je vous invite maintenant à autoriser la publication du rapport d information sur le prix des carburants dans les départements d outre-mer en vous précisant à nouveau que ce rapport ne sera publié qu au début du mois de septembre mais que les propositions qu il contient, et qui vous ont été présentées aujourd hui, revêtent un caractère définitif. La commission des affaires économiques et la commission des finances, de l économie générale et du contrôle budgétaire ont ensuite autorisé la publication du rapport d information sur le prix des carburants dans les départements d outre-mer.

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242 111 SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS DE LA MISSION Proposition n 1 : Créer un comité de suivi des prix des carburants permettant de consulter préalablement l ensemble des parties prenantes, préalablement à la publication de l arrêté de fixation des prix des carburants. Proposition n 2 : Imposer aux stations services l affichage visible des prix administrés, avec la précision du «prix maximum». Proposition n 3 : Recenser les cuves privées et soumettre leur installation, à partir d une certaine capacité, à une autorisation administrative. Proposition n 4 : Obliger les compagnies pétrolières à transmettre aux directions régionales de la concurrence et de la répression des fraudes les contrats signés avec les détaillants afin qu elles vérifient qu ils ne comportent pas de clauses abusives. Proposition n 5 : Maintenir dans les départements d outre-mer un système d administration des prix des carburants par le préfet. Proposition n 6 : Simplifier la formule de prix afin d en éliminer les composants contestables, obsolètes ou redondants. Proposition n 7 : Lier le prix à la pompe des carburants à l évolution (à la hausse comme à la baisse) du cours du pétrole sur les marchés internationaux. Proposition n 8 : Engager une réflexion sur une éventuelle mutualisation des coûts du fret entre Antilles et Guyane. Proposition n 9 : Conforter la SARA, pour ne pas sacrifier l emploi et l outil industriel qu elle représente à une baisse de prix immédiate. Proposition n 10 : Créer en Martinique, autour de la SARA et en s'appuyant sur ses structures et ses compétences, un pôle de compétitivité européen sur la recherche de normes applicables aux hydrocarbures, compatibles avec les exigences de la réduction des gaz à effets de serre. Proposition n 11 : Abaisser les droits de passage de la SRPP pour qu ils correspondent à une rentabilité maximale sur capitaux investis de 12 %. Proposition n 12 : Créer une filiale dédiée au stockage avec prise de participation de l État, distincte de l activité raffinage de la SARA.

243 112 Proposition n 13 : Maintenir autant que possible les emplois de pompistes dans les stations-service en refusant leur automatisation. Proposition n 14 : Permettre au préfet d autoriser certaines stationsservice limitativement énumérées à déroger au prix maximum afin d assurer la continuité de l approvisionnement dans certaines régions isolées. Proposition n 15 : Calculer la marge de gros de manière à ce qu elle garantisse une rentabilité suffisante aux compagnies pétrolières, à même de garantir la continuité de l approvisionnement en carburant et en gaz des départements d outre-mer. Proposition n 16 : Limiter la durée des contrats d exclusivité entre les fournisseurs et les propriétaires de stations-service indépendantes et supprimer la clause donnant priorité au fournisseur pour le rachat du fond de commerce en cas de retrait du propriétaire. Proposition n 17 : Faciliter l accession à la propriété des locatairesgérants. Proposition n 18 : Si le prix du pétrole le permet, utiliser une partie du produit du prélèvement finançant l aide à la cuve pour apurer le passif de l État vis-à-vis des compagnies pétrolières. A défaut, augmenter la taxe à due concurrence. Proposition n 19 : Mettre en place rapidement un dispositif progressif de retour aux prix «réels» des carburants. Proposition n 20 : Développer l énergie solaire outre-mer et expertiser les autres énergies renouvelables (biocarburants, géothermie, éolien). Proposition n 21 : Supprimer l application dans les départements d outre-mer, prévues à compter du 1 er janvier 2010, de la TGAP relative aux carburants.

244 113 LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA MISSION I. Lors de réunions à Paris Mme Anne Bolliet, inspecteur général des finances, chef de la mission interministérielle sur les prix des carburants outre-mer M. Jean-Guy de Chalvron, inspecteur général de l Administration M. Bruno Parent, directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), au ministère de l Économie, de l Industrie et de l Emploi M. Laurent Prévost, directeur de cabinet de M. Yves Jégo, secrétaire d État à l outre-mer Mme Christine Buhl, secrétaire général adjointe du secrétariat général des affaires européennes M. Richard Samuel, coordonnateur national pour les États généraux de l outremer M. Jérôme Fournel, directeur général des douanes et droits indirects Mme Virginie Beaumeunier, rapporteur général de l Autorité de la concurrence et M. Thierry Dahan, rapporteur de l enquête menée par l Autorité sur les prix des carburants dans les DOM M. Francis Jan, directeur spécialités et marketing, et M. Jacques de Naurois, directeur des relations institutionnelles du groupe Total Mme Joëlle Prévôt-Madère, présidente de la CGPME Guyane M. Fernand Bozzoni, président de la Socatra M. Jean-Marc Tenneson, directeur général du Comité Professionnel des Stocks Stratégiques Pétroliers (CPSSP). Par ailleurs, une réunion de la Mission avec l ensemble des députés des départements d outre-mer a eu lieu le mercredi 15 juillet 2009.

245 114 II. Au cours des déplacements de la mission LA RÉUNION (4-5 mai) M. Theuil, secrétaire général de la préfecture M. Paul Vergès, président du Conseil régional, hôtel de Région, le Moufia Mme Nassimah Dindar, présidente du Conseil général, Palais de la Source M. Cherrier, directeur départemental de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes M. Bonhomme, directeur général des douanes M. Mondon, président du Conseil économique et social régional M. Magamootoo, président de la Chambre de commerce et d industrie M. Minatchy, président de la Chambre d agriculture M. Coupu, directeur régional des affaires maritimes Mme Musard, vice-présidente de la Chambre des métiers et de l artisanat M. Ardin, directeur régional de l industrie, de la recherche et de l environnement, hôtel de la préfecture M. Enilorac, président du comité des pêches M. Briand, syndicat des armements réunionnais de pêche palangrière pélagique et M. Lauri, syndicat des armements réunionnais des palangriers M. Abzizi, directeur général de la SRPP et visite de la SRPP M. Bodilis, directeur général de Total Réunion Mme Venis, responsable de Petradec M. d Abadie, président de Tamoil pour deux membres de la délégation M. Maziaux, président de Caltex pour deux membres de la délégation MM. les représentants des organisations de transports routiers MM. les rapporteurs de l atelier formation des prix des états généraux. GUYANE (24-26 mai) M. Daniel Ferey, préfet, ainsi que MM. les directeurs des services régionaux (DRIRE, DRCCRF) M. Antoine Karam, président du Conseil régional M. Tien Liong, président du Conseil général M. Adrien Aubin, président du MEDEF Guyane

246 115 M. Ringuet, Association de consommateurs «Contre la vie chère» M. Liabaste, Association des «Consommateurs en colère» M. Madeleine, maire de Sinamary, représentant M. le Président de l Association des maires M. Peru Dumesnil, directeur de Texaco Guyane Mme Desert, M. Ho a Chuck, Syndicat des Gérants de stations-service CGPME à la préfecture MM. Mangal et Sianï, présidents syndicats de transporteurs M. Le Pelletier, président de la CCI de Guyane MM. les membres de l atelier formation des prix des états généraux et M. Budoc, préfet coordinateur des états généraux. MARTINIQUE (26-28 mai) M. Ange Mancini, préfet de Martinique M. Alfred Marie-Jeanne, président du Conseil régional, député de la Martinique M. Claude Lise, président du Conseil général M. Serge Letchimy, député de la Martinique M. Jean-René Vacher, secrétaire général de la préfecture M. Maurice Tubul, secrétaire général aux affaires régionales M. Thierry Leconte, DRIRE M. Roland Aymerich, DRCCRF, M. Jean Tibilan, DDCCRF, et M. Thierry Zennaro, inspecteur expert en charge du dossier carburants à la DRCCRF M. Michel Sennelier, directeur interrégional des douanes et droits indirects Antilles-Guyane M. Philippe Troniou, chef du Service des politiques interministérielles et de la solidarité M. Claude Pompière, président de la CCIM M. Michel Charton, directeur général de la SARA, M. David Marion, futur directeur, M. André Armougon, secrétaire général de la SARA, M. André Deelstra, directeur financier de la SARA M. Jean-Claude Ouka, Collectif des carburants M. Philippe Bourgeois, PDG de Total Caraïbes, président du syndicat des pétroliers Mme Monrose, président du syndicat des distributeurs (stations-service)

247 116 M. Raphaël Bordelais, représentants des activités de transport d hydrocarbure M. André Kiener, directeur de EDF Martinique Mme Marie, association de consommateurs GUADELOUPE (28-29 mai) M. Nicolas Desforges, préfet de Guadeloupe M. Victorin Lurel, président du Conseil régional, député de la Guadeloupe MM. les représentants de la DRIRE et de la DDCCRF M. le président du CESR MM. les représentants des syndicats patronaux UDE-MEDEF, CGPME MM. les présidents des chambres consulaires (CCI, CA) MM. les représentants des distributeurs indépendants CAP, WIPCO, GPC MM. les représentants du syndicat des gérants de stations-service OPGSS M. Elie Domota et une délégation du LKP MM. les représentants des associations de consommateurs UDCLCV, UDAF MM. les représentants des organisations de transporteurs.

248 Annexe 1 d Décret n du 8 novembre 2010 réglementant les prix des produits pétroliers et du gaz de pétrole liquéfié dans le département de La Réunion

249 .. 10 novembre 2010 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 25 sur 185 Décrets, arrêtés, circulaires TEXTES GÉNÉRAUX MINISTÈRE DE L ÉCONOMIE, DE L INDUSTRIE ET DE L EMPLOI Décret n o du 8 novembre 2010 réglementant les prix des produits pétroliers et du gaz de pétrole liquéfié dans le département de La Réunion NOR : ECEC D Publics concernés : professionnels du secteur pétrolier, consommateurs finals de produits pétroliers et gaziers. Objet : définition des règles de fixation des prix des produits pétroliers et gaziers dans le département de La Réunion. Entrée en vigueur : immédiate. Notice : les restrictions de concurrence constatées dans la filière ont conduit, à partir de 1986, à administrer les prix des principaux produits pétroliers et gaziers approvisionnant le département de La Réunion. Le décret actualise ce cadre de prix pour une réglementation plus précise et une meilleure information des parties prenantes. Références : les textes modifiés par le présent décret peuvent être consultés, dans leur rédaction issue de cette modification, sur le site Légifrance ( Le Premier ministre, Sur le rapport de la ministre de l économie, de l industrie et de l emploi, Vu le code de commerce, notamment son article L ; Vu le décret n o du 17 novembre 1988 modifié réglementant les prix de certains produits dans le département de La Réunion ; Vu le décret n o du 2 mai 2007 relatif à la création d un observatoire des prix et des revenus en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon ; Vu les avis de l Autorité de la concurrence en date du 3 février et du 28 juillet 2010 ; Vu la saisine du conseil général de La Réunion en date du 29 juillet 2010 ; Vu l avis du conseil régional de La Réunion en date du 10 août 2010 ; Le Conseil d Etat (section des finances) entendu, Décrète : CHAPITRE I er Dispositions relatives aux prix des produits pétroliers et gaziers Art. 1 er. I. A La Réunion, les prix des produits pétroliers et gaziers suivants sont réglementés : a) Supercarburants sans plomb et gazoles ; b) Fioul domestique ; c) Pétrole lampant ; d) Superéthanol ; e) Gaz de pétrole liquéfié. II. Pour chacun des produits énumérés au I, le préfet fixe par arrêté : a) Le prix maximum, hors taxes, des importations, hors passage en dépôt ; b) Le prix maximum de passage en dépôt, hors taxes, pour les produits pétroliers, et le prix maximum de passage en dépôt et d embouteillage, toutes taxes comprises, pour les produits gaziers ;

250 .. 10 novembre 2010 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 25 sur 185 c) Le prix maximum, toutes taxes comprises, de distribution au stade de gros, ainsi que la marge maximale correspondante ; d) Le prix maximum, toutes taxes comprises, de distribution au stade de détail, ainsi que la marge maximale correspondante. Art. 2. Les prix des importations mentionnés à l article 1 er sont fixés le premier jour de chaque mois. Ils tiennent compte : a) Du coût moyen des produits importés, calculé en fonction des cotations de référence sur les zones effectives d approvisionnement, franco à bord, et du cours moyen du dollar ; les coûts moyens sont calculés sur les quinze premiers jours ouvrés et cotés du mois précédent ; les cotations de référence sont celles publiées par une société de cotation désignée par le préfet, et exprimées en dollars ; le cours du dollar est le cours publié au Journal officiel de la République française ; b) Du coût des assurances et du fret ; c) Des coûts pertinents et dûment justifiés des entreprises concernées par l importation, dont l évaluation peut être modifiée une fois par an, en fonction de l évolution de ces coûts, ainsi que des efforts de productivité réalisés par ces entreprises ; une modification supplémentaire peut intervenir dans l année en cas de circonstances exceptionnelles. Art. 3. Les prix maximum de passage en dépôt et d embouteillage des produits, mentionnés à l article 1 er, peuvent être modifiés une fois par an, pour tenir compte de l évolution des coûts pertinents et dûment justifiés, ainsi que des efforts de productivité, des entreprises concernées ; une modification supplémentaire peut intervenir dans l année en cas de circonstances exceptionnelles. Art. 4. Les prix maximum de distribution, toutes taxes comprises, au stade de gros et de détail des produits, mentionnés à l article 1 er, sont modifiés pour tenir compte : a) Le premier jour de chaque mois, des modifications des prix des importations effectuées en application de l article 2 ; b) Une fois par an, des modifications des prix de passage en dépôt et d embouteillage effectuées en application de l article 3 ; c) A tout moment, des variations des droits et taxes assis sur ces produits ; d) Des modifications des marges maximales au stade de gros et de détail, lesquelles peuvent intervenir une fois par an, en fonction de l évolution des coûts pertinents et dûment justifiés, ainsi que des efforts de productivité, des entreprises concernées ; une modification supplémentaire peut intervenir dans l année en cas de circonstances exceptionnelles. Il est tenu compte au stade de gros de l incidence de la dilatation des fluides due à la température ambiante. CHAPITRE II Dispositions relatives à l information du public Art. 5. I. Une fois par an, le préfet présente à l observatoire des prix et des revenus instauré par le décret du 2 mai 2007 susvisé, les évolutions de prix découlant de la mise en œuvre du présent décret, au regard des variations des cours des matières premières. Le président de l observatoire invite à cette présentation les opérateurs des filières concernées. II. Une commission spécialisée en matière de carburant et de gaz est constituée au sein de l observatoire mentionné au I. Cette commission est informée des projets de décisions de modification des prix prévues par le présent décret. Art. 6. Le préfet précise par arrêté les modalités de fixation des prix prévues par le présent décret, notamment les éléments d appréciation des coûts et de la productivité, ainsi que la liste des justificatifs que les entreprises concernées sont tenues de lui fournir. CHAPITRE III Dispositions finales Art. 7. Les articles 1 er, 2 et 5 du décret du 17 novembre 1988 susvisé sont abrogés. Art. 8. La ministre de l économie, de l industrie et de l emploi, le ministre de l intérieur, de l outre-mer et des collectivités territoriales et la ministre auprès du ministre de l intérieur, de l outre-mer et des collectivités territoriales, chargée de l outre-mer, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française. Fait à Paris, le 8 novembre Par le Premier ministre : La ministre de l économie, de l industrie et de l emploi, CHRISTINE LAGARDE FRANÇOIS FILLON

251 .. 10 novembre 2010 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 25 sur 185 La ministre auprès du ministre de l intérieur, de l outre-mer et des collectivités territoriales, chargée de l outre-mer, MARIE-LUCE PENCHARD Le ministre de l intérieur, de l outre-mer et des collectivités territoriales, BRICE HORTEFEUX

252 Annexe 1 e Arrêté 463 du 29 mars 2011

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257 Annexe 2 Powerpoint de présentation générale

258 Prix des carburants Février 2012

259 Un prix maximum fixé par décret Décret du 8 novembre 2012 réglementant les prix des produits pétroliers et du gaz de pétrole liquéfié dans le département de La Réunion Prix carburants février

260 Évolution du prix du pétrole Une tendance haussière portée par : - Un contexte international tendu - Une demande croissante - Une vague de froid dans les pays consommateurs (court terme) Prix du pétrole brut au 03/02/12 : /l Prix carburants février

261 Parité euro/dollar Prix carburants février

262 Formation du prix Super Sans Plomb 1.66 /litre Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage Prix carburants février

263 Formation du prix Super Sans Plomb 1.66 /litre Le calcul du prix CAF dépend : Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage De la cotation mondiale Du coût du fret De la parité euro/dollar Au 1er février prix CAF = par litre soit 39.7% du prix à la pompe Prix carburants février

264 Formation du prix Super Sans Plomb 1.66 /litre Le calcul de la fiscalité comprend : Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage OM :19.4% 2% 20.5% FIRT : 76.2% TEC : 4% CEE : 0.4% /l pour OMR /l pour OMC /l /l /l Au 1er février fiscalité = par litre soit 46.1% du prix à la pompe Prix carburants février

265 Formation du prix Super Sans Plomb 1.66 /litre Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage Les revenus des détaillants est identique quelque soit le carburant soit par litre Au 1er février le revenu détaillant représente 6.5% du prix à la pompe Prix carburants février

266 Formation du prix Super Sans Plomb 1.66 /litre Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage Les revenus des importateurs est de par litre Au 1er février le revenu des importateurs représente 5.3% du prix à la pompe Prix carburants février

267 Formation du prix Super Sans Plomb 1.66 /litre Les frais de déchargements comprennent : Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage La prestation de déchargement La prestation d entretien des ouvrages La taxe sur les marchandises débarquées Au 1er février les frais de débarquement = par litre soit 1.2% du prix à la pompe Prix carburants février

268 Formation du prix Super Sans Plomb 1.66 /litre Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage Le prix de passage est déterminé et inchangé depuis avril Cette valeur tient compte des recommandations de l IGF. Ces frais sont identiques quelque soient les carburants. Au 1er février les prix de passage = par litre soit 1.2% du prix à la pompe Prix carburants février

269 Évolution des principaux paramètres Super Sans Plomb 1.66 /l max Janvier Février Évolution Cotation SP ($/Bbl) % Euro/$ % Fret ($/hl) % Prix CAF( /hl) % Fiscalité ( /hl) % Revenus importateurs Revenus détaillants << Prix de vente % Prix carburants février

270 Formation du prix Gazoil 1.29 /litre Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage Prix carburants février

271 Formation du prix Gazoil 1.29 /litre Le calcul du prix CAF dépend : Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage De la cotation mondiale Du coût du fret De la parité euro/dollar Au 1er février prix CAF = par litre soit 51.9% du prix à la pompe Prix carburants février

272 Formation du prix Gazoil 1.29 /litre Le calcul de la fiscalité comprend : Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage OM :8.4% 2% 3% FIRT : 90.8% TEC : 0% CEE : 0.8% /l pour OMR /l pour OMC /l 0 /l /l Au 1er février fiscalité = par litre soit 30.9% du prix à la pompe Prix carburants février

273 Formation du prix Gazoil 1.29 /litre Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage Les revenus des détaillants est identique quelque soit le carburant soit par litre Au 1er février le revenu détaillant représente 8.4% du prix à la pompe Prix carburants février

274 Formation du prix Gazoil 1.29 /litre Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage Les revenus des importateurs est de par litre Au 1er février le revenu des importateurs représente 6.5% du prix à la pompe Prix carburants février

275 Formation du prix Gazoil 1.29 /litre Les frais de déchargements comprennent : Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage La prestation de déchargement La prestation d entretien des ouvrages La taxe sur les marchandises débarquées Au 1er février les frais de débarquement = par litre soit 0.8% du prix à la pompe Prix carburants février

276 Formation du prix Gazoil 1.29 /litre Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage Le prix de passage est déterminé et inchangé depuis avril Cette valeur tient compte des recommandations de l IGF. Ces frais sont identiques quelque soient les carburants. Au 1er février les prix de passage = par litre soit 1.5% du prix à la pompe Prix carburants février

277 Évolution des principaux paramètres Gazoil 1.29 /l max Janvier Février Évolution Cotation SP ($/Bbl) % Euro/$ % Fret ($/hl) % Prix CAF ( /hl) % Fiscalité ( /hl) % Revenus importateurs Revenus détaillants << Prix de vente % Prix carburants février

278 Synthèse Super Sans Plomb 1.66 /litre Gazoil 1.29 /litre Prix CAF Fiscalité Revenus détaillants Revenus importateurs Frais de déchargement Prix de passage Prix carburants février

279 Répartition de la consommation % 28% 4.79M hl 4.87M hl 69% 72% gazoil SP Une légère augmentation de la consommation totale de carburant en deux ans ( hl, soit moins de 2%) mais caractérisée par une diminution de la consommation du super ( hl, -9.5%) et une augmentation de la consommation de gazole ( hl, +6.8%) Prix carburants février

280 Comparatif des prix de vente au détail Super sans plomb Métropole La Réunion Martinique Guadeloupe Guyane Août Août Février Évolution +18% +13% +13% +12% +19% La croissance du prix du super est parmi les plus faible à La Réunion que partout en France. En février 2012, le prix moyen en métropole est de 1.57 /l soit 5.43% par rapport à La Réunion Gazoil Août 2010 Août 2011 Février 2012 Évolution Prix carburants février 2012 Métropole % La Réunion % Martinique % Guadeloupe % Guyane % La croissance du prix du gazoil a été maîtrisée à la Réunion, le prix de vente au litre est 0.12 inférieur à La Réunion qu en métropole pour le mois de février (prix moyen en métropole : 1.41 /l ) Gaz La Réunion Martinique Guadeloupe Guyane

281 Sites utiles Préfecture de La Réunion Automobile club de France Prix des carburants Prix carburants février

282 Annexe 3 Compte rendu de la réunion du 8 mars 2012

283 RELEVÉ DE CONCLUSIONS Réunion du jeudi 8 mars 2012 à 14h30 DIECCTE Saint-Denis Madame Marie Christine TIZON, après avoir remercié l ensemble des participants (liste jointe), a rappelé les principaux objectifs de cette première réunion. Il s agit, de manière liminaire aux échanges de fond, de s accorder avec l ensemble des participants de l atelier n 1 «Formation des prix des carburants à La Réunion» sur la méthode de travail du groupe et d arrêter un programme de rencontres. Les délais d aboutissement des travaux de l atelier sont contraints puisque la synthèse est attendue, conformément aux engagements du Préfet, pour fin avril 2012 et que la restitution fera l objet d une présentation publique en juin. Par ailleurs, il est rappelé que les travaux de l atelier doivent en particulier permettre de prendre la mesure de la réalité de l application du décret du 8 novembre 2010 et proposer, si nécessaire, les amendements et adaptations à apporter. Après cette introduction, les propositions d organisation de chacune des rencontres préparées par le SGAR ont été présentées par la Présidente et commentées par l ensemble des participants. Pour répondre aux attentes d une transparence totale du prix du carburant et rechercher les moyens les plus appropriés de réduire les coûts, il est proposé 4 rencontres dont les thèmes recouvrent l ensemble de la problématique du prix des hydrocarbures à La Réunion : - Rencontre 1 : «Le coût assurance fret CAF» - Rencontre 2 : «Acheter le carburant différemment» - Rencontre 3 : «Quel coût de distribution?» - Rencontre 4 : «Les autres pistes d organisations possibles pour les carburants» Les fiches jointes en annexe du présent document détaillent les modalités d organisation des rencontres telles qu elles ont été validées par les participants. Il est convenu, comme suite à la demande des participants, que les propositions et résultats présentés dans le rapport de l Inspection générale des finances (IGF) sur «La fixation des prix des carburants dans les départements d outre mer» (mars 2009), seront abordés en fonction de leur thème lors des différentes rencontres (rappel des résultats de la mission et des recommandations du rapport prises en compte dans le décret de 2010). D autre part, la question de l accès aux comptes et autres documents relatifs aux acteurs de la filière a été à plusieurs reprises soulevée. Le représentant du CIH a précisé que les services de l Etat disposaient de l ensemble des documents, mais souligné que certains étaient couverts par le

284 secret commercial. Une analyse sera faite pour étudier les données qui pourront être transmises aux participants de l atelier. La préfecture a mis en place un site Internet dédié aux travaux relatifs au Grand Débat où seront notamment mis en ligne l ensemble des documents de référence et les résultats de travaux des trois thématiques dont les compte rendus des 4 rencontres de l atelier 1.

285 Cadre général de l Atelier 1 Présidence : Madame Marie-Christine TIZON, Présidente de l observatoire des prix et des revenus de La Réunion. Rapporteur général : Monsieur Gérard CHERRIER, Chef du Pôle C de la DIECCTE. Participants permanents: les membres de l Observatoire des Prix et des Revenus (Représentant de l Etat, Parlementaires, Conseil Régional, Conseil Général, Association des Maires, CESER, Consulaires, Organisations syndicales d employeurs, Organisation syndicales de salariés, Personnalités qualifiées), Comité des importateurs d hydrocarbures, des représentants des transporteurs. Autres participants : - des «experts» des thématiques (dans un souci d efficacité, la visioconférence sera privilégiée) ; - les différents services de l Etat (Préfecture, DIECCTE, DRDDI, DEAL, DGFiP ) participeront également aux différentes rencontres et apporteront, en tant que de besoin, leur expertise. Calendrier prévisionnel des rencontres (sous réserve de la disponibilité des invités): - Rencontre liminaire sur les modalités de travail : 8 mars Rencontre n 1 : semaine 14 (entre le 2 et 6 avril, à préciser) - Rencontre n 2 : semaine 15 (entre le 10 et 13 avril, à préciser - Rencontres n 3 et 4 : semaines 16 et 17 (entre le 16 et le 27 avril, à préciser) - Restitution de la synthèse des travaux du groupe (début mai)

286 Première rencontre : Le Coût Assurance Fret (CAF) 1) Thèmes de travail : Comment le décret du 8 novembre 2010 organise-t-il la formation des prix des carburants à La Réunion? Zoom sur la construction du prix CAF a. Comment se fait l achat des carburants? Quelle est la réalité des prix d achat à Singapour? Existe-t-il des marges de progrès par rapport aux prix d achat? b. Comment est organisé l acheminement des carburants vers La Réunion? Quel est le coût réel de l acheminement vers La Réunion? (l ensemble des informations relatives à la propriété du bateau, aux conditions d exploitation, les prestations facturées seront précisés) c. Comment est organisée la filière gaz? 2) Objectifs en fin d atelier : Comprendre les mécanismes mondiaux d achat du pétrole Disposer d une décomposition transparente du prix CAF, validée par l ensemble des acteurs présents 3) Invités: Madame Anne BOLLIET, Inspectrice Générale des Finances, chef de la mission sur «La fixation des prix des carburants dans les départements d outre mer» (mars 2009) Un trader international sur les marchés de matières premières Hervé MARODON (expert local), TTRAM, expertise en fret et procédures d import des hydrocarbures 4) Point focal : En direct d une salle de marchés «matières premières» Visite du bateau «le Tamarin» et des infrastructures portuaires pour les hydrocarbures

287 Deuxième rencontre : Acheter le carburant différemment 1) Thèmes de travail : a. Quelles zones d approvisionnement possibles et à quels coûts? ASIE Moyen Orient RSA b. Quelle qualité des carburants? Quelles contraintes réglementaires? (Ce point inclut l examen de la procédure de conformité du produit et les résultats) Comment se passent les achats dans la zone Quelles économies d échelles imaginer? Impact sur l environnement et les moteurs 2) Objectifs en fin d atelier : Bien appréhender les contraintes liées à la réglementation et leur prise en compte effective Comprendre les subtiles relations entre qualité du pétrole, motorisation et consommation Maîtriser les cadres environnementaux et réglementaire Evaluer la pertinence d autres projets d approvisionnement 3) Invités : Un ingénieur motoriste de Renault ou PSA Un responsable mauricien des achats pétrole, ainsi qu un représentant d Indian Oil Un expert en réglementation sur les hydrocarbures en administration centrale (Institut français du pétrole ou DGCCRF, à préciser)

288 Troisième rencontre : Quels coûts de distribution? 1) Thèmes de travail : a. Comprendre la fonction de grossiste distributeur Les enjeux économiques Les investissements (contraintes réglementaires et effectivité, amortissement, retour sur investissement, défiscalisation ) Le stockage dans les conditions actuelles (conditions d exploitation des installations, investissements ) L option relative à la création d un second site de stockage Comprendre les contraintes liées à la sécurité / protection des populations et aux stocks stratégiques Quelle stratégie d enseigne? Quels liens verticaux? b. La station service? La distribution aux consommateurs : impact sur l emploi et le service aux populations Structure de coût d une station service Conditions statutaires des gérants de stations services Quelle rentabilité? Vers un commerce de proximité c. Autres pistes de travail proposées par les participants Conditions d élargissement du conseil d administration de la SRPP à d autres investisseurs, notamment publics (CCIR, Région ) 2) Objectifs en fin d atelier : Cerner les investissements dans la structure du coût ; Connaître la fin de la chaîne de la valeur : du Port à Cilaos Positionner la station service dans la structure de coût Mieux appréhender les contraintes en matière de sécurité/stocks stratégiques 3) Invités : 1. Gérard LEBON, Syndicat des stations services 2. Ahmed ABZIZI, SRPP 3. Eric LE BLEVEC, CIH 4. Didier JAVOY, EMZ 5. Un responsable «produits pétroliers» d un grand groupe de distribution national (Leclerc, Auchan, Intermarché ) 6. L Autorité de la concurrence 4) Point focal : Visite de la SRPP (groupe maximum de 10 personnes pour des raisons de sécurité). Des informations spécifiques seront communiquées à ce sujet aux participants.

289 Quatrième rencontre : Les autres pistes d organisation possible pour les carburants 1) Thèmes de travail : a.. Peut-on fédérer les professionnels pour l achat et le stockage des carburants qui leur est nécessaire? Quelle économie d échelle? b.. Le mode de fonctionnement coopératif ou interprofessionnel est il envisageable? 2) Objectifs en fin d atelier : Proposer les bases d une «interprofession de la route» 3) Invités : 1. Pascal THIAW KINE, Président de la Fédération du Commerce et de la Distribution 2. Robert SENGEL, secrétaire général de l ARIBEV, ARIV 3. CCIRPP 4) Point focal : Présentation de UNICOOP Trans (Coopérative de taxis de Lyon qui a développé des relations directes avec ses fournisseurs)

290 PERSONNES PRESENTES AU GRAND DEBAT ATELIER 1 (Formation du prix des hydrocarbures) Jeudi 8 mars 2012 Nom Titre MEMBRES DE L'OPR REPRESENTANTS DE L ETAT Thierry DEVIMEUX SGAR PRESIDENTE DE L OPR Mme Marie Christine TIZON Présidente PARLEMENTAIRES René Paul VICTORIA Député de Saint Denis CONSEIL REGIONAL Dominique FOURNEL Vice Président du Conseil Régional REPRESENTANTS DE L ETAT Dominique NOMEN DR Finances Publiques Mme Valérie ROUX INSEE Gérard CHERRIER DIECCTE- Pôle C Yves SIMON DEAL CHAMBRES CONSULAIRES Armand SINAMALE CCIR ORGANISATIONS SYNDICALES D EMPLOYEURS JF TARDIF CGPME REPRESENTANTS SYNDICATS DE SALARIES Jean Pierre RIVIERE UIR CFDT Erick CHAVRIACOUTY UR UNSA Aurélie FILAIN UR UNSA Paul JUNOT CFTC Jocelyn CAVILLOT US Solidaires Jocelyn FOUGERAIS CAPEB RG HOARAU CAPEB PERSONNALITES QUALIFIEES Jean Yves ROCHOUX CEUOI Jean Pierre LAJOIE UFC Que choisir Mme Céline LUCILLY UDAF INSTITUT D EMISSION DES DEPARTEMENTS D OUTRE MER David PERRAIN IEDOM INVITE A TITRE EXCEPTIONNEL Maurice CERISOLA La Réunion économique SGAR PREFECTURE Alain HOARAU Béatrice ALPERTE PROFESSIONNELS HYDROCARBURES Eric LEBLEVEC CIH Daniel WERNERT SRPP Gérard LEBON SRESS Goulam AKBARALY SRESS

291 Hervé MAZIAU Frédéric MARDENALOM Lionel MERLE Didier JAVOY Jean Bernard CAROUPAYE Georges SAUTERON Philippe CREISSEN Pierrick ROBERT Armand MOUNIATA Joel MONGIN Hugues ATCHY ENGEN Oil Lybia AUTRES ADMINISTRATIONS DOUANES EMZ Prefecture PROFESSIONNELS DE LA ROUTE FNTR FNTR FNTR FNTR Collectif LO Fer IPR R

292 Annexe 4 Powerpoint : «Le Coût Assurance Fret»

293 Le Coût Assurance Fret Atelier 1 6 avril 2012

294 Ordre du jour 1. Le décret du 8 novembre 2010 Impact des missions d étude Formation du prix des carburants 2. Comment se fait l achat des carburants? Les déterminants du marché mondial Du marché au prix FOB 3. Comment sont acheminés les carburants vers La Réunion? Du prix FOB au prix CAF Point sur la visite du Tamarin 4. Exemples 5. Premières pistes de réflexion 2

295 Ordre du jour 1. Le décret du 8 novembre 2010 Impact des missions d étude Formation du prix des carburants 1. Comment se fait l achat des carburants? Les déterminants du marché mondial Du marché au prix FOB 2. Comment sont acheminés les carburants vers La Réunion? Du prix FOB au prix CAF Point sur la visite du Tamarin 3. Exemples 4. Premières pistes de réflexion 3

296 Les prix d achats Rapport IGF (Bolliet) «le groupement des achats permet d obtenir, compte-tenu des volumes modestes en jeu, des prix plus intéressants et de mutualiser les frais d approvisionnement et notamment le fret». Le rapport a validé globalement le système d approvisionnement en notant des pistes d améliorations et de réduction de coûts: «la référence à un prix de marché à Singapour est cohérente avec les modalités actuelles d approvisionnement et légèrement plus avantageuse pour le consommateur qu une cotation à Rotterdam» La rémunération du trader (5$/TM) est cohérente Le coulage estimé à 1% est surestimé: recommandation à 0,2% 4

297 Les Prix d achat Autres rapports Assemblée nationale Ne s est pas penché de manière approfondie sur l amont Reprend les conclusions du rapport IGF et recommande la prise en compte de la cotation Platt s et la baisse du coût du coulage Autorité de la concurrence Considère que les prix doivent être détachés des importateurs et que le recours à un système de cotation, reflétant la moyenne d un grand nombre de transactions, est la meilleure solution 5

298 L acheminement - Rapport IGF (Bolliet) «les frais de transport maritime apparaissant dans la structure de prix sont globalement justifiés» Les coûts du fret ne sont pas excessifs sur la période Le bateau dédié (Cilaos) est moins cher que les bateaux Spots Le Tamarin est légèrement plus cher mais répond à des impératifs nationaux (bateau français et équipage français). La rémunération des importateurs de 2$/TM est redondante et doit être supprimée 6

299 L acheminement - Autres Rapports Assemblée nationale Reprend à son compte la proposition de l IGF de la suppression de la rémunération de 2$/TM Autorité de la concurrence Le fret des carburants à la Réunion est un monopole naturel (pas d autres solution): en conséquence, l Etat doit en contrôler le coût: préconise la baisse du coulage et la suppression de la rémunération de 2$/TM: économie estimée entre 1,5 et 2M 7

300 Bilan des mesures adoptées Avant novembre 2010 Après novembre 2010 Cours d achat Trading Valeur de coulage Assurance Coût de Fret Autres coûts non justifiés Cours d achat Trading Valeur de coulage Assurance Coût de Fret CAF CAF Décret du 8 novembre 2010: 3 éléments de coûts: Coût moyen des produits importés: Coût des assurances et du fret Coûts pertinents et dûment constatés 8

301 Ordre du jour 1. Le décret du 8 novembre 2010 Impact des missions d étude Formation du prix des carburants 1. Comment se fait l achat des carburants? Les déterminants du marché mondial Du marché au prix FOB 1. Comment sont acheminés les carburants vers La Réunion? Du prix FOB au prix CAF Point sur la visite du Tamarin 2. Exemples 3. Premières pistes de réflexion 9

302 Les modalités d achat Le marché Expression des besoins Recours à un trader commun qui consulte par appel d offres toutes les raffineries Raffinerie 1 Raffinerie 4 Raffinerie 2 Raffinerie 3 10

303 Évolution des primes depuis 2009 Période Premium SP Premium Gazole Rémunération trader 01/10/2008 au 01/02/ /02/2009 au 01/12/ /12/2009 au 01/10/ /10/2010 au 01/12/ /12/2010 au 01/06/2011 Depuis le 01/06/2011 5,89 $/baril 2 $/baril 5 $/TM 2,95 $/baril -0,23 $/baril 5 $/TM 4,70 $/baril -0,29 $/baril 5 $/TM 2,55 $/baril -0,09 $/baril 5 $/TM 3,58 $/baril -0,21 $/baril 5 $/TM 3 $/baril -0,20 $/baril 5 $/TM = 11

304 Coût moyen des produits importés Référence aux cotations de la zone d approvisionnement Arrêté préfectoral 463 du 29/03/11: coût moyen des produits pétroliers importés calculé en fonction des cotations PLATT S Asia-Pacific : MOPS Singapour 10 ppm pour les gazoles et MOPS Singapour 97 UNLD pour les supercarburants sans plomb, franco à bord et du cours moyen du dollar, sur une période de 15 jours ouvrés et côtés, commençant le 1 jour du mois précédent. Le cours du dollar est le cours publié au «Journal Officiel de la République Française». Allongement de la période de cotation (15 jours au lieu de 5) et donc lissage des prix en moyenne Prix facturés (5 jours) # prix décret: à voir les conséquences sur le prix CAF 12

305 Coûts pertinents et dûment constatés Premium: prise en compte de la prime résultant de l appel d offres ( aujourd hui +3$/baril pour le sans-plomb et 0,20$/baril pour le gazole. Rémunération du trading: 5$/TM: rémunération non remise en cause dans les rapports et donc retenue 13

306 Les modalités d achat Free On Board Choix de la meilleure offre: Référence à la cotation Platt s Prime (positive ou négative) Rémunération du trader: 5 $/TM La prime ou premium est fonction de l offre et de la demande, donc de la tension sur le marché: si l offre est plus forte que la demande, la prime sera négative (réduction). Si la demande est supérieure à l offre, la prime sera positive (augmentation) 14

307 Ordre du jour 1. Le décret du 8 novembre 2010 Impact des missions d étude Formation du prix des carburants 2. Comment se fait l achat des carburants? Les déterminants du marché mondial Du marché au prix FOB 1. Comment sont acheminés les carburants vers La Réunion? Du prix FOB au prix CAF Point sur la visite du Tamarin 1. Exemples 2. Premières pistes de réflexion 15

308 Le prix CAF Coût: prix du produit (Free on Board) Assurance: prix de l assurance sur le produit Fret: prix du transport du produit Le prix CAF est le prix du produit à l arrivée du bateau à la Réunion avant débarquement 16

309 Le transport Le transport est assuré par le TAMARIN: Bateau de 43000T( a remplacé le CILAOS en 2008) Contrat de 5 ans avec le GIE Tamarin et géré par la SOCATRA (2008 à 2013) Bateau dédié 17

310 Le transport GIE TAMARIN Réceptionnaire: SRPP Contrat affréteur coque nue SOCATRA Chargeurs: Sociétés pétrolières locales Contrat de sousaffréteur GIE Pétroliers: Total, Shell, Engen, Oilybia 18

311 Le prix du transport Un prix fixé dans le contrat initial: Loyer: 14350$/jour +6650$/jour soit pour 30 jours $ Frais de carburant: environ $/voyage Droits de port: environ $ Frais de coordination: environ $ Soit environ 1,45M$ pour un voyage ( 41000TM) soit 34,54$/TM soit près de 2 centimes/litre 19

312 Vers le Coût Assurance Fret (CAF) Assurance: 0,25% sur prix FOB + fret: rémunération habituelle dans la profession, non remise en cause par l IGF et donc retenue Fret: le coût retenu est le coût réellement facturé par l armateur: prise en compte de la facture m-3 (arrêté préfectoral 463 du 29/03/11) Coulage: coût réellement constaté l année précédente: 0,0358% pour le SP et 0,1342% pour le gazole en , 0774% pour le SP et 0, 1419% pour le gazole en 2012 Moins que les 0,20% préconisé par IGF Suppression de la rémunération des importateurs sur le fret de 2$/TM 20

313 Point sur la visite du Tamarin 21

314 Ordre du jour 1. Le décret du 8 novembre 2010 Impact des missions d étude Formation du prix des carburants 2. Comment se fait l achat des carburants? Les déterminants du marché mondial Du marché au prix FOB 3. Comment sont acheminés les carburants vers La Réunion? Du prix FOB au prix CAF Point sur la visite du Tamarin 1. Exemples 1. Premières pistes de réflexion 22

315 Prix CAF calculé : la construction 1/4 134, , , ,0000 Cours du MOPS 126, , , , ,0000 Super Gazole 116, /01/ /01/ /01/ /01/ /01/ /01/ /01/ /01/ /01/ /01/ /01/ /01/2012 Pour le Super = $/baril soit 79.31$/hl Pour le Gazole = $/baril soit 82.13$/hl 23

316 Prix CAF calculé : la construction 2/4 Appel d offres Dans le contrat actuel les pétroliers achètent au cours mondial * + 3$ (premium) du baril (soit 1.89 /hl) pour le Super et au cours mondial 0,2$ (minium) du baril (soit 0.13 /hl) pour le gazole Trading La rémunération du trader est de 5$ par Tonne Métrique, soit en fonction des densités des carburants (0,755 pour le super et 0,845 pour le gazole) cette rémunération est de 0,38$/hl pour le super et 0,42$/hl pour le gazole). Sur les 15 premiers jours ouvrés du mois le prix FOB est calculé à 81.57$/hl pour le super et de 82.43$/hl pour le gazole 24

317 Prix CAF calculé : la construction 3/4 Le Fret Assurance Coulage Sur le mois de février, le fret est de 35.07$/TM. Soit avec les densités des produits : 2.65 $/hl pour le Super et 2.96 $/hl pour le gazole Le montant est de 0.25% sur la valeur FOB + fret. Pour le Super, l assurance représente 0.21$/hl et pour le Gazole 0,21$/hl Modifié depuis le rapport de l Inspection Générale des Finances de 2009, il représente aujourd hui 0,0358% du prix CAF pour le Super et 0,1342% du prix CAF pour le Gazole soit 0.03$/hl pour le Super et 0.11$/hl pour le Gazole Le prix CAF = FOB + Fret + assurance + coulage. Pour le mois de février, le prix CAF est calculé a 84.46$/hl pour le Super SP et 85.72$/hl pour le Gazole. 25

318 Prix CAF calculé : la construction 4/4 1,31 1,3 1,29 Parité /$ 1,28 1,27 1,26 1,25 1, Parité constatée sur les mêmes 15 jours que ceux qui servent de base au calcul des cours. Moyenne sur les 15 premiers jours ouvrés du mois 1.28$/ Prix CAF Février Super /hl Prix CAF Février Gazole /hl 26

319 Ordre du jour 1. Le décret du 8 novembre 2010 Impact des missions d étude Formation du prix des carburants 2. Comment se fait l achat des carburants? Les déterminants du marché mondial Du marché au prix FOB 3. Comment sont acheminés les carburants vers La Réunion? Du prix FOB au prix CAF Point sur la visite du Tamarin 4. Exemples 1. Premières pistes de réflexion 27

320 Conclusion provisoire Le système d approvisionnement mis en place a été validé par toutes les instances et, compte-tenu des améliorations apportées, parait pertinent Toutes les préconisations ont été mises en œuvre, voire au-delà Le prix CAF reflète la réalité économique du marché de la zone et ne prend en compte que les coûts dûment constatés. 28

321 Les pistes de réflexion Période d achat: Quel différentiel entre prix calculé sur 15 jours et prix sur 5 jours: doit-on revenir à l ancien système Tamarin: son coût est plus élevé que celui des bateaux Spots. La différence( - de ½ centime par litre) justifie-t-elle la remise en cause de la sécurité des approvisionnements? Dès 2013: Quel bateau? ( fin du contrat avec le Tamarin) Questions induites: quelles économies avec un plus gros bateau; quel financement et quel coût; quels investissements sur le port et qui finance 29

322 Annexe 5 Relevé de conclusions de la réunion du 27 mars 2012 (Visite du Tamarin)

323 ATELIER 1 LA FORMATION DES PRIX DES CARBURANTS A LA REUNION RELEVÉ DE CONCLUSIONS DE LA RÉUNION DU 27 MARS 2012 PORT RÉUNION 9H30 Conformément à la feuille de route sur laquelle ils se sont accordés le 8 mars 2012 pour organiser leurs travaux, les membres de l Atelier 1 du Grand Débat ont participé à une séance de travail sur le fret des carburants à la Réunion. Cette séance s est déroulée au Port Réunion le 27 mars Dans ses propos introductifs, la présidente de l Atelier 1, Mme Marie-Christine TIZON, a précisé que la visite sur pièce du bateau assurant le transport des hydrocarbures à la Réunion, le Tamarin, ne pourrait pas se réaliser en raison des contraintes strictes de sécurité, qui limitent l accès du bateau à un petit nombre de visiteurs. La séance de travail du groupe s est appuyée sur la présentation technique et opérationnelle du transport des hydrocarbures à la Réunion réalisée par M. Mathieu LE MOAL, chef d agence, représentant la SOCATRA. Cette présentation a été ponctuée de questions/réponses et suivie d un débat. 1) Principales caractéristiques commerciales du Tamarin Le Tamarin appartient à un groupement d intérêt économique, le GIE Tamarin. Les membres du GIE sont la Société d armement et de transport (SOCATRA) et plusieurs banques. La SOCATRA est une entreprise familiale dont le siège social est à Bordeaux, avec une agence à Singapour et une agence à la Réunion. Ses activités sont le transport de produit pétrolier par navire citerne (15 tankers de à tonnes), le transport sur la Gironde des modules Airbus A380 par barges (Breuil & Brion) et le transport de passagers sur la Seine. La SOCATRA est l opérateur technique du Tamarin. Le Tamarin a été construit au chantier SSP Shipbuilding Corée du sud et livré en novembre Depuis novembre 2008, et pour une durée de 5 ans, le navire est affrété à temps (exploitation 24h/24, 365 jours par an) par un groupement. Les membres de ce groupement sont : Shell, Total, Lybia Oil et Engen. Le navire fait l objet d un management opérationnel tournant (actuellement assuré par Engen). Les chargeurs sont en partie des filiales des affréteurs : la SRPP, Total Réunion, Lybia Oil Réunion et Engen Réunion. Le réceptionnaire est la SRPP. Principales dimensions du Tamarin : 183 m x 32,2 m ; hauteur de la quille au mât : 48,36 m ; tirant d eau chargé pour Port Réunion : 12,10 m ; déplacement chargé: tonnes.

324 Le chargement (composé de Gas-Oil, Mogas et Jet) s effectue à Singapour et le déchargement à la Réunion. La durée du voyage vers Singapour est d environ 11 jours et le retour vers la Réunion de 10,5 jours (6 500 km), la durée de l escale se situe entre 5 et 7 jours. Le Tamarin effectue 12 rotations annuelles ; en complément le groupement recourt à 5 navires supplémentaires bateaux spot - par an pour couvrir les besoins en hydrocarbures de la Réunion. Le Tamarin, sous drapeau français (RIF registre international français), recourt à un équipage composé de 24 personnes à bord, 6 français, 17 malgaches et 1 roumain, dont 7 personnes + 1 élève pour le service machine. La durée moyenne des embarquements se situe entre 3 et 4 mois. La langue de travail à bord est le français. Quantités transportées par le Tamarin / produits en tonnes GASOIL ,88% MOGAS (moteurs à combustion) - 9,4% Total % ,7% ,3% % % JET (avions) ,2% % % Distances parcourues en km Questions principales ressortant du débat Les discussions ont principalement porté sur : le coût du fret, les relations fonctionnelles et financières entre les différentes parties prenantes, les autres options possibles en termes de capacités/coûts pour le transport des hydrocarbures. Il a notamment été rappelé par le représentant de la DEAL que des projets concernant l aménagement du Port Réunion pourraient, sous certaines conditions, permettre de recourir à des navires de plus grandes capacités. A l issue des échanges, la Présidente du groupe, Mme Marie-Christine TIZON, a pris note des questions pour lesquelles des informations complémentaires étaient demandées par les membres de l Atelier 1 : - la composition détaillée du GIE, incluant notamment la part détenue par les différents propriétaires ; - le schéma descriptif des relations fonctionnelles et financières entre les parties prenantes propriété du Tamarin, achat et transport des hydrocarbures ;

325 - l octroi de financements publics dont aurait pu bénéficier le GIE ; - l évaluation de la perte en volume volume départ et volume arrivée et coût par rotation sur la durée d exploitation du Tamarin ; - les économies d échelles (sur le fret, etc.) qui pourraient être induites si le transport des hydrocarbures était assuré par un bateau d un port en lourd supérieur escalant aux quais 20/21 où les navires peuvent caler jusqu à 14 m de tirant d eau (au lieu de 12 m au quai 10 actuel) ; - les principales obligations figurant dans les conventions qui lient la SRPP et la CCIR, concessionnaire de Port Réunion. S agissant du coût du fret et de la qualité du gazole, qui ont également fait l objet de questions des participants, il a été rappelé par la Présidente qu il est d ores et déjà prévu de traiter ces sujets aux cours des 2 prochaines rencontres de l Atelier 1.

326 Liste des participants - M. Hugues ATCHY, IPR R - M. Bernard PICARDO, Chambre des métiers - M. Jean-François NAULEAU, DRFIP - M. Arnold LOUIS, CFTC - M. Jacky CHANE-ALUNE, UFC QUE CHOISIR - M. Aurélie FILAIN, UNSA - M. Joel MONGIN, LO Fer - M. Patrick HOAREAU - M. Maurice CERISOLA, La Réunion économique - M. Patrick VALETTE, TOTAL - M. Gérard LEBON, SRESS - M. Jean-Bernard CAROUPAYE, CCIR - M. Pierrick ROBERT, CCIR - M. Roland HOUTIEN, FNTR - M. Georges SAUTRON, FNTR - M. Johny OGNARD, ENGEN - M. Jean-François DUTERTRE, DIECCTE - M. Daniel WERNERT, SRPP - M. COLLOLOAUD, SRPP - Mme Erika DIJOUX, SRESS - M. Yves SIMON, DEAL - M. Ary-Claude CARO, CCIR - Mme Marie-Christine TIZON, OPR - Mme Béatrice ALPERTE, SGAR - M. Alain HOARAU, SGAR

327 Annexe 6 Visite du Tamarin : Questions complémentaires

328 ATELIER 1 LA FORMATION DES PRIX DES CARBURANTS A LA REUNION Questions complémentaires : 1. la composition détaillée du GIE, incluant notamment la part détenue par les différents propriétaires : Propriétaire : GIE Tamarin (30, ave. Pierre Mendès France Paris) Répartition des droits statutaires (cf. statuts pour le détail de la personnalité juridique des institutions concernées) : - Banque populaire Lorraine Champagne (SA coop de Banque pop) 6% - Banque populaire Occitane (SA coop de Banque pop) 10% - Banque populaire rives de Paris (SA coop de Banque pop) 50% - Banque populaire Val de France 10% - Investima 8 (Soc par actions simplifiée à associé unique) 24% Cessions possibles aux groupes affiliés : - Natixis et ses filiales - La Banque fédérale des banques populaires (BFBP) et filiales - Les Sociétés coopératives de Banques Populaires et filiales - La Caisse Nationale des Caisses d Epargne et de Prévoyance (CNCEP) et filiales - Les Caisses d Epargne régionales et filiales Groupe constitué pour une durée de 10 ans (à partir de 2008?) pour l acquisition, l exploitation (location du Navire au terme d un contrat d affrètement coque nue ou à défaut par voie de location simple ou de crédit-bail) et le financement du Navire art L et suivants du Code de Commerce. Les statuts prévoient par ailleurs la cession du Navire à la fin normale ou anticipée du Contrat d affrètement. 2. le schéma descriptif des relations fonctionnelles et financières entre les parties prenantes propriété du Tamarin, achat et transport des hydrocarbures : Propriétaire : GIE Tamarin Promesse unilatérale de vente du navire à la SAS SOCATRA REUNION exerçable à l issue d une période de 60 mois de location pour un prix égal à l encours des prêts bancaires, augmenté du capital du prêt subordonné. Affrèteur coque nue : SOCATRA REUNION (Soc par actions simplifiées). SOCATRA (Société d armement et de transport de produits pétroliers. Siège social à Bordeaux, agence à Singapour et à la Réunion). Transport de produit pétrolier par navire citerne (15 tankers de 7000 à tonnes - Moyenne d âge de la flotte 5 ans).

329 Coût total du projet d acquisition du navire : USD Affrètement à temps du navire par le groupement : Shell, Total, Lybia Oil et Engen depuis novembre 2008 pour 5 ans (renouvelable, sur option des affréteurs, un an plus un an). Management opérationnel tournant du navire par les membres du groupement (actuellement Engen). Chargeur : SRPP, Total Réunion, Lybia Oil Réunion, Engen Réunion. Réceptionnaire : SRPP. 3. l octroi de financements publics dont aurait pu bénéficier le GIE : Bénéfice de mesures de défiscalisation (agrément prévu au 1 du III de l art. 17 du code général des impôts) pour l acquisition du navire à partir de l exercice 2008 (année de livraison du navire) pour une base maximum de (montant cumulé de la déduction à demander à la DGFIP). Conditions (principales) : - Immatriculation sous pavillon français - Aucune escale entre Singapour et la Réunion - Conserver et exploiter le navire pendant 2 ans au terme des 5 premières années du contrat d affrètement dans l hypothèse où les compagnies pétrolières ne prorogeraient pas ce dernier - Créer un emploi direct net créer 31 emplois directs ETP dont 5 emplois de navigants français et les maintenir au minimum pendant la durée légale d exploitation. 4. l évaluation de la perte en volume volume départ et volume arrivée et coût par rotation sur la durée d exploitation du Tamarin : 5. les économies d échelles (sur le fret, etc.) qui pourraient être induites si le transport des hydrocarbures était assuré par un bateau d un port en lourd supérieur escalant aux quais 20/21 où les navires peuvent caler jusqu à 14 m de tirant d eau (au lieu de 12 m au quai 10 actuel) : 6. les principales obligations figurant dans les conventions qui lient la SRPP et la CCIR, concessionnaire de Port Réunion : Le seul document contractuel liant la SRPP et la CCI Réunion-Concession Port Réunion est une convention d'autorisation d'occupation temporaire constitutive de droits réels. Aussi, hormis les obligations relatives à une occupation du domaine public, il n'y en a pas d'autres telles qu'il pourrait en avoir dans une Délégation de Service Public.

330 Liste des participants - M. Hugues ATCHY, IPR R - M. Bernard PICARDO, Chambre des métiers - M. Jean-François NAULEAU, DRFIP - M. Arnold LOUIS, CFTC - M. Jacky CHANE-ALUNE, UFC QUE CHOISIR - M. Aurélie FILAIN, UNSA - M. Joel MONGIN, LO Fer - M. Paluch HOAREAU - M. Maurice CERISOLA, La Réunion économique - M. Patrick VALETTE, TOTAL - M. Gérard LEBON, SRESS - M. Jean-Bernard CAROUPAYE, CCIR - M. Pierrick ROBERT, CCIR - M. Roland HOUTIEN, FNTR - M. Georges SAUTRON, FNTR - M. Johny OGNARD, ENGEN - M. Jean-François DUTERTRE, DIECCTE - M. Daniel WERNERT, SRPP - M. COLLOCOAUS, SRPP - Mme Erika DIJOUX, SRESS - M. Yves SIMON, DEAL - M. Arry-Claude CARO, CCIR - Mme Marie-Christine TIZON, OPR - Mme Béatrice ALPERTE, SGAR - M. Alain HOARAU, SGAR

331 Annexe 7 Powerpoint : «Acheter le pétrole différemment»

332 Acheter le carburant différemment Atelier 1 17 avril 2012

333 Ordre du jour 1. Point sur les avancées précédentes 2. Les contributions au débat 3. Acheter le carburant différemment 4. Les stocks stratégiques 2

334 Ordre du jour 1. Point sur les avancées précédentes 1. Les contributions au débat 2. Acheter le carburant différemment 3. Les stocks stratégiques 3

335 Bilan des rencontres précédentes Les réponses apportées La réalité du coût d achat Singapour La diminution de la valeur de coulage La réalité du poste «assurance» Les questions qui demeurent à ce stade : La commission de négoce est elle justifiée? Le fret est il optimisé? 4

336 Ordre du jour 1. Point sur les avancées précédentes 1. Les contributions au débat 1. Acheter le carburant différemment 2. Les stocks stratégiques 5

337 Les contributions au débat Mémoire d observation de la FNTR 974 Contribution de du syndicat Union syndicale Solidaires de La Réunion 6

338 Ordre du jour 1. Point sur les avancées précédentes 2. Les contributions au débat 1. Acheter le carburant différemment 1. Les stocks stratégiques 7

339 Acheter le carburant différemment 1. Rappel des principes de la Loi 2. Réglementation relative à la qualité des carburants 3. Réglementation relative aux opérateurs pétroliers 4. Approvisionnement et marchés pétroliers 8

340 1 - Les principes de la loi Article L du code de l'énergie Sous réserve du respect des dispositions applicables du présent code, notamment de celles du livre VI, la réception en provenance de l'étranger et l'expédition à destination de celui-ci, le traitement, le transport, le stockage et la distribution du pétrole brut et des produits pétroliers s'effectuent librement. Dans les départements d'outre-mer, des restrictions à la réception en provenance de l'étranger et à l'expédition à destination de celuici peuvent être prévues. 9

341 2 - La réglementation relative à la qualité des carburants (1/4) Article L du code de l'énergie Les seuls carburants autorisés à la consommation en France sont référencés à l'article 265 du code des douanes. Article 265 du code des douanes Les produits énergétiques repris aux tableaux B et C ci-après, mis en vente, utilisés ou destinés à être utilisés comme carburant ou combustible sont passibles d'une taxe intérieure de consommation dont les tarifs sont fixés comme suit : 10

342 2 - La réglementation relative à la qualité des carburants (2/4) Directive 98/70/CE Articles 3 (et 4) Les États membres veillent à ce que l'essence (les carburants diesel) ne puisse(nt) être mise sur le marché sur leur territoire que si elle est (s'ils sont) conforme(s) aux spécifications environnementales fixées à l'annexe I. Toutefois, les États membres peuvent prévoir, pour les régions ultrapériphériques, des dispositions spécifiques pour l'introduction d'essence d'une teneur en soufre maximale de 10 mg/kg. Les États membres qui ont recours à la présente disposition en informent la Commission. 11

343 2 - La réglementation relative à la qualité des carburants (3/4) Les arrêtés du 23 décembre 1999 modifiés Article 1 : A compter du 1 janvier 2000, le supercarburant sans plomb / le gazole ne peut être détenu en vue de la vente ou vendu que s'il est conforme aux spécifications définies à l'article 2 ci-après. L'article 2 prévoit que les caractéristiques techniques sont listées en annexe. Article 4 ou 5 : Dérogations Elles peuvent être accordées, pour une durée limitée, par le ministre chargé des hydrocarbures 12

344 2 - La réglementation relative à la qualité des carburants (4/4) Les carburants doivent respecter toutes les caractéristiques techniques : pour être conforme à la réglementation pour permettre le bon fonctionnement des moteurs et notamment ceux des modèles les plus récents 13

345 3 - La réglementation relative aux opérateurs pétroliers Le code des douanes prévoit 4 catégories d'opérateurs économiques agréés : 1) Les entrepositaires agréés (EA) Ils sont habilités à recevoir (ou à expédier) en suspension de droits, dans un entrepôt fiscal, des produits en provenance (ou à destination) d'un autre EM ou d'un pays tiers 2) Les destinataires enregistrés Ils peuvent recevoir des produits expédiés en suspension de droits en provenance d'un EA 3) Les destinataires enregistrés occasionnels Ils peuvent, à titre occasionnel recevoir des produits expédiés en suspension de droits en provenance d'un autre EM 4) Les expéditeurs enregistrés Ils sont exclusivement autorisés à expédier des produits en suspension de droits Ces différents statuts sont accordés par la direction régionale des douanes 14

346 3 - Les obligations des opérateurs pétroliers (1/2) Outre les obligations douanières, les opérateurs pétroliers restent soumis à certaines obligations : 1) L'obligation de stockage stratégique Toute personne qui met à la consommation un produit pétrolier est tenue de contribuer à la constitution et à la conservation de stocks stratégiques 2) L'obligation de pavillon Elle concerne les propriétaires d'une unité de distillation de pétrole brut (raffinerie) 3) L'obligation de continuité de fourniture de fioul domestique Les distributeurs de fioul domestique doivent assurer la continuité de fourniture de produit aux clients qui accomplissent des missions d'intérêt général 4) L'obligation d'information En période de difficultés d'approvisionnement, tout opérateur pétrolier est tenu de fournir à l'autorité administrative tous documents et informations sur sa contribution à approvisionnement du marché français 15

347 3 - Les obligations des opérateurs pétroliers (2/2) 5) L'obligation de notification Les projets d'acquisition ou de construction d'une raffinerie ainsi que les projets d'arrêt définitif ou de démantèlement d'une ou plusieurs installation comprises dans une raffinerie doivent être notifiés à l'autorité administrative 6) L'obligation de respecter les règles techniques de sécurité Elle concerne les installations non soumises au régime des installations classées 16

348 4 - L organisation du marché - généralités Les contrats longs terme Intérêt pour le vendeur : garantir ses débouchés Intérêt pour l'acheteur : s'assurer la disponibilité d'une qualité de produit et limiter ses coûts de transaction Les transactions spot Des marchés de gré à gré Absence d'organisme de régulation 17

349 4 - L organisation du marché déterminants des prix Des fondamentaux Équilibre au jour le jour des marchés régionaux Capacité et niveaux de production Évolution des consommations Niveaux et variations des stocks L'actualité Informations techniques, économiques et politiques susceptibles de peser lors de l'appréciation de l'équilibre offre/demande Les outils Analyse des séries historiques... 18

350 4 - Diversification de l approvisionnement Des spécifications européennes contraignantes qui limitent fortement les sources d'approvisionnement Le déficit de production de gazole européen est majoritairement compensé par des importations en provenance de Russie Mais... 1) Le marché européen présente un intérêt en terme de débouché et d'image Les nouvelles raffineries mises en service sont conçues pour permettre la production de produits aux standards les plus élevés (Moyen-Orient, Inde ) 2) Les standards européens sont repris par d'autres pays Les futures spécifications applicables en Californie ou en Afrique du Sud seront proches de celles en vigueur en Europe 19

351 Ordre du jour 1. Point sur les avancées précédentes 2. Les contributions au débat 3. Acheter le carburant différemment 1. Les stocks stratégiques 20

352 Le principe des stocks stratégiques La France, comme l ensemble des pays importateurs de pétrole,doit se prémunir contre l éventualité d une rupture de son approvisionnement extérieur. A cet effet, elle a l obligation de constituer des Stocks de Sécurité pour répondre aux besoins de ses consommateurs finaux en période de crise et disposer d un outil de solidarité internationale. Ces obligations ont pour sources : l Agence Internationale de l Énergie (AIE) l Union européenne (UE) les obligations nationales 21

353 Les obligations internationales L obligation AIE est fixée à 90 jours d importations nettes de l année civile précédente. L obligation européenne impose que chaque État membre entretienne un stock de produits pétroliers équivalent à au moins 90 jours de consommation intérieure moyenne de l année civile précédente. L Europe distingue 3 catégories de produits dans lesquelles des substitutions sont possibles avec des seuils minimum de produits finis, ainsi que des règles de calcul et de contrôle. Des évolutions en cours sont à transposer avant le 31/12/12 22

354 Les obligations nationales a) L obligation de stockage stratégique est calculée sur la base d un pourcentage des mises en consommation de l année précédente. b) Des décrets fixent ce taux à 27% des consommations visées en France métropolitaines et à 20% dans les DOM. c) L obligation porte sur 5 catégories de produits 1- essences auto et essences avion 2- gazole, fioul domestique, pétrole lampant 3- carburéacteur (spécial France) 4- fiouls lourds 5- gaz de pétrole liquéfié (uniquement Guyane et Réunion). d) L obligation est partiellement déléguée au CPSSP. 23

355 Modalités de constitution des stocks QUI? : Toute personne qui réalise une opération entraînant l exigibilité des taxes intérieures de consommation de produits pétroliers ou qui livre l un de ces produits à l avitaillement des aéronefs civils. COMBIEN? : L obligation concerne les quantités nettes mises à consommation ou livrées à l avitaillement durant l année civile N pour effet au premier juillet N+1. COMMENT? : Une répartition est faite entre la part de l obligation que l opérateur assume directement et celle qu il confie à la CPSSP contre rémunération. Pour l outre-mer la part déléguée est de 50%. 24

356 Les conditions de stockage Opérateurs : Pour les DOM, tout opérateur reconnu par les douanes, doit effectuer ce stockages dans des installations de plus de 400 m3 (ou m3 pour Cat IV et V) agrées et considérées comme fixes. (hors stations services, hors canalisations, hors navires sauf exceptions) CPSSP : (comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers) Il peut utiliser les capacités de stockage de la SAGESS (société anonyme de gestion de stocks de sécurité) réparties sur le territoire national ou avoir recours à des stocks de produits finis mis à sa disposition par l ensemble des opérateurs. 25

357 Les contrôles 1) Obligation de déclaration des quantités mise à consommation N-1 pour définition de l obligation de stock 2) Compte rendu des stocks mensuels par catégorie 3) Visites de contrôle sur place possibles Les organismes concernées : - les douanes - la CPSSP - la DEAL (ex DRIRE) - la préfecture (continuité de l activité économique et gestion de crise) 26

358 Autres règlementation 1) Les ICPE (Installations Classées pour la Protection de l Environnement) 2) Les SAIV (Secteurs d Activité d Importance Vitale) 27

359 Bases règlementaires 1) Loi n du 31 décembre 1992 portant réforme du régime pétrolier (modifiée) 2) Décret n du 29 janvier 1993 relatif à l obligation de constituer et de conserver des stocks stratégiques de pétrole brut et de produits pétroliers (modifié) 3) Décret n du 29 janvier 1993 portant création du comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers (modifié) 4) Arrêté du 15 mars 1993 relatif à la constitution des stocks stratégiques pétroliers en France métropolitaine (modifié) 5) Arrêté du 13 décembre 1993 relatif à la constitution des stocks stratégiques dans les départements d outre-mer (modifié). 28

360 Atelier 1 17 avril 2012

361 Annexe 8 Compatibilité carburants et émissions des polluants de véhicules

362 COMPATIBILITE CARBURANTS ET EMISSIONS DES POLLUANTS DES VEHICULES 1) Evolution des textes carburants issus des directives CE ( base 98/70) Supercarburant AM du 23 décembre 1999 modifié en constante évolution ( ses pourcentages des composés évoluent) dernièrement évolution des composés oxygénés ( part d'éthanol) rappel des évolutions importantes pour la teneur en soufre: Depuis le 1/1/2009 1/1/2005 1/1/2003 Avant 1/1/2003(*) 10 mg/kg 50 mg/kg 150 mg/kg 350 mg/kg (*) un AM du 26 juillet 2000 avait repoussé l'échéance du 1 er janvier 2000 au 1 er janvier 2003 pour les DOM. Gazole AM du 23 décembre 1999 modifié rappel des évolutions importantes pour la teneur en soufre: Depuis le 1/1/2009 1/1/2005 1/1/2003 Avant 1/1/2003(*) 10 mg/kg 50 mg/kg 150 mg/kg 500 mg/kg (*) un AM du 26 juillet 2000 avait repoussé l'échéance du 1 er janvier 2000 au 1 er janvier 2003 pour les DOM. 2) Evolution des textes émissions de polluants La législation européenne est de plus en plus sévère sur les rejets des moteurs à explosion. Les normes d'émissions «Euro» se succèdent. La mise en œuvre se fait à des dates décalées pour les automobiles, les véhicules utilitaires légers, les motos et les poids-lourds. Les normes diffèrent entre les différents types de moteurs (moteurs à allumage commandé (essence, GPL...) ou moteurs Diesel) et de véhicules, jusque dans les unités choisies, rapportées à la distance parcourue (par exemple g/km), sauf pour les véhicules lourds où elles sont rapportées à l'énergie développée (par exemple g/kwh). Pour les automobiles particulières, les dates d'entrée en vigueur sont les suivantes: Euro 1 : automobiles mises en service après 1993 (nouveaux types dès juillet 1992); Euro 2 : automobiles mises en service après 1997 (nouveaux types dès janvier 1996); Euro 3 : automobiles mises en service après 2001 (nouveaux types dès janvier 2000); Euro 4 : automobiles mises en service après 2006 (nouveaux types dès janvier 2005); Euro 5 : automobiles mises en service après 2011 (nouveaux types dès septembre 2009); Euro 6 : automobiles mises en service après 2015 (nouveaux types dès septembre 2014);

363 Les émissions de polluants sont mesurées durant un cycle de conduite normalisé qui dure 20 minutes. Il comprend une première phase de conduite typée "ville" suivi d'une phase de conduite plus rapide typée "route". La vitesse moyenne durant ce cycle est de 33 km/h. Véhicules à moteur Diesel[ (toutes les valeurs sont exprimées en mg/km) Norme Euro 1 Euro 2 Euro 3 Euro 4 Euro 5 Euro 6 Oxydes d'azote (NO X ) Monoxyde de carbone (CO) Hydrocarbures (HC) HC + NO X Particules (PM) Particules (P)* (*) Nombre de particules. Une valeur limite doit être définie au plus tard pour la date d'entrée en vigueur de la norme Euro 6 Véhicules à moteur essence ou fonctionnant au gaz de pétrole liquéfié ou au gaz naturel pour véhicules[ (toutes les valeurs sont exprimées en mg/km) Norme Euro 1 Euro 2 Euro 3 Euro 4 Euro 5 Euro 6 Oxydes d'azote (NOx) Monoxyde de carbone (CO) Hydrocarbures (HC) Particules (PM) (*) 5 (*) Particules (P)** Hydrocarbures non méthaniques (HCNM) (*) Uniquement pour les voitures à essence à injection directe fonctionnant en mélange pauvre (combustion stratifiée) (**) Nombre de particules. Une valeur limite doit être définie au plus tard pour la date d'entrée en vigueur de la norme Euro 6 3) Conséquences de ces échéances réglementaires La réduction de la teneur en soufre des carburants permet de garantir l'efficacité des nombreuses technologies existantes ou émergentes ( convertisseurs catalytiques à 3 voies, catalyseurs d'oxydation, absorbeurs à oxyde d'azote, filtres à particules). C'est la directive européenne 2003/17 qui amende la directive de base 98/70 et qui a fixé au 1er janvier 2009 le passage de l'ensemble des carburants à 10 ppm de soufre, Les compatibilités suivantes sont induites de ces exigences réglementaires:

364 Véhicule essence Norme d'émissions exigibles Teneur admissible en soufre de l'essence EURO mg/kg 2001 EURO 4 50 mg/kg 2006 EURO 5 10 mg/kg 2011 Véhicule diesel Norme d'émissions exigibles Teneur admissible en soufre du gazole EURO mg/kg 2001 EURO 4 50 mg/kg 2006 EURO 5 10 mg/kg 2011 Date de mise en circulation Date de mise en circulation A l'heure actuelle, les véhicules livrés neufs disposent des dernières technologies disponibles pour respecter le cahier des charges de la norme EURO 5 en particulier avec leurs pots catalytiques, leurs filtres à particules et leurs absorbeurs d'azote. Si la qualité des carburants était revue à la baisse, cela aurait des conséquences dommageables sur la durée de vie de ces dispositifs puisqu'ils seraient plus sollicités et s'encrasseraient très vite. Autres conséquences: - les garanties contructeurs des moteurs et de leurs dispositifs anti-pollution ne seraient plus assurées - le carburant normalisé à 10 ppm est celui qui a été utilisé pour justifier la conformité des émissions polluantes des véhicules; s'il est augmenté, les taux admissibles d'émissions de polluants des véhicules ne seront plus garanties. Compte tenu des éléments précédents, ce serait aussi faire fi des impératifs européens de limiter au maximum l impact négatif des véhicules routiers sur l environnement et la santé.

365 Annexe 9 Powerpoint : «Les frais de passage»

366 Les frais de passage Atelier 1 14 mai 2012

367 La SRPP en chiffres (1/2) 19 cuves: m3 de carburant sur 17ha m3 de GPL Répartition du carburant: Gazole: 42% Kérosène: 28% Sans-Plomb: 15% FOD/GNR: 11% Pipe-line de 4,5Km du Port Est ( lieu d accostage du Tamarin) à la SRPP Sorties de 3500 m3/jour= 100 camions 2

368 La SRPP en chiffres (2/2) Gaz: Débarqué au Port Ouest Pipe-line de 800m de long pour rejoindre la SRPP Stockage sous-talus ( conforme normes sécurité) Embouteillage: 850 bouteilles/heure 1, 62 M bouteilles/an 3

369 Tableau des réservoirs SRPP m <1985 Gazole SP Jet GPL

370 Présentation de la prestation (1/2) Réception des produits : reconnaissance à bord du navire, transfert par pipeline du bord du navire jusqu au dépôt. Entreposage des produits : réception, recensement (déterminer les quantités reçues) et conservation en quantité et par catégorie, dans des réservoirs banalisés sans différenciation de propriétaire, pour tous les opérateurs, 5

371 Présentation de la prestation (2/2) Remise des produits à disposition : livraison au poste de chargement des camions citernes, à partir duquel ils sont enlevés par chaque propriétaire. Rendre compte des opérations : production d états de stocks et de mouvements. 6

372 Prix de la prestation Les frais de passage constituent une rémunération pour l opérateur, entrepositaire et industriel assurant la prestation de passage Ces sommes sont soumises à l impôt Les frais de passage rémunèrent : Les coûts liés aux immobilisations Les coûts liés à l exploitation 7

373 Généralités Bases financières calculées au 31 décembre de chaque année Immobilisations : Valeur = valeur acquisition comptable Exploitation : Chiffres de l exercice précédent 8

374 Immobilisations Un taux couvre les amortissements 3 valeurs par tranche de 5 années (9, 7 et 4 %) Durée maxi : 15 ans Un taux couvre la rémunération du capital valeur unique : 7 % Durée maxi : 18 ans Au delà de 18 ans les immobilisations ne sont plus rémunérées 9

375 Exploitation Reprise des charges de l année écoulée Actualisation par application de l indice des services publié par l INSEE Rémunération actuelle 9 % 10

376 Evolution des frais de passage ESSENCE PB SUPER SPB GAZOLE GAZ JET 01/02/2000 1,6693 1,6693 1,6693 3, /02/2001 1,7257 1,7257 1,7257 3, /02/2002 1,7330 1,7330 1,7330 3,7625 0, /02/2003 1,7800 1,7800 3,6969 0, /02/2004 1,7800 1,7800 3,5606 0, /05/2004 1,8150 1,8150 3,5606 0, /02/2005 1,8150 1,8150 3,5425 0, /02/2006 1,8150 1,8150 3,6150 1, /02/2007 1,8500 1,8500 3,9225 1, /02/2008 1,8250 1,8250 3,8000 1, /02/2009 2,0950 2,0950 3,5375 1, /02/2010 2,0407 2,0407 3,5000 2, /04/2011 1,9949 1,9949 3,4933 1,

377 Origine des coûts Carburants : 1,9949 /hl (2011) 2,0575 (2012 reporté) Immobilisations : 51 % Exploitation : 49 % GAZ : 279,46 / T ou 3,493/ bt Immobilisations : 32 % Exploitation : 68 % 12

378 Atelier 1 14 mai 2012

379 Annexe 10 Les stocks stratégiques

380 Les Stocks Stratégiques Grand débat GT 1 17/04/12 CLC D. JAVOY

381 Le Principe La France, comme l ensemble des pays importateurs de pétrole,doit se prémunir contre l éventualité d une rupture de son approvisionnement extérieur. A cet effet, elle a l obligation de constituer des Stocks de Sécurité pour répondre aux besoins de ses consommateurs finaux en période de crise et disposer d un outil de solidarité internationale. Ces obligations ont pour sources : - l Agence Internationale de l Énergie (AIE) - l Union européenne (UE) - les obligations nationales. Grand débat GT 1 17/04/12 CLC D. JAVOY

382 Les Obligations internationales L obligation AIE est fixée à 90 jours d importations nettes de l année civile précédente. L obligation européenne impose que chaque État membre entretienne un stock de produits pétroliers équivalent à au moins 90 jours de consommation intérieure moyenne de l année civile précédente. L Europe distingue 3 catégories de produits dans lesquelles des substitutions sont possibles avec des seuils minimum de produits finis, ainsi que des règles de calcul et de contrôle. Des évolutions en cours sont à transposer avant le 31/12/12. Grand débat GT 1 17/04/12 CLC D. JAVOY

383 Les Obligations nationales a) L obligation de stockage stratégique est calculée sur la base d un pourcentage des mises en consommation de l année précédente. b) Des décrets fixent ce taux à 27% des consommations visées en France métropolitaines et à 20% dans les DOM. c) L obligation porte sur 5 catégories de produits 1- essences auto et essences avion 2- gazole, fioul domestique, pétrole lampant 3- carburéacteur (spécial France) 4- fiouls lourds 5- gaz de pétrole liquéfié (uniquement Guyane et Réunion). d) L obligation est partiellement déléguée au CPSSP. Grand débat GT 1 17/04/12 CLC D. JAVOY

384 Modalités de constitution des stocks QUI? : Toute personne qui réalise une opération entraînant l exigibilité des taxes intérieures de consommation de produits pétroliers ou qui livre l un de ces produits à l avitaillement des aéronefs civils. COMBIEN? : L obligation concerne les quantités nettes mises à consommation ou livrées à l avitaillement durant l année civile N pour effet au premier juillet N+1. COMMENT? : Une répartition est faite entre la part de l obligation que l opérateur assume directement et celle qu il confie à la CPSSP contre rémunération. Pour l outre-mer la part déléguée est de 50%. Grand débat GT 1 17/04/12 CLC D. JAVOY

385 Les conditions de stockage Opérateurs : Pour les DOM, tout opérateur reconnu par les douanes, doit effectuer ce stockages dans des installations de plus de 400 m3 (ou m3 pour Cat IV et V) agrées et considérées comme fixes. (hors stations services, hors canalisations, hors navires sauf exceptions) CPSSP : (comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers) Il peut utiliser les capacités de stockage de la SAGESS (société anonyme de gestion de stocks de sécurité) réparties sur le territoire national ou avoir recours à des stocks de produits finis mis à sa disposition par l ensemble des opérateurs. Grand débat GT 1 17/04/12 CLC D. JAVOY

386 Les contrôles 1) Obligation de déclaration des quantités mise à consommation N-1 pour définition de l obligation de stock 2) Compte rendu des stocks mensuels par catégorie 3) Visites de contrôle sur place possibles Les organismes concernées : - les douanes - la CPSSP - la DEAL (ex DRIRE) - la préfecture (continuité de l activité économique et gestion de crise) Grand débat GT 1 17/04/12 CLC D. JAVOY

387 Autres réglementations 1) Les ICPE (Installations Classées pour la Protection de l Environnement) 2) Les SAIV (Secteurs d Activité d Importance Vitale) Grand débat GT 1 17/04/12 CLC D. JAVOY

388 Bases réglementaires 1) Loi n du 31 décembre 1992 portant réforme du régime pétrolier (modifiée) 2) Décret n du 29 janvier 1993 relatif à l obligation de constituer et de conserver des stocks stratégiques de pétrole brut et de produits pétroliers (modifié) 3) Décret n du 29 janvier 1993 portant création du comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers (modifié) 4) Arrêté du 15 mars 1993 relatif à la constitution des stocks stratégiques pétroliers en France métropolitaine (modifié) 5) Arrêté du 13 décembre 1993 relatif à la constitution des stocks stratégiques dans les départements d outremer (modifié). Grand débat GT 1 17/04/12 CLC D. JAVOY

389 Annexe 11 La distribution au détail (SRESS - Syndicat réunionnais des exploitants de station-service)

390 ATELIER FORMATION DU PRIX DES CARBURANTS RENCONTRE n 4 LA DISTRIBUTION AU DETAIL Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service 1

391 PLAN I- Une Station-Service à la Réunion? I-1: Présentation du secteur Implantation par Commune Typologie des localisations I-2: Une exploitation atypique Les différentes dimensions Une position particulière Une exploitation bicéphale Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service 2

392 PLAN II- Coût de distribution carburant II-1: Une modélisation difficile Echantillon Diversité des variables Arbitrage II-2: Impactant la marge maximale Masse salariale Autres charges de fonctionnement Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service 3

393 I-1 Présentation du secteur Implantation par Communes Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service 1 4

394 I-1 Présentation du secteur Typologie des localisations STATIONS PAR ZONES Grands axes: 18 Centre-ville: 41 Les hauts: 29 Stations en périphérie : 60 Stations en périphérique ne se retrouvant pas dans l une des catégories Soit 148 stations actives réparties sur toute l Ile. Périphérie; 60 Les Hauts; 29 Grands axes; 18 Centreville; 41 Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service 5

395 I- 2 Une exploitation atypique Les différentes dimensions d une station-service Proximité Mode de vie Liant social fort Service Une amplitude horaire forte Accompagnement client Authenticité Humanité Interface client /pétrolier: Ex «litige» qualité carburant Des coûts de distributions variables selon les exploitations et les enseignes (II). Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service AMPLITUDE JOURNALIERE D UNE STATION 60% < 12H PAR JOUR < 14 H PAR JOUR > 14H PAR JOUR 24% 16% 6

396 I- 2 Une exploitation atypique Les différentes dimensions d une station-service Une dimension humaine forte, des Hommes et des Femmes investis Les salariés Les gérants Indépendants. Entre 1500 et 1800 (+ famille), Des emplois stables + Tremplin professionnel Un personnel impliqué et formé (vente, sécurité ) Mais aussi des Emplois Indirects difficilement quantifiable (prestataires divers, fournisseurs non référencés en GD ) Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service Une indépendance financière, fiscale et juridique. Des risques et des responsabilités élevés: employeurs de l économie réel au rôle social certain acteurs du territoire et de l économie de l Ile 7

397 I- 2 Une exploitation atypique Une position particulière Autres fournisseurs Pétrolier Etat + Loi Station- Service Concurrents Consommateurs finaux Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service 8

398 I- 2 Une exploitation atypique Une exploitation bicéphale CARBURANT STATION-SERVICE AUTRES ACTIVITES: «BOUTIQUE» Entretien auto, lavage, restauration rapide, garage, boutique de proximité Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service 9

399 I- 2 Une exploitation multi-facette et bicéphale Une exploitation bicéphale Une pluralité d activités absolument Nécessaires et Interdépendantes PRESSION DE L ENVIRONNEMENT EXTERNE: CONTRAINTES REGLEMENTAIRES TECHNIQUES, SOCIALES, ENVIRONNEMENTALES AMENAGEMENT RESEAU ROUTIER Activité «BOUTIQUE» Activité CARBURANT CARBURANT «BOUTIQUE» un équilibre précaire et une adaptation limitée à son environnement. PRODUITS CHARGES CHARGES PRODUITS PRODUITS CHARGES Syndicat Réunionnais des Exploitants de Station Service 10

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