ACTEURS DE L ALCOOLOGIE ET DE L ADDICTOLOGIE

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1 LES CAHIERS THÉMATIQUES DE LA FÉDÉRATION DES ACTEURS DE L ALCOOLOGIE ET DE L ADDICTOLOGIE P A T R I C K F O U I L L A N D Président de la F3A Pour son premier cahier thématique ACTAL, la Fédération des Acteurs de l Alcoologie et de l Addictologie (F3A) s attaque aux enjeux de l interface santé/ justice, pour les consommateurs d alcool et de drogues, pour les acteurs de la santé, de la justice, du travail social, mais aussi pour les parents, les enseignants, les éducateurs. Professionnels de ces champs, intervenants en milieu ouvert ou dans les lieux de détention, nous agissons, comme nous le pouvons, avec des interrogations sur l efficacité de nos pratiques, les modalités de coopération avec les autres acteurs, des vertiges parfois sur l immensité de la tâche. La F3A a proposé à la Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie (MILDT) d organiser une rencontre nationale Santé-Justice et addictions, singulièrement autour de la question «peuton soigner sous contrainte?» ; cet événement prolongera en quelque sorte ce premier cahier. Plus qu une interrogation sur la loi de 70, il s agit de permettre à des équipes de terrain de confronter leurs pratiques, d interroger les partenariats, d apporter des points de vue renouvelés, de traiter d un certain nombre de malentendus (partage d informations, logiques d intervention). Ce cahier donne la parole à des acteurs du champ santé justice*, présente quelques travaux et propose des pistes de travail. *pouvoirs publics, magistrats, avocats, soignants, travailleurs sociaux, psychologues, mais aussi, bien-sûr, à des justiciables... INTRODUCTION : Le point de vue de Didier Jayle, Président de la MILDT - Chiffres et définitions, le cadre juridique et ses évolutions - La position de la F3A, par Patrick Fouilland, Président de la F3A. HISTORIQUE : De l APECAPP à la commission santé/justice de la F3A ÉTUDES : L offre de soins en alcoologie dans les établissements pénitentiaires par Agnès DUMAS et Philippe MICHAUD, - Analyse du projet de loi sur la prévention de la délinquance - Tour d Europe de l alcoolémie routière par Sabine JOFFRE - Partenariat Santé / Justice,(résumé d une intervention de Thierry-Emmanuel Spieser) PORTRAITS D ACTEURS : Mireille Carpentier, Directrice de l ANPAA du Calvados - Véronique Zusy, Travailleur social à la DDASS du Haut-Rhin - Christine Perrine, Responsable de l Arapej d Aulany-sous-Bois - Annie Boisyvon, Infirmière au CCAA de Saint Malo - Sylvie Auliac, Infirmière thérapeute au CCAA de Boulogne - Martine Lebas Liabeuf, Juge d application des peines - Patrick Fasseur, Praticien hospitalier à La Rochelle - Christophe Deltombe, Avocat au barreau de Paris - André Goepp, Commissaire principal à Mulhouse - Claude Roche Desbordes, Médecin addictogue à l hôpital de Dax- Une détenue à sa sortie des Baumettes. PRÉSENTATIONS : La F3A, ses missions et commissions de travail - Le colloque santé / justice de la F3A les 22 et 23 mars à Paris.

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3 DIDIER JAYLE Président de la Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie depuis «Créer du lien entre robes noires et blouses blanches» Les personnes traduites en justice sont particulièrement concernées par les conduites addictives - même quand celles-ci ne sont pas en cause dans les infractions jugées. L incarcération ou les mesures pré ou post sentencielles d encadrement judiciaire peuvent alors constituer un «déclic», en tout cas un moment propice à une prise de conscience favorisant l adhésion à une prise en charge globale. C est donc dans l individualisation de la sanction et du traitement que se rencontrent justice et médecine autour des questions d addictions, avec comme souci commun le respect de l individu et son insertion sociale. Rencontre non exempte de contradictions, les lieux, principes et modes d action de la justice et du soin s avérant certes bien distincts. Leur articulation n en est pas moins de l intérêt de la personne comme de la société. À cette fin ont été créés des dispositifs institutionnels mis en œuvre dans les infractions à la législation sur les stupéfiants, puis étendus à l alcool: - un outil financé par la MILDT permet depuis 1993 de «créer du lien» entre «robes noires» et «blouses blanches» : les Conventions Départementales d Objectifs Justice/Santé, dispositif légitimé par le plan gouvernemental 2004/2008 qui a prévu son optimisation, notamment en matière d alcool. La MILDT a récemment fixé aux chefs de projet et coordonnateurs DDASS de nouvelles priorités en ce sens, prenant appui sur certaines actions innovantes déjà menées localement ; - le dispositif de médecins-relais envisagé par le gouvernement devrait, sous réserve d une mise en place réussie, améliorer l articulation «justice/santé» ; le projet de loi étend en outre le champ des alternatives aux poursuites et des aménagements de peines aux délinquants ayant un problème d alcool ou de stupéfiants. D AUTRES PISTES À EXPLORER : - Les consultations mises en place en 2005 offrent un cadre adapté aux usagers de cannabis, souvent aussi consommateurs d alcool : ce dispositif, qui fonctionne bien pour les jeunes interpellés, pourrait être étendu aux infractions liées à une alcoolisation excessive ; - les protocoles de prise en charge pourraient être adaptés au contexte de l incarcération, notamment pour prévenir les rechutes lors de la libération ; - les futurs CSAPA pourraient proposer dans leur projet de soins un volet consacré à l articulation santéjustice. En conclusion, l œuvre commune santé-justice ne peut être réussie que si elle garantit l indépendance des soignants, le respect de la confidentialité, mais surtout l accès aux soins et leur qualité. 3

4 4 quand se croisent les routes de la justice et de la santé Comme un «Jeu de Loi»... Quel qu en soit le motif, avoir à faire avec la justice n est jamais simple. Le parcours s effectue dans un territoire mal connu où le rôle de chacun n est pas toujours lisible, où le langage parlé n est pas celui de tous les jours. La représentation ci-contre, ô combien schématique pose quelques repères. Comme un «Jeu de Loi», il y a des cases, des passages obligés ou facultatifs... où le hasard a aussi sa place. Classement Pré sententiel Intervention Procureur Injonction Poursuites thérapeutique Traitement Admin. Transm. Parquet Procès-verbal Infraction Plaidercoupable Juge d instruction Contrôle judiciaire Garde à vue Interpellation Sursis Mise à l Epreuve Jugement Enquête rapide Détention préventive Intervention J.A.P. Aménagements Semi-liberté de peine Libération conditionnelle Prison ferme Intervention S.P.I.P. Post sententiel Dans le champ qui va de gauche à droite, du pré au post sententiel, de l infraction à l exécution de la peine, les acteurs et les instances sont repérés. À l heure de l impression de ce cahier, la Loi «Prévention de la délinquance» est encore en discussion à l Assemblée Nationale ; s il est adopté, ce schéma s en trouvera encore complexifié. (Cf présentation du projet de loi P.15) Milieu ouvert Milieu carcéral SOURCES OFDT (Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies) «Drogues et dépendances, données essentielles», édition la découverte 2005 «Drogues. Savoir plus». Livret juridique. Avril Revue «Arpenter le champ pénal» n 8 du11/9/2006 de Pierre V. Tournier Dictionnaire des drogues et dépendances. Larousse 2004 Site de legifrance «Plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites, tabac, alcool», MILDT, documentation française 2004 Synapse, janvier 2003, n 192 LES ACTEURS DE LA JUSTICE Le parquet (Ministère Public). Il s agit au niveau du tribunal de grande instance, du procureur de la République et de ses substituts, et au niveau de la cour d appel, du procureur général, des avocats généraux et des substituts du procureur général. Le Ministère Public déclenche l action publique, décide de mettre en œuvre les poursuites pénales et dirige l activité des gendarmes et policiers et réclame l application de la loi devant les juridictions. Il est chargé d assurer la défense de la société. Le Siège (juge ou magistrat du siège). Il désigne les magistrats de l ordre judiciaire qui tranchent les conflits qui leur sont soumis, par opposition aux magistrats du parquet. Le Juge. Il prend des décisions de justice (ordonnance, jugement). Ils est indépendant dans son activité juridictionnelle. Il n y a que deux seules voies de recours à ses décisions : l appel ou le pourvoi en cassation. Certains juges sont spécialisés : - le juge d instruction : chargé de diriger des enquêtes sur les infractions, de mettre en examen les auteurs - le juge des libertés et de la détention : compétent pour ordonner, pendant l instruction d une affaire pénale, le placement en détention provisoire d une personne mise en examen ou la prolongation de la détention provisoire et d examiner les demandes de mise en liberté. - le juge d application des peines (JAP) : décide des permissions de sortie, des placements à l extérieur, des libérations conditionnelles. Il assure le contrôle de l exécution des peines qui se déroulent en milieu libre.

5 le cadre juridique et ses évolutions Il s agit ici de reprendre les principaux repères législatifs permettant de resituer le contexte, les évolutions des politiques de santé et les perceptions qu a la société des problèmes d alcool, entre stigmatisation et ignorance. Ainsi, très longtemps, la société a considéré la personne dépendante comme un «alcoolique», un être asocial ou dangereux dont la surveillance nécessitait des mesures d ordre public. Aujourd hui, elle tend à être reconnue comme une personne malade. On retrouve les prémices de la législation antialcoolique au 19e siècle, avec 2 grandes lois : - Loi de 1838 : sur l internement des aliénés (loi n 7443 du 30 juin 1838) - Loi de 1873 : concernant la répression de l ivresse publique On s intéressait alors aux atteintes à l ordre public occasionnées par l alcool, et non à la personne présentant un problème. Au 20e siècle, plusieurs mesures sont prises : - Loi du 15 avril 1954 : concernant l alcoolique dangereux. Cette loi dite de «défense sociale» déclinait 3 finalités : - rééduquer l alcoolique dangereux et non le punir - l obliger à se soigner - agir ante delictuum, c est à dire hospitaliser contre son gré un patient alcoolique présumé dangereux. On est passé au droit pénal d obligation qui condamne un état et non un fait. (AA 2003, p18). L article 1er prévoit que «tout alcoolique dangereux pour autrui est placé sous la surveillance de l autorité sanitaire». L article 2 stipule que «tout alcoolique présumé dangereux doit être signalé à l autorité sanitaire par les autorités judiciaires ou administratives compétentes». L article 11 prévoit un bilan sanguin qui peut être pratiqué sur les auteurs et victimes de crimes, délits et accidents de la circulation qui peuvent avoir été commis sous un état alcoolique. La loi de 1954 impliquait des compétences médicales, administratives et judiciaires. Elle a été très peu appliquée notamment en raison d un manque de moyen et d une méconnaissance des intervenants. L ordonnance du 20 juin 2000 (insérée dans la partie législative du code de la santé publique) l a abrogée. Cette ordonnance a valeur de loi depuis le 5 mars En effet, elle a été ratifiée par le parlement français. L abrogation de la loi de 1954 s est quasiment effectuée dans l indifférence, notamment en raison de la possibilité offerte par la loi du 27 juillet 1990 (relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et de leurs conditions d hospitalisation) de contraindre aux soins. Ainsi la personne dépendante peut bénéficier du dispositif de soins publics en santé mentale. - Loi du 3 janvier 1968 : loi sur les incapables majeurs. Un placement sous tutelle judiciaire peut être prononcé par le tribunal de grande instance, dans différents cas d incapacité, dont l alcoolisme. - Circulaire du 30 novembre 1970 : création des centres d hygiène alimentaire CHA - Circulaire du 16 juillet 1973 reconnaît l alcoolisme chronique comme une maladie. - Circulaire DRT n 5-83 du 15 mars 1983 (circulaire «Ralite») : les CHA deviennent des CHAA, centre d hygiène alimentaire et d alcoologie afin d intégrer la prise en charge des malades alcoolo dépendants. Depuis 1994, la prise en charge sanitaire des détenus ne dépend plus de l administration pénitentiaire mais du service public hospitalier. - Loi du 18 janvier 94 relative à la santé publique et la protection sociale : dès leur incarcération, les détenus sont affiliés au régime général de la sécurité sociale. - Loi contre les exclusions du 29 juillet Les CCAA (centre de cure ambulatoire en alcoologie) remplacent les CHAA Les CCAA sont dotés d un statut d institution médico-sociale et sont financés par l assurance maladie. Le contexte législatif et réglementaire est complété par : Le code des débits de boisson Ce code a été mis en place à partir de Il est aujourd hui intégré au code de la santé publique. Les principales mesures portent sur : - l interdiction de délivrer de l alcool aux mineurs de moins de 16 ans, - l accessibilité des boissons alcooliques - la réglementation de la publicité en faveur de l alcool (loi n du 10 janvier 1991, dite «loi Evin», qui réglemente la propagande ou la publicité en faveur des boissons alcoolisées supérieures à 1,2. Le code de la route Loi du 9 juillet 1970 : un taux légal d alcoolémie est fixé pour les conducteurs, soit 0,8 grammes d alcool pur par litre de sang (g/l). Si le taux est supérieur à 1,2g/l, la peine est aggravée - Loi du 10 juillet 1987 : la conduite sous l emprise d un état alcoolique est un délit. Les peines encourues sont de différents degrés en fonction du taux d alcoolémie et en cas d accident corporel : amende, suspension de permis de conduire, retrait du permis, peine d emprisonnement assortie d un sursis total ou d un sursis avec mise à l épreuve, peine d emprisonnement ferme. - Plusieurs lois et décrets modifient ce taux. Aujourd hui, lorsque le conducteur a un taux d alcoolémie compris entre 0,5g/l et 0,8g/l, il est contraint à des sanctions administratives. Cela constitue une contravention de 4e classe, et relève de la compétence du tribunal de police. Lorsque le conducteur est arrêté avec un taux supérieur à 0,8g/l, il commet un délit. Il est poursuivi pénalement et jugé par le tribunal correctionnel. 5 Paris - 22 et 23 mars colloque F3A - santé justice peut on soigner sous contrainte?

6 6 OBLIGATION DE SOINS L obligation de soins est définie par l art L du code pénal : «L obligation de se soumettre à des mesures de contrôle, de traitement ou de soins, même sous le régime de l hospitalisation». Elle intervient en post sententiel. C est une démarche imposée, une sanction pénale. Son but est double : faire prendre conscience du délit et prévenir les récidives. Les lois, décrets et règlements ne définissent pas de façon précise les conditions de mise en œuvre de l obligation de soins. L indication de la mesure, de compétence judiciaire, est prise en dehors de tout avis médical. C est le juge qui en définit l indication et la durée. Toutefois, la personne qui est dans l obligation de soins est libre de choisir son médecin ou la structure où elle souhaite être suivie. Par ailleurs, le médecin va définir la nature des soins (en fonction de son diagnostic), et les dispositifs de soins à proposer à la personne. Il ne rend pas compte du contenu de son suivi. INJONCTION THÉRAPEUTIQUE L injonction de soins est une mesure prévue dans le cadre de la loi du 31/12/70 (n relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et la répression du trafic et l usage de substances vénéneuses) permettant au parquet de suspendre les poursuites à l encontre d un usager de stupéfiants qui accepte d être pris en charge par le système sanitaire. La DDASS (Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales) est chargée de faire procéder à un examen médical de l usager et de son orientation. Le suivi thérapeutique doit articuler une prise en charge médicale, lorsque l état de l usager de drogue le justifie, avec un suivi psychologique et un suivi social. Elle doit prévenir le parquet en cas d échec du suivi. (Circulaire interministérielle du 28 avril 1995). Il s agit d une mesure contraignante, une alternative sanitaire aux poursuites pénales sous la forme d une procédure mixte judiciaire et sanitaire. Des modifications concernant l injonction thérapeutique sont à prévoir en fonction de l adoption du projet de loi contre la délinquance. (Cf présentation du projet de loi P.15) chiffres QUELQUES Au 1er septembre 2006 : personnes sont sous écrou, ( prévenus et condamnés). Arpenter le champ pénal N 13 16/10/2006 En 2003, un peu plus de 3 entrants en prison sur 10 déclarent une consommation excessive d alcool. (Source Enquête DREES Direction de la Recherche, des Études, de l Évaluation et des Statistiques) En 2003 : 6% des entrants en prison ont bénéficié d une consultation spécialisée en alcoologie, contre 4% en 1997 Dans le cadre des États En 2002, près d une personne sur trois est Généraux de la condition adressée à une consultation «alcoologie» pénitentiaire, une consultation individuelle des par des services administratifs ou la justice détenus et des personnels En 2002, l alcool au volant représente plus a été organisée. À travers du quart des condamnations en France un manifeste et un cahier En 2002, interpellations pour de doléances, les organisations membres plaident ivresse publique et manifeste (source Direction Générale de la Police Nationale / Direction Générale de la pour une profonde réforme des prisons et des droits Gendarmerie Nationale) En 2001, personnes sont venues des personnes privées de consulter dans un CCAA liberté. (source D.G.S. - Direction (www. etatsgenerauxprisons.org) Générale de la Santé) L IVRESSE PUBLIQUE ET MANIFESTE est sanctionnée depuis C est une contravention de 2ème classe, réprimée par l article R du code de santé publique qui donne lieu à une procédure judiciaire poursuivie devant le tribunal. La loi punit le fait de «se trouver en état d ivresse manifeste dans les lieux tels que chemin, rue, café, cabaret, autre lieu public. Dans ce cas, par mesure de police, la personne est conduite à ses frais au poste le plus voisin ou dans une chambre de sûreté pour y être retenue jusqu à ce qu elle ait recouvré la raison», art L CRITERES DE LA DEPENDANCE SELON DSM-IV (Diagnostic and Statistical Manual - Révision 4) La dépendance* est un mode d utilisation inapproprié d une substance, entraînant une détresse ou un dysfonctionnement cliniquement significatif, comme en témoignent trois (ou plus) des manifestations suivantes, survenant à n importe quel moment sur la même période de douze mois : 1. Tolérance, définie par l une ou l autre des manifestations suivantes : a. Besoin de quantités nettement majorées de la substance pour obtenir une intoxication ou l effet désiré ; b. Effet nettement diminué en cas d usage continu de la même quantité de substance. 2. Comme en témoigne l une ou l autre des manifestations suivantes : a. Syndrome de sevrage caractéristique de la substance ; b. La même substance (ou une substance apparentée) est prise dans le but de soulager ou d éviter les symptômes de sevrage. 3. Substance souvent prise en quantité supérieure ou sur un laps de temps plus long que ce que la personne avait envisagé 4. Désir persistant ou efforts infructueux pour réduire ou contrôler l utilisation de la substance ; 5. Temps considérable passé à faire le nécessaire pour se procurer la substance, la consommer ou récupérer de ses effets ; 6. D importantes activités sociales, occupationnelles ou de loisirs sont abandonnées ou réduites en raison de l utilisation de la substance ; 7. Poursuite de l utilisation de la substance malgré la connaissance de l existence d un problème physique ou psychologique persistant ou récurrent déterminé ou exacerbé par la substance. *Avec dépendance physique : signes de tolérance ou de sevrage (item 1 ou 2 présents) ; *Sans dépendance physique : pas de signes de tolérance ou de sevrage (item 1 ou 2 absents).

7 le manifeste de la F3A Certaines populations nécessitent des approches particulières, notamment celles dont la situation est un frein au recours au dispositif général : personnes en situation de grande précarité ou d exclusion, étrangers en situation irrégulière, population carcérale, personnes atteintes de grands troubles psychiques et/ou comportementaux. Ces situations justifient des procédures ou même des dispositifs spécifiques nécessitant éventuellement une augmentation des moyens. Ces populations sont plus fréquemment concernées par la dépendance aux produits, notamment alcool, tabac et médicaments psychotropes. Ces dispositifs spécifiques doivent faire l objet d une description et d une évaluation rigoureuses, et se donner comme principe d éviter, autant que faire se peut, de mettre en place des filières spécifiques, l objectif devant donc rester l accès au dispositif général de soin. L intervention de la justice pouvant diriger un «justiciable» vers le soin (injonction thérapeutique, obligation de soin) amène un nombre important de personnes vers les lieux de consultation pour dépendants. Ces orientations ne sont pas toujours en rapport avec un besoin de soin, comme sous-entendu dans les dénominations judiciaires : excès occasionnel ayant provoqué une conduite sous l emprise de l alcool ; usage occasionnel de cannabis, par exemple. Mais ces rencontres peuvent avoir dans ces cas un rôle de prévention secondaire. Les contradictions absolues entre rôles de soignant et d expert doivent être sans cesse rappelées. Les demandes d expertise ne peuvent être honorées que s il existe une possibilité de prise en charge par une autre personne. La liberté de choix du médecin ou du lieu de soin doit être respectée. La F3A met en garde contre les tentations d interventions «présententielles» qui ne respecteraient pas ces principes. Il n entre pas dans la fonction du soignant de juger les comportements. 7 Paris - 22 et 23 mars colloque F3A - santé justice peut on soigner sous contrainte?

8 De l APECAPP à la commission santé-justice de la F3A... 8 À l origine de l APECAPP, l Association pour la prévention et l étude des conduites d alcoolisations des populations pénales, créée en 1991, il y a quelques cliniciens qui sont intervenus ou interviennent encore auprès des détenus de la région parisienne, de la Santé à Fleury-Mérogis. L enjeu est de faire sortir de l ombre les besoins de soins majeurs que ces cliniciens ont décelés dans les prisons où ils sont allés animer, qui des ateliers de prévention, qui des consultations d alcoologie. Faire sortir de l ombre, cela veut dire notamment mettre en place un argumentaire scientifique pour que ces besoins soient précisément évalués, et que la politique de santé publique tienne compte de ces évaluations ; cela veut dire aussi mettre en place des échanges entre les acteurs qui dans d autres régions ont les mêmes préoccupations. Et c est enfin commencer le lobbying qui devra faire savoir aux responsables de l organisation des soins que les moyens consacrés à l alcoologie dans les prisons ne seraient pas perdus pour tout le monde! Mais au-delà des prisons, on s intéressait déjà à l ensemble des populations pénales, car il était clair que la prison n est que la face visible d un phénomène plus global, l interférence entre la problématique alcoolique et l action de l appareil judiciaire, interférence qu on avait depuis longtemps repérée au sujet de la conduite automobile, mais aussi des actes de violence interpersonnelle. On peut citer les travaux réalisés pendant les dix années d existence autonome de l APECAPP (qui n a disposé pour faire tout cela qu un salarié à temps plein dans les années les plus fastes, ce qui signifie que l apport «militant» de ses associés a été déterminant) : - sur le plan de la recherche épidémiologique, une recherche sur les problèmes d alcool des jeunes détenus, puis sur la situation alcoologique des entrants en maison d arrêt ; un travail de validation du questionnaire CAGE/DETA (Cut Down, Annoyed, Guilty, Eye, Opener/Diminuer, Entourage, Trop, Alcool) comme instrument de repérage des alcoolodépendants à l entrée en maison d arrêt ; un travail sur l offre de soin en maison d arrêt ; l APECAPP a aussi apporté un soutien immédiat à la recherche collaborative EVACAPA (ÉValuation d une Action auprès des Conducteurs Ayant un Problème d Alcool) menée autour de Pascal Gache ; cette recherche a montré, pour la première fois en France, que l intervention sanitaire et éducative pouvait avoir un effet supérieur au traitement pénal dans la prévention de la récidive des CEA (Conduites sous l Emprise d Alcool) ce qui n est pas rien! - sur le plan de l échange et de la communication entre équipes, trois colloques nationaux, l un portant sur l offre de soins en prison (Dijon, 1993), le deuxième sur le dialogue entre justice et soignants (à l école de la Magistrature de Bordeaux, en 1995), le troisième sur les conduites sous l emprise de l alcool (à Toulouse, en 1998). Cette stratégie de communication a culminé avec la co-organisation avec la SFA (Société Française d Alcoologie) de deux journées sur «Alcool, justice, violence» en mars Ces journées ont elles-mêmes été suivies d un projet de numéro spécial d «Alcoologie et addictologie» - qui se concrétise seulement à la fin de cette année 2006, ce qui prouve qu il faut à tout projet de la persévérance! - sur le plan du lobbying, quelques percées ont pu avoir lieu, avec une lente prise de conscience des autorités sanitaires de la place des problèmes d alcool chez les détenus, mais avec un coup d arrêt en 1997 dû à la publication d un rapport sur la santé des détenus, rédigé par le Professeur Gentilini, qui ignorait pratiquement la question alcool et, s il se prononçait pour une extension des «antennes toxicomanies», ne confiait que de manière très vague les problèmes d alcool aux CCAA(Centre de Cure Ambulatoire d Alcoologie) - sans financement prévu - et aux services psychiatriques. Cet échec, car c est ainsi que l ont vécu les rares professionnels qui travaillaient à cette époque dans les «antennes d alcoologie» (4 existaient pour 186 établissements pénitentiaires sur le territoire national!), a amené à changer de stratégie et à prendre le parti de favoriser les liens entre équipes d alcoologie ambulatoire et équipes médicales travaillant en établissements pénitentiaires.

9 Philippe MICHAUD Ce parti-pris a été défendu ensuite auprès du Ministère de la santé, de l assurance-maladie puis de la MILDT lorsque celle-ci a commencé à s affirmer comme une référence en matière de stratégie pour les actions de santé publique en matière d alcool. C est ainsi que l APECAPP a proposé une recherche-action sur la mise en place de consultations avancées des CCAA dans les établissements pénitentiaires d Île-de-France. Financée à la fois par la Région, l assurancemaladie et la MILDT, elle préfigurait à la fois les «contrats d objectifs» et les «plans régionaux de santé publique» dans ce qu ils peuvent avoir de positif avec leur volonté de faire travailler ensemble des acteurs qui jusqu à présent s ignoraient. Deux résultats à ce travail. Il montrait : 1 que des interventions brèves, de deux ou trois rencontres en moyenne, permettaient effectivement au quart des alcoolodépendants rencontrés pendant qu ils étaient détenus, de rencontrer, une fois libérés, le dispositif ambulatoire de soins ; 2 que les CCAA étaient prêts à se mobiliser pour intervenir auprès des populations pénales. Ces deux résultats, un certain épuisement de la vie associative dans l APE- CAPP, mais aussi le lien qui s était tissé entre celle-ci et la Fédération française de l alcoologie ambulatoire, ancien nom de la F3A, grâce au partage des locaux et à de nombreux cas de «double appartenance», ont finalement amené à proposer une fusion entre les deux associations, qui s est traduite par la naissance de a F3A et de la commission «prévention et étude des conduites d alcoolisation pénales» de ladite Fédération, vite dénommée «commission santéjustice» de la F3A. Que pense l ancien fondateur et longtemps président de l APECAPP, depuis son poste actuel de membre du Conseil d Administration de la F3A? Que ce regroupement des forces n avait que de bonnes raisons, mais que le changement de cadre ne s est pas fait sans quelque solution de continuité, probablement dû à l épuisement de la première équipe militante, à la disparition pendant trois ans d un poste salarié spécialement dédié, à la transmission imparfaite de l histoire de l APECAPP dans la F3A. Mais aussi, que la relève est maintenant assurée avec une responsable salariée efficace, que les projets anciens se concrétisent (le numéro spécial d «alcoologie et addictologie», les colloques réalisés en janvier 2005 à Biarritz et en préparation pour les 22 et 23 mars 2007, la publication de l étude sur l offre de soins...). Même la leçon des difficultés rencontrées pour certaines initiatives (formation des SPIP (Services Pénitentiaires d Insertion et de Probation), interventions en établissements pour peine, besoins de financement pérennes...) peuvent être utiles pour relancer une réflexion stratégique. Les échanges cliniques sont en effet nécessaires et utiles, et le groupe qui travaille sur ce thème depuis la rentrée au sein de la F3A a bien raison de se pencher sur les difficultés cliniques et éthiques de l intervention en prison ; mais il me semble que la F3A, pour être la continuatrice fidèle de l APECAPP, doit faire siennes les conclusions de l enquête sur l offre de soins qu Agnès Dumas et moi-même avons publiée sur le site de la F3A et résumé dans «Alcoologie» : face à un tel besoin de soins, qui concerne environ un quart des détenus, et un nombre encore non mesuré des personnes «sous main de justice» en milieu ouvert, les moyens d intervention sont en progrès certes depuis 1993, mais toujours notablement insuffisants ; et nous devrons continuer de nous mobiliser pour que ce pays se donne les moyens de soigner pour éviter de répondre uniquement en punissant. La F3A, en conformité avec son manifeste, peut fortement y contribuer. 9 SPIP : Créé par le décret n du 13 avril 1999, il a pour mission, auprès des établissements pénitentiaires et du milieu ouvert, de favoriser l accès aux droits et aux dispositifs d insertion de droit commun des personnes placées sous main de justice (détenus, personnes placées sous contrôle judiciaire...).

10 L OFFRE DE SOINS EN ALCOOLOGIE DAN Rapport d enquête - Agnès Dum L objectif principal de cette étude est de dresser un état des lieux de la prise en charge des problèmes d alcool en milieu carcéral : - en décrivant précisément les interventions alcoologiques spécifiques proposées aux détenus, - en appréhendant parallèlement la prise en charge interne assurée par les services de l établissement pénitentiaire. De plus, cette étude constitue la réplication de l unique enquête conduite sur ce sujet par le Docteur Philippe Michaud en 1993, et qui avait mis en évidence une carence globale de l offre de soins. La comparaison de ces deux enquêtes transversales permet donc de mesurer les évolutions conduites durant la dernière décennie. 10 Les populations pénales sont particulièrement concernées par les problèmes d alcool. Dans les deux enquêtes de la DREES (1999 et 2005) sur la santé des entrants en prison, un tiers des entrants en prison déclarait une consommation excessive d alcool. En 1992, une étude mesurant la prévalence des problèmes d alcool dans les maisons d arrêt françaises estimait que 22,5% des entrants souffraient d une alcoolodépendance physique ou psychologique et que 37% avaient un problème lié à l alcool, ce qui incluait les dépendances, les ivresses à répétition et les consommations supérieures à 280g d alcool pur par semaine. Depuis 1994, l organisation des soins en milieu pénitentiaire, et notamment la prise en charge des dépendances aux substances psychoactives, a été radicalement bouleversée. La prise en charge sanitaire des détenus ne dépend plus de l administration pénitentiaire mais du service public hospitalier : les détenus sont désormais soignés au sein des Unités de Consultation et de Soins Ambulatoires (UCSA), par une équipe pluridisciplinaire, le plus souvent composée de médecins et d infirmiers. De plus, de nouvelles directives modifient depuis 2001 les objectifs poursuivis en matière de prise en charge des détenus présentant des consommations excessives de substances psychoactives : elles prévoient le repérage systématique des situations d abus ou de dépendance, la mise en place d une prise en charge adaptée aux besoins des détenus, ainsi que le développement de la prévention, des aménagements de peine et de la préparation à la sortie. LES PRINCIPAUX RÉSULTATS Quatre grands types d interventions alcoologiques ont été répertoriés, se distinguant selon le type d intervenant (bénévole ou professionnel) et selon le type de public visé (un détenu ou un groupe de détenus). Parmi les 185 établissements inclus dans l enquête, 30 établissements (soit 16%) ne proposent aucune intervention mais 11 d entre eux prévoient la mise en place d une telle intervention. 60% Interventions en «individuels» par de professionnels 31% Interventions en «groupes» par des professionnels travail salarié interventions Seulement 4 établissements (2%) offrent les quatre types ventions alcoologiques. - Des interventions individuelles professionnelles sont réalisées dans 112 établissements (60% de l ensemble des établissements in- clus dans l enquête), d inter- - Des interventions de groupe professionnelles sont réalisées dans 66 établissements (31%), - Des réunions d associations néphalistes sont organisées dans 46 établissements (25%), - Des visiteurs de prison sont présents dans 34 établissements (18%). Soixante dix établissements (38%) proposent une intervention sur le tabac, le plus souvent réalisée par les soignants de l UCSA. Par ailleurs les détenus ont à leur disposition des patchs dans 152 établissements (82 %), mais dans 44% des cas ce sont les détenus qui payent les substituts nicotiniques (dans 39% des cas c est l hôpital de rattachement). 25% Interventions en «individuels» par de visteurs de prison 18% Interventions en «groupes» Réunions d associations néphalistes travail bénévole - 80 interventions

11 S LES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES as & Docteur Philippe Michaud Caractéristiques des interventions professionnelles Les pourcentages sont relatifs aux établissements concernés par chaque type d intervention Intervention individuelle Intervention groupale Nombre d établissements concernés 112 établissements 66 établissements Nombre d intervenants 143 intervenants 114 intervenants Nombre d intervenants moyen par étab. concerné 1,3 1,7 Fréquence moyenne du temps de travail déclaré La moyenne est de 3h1/2 55 % des intervenants /semaine travaillent <1h / semaine Employeurs des intervenants 57 % CCAA 41 % UCSA/SMPR 20 % ANPAA (Assocation Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie) 35 % CCAA 17 % UCSA/SMPR 15 % ANPAA Nombre total de détenus vus en Difficultés ressenties par les intervenants l organisation pénitentiaire (39%) l orga. pénitentiaire (17%) le manque de temps (29%) la mise en place (15%) le manque de financement (17 %) le manque de temps (9 %) le local (15 %) le local (8 %) Demande non satisfaite 50 % des établissements 21 % des établissements Dans le cadre d une démarche de soins, en moyenne 3 minutes sont disponibles par semaine pour chaque personne alcoolodépendante incarcérée, soit à peu près 1h1/2 par an et par détenu concerné. LA PRISE EN CHARGE INTERNE Concernant le dispositif interne aux établissements, aucun «référent alcool» ne semble avoir été désigné dans 71% des 185 établissements. Dans 3% des cas, soit l établissement comporte une antenne d alcoologie, soit plusieurs professionnels spécialisés en alcoologie travaillent au sein de l UCSA ou du SMPR. Le sevrage des détenus ne suit aucun protocole particulier dans 58% des établissements enquêtés. Pour la préparation à la sortie, la très grande majorité des professionnels ne fait que donner des coordonnées au détenu sortant. Dans 60% des cas, il peut arriver qu un rendez-vous à l extérieur soit pris depuis la prison et dans 55% des cas des visites peuvent être organisées dans la prison. Dans seulement un tiers des établissements un courrier peut être rédigé à l attention d un correspondant extérieur, principalement d un CCAA. L absence de partenariat reste cependant notable, puisque dans 20% des cas, les professionnels ont déclaré ne pas avoir de partenaire particulier pour l orientation post-carcérale. Enfin, le manque de fonds pour financer des actions et le manque de temps arrivent au premier plan des difficultés ressenties par les professionnels (respectivement 14% et 13% des répondants), suivis par les difficultés pour recruter des professionnels (10%) et par l organisation pénitentiaire (9%). Par contre, le problème du «déni» d alcoolisation est probablement sur-évalué par les professionnels des prisons (12% d entre-eux désignent cette difficulté, contre seulement 3,5% des intervenants en alcoologie). EN GUISE DE CONCLUSION À l issue de cette étude, les premiers constats quantitatifs suggèrent que l offre de soins est amplement répartie. Cependant, les données concernant la fréquence des interventions, le nombre d intervenants et leur temps de travail révèle la faiblesse qualitative du dispositif. En termes d évaluation du nombre de détenus rencontrés, le bilan reste modeste, puisque en 2003 un peu moins de 4000 détenus ont été pris en charge dans le cadre d une intervention individuelle axée sur le soin alors que la population incarcérée souffrant d une alcoolodépendance peut être estimée à détenus par an. Si l intervention alcoologique en prison a connu une extension importante entre 1993 et 2004 en ce qui concerne le nombre d établissements, il reste encore de nombreux établissements qui ne disposent que d une intervention bénévole, voire d aucune intervention. Le nombre d actes réalisés par établissement demeure particulièrement modeste, tout comme le nombre d équivalents temps plein sur l ensemble du territoire national. À l objectif d une intervention par établissement devrait s ajouter celui d une rencontre au moins pour chaque alcoolodépendant incarcéré, ce qui impliquerait de multiplier pratiquement par cinq le temps de travail pour l activité alcoologique en prison. 11

12 Un tour en Europe En France, 56% des condamnations pour infractions en matière de circulation routière sont liées à l alcool. Qu en est-il de la réglementation en Europe? 12 La Sécurité Routière est un problème grave en Europe : l équivalent d une ville de moyenne importance est rayée de la carte chaque année ( morts en 2003). Depuis le traité de Maastricht, l Europe a les moyens de prendre des mesures communes. L objectif est de réduire de moitié le nombre de tués d ici 2010, tâche difficile compte tenu de l intégration de nouveaux pays membres. Les premières causes identifiées sont la vitesse et l alcool. Quels sont les comportements de nos voisins, leurs conséquences en terme d accidents, leurs réglementations? Cette comparaison jointe à un passage en revue des expériences intéressantes menées par quelques pays modèles tels que la Suède, les Pays- Bas et le Royaume-Uni nous permettront d alimenter le débat autour de quelques questions-clés, et pourquoi pas, de proposer des idées susceptibles d améliorer la situation dans notre pays. À chacun ses morts Savez-vous qu il vaut mieux rouler en Angleterre ou aux Pays-Bas qu en Grèce ou en France? Dans le gradient manifeste Nord-Sud, la France se situe nettement dans les pays du Sud comme en témoignent les chiffres de mortalité par million d habitants (1998) : Suède : 60 Royaume-Uni : 61 Allemagne : 95 Italie : 110 Espagne : 151 France : 152 Grèce : 212 Portugal : 243 Certes la France a beaucoup progressé depuis 2002, date à laquelle la lutte contre l insécurité routière est devenue un chantier national prioritaire. Elle reste cependant parmi les mauvais élèves de l Europe. À chacun son comportement Même s il existe de grandes différences individuelles à l intérieur de chaque pays, on retrouve le même gradient de dangerosité Nord-Sud. C est ce qui ressort d une enquête intitulée SARTRE (Social Attitude to Road Traffic in Europe) : Si pour le Suédois, la voiture n est qu un moyen de transport qui se doit d être le plus sûr possible, pour un Italien, ce sera volontiers un outil de pouvoir. Quant au Français, chacun sait que sa virilité lui permet de tenir aussi bien la vitesse que l alcool ; rappelons qu en France, 94% des automobilistes condamnés sous l emprise de l alcool sont de sexe masculin... À chacun sa réglementation Si la Commission Européenne a bien le pouvoir de fixer des objectifs communs, la réglementation relève des décisions de chaque état membre, au nom du principe de subsidiarité. Ces différences concernent principalement le taux d alcoolémie toléré :

13 En SUÈDE La sécurité dans tous les domaines de la société est depuis longtemps une priorité ; l accent est mis sur la responsabilisation de tous les acteurs de la sécurité routière. En matière d alcoolémie : les contrôles sont fréquents : 9 millions d alcootests par an pour 8 millions d habitants, soit autant qu en France, pour 62 millions d habitants. le système EAD (éthylomètre antidémarrage) fait l objet d une expérimentation dont les résultats sont encourageants. Aux PAYS BAS La «sécurité durable» est obtenue grâce à un savant dosage entre : l éducation : dès l école maternelle, la sensibilisation des enfants à la sécurité routière vise à ce que leurs comportements soient différents de ceux de leurs parents. la répression : avec une loi fermement appliquée. l équipement. Au ROYAUME UNI On peut parler de «culture du respect» vis-à-vis de la loi, des autres et de soi-même ; les jeunes britanniques qui sortent des pubs sont loin d être toujours en état de conduire et le phénomène du «binge-drinking» n est semble-t-il pas sur la voie de l amélioration... Le taux d alcoolémie légal est également plus élevé. Alors? Les fêtards optent pour les transports en commun! Le temps semble venu de nous poser quelques questions : Pourquoi ne pas abaisser le taux d alcoolémie à 0,2 g/l voire 0g/l comme certains européens? La Commission Européenne préconise un alignement sur le taux de 0,5g. L enquête SARTRE a montré que les conducteurs des pays où ce taux est inférieur ne souhaitent pas qu il soit relevé. En France, un comité d experts du Conseil National de la Sécurité Routière, dont le Pr Got, s est prononcé pour le maintien du taux de 0,5g. Outre les raisons scientifiques, ils s appuient sur deux constatations : les bons chiffres du Royaume-Uni, l implication statistique importante des fortes alcoolisations. Le débat est-il si neutre en France, premier pays producteur et consommateur de vins, où la tolérance sociale de l alcoolisation est particulièrement forte? En Europe, qu en est-il des lobbies alcooliers et de leur influence? Le docteur D.Martin, responsable du bureau addictions à la DGS évoquait dans la revue Santé de l Homme (nov/déc 03) que toute politique européenne visant le risque alcool se heurtait à de nombreux freins tels que les actions du groupe Amsterdam, représentant les industries de la bière, la Direction de l Agriculture, mais aussi le service chargé des taxes... Il n y a pas que les députés de nos régions viticoles... Que penser de l efficacité comparée des mesures de prévention et de répression? En France, la réduction du nombre de tués sur les routes a été obtenue essentiellement par des mesures répressives, le terme employé de «délinquance routière» justifiant cette politique. Pour les alcoolémies routières, on observe un encombrement des tribunaux ; par ailleurs les peines de prison souvent prononcées sont loin de faire la preuve de leur efficacité en terme préventif... Nos structures spécialisées, déjà en déficit de moyens, comptent une proportion de plus en plus importante de personnes soumises à des obligations de soins. Il est vrai que la prévention en France a la réputation d être peu efficace et coûteuse... Ne pourrions-nous pas nous inspirer un peu plus des politiques de nos voisins? Telles que la prévention très précoce dès la maternelle aux Pays-Bas, le projet belge d étendre l opération «capitaine de soirée» aux conducteurs d âge mûr. Là-bas, c est «Bob» et il est très populaire, pas seulement chez les jeunes, ou encore des actions ciblées sur des publics intermédiaires : gérants de discothèque, barmen, responsables sportifs, parents,... Indirectement, cette question soulève le problème des multirécidivistes, qu il s agisse de consommateurs excessifs occasionnels ou d alcoolodépendants. Claudine Pérez Diaz, chercheur au C.N.R.S., évoque «le déni social dont l usage d alcool fait l objet, responsable d une absence d intérêt pour le dispositif de soins qui lui est consacré...». Les décisions politiques en matière d usage de stupéfiants, ou encore de maladies rares telles que «la vache folle» sont plus rapides et plus médiatiques. Les premières réglementations sur l alcoolémie routière datent de Peut-être existe-t-il un essoufflement de la réflexion ou plus tragiquement un sentiment de fatalité vis-à-vis de toutes les pathologies qu elles soient physiques, psychologiques ou sociales liées à l alcoolisation? Le Dr D.Martin évoquait la nécessité pour l Europe de «ne plus se limiter à l organisation d un grand marché». «Il est fondamental, dit-elle, que l Europe des citoyens se construise en lui donnant un sens par de véritables politiques sociales et sanitaires qui ne soient plus seulement protectrices mais bien incitatives». Au total, la tâche est lourde pour l Europe : harmoniser les réglementations malgré les différences culturelles et économiques, créer une politique sociale et sanitaire commune... À notre niveau, peut-être est-il urgent d induire une concertation des professionnels chargés de la répression, en particulier la Justice, comme ceux de la prévention et du soin? À quand les changements de comportement? Le respect et le civisme britanniques sur nos routes? Docteur Sabine JOFFRE Documentaliste MC Genest CCAA de Beaumont sur Oise 13

14 Partenariat JUSTICE-SANTE «Chemins à suivre pour sortir des prés carrés» Résumé de l intervention de Thierry- Emmanuel Spieser, directeur du SPIP de Maubeuge, lors du colloque organisé par le Dr Yguel sur le thème Santé-Justice-Recherche à Lille le 12 mai Ce résumé a été réalisé par Sabine Joffre. L intervention est disponible dans son intégralité sur le site de la F3A : 14 Thierry Emmanuel Spieser propose à partir d une analyse des difficultés rencontrées dans le partenariat JUSTICE-SANTE de chercher à dépasser ces obstacles pour parvenir à travailler ensemble dans l intérêt mutuel ainsi que de celui des personnes suivies. Il propose un court rappel historique des progrès relatifs de cette relation : en effet, si avant 1994, l existence d une chaire de médecine pénitentiaire (tenue par Me Troisier) témoignait de la subordination de la médecine au secteur pénitentiaire, la création des UCSA (Unités de Consultation et de Soins Ambulatoires) a créé un état de sujétion réciproque. Puis, à propos de la population des agresseurs sexuels faisant l objet de mesures pénales, il recense les contradictions et conflits de valeur pour les 2 parties prenantes. Du côté médical, d abord : Concilier secret médical et obligation de soins s apparente à un véritable défi! «Le fait pour un médecin d être lié dans son exercice professionnel par un contrat ou un statut à une administration n enlève rien à ses devoirs professionnels et en particulier à ses obligations concernant le secret professionnel et l indépendance de ses décisions», nous dit le code pénal. Soigner «un comportement sexuel agressif ou déviant» suppose qu il relève d une pathologie mentale. «Le psychiatre ne doit pas participer à un traitement psychiatrique imposé en l absence de maladie psychiatrique» (rapport de l Association mondiale de psychiatrie 1977). Or, la différence d objectifs est flagrante : - pour le médical : «comprendre le symptôme, traiter, soulager» - pour la justice, «coller à la vérité des faits, décider de la sanction, de son application, puis des soucis de réparation et de réinsertion». «Le conflit de valeurs principal se situe dans le problème crucial de la confidentialité» : - comment le médecin coordonnateur peut éclairer la justice sur l implication de la personne dans les soins en limitant au maximum les informations contenues dans les certificats de suivi? - par ailleurs, le médecin en tant que citoyen est tenu de dénoncer un crime «dont il serait possible de prévenir ou limiter les effets». La dernière difficulté soulignée est l ambiguïté de la relation thérapeutique au cours de l incarcération : «le condamné doit être consentant mais il n est pas libre de refuser» ; Cependant, si l indication de soins a été bien portée, le suivi s émancipe progressivement de l obligation initiale. Du côté pénitentiaire ensuite : - Il convient souvent que l agresseur incarcéré se taise pour éviter la stigmatisation et les sanctions de la part des autres détenus, contrairement à la prise en charge médicale qui nécessite que la souffrance (infligée et subie) soit exprimée. Il peut se produire un véritable déni et en cas d «atteinte à la dignité» par des codétenus une «inversion de la place de victime», sources éventuelles de récidive à la sortie. - Deux problèmes sont ensuite soulevés :. L accroissement relatif de cette population pénale, son vieillissement et son mauvais état de santé,. La nécessité d une prise en charge spécifique ; Il rappelle que la commission Cartier préconisait en 1995 de : «mieux prendre en charge le criminel pendant sa détention dans un environnement adapté» et de proposer des soins aux auteurs d infractions sexuelles même légères. L intervenant souligne «le conflit de valeurs» entre - le désir de ne pas créer de quartier séparé (à l instar des Canadiens), - l absence de moyens spécifiques suffisants (SMPR - Service Médico Psychologique Régional, psychiatres, infirmiers, travailleurs sociaux,...). Il propose, suivant les recommandations des experts, les objectifs suivants : - mieux connaître ces populations, - mieux former tous les intervenants médicaux, paramédicaux, pénitentiaires, - développer de véritables projets d insertion (ou réinsertion) pendant et après l incarcération, - former les agents pénitentiaires chargés de cette mission à faire la part entre les champs médical et pénitentiaire. Au total, il importe que, sans abandonner leur spécificité, les acteurs des champs médical et judiciaire travaillent ensemble, prennent les moyens de se parler, de se former mutuellement et de réaliser des projets communs ; il souhaite cependant que ces initiatives ne soient pas trop personnalisées, afin de pouvoir durer dans le temps. UCSA : unité hospitalière implantée en milieu pénitentiaire, qui assure les soins incluant la prévention, l organisation des soins en milieu hospitalier ainsi que la continuité de soins à la sortie de détention. (loi n du ) SMPR : service de psychiatrie implanté en milieu pénitentiaire ayant une vocation régional et comprenant une unité d hospitalisation, offrant des soins diversifiés incluant l hospitalisation volontaire. (Décret n du 14 mars 1986, circulaire 45 DH/DGS/DAP du )

15 PROJET DE LOI SUR LA DELINQUANCE. QUELQUES ASPECTS CONCERNANT LES ADDICTIONS ET L USAGE EXCESSIF D ALCOOL «Bandits, voyous, voleurs, chenapans...» Analyse du projt de loi conduite pour Actal par Sabine Joffre Depuis longtemps, même avant ce texte de Prévert écrit en 1936, la délinquance est une préoccupation politique majeure. De nombreux textes ont été votés particulièrement ces dix dernières années en matière de procédure pénale, de peines d ordre public ; pourtant le projet de loi intitulé «Prévention de la Délinquance» se veut d une autre nature. Il a l ambition d aborder la question dans toutes ses dimensions «sociale, sanitaire, éducative, répressive». Il vise en effet à s attaquer «aux causes profondes de la délinquance : le sentiment d impunité, la violence gratuite, la toxicomanie...» En gestation depuis plus de trois ans, il comporte 51 articles regroupés en 9 chapitres. Adopté par le Sénat, qui a rajouté bon nombre d amendements, il retourne fin novembre à l Assemblée Nationale. Deux axes nouveaux apparaissent. Le renforcement du rôle du maire et l action contre la délinquance des mineurs. Les controverses viennent de tous les horizons : - de l opposition politique : si la droite le décrit comme «amitieux mais perfectible», la gauche dénonce son caractère «idéologique, sécuritaire, détestable et inutile». - de nombreux professionnels notamment de la justice ou de l action sociale. Quelles sont les mesures prévues en matière d addiction ou d abus d alcool? C est le chapitre VI «Dispositions tendant à prévenir la toxicomanie et certaines pratiques addictives» qui nous concerne directement. Ce chapitre modifie certaines dispositions du Code de Santé Publique. Ces mesures correspondent à trois objectifs principaux : - augmenter l efficacité et le champ d application de l injonction thérapeutique, - rendre la réponse pénale «plus diversifiée et plus systématique», selon les termes du Garde des Sceaux, - augmenter la répression. 1- MESURES VISANT À AUGMENTER L EFFICACITÉ ET LE CHAMP D APPLICATION DE L INJONCTION THÉRAPEUTIQUE : Ces mesures concernent aussi bien l usage de stupéfiants que les infractions en rapport avec «la consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques». Une nouvelle fonction est créée : «le médecin-relais» chargé d assurer «l interface entre l autorité judiciaire et les personnels de soins» toujours d après les termes du Ministre. Cette nouvelle fonction remplacera celle des «médecins injoncteurs» de la DDASS (Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales). Les médecins relais seront habilités à faire procéder à «un examen médical», «une enquête sur la vie familiale et professionnelle de l intéressé». Cet examen leur permettra de déterminer «l état de dépendance physique ou psychologique» et ainsi de déterminer «le type de traitement ou de suivi adapté» et enfin d en «contrôler le suivi par la suite». Leurs conclusions devront être transmises à l autorité judiciaire ainsi que toute constatation d interruption de suivi. Aucune précision n est donnée sur le mode de recrutement de ces médecins, les modalités devant être fixées ultérieurement par décret en Conseil d Etat. 2- MESURES VISANT À DIVERSIFIER LA RÉPONSE PÉNALE : - Mesures de «composition pénale» sous l autorité du Procureur de la République : outre les injonctions thérapeutiques, il s agit d amendes, de travaux d intérêt général tels que des «activités d insertion professionnelle ou de mise à niveau scolaire» ; - «Stages de sensibilisation aux dangers des produits stupéfiants» : il s agit d une nouvelle peine inspirée de ce qui existe en matière de Sécurité Routière. 3- MESURES VISANT À AUGMENTER LA RÉPRESSION : - l usage de «drogue» ou d alcool deviendra une circonstance aggravante : - pour les infractions contre les personnes, - ou si le consommateur est une personne dépositaire d une mission de service public - la «provocation à la consommation» ou le trafic de stupéfiants en direction de mineurs sera également puni très sévèrement - enfin, des contrôles d identité et des dépistages de consommation de stupéfiants seront pratiqués dans les transports publics ; le refus de s y soumettre sera très sévèrement puni. L ensemble de ces mesures s appliquera aux mineurs de plus de treize ans A l heure où nous imprimons ce cahier thématique, la loi n est pas définitivement votée ; nous ouvrirons ce débat lors d une prochaine publication de la F3A. - Référence du texte :

16 16 f «l o r i l è g e Michèle, secrétaire : «Quelqu un envoyé par le juge demande un rendez-vous, c est urgent et je n ai pas de place de premier entretien à proposer avant un mois et demi, qu est ce que je fais?» Gérard, nouveau patient : «Ah au fait Docteur, il me faudrait une attestation comme quoi je suis venu vous voir...» Catherine, infirmière : «Je suis ennuyée, Daniel, un patient que j avais suivi il y a deux ans refait surface avec une demande de post cure, manifestement sous pression de la justice ; mais il ne me semble pas prêt du tout à envisager un sevrage!» Michèle, secrétaire : «François a manqué ces deux derniers rendez-vous, sans prévenir ni s excuser, la consigne est de ne pas donner de rendez-vous sans qu il y ait de demande écrite, mais le juge demande qu il soit vu d urgence, sinon il ira en prison ; on fait quoi?» Pascal, travailleur social du SPIP : «Je suis ennuyé à propos de Matthieu, je sais qu il vient vous voir, il m apporte vos attestations, mais je sais aussi qu il continuer à s alcooliser et je dois faire mon rapport au JAP...» Jacques, patient : «L avocat m a dit qu un certificat de votre part ce serait bon pour mon dossier». Fatima, assistante : «Nous venons de recevoir la convocation pour la Commission de surveillance de la prison ; c est dans quinze jours et les rendez-vous sont déjà complets pour tout l après-midi il ; je les reporte, mais quand?» Thomas, patient : «J aurais besoin d une prise de sang, Gamma GT et CDT, c est pour la dame du SPIP». Patrick, alcoologue : «Christophe, c est la troisième fois que nous nous voyons, dans le cadre de votre obligation de soins et je ne vous sens pas du tout engagé dans cette démarche. Vous me dites à chaque fois que tout va bien, qu il n y a pas de problème avec l alcool... Alors, cela vaut-il la peine de poursuivre?» «Yvon, patient : «Quand je n y serai plus obligé par la Justice, est-ce que je pourrais continuer à venir vous voir?» Catherine, sophrologue : «C est sûr que Pierre est bien engagé, et depuis près d un an, dans une vraie démarche sur lui-même, et par rapport à son problème avec l alcool... mais il vient à nouveau d être contrôler positif. Que fait-on?» Antoine, patient : «Finalement, c est peut-être une chance de m être fait arrêter, quand j y pense, ça aurait pu être très grave...» Karine, patiente : «Si la Justice m enlève mes enfants, ce sera la fin de tout!» Fatima, assistante : «Le directeur de la prison voudrait vous rencontrer pour faire une formation à son personnel...» Sylvie, addictologue de l UCSA : «Jean-Pierre sort de prison ces jours-ci, ce serait bien si vous pouviez le recevoir rapidement...» Ces séquences prises au vol évoquent quelques unes des questions qui se posent à nous, autour des publics sous main de justice : la disponibilité de l équipe n est pas extensible à l infini, il nous arrive de nous poser des questions sur l utilité de ces obligations de soins. Parmi les repères que nous nous donnons pour agir : des petites phrases entendues au Centre Havrais d Alcoologie Ambulatoire Il n est pas nécessaire d espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer! La motivation, il nous appartient de la faire éclore! L obligation de soins est faite aux patients, pas à nous. Dès lors, la question devient : «que peut-on faire dans ce cadre?» Certes, une contrainte pèse sur les patients adressés par la justice, mais la plupart de nos patients ne viennent-ils pas eux aussi sous d autres contraintes, lourdes elles aussi, professionnelles, familiales ou autres...? À travers des réunions de travail, des séances d information, de la vie des réseaux, parlons de la manière dont nous exerçons notre métier et entendons les autres professionnels (Magistrats, SPIP...) ; le partage de nos cadres d intervention, de nos systèmes de représentation est probablement plus utile que l échange d informations sur les patients....

17 p o r t r a i t d a c t e u r Mireille Carpentier Directrice départementale de l Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie (ANPAA 14) Au niveau régional, l ANPAA a un long passé puisqu elle descend tout droit de la ligue anti-alcoolique. L association s est rapidement posé la question des consommations qui sont directement associées à la consommation d alcool, notamment le tabac ou le cannabis. En 2004, de nouveaux statuts ont permis à l association d élargir sa compétence en alcoologie à l addictologie. ACTAL : Quelle est votre approche des problèmes d alcool et de quels outils disposez-vous? Mireille CARPENTIER : D abord, il faut rappeler aux personnes alcooliques qu elles ont toute leur place dans l association. Culturellement, il est difficile d être dépendant de l alcool. Il est difficile de faire une démarche de soins. Commencer par nommer l alcool est une première étape. Il faut rappeler sans cesse que nous sommes un lieu d accueil. Au niveau départemental, nous avons trois établissements dans l agglomération caennaise. Le siège regroupe la structure prévention-formation. La prévention s articule sur plusieurs axes, notamment au niveau de l éducation nationale, de l entreprise, de la formation médico-sociale. Les autres centres sont des centres de cures ambulatoires. Vingt-trois permanents travaillent à l association plus des personnes mises à disposition par les CSST (Centres Spécialisés de Soins aux Toxicomanes) et par le CHU (Centre Hospitalier Universitaire). ACTAL : Vous avez animé récemment une conférence à Paris sur ce thème. Quelle est pour vous la problématique «Soigner sous la contrainte»? M. CARPENTIER : Traditionnellement, nous sommes confrontés dans les centres de soins à des personnes qui viennent en obligation de soins. Il y a même un fort pourcentage de consultations. Et cela posait un problème. En gros, les personnes venaient chercher un bout de papier qu elles présentaient ensuite au magistrat pour montrer qu elles étaient dans une démarche de soins. La difficulté, c est que l obligation de soins est très peu définie. Cela veut dire qu une personne peut aller voir un médecin généraliste. La visite seule suffit à dire que la personne est en obligation de soins. La justice ne va pas vérifier notamment à cause du secret médical. Les personnes sont souvent acculées à rencontrer des professionnels de santé. Il y a eu un certain ras-le-bol et les professionnels ne voulaient plus donner ce fameux papier à des personnes qui étaient en demande de rien du tout. Mais dire qu on ne veut pas donner le papier, c est dire que la personne ne veut pas être en démarche de soins et donc trahir le secret médical. C était donc un réel problème et il n y avait pas de réponses. ACTAL : Quelles premières pistes ont été explorées? M. CARPENTIER : On a constitué un groupe de travail sur Caen avec des professionnels de la justice et de la santé afin de voir comment l on pouvait mieux travailler ensemble. Un magistrat qui rencontre par exemple une personne multiréciviste pour des conduites en état alcoolique se demande quel est l outil dont il dispose pour solutionner le problème. La justice s est rendue compte que les réponses uniquement répressives n amenaient pas une modification du comportement chez ces personnes qui étaient débordées par la dépendance alcoolique. Nous avons donc réfléchi avec une magistrate pour trouver une réponse plus adaptée qui serait en amont du soin, articulée sur le travail de la justice. Il fallait qu un réseau prenne sens, que le magistrat puisse poser un regard sur la situation, qu il puisse condamner et obliger les justiciables à rencontrer quelqu un qui prenne en compte sa non acceptation de la dépendance. Les magistrats étaient en difficulté devant le déni constant des personnes alcooliques qui n arrivent pas à poser le diagnostic de leurs difficultés. Il fallait organiser un espace qui permette aux personnes d être dans l acceptation de cette dépendance. Il fallait un modèle qui permette de les amener à accepter le changement dans le respect de l autre. Un espace d expression totalement libre et une démarche de groupe nous ont semblé être des pistes intéressantes. Nous sommes partis de bases pédagogiques. C est l idée qu à partir du moment où un groupe est structuré, il passe par plusieurs étapes. Le groupe doit passer un certain temps ensemble afin qu il évolue, que des choses puissent se construire. ACTAL : Quelles sont les modalités de fonctionnement des groupes? M. CARPENTIER : Nous sommes partis sur l idée d un parcours que devaient faire les gens dans des groupes fermés. Il n était pas question de faire entrer des personnes en cours de parcours. Nous avons institué une obligation de présence pendant quatre mois et demi. Il y a un premier entretien qui permet de dire «voilà ce qu on a constaté». La personne campe souvent sur sa position du style «mais moi je ne suis pas alcoolique». On lui explique alors qu il ne nous incombe pas de 17

18 p o r t r a i t d a c t e u r Mireille CARPENTIER agir quotidiennement à la frontière de la prévention et du soin poser un diagnostic mais que la contrainte judiciaire, elle, est à prendre en compte dans son parcours de vie. «Acceptez-vous l idée de réfléchir à ce qui vous a amené là et surtout de réfléchir à ce qui vous permettrait de ne pas vous retrouver dans la même situation?». C est en cela que nous sommes dans la prévention. Et en cela les gens sont intéréssés. ACTAL : Comment réagissent les gens qui participent aux réunions? M. CARPENTIER : Dans les groupes, constitués de huit à dix personnes au maximum, on a pu travailler sur le ressenti de la sanction, juste ou injuste. Il y a toujours quelqu un qui dira «c est vrai je n étais pas clair ce jour-là». Et ce n est pas l animateur qui amène ça. L important c est que les gens du groupe qui éprouvent tous la même difficulté se regardent un moment et voient chez l autre ce qu ils ne voient pas chez eux. Dans un groupe qui est en confiance et dans le respect, les jeux de miroirs entre les personnes permettent à chacun d avancer sur une prise de conscience. Les groupes se rencontrent une fois toutes les trois semaines. Pour certains, la contrainte est énorme car il faut se retrouver face à d autres et assumer ses difficultés en public. Au cours d un entretien initial, on demande aux gens comment ils peuvent se présenter avec des mots très simples sans se mettre en danger. Tous ont la trouille en général mais dans le premier quart d heure ils se reconnaissent. La mise en confiance va très vite car ils savent que le secret sera maintenu et qu ils vont être écoutés. Pour beaucoup, ils Ils savent que le secret sera maintenu et qu ils vont être écoutés. n ont jamais été véritablement écoutés de manière authentique. Leur parole est enfin prise en compte et c est une expérience fondamentale pour eux. Les femmes sont moins nombreuses mais nous n acceptons pas une femme parmi les hommes car il peut y avoir un phénomène de séduction. Nous n avons pas suffisament de femmes pour constituer des groupes. pour elles, nous fonctionnons donc en entretiens individuels. ACTAL : Y a t-il des intervenants extérieurs? M. CARPENTIER : Nous invitons parfois des gens à venir rencontrer le groupe mais uniquement s il y a une demande. La démarche consiste à mieux comprendre par exemple la justice ou les problèmes d alcoologie, d addictologie. Il s agit de dire simplement «voilà ce que l on peut vous proposer si un jour vous avez envie de rencontrer un professionnel du soin». C est également une manière de ne plus diaboliser le soin alcoologique. Les gens parlent du sevrage en termes extrêmement violents, ils parlent de «décalaminage». La souffrance peut être soulagée et nous travaillons au confort de la personne. Offrir un espace comme cela, c est donner la chance au changement. Dans le travail de groupe, on ne reste pas axé sur la dépendance d alcool. Les gens se rendent compte que c est un tas d autres choses qu ils n arrivaient pas à assumer dans leur vie et que l alcool leur servait à quelque chose. C est une manière de travailler sur un véritable projet de vie ou l alcool serait absent. ACTAL : Et la notion de contrainte? M. CARPENTIER : C est d avoir posé une notion de contrainte qui permet aux gens de s obliger à se regarder à un moment ou à un autre. Après, ils saisissent ou ils ne saisissent pas cette opportunité. Et ça c est leur histoire et personne ne pourra rien y faire. Mais au moins nous pouvons être présents au moment où cette prise de conscience fait mal. J ai vécu des histoires saisissantes. Des moments où des personnes prenaient conscience de leurs responsabilités vis-à-vis de leurs enfants, par exemple. Je sais que des gens ont fait des démarches de soins d autres pas. Je pense aussi que condamner une personne à un moment donné, c est également montrer qu elle est responsable de ses actes. «L alcoolique» peut se présenter comme une personne ayant perdu toute notion de responsabilité et se présentant comme une victime. L idée c est qu il sorte de ce costume de victime. L expérience existe depuis une dizaine d années sur Caen, de manière expérimentale au départ, puis elle s est institutionnalisée. Nous avons un psychologue à mi- temps qui travaille sur ces parcours à la fois en détention mais aussi en milieu ouvert. Ce travail est transposable à d autres addictions. Dans les maisons d arrêt, nous proposons un travail de groupe. Le psychologue est aujourd hui saturé de demandes en maison d arrêt. ACTAL : Quels résultats avez-vous obtenu? M. CARPENTIER : Il y a eu une évaluation, faite sur cinq ans par le ministère de la justice et qui a montré qu il y avait réellement moins de récidives par les actions éducatives que par les actions répressives. Nous recevons les personnes dans un cadre prédéfini. C est le service de probation. C est une autre façon de travailler. Tout le monde n y adhère pas mais ce n est pas grave. Nous sommes à la frontière de la prévention et du soin. Le professionnel doit accepter d être dans un autre contrat avec la personne. C est un choc de culture. On peut faire le travail dans le plus grand respect de la personne mais en disant on va arrêter de tourner en rond et on va dire ce que l on ressent l un et l autre et voir le point de rencontre. C est applicable dans n importe quel espace. La contrainte est donc nécessaire si elle se passe dans le respect.

19 p o r t r a i t d a c t e u r Renouer les liens «J a c c o m - pagne transitoirement des personnes dans l e r r a n c e depuis des a n n é e s, ayant souvent perdu tout lien social et familial, en perte de repères, qui ont fait des va-etvient entre la rue, les urgences, la psychiatrie et la prison. Je sers de passerelle pour permettre à ces personnes de renouer avec les soins, le logement, le travail.» Les professionnels, qu ils soient travailleurs sociaux, médecins ou qu ils travaillent dans le champ judiciaire connaissent bien les missions de l unité santé justice et lui orientent des personnes qui sont rejetées par la plupart des structures, qui ont épuisé les professionnels, qui cumulent toutes sortes de difficultés et dont les situations sont tellement complexes qu il est indispensable que quelqu un assure la coordination des interventions. On ne peut pas exiger d une personne qu elle ait un projet de vie alors qu elle n a pas de quoi manger ou pas de toit sur la tête. Pour pouvoir entrer en contact avec ces personnes qui sont dans une attitude de grande défiance à l égard des professionnels et qui n ont plus d autre demande que celle d «avoir un toit sur la tête», Véronique va à la rencontre des personnes, là où elles vivent. «Je les rencontre dans un endroit public, un Véronique Zusy Travailleur social à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) du Haut-Rhin. Depuis deux ans, Véronique travaille en lien étroit avec une psychologue, au sein de l unité santé justice, créée à l initiative du Sous- Préfet, Chef de Projet Chargé de la Lutte contre la Toxicomanie et de la Prévention des Dépendances, des Procureurs de la République près des Tribunaux de Grande Instance de Colmar et de Mulhouse, du Directeur Régional des Services Pénitentiaires et du Directeur Départemental de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, dans le cadre des injonctions thérapeutiques. En 2005, Véronique a suivi trente-huit patients sur tout le département du Haut-Rhin. Progressivement, l unité s est élargie aux personnes en difficulté avec un produit (alcool, drogues illicites, médicaments), sous main de justice, en grande précarité. café, une structure qu elles fréquentent ou à leur domicile quand elles en ont un, ce qui est rarement le cas.» Son but est avant tout de reconstruire un lien de confiance, sans lequel aucun accompagnement n est envisageable. «La création d un lien de confiance passe avant tout par un accueil chaleureux et convivial. Ce qui est primordial, c est de montrer à la personne qu on la respecte et qu on prend en compte sa réalité. Pour ce faire, il faut être à l écoute, avoir une attitude d empathie et ne jamais porter de jugement sur le parcours de la personne.» Véronique a également appris, au cours de son expérience, que pour favoriser l accroche avec une personne en grande précarité, il fallait répondre à une attente matérielle. «On ne peut pas exiger d une personne qu elle ait un projet de vie alors qu elle n a pas de quoi manger ou pas de toit sur la tête». Elle va donc travailler à recréer autour de la personne les conditions qui lui permettront de se poser et de rebondir : une chambre, ce qui est le plus difficile à trouver compte tenu de l image que véhiculent ces personnes, de la nourriture, un revenu, une couverture sociale. «Il s agit de permettre à la personne de recharger ses batteries, de pouvoir utiliser son énergie à autre chose qu à la lutte pour la survie.» Une fois cette première étape passée, un véritable accompagnement socio-éducatif va pouvoir commencer. Il faut remobiliser la personne, travailler sur l estime de soi, lui donner envie de prendre à nouveau soin d elle. Durant cette phase, Véronique va travailler en lien étroit avec Aurélie, la psychologue de l unité, qui, même si elle n intervient pas en première ligne, reprend avec elle les situations pour identifier les points d achoppement et proposer éventuellement d autres stratégies. Petit à petit, quelque chose de l ordre d une demande émerge chez la personne : se soigner, faire une formation, trouver un travail. Montrer à la personne qu on la respecte et qu on prend en compte sa réalité. 19

20 p o r t r a i t d a c t e u r Véronique ZUSY 20 Une véritable articulation entre les professionnels des champs médical, social et de la justice Véronique va faire le lien avec les professionnels concernés, obtenir un rendez-vous, y accompagner physiquement la personne, à la fois pour la rassurer et pour rendre crédible sa démarche auprès de ces professionnels qui avaient fini par estimer qu «il n y avait plus rien à faire pour elle, qu elle ne s en sortirait jamais». Elle assiste souvent à une partie de l entretien et organise ensuite régulièrement des réunions de synthèse en présence de la personne pour mettre en place autour de la personne un accompagnement global et cohérent. «En proposant à la personne un accompagnement cohérent, où tous les professionnels vont dans le même sens, on permet à la personne de retrouver une cohérence interne». Son intervention prend fin quand les liens avec les professionnels ont été renoués. Ce travail de terrain permet de créer les conditions d une véritable articulation entre les professionnels des champs médical, social et de la justice. Il est aussi l occasion de faire remonter aux différents services de la DDASS les besoins exprimés tant par les usagers que par les professionnels. Ces éléments vont être pris en compte dans les réflexions menées au niveau institutionnel et permettre de donner naissance à des projets. Jean-Jacques BOSC, Procureur de la République au Havre (76). Les prérogatives de la justice dans l obligation de soins ACTAL : Au sein de vos services, quelle est la proportion de dossiers dans lesquels l alcool est présent? J-J BOSC : L alcool est bien-sûr présent dans tous les dossiers dans lesquels il est un des éléments constitutifs de l infraction. C est le cas des conduites sous l empire d un état alcoolique. Mais on retrouve également l alcool dans beaucoup d autres infractions, dans les faits de violence, de dégradations aussi, dans les incendies surtout pour les incendies de poubelles. On constate qu une grosse partie de la délinquance de week-end est liée à la consommation d alcool. ACTAL : Quels sont les outils dont vous disposez pour agir? J-J BOSC : On pense souvent aux outils dont dispose le Juge d Application des Peines dans le cadre du sursis mise à l épreuve. Le tribunal peut ordonner une obligation de soins. Cette obligation est très utile. Mais il y a des difficultés notamment en terme de délai. Quelque soit la rapidité des poursuites, l obligation de soins n intervient que lorsque la condamnation est prononcée par le tribunal. Donc, elle se fait en aval par rapport aux faits. Non seulement il faut que la condamnation ait été prononcée mais il faut qu elle ait été amenée à exécution par le parquet. Deuxième difficulté, le nombre de sursis mise à l épreuve reste limité. Toutes les affaires ne peuvent pas conduire à un sursis avec mise à l épreuve. D où l intérêt des mesures qui peuvent être mise en oeuvre en amont. Il y a le contrôle judiciaire qui peut être ordonné soit par le juge d instruction soit par le juge des libertés qui peut lui aussi prévoir une obligation de soins. Il y a les mesures que le parquet peut ordonner dans le cadre des mesures alternatives aux poursuites. Le parquet n est jamais tenu de poursuivre et il peut subordonner le fait de ne pas poursuivre à des conditions. C est par exemple de justifier un suivi concernant l alcool. Cette mesure a le mérite d intervenir en amont. Elle a quand même un inconvénient, c est une mesure à minima. Si vous avez des faits relativement graves, elle peut paraitre insuffisante. C est l addition de toutes ces mesures qui est nécessaire. Toutes ont des avantages et des inconvénients. Je pense que le système de l obligation de soins qui oblige les gens à rencontrer les professionnels de la santé est quand même positif. ACTAL : Quelles sont les relations entre le monde de la santé et la justice? J-J BOSC : Ces relations existent. Elles se font à travers le SPIP, les travailleurs sociaux, les éducateurs. Elles ne sont pas très institutionnalisées. Il existe aussi la MILDT qui s occupe des stupéfiants mais aussi de l alcool. Elle lance des missions, des conventions d objectifs.

21 p o r t r a i t d a c t e u r Jean-Jacques BOSC «Une personne peut parfaitement se faire suivre par un médecin alcoologue sans adhérer et se contenter de ramener des certificats médicaux aux services de justice». ACTAL : Que se passe-t-il pour une personne qui ne respecte pas son obligation de soins? J-J BOSC : Qu entend-on par «la personne n a pas respecté l obligation de soins?». Si elle ne respecte pas la mesure de sursis avec mise à l épreuve, il appartient au Juge d Application des Peines de révoquer ce sursis et faire ramener à exécution la peine avec sursis qui avait été prononcée. Par contre, le contrôle que fait la justice reste un contrôle formel c est à dire qu on va par exemple vérifier si la personne respecte les rendez-vous qui lui sont donnés par les services médicaux. Le contrôle au delà est plus difficile, est ce que la personne adhère vraiment à la mesure? Il y a une obligation de soins mais d un autre coté la consommation d alcool n est pas interdite. Il existe une vraie difficulté. Si une personne a tendance à commettre des infractions sous le coup de l alcool et si sous le coup du sursis mise à l épreuve elle recommence à commettre une infraction, on va révoquer le sursis. On peut révoquer le sursis avec mise à l épreuve dans deux cas, si elle n a pas respecté les obligations ou si elle commet à nouveau un délit dans le délai de l épreuve. On peut se heurter à des problèmes de secret médical. Une personne peut parfaitement se faire suivre par un médecin alcoologue sans adhérer et se contenter de ramener des certificats médicaux aux services de justice. ACTAL : Existe -t-il beaucoup de cas de personnes n adhèrant pas aux soins? J-J BOSC : Bien-sûr, mais je ne pense pas qu il s agisse de la majorité des cas. Il est fondamental de créer un contact avec le système de soins pour ces personnes qui, pour certaines, n ont même pas conscience de leur pathologie liée à la consommation excessive d alcool. Le médecin peut exercer certaines contraintes, des examens biologiques par exemple. Il y a les soins mais il y a également la notion de sécurité publique. C est le deuxième volet, il faut éviter la récidive. ACTAL : Quelle est votre politique concernant les personnes qui conduisent en état alcoolique? J-J BOSC : Notre politique est la suivante. Si on parle d un délinquant primaire, on a un barème en fonction du taux d alcoolémie. On met alors en œuvre des procédures qui ne sont pas forcément les mêmes. Entre 0,40 et 0,60 milligrammes par litre d air expiré (soit entre 0,8 et 1,2 g/l de sang), on met en oeuvre une composition pénale. C est une mesure transactionnelle qui est proposée par le parquet. On fait généralement suivre un stage de la sécurité routière et on ordonne une suspension du permis. De 0,60 à 0,80 milligrammes par litre d air expiré, il y a une ordonnance pénale. C est une condamnation sans comparution devant un tribunal qui se traduit par une suspension du permis et par une amende. À partir de 0,80 on met en œuvre le plaider coupable. Il y a généralement une peine de prison avec sursis plus une suspension du permis de conduire. Pour les récidivistes, c est en principe une peine de sursis mise à l épreuve avec une obligation de soins. S il y a plusieurs récidives, la personne est présentée devant le tribunal selon le mode de la comparution immédiate. Le parquet peut demander une mesure de détention immédiate. On va donc crescendo en fonction du taux. ACTAL : Comment appréciez vous l état de dépendance? J-J BOSC : On dispose d éléments pour orienter notre décision pour ne pas utiliser systématiquement l obligation de soins. On peut faire une enquête de personnalité rapide. On se rend compte si le fait est accidentel ou s il y a un problème de dépendance. Parfois au tribunal des personnes ont conscience de leurs problèmes d alcool et justifient d un suivi médical auquel cas on peut leur faire confiance d une certaine façon et on prononce pas une obligation de soins. Il y a des gens qui sont dans le déni. J ai vu récemment une personne qui me disait «je n ai pas de problème d alcool. Certes, je prend deux apéritifs à chaque repas mais je ne suis pas alcoolique». Là, il y avait un vrai problème. Il est donc nécessaire de rencontrer le personnel de santé. ACTAL : Quelle est l utilité de la peine de prison? J-J BOSC : À un moment donné, l aspect sécurité publique va l emporter sur l aspect médical. Ceci dit, à la maison d arrêt, le secteur médical peut réintervenir. La peine de prison ne se limite pas à de l enfermement. Si une personne veut bénéficier d une mesure de liberté conditionnelle, le Juge d Application des Peines peut à nouveau poser des conditions d obligations de soins et r é a m o r c e r autre chose avec elle. 21

22 p o r t r a i t d a c t e u r Christine PERRINE, responsable de l Arapej d Aulnay-sous-Bois L Arapej (association réflexion action prison et justice) d Aulnaysous-Bois fête cette année ses trente ans d existence. La structure a été créée à l origine par des aumôniers pour accueillir des personnes sortant de prison qui n avaient pas d hébergement. L association qui au départ était composée de bénévoles s est progressivement professionnalisée avec des bénévoles et des salariés. Le siège Ile de France se trouve à Paris dans le onzième arrondissement. D autres antennes situées dans les départements 91,92, 93 et 75 mettent en oeuvre les missions de l Arapej. «Un des objectifs de l association est de créer et de développer des activités éducatives, sociales et culturelles». 22 Sur le département quatre vingt treize, un centre d hébergement et de réinsertion sociale abrite principalement des personnes qui ont eu un parcours pénal. «Ce sont souvent des personnes qui ont encore des obligations par rapport à la justice, libération conditionnelle, sursis avec mise à l épreuve etc. Huit places sur les trente-deux existantes sont réservées à des personnes toxicomanes ou présentant un problème d alcool. Elles dépendent de la MILDT. Il existe un atelier de redynamisation à la vie active animé par un formateur. Le placement extérieur est une mesure d aménagement de peine qui est subventionnée pour un accueil de 25 personnes en continu ayant moins d un an de fin de peine et ayant eu l accord du juge d application de peines». Intervenir rapidement Les personnes en liberté conditionnelle peuvent être sous le régime d obligation de soins. Le nombre de ces profils qui sont accueillis en hébergement sont en augmentation. «Il y a des listes d attente qui peuvent aller jusqu à trois mois...». Un suivi social est mené et la structure met en œuvre les mesures décidées par la justice. Pour Christine Perrine, l obligation de soins doit intervenir le plus rapidement possible pour en tirer tous les fruits. Elle constate également que la mise en œuvre réelle de la mesure peut comporter un certain nombre de résistances. Ces résistances peuvent prendre différentes formes. «Des prétextes comme un retard dans un transport en commun sont des choses auxquelles nous pouvons assister... Pour l addictologie et l alcool, nous avons un partenariat avec un médecin alcoologue qui prescrit des traitements. C est un partenariat très réactif. Si les personnes ne sont pas prêtes à accepter la démarche de soins, elles ne viennent pas. D autres jouent parfois le jeu en façade. On prend les choses au sérieux et on vérifie qu elles s inscrivent dans une démarche personnelle». D autres partenaires sont contactés au cas par cas. Pour Christine Perrine, la mise en œuvre de l obligation de soins nécessiterait un travail préalable notamment en milieu carcéral. Elle rappelle que la mesure correspond souvent à une mesure transitoire avant une sortie définitive en société d où l importance d un accompagnement préalable. Une psychologue intervient dans le cadre de la préparation de placement extérieur. «On évalue la capacité des personnes à se projeter dans un projet, leur relation avec les faits qu elles ont commis. Il faut qu il y ait un démarrage de questionnement. Le rendez-vous est obligatoire avec le psychologue dans leur mois d arrivée. Suivant le cas et à la demande de l usager, ça peut aboutir à un suivi dans un registre de soutien personnel. Cela ne concerne pas forcément les personnes qui ont des conduites addictives. La psychologue ne peut rien imposer mais elle peut fortement insister pour les faire venir». Un groupe de parole devrait se mettre en place à l extérieur avec deux encadrants pour mener une réflexion autour de l alcool. Accepter le pari À l Arapej 93, Christine Perrine essaie d avoir une approche plutôt analytique. Chaque prise en charge doit être réfléchie en lien avec le psychologue. Il est toujours difficile d évaluer les actions. Pour les personnes qui sont en rupture et qui ne se plient pas au cadre, qui ne se rendent pas au rendez-vous avec la psychologue, la difficulté est d enclencher le soin. «Il faut qu ils acceptent le pari qu on leur propose. Pour les personnes qui ont commencé leurs obligations de soins en détention et si le temps de détention est long, cela nous facilite les choses car il n y a pas de résistance. Si pour la mesure de placement extérieur, l obligation de soins est demandée, là c est nettement plus complexe. La personne passe d un milieu fermé à un milieu ouvert. Pour les anciens détenus, cela relève d un pari important. Au début, ils sont toujours d accord. Pour obtenir la mesure, ils vont signer beaucoup de choses. Dans la réalité, cela peut largement s effriter. Les magistrats du 93 chargés de les suivre sont largement débordés et ils ne sont pas toujours aussi présents que ce qu on pourrait attendre.

23 p o r t r a i t d a c t e u r Christine PERRINE Certaines personnes, pendant leur temps de placement extérieur peuvent parfois n être jamais vues par le juge. En cas de résistance des gens, la justice n est pas toujours opérante pour leur dire : vous n avez pas respecté vos obligations. Par expérience, les mesures d obligations ne sont pas forcément vérifiées par la justice. Les personnes accueillies connaissent le système. En trois mois, elles peuvent signer l obligation de soins. Deux mois de délai d attente aboutissent généralement à un rendezvous, puis elles sont libérées!». Un réseau à activer Diane Bikok-Prothais, la psychologue de l Arapej 93, indique que les personnes sortant de prison sont censées avoir arrêté l alcool ou les drogues sachant qu avec la substitution, il y a parfois moyen d en faire une substance active. «Les gens au final ne sont pas toujours sevrés. La confrontation avec le monde réel après le temps de détention n est pas toujours facile. Pour les personnes en diificultés avec l alcool, il y a parfois une rechute lorsqu on les accueille, une rechute qui ne dure pas forcément dans le temps car elles sont prises en charge rapidement avec leur agrément. À leur entrée en placement extérieur, je fais le point avec eux sur leurs difficultés, les problèmes médico-psychologiques quand il y en a. J évalue avec eux la possibilité de les revoir quand ils en expriment le besoin. Et c est la difficulté. Proposer des choses c est bien, mais elles doivent adhérer au projet. Le secteur hospitalier nous relaie et cela peut être un second soutien. «Parfois, on bricole!» On ne peut pas cependant accueillir les cas les plus lourds car nous ne sommes pas adaptés pour cela... Par manque de temps et parfois de moyens en France, on ne peut pas toujours faire de bons suivis. Parfois, on bricole!». La psychologue propose des aides allant dans les sens d une redynamique de réinsertion et de réadaptation à la société. Pour ce faire, elle s appuie sur des réseaux extérieurs. Annie BOISYVON Infirmière diplômée d État au CCAA de Saint Malo depuis 1999 de gauche à droite Mme BOURGEAUX secrétaire Dr LESEIGNEUR médecin responsable Dr LANIECE médecin intervenant à la maison d arrêt Annie BOISYVON infirmière L équipe en place au Centre de Cure Ambulatoire en Alcoologie (CCAA) de Saint-Malo est composée de quatre médecins alcoologues à temps partiel, une psychologue, une assistante sociale, un diététicien, une infirmière sans oublier une secrétaire qui selon Annie Boisyvon est «le pilier d un CCAA». C est en effet elle qui gère en premier les appels et les rendez-vous. «Le premier contact est important, notamment pour l entourage... Nos consultations pour l entourage sont en place depuis peu de temps et c est déjà une grande bouffée d oxygène pour nous et pour les patients...». Le CCAA est avant tout un lieu d accueil, d écoute, de soins et d orientation. Les personnes qui ont pris contact avec la structure sont Au-delà de l obligation, la parole, comme outil thérapeutique dirigées en premier lieu vers Annie Boisyvon qui peut leur donner un rendez-vous assez rapidement dans la semaine ou dans les quinze jours. «Cela permet d apaiser un peu les choses...». Le personnel du centre travaille régulièrement avec les conseillers d insertion et de probation. «Ils nous adressent des gens. Par contre, nous ne faisons pas de retour. Ils le savent et ça fonctionne bien. Ils connaissent nos méthodes de travail. Ils savent également que le centre ne se contente pas de donner une simple feuille pour attester de la venue des patients. S il y a matière, nous faisons tout pour que les gens puissent rentrer dans un processus de soins au-delà de l obligation...». 23

24 p o r t r a i t d a c t e u r Annie BOISYVON 24 Une sphère indépendante Une attestation de passage est donnée aux personnes qui viennent aux entretiens. Elle est remise ou non à la justice. «Au cours de mes entretiens, je leur explique qu il y a une obligation avec la justice mais qu il s agit également d un problème de santé. On essaie de les amener à s approprier la démarche. On leur explique que nous sommes avant tout un espace de soins. Les gens en prennent conscience et reviennent. Il est important de leur dire d emblée que nous sommes indépendants par rapport à la justice même si c est la justice qui nous les envoie. Nous rappelons que nous sommes dans le secret médical, que l on ne communique rien, y compris à la famille. C est important. C est une manière de les mettre en confiance». Annie Boisyvon constate que les personnes se détendent plus facilement une fois les choses posées et expliquées, lorsqu il n y a plus confusion entre le monde de la justice et celui de la santé. Les conseillers d insertion de Saint Malo se chargent aussi de cette information. «Il arrive que les gens reviennent nous voir une fois que l obligation est terminée». L infirmière du CCAA constate que les patients sont souvent dans le déni. «Je leur réponds : c est fort possible que vous ne soyez pas alcoolique mais nous allons faire le point sur une journée type. Cela permet de quantifier les choses. Lorsqu on rentre dans le détail d une journée, ils se livrent plus facilement. Pour les récidivistes, on leur demande pourquoi ils en sont arrivés là avec la justice. Les entretiens ne commencent pas bille en tête sur l alcool. On parle plutôt de leur vie, s ils sont mariés, s ils ont des enfants. C est un survol de leur vie, les choses marquantes. Du coup, ils sont apaisés. Ils sentent qu on ne va pas leur faire un cours de morale». Le premier entretien dure généralement une heure. On évoque peu les médicaments. Ils restent du ressort du médecin. Au CCAA, aucune obligation n est imposée, le centre laissant le soin à la justice de prendre une éventuelle mesure s il n y a pas respect de l obligation. Selon Annie Boisyvon, les patients qui ne veulent pas revenir en entretien sont rares. «Ils savent souvent qu il y aura des comptes à rendre à la justice...». L infirmière travaille avec ces personnes comme avec n importe quel autre patient. «On parlait d un patient avec un collègue il y a peu de temps et on ne savait plus par quel biais il nous avait été adressé. Il n y a pas de différence». Le travail en maison d arrêt L infirmière se rend également en maison d arrêt pour une mission d information auprès des détenus. «L alcool est souvent banalisé dans la société. Il m arrive de rencontrer des jeunes en maison d arrêt qui m affirment boire normalement et ils m annoncent vingt-quatre bières bues sur un parking». Généralement les détenus qui ont un problème avec l alcool sont repérés par le service de santé (unité de consultation avancée) de l établissement pénitencier. Les avocats poussent également leurs clients à consulter en prison.on me donne une liste lorsque je me rends en maison d arrêt. Les gens viennent. Le premier objectif, c est faire de l information. Comme ils sont en sevrage, ils me disent souvent : «vous voyez je n ai pas de problèmes avec l alcool parce que là, il n y en a pas et ça ne me dérange pas». On leur propose de les revoir. Ils reviennent souvent. En maison d arrêt, les détenus ont souvent un grand besoin de parler. Il faut leur dire que se faire aider n est pas dévalorisant». Les demandes sont parfois motivées pour obtenir un simple certificat. profiter du temps de détention pour positiver Annie Boisyvon insiste auprès des détenus de profiter du temps de détention pour positiver les choses, pour mener une réflexion afin de ne pas revenir en prison. Le CCAA de Saint Malo mène actuellement une réflexion pour mettre en œuvre une série de réunions d information en collaboration avec le SPIP. Le premier module serait organisé avec un conseiller d insertion et de probation pour parler du rapport à la loi, le second aborderait les effets immédiats de l alcool et le troisième la maladie alcoolique. Ces réunions s organiseraient en groupes fermés. Elles seraient essentiellement destinées aux personnes adressées par le SPIP.

25 p o r t r a i t d a c t e u r Sylvie Auliac, infirmière thérapeute familiale au CCAA de Boulogne ACTAL : Pouvez-vous nous présenter brièvement l activité du CCAA? Sylvie AULIAC : On reçoit toute personne qui présente un problème d alcool, mais aussi l entourage. En premier entretien, les gens sont généralement envoyés pas des médecins, des assistantes sociales ou par la justice. On étudie leur consommation par l intermédiaire d un journal de bord. Si l alcool est plus fort qu eux, il faut arriver à l abstinence et là, on passe dans le soin. Nous avons une équipe pluridisciplinaire, deux médecins, une psychiatre alcoologue, un généraliste alcoologue, un psychologue, une assistance sociale et moi-même. Tous les premiers entretiens passent par moi. Ils durent généralement une heure. On évoque les antécédents familiaux. Puis j oriente sur l équipe. Si la pathologie est lourde du point de vue psychiatrique par exemple, je les oriente vers un psychiatre. S il y a un problème de couple ou de famille, je les prends en charge. Les entretiens sont toujours sur rendez-vous et ils sont gratuits. ACTAL : La démarche est-elle différente pour une personne qui est soumise à une obligation de soins? Sylvie AULIAC : Oui. Les premiers entretiens sont axés sur du concret. L objectif est qu ils se questionnent sur leur mode d alcoolisation. Là, il peut y avoir une prise de conscience. La plupart du temps, ils minimisent leur consommation. Pour ceux qui doivent récupérer un permis, la préfecture va leur demander un bilan sanguin. Donc, je leur dis, «pas d alcool un mois avant le bilan». C est une manière de les tester. Il faut deux ou trois entretiens pour arriver à cette prise de conscience. Si c est une affaire de violence conjugale avec un contexte d alcool, je vais demander à voir le conjoint pour entamer une thérapie de couple. Nous remplissons un bulletin de présence qu ils doivent remettre au personnel du SPIP qui les suit. Je leur demande souvent un bilan sanguin pour vérifier la consommation. C est juste une proposition, je ne les oblige pas. Ce bilan va permettre d amorcer le soin. On refuse de faire les injonctions thérapeutiques. On pratique uniquement les obligations de soins. La démarche est placé sous secret médical. Les injonctions de soin, ce sont des comptes rendus sur les patients. S ils viennent en état d ivresse, il faut le signaler. On refuse de le faire car si nous voulons amener les patients vers le soin, ils doivent avoir confiance en nous. La période de prise de conscience est nécessaire pour tous les patients même ceux qui ne sont pas sous une obligation. ACTAL : Est-il important de se démarquer de l action de la justice? Sylvie AULIAC : Nous expliquons aux patients que tout est placé sous secret médical. Nous ne voulons pas désigner ceux qui présentent un réel problème et les autres. Dans les obligations de soins, nous avons plus de buveurs excessifs occasionnels que d alcoolo-dépendants. ACTAL : Comment arrivez-vous à sensibiliser les personnes sur la nécessité de se soigner? Sylvie AULIAC : Au départ, ils viennent surtout chercher un papier. Ils veulent être en règle avec la justice, c est tout. Par exemple, ils nous disent : «c est mon avocat qui m a conseillé de venir». Ils viennent sous contrainte. Le travail consiste à leur démontrer que l alcool ne les aide pas dans leur vie, qu ils ont des problèmes avec la justice, dans leur couple, dans leur travail. C est un bilan des problèmes que provoque l alcool dans leur vie. 25

26 p o r t r a i t d a c t e u r Sylvie AULIAC «Trois patients sur quatre sont dans le déni, obligation de soins ou pas...» 26 Est -ceq u e ça vaut le coup de continuer? Il faut plusieurs séances pour agir là dessus. Arrêter l alcool pendant quelque temps est le pari qu on leur propose. On va les amener progressivement aux soins. Certains restent dans le déni mais c est assez rare. Parfois certaines personnes reviennent nous voir après leur peine de sursis avec mise à l épreuve. Ce n est pas du 100%. Il y a ceux qui, sur le coup, veulent seulement une attestation. On ne peut pas faire grand chose. Par contre, ils vont peut-être revenir dans un an, dans cinq ans car notre discours aura finalement fait écho. La prise de conscience ne se produit pas toujours pendant la durée de la mise à l épreuve. La démarche volontaire peut se produire après. En entretien, certaines personnes vident leur sac et se soulagent. Elles sont contentes de trouver un lieu où elles peuvent parler librement de l alcool sans honte. Un groupe de parole, composé de cinq à vingt personnes est également organisé une fois par mois. Les groupes sont ouverts à tous patients qui consultent dans le centre. Ce système est complémentaire des entretiens individuels. ACTAL : Comment les personnes perçoivent cette obligation? Sylvie AULIAC : C est très variable. Il y a certains patients qui arrivent remontés contre la justice, les juges. D autres prennent soudain conscience de leurs problèmes surtout dans la violence conjugale. Ils me disent : je n aurais jamais pensé ça de moi. D autres veulent apprendre à boire plus modérément. On leur explique par exemple de ne pas confondre l état d ivresse et le taux d alcoolémie. Ce sont des choses qu ils peuvent apprendre à l occasion d une obligation de soins. ACTAL : Pour l alcool au volant, quels sont les profils rencontrés généralement? Sylvie AULIAC : Certains me disent, je n ai plus de permis mais je continue de boire. D autres vont conduire sans permis. C est un travail pour leur faire prendre conscience du danger que cela représente. Pour les gens qui tiennent à leur permis, ce sont des personnes qui généralement en ont besoin pour leur travail. Nous faisons au cas par cas. ACTAL : Et comment gérez vous le déni? Sylvie AULIAC : Les trois quarts des patients sont dans le déni, obligation de soins ou pas. Ils vous disent qu ils ne sont pas alcooliques. Je leur explique qu il existe différents stades dans l alcoolisme. J accueille parfois des personnes qui ne prennent de l alcool que le week-end. Ils ne se sentent pas concernés. Il faut être vigilants s ils consomment seuls. Il faut réamorcer la réflexion. On évoque les conséquences de l alcool. S ils ne sont pas prêts, cela ne sert à rien. Ils ne doivent pas faire une démarche pour faire plaisir aux juges ou aux professionnels de la santé. Ils doivent le faire pour eux, pour leur vie, leur bien-être. Sinon, l abstinence risque d être de courte durée. Il est important qu ils aient un lien continu avec nous dans la semaine. Si la période est trop longue entre les rendez-vous, ils risquent de retomber dans le doute. Il faut beaucoup de patience. On ne peut pas changer les habitudes du jour au lendemain surtout lorsque celles-ci remontent à l adolescence. ACTAL : Quelles sont vos relations avec la justice? Sylvie AULIAC : Ici, on ne fait pas de travail de synthèse sur les patients. Certaines structures le font et ça m intéresse de savoir comment elles travaillent sans trahir le secret médical. Les conseillers du SPIP aident les personnes mais jusqu où peut-on aller ensemble sur l histoire du patient? C est tout le problème. Nous sommes complémentaires mais nous sommes différents. Nous n avons pas tout à fait le même objectif. Certaines structures font un travail de synthèse sur les patients qui leur sont envoyés par la justice. Nous, non!

27 p o r t r a i t d a c t e u r L obligation de soins : entre formalisme et réalité Martine LEBAS LIABEUF, Juge d Application des Peines Vice présidente chargée de l application des peines, elle est en poste au Havre depuis deux ans. Son parcours professionnel l a amené à être successivement juge des enfants, juge d instance, juge au siège. Parmi ses fonctions actuelles, elle préside également des audiences au tribunal correctionnel. Le juge d application des peines est compétent en milieu ouvert et en milieu fermé. En milieu ouvert, il est chargé de suivre l exécution des peines de sûreté avec mise à l épreuve et des peines de sursis avec obligation d accomplir un travail d intérêt général. Il est en charge des suivis socio-judiciaires sans oublier les libérations conditionnelles ou encore les interdictions de séjour. «Le juge a vu ses compétences s élargir nettement depuis le 1er janvier 2005 notamment pour les peines d emprisonnement puisque dorénavant aucune peine d emprisonnement ferme d un quantum inférieur ou égal à un an ne peut être mis à exécution sans une évaluation préalable du juge d application des peines pour envisager un éventuel aménagement ou conversion de la peine. Il est également compétent pour révoquer une peine de sursis avec mise à l épreuve qui relevait auparavant de la compétence du tribunal de grande instance». Les moyens mis en œuvre se sont en conséquence renforcés. Au Havre, un deuxième poste de juge d application des peines a été créé au mois de septembre dernier. «On retrouve les dossiers liés à l alcool dans le cadre des sursis mise à l épreuve avec obligation de soins. Ce sont des infractions commises dans un contexte lié à la consommation d alcool, des vols, des violences. Ce ne sont pas forcément des conduites en état alcoolique». Même s il n y a pas d obligation de soins lié au prononcé de la peine, c est une problématique qui sera prise en compte pour évaluer la possibilité d aménager la peine. «Si quelqu un vient me voir pour une semi liberté alors qu il a six mois d emprisonnement à faire et que je sens une problématique d alcool, je vais lui demander de justifier une prise en charge en soins. C est un élément d appréciation supplémentaire pour octroyer ou pas la mesure d aménagement». Dans le cadre d une mesure de libération conditionnelle, le juge peut réclamer une obligation de soins parmi les obligations à respecter. Martine Lebas Liabeuf indique que les juges n ont parfois pas de relation directe avec les professionnels de la santé. L obligation de soins lorsqu elle est prononcée par un tribunal est un contenant. «On considère qu il appartient au condamné de mettre en œuvre le contenu. Le juge d application des peines est là pour contrôler si cette obligation est respectée dans la forme. On ne contrôle pas le fond». Parfois les personnes ont déjà entamé une démarche de soins avant même d être reçues par le juge d application des peines. On leur demande de poursuivre la démarche. D autres sont plus passifs et attendent qu on les oriente. Un regard extérieur «Je n ai pas de connaissance médicale. Je n ai pas l aptitude à apprécier ce problème là. Je leur fais part de l éventail de soins existant sur la place havraise. À partir de là, il leur appartient de faire un choix. On leur donne l information. Des gens préfèrent aller voir leur médecin traitant, d autres non. Après, on peut s apercevoir que cela ne porte pas ses fruits. On demande de faire d autres démarches pour des soins mieux adaptés». Le juge a un regard extérieur. Il contrôle la régularité, le respect des obligations. Il travaille avec un service pénitentiaire d insertion et de probation qui est mandaté pour suivre les mesures. «Nous sommes informés de l évolution des situations et nous intervenons en cas de non respect des obligations. Mais au quotidien, nous ne suivons pas les mesures. Les travailleurs sociaux ont donc une connaissance plus affinée et plus précise des outils existants». Parfois, nous aimerions en savoir un peu plus sur l efficacité de la mesure sans violer le secret médical. Le juge d application des peines ne possède pas d outil pour vérifier l efficacité de la mesure. Par contre, elle demande de justifier mensuellement des rendez-vous pris avec le soignant, les services d alcoologie. «Nous demandons également de nous fournir régulièrement des analyses biologiques. C est un contrôle formel. Parfois, nous constatons des gens qui récidivent avec de l alcool alors qu ils ont régulièrement justifié d un suivi. Nous n avons donc pas de contrôle sur l efficacité. À juste titre, les médecins se réfugient derrière le secret médical. Parfois, il est vrai que nous aimerions en savoir un peu plus sur l efficacité de la mesure sans violer le secret médical». En cas de non-respect formel de l obligation, la sanction tombe. C est la révocation du sursis avec mise à l épreuve. Depuis le 1er janvier 2005, c est une compétence qui relève du juge d application des peines. 27

28 p o r t r a i t d a c t e u r Martine LEBAS LIABEUF «On ne peut pas contraindre quelqu un à suivre un soin en détention». 28 «Lorsque le travailleur social m informe que la personne se soustrait à ses obligations, je n envisage pas d emblée la révocation du sursis mise à l épreuve. Je la convoque pour lui faire un rappel de ses obligations. Soit la personne vient auquel cas elle entend le message que je lui transmets et on reprend le suivi. Soit, elle ne vient pas. Là, je la convoque en débat contradictoire pour envisager la révocation de son sursis avec mise à l épreuve. Qui dit révocation, dit peine d emprisonnement ferme. Dans le cas d un aménagement de peine avec obligation de soins, je peux retirer l aménagement. Il y a une véritable menace». Le nombre de mesures révoquées au Havre représente un petit pourcentage du nombre de dossiers traités en sursis mise à l épreuve. En milieu fermé, le juge d application des peines est compétent pour suivre les détenus en maison d arrêt. Il octroie les permissions de sortie, les aménagements de peines. Pour les peines d emprisonnement ferme, il est tenu d évaluer la situation des personnes condamnées à une peine de prison inférieure ou égale à un an. Il envisage soit un aménagement de l exécution de la peine soit une conversion de peine. L éventail va de la semi liberté, la libération conditionnelle, le bracelet électronique, le fractionnement d exécution de la peine, la suspension de peines. Les peines inférieures ou égales à six mois peuvent également être converties en travail d intérêt général ou en jours amendes. «En 2004, il y a eu 113 jugements rendus à l application des peines. En 2005, on est passé à 203. Pour octobre, nous sommes à 230». Il existe un service médical au sein de la maison d arrêt. Au Havre, un psychiatre, un généraliste et un médecin addictologue interviennent. «On ne peut pas contraindre quelqu un à suivre un soin en détention. Par contre, si le détenu suit un soin adapté à sa situation, c est un élément qui sera pris en compte notamment dans le cadre des remises supplémentaires de peines et dans le cadre d un demande d aménagement. Cela peut être le début d une prise de conscience qui se poursuivra à l extérieur. Ce qui était un peu contraint au départ devient un besoin. Cette dynamique, on peut la retrouver dans le cadre d un sursis mise à l épreuve. Il y a beaucoup de gens qui nient leur consommation d alcool. Le fait de les contraindre que ce soit en milieu ouvert ou en milieu fermé les conduisent à se soumettre à cette contrainte car il savent qu à la clé il y a tout de même une sanction et puis finalement, ils voient la nécessité de le faire». L électrochoc de la détention La juge souligne que le déni est «classique» lors des audiences du tribunal correctionnel. «L incarcération est une peine très dure mais elle fait parfois prendre conscience du problème, notamment pour les personnes impliquées dans les délits routiers. On sent une escalade. Ce sont des gens qui ne se sentent pas délinquants. La jurisprudence au Havre consiste à faire comparaitre en comparution immédiate les récidivistes pour de délits routiers liés à l alcool. Cela peut entrainer un mandat de dépôt à l audience. La prison devient un électrochoc. C est un électrochoc qui n est parfois pas inutile». Les obligations du sursis avec la mise à l épreuve sont notifiées à l audience. Le dossier est enregistré par le greffe mais le Juge d Application des Peines n est pas obligé de recevoir le condamné. C est le SPIP qui est saisi directement. C est lui qui aura les contacts réguliers avec le condamné. «Je n interviens qu en cas de difficulté dans le suivi. Pour les mesures qui se déroulent sans incident, le juge n aura jamais rencontré le condamné pour les sursis mise à l épreuve. Par contre, pour les condamnés à de la prison ferme, il y a le sas obligatoire du juge d application des peines avec des entretiens».

29 p o r t r a i t d a c t e u r Patrick FASSEUR Praticien hospitalier en psychiatrie à la Rochelle Des groupes de parole dans l univers carcéral Il y a onze ans, une structure nommée «Service Hospitalier d Aide à la Libération de l Éthylisme» (SHALE) a été mise en place à La Rochelle. Elle comporte aujourd hui trente-deux lits à destination des curistes. Mais en parallèle, des interventions sont organisées en milieu carcéral. «Elles existent de longue date au centre pénitencier de Saint-Martin-de-Ré. Trois psychiatres interviennent dans cette centrale qui abrite près de 450 détenus...». C est au cours de ces nombreuses interventions que les praticiens ont cerné le rôle de l alcool dans les différents parcours des personnes incarcérées. «Saint- Martin-de-Ré est un centre pour les moyennes et longues peines. Il est important d en tenir compte car à leur sortie les détenus peuvent être amenés à redécouvrir l alcool d où l importance de bien préparer les permissions». Patrick Fasseur remarque que les personnes se réfugient souvent dans leurs problèmes. Elles justifient leurs gestes ou leurs comportements par une consommation excessive. «En prison, sauf de manière clandestine, il n y a pas de consommation d alcool. Du coup, on évoque un produit qui est absent et que l on ne peut pas se procurer. Certaines personnes se croient fortes, d autres ignorent le problème». Des séances de groupe sont organisées à raison de huit séances étalées sur huit semaines. Elles ne sont pas obligatoires. À chaque séance, un thème bien spécifique est abordé. Ainsi sont évoqués l effet de l alcool sur le cerveau et sur l organisme en général, la dépendance, les variations de l humeur, la rechute, les fausses idées sur l alcool ou encore les traitements. Ces séances thématiques en groupe ont été mises en place en septembre «Aujourd hui, il est encore difficile d établir un bilan de ces actions mais on constate tout de même moins de rechutes... À l origine, nous avions peur que les détenus ne se dévoilent pas. Il y en a qui se rétractent mais ce n est pas la majorité. Il est toujours délicat d annoncer ces réunions dans l enceinte du centre...». Pour le psychiatre, l effet de groupe joue pleinement et le praticien reste étonné du niveau de verbalisation. La participation à de telles réunions peut avoir un impact bénéfique sur l appréciation du Juge d Applications des Peines. Patrick Fasseur et ses collègues regrettent cependant de n avoir pas pu attirer au sein du centre pénitencier une antenne d anciens buveurs, ce qui aurait pu permettre d avoir une autre approche de la problématique. Geneviève est une infirmière en secteur psychiatrique et travaille dans la structure depuis neuf ans. Elle intervient à la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré et anime avec une autre infirmière des groupes de six à huit personnes. Une infirmière référente de la prison sert également de relais. Le médecin psychiatre a identifié préalablement les personnes susceptibles de participer aux groupes de parole. On leur fait la proposition individuellement. Un travail de longue haleine. «Près de 60 % des détenus ont commis les délits sous alcool..». C est à nous de préparer leur sortie. Nous sommes quatre à intervenir. On se présente. On pratique d entrée le tutoiement. On utilise les prénoms. On explique le sens de la démarche. Dans un premier temps, nous donnons des informations techniques sur la consommation d alcool, comment la mesurer. Chaque détenu est amené à faire ses petits calculs. Les gens sont parfois surpris par leur dépendance. Ils sont souvent dans le déni au départ. Mais progressivement, l émotion est palpable... Là, il se passe quelque chose dans la rencontre, dans le message que l on a à transmettre. Au fil des interventions, les détenus se livrent, la confiance s établit. Chaque intervention dure une heure et demie. «Sur toutes les sessions, les participants sont restés du début à la fin» explique l infirmière. Certaines personnes qui ont participé aux groupes de parole ont engagé des psychothérapies par la suite. Le temps d incarcération est par définition une période d abstinence. Et les peines sont longues au sein de l établissement pén i t e n c i e r. C o m m e n t alors utiliser le temps de la peine pour entamer un travail sur soi? Quelque soit le type de population, quelque soit le lieu, il est primordial selon Geneviève d aller à la rencontre de l être humain. «Le travail n est pas différent en milieu carcéral. Les questions restent les mêmes. Comment vais-je toucher la partie vivante de la personne pour qu elle puisse s interroger sur sa vie?». 29 Paris - 22 et 23 mars colloque F3A - santé justice peut on soigner sous contrainte?

30 p o r t r a i t d a c t e u r 30 Quotidiennement, MaÎtre Christophe Deltombe a en charge des dossiers dans lesquels l alcool est présent. «Il peut s agir de dossiers de droit pénal par exemple. L alcool est dans ce cas un élément de l infraction qui a concouru aux faits. Il y a également des dossiers de droit du travail dans lesquels je suis consulté, soit par des salariés, soit par des délégués du personnel ou par des directeurs des ressources humaines (D.R.H.) qui se demandent comment gérer un tel problème au sein de l entreprise». L avocat au chevet du patient L avocat est plutôt habitué aux injonctions extra-judiciaires qu aux injonctions judiciaires. En entreprise, les directeurs du personnel sont souvent confrontés à des situations humaines sur lesquelles ils n ont pas prise. Ils sont amenés à convoquer le salarié concerné pour essayer de lui faire admettre son état alcoolique, une étape difficile car il est toujours douloureux de l admettre. «Quelquefois, il faut un vrai flagrant délit pour que les gens le reconnaissent». La deuxième étape consiste à demander au salarié concerné de choisir entre les soins ou le licenciement. «C est peut-être dans la menace d une sanction, de la rupture du contrat que le DRH peut avoir une certaine efficacité pour provoquer un recours aux soins. Le DRH se comporte alors un peu comme un juge. Généralement cela fait suffisamment peur pour que le salarié, d abord d une manière un peu défensive, accepte de faire une cure. Puis, le passage dans le désir réel de se soigner MaÎtre Christophe Deltombe, avocat au barreau de Paris peut se faire». Maître Deltombe fait le parallèle avec un dossier pénal. «Quand vous avez une injonction thérapeutique qui a été suivie en amont du procès, le tribunal va en tenir compte. Quand il s agit d une peine accessoire à une peine principale, la manière dont l injonction thérapeutique est respectée va inciter le juge d application des peines à prendre en considération cela». Le moins mauvais système L avocat estime que souvent l injonction thérapeutique est la seule solution possible, le «moins mauvais système à défaut d autres choses». L injonction peut déclencher un vrai désir si les soins sont bien menés. «Les soins médicaux ne règlent forcément pas tout. On soigne la maladie mais pas la cause de la maladie. L alcoolisme a plusieurs origines possibles, psychologiques, sociales, familiales. L environnement est plus ou moins incitatif, la personne plus ou moins vulnérable. Le soin est composite. L idéal par exemple est qu une cure puisse être accompagnée d une psychothérapie, voire d une psychanalyse. Si l individu est prêt à aller jusqu au bout, à faire ce parcours analytique, c est parfait. C est une manière pour lui de s approprier son histoire et de mieux maîtriser sa vie pour l avenir. Par contre, j ai vu des gens qui fêtaient la fin de leur cure. En gros, on s est soigné mais on a encore soif». Pour l avocat, l injonction qu elle soit du juge ou du DRH n est donc qu un premier pas. Le désir du soin doit être relayé par le soignant y compris jusqu à l étape psychologique. «J ai un petit rôle en tant qu avocat, celui d informer les personnes des risques qu elles encourent si elles n acceptent pas le soin. En matière pénale, la défense peut demander en peine accessoire une injonction thérapeutique. Ce n est pas un artifice. On devine bien qu un soin n est pas absurde même si nous ne sommes pas médecins. Je me souviens avoir reçu un jour une femme qui assurait que ses voisins lui faisaient des ondes dans son genou. Elle voulait faire un procès à ses voisins. Je lui ai dis : «je vous crois, c est sans doute très embêtant, mais j ai un problème de preuve. Comment allez-vous prouver que vos voisins vous font des ondes? Je vous propose d aller voir un psychiatre et vous lui demanderez au bout d un moment s il veut bien vous faire une attestation». C est une manière un peu dévoyée de transférer le client en patient. L avocat incite vivement à aller voir les médecins, même s il ne dispose pas de moyens de pression. Il faut être persuasif. «L obligation de soins est souvent perçue comme un substitut à une peine supplémentaire. L injonction thérapeutique vient remplacer une peine de prison avec sursis plus importante. Généralement, l injonction est bien souvent acceptée car elle est demandée par l avocat. En défense, nous venons devant le tribunal et notre discours est de dire, cette personne a commis une faute c est incontestable mais cette personne a un gros problème d alcool ou de drogue. Plutôt que de la sanctionner par une peine de prison vous seriez avisé de prendre une mesure d injonction thérapeutique. C est la protection de la société qui prime, or l injonction thérapeutique, c est à la fois la protection de l individu mais aussi de la société». Par contre, l avocat ne peut pas plaider l injonction thérapeutique dans le cas où son client se trouverait dans le déni.

31 p o r t r a i t d a c t e u r CHRISTOPHE DELTOMBE «Faire advenir le désir de soins fait partie du travail de l avocat» Il faut l accord du client. Ce dernier doit donc reconnaître son alcoolisme. «Nous devons être solidaires dans la demande. On ne peut pas soigner quelqu un qui nie être alcoolique. Les personnes poursuivies pénalement sont suffisamment déstabilisées pour faire tomber leurs défenses notamment dans les affaires où l alcool est présent. Le déni est fréquent mais s il apparait que dans le dossier du justiciable, l alcool est omniprésent, l avocat peut alors conseiller à son client d accepter une plaidoirie basée sur une demande d injonction thérapeutique. C est une manière de dire vous êtes alcoolique mais on ne le dira pas. C est aussi une manière pour la personne de dire je suis alcoolique mais je ne peux pas le dire. Le client peut se dire que c est l avocat qui l a demandé. Avec un langage un peu codé, on peut donc arriver à faire admettre l obligation de soins». Le pas est fait même si le pas social reste plus difficile à assumer. Maitre Deltombe admet que les résultats ne sont pas à 100% positifs. Il existe donc un respect réel et un respect formel de la mesure. Si les personnes ont compris l importance d un soin avant leur comparution devant le tribunal, ils feront la différence entre justice et santé. S ils se rallient à l obligation pour faire baisser la peine, ils n auront pas compris. Pour eux la justice et la santé, c est la même chose. Aux soignants de leur faire comprendre que ce n est pas la même chose. «Il n est pas facile pour les soignants de travailler avec une menace pénale qui plane au-dessus de leurs patients. Je pense que le dispositif de base n est pas mauvais en lui-même. S il est un peu choquant de se faire soigner sous la menace, en même temps, le système permet d amener vers les soins des gens qui n y seraient pas allé. Une chose est certaine, faire advenir le désir de soins fait partie intégrante du travail de l avocat». COMMISSAIRE PRINCIPAL ANDRÉ GOEPP Depuis deux ans, le commissaire principal André Goepp est responsable du service de sécurité et de proximité à Mulhouse. Il gère les fonctionnaires en uniforme chargés des interventions de police secours mais aussi les équipages de la brigade anticriminalité, la brigade canine, le service de quart et les équipages des commissariats de secteur soit au total cent quatre vingt quatre personnes. une affaire sur deux est liée à l alcool «Une affaire sur deux est en relation directe ou indirecte avec l alcool. Ce sont par exemple des différends sur la voie publique, des sorties de boîtes. Dans les affaires de violences conjugales, l alcool est présent trois fois sur quatre. Il n est pas rare de voir l auteur comme la victime tous deux alcoolisés. Parfois, la victime des violences se rétracte une fois devant le tribunal. Nous traitons aussi des affaires d alcool au volant. Il ne se passe pas vingt-quatre heures sans interpeller des personnes qui ont commis des infractions routières dont l origine est liée à la consommation d alcool». Les fonctionnaires de police sont de plus en plus fréquemment victimes d agression verbales ou physiques, des comportements dont l origine se trouve souvent dans l alcool qui lève les inhibitions. «Ils limitent la casse mais cela les use. Si on arrivait à limiter la surconsommation de certaines personnes, on aurait beaucoup moins d interventions difficiles» confie le policier. Il constate que les gens qui sont en difficulté par rapport à l alcool sont également en difficulté sociale. Parfois les aides versées sont utilisées pour acheter de l alcool ou des stupéfiants. Le code de procédure pénale stipule que les fonctionnaires de police ne peuvent pas faire une audition si l interpellé est en état d ébriété. Le placement en dégrisement est donc un passage obligé. Les magistrats du parquet sont informés des gardes à vue par fax. Les délais sont courts et les causes d annulation de procédures sont nombreuses. Le commissaire constate que les personnes qui sont entendues considèrent souvent leur consommation excessive comme une excuse. Ils pensent du coup que la justice leur sera plus clémente. «Les personnes qui sont vraiment alcooliques ne sont pas les pires. Ce sont des personnes qui consomment souvent à domicile, des gens qui vivent seuls. Cela m est arrivé de marcher sur cinquante centimètres de bouteilles vides qui jonchaient le sol d un appartement. Il s agissait du domicile d un enseignant qui a été placé en hospitalisation d office. 31

32 p o r t r a i t d a c t e u r ANDRÉ GOEPP Un commissaire témoigne : «Les obligations de soins ne sont pas efficaces puisqu on se retrouve toujours en face de récidivistes» 32 On signale les situations aux travailleurs sociaux mais ils ne peuvent intervenir qu avec l accord des intéressés. Généralement, c est un refus. C est un véritable problème de société. À partir de quand peut on arriver à une certaine forme de contrainte pour le bien des gens ou pour le bien commun? L alcool peut détruire des vies, des familles sans parler des problèmes que posent l alcool au travail». Une majorité de récidivistes L immense majorité des gens interpellés par les services du commissaire Goepp dans des affaires liées à l alcool sont des multi-récidivistes. «L alcool est chez ces personnes une affection chronique». Les policiers ne sont pas informés des décisions de justice qui sont prises et notamment les obligations de soins. «L obligation de soins est une réponse pénale. C est la décision du magistrat. Mais en tant que policier je n appellerais pas ça une réponse pénale. C est une alternative aux poursuites. Aujourd hui, les Juges d Application des Peines n ont plus la capacité de suivre cela en plus des dossiers à caractère véritablement pénals dont ils ont déjà la charge. Ils sont submergés». Le commissaire Goepp estime que les obligations de soins ne sont pas efficaces. Elles sont liées selon lui à l inefficacité du système. «On se retrouve toujours en face de récidivistes». Second argument avancé par le policier, les alcooliques sont systématiquement dans le déni le plus total. Autre problème soulevé, le commissariat central de Mulhouse ne dispose pas à l heure actuelle d assistante sociale. Pourtant, la présence d un travailleur social est prévue par le contrat local de sécurité signé à Mulhouse en Le système est financé par la mairie, le conseil général et le conseil régional. La phase de recrutement a été lancée et le système sera définitivement mis en place au cours du deuxième semestre «Il existe un lent processus avant que les gens tombent dans la délinquance» Les policiers y voient un grand intérêt et une véritable nécessité. «Il existe un lent processus avant que les gens tombent dans la délinquance. Nous avons donc pleinement conscience que nous ne pouvons apporter de solution. La prévention, l éducation, ce n est plus de notre ressort». L assistante sociale aura pour mission de rencontrer et d orienter les personnes en difficulté. Elle mettra en alerte les différents réseaux existants, éducateurs, médecins, etc... Dans les commissariats de secteur, les fonctionnaires de police peuvent parfois signaler les gens en difficulté. Mais selon le commissaire, ils n ont pas toujours une bonne connaissance des réseaux. «Rien n est fait pour faciliter la mise en relation des gens qui ont besoin Paris - 22 et 23 mars colloque F3A - santé justice peut on soigner sous contrainte?

33 p o r t r a i t d a c t e u r Claude Roche Desbordes, Médecin spécialisée en alcoologie et en addictologie à l hôpital de Dax. ACTAL : Quel type de public rencontrez-vous? Dr Claude Roche Desbordes : Pour un délit routier, les obligations de soins s appliquent généralement aux récidivistes. Pour les gens qui ont une première alcoolémie positive, le procureur du tribunal de grande instance de Dax a souhaité qu ils puissent être interpellés sur leur consommation d alcool. Un protocole a été mis en place en La police leur propose de faire un pas auprès des structures alcoologiques avant de passer au tribunal. Un jeu d attestation de présence est demandé. La possibilité de rencontrer quelqu un peut se faire en groupe ou en individuel. Dans ce cadre, je reçois de 60 à 100 personnes par an avec des groupes mensuels d une quinzaine de personnes. Dans ce dispositif, un tiers des personnes choisit une consultation individuelle. Il n y a pas d obligation. C est une proposition pré-sentencielle. Ils se disent parfois que cela va améliorer la sentence s ils viennent nous voir. Il y a possibilité d accéder à un soin. Cela nous permet d identifier leur problème au niveau de l alcool, s ils sont consommateurs épisodiques ou consommateurs quotidiens à risque avec ou sans dépendance. Sur quarante-cinq millions de personnes consommateurs en France, il y a deux millions de dépendants. Pour eux, il n y a pas d alternative, soit ils boivent trop, soit ils ne boivent plus. Pour les gens qui ont eu une première alcoolémie positive, il y a déjà 25% de dépendants et 25% de personnes qui ont une consommation nocive. Les autres sont des usagers occasionnels pour lesquels il n est pas utile de mettre en place un soin. Pour les premières alcoolémies positives, il est utile de leur faire identifier leur boire. Chez les gens qui viennent en obligation de soins, la proportion des dépendants représente le double (51%) des patients. Sur l ensemble, 25% ont une consommation nocive et 10% sont des consommateurs épisodiquement à risque. Nous constatons qu un certain nombre de personnes qui commencent à boire ne savent plus s arrêter. Ils vont généralement cumuler une, deux, trois alcoolémies positives au volant en l espace de deux ou trois ans. Cela touche une population de plus en plus jeune, souvent âgée de moins de vingt-quatre ans. Leur alcoolisation reste peu fréquente. Ils ne se reconnaissent pas dans les «piliers de bistrot». Là, on se pose la question, quelle démarche de soins? Le docteur ROCHE-DESBORDES rencontre de 580 à 600 patients par an. Un nombre toujours croissant qui correspond à une augmentation de l activité de 10% par an. La part justice représente 16% de son activité soit pour cette année 50 personnes en obligation de soins auxquelles viennent s ajouter les anciens patients qui reviennent dans le soin. Elle a mis en route une consultation d alcoologie à la maison d arrêt de Draguignan de 1985 à 1988, une expérience unique pour l époque. En 2002, elle a également présenté un travail sur les patients en obligation de soins en les comparant statistiquement dans leur devenir et leur durée de suivi aux patients venus spontanément. ACTAL : Quelle est la différence entre les patients qui sont en injonction de soins et les autres? Dr Claude Roche Desbordes : Pour moi, en tant que soignante, il n y a pas de différence mais la première prise de contact n est pas la même. Certains viennent en traînant les pieds, contraints et forcés. Quel va être le soin pour un dépendant? Tout d abord, il faut consentir sa dépendance, avoir un regard sur soimême. Certains vont la découvrir. Ce sont les tremblements dès le matin par exemple. Pour aller à l abstinence, il y a un syndrome de manque. Il faut donc leur permettre d accéder au sevrage. Un protocole médicamenteux est mis en place. Il faut leur donner les outils pour y arriver. Cela peut être également une hospitalisation, une cure. L étape suivante est le deuil total de l alcool. Il faut une alliance thérapeutique. Il faut que le lieu de soins soit un lieu où l on puisse construire l alliance thérapeutique, un lieu où le patient puisse s appuyer sur le soignant le temps nécessaire avant d être autonome. On doit lui donner la possibilité d exprimer toutes les choses qui pèsent, qu il puisse enfin parler de sa dépendance alcoolique. Le lieu doit être On doit lui donner la possibilité d exprimer toutes les choses qui pèsent protégé, un lieu que la personne va s approprier. Il est important qu il sache que tout se qui se dira sera préservé par le secret. Il faut que le juge puisse désigner ce lieu. Il faut donc protocoliser cette rencontre mais la protociliser de telle manière qu ultérieurement la personne ne soit pas obligée de poursuivre parce que le juge le veut mais parce qu elle en a vraiment envie. Pour le consommateur à risque qui n est pas dépendant, il faut lui permettre d identifier sa consommation. Réduire sa consomation devient un challenge. Dans ce cas, l obligation de soins va se traduire pour moi par ce temps où la personne va se découvrir usager à risque et va s approprier la démarche pour avoir au final une consommation sans risque pour sa santé. ACTAL : Concrètement, comment travaillez-vous? Dr Claude Roche Desbordes : Avec le juge d application des peines de Dax, nous avons mis en place un protocole très simple qui se fonde sur deux consultations obligatoires. Au cours de la première consultation, 33

34 p o r t r a i t d a c t e u r CLAUDE ROCHE DESBORDES La manière dont on va s intéresser à leur histoire est très importante. 34 nous avons des astuces pour décaler l objet de la rencontre. La manière dont on va s intéresser à leur histoire est très importante. Ce sont des choses très simples, c est évoquer la famille, les frères et les sœurs, les parents. Cela va nous permettre d identifier la rencontre avec l alcool. Nous savons également qu il y a des professions à risque, barman ou le monde du show biz par exemple. Nous nous intéressons à ce qu ils sont et ils nous en sont gré. Il faut les rassurer, surtout pour ceux qui sont très dépendants. On les revoit une seconde fois avec un bilan qui permet de confirmer la notion de consommation nocive tout en sachant que l on peut avoir un bilan normal et une consommation nocive. À l issue de ces consultations, nous sommes autorisés par les patients à écrire à leur médecin. Je leur lis la lettre. Je signe l attestation de rencontre. Pour ceux qui nécessiteraient un accompagnement ou une démarche de soins hospitalière, je leur propose tout ce que nous pouvons proposer. Certains ont déjà arrêté de boire avant que la loi ne se pose. Dans ce cas, tout est cohérence et on n a pas de doute sur leur arrêt spontané d alcool. C est à nous de valoriser ce qu ils ont fait et surtout leur permettre de poursuivre la démarche avec tout le bénéfice qu ils peuvent en tirer. Ce n est pas parce qu on les oblige à arrêter qu ils vont souhaiter reprendre. L obligation de soins permet de visualiser l alcoolodépendance. C est un moment très fécond. Dans une étude que j ai menée, j ai comparé pendant deux ans des patients dépendants sous obligation de soins et des patients dépendants qui étaient venus nous voir par leur médecin traitant par exemple. J ai regardé ce qu ils devenaient. Je me suis rendu compte qu au bout des deux ans les résultats sont similaires. Dans les deux groupes, il y avait autant de patients qui étaient restés abstinents. Pour le nombre de consultations par personne au-delà de l obligation, les chiffres étaient du même ordre sur le plan statistique. Pour ceux qui ne donnaient pas suite au suivi, là encore, les chiffres sont similaires. À partir du moment où il y a une possibilité de rencontre, les personnes vont avoir la même démarche de soins à condition que l obligation soit dans la rencontre initiale et non pas dans le suivi. La limite que pose la loi a une place structurante La limite que pose la loi a une place symbolique, structurante mais il est nécessaire que le droit désigne un lieu autre, le lieu du soin. Il ne faut pas qu il y ait collusion entre le lieu du soin et le lieu de l obligation ce qui veut dire que nous ne sommes pas des experts de la justice. Si un juge a besoin d un expert, l expert sera tenu de dire ce qu il en est. Cela fait partie d une démarche de justice. Si le patient nous prend pour un expert, on ne pourra pas le soigner. C est totalement antinomique. Le lieu du soin est un lieu de confidentialité. On leur dit : voilà l obligation c est fini mais les jeux sont ouverts pour la démarche de soins. Ce qui est grave actuellement, c est que beaucoup de juges d application des peines s engouffrent dans une vide juridique puisque l obligation n est pas définie. Ils exigent des lieux de soins pour faire des rapports d expertise. Or, cela fausse la relation. Pour les gens qui ne font pas le deuil de l alcool, qu il y ait ou non obligation de soins, vous ne le ferez pas arrêter. ACTAL : Quelles difficultés rencontrez-vous avec la justice? Dr Claude Roche Desbordes : Il y a quelques mois, une nouvelle juge d application des peines a pris ses fonctions. D emblée, elle a demandé aux patients de faire des bilans sanguins. On a entendu ce genre de discours «Je vous exige de normaliser les gammas». Or, les gens le vivaient comme une prolongation de l expertise du juge. C est la première fois que j ai rencontré des situations de violence. Les personnes n étaient pas prêtes à se poser en consultations. J avais l impression que l on cassait des démarches bien rodées. Il y a également un contexte de pression sécuritaire très médiatisé. On sent cette pression. Il faudrait un positionnement au niveau national concernant ce vide juridique qu est l obligation. Si avoir les gammas, c est suffisant pour gérer le problème, dans ce cas-là, ce n est pas la peine de les envoyer en soins. On ne peut pas obliger quelqu un à se soigner. On l oblige juste à rencontrer le soignant. Il faut une limite posée mais il ne doit pas y avoir collusion entre la justice et la santé. Lorsqu un patient rechute, il doit avoir la possibilité de revenir en consultation. C est le meilleur résultat du soin.

35 p o r t r a i t d a c t e u r Une femme, agrégée en lettres, nous livre les réflexions que lui inspirent ses neuf mois de détention. Elle a été détenue pour avoir été re-contrôlée au volant en état d ébriété. Cette récidive a entraîné son incarcération immédiate, confirmée par une condamnation à un an de prison ferme. ACTAL : Comment avez-vous vécu votre peine? Mon quotidien était très dur car j étais seule ; seule malgré mes co-détenues. Je n ai eu aucun parloir, personne pour m apporter des habits de rechange, pas la couleur du moindre mandat. Dès le premier jour, j ai demandé à voir un psychiatre, et le lendemain j ai pu le rencontrer. J avais un manque affectif énorme à régler. Nous avons commencé à tisser des liens et on l a muté. Je ne me suis pas entendue avec son remplaçant et j ai coupé court aux entretiens. Dedans, il fallait être fort, on ne peut pas se permettre d arriver en déprime, il fallait être un battant. ACTAL : À quoi a servi cette incarcération? À rien, strictement rien, sinon à connaître le milieu carcéral. Du point de vue alcool, ça ne résoud rien. J avais besoin d une psychothérapie, pour faire sortir ce qui me menait à l alcool. Avant, lorsque j avais des angoisses, je buvais pour les endormir. Je me cachais, je culpabilisais, je souffrais et là on a rajouté l enfermement. Les éducateurs sont trop débordés et je n étais pas prioritaire, nombreux étaient plus mal en point que moi. Je pense que la prison affaiblit la personne, on n en sort pas indemne et elle ne guérit rien. J ai été arrachée de mon quotidien et rejetée neuf mois plus tard, avec des problèmes en plus. À ma sortie j étais seule avec mes sacs poubelles. J ai retrouvé ma maison à l abandon, avec tous ces courriers administratifs... Neuf mois, ça en fait des papiers à régler. Et bien voilà, je me suis acheté deux bouteilles de whisky et je les ai bues. Non, la prison n a pas empêché la rechute. ACTAL : Quelle aurait été la solution pour vous? Pas la prison! Il aurait fallu un encadrement psychologique par des personnes disponibles, et dedans tout le monde est débordé. Il est facile d enfermer des gens puisque telle est la loi, mais cela me donne l impression qu ainsi, l État se protège, mais ne protège absolument pas la personne. À ma sortie, je me suis acheté deux bouteilles de whisky et je les ai bues. propos recueillis à la sortie de la prison des Baumettes, à Marseille par Théodore VASSILEV de «Radio-Galère» 35 Paris - 22 et 23 mars colloque F3A - santé justice peut on soigner sous contrainte?

36 adhérents individuels PROFESSIONNELS DE TERRAIN DE TOUS LES MÉTIERS DE L ADDICTOLOGIE : Infirmiers Secrétaires Médecins Travailleurs sociaux Psychologues Gestionnaires Structures adhérentes STRUCTURES Médicosociales, sanitaires, de réduction des risques, réseaux... CCAA, CSST, Unités d alcoologie, Équipes de liaison, Centres de cures, SSR, etc... 2 Partenaires de premier rang Direction Générale de la Santé Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie Association 1901 Quand les consommations d alcool et les usages de produits posent question, les acteurs interviennent auprès de patients, en formation et dans des actions de prévention. La F3A a pour buts de promouvoir une addictologie de terrain avec des équipes pluridisciplinaires, femmes et hommes de tous métiers et de tous horizons, de constituer une force de proposition, d affirmer la place de ses équipes dans le dispositif sanitaire et social, de représenter ses membres, de fédérer les instances de l addictologie de terrain qui le souhaitent, de mettre en œuvre les recherches permettant au dispositif d addictologie de terrain de participer à l élaboration des politiques de santé publique. l évolution des modes de consommation, la diversité des publics, les expériences internationales... le sens des consommations, le sens des conduites de dépendance des savoirs, des formations, des colloques, les Journées de Nîmes vis-à-vis des publics présentant des problèmes de dépendance vis-à-vis des acteurs de l alcoologie et de l addictologie vis-à-vis de la santé vis-à-vis des pouvoirs publics vis-à-vis du grand public aux textes officiels, aux événements, aux articles de presse, aux médias... les pouvoirs publics, les agences nationales,le monde associatif... EXTRAITS DES STATUTS DE LA F3A La F3A constate qu il n existe pas de société sans «paradis artificiels» (même si nombreux sont ceux, individus ou groupes, qui ne souhaitent pas y avoir recours). La consommation de substances psychoactives est un plaisir, un fait social, un remède, une solution avant d être pour certains un problème. Mais quand ces «certains» se comptent en millions, l ampleur du problème est celle d une catastrophe nationale. La F3A prend acte du fait que, selon les circonstances et les périodes, la société encourage, autorise, interdit, réprime la production, la distribution et l usage des produits psychoactifs. La F3A opte pour une approche qui, distinguant les modes d usage, les produits, les usagers, les préventions, les soins et la réduction des risques, articule ces éléments entre eux, et décloisonne la compréhension, les réponses, les cliniques, les structures. A C T A L - Co Directeur de la publication : Dr Patrick FOUILLAND - Rédacteur en Chef : Anne RENAERD Journalistes : François HAUGUEL - Théodore VASSILEV - Créd Coordination générale et mise en page : Jean-Pierre VÉDIEU - Im

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