SISTERON (04) UNE CITADELLE A L ASSAUT DU CIEL Blandine Jourdan, chargée d études à la Conservation régionale des monuments historiques

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1 SISTERON (04) UNE CITADELLE A L ASSAUT DU CIEL Blandine Jourdan, chargée d études à la Conservation régionale des monuments historiques Esquisse historique 1-Vue de Sisteron depuis le sud-est, dessin d Etienne Martellange (1608) La citadelle de Sisteron se dresse entre ciel et roc, sur le faîte d un escarpement qu elle chemise selon des lignes géométriques improbables. Elle domine la ville et une clue de la Durance dont elle forme le pendant architecturé. Cet édifice n a jamais fait l objet d une monographie, elle illustre pourtant un «âge d or» de la fortification bastionnée réalisée à la fin du 16ème siècle, qui en fait tout son intérêt. En 2006 Christian Corvisier, historien de l architecture, a réalisé la première étude du site dans le cadre de l inventaire thématique du patrimoine militaire en région Provence-Alpes Côte d Azur, commandée par le Service régional de l inventaire du patrimoine culturel. Il a mis à profit les précieuses archives du Service Historique de l'armée de Terre, conservées à Vincennes 1 pour mettre en évidence certaines dispositions défensives remarquables pour leur unicité, leur précocité ou leur accomplissement. Cet article se base essentiellement sur ses travaux 1

2 Les fortifications médiévales 2-Vue de Sisteron depuis le sud, dessin d Etienne Martellange (1606) L histoire de la citadelle de Sisteron commence à la fin du 16ème siècle, mais ce qui forme aujourd hui son rempart supérieur existait 3 siècles plus tôt. La première occupation du site par le château des comtes de Forcalquier, intégré par la suite à l enceinte de la ville, est attestée au milieu du 13ème siècle. Dès le Moyen-Age la ville offrait une position privilégiée : elle défendait la frontière entre le Comté de Provence et le Dauphiné et contrôlait tout le ravitaillement de ces deux provinces par route et par eau. 3a-chapelle-donjon 3b-chapelle-coupe 3c-tour-Horloge La chapelle Notre Dame du Château et sa "place" sont mentionnées pour la première fois en 1368 quand elles abritent la garde de ville. En 1402, la tour de l Horloge devient beffroi et 2

3 sert de clocher à la chapelle voisine reconstruite en 1417 et transformée en donjon au moment de son intégration à la citadelle. La ville est réunie au domaine royal avec l'ensemble du comté de Provence en La réalisation d un programme royal 4- Plan chronologique Durant les guerres de Religion, le pouvoir royal décide la construction d une citadelle pour répondre à deux objectifs : défendre un point stratégique du territoire et soumettre la ville qu elle dominait. De 1562 à 1568 la ville de Sisteron avait en effet subi plusieurs sièges dans le but de soumettre les protestants de la région qui s y étaient regroupés. Le traité de fortification d Antoine de Ville publié en 1628 ne manque pas de souligner cet intérêt : «on fait aussi les citadelles dans les places où l on craint la révolte et quelque commencement de guerre civile, bien qu elles soient dans le corps d Etat, à cause de la diversité de la Religion». L année 1568 marque la fondation de la citadelle. Un procès-verbal d inspection impose à cette date la nécessité de fortifier le "château de Notre-Dame", afin qu'il pût servir "de rocque au dict lieu" 2. La première campagne de construction de la citadelle est directement attestée dans un acte d adjudication de Les travaux furent attribués à Jean Sarazin, ingénieur du Roy en Dauphiné et Provence qui travaillait alors sur le chantier du château de la Tour d Aigues. Le choix de ce maître d œuvre n est sans doute pas étranger au voyage du gouverneur de Sisteron qui se rendit à la Tour d Aigues en 1570 pour réquisitionner des canons afin de réarmer la place. 3

4 Le programme des fronts bastionnés successifs est employé ici de manière tout à fait inhabituelle sur un plan vertical, voire pyramidal. Ce type de fortification innovante, issu du modèle transalpin, se diffusa auprès des ingénieurs militaires français après les campagnes d Italie du début du 16ème siècle. A Sisteron il s agirait sans doute de l influence directe de l ingénieur italien Ercole Nigra, que Sarazin avait connu dans ses fonctions précédentes à la Tour d Aigues. La deuxième campagne de travaux se déroula de 1595 à 1607 sous la direction de l ingénieur Raymond de Bonnefons qui a fourni également les projets de modernisation des fortifications d Antibes et Saint-Tropez. C est à lui qu il convient d attribuer les principaux agencements de la citadelle, particulièrement : - le plan général constitué de deux enceintes construites de part et d autre d un rempart supérieur médian, ancienne courtine nord de la fortification urbaine ; - les fronts bastionnés étagés sur 3 niveaux, - la chapelle réutilisée en donjon, voisine de la tour-beffroi, - la plate-forme construite en surplomb prenant appui sur des bandes lombardes massives réunies entre elles par des berceaux transversaux ; - un bâtiment sur l éperon Est, futur logement du gouverneur (disparu). 5-Vue d ensemble depuis le sud avec l emplacement des remparts de ville, dessin d Etienne Martellange (1605) Le jésuite Martellange, qui se rendit à Sisteron pour surveiller la construction d un collège, a réalisé plusieurs dessins de la ville entre 1605 et 1609 qui témoignent de la précocité et de l authenticité des dispositions toujours en place. Ils permettent d observer comment la citadelle s articulait avec les fortifications de la ville dans un état inchangé jusqu au milieu 4

5 19ème siècle, notamment le front ouest de la citadelle doublé par la courtine du rempart de ville. Le plan dressé en 1609 par Jean de Beins (1609) ingénieur des fortifications du Dauphiné confirme l existence à cette date : - de la demi-lune au sud, - des 5 bastions : du Roy, de Notre-Dame, du Gouvernement, du Buëch et de la Durance qui n est pas encore divisé par le retranchement intérieur ; - du redent en épi surplombant le rocher à l ouest, - du passage charretier qui n est pas encore intégré à la place-forte, - du logement du Gouverneur qui sera détruit en Plan de la citadelle et des fortifications de ville. Dessin anonyme (vers 1610) Un plan établi vers 1610 atteste la présence de l orillon du bastion du Roy. Ce dispositif de flanquement, unique à Sisteron, défendait une communication entre la citadelle et la ville. Le tracé arrondi, plus résistant aux tirs, sécurisait ce point d accès sans doute temporaire. Jean de Bonnefons, succède à son père à partir de Il conçut de nouveaux ouvrages à la citadelle de Sisteron en 1611 et On lui doit notamment la construction du retranchement dans l enceinte nord, autre particularisme de la citadelle. Les modifications de la citadelle entre 1611 et 1690 En 1638 un plan de Tassin confirme l emplacement définitif de la communication sud vers la ville, matérialisée par un pont-levis, de l existence de casernes en contrebas du rempart supérieur, qui seront détruites en 1944, et du retranchement intérieur de l enceinte nord (dite aussi tenaille) qui divise dorénavant le bastion de la Durance selon un axe nord-sud. Un escalier pratiqué dans le rocher sous le rempart supérieur permettait de faire communiquer les deux enceintes de la citadelle jusque là étanches entre elles. Une série de plans postérieurs, non datés ni attribués, permettent de faire remonter au milieu du 17ème siècle différents éléments comme les corps de garde de la porte sud et de la porte 5

6 nord dite "de secours", la citerne, au pied de ce qui subsistait de l ancien château médiéval, le bastion (ou tambour) en forme d étrave qui défendait l accès nord de l unique communication interne, le passage charretier percé dans le rocher vers l'ouest, à l époque situé hors de la citadelle. En 1639 la citadelle devint l inconfortable prison du prince Jean Casimir, futur roi de Pologne incarcéré sur ordre de Richelieu. Les améliorations de la fin du 17ème siècle et le projet de Vauban Un rapport daté de 1691 décrit la place en ces termes : "[elle] a esté si fort négligée que tout y tombe en ruyne et à peine y peut-on loger la garnison et les munitions qui y sont necéssaires pour sa déffense". Des réparations et des améliorations sont apportées pour redonner à la citadelle un rôle de dissuasion et des moyens de défense. Les travaux sont rapidement menés sous la direction des ingénieurs Gabriel du Cairon et Gombert. Ils consistèrent à augmenter le nombre de casernement par le surhaussement d'un étage des casernes, à créer une fausse-braie commandant la porte sud de la citadelle en absorbant la demi-lune existante, à construire le demi-bastion sur le front ouest qui intègre désormais dans la citadelle le passage charretier creusé dans le rocher, à élargir le chemin de ronde médian au point haut de la citadelle, et à créer un escalier au milieu de son développement afin de faciliter l'utilisation des tours de jalonnement de l ancienne muraille médiévale. L encorbellement du chemin de ronde s appuie sur une série de contreforts à arcades, sur le modèle de celles de la plate-forme de la chapelle réalisées un siècle plus tôt. Cette scansion verticale donne à la citadelle de Sisteron son allure si caractéristique. A la suite de l invasion du Dauphiné en 1692 par les armées du duc de Savoie, Vauban est dépêché par le roi pour une inspection des places du Dauphiné et de la Haute-Provence. Cette tournée a lieu de septembre à début décembre de la même année avec Niquet, directeur des fortifications pour la Provence. Les deux ingénieurs se montrèrent très critiques vis-à-vis des réalisations précédentes, y compris sur les améliorations qui venaient d être réalisées dans l enceinte sud, qu ils se proposent de supprimer. Les différents projets de Vauban et de Niquet présentés en 1698 et 1704, jugés d une ampleur et d un coût disproportionnés, ne furent jamais concrétisés. La contribution de Vauban à Sisteron fut donc limitée à la construction du magasin à poudre sur le bastion du Buëch. 6

7 L immobilisme au 18ème siècle 7a-Plan de Sisteron et des environs en 1785 : détail de la citadelle Après la mort de Vauban, l'idée d une réorganisation complète de la citadelle est abandonnée. Plusieurs de ses propositions furent reprises sans plus de succès par les ingénieurs militaires au 18ème siècle. Un plan de la citadelle daté de 1785 dresse un état des lieux qui va perdurer jusqu en Des 9 échauguettes mentionnées sur ce plan, huit subsistent aujourd hui (celle du redent en épi a disparu). Les apports du 19ème siècle Durant la Révolution et le premier quart du 19ème siècle, la citadelle ne fit l'objet que de travaux d'entretien ordinaires les dépenses extraordinaires étant réservées à l enceinte urbaine, jugées prioritaires, car elle défendait directement la vallée de la Durance. 7

8 7b-Vue de la citadelle depuis le sud avec la fortification urbaine montant à l ouest. Gravure vers 1820 d après un dessin de Constant Bourgeois ( ) A partir de 1820 deux préoccupations majeures vont influer dans la logique de défense de la citadelle. La première était l absence de communication entre la citadelle et le pont sur la Durance en contrebas, sur lequel elle n'exerçait aucun contrôle direct ; la seconde était la relative vulnérabilité du front sud-ouest, faiblement escarpé et jugé insuffisamment protégé des positions dominantes environnantes, malgré la courtine du rempart médiéval élevée en parallèle. La solution préconisée pour connecter la citadelle à la ville basse consista à créer un fortin à l aplomb de la porte Dauphine et à percer dans l escarpement rocheux un escalier tunnel de 258 marches pour faire communiquer ce réduit et la citadelle. Les travaux sont mis en œuvre entre 1841 et Des modifications furent également apportées progressivement de 1841 à 1861 pour optimiser la défense de la citadelle en fonction de l évolution de l armement. Dans l enceinte sud, un cavalier en terre destiné à supporter les pièces d artillerie est construit sur le bastion du Roy. Ce dispositif a rendu superflu le rempart de ville qui fut supprimé de ce côté en 1842, déconnectant la citadelle et la ville. 8

9 8a - Porte charretière dans l orillon du bastion du Roy 8b Ancienne porte entre la 1ère et 2ème enceinte au sud 9-Vue générale de l enceinte nord : le mur de retranchement au premier plan, les casemates traversantes au second plan. À l arrière le bastion de la Durance, à droite le mur à traverses supérieur. B. Jourdan, drac paca crmh Après 1850, on s'emploie à améliorer les accès charretiers de l enceinte sud où sont regroupés les casernements. Pour ce faire deux portes à pont-levis métalliques sont aménagées, une dans l orillon du bastion du Roi, une autre dans la gorge du bastion du Gouvernement. Pour faciliter la circulation des convois, la rampe d accès à la 2ème enceinte fut reprofilée à son débouché, entraînant l abaissement du niveau de seuil de la porte primitive qui a été condamnée depuis cette date. L organisation de l enceinte nord fut entièrement reconsidérée. La porte nord fut doublée par un ouvrage maçonné formant sas. La porte et le mur de contrescarpe du retranchement intérieur furent refaits à neuf. Au niveau le plus haut, un chemin de ronde à visées de tirs, ponctué de murs à traverses qui permettaient en cas d assaut de protéger la retraite des soldats, fut construit parallèlement à l arête médiane du rocher. Des magasins casematés à l épreuve des bombes et des cavernes abris en sous-œuvre de la chapelle complétaient le nouveau dispositif militaire. A partir de 1863 du fait de la diffusion de l'artillerie rayée 3 la citadelle n'était plus considérée comme d'une importance stratégique suffisante pour justifier de nouveaux investissements pour sa défense. En 1869, la casemate du bastion du Roi fut cédée à la ville et des terrains militaires aux abords de la citadelle furent affermés à l administration municipale. Le classement au titre des monuments historiques des restes de la fortification urbaine intervient dès 1875, et marque 9

10 dès lors leur intérêt pour le service des Monuments Historiques, tandis que le déclassement militaire de la place-forte est décrété en La désaffectation et les destructions au 20ème siècle Durant la première Guerre Mondiale la citadelle fut utilisée comme centre de détention pour les prisonniers de guerre allemands. En 1925 le classement au titre des monuments historiques des "rempart supérieur, tour de l'horloge, chapelle et échauguette dite guérite du diable de l'ancienne citadelle de Sisteron" est acquis tandis que l'ensemble est classé à la même date au titre des sites (à l exclusion des parties MH). Le 2 juin 1928 la ville fit l acquisition de la citadelle et fait aménager un théâtre de verdure au milieu de l'enceinte nord, ce lieu accueille depuis, un des plus anciens festivals de théâtre en France. De des travaux de restauration conduits par l'architecte en chef Albert Chauvel, ont concerné le chemin de ronde du rempart supérieur, la couverture de la tour de l'horloge, la restitution du volume intérieur de la chapelle, la démolition du bâtiment situé à l'extrémité orientale de la plate-forme de la chapelle, attesté en 1610, pour faire place au belvédère actuel. 10- Etat de la chapelle après les bombardements Les bombardements aériens alliés d août 1944, occasionnèrent d'importants dégâts à la citadelle, principalement à la chapelle lourdement ruinée, et aux bâtiments militaires de la moitié sud, tous partiellement détruits. Le programme de restauration de la chapelle Notre Dame est lancé par le service des Monuments Historiques à partir de 1967, sous la responsabilité successive des architectes en chef Jean-Claude Rochette ( ) et Dominique Ronsseray ( ). Les bâtiments militaires n ont pas été reconstruits. 10

11 Une association locale "Arts-Théatre-Monuments" se constitue en 1955, avec pour double vocation, de restaurer la citadelle et d'y rouvrir le théâtre de plein-air qui avait été actif de 1928 à L'oeuvre de restauration, financée principalement par le produit des entrées, est régulièrement menée par l'association A.T.M., maître d'ouvrage ayant délégation de service public de la commune, avec l aide et le conseil du Service territorial de l architecture et du patrimoine (STAP) des Alpes de Haute-Provence. Présentation topographique 11- Fronts successifs au sud de la citadelle (état actuel) Vue d ensemble Construit à la périphérie de la ville, l ensemble a la forme d un polygone irrégulier qui épouse un relief particulièrement escarpé. Des fronts étagés sur 4 niveaux au sud et 3 niveaux au nord se succèdent selon une verticalité tout à fait exceptionnelle dans ce type de plan bastionné. 11

12 12 Rempart supérieur médian, séparant les deux parties de la citadelle Le rempart supérieur à peu près rectiligne s élève sur une crête rocheuse qui sépare de manière presque étanche les parties nord et sud de la place forte. Il est couronné par la tour de l horloge, ancien beffroi, et par la chapelle, autrefois donjon, située sur une plate-forme construite sur bandes lombardes. A l ouest domine le redent en épi qui a perdu son échauguette attestée en De ce côté le parement de la courtine chemise entièrement l enrochement naturel de façon remarquable. L éperon naturel constitue l essentiel de la défense orientale, ce front n est donc pourvu que d une guérite dite du Diable - montant de fond, qui permettait la surveillance du défilé formé par la Durance. En contrebas de cet éperon se dresse le réduit qui complète à partir de 1850 le système défensif de la citadelle L enceinte sud 13-Vue des plates-formes successives de l enceinte sud 12

13 Dans la moitié sud, trois fronts délimitent trois plates-formes rapprochées offrant le maximum de planéité aux pièces d artillerie malgré les contraintes topographiques du site. Trois portes à pont-levis commandaient de manière désaxée les enceintes successives. Ces 3 communications furent augmentées d un passage charretier en 1691 et de deux portes à pontlevis métalliques en Fausse braie de l enceinte sud et bastion Notre-Dame. 15 Porte principale au sud. L ancienne demi-lune, transformée en fausse braie en 1692, est dominée par le bastion du Roy à gauche et le bastion Notre-Dame à droite. La porte principale, en fonction après 1610, s ouvre vers la ville. Très endommagée en 1944, elle a été restaurée et présente aujourd hui des rainures de flèches ouvertes par le haut et un sas découvert. Elle est défendue par une série de casemates. Des casemates passives servant de magasin ou de corps de garde qui abritent aujourd hui le musée de la citadelle et deux casemates de tir dites casemates actives. Le bastion du Roy possède deux casemates actives, dont une logée dans le flanc sud-est, percée de 3 paires de meurtrières. Son chemin de ronde est semi enterré. Il s agit d une disposition héritée du 19ème avec l aménagement du cavalier en terre. Une rampe coudée à droite dessert la plate-forme de la première enceinte. Le bastion du Gouvernement défend la 2ème enceinte. Il tient son nom du logis du gouverneur qui était édifié à proximité. Il est pourvu d une échauguette dans l axe de la première rampe d accès et d un chemin de ronde à traverses, créé en Bastion du Gouvernement. 13

14 Le front ouest est défendu par un demi-bastion attesté sur le plan de Vauban en Destiné à abriter des batteries de canons, son parapet est constitué d une maçonnerie épaisse, percée de deux larges embrasures à ciel ouvert. 17-Demi-bastion sud-ouest avec emplacement des batteries 18- Echauguette sur le front sud-est Le front est de la deuxième enceinte est formé d un demi-bastion. Sa pointe sud est pourvue d'une échauguette qui fait pendant à celle du bastion du Gouvernement. Sur son terre-plein s élevait le logis du gouverneur détruit en La troisième enceinte est desservie par un escalier à double révolution, défendu par une chambre de tir. Elle conserve la citerne mentionnée en Une volée droite d escalier appuyée contre le soubassement de la chapelle donnait accès au réduit du château médiéval (détruit au 19ème siècle) par une porte défendue d un petit pontlevis. 19 Brisure de la courtine de la plate-forme supérieure. 20- Chemin de ronde supérieur On accède au rempart supérieur par un escalier droit attesté en Son chemin de ronde presque rectiligne était flanqué de quatre tours rectangulaires dont il reste un exemple. Il 14

15 s élève sur une série d'arcades formant contreforts venus élargir le rempart médiéval en A l'est, le chemin de ronde s élargit pour former une étroite plate-forme qui supporte la chapelle. La cluse de la Durance est dominée par une échauguette dite Guérite du Diable. L enceinte nord 21 Vue cavalière depuis l est (état actuel). La moitié nord de la citadelle s étend sur une pente plus modérée. Son niveau en net contrebas du rempart supérieur, est proche de celui de la première enceinte sud. A l inverse du front sud, son plan est plus développé en largeur (250 m) qu en profondeur. Il présente une organisation symétrique, avec deux bastions encadrant une courtine au centre de laquelle est percée la "porte de secours". Son aménagement intérieur se caractérise par un retranchement créé dès La porte nord donne sur la campagne. Elle est dite de secours car c était le point de passage des renforts en cas d attaque du côté de la ville. Elle était également destinée aux convois de ravitaillement et à l acheminement de l artillerie car il n existait pas à l origine de passage charretier entre les deux parties de la citadelle. 15

16 Elle a été condamnée durant le 18ème siècle jusqu en 1840 où elle fut réhabilitée et pourvue d un sas qui doublait sa défense. Cette porte équipée d'un pont-levis à flèches, est analogue à la porte principale sud : mur-écran plaqué en relief sur la courtine, arcades d'entrée en pleincintre, rainures de flèches ouvertes vers le haut. 22 Mur de courtine nord et porte dite de secours 23 Magasin à poudre : élévation et coupe transversale. Le bastion du Buëch, achevé en 1606, est le plus grand bastion de la citadelle. Il possède dès l origine deux échauguettes. Il comprend une casemate de tir défendant la porte nord et le magasin à poudre. Seule construction attribuée à Vauban, le magasin à poudre de plan rectangulaire s élève sur une terrasse et n'a jamais eu de mur d'isolement. Il est très bien conservé sans altérations ni remaniements. Il abrite deux salles voûtées en berceau, l une en rez-de-chaussée, l autre en sous-sol. Les voûtes sont construites en brique pour minimiser les dommages en cas d explosion. Un escalier droit, couvert d une voûte en demi berceau, dessert le sous-sol. Il prend place dans le volume intérieur de l édifice au revers de la façade nord. Les reins des voûtes ont une épaisseur de 2, 80m, pour résister aux bombes. Les murs latéraux d une épaisseur de 2, 65 m sont dépourvus de contreforts et sont percés de baies de ventilation en chicane. La citadelle compte aujourd hui 8 échauguettes. Elles sont de plan circulaire et positionnées en encorbellement sur l angle des bastions. Seule l échauguette qui cantonne le retranchement intérieur est de forme octogonale et d une dimension plus importante. Le faîte de la courtine nord est surmonté d une tourelle pleine, ajoutée en 1853, appelée «dame», dont la fonction est d empêcher le cheminement des agresseurs sur le parapet. 16

17 24 Echauguette et dame du retranchement intérieur. 25 Porte du retranchement intérieur. Le retranchement intérieur de la citadelle est attesté en Sa porte, son fossé et sa contrescarpe ont été rebâtis en Le bastion de la Durance est devenu un demi-bastion du fait de son amputation par le retranchement intérieur. Sa forme irrégulière souligne une série de redents saillants et rentrants. Il donne accès à la guérite du diable. Les deux bâtiments longitudinaux casematés, construits entre 1848 et 1850, selon un axe nord-sud, abritaient une caserne de 170 hommes et des magasins voûtés en berceau transversaux. Le sous-sol est pour partie creusé dans le rocher, pour partie maçonné et voûté en berceau. Une petite casemate s étend en parallèle à l est. Construite en 1850, elle abrite l'accès de l'escalier souterrain et une citerne. 26 Partie orientale du bastion de la Durance cantonnée par la guérite du Diable. 17

18 Parmi les améliorations défensives apportées au milieu du 19ème siècle un imposant mur de séparation fut élevé en parallèle au rempart supérieur médiéval et perpendiculaire au retranchement d origine. Il protège un chemin de ronde percé de créneaux de fusillade très rapprochés. 27 Mur à créneaux de fusillade et à traverses. 28 Tambour défendant l accès à la communication interne entre les deux parties de la citadelle. Au point haut de l enceinte nord un petit bastion ou tambour de plan pentagonal, créé en 1611, défend la communication directe entre les parties nord et le sud de la citadelle percée sous l'arête rocheuse, seul passage intérieur jusqu en Au milieu du 19ème siècle il a été modernisé et sa protection renforcée par une succession de traverses-murs. Les "cavernes-abris" aménagées en sous-œuvre de la chapelle entre 1854 et 1849 permettaient aux soldats de trouver refuge. 29 Cavernes-abris. 30 Escalier couvert faisant communiquer les parties nord et sud de la citadelle. Un escalier couvert et un escalier découvert mettent en communication ces casemates avec le secteur haut du bastion de la Durance. Un escalier droit souterrain sert de passage entre les 2 parties de la citadelle. Il correspond à une disposition d origine. Le réduit ou fortin de la porte Saunerie fut créé en 1850 pour commander le pont sur la Durance. Il défend le débouché de l escalier tunnel qui dessert la citadelle. 18

19 31 Fortin ou réduit en contrebas défendant le pont sur la Durance. 32 -Escalier tunnel faisant communiquer le réduit et la citadelle. L escalier tunnel de 258 marches a été aménagé en Il est percé d une série d ouvertures pour l aération, l éclairage et le tir. De la citadelle au monument Conjuguant l héritage d une fortification urbaine médiévale et les innovations architecturales de l ingénierie militaire de la fin du 16ème et du début du 17ème siècle, la citadelle de Sisteron constitue un catalogue des meilleurs dispositifs militaires adoptés au cours de son histoire. Ses principales dispositions actuelles, attestées en 1605, demeurent authentiques et en font son intérêt majeur. Les apports du 19ème siècle ont remodelé son système fortifié sans modifier son allure générale. Parmi ceux-ci, la refonte des accès en 1859 a eu un impact déterminant dans l adaptation du monument aux nouveaux enjeux stratégiques, comme en témoignent les ponts-levis en zig-zag dont peu sont conservés de nos jours. L intérêt pour l histoire de l architecture militaire et la qualité de l ensemble particulièrement bien conservé ont motivé le vœu d un classement de la citadelle, en totalité, par la commission régionale du patrimoine et des sites (CRPS) lors de sa séance du 3 juillet Il devra être validé par la commission nationale des monuments historiques (CNMH) au cours d un second examen du dossier. 19

20 NOTES 1 Bibliothèque du Génie (Atlas 57, 1775, Sisteron par Paul Louis Antoine de Rosières, p. 1 à 14 : mémoires ) & Archives du Génie, Places-Fortes : Article 8, section 1, Cartons 1 à 7 : Mémoires, apostilles, états estimatifs des dépenses, plans coupes et élévations relatifs aux travaux de construction et d'amélioration projetés ou en cours dans la place de Sisteron.( ) et Sous-série 4 V 485 (Direction et chefferies du Génie des Alpes) : nomenclature générale des fortifications et bâtiments militaires ( ). Mémoires, apostilles, états estimatifs des dépenses, plans coupes et élévations relatifs aux travaux de construction et d'amélioration projetés ou en cours dans la place de Sisteron ( ) 2 De l Italien «rocca» qui signifie forteresse. 3 Les rayures pratiquées dans le canon conféraient au boulet une rotation selon un axe fixe et invariable destiné à augmenter la justesse et la portée des tirs. CREDITS PHOTOGRAPHIQUES 1 - Vue de Sisteron depuis le sud-est, dessin d Etienne Martellange (1608). BNF Gallica 2 - Vue de Sisteron depuis le sud, dessin d Etienne Martellange (1606). BNF Gallica 3a - Elévation de la chapelle-donjon et de la tour de l Horloge. AD 13 cote : 2 J 3 «Atlas des bâtiments militaires», Repro. B. Jourdan 3b- Coupe longitudinale de la chapelle-donjon. AD 13 cote : 2 J 3 «Atlas des bâtiments militaires», Repro. B. Jourdan 3c- Coupe de la tour de l Horloge. AD 13 cote : 2 J 3 «Atlas des bâtiments militaires», Repro. B. Jourdan 4- Plan chronologique. Service territorial de l architecture et du patrimoine des Alpes de Haute Provence et Conservation régionale des monuments historiques 5- Vue d ensemble depuis le sud avec l emplacement des remparts de ville, dessin d Etienne Martellange (1605). BNF Gallica. 6- Plan de la citadelle et des fortifications de ville. Dessin anonyme (vers 1610). BNF Gallica 7a- Plan de Sisteron et des environs en 1785 : détail de la citadelle. AD 13 cote : 2 J 2 (9). Repro. B. Jourdan. 7b- Vue de la citadelle depuis le sud avec la fortification urbaine montant à l ouest. Gravure vers 1820 d après un dessin de Constant Bourgeois ( ). DR. 8a- Porte charretière dans l orillon du bastion du Roy. B. Jourdan, drac paca crmh 8b- Ancienne porte entre la 1ère et 2ème enceinte au sud. B. Jourdan, drac paca crmh 9- Vue générale de l enceinte nord : le mur de retranchement au premier plan, les casemates traversantes au second plan. À l arrière le bastion de la Durance, à droite le mur à traverses supérieur. B. Jourdan, drac paca crmh 10- Etat de la chapelle après les bombardements. Médiathèque de l Architecture et du Patrimoine, cliché Mas, avant Fronts successifs au sud de la citadelle (état actuel). ATM, dessin Jean-Benoit Héron 12- Rempart supérieur médian, séparant les deux parties de la citadelle. B. Jourdan, drac paca crmh 13- Vue des plates-formes successives de l enceinte sud. B. Jourdan, drac paca crmh 14- Fausse braie de l enceinte sud et bastion Notre-Dame. B. Jourdan, drac paca crmh 15- Porte principale au sud. B. Jourdan, drac paca crmh 16- Bastion du Gouvernement. B. Jourdan, drac paca crmh 17- Demi-bastion sud-ouest avec emplacement des batteries. B. Jourdan, drac paca crmh 18- Echauguette sur le front sud-est. B. Jourdan, drac paca crmh 19- Brisure de la courtine de la plate-forme supérieure. B. Jourdan, drac paca crmh 20- Chemin de ronde supérieur. B. Jourdan, drac paca crmh 21- Vue cavalière depuis l est (état actuel). ATM, dessin Jean-Benoit Héron 22- Mur de courtine nord et porte dite de secours. B. Jourdan, drac paca crmh 23- Magasin à poudre : élévation et coupe transversale. AD 13 cote : 2 J 3 «Atlas des bâtiments militaires», Repro. B. Jourdan 24- Echauguette et dame du retranchement intérieur. B. Jourdan, drac paca crmh 25- Porte du retranchement intérieur. B. Jourdan, drac paca crmh 26- Partie orientale du bastion de la Durance cantonnée par la guérite du Diable. B. Jourdan, drac paca crmh 27- Mur à créneaux de fusillade et à traverses. B. Jourdan, drac paca crmh 28- Tambour défendant l accès à la communication interne entre les deux parties de la citadelle. B. Jourdan, drac paca crmh 29- Cavernes-abris. B. Jourdan, drac paca crmh 30- Escalier couvert faisant communiquer les parties nord et sud de la citadelle. B. Jourdan, drac paca crmh 31- Fortin ou réduit en contrebas défendant le pont sur la Durance. B. Jourdan, drac paca crmh 32- Escalier tunnel faisant communiquer le réduit et la citadelle. B. Jourdan, drac paca crmh 20