EPREUVE ECRITE de BIOLOGIE
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- Léon Brunet
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1 Banque Agro Veto. Session 2008 Rapport sur le concours B ENV EPREUVE ECRITE de BIOLOGIE Concours Nombre de Moyenne Ecart-type Note la plus Note la plus candidats basse haute B ENV 339 8,9 3,5 1,0 19,0 Le sujet intitulé «Les membranes biologiques dans la vie des organismes eucaryotiques» couvre un très large champ de connaissances, à la fois biochimiques, cellulaires et physiologiques, et tant dans les domaines du végétal que de l animal. Cet aspect encyclopédique, qui pouvait a priori sembler un handicap, s est avéré être un avantage, dans la mesure où, malgré des différences de culture inhérentes à des formations universitaires spécifiques, chaque candidat pouvait valoriser une bonne partie de ses connaissances. En rapport avec ceci, il a été noté un gain de plus d un point à la moyenne de cette épreuve par rapport à celles des années précédentes. Le plan du devoir était clairement annoncé dans l énoncé du sujet et ne posait pas de difficulté particulière. Il s agissait, dans une première partie, de traiter les aspects biochimiques et architecturaux concernant les membranes biologiques, puis de développer les aspects fonctionnels très divers associés à toutes les membranes limitantes ou internes des cellules animales et végétales, et enfin de montrer que chez des Eucaryotes pluricellulaires (exemple des Vertébrés) de nouvelles fonctions se trouvaient rassemblées essentiellement au niveau de la membrane plasmique, dans le cadre de la construction et du fonctionnement harmonieux d un organisme complexe et de grande taille. 1) Deux catégories d informations sont attendues dans la première partie : celles concernant les molécules constitutives des membranes et leurs propriétés physicochimiques (en particulier dans le cas des lipides membranaires) et celles concernant leur organisation moléculaire, avec la description raisonnée de la bicouche lipidique et la position des différentes catégories de protéines qui y sont associées. Quelques expériences classiques, et/ou des modèles biologiques historiques (les hématies de Mammifères, par exemple), permettent d illustrer cette partie et de montrer comment le perfectionnement des techniques cytologiques (protocoles de cryofracture et cryodécapage) a permis de faire évoluer le modèle de membrane biologique (de la structure trilaminaire au modèle de la mosaïque fluide) et de décrire ses principales propriétés : la fluidité et l asymétrie. Très peu de candidats connaissent la formule exacte d un phospholipide, avec ses différents constituants chimiques, et une grande majorité se contente de proposer la représentation simplifiée avec «une boule hydrophile et deux queues hydrophobes». Très nombreux sont ceux qui confondent acides gras seuls ou glycérol seul et phospholipides, ou acide phosphatidique, au mieux, et phospholipide ; certains ne mentionnent même pas l acide phosphorique dans les phospholipides. Les sphingolipides, les glycolipides, le cholestérol (spécifique des cellules animales) sont enfin le plus souvent oubliés. La notion d amphiphilie, qui découle de l analyse de la structure de tous les lipides membranaires n est pas suffisamment dégagée ; ceci laisse à penser que le processus d autoassemblage en bicouche qui en résulte n a généralement pas été bien compris, en termes de physicochimie. 1 sur 5
2 En ce qui concerne les différents types de protéines membranaires, la nomenclature ne semble pas encore bien claire et stabilisée, y compris sans doute chez quelques formateurs. Les protéines intrinsèques (intégrales) sont en général transmembranaires et portent un ou plusieurs domaines hydrophobes en alpha hélice (mais il existe aussi des feuillets béta et des «tonneaux» hydrophobes) interagissant avec les domaines hydrophobes des lipides. D autres protéines intrinsèques totalement hydrophiles sont en revanche situées en dehors de la bicouche, mais fortement liées à elle par des ancres lipidiques (acides gras ou lipides). Toutes ces protéines - et c est leur définition opérationnelle - ont en commun de ne pouvoir être «extraites» de la bicouche qu après destruction de cette dernière par des solvants ou des détergents. A côté de celles-ci, les protéines dites extrinsèques (périphériques) sont associées aux protéines intrinsèques, de part et d autre de la bicouche, par des liaisons faibles (de type liaisons hydrogène, par exemple) ; elles sont hydrophiles et facilement décrochables de la membrane par de simples variations de ph ou de force ionique (salinité). Il s agit donc d associations de protéines de type structure quaternaire. 2) La deuxième partie décrit les diverses fonctions universellement assurées par des membranes biologiques chez les cellules eucaryotiques. Leur tout premier rôle, facile à illustrer avec la membrane cytoplasmique, est celui d une barrière sélective limitant un compartiment cellulaire (organite) ou la cellule entière. Le cœur hydrophobe de la bicouche empêche, en principe, le passage de toute molécule polaire (hydrophile), mais comme le montrent les études utilisant les bicouches phospholipidiques artificielles, il faut nuancer le propos. Tout développement sur les transports doit commencer par un rappel rapide sur la diffusion et les mouvements spontanés de molécules et d ions en solution ; il est ensuite aisé de montrer la nécessité de sources d énergie dans certaines conditions de transport. Les bicouches artificielles laissent aisément passer, par simple diffusion, les gaz dissous et les molécules apolaires ; l eau et les petites molécules polaires non chargées les franchissent aussi, bien qu avec difficulté, sans doute grâce aux mouvements constants des queues des acides gras, en particulier dans les membranes fluides (agitation moléculaire des acides gras peu «tassés» les uns sur les autres) ; enfin, les bicouches sont totalement imperméables aux grosses molécules polaires (chargées ou non) et aux ions minéraux, et a fortiori aux macromolécules. La conclusion de ces observations est que la plupart des molécules indispensables au fonctionnement des cellules : nutriments (acides aminés, sucres, etc.) ou ions, devront y pénétrer au moyen de molécules porteuses spécialisées de nature protéique ; un nombre très élevé de protéines transmembranaires de grande taille assurent ainsi cette fonction de transport dans la membrane plasmique de toute cellule, ainsi que dans celles des organites. De façon générale, les candidats font bien la différence entre transports passifs et transports actifs, ces derniers nécessitant une source d énergie et se réalisant contre un gradient chimique ou électrochimique. Ils citent souvent les aquaporines comme exemple de transport diffusif facilité, mais oublient les canaux ioniques dont on verra l importance plus loin! En ce qui concerne les mécanismes de transport, il n est pas rare de lire que certains transporteurs de ce type (les perméases) fonctionnent en basculant au sein de la membrane (avec retournement complet) pour transporter un ligand à travers celle-ci. Il faut bien comprendre que si le «flip-flop» spontané est quasiment impossible pour un petit phospholipide, pour des raisons physicochimiques simples, il est a fortiori inimaginable pour une grosse molécule transmembranaire le plus souvent glycosylée (sur la face externe) ; ce genre de schéma explicatif que l on trouve encore dans certains vieux ouvrages est en totale contradiction avec les lois élémentaires de la thermodynamique! La pompe Na/K est classiquement décrite comme exemple de transporteur actif primaire, et le plus souvent de façon correcte ; en revanche, les transports actifs secondaires, qui utilisent un gradient ionique moteur pour permettre le transport d une molécule organique ou d un autre ion contre leurs 2 sur 5
3 gradients (électro)chimiques, sont plutôt mal connus. Diverses erreurs sont à signaler en ce qui concerne les transports par cytoses, plus particulièrement l exocytose, qui est confondue avec le bourgeonnement (évagination de la membrane plasmique) ; ce dernier est un processus rare (en général lié au cycle viral), alors que l exocytose est en rapport direct avec les processus sécrétoires communs à toutes les cellules eucaryotiques : production de protéines, glycoprotéines, polysaccharides et entretien de la membrane plasmique (apport de molécules et compensation de l endocytose). Parmi les fonctions universelles assurées par les membranes chez les Eucaryotes, il ne fallait pas oublier celles assurées par le réseau dit «endomembranaire», constitué par le Réticulum Endoplasmique (RE rugueux et lisse, qui représentent la plus grande surface membranaire dans les cellules, en général), l appareil de Golgi, le système endosomal et les lysosomes. Sans entrer dans les détails des multiples rôles physiologiques assurés par ces compartiments, il fallait tout de même rappeler leur importance capitale dans le trafic des protéines le long de la voie de sécrétion : synthèse (par insertion cotraductionnelle) des protéines sécrétées, membranaires et lysoso-males au niveau du RE rugueux, glycosylations diverses dans les dictyosomes golgiens, stockage des hydrolases lysosomales dans les lysosomes «primaires» et enfin, synthèse des lipides membranaires et du cholestérol dans les membranes du RE lisse. Si 50 % des candidats ont bien pensé au RE rugueux, un tiers seulement a correctement traité ce point, en relation avec le processus sécrétoire, la biogenèse de la membrane plasmique et l exocytose ; en revanche, pratiquement aucun candidat n a une idée sur les fonctions précises de l appareil de Golgi et du RE lisse. Enfin, un rôle très important des membranes des cellules eucaryotiques est celui rempli par les organites à vocation énergétique, dits «semi-autonomes» et issus de l endosymbiose : mitochondries et plastes. Il ne s agissait pas de détailler les mécanismes de l oxydation phosphorylante ou de la photophosphorylation (un seul de ces exemples suffisait, d ailleurs, et essentiellement traité sous forme de schéma) liées aux membranes internes de ces organites. Les grands principes des processus : 1) du transfert des électrons (issus du pouvoir réducteur ou de l eau, selon les cas), 2) de la formation d un gradient de protons transmembranaire (avec des différences selon qu il s agit de respiration ou de photosynthèse), et 3) de la synthèse de l ATP au niveau des ATP synthétases devaient être rapidement décrits. Un quart des candidats seulement (avec une majorité pour les mitochondries) a bien réussi cette question, tandis que plus de la moitié n y a même pas pensé! C est pourtant un exemple très illustratif de la nécessité d une membrane pour accomplir une fonction cellulaire, ici énergétique. Dans un autre ordre d idées il a été noté, et dans un nombre anormalement élevé de copies, de grossières erreurs dans l organisation des cellules végétales : selon les cas, deux membranes limitantes (plasmalemme et membrane cytoplasmique!) sont mentionnées, ou bien il n existe pas de membrane, mais seulement une paroi. On rappelle que la situation n est pas fondamentalement différente de celle des cellules animales, et que la paroi végétale (quelle que soit son épaisseur et sa complexité) n est rien d autre qu une matrice extracellulaire (MEC) classique. Les choses sont pourtant bien claires, et seuls l usage et l histoire sont responsables du fait que les parois font classiquement partie intégrante de l organisation des cellules végétales, alors que dans le règne animal la MEC est située hors de la cellule. 3) La dernière partie concerne les rôles spécifiques assurés par les membranes dans le cadre du fonctionnement intégré des Vertébrés ; les thèmes traités ici dépassent donc la stricte échelle cellulaire et posent les questions du rôle des membranes chez un pluricellulaire. Deux problématiques sont liées à l état pluricellulaire : 1) l acquisition de liens stables entre cellules 3 sur 5
4 identiques constituant les tissus, eux-mêmes constituant les organes, 2) l échange indispensable de signaux entre cellules, de façon à organiser le fonctionnement harmonieux des milliards (et souvent davantage!) de cellules d un organisme de grande taille, à la fois dans l espace et dans le temps. L accrochage des cellules au sein d un tissu se réalise au moyen des jonctions intercellulaires, qui sont des dispositifs membranaires identifiables en cytologie, ou bien grâce à des protéines d adhérence (évoquées dans les cours de Biologie du développement), localisées dans la membrane plasmique, mais non visualisables de façon directe. L exemple classique, au niveau de la Licence, est celui d un épithélium unistratifié (en général intestinal : exemple des entérocytes), où l on décrit, le long des membranes latérales et de haut en bas, trois types de dispositifs : les jonctions étanches (serrées), les ceintures d adhérence et les desmosomes ponctuels. Les hémidesmosomes, quant à eux, permettent l accrochage avec la lame basale, qui est une fine matrice extracellulaire particulière (et surtout pas une membrane!) faisant le lien avec le tissu conjonctif sous-jacent. Il suffisait simplement, dans cet exposé, de mentionner l existence des protéines adhésives. Le tiers seulement des candidats a pensé à traiter cette question, pourtant cruciale quand on considère l organisation d un être pluricellulaire, et moins de 10 % possèdent des connaissances correctes sur le sujet. La communication entre cellules se réalise de diverses manières : 1) directement de cytoplasme à cytoplasme, via des jonctions spécialisées, 2) indirectement, en faisant intervenir des molécules de signalisation émises à l extérieur des cellules émettrices (en général par exocytose), transportées à des distances plus ou moins grandes et reconnues par des cellules cibles, grâce à des récepteurs protéiques de deux types, selon les cas (membranaires ou cytoplasmiques), induisant, après liaison, une cascade de signalisation intracellulaire ; 3) au sein des cellules nerveuses, un signal électrique peut être conduit à très longue distance et très rapidement, et il est responsable au niveau d une zone d étroit contact entre deux membranes plasmiques de cellules voisines (synapse) d une réponse chimique au sein de la membrane de la cellule post-synaptique. Les jonctions communicantes (gap junctions), ou synapses électriques, permettent le passage direct, entre cellules, d ions ou de petites molécules de signalisation ; elles sont localisées sur la face latérale des cellules intestinales citées plus haut, mais présentes dans un grand nombre d autres tissus animaux. Elles permettent de coordonner instantanément le fonctionnement de cellules voisines au sein d un tissu ; les exemples des cardiomyocytes et du battement cardiaque, ou bien des cellules embryonnaires au cours du développement sont classiques et permettent d illustrer ce thème. Comme pour les autres jonctions intercellulaires, un tiers seulement des candidats a évoqué ce point et un peu plus de 10% l ont bien traité. Qu elle soit humorale ou nerveuse, la signalisation constitue un domaine très important de la physiologie animale, traité à travers de nombreux exemples de cours ; elle implique presque toujours une intervention membranaire. Il est tout de même étonnant que la moitié environ des copies ne fasse pas état de l une ou l autre de ces fonctions capitales (ou parfois même les deux). De façon générale, tout ce qui concerne la genèse d un potentiel d action et sa conduction unidirectionnelle, l intervention des canaux voltage dépendants et des pompes ioniques, les événements se déroulant au niveau des membranes pré et post-synaptiques (synapse neuromusculaire, le plus souvent) ont été correctement décrits par une majorité de candidats (parmi ceux qui y ont pensé!). De même, lorsque la signalisation humorale a été traitée, c est généralement avec un luxe de détails concernant les diverses familles de signaux (hormones ou facteurs de croissance) et de récepteurs, les cascades mises en œuvre, etc. ; on remarque particulièrement bien ici la différence de traitement de certains sujets académiques, selon les 4 sur 5
5 centres de formation. Dans ce cas, un seul exemple de signalisation membranaire était évidemment attendu, parmi les nombreux possibles, mais avec quelques phrases de généralisation! Enfin, parmi les rubriques de type «cerise sur le gâteau», et qui justifiaient un «bonus» (très rarement rencontrés, il est vrai), on pouvait citer le cas original et particulièrement intéressant des cellules sensorielles possédant des membranes photosensibles (cellules visuelles) ou mécano sensibles (cellules auditives, par exemple). En conclusion, le cru 2008 est un bon millésime, avec plusieurs copies denses et d excellent niveau dans plusieurs secteurs d un vaste champ de connaissances ; il semblerait même (bien que cela n ait pas été quantifié) que l orthographe soit globalement en voie d amélioration, et si ceci se confirme, il s agirait d une très bonne nouvelle! En revanche, à l autre extrémité de l histogramme, on trouve toujours quelques copies indignes d étudiants de niveau L2 (quelques exemples : il n existe pas de mitoses chez les végétaux, l épiderme est une membrane, l ADN est une chaîne d acides aminés, la respiration n existe que dans les cellules animales, les virus et les prions sont des Procaryotes, ) et parfois même à la limite d un certain délire (dû à une fatigue excessive?). Correcteurs : MME REEB, M. CALLEN et M.HOURDRY 5 sur 5
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