LA JUSTICE DE PROXIMITE AU BAS-CONGO

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1 LA JUSTICE DE PROXIMITE AU BAS-CONGO (Ville de Matadi et district des Cataractes) Août 2009 Japan International Cooperation Agency

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3 La Justice de proximité au Bas-Congo (Ville de Matadi et district des Cataractes) Août

4 Illustration de couverture : Anne-Aël POHU Photos : Anne-Aël Pohu RCN Justice & Démocratie Siège social : Avenue Brugmann, 76 B-1190 Bruxelles info@rcn-ong.be Programme Bas-Congo : Immeuble Sofide, Croisement avenues Kisangani et Ngabu 9-11, Kinshasa / commune de la Gombe / R.D.C. rcn@ic.cd 4

5 L Agence Japonaise de Coopération Internationale (JICA) a réalisé, par l intermédiaire de l ONG RCN Justice & Démocratie, une étude sur le fonctionnement de la justice de proximité au Bas-Congo. L étude s est déroulée du 26 février au 30 avril 2009 au Bas-Congo (dans la ville de Matadi et le district des Cataractes) et à Kinshasa. Elle a été coordonnée par Anne-Aël POHU, experte internationale en administration de la justice. JICA, RCN Justice & Démocratie et l équipe d experts remercient toutes les personnes interrogées dans le cadre de cette étude qui ont apporté des informations essentielles sur le fonctionnement de la justice de proximité au Bas-Congo. 5

6 TABLE DES MATIERES ABREVIATIONS EMPLOYEES RESUME EXECUTIF RECOMMANDATIONS INTRODUCTION PREMIERE PARTIE CONTEXTE ET JUSTIFICATION DE L ETUDE I MÉTHODOLOGIE ET CIBLE DE L ÉTUDE DEFINITION DU CONCEPT DE JUSTICE DE PROXIMITE IDENTIFICATION DES CIBLES DE L ENQUETE A. Les professionnels de la justice B. Les chefs coutumiers C. La société civile et la population II PRESENTATION GLOBALE DU CADRE DE LA REFORME DE LA JUSTICE III ANALYSE DE LA SITUATION AU BAS-CONGO SITUATION ADMINISTRATIVE, POLITIQUE ET JUDICIAIRE A. Sur le plan administratif B. Sur le plan social et économique C. Sur le plan politique et sécuritaire D. Sur le plan judiciaire IDENTIFICATION DES ACTEURS INTERNATIONAUX PRESENTS AU BAS-CONGO DEUXIEME PARTIE RESULTATS DE L ETUDE I L APPRECIATION DE LA JUSTICE DE PROXIMITE PAR LES JUSTICIABLES II ANALYSE DE LA JUSTICE FORMELLE ANALYSE DU FONCTIONNEMENT DES INSTANCES JUDICIAIRES : TP, TGI, PARQUET A. Les conditions matérielles B. Le personnel de justice C. La qualité de la justice rendue D. L information du public et la question de la langue E. La justice foraine ANALYSE DES AUTRES INSTITUTIONS DE JUSTICE (POLICE, JUSTICE MILITAIRE, PRISONS) A. La Police B. le système carcéral C. La justice militaire III ANALYSE DE LA JUSTICE COUTUMIERE QUELQUES ELEMENTS DE DECRYPTAGE DE LA COUTUME AU BAS-CONGO A. La persistance du système matrilinéaire B. La matière foncière C. La question de l esclavage D. La sorcellerie LE REMPLACEMENT DES TRIBUNAUX COUTUMIERS PAR LES TRIBUNAUX DE PAIX A. L ancien système des tribunaux coutumiers B. La mise en œuvre de la réforme : une justice moins accessible et une perte de visibilité des pratiques coutumières LA QUESTION DES JUGES ASSESSEURS A. Le rôle des assesseurs B. Le statut des assesseurs LA PERSISTANCE DES PRATIQUES COUTUMIERES OU LA MISE EN MARGE D UNE JUSTICE BIEN VIVANTE

7 5. LA COEXISTENCE DIFFICILE DES DEUX SYSTEMES IV ANALYSE DE LA SOCIETE CIVILE L ASSISTANCE JUDICIAIRE A. Les avocats au Bas-Congo et les Bureaux de consultation gratuite (BCG) B. Les défenseurs judiciaires C. Les para-juristes LES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE A. Le partenariat mis en œuvre avec les organisations de la société civile dans le cadre de l enquête B. Les recommandations d action formulées par la société civile VII LISTE DES ANNEXES ANNEXE 1 LISTE DES PERSONNES RENCONTREES PAR L EQUIPE DE CONSULTANTS ANNEXE 2 LISTE DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE PARTENAIRES

8 Agence Japonaise de Coopération Internationale (JICA) Fondée en 1974, l Agence Japonaise de Coopération Internationale (JICA) est un organisme d exécution de l Aide Publique au Développement (APD) du gouvernement du Japon. Axée sur le renforcement des systèmes administratifs et des institutions, mais aussi sur la valorisation des ressources humaines, elle permet aux pays en développement de poursuivre de manière durable leur propre développement socio-économique. Naissance de la nouvelle JICA Le 1 er octobre 2008 fut la naissance de la nouvelle JICA qui s est vue la plus grande agence de coopération bilatérale du monde et élargie dans ses attributions, sous la forme d une agence donatrice fournissant, de manière plus intégrée, une coopération technique, des prêts concessionnels (prêt APD) et une aide financière non remboursable. Dans ce cadre, les opérations de prêts de la Banque Japonaise pour la Coopération Internationale (JBIC) et une partie de l aide financière non remboursable fournie par le ministère des Affaires étrangères du Japon (MAE) ont été intégrées dans la fonction de la JICA. La nouvelle JICA fournira ainsi une aide globale aux pays en développement, en mobilisant avec un maximum d efficacité et d efficience une gamme élargie d instruments de coopération et un réseau de plus de 100 bureaux répartis dans le monde entier. Les principaux instruments de l aide Coopération technique : Assistance technique fournie aux pays en développement par l envoi d experts et de volontaires, l accueil de stagiaires, l exécution de différents types d études, etc. Prêts APD : Prêts concessionnels fournis aux pays en développement. Aide financière non remboursable : Assistance financière accordée aux pays en développement sans obligation de remboursement. Les interventions de la JICA en RDC La reprise de la coopération bilatérale entre le Japon et la République démocratique du Congo (RDC) a été marquée par l ouverture du bureau de représentation de la JICA à Kinshasa en juillet 2007 après plus de 15 ans d absence. Ses interventions sont effectuées à travers la coopération technique et l aide financière non remboursable et principalement concentrées sur trois axes : (1) la consolidation de la paix (la réforme de la secteur de la sécurité : la police et la justice); (2) l amélioration aux services sociaux de base (le secteur de l eau, de la santé et du développement communautaire); (3) le développement économique (l infrastructure et de la formation professionnelle). 8

9 RCN Justice & Démocratie RCN (Réseau des Citoyens/Citizen s Network) Justice & Démocratie est une organisation non gouvernementale à vocation internationale. Elle a été fondée en 1994, en réponse au besoin de justice au Rwanda après le génocide et les massacres. La mission et les objectifs de RCN Justice & Démocratie RCN Justice & Démocratie contribue, dans des Etats ou des régions en transition ou en développement à la (re)fondation d une Justice au service de la société et des personnes, proche de leurs besoins, préservant le lien social, conforme aux principes de l Etat de droit et adaptée aux réalités sociales, économiques et culturelles. Les objectifs de l association sont : 1. Améliorer l offre de justice: soutenir la (re)construction de systèmes judiciaires indépendants, impartiaux et efficaces. 2. Renforcer la demande de justice et le dialogue démocratique : renforcer la capacité des citoyens et des organisations de la société civile à connaître, défendre et revendiquer leurs droits et stimuler leur dialogue avec les autorités. 3. Contribuer au renforcement du droit et de la qualité des politiques de justice : appuyer le recueil et l analyse d informations objectives sur le fonctionnement du système judiciaire et plaider pour l amélioration du cadre réglementaire et des politiques de justice. 4. Lutter contre l impunité : des crimes de génocide, crimes contre l humanité, crimes de guerre et des autres crimes les plus graves, et pour l œuvre de mémoire de ces crimes en favorisant tous les arts de la parole. RCN Justice & Démocratie en RDC RCN Justice & Démocratie a une mission permanente en RDC depuis C est l un des premiers acteurs à s être engagé dans l appui au secteur de la justice dans un pays qui était encore en pleine guerre ( ). Au fil des années, RCN a développé des projets dans plusieurs zones du pays (Kinshasa, Bas-Congo, Bandundu, Ituri, Katanga) en collaboration avec les institutions de justice tant au niveau local que national. 9

10 ABREVIATIONS EMPLOYEES BCG BDK CA CICR CMJ CPRDC CSM DFID DGRAD EFRPJ FARDC FLEC HRW IPJ JICA JO MONUC OMP ONG OPJ OSC PARJ PNC RCN TGI TMG TP UE USAID UNHCR Bureau de consultation gratuite Bundu Dia Kongo Cour d'appel Comité international de la Croix-Rouge Comité mixte Justice Commission permanente de réforme du droit congolais Conseil supérieur de la magistrature Department for International Development (coopération britannique) Direction générale des recettes des administrations et des douanes Ecole de formation et recyclage des personnels judiciaires Forces armées de la République démocratique du Congo Front de libération de l'enclave de Cabinda Human Rights Watch Inspecteur de police judiciaire Japan International Cooperation Agency Journal officiel Mission des Nations unies en RDC Officier du ministère public Organisation non gouvernementale Officier de police judiciaire Organisations de la société civile Plan d'action pour la réforme de la justice Police nationale congolaise Réseau des citoyens/citizen s network Justice & Démocratie Tribunal de grande instance Tribunal militaire de garnison Tribunal de paix Union européenne United States Agency for International Development Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés 10

11 RESUME EXECUTIF Comme de nombreux services de l Etat en RDC, la justice est malade. Son état est alarmant et se caractérise notamment par le délabrement des infrastructures, l absence totale de moyens de fonctionnement, le faible niveau de formation du personnel, des salaires peu attractifs, la corruption qui en découle, le trafic d influence, la faiblesse de l assistance judiciaire autant de maux qui en paralysent son fonctionnement. Afin de réaliser un état des lieux précis des problèmes sur le terrain, l Agence Japonaise de Coopération Internationale (JICA) a mené, par l intermédiaire de l ONG RCN Justice & Démocratie, une étude sur le fonctionnement de la justice de proximité dans la province du Bas-Congo. L étude s est déroulée du 26 février au 11 avril 2009 au Bas-Congo (dans la ville de Matadi et le district des Cataractes) et à Kinshasa. I. Contexte de l étude Définition du concept de justice de proximité et des cibles de l étude La justice de proximité peut être définie comme l ensemble des structures juridictionnelles et des réseaux d accès au droit assurant la prévention ou le dénouement des litiges et privilégiant le règlement des conflits. L accent est donc mis sur le fonctionnement effectif des services de justice au bas de la pyramide. Une étude sur la justice de proximité au Bas-Congo ne doit toutefois pas se limiter à examiner la situation de manière spécifique et isolée. L étude s est donc basée autant sur les constats opérés sur le terrain que sur l analyse des causes structurelles des dysfonctionnements. Pour réaliser une analyse globale, la collecte des données s est déroulée auprès de différents publics cibles : - les professionnels de la justice : l équipe d experts a collecté des données systématiques auprès des institutions judiciaires civiles (tribunaux de paix, tribunaux de grande instance et les parquets) et de manière incidente auprès d autres institutions de justice (la justice militaire, la police et le système carcéral) ; - les autorités coutumières (chefs coutumiers et anciens juges coutumiers) ; - la société civile, regroupée en trois catégories : les avocats et les défenseurs judiciaires ; les organisations de la société civile et les justiciables dans leur ensemble. Situation judiciaire du Bas-Congo Le Bas-Congo constitue une province favorisée en termes d institutions judiciaires. Presque toutes les juridictions prévues par la loi ont pu être installées ce qui n est le cas dans aucune autre province du pays. Au niveau des juridictions civiles, il existe actuellement : onze tribunaux de paix ; cinq tribunaux de grande instance ; cinq parquets près les TGI ; quatre parquets secondaires ; une cour d appel (Matadi) et un parquet général (Matadi). S agissant des juridictions militaires, la province compte : une cour militaire et un auditorat supérieur rattaché à la Cour à Matadi ; trois tribunaux militaires de garnison et trois auditorats militaires près ces tribunaux (Matadi, Boma, Mbanza-Ngungu). 11

12 Toutefois jusqu à présent l installation des juridictions est loin de garantir une justice de proximité de qualité. II. Résultats de l étude L appréciation du fonctionnement de la justice par les justiciables Une enquête menée auprès de 299 justiciables a permis de dégager quelques constats importants sur la perception de la justice par les justiciables : - Les justiciables ne maîtrisent pas les bases de l organisation de la justice en RDC et confondent les compétences des différentes institutions (la police, le tribunal, le parquet, les avocats, les autorités coutumières, etc.), ce qui les rend vulnérable aux abus de pouvoir. - L enquête fait notamment ressortir le rôle exorbitant des officiers de police qui sont les premières personnes vers qui les justiciables se tournent pour trancher un litige. 70% des personnes interrogées estiment d ailleurs que l OPJ est compétent pour trancher un litige, ce qui va au-delà de ses attributions. - Les autres instances vers lesquelles le justiciable se tourne en premier lieu sont les chefs coutumiers ou les autorités administratives. Les instances judiciaires (TP, TGI, parquets) interviennent plutôt en second recours lorsqu aucune solution n a pu être trouvée. - La corruption et le trafic d influence sont pointés comme les principaux maux de la justice, loin devant la complexité des procédures, le coût et l inaccessibilité des tribunaux. Le justiciable, exaspéré d être taxé à tous les stades de la procédure, estime que le sens des décisions de justice dépend du statut social de son adversaire ou de sa capacité à «mettre la main à la poche». - Pour 73% des personnes interrogées, le fait que la justice soit rendue en français pose problème. - L assistance judiciaire est totalement méconnue : 89% des personnes interrogées ont déclaré ne jamais avoir entendu parler des bureaux de consultation gratuite (BCG). - L appréciation globale qui est faite du fonctionnement de la justice coutumière n est pas vraiment meilleure que pour la justice formelle. Elle est en effet considérée comme trop subjective, manquant de textes de références et de compétences. Analyse du fonctionnement des instances judiciaires (TP, TGI, parquets) La visite des lieux de justice et la collecte systématique de données ont permis de constater la déliquescence généralisée des institutions de justice au Bas-Congo. Les conditions matérielles Malgré les réhabilitations récentes opérées par l Union européenne (2006) certaines détériorations sont déjà constatées faute d entretien et plusieurs bâtiments non réhabilités restent dans un état de délabrement avancé. Les conditions de travail sont très difficiles pour le personnel judiciaire. Le matériel de bureau est également problématique. Les juridictions ne reçoivent aucune dotation en mobilier, ni en fournitures de bureau et les moyens de communication sont entièrement à la charge des magistrats et du personnel. La documentation juridique est également insuffisante, et les textes et ouvrages présents au tribunal sont généralement la propriété des magistrats. De même, les moyens de transport sont inexistants ce qui empêche les professionnels de la justice de réaliser plusieurs tâches essentielles pour la bonne administration de la justice dans leur ressort souvent très étendu. 12

13 Le cercle vicieux des coûts qui entravent l accès à la justice est ainsi enclenché. Si le justiciable est dépourvu de ressources ou refuse d obtempérer, son dossier sera bloqué. En outre, un lien de dépendance se crée entre le juge et les personnes qui paient ce simulacre de justice. Afin d enrayer ce cercle il est essentiel que les budgets alloués à la justice soient augmentés et surtout que les frais de fonctionnement prévus pour les juridictions soient effectivement versés (e.a les 5% de rétrocession des recettes judiciaires). Le personnel de justice Le manque d effectifs dans les cours et tribunaux, leur mauvais traitement et l absence de formation de base constituent l un des principaux handicaps de la justice. En RDC, plus d un tiers des magistrats sont rassemblés dans la seule ville de Kinshasa. Parallèlement, dans la province Bas-Congo, il y a une forte concentration des magistrats dans les villes au détriment des zones rurales. L étude a ainsi constaté que la ville de Matadi et la cité de Mabanza-Ngungu comptent à elles seules 41 magistrats du siège, alors que des territoires immenses comme Songololo et Luozi comptent respectivement 2 juges et 1 seul juge. Mais l étude a surtout mis en exergue le délicat problème du personnel judiciaire, plus précisément des agents de l ordre judiciaire comprenant les greffiers, secrétaires de parquet et huissiers. Ce personnel, qui est bien souvent la première porte d entrée du justiciable vers la justice et dans certains endroits la seule, se caractérise notamment par : un faible niveau de rémunération (environ 45$/mois) ; l abandon des formations initiales depuis 1986 ; le non renouvellement des effectifs et le manque total de contrôle sur ses activités. En outre le manque d effectifs dans les juridictions conduit au recours à du personnel assumé (qui représente plus de 58% du personnel au niveau des tribunaux de paix). Ce personnel assumé (que l on présente parfois aussi comme des stagiaires) est recruté localement sans aucune formation. N étant pas immatriculé par l administration il ne reçoit pas de salaire. Dans ce contexte, la mise à contribution du justiciable est rendue nécessaire et systématique pour tout acte de procédure. La question du contrôle L ampleur des phénomènes de corruption, d indiscipline et d absentéisme constatés sur le terrain pose immanquablement la question du contrôle exercé sur les magistrats et l ensemble du personnel judiciaire. Sans le contrôle et la sanction des abus, il est illusoire de prétendre remédier et protéger les justiciables des pratiques déviantes. La question du contrôle est actuellement au cœur des débats sur le rôle respectif du judiciaire et de l exécutif dans l administration de la justice. Dans ce contexte, il est essentiel que le nouveau Conseil supérieur de la magistrature (CSM) soient dotés des moyens suffisants pour exercer son mandat et affirmer l indépendance de la magistrature. Il devra dans le même temps prendre des mesures exemplaires à l encontre des magistrats déviants pour restaurer la confiance des citoyens dans la Justice. À cet égard, il est important de noter que les procédures équitables à l encontre des magistrats requerront l installation des chambres disciplinaires du CSM tant au niveau provincial que national. La question du contrôle des agents de l ordre judiciaire est délicate en raison de leur statut particulier. En tant que fonctionnaires de l Etat, ils dépendent administrativement du ministère de la Fonction publique tandis qu ils dépendent disciplinairement du ministère de la Justice et techniquement du chef de juridiction. Finalement, le personnel semble ne dépendre de personne. Le manque d autorité du chef de juridiction pose notamment de nombreuses difficultés sur le terrain. Considérant que le système 13

14 actuel de contrôle sur ce personnel est défaillant, l étude propose que les agents de l ordre judiciaire soient placés, à terme, sous l autorité effective du pouvoir judiciaire, et plus particulièrement du Conseil supérieur de la magistrature. Analyse des autres institutions de justice A côté de l analyse des institutions judiciaires civiles, l étude a permis de confirmer le rôle central de la police dans la justice de proximité. Dans certains endroits l officier de police est le seul à incarner l autorité de l Etat et il a un rôle omnipotent. La justice militaire a également des pouvoirs importants sur le terrain. Globalement la police et la justice militaire souffrent des mêmes maux que la justice civile en ce qui concerne les conditions matérielles, les sous-effectifs, le faible niveau de formation du personnel ou le recours à du personnel assumé. Il en résulte à nouveau une taxation systématique des justiciables. L étude confirme par ailleurs que ces institutions dépassent souvent le cadre strict de leurs attributions légales et s ingèrent dans les affaires civiles. Comme dans le reste de la République, les 2 prisons du Bas-Congo (Matadi et Mbanza-Ngungu) et les centres de détention sont largement surpeuplés et posent des défis quotidiens en termes de sécurisation, d alimentation des détenus, d accès aux soins, de condition hygiénique, etc. Le transport des détenus s avère particulièrement difficile et dangereux faute de moyens sécurisés. Analyse de la justice coutumière La République démocratique du Congo vit, du fait de son histoire précoloniale et coloniale et de l internationalisation des standards de la démocratie et de l Etat de droit, un dualisme de ses systèmes. Les divergences entre les règles coutumières et le droit écrit posent un problème d insécurité juridique à la base de divers conflits sociaux. Le législateur congolais a souhaité résoudre cette dichotomie en instaurant progressivement la primauté du droit écrit sur la coutume. Les tribunaux de paix, créés en 1978, devaient ainsi remplacer les anciens tribunaux coutumiers et être l acteur central de la justice de proximité. Au Bas-Congo, l'installation des 11 tribunaux de paix a effectivement conduit à la disparition formelle des anciens tribunaux coutumiers. Toutefois l'arrivée d'une justice formelle n a pas permis d assurer une justice de proximité de qualité et la pratique coutumière est loin d avoir disparu. On constate plutôt qu elle continue à s exercer d une manière plus informelle voire clandestine, sans aucun contrôle des instances judiciaires. La réconciliation des deux systèmes requière un dialogue entre les chefs coutumiers, qui jouent un rôle important dans le maintien de la paix sociale, et les autorités judiciaires. Analyse de la société civile L assistance judiciaire Le barreau de Matadi compte actuellement 177 avocats et 144 avocats stagiaires. Ce nombre paraît suffisant pour la province mais comme pour les magistrats, les avocats sont concentrés dans les centres urbains et absents des zones rurales. Quant au service d assistance judiciaire gratuite, qui doit être assuré au sein des bureaux de consultation gratuite, il est quasiment inexistant. Pourtant la majorité des justiciables sont indigents et 147 avocats sont susceptibles de pouvoir exercer la consultation gratuite au niveau de la province du Bas-Congo (les trois membres de la Commission BCG, plus les 144 avocats stagiaires). Il y a lieu de réfléchir sérieusement au renforcement de l assistance judiciaire d autant que la prise en charge par les avocats permet une amélioration sensible de la qualité de la justice rendue. 14

15 La société civile La société civile congolaise a émergé essentiellement dans les années 90 avec le déclin de la dictature. Dans le secteur de la justice, les ONG de droits de l homme ont joué un rôle important pour dénoncer les abus de pouvoir des autorités tant politiques que judiciaires. Elles ont également apporté des services précieux pour l orientation, le conseil et, dans certains cas, la défense des justiciables et la résolution des conflits. On constate néanmoins que les organisations n ont pas toujours une identité claire et transparente et qu elles outrepassent parfois leur mandat. D autre part, les experts ont relevé qu il existait une méfiance réciproque entre les professionnels de la justice et les organisations de la société civile. L étude conclut notamment qu il serait opportun d organiser des ateliers de réflexion entre la société civile et le corps des avocats pour clarifier les rôles de chacun et renforcer l accès à la justice des citoyens. 15

16 RECOMMANDATIONS Les recommandations s adressent au ministère de la Justice, aux autorités judiciaires et aux bailleurs de fonds ainsi qu à tout acteur souhaitant contribuer au renforcement de la justice de proximité. Concernant le fonctionnement des institutions judiciaires Allouer un budget significatif au pouvoir judiciaire distinguant le budget alloué au ministère de la Justice et le budget alloué au Conseil supérieur de la magistrature S assurer du versement du budget de fonctionnement aux juridictions et augmenter celui-ci afin de permettre l entretien des juridictions et l achat du matériel et des fournitures de base pour le bon exercice de la justice S'assurer que la rétrocession de 5% des recettes judiciaires soit effective, et planifier une réévaluation à la hausse de ce taux Donner les moyens de transports des institutions judiciaires afin de faciliter les descentes sur le terrain (enquêtes, notification, exécution, contrôle hiérarchique etc.) Allouer un budget à la poursuite des réhabilitations des bâtiments judiciaires et la réhabilitation des commissariats et sous-commissariats de police et chercher des partenariats pour ces constructions Concernant le personnel Recruter des magistrats supplémentaires et veiller à une affectation équilibrée des effectifs sur le territoire national et provincial Instaurer des primes d encouragement pour les magistrats et le personnel judiciaire œuvrant dans des zones reculées et/ou dangereuses, et veiller au respect des avantages liés à la fonction des magistrats (logements de fonction, primes, assurance santé, ) Suite à l'inventaire de la Fonction publique réalisé en 2008, procéder à l'identification des personnes compétentes en vue de les intégrer, et régulariser ce personnel judiciaire en tenant compte des besoins pour le bon fonctionnement de chaque juridiction Rattacher le personnel judiciaire dépendant actuellement du ministère de la Fonction publique au pouvoir judiciaire Privilégier l appui aux structures nationales pour la formation initiale et continue des différentes catégories de personnels plutôt que les programmes de formation isolés Dégager les ressources humaines et financières nécessaires au fonctionnement de l Ecole de formation et de recyclage du personnel judiciaire (EFRPJ), de l Ecole de formation des OPJ et d une Ecole de la magistrature (non existante) Elaborer un recueil d actes de procédure officiel pour le personnel judiciaire. Renforcer les effectifs des officiers de police judiciaire et procéder à une évaluation des OPJ en fonction Appuyer l organisation des assemblées plénières des magistrats dans les juridictions pour débattre de questions de droit controversées et d affaires complexes en vue d harmoniser la jurisprudence du tribunal 16

17 Concernant le contrôle Clarifier le rôle de l Inspectorat judiciaire et son articulation avec le CSM Mettre en place les chambres de discipline du CSM tant au niveau provincial que national Sanctionner le personnel déserteur et les comportements menaçant la bonne administration de la justice en engageant systématiquement les actions disciplinaires et en respectant les droits de la défense Dégager les moyens nécessaires au déplacement des supérieurs hiérarchiques dans les juridictions inférieures afin qu'ils exercent correctement leur mission de contrôle S'assurer d'un contrôle régulier des registres des commissariats et tribunaux militaires par l'auditeur militaire afin de limiter le traitement des affaires civiles par les juridictions militaires Concernant l'accueil du justiciable et l'accès à la justice Adopter des directives claires en matière de réhabilitation ou construction (par exemple : prévoir systématiquement un espace d'accueil et d'information du public) Mettre en place un cadre de concertation entre les acteurs de l'assistance judiciaire pour définir des mécanismes d'assistance réalistes et adaptés au contexte socio-économique local (par exemple : renforcer les obligations de stage des jeunes stagiaires avec un encadrement par un avocat expérimenté) Réformer le monopole de la langue française dans les procédures judiciaires, par exemple par la mise en place de réseaux d'interprètes pour faciliter l'accès aux justiciables non francophones (éventuellement par l'intermédiaire des ONG locales et/ou du barreau) Concernant la justice coutumière Clarifier le statut des juges assesseurs près les tribunaux de paix et adopter la loi devant régir leur fonction Ouvrir un débat sur le rôle des chefs de groupement et sur la nécessité de rétribuer leurs activités en qualité d autorités administratives Organiser un atelier provincial pour améliorer la compréhension des coutumes par les autorités judiciaires Développer des outils de vulgarisation sur le rôle des autorités coutumières et la répartition des compétences par rapport aux tribunaux de paix. Concernant la société civile Clarifier le rôle des ONG de défense des droits humains par rapport à celui des avocats et renforcer la collaboration entre ces deux catégories d'acteurs Développer des outils de vulgarisation du droit et renforcer les actions d'information et d'orientation du public, notamment en ce qui concerne le travail des bureaux de consultation gratuite et le pro deo Améliorer le suivi et le monitoring du système judiciaire, entre autres sur les questions d'accueil et d'accès des justiciables aux institutions judiciaires, en vue d'un dialogue constructif avec les autorités 17

18 INTRODUCTION «Notre justice souffre, elle est malade, corrompue et réservée aux riches.» Cette phrase issue d un entretien mené avec un justiciable dans la province du Bas-Congo caractérise la détérioration du lien de confiance entre la justice et les citoyens. Au Bas-Congo, la demande de justice est très forte. Cette province a été pionnière dans l installation des tribunaux de paix et la population, qui espérait dans la réforme une forme de progrès, s est montrée favorable à l instauration d une justice moderne, capable d instaurer une paix durable. Mais le manque de moyens et l inefficacité de la justice n ont pas tardé à décevoir les attentes. La justice est devenue synonyme de tracasseries perpétuelles : les justiciables, taxés à tous les stades de la procédure, ne se reconnaissent pas dans la justice rendue. Quant aux juges et aux personnels judiciaires, démunis de moyens, ils se sentent abandonnés et impuissants face au discrédit de leur fonction. La justice coutumière, réduite à l informel, continue à faire son œuvre, sans contrôle et sans reconnaissance de sa contribution au maintien de la paix sociale. Les défis sont nombreux : la détérioration des infrastructures de justice, l absence de moyens de transport, le manque d effectifs, le faible niveau de formation du personnel, les salaires peu attractifs, la corruption qui en découle, le trafic d influence, la marginalisation des mécanismes coutumiers, la faiblesse de l assistance judiciaire Autant de maux qui paralysent le fonctionnement de la justice. En analysant de manière plus spécifique la situation dans la province du Bas-Congo, l étude entend donner la parole aux acteurs de terrain et récolter des données empiriques sur le fonctionnement de la justice de proximité. L approche adoptée vise à relier les constats opérés sur le terrain avec une analyse des causes structurelles des dysfonctionnements au niveau central. En effet, afin d inscrire l impact des activités dans la durée, il est primordial d agir conjointement sur le terrain et sur le plan structurel et politique. Le contexte actuel est favorable à ce double exercice. Les efforts conjoints du gouvernement et des bailleurs de fonds pour mettre en œuvre le plan de la réforme de la justice, et l instauration progressive d un pouvoir judiciaire indépendant sont des éléments encourageants qui doivent servir de levier à l instauration d une justice de qualité. Il est toutefois essentiel que les efforts de réforme visent une amélioration concrète des pratiques de justice en faveur du justiciable et ne soient pas orientés uniquement vers les institutions du haut de la pyramide judiciaire. 18

19 PREMIERE PARTIE CONTEXTE ET JUSTIFICATION DE L ETUDE 19

20 I MÉTHODOLOGIE ET CIBLE DE L ÉTUDE L objectif de cette étude visait à recueillir des données précises et à analyser en profondeur le fonctionnement du système judiciaire au Bas-Congo en vue de dégager des axes prioritaires d appui à la justice de proximité. Pour mener cette étude, RCN Justice & Démocratie a recruté une équipe de trois consultants composée de : - Anne-Aël POHU : experte internationale en administration de la justice et droits humains coordinatrice de l étude ; - Yvon KALONDA KELE OMA : ancien président de la Cour suprême de justice expert institutionnel ; - Jean KINWANI NGEZIM : avocat au barreau de Matadi et président du Centre d appui aux initiatives de développement expert société civile. Le champ de l étude était circonscrit à l un des trois districts du Bas-Congo (district des Cataractes) et à la ville de Matadi. Après une semaine de préparation à Kinshasa du 26 février au 6 mars 2009, l équipe a mené son enquête de terrain du 7 au 27 mars 2009 dans le district des Cataractes (territoires de Songololo, Luozi et Mbanza-Ngungu) et dans la ville de Matadi. Les consultants ont ensuite approfondi leur analyse à Kinshasa du 28 mars au 11 avril et finalisé la rédaction du présent rapport, avec l appui de l équipe de RCN J&D. La mission première de l équipe chargée de l enquête a consisté à délimiter le champ de l étude en définissant le concept de «justice de proximité» et en identifiant les institutions et public cibles de l enquête. 1. Définition du concept de justice de proximité La justice de proximité peut être définie comme l ensemble des structures juridictionnelles et des réseaux d accès au droit assurant la prévention ou le dénouement de certains litiges et privilégiant le règlement des conflits 1. Le concept de la justice de proximité part du postulat selon lequel la justice est un service public qui doit être mis au service des citoyens et notamment des populations les plus vulnérables. Elle doit donc être accessible au plus grand nombre et offrir un service de qualité. Une telle définition ne permet pas une délimitation ex ante du champ d application de la justice de proximité. C est précisément le but d une étude sur le fonctionnement de la justice de proximité d identifier quels sont les éléments particuliers qui entravent son bon fonctionnement au niveau local. L accent est donc mis sur le fonctionnement effectif des services de justice au bas de la pyramide

21 Au cours de ses programmes, RCN a pu dégager certains critères objectifs caractérisant une justice de proximité de qualité : elle doit être proche dans l espace (proximité géographique) ; elle doit être rendue dans des délais raisonnables ; elle doit être comprise par les citoyens ; elle doit être accessible à tous en termes de coût ; elle doit refléter la demande de justice des citoyens et prendre en compte le contexte culturel dans lequel elle s applique, afin que les justiciables puissent en user en toute confiance. La question de l identification des justiciables dans la justice rendue est particulièrement cruciale dans la province du Bas-Congo où les divergences entre les règles établies par la coutume locale et les normes de droit écrit sont nombreuses. 2. Identification des cibles de l enquête Conformément aux termes de référence de l étude, la collecte des données s est déroulée auprès des publics cibles suivants : - les professionnels de la justice ; - les chefs coutumiers ; - la société civile et la population en général. A. Les professionnels de la justice En ce qui concerne les professionnels de la justice, la collecte de données s est principalement concentrée sur les institutions judiciaires civiles, à savoir : les tribunaux de paix (TP), les tribunaux de grande instance (TGI) et les parquets (principaux et secondaires). L équipe a visité chaque juridiction de la zone ciblée et a pu s entretenir avec l ensemble des présidents des juridictions ainsi qu avec les procureurs (ou leurs représentants). Par ailleurs, l équipe a eu l occasion de s entretenir avec les responsables des greffes et des secrétariats de parquet, ainsi qu avec quelques magistrats et juges assesseurs. Parallèlement à cette analyse, les experts ont collecté des données auprès des autres institutions jouant un rôle important dans la justice de proximité. Il s agit de la justice militaire, de la police et du système carcéral. Toutefois, afin de mieux circonscrire le champ de l étude et pour des impératifs de temps, il a été décidé de ne pas effectuer une collecte systématique des données pour ces institutions. 21

22 B. Les chefs coutumiers Pour les rencontres avec les juges coutumiers, les enquêteurs se sont adressés aux administrateurs de territoire pour obtenir les contacts des chefs de groupement et organiser des rencontres. Un échantillon de 8 chefs de groupement a pu être interrogé 2. Dans trois groupements, ils étaient accompagnés de notables au cours de l entretien. C. La société civile et la population Les enquêteurs ont divisé la société civile en trois catégories : les avocats et défenseurs judiciaires, les organisations de la société civile, et les justiciables dans leur ensemble. Ils ont pu au cours de l enquête interroger ou collaborer avec : - le barreau de Matadi et les 3 avocats responsables de la Commission de consultation gratuite ; - dix organisations de la société civile ; justiciables ; Pour chacune de ces catégories, des outils spécifiques ont été élaborés en vue d organiser une collecte systématique des données au moment de l enquête de terrain. La première semaine de travail des experts à Kinshasa a été destinée à l élaboration des outils de récolte des données (voir encadré). 2 Il y a 366 groupements au Bas-Congo et il y a autant de chefs coutumiers qu il y a de groupements. 22

23 A. L analyse des tribunaux et parquets Outils de récolte des données En ce qui concerne l analyse des tribunaux et parquets, les enquêteurs ont utilisé quatre outils : - une fiche signalétique qui reprend l essentiel des informations sur la juridiction : contacts, effectifs, état des locaux, du mobilier, de la documentation juridique et de l information du public ; - une fiche statistique qui permet à travers l analyse des registres et des discussions avec les responsables des greffes de collecter les données judiciaires relatives au traitement des dossiers ; - l analyse des jugements : lors des visites dans les tribunaux (TP et TGI), l équipe d experts a analysé la qualité de plusieurs affaires au civil et au pénal (rédaction des jugements, connaissances en droit des magistrats, ) ; - les entretiens : les présidents des juridictions et les procureurs (ou leurs représentants), ainsi que quelques magistrats ont fait l objet d interviews détaillées sur base d un questionnaire standardisé en vue d échanger sur la réalité de leur travail au quotidien, sur les difficultés auxquelles ils sont confrontés et sur leurs recommandations. B. L analyse de la justice coutumière Deux outils ont permis d appréhender le fonctionnement de la justice coutumière au Bas-Congo : - les entretiens directs avec les chefs de groupement et les notables ; - les questionnaires et entretiens menés avec les justiciables et les autorités judiciaires et administratives sur le fonctionnement de la justice coutumière. C. La société civile et les justiciables Pour les avocats et défenseurs judiciaires, les enquêtes ont consisté dans : - des entretiens avec le barreau de Matadi (avocats) et les présidents des TGI, qui dirigent le corps des défenseurs judiciaires ; - des questions posées aux justiciables et aux organisations de la société civile sur le fonctionnement de l assistance judiciaire gratuite et l accessibilité des avocats. Pour les organisations de la société civile (OSC) et les justiciables : - RCN a identifié dix OSC actives dans le domaine de l accès à la justice à Matadi et dans les Cataractes, et qui ont collaboré pour cette étude ; - ces organisations ont rempli un questionnaire en vue d identifier leur rôle auprès des justiciables et leurs besoins ; - il était ensuite demandé aux organisations partenaires de réaliser elles-mêmes une enquête auprès de la population, sur base d un questionnaire standard, sous la direction de l équipe d experts. Au total, 299 justiciables ont été interrogés par ces organisations. - Deux «focus groups» ont été organisés (à Matadi et Mbanza-Ngungu) pour préparer l enquête auprès des justiciables et effectuer une restitution des résultats. 23

24 II PRESENTATION GLOBALE DU CADRE DE LA REFORME DE LA JUSTICE Depuis la période de transition ( ) et les élections démocratiques, le secteur de la justice fait l objet de préoccupations particulières en RDC en tant que pilier essentiel de la gouvernance. La nouvelle Constitution, promulguée le 18 février 2006, qui instaure la III e République, représente une avancée notable dans la construction de l Etat de droit et particulièrement dans le domaine de la justice. Elle constitue l armature principale d un dispositif qui nécessite cependant l adoption de nombreuses réformes législatives. Parallèlement, le gouvernement a entamé un processus de réforme de la justice avec l appui de la Communauté internationale. Les avancées constitutionnelles importantes pour la justice s articulent autour de trois pôles la consécration d un corpus des droits de l homme : plusieurs articles de la Constitution concernent les droits des justiciables (règles du procès équitable, non-rétroactivité des peines, protection de la liberté individuelle, protection de l'enfance, etc.) ; le nouvel ordonnancement de l ordre judiciaire : la Cour suprême est remplacée par trois Hautes Cours. La Cour de cassation est placée au sommet de la pyramide, et veille à la légalité des décisions des cours et tribunaux civils et militaires. La Cour constitutionnelle est chargée du contrôle de la constitutionnalité des lois (art. 160). Enfin, la Constitution institue également un Conseil d Etat, avec dans le même temps un ordre de juridictions administratives (art. 154). Des lois organiques doivent encore être adoptées par le Parlement pour rendre ces nouvelles cours opérationnelles ; l affirmation de l indépendance de la magistrature : afin de consacrer cette indépendance, la Constitution a placé au centre du dispositif judiciaire un nouveau Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Le législateur a également adopté une loi visant à préciser le nouveau statut des magistrats. Le fonctionnement effectif du CSM et le respect des dispositions sur le statut des magistrats constituent un enjeu fondamental pour une amélioration concrète des pratiques de justice en RDC. Pour réaliser la mise en œuvre de la réforme de la justice, un appui technique a été institué pour épauler le gouvernement, et notamment le ministère de la Justice. Un Comité mixte de justice (CMJ) a ainsi été mis sur pied à partir de Celui-ci a pour mission d accompagner la réforme et d assurer une coordination entre les différents acteurs. Il réunit des membres des ministères impliqués dans la réforme ainsi que les principaux bailleurs internationaux. Le CMJ a servi de point de contact pour une mission internationale qui visait à élaborer un Plan d actions pour la réforme de la justice (PARJ). Le PARJ constitue le cadre général opérationnel pour la réforme, à travers lequel l ensemble des acteurs doit s inscrire dans la perspective d une action coordonnée et efficace. Par ailleurs, le nouveau ministre de la Justice, arrivé en novembre 2008, a souhaité mettre l accent sur certains aspects prioritaires de la réforme pour l année Tous les partenaires agissant dans le secteur de la justice sont dès lors invités à intégrer ces aspects dans leurs actions. S il convient de féliciter l effort fourni pour créer avec le CMJ un espace de dialogue et de concertation, certaines limites apparaissent toutefois dans le fonctionnement de ce comité : - il est difficile d obtenir la participation de tous les bailleurs ayant des activités dans le secteur justice (concertation partielle) ; - le CMJ est perméable aux tensions ou actualités politiques ; - des acteurs autres que les bailleurs de fonds sont exclus du CMJ alors qu ils sont d importants opérateurs de terrain (notamment les ONG) ; 3 Voir feuille de route du ministère de la Justice pour l exercice

25 - le CMJ est plutôt perçu par les acteurs judiciaires comme un organe de l exécutif. En conclusion, le mouvement de réforme de la justice constitue un élément encourageant vers l institution d un véritable Etat de droit en RDC. Les défis sont toutefois nombreux et complexes. RCN relève l importance de construire un système de justice qui corresponde aux attentes et aux besoins de la population. Dans cette perspective, il est à craindre qu une réforme qui se focalise sur les hautes institutions (Cour de cassation, Cour constitutionnelle, Conseil d Etat) et qui soit calquée sur un modèle de l Etat de droit à l occidental ne soit pas de nature à rapprocher la justice du justiciable. Il est nécessaire que la réforme fasse l objet d une appropriation par les acteurs de justice à la base, sous peine de mettre en place un système non viable. Tels sont les principaux défis qui doivent guider le mouvement de réforme pour l instauration d une justice de proximité de qualité. 25

26 III ANALYSE DE LA SITUATION AU BAS-CONGO 1. Situation administrative, politique et judiciaire La province du Bas-Congo est généralement présentée comme une des provinces les plus avantagées et avancées du pays. Porte d entrée de la République démocratique du Congo avec son accès à la mer, elle dispose d un grand potentiel agricole, économique et commercial. Les indicateurs de développement démontrent pourtant un taux élevé de pauvreté et un accès difficile aux services de base. Le secteur de la justice n échappe pas à ce constat : le déploiement des tribunaux de paix dans la province n a pas suffi à instaurer une justice de proximité efficiente et au service des citoyens. A. Sur le plan administratif La province du Bas-Congo, qui existe officiellement depuis 1962, est la plus petite des onze provinces de la République démocratique du Congo. D une superficie de km 2, soit 2,3% du territoire national, elle comptabilise une population de habitants, dont 64% vivent en milieu rural et 36% en milieu urbain. Réputée cosmopolite, la province du Bas-Congo est dominée par l ethnie Kongo, autochtone du milieu et divisée en trois tribus principales : les Bayombe, les Bandibu et les Bantandu. 26

27 Structurée comme les autres provinces du pays, la province du Bas-Congo se divise en : trois districts : le Bas Fleuve, les Cataractes et la Lukaya ; deux villes : Matadi et Boma ; dix territoires ; dix-sept cités. Elle compte en outre 55 secteurs, 366 groupements et six communes. La structure administrative de la province comprend d une part l administration provinciale constituée de démembrements provinciaux de services centraux de l Etat et, d autre part, l administration territoriale comprenant les entités administratives décentralisées (villes et territoires) et les entités administratives déconcentrées (districts, communes, cités, secteurs, groupements). Cette organisation administrative va toutefois évoluer au fur et à mesure de la mise en œuvre du mouvement de décentralisation prévu en RDC. En effet, le 31 juillet 2008, Joseph Kabila a promulgué la loi spécifiant les principes relatifs à la libre administration des provinces (loi sur la décentralisation) mettant ainsi en œuvre l article 3 de la Constitution. Cette loi réorganise la RDC qui est dès lors composée de vingt-cinq provinces, plus la ville de Kinshasa 4. Cette décentralisation au niveau légal doit toutefois encore s accompagner de plusieurs réformes pour être effective sur le plan administratif. La division du pays en vingt-cinq provinces n aura toutefois pas d influence sur la province du Bas-Congo qui restera une seule province à l issue du processus de décentralisation. 4 La nouvelle architecture administrative est à présent constituée des entités suivantes : la province est subdivisée en villes et territoires, la ville en communes, la commune en quartiers et/ou en groupements incorporés, le territoire en communes, secteurs et/ou chefferies, le secteur ou chefferie en groupements et le groupement en villages. La ville, la commune, le secteur et la chefferie sont des entités territoriales décentralisées dotées de la personnalité juridique. Le territoire, le quartier, le groupement et le village sont des entités territoriales déconcentrées dépourvues de la personnalité juridique. 27

28 > Le district des Cataractes Selon l Institut national des statistiques, le district des Cataractes, qui a fait l objet de la présente étude, a une superficie de km 2 et compterait habitants 5. Ce district se compose de trois territoires : Luozi, Songololo et Mbanza-Ngungu. Les informations collectées auprès des autorités politico-administratives concernant la taille et le nombre d habitants des territoires du district diffèrent des chiffres officiels de l INS (en italique dans le tableau qui suit), révélant ainsi la difficulté d obtenir des données fiables : Territoire Taille (km 2 ) Nombre d habitants Luozi Songololo Mbanza-Ngungu * * dont étrangers Nombre de Nombre de Nombre de cités secteurs groupements (785 villages) B. Sur le plan social et économique La province du Bas-Congo est une des provinces les plus riches du pays. Idéalement située géographiquement, elle bénéficie d atouts majeurs sur les plans commercial, économique et agricole : elle est riche en terres fertiles, et dispose de minerais non exploités, d un réseau hydrographique très dense, d un accès à la mer, de ports fluviaux dynamiques (Matadi et Boma). Proche de la capitale, elle bénéficie en outre d un bon réseau routier, d une voie de chemin de fer reliant Matadi à Kinshasa, ainsi que de quelques attraits touristiques. Véritable grenier de la capitale, elle écoule 65% de ses productions agricoles à Kinshasa. La relative stabilité politique de la province comparativement à l Est, ainsi que la présence de pétrole achèvent d expliquer le relatif avancement de la province en termes de développement comparativement à l arrière-pays. 5 Les chiffres donnés sur le terrain par les autorités politico-administratives diffèrent : habitants pour les Cataractes. 28

29 Le tableau est cependant loin d être parfait : - les indicateurs de développement montrent que 69% de la population vit sous le seuil de pauvreté ; - Les problèmes fonciers et l opposition entre le système traditionnel et le droit positif en matière de droit de propriété entravent le développement économique : l accès à la terre constitue en effet la principale richesse pour une population majoritairement rurale et attachée à la terre de ses ancêtres, ce qui provoque des rivalités entre les communautés locales et les exploitants (agricoles et industriels) ; - les déséquilibres sont importants d un territoire à l autre : les zones très enclavées comme Kimvula, Luozi ou Muanda ne bénéficient pas des mêmes atouts et ressources que les grandes villes portuaires de la province ; - le secteur informel est prédominant : 90% de la population n a pas de source de revenu fixe ; - les services sociaux présents sur le territoire souffrent des mêmes maux que dans le reste du pays : absence de budget de fonctionnement, ressources humaines sous-qualifiées, manque d équipement ; - la détérioration des infrastructures de santé est visible et l accès à l éducation y est difficile ; - les infrastructures routières sont mal entretenues (l axe principal Kinshasa Matadi est saturé de trafic et les routes secondaires sont quasi inexistantes dans la province) ; - le réseau ferroviaire est vétuste : il n a pas été rénové depuis l indépendance ; - le barrage hydro-électrique d Inga nécessite des réhabilitations, mais les conflits d intérêts entre les secteurs public et privé bloquent le processus. L électricité produite est envoyée en priorité à Kinshasa et au Katanga, et la province du Bas-Congo n en bénéficie pas (absence par exemple d électricité à Luozi). Le potentiel hydro-électrique de la province pourrait pourtant permettre la production d électricité en quantité suffisante pour couvrir les besoins de toute l Afrique. La loi foncière en RDC : un système complexe Le législateur a tenté de trouver un difficile équilibre entre les prescrits traditionnels et les impératifs de propriété. La loi foncière de 1973 pose le principe selon lequel le sol est la propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l Etat. Il n est pas susceptible d appropriation privée et les droits accordés par l Etat le sont sous la forme de «concession». Celle-ci peut être permanente pour les Congolais et ne peut dépasser 25 ans pour les étrangers. Les modalités d acquisition sont également différentes selon qu on se situe en ville ou en zone rurale, où le législateur reconnaît la persistance de certaines lois traditionnelles et dès lors un certain pouvoir du chef coutumier. Malheureusement, l'ordonnance devant préciser le statut de ces terres coutumières n'est jamais intervenue, laissant ainsi une large proportion des terres congolaises dans un régime juridique flou. Au final, il en résulte un système de droit de propriété complexe, mêlant des aspects de droit d usage et d usufruit qui ne sont pas toujours compris par la population et les acteurs économiques (principalement étrangers). De plus, les coûts de procédure s'ajoutant à la complexité de celles-ci, les moyens très limités des administrations foncières et leur faible répartition sur le territoire, rendent l'accès à la propriété extrêmement incertain pour la majorité de la population congolaise. Suite à l élaboration du Document de stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté (DSCRP) au niveau national en 2006, le gouvernement provincial a élaboré en avril 2007 un plan stratégique quinquennal 6. Mais il peine à obtenir les financements nécessaires à sa mise en œuvre. Les autorités provinciales et locales réclament en outre que leur soient versés les 40% des revenus fiscaux de la province, tel que le prévoit la décentralisation inscrite dans la Constitution (art. 175). La province 6 Les cinq piliers de ce plan sont : le développement de l industrie, le développement de l agriculture, le développement des infrastructures, la lutte contre la corruption et le renforcement de la paix et de la sécurité, via notamment les bonnes relations transfrontalières avec les pays voisins. 29

30 du Bas-Congo, qui est une des plus riches du pays et qui apporte des recettes importantes à la caisse de l Etat, pourrait ainsi récupérer des sommes considérables des revenus de l exploitation du pétrole (Muanda), des services de douanes, des ressources minières et de l agriculture. Les contestations des responsables politiques locaux restent pour le moment sans réponse, et seuls les vastes programmes d infrastructures signés avec la Chine en 2007 semblent pouvoir produire des effets visibles sur le terrain 7. C. Sur le plan politique et sécuritaire Le gouverneur de province Simon Floribert Mbatshi Batshia a été élu en janvier Entouré de dix ministres, il est à la tête de l administration provinciale. L assemblée provinciale est composée de trente députés provinciaux. Comme dans le reste du pays, les maires, bourgmestres et commissaires de district en fonction ont été désignés par le Président de la République en septembre Si la situation sécuritaire au Bas-Congo est bonne dans l ensemble, certains éléments doivent cependant être examinés avec attention : les flux successifs de migrants économiques et de réfugiés angolais en RDC (1961, 1972, 1991) demeurent une situation complexe à gérer. Si leur intégration est dans l ensemble assurée, il existe tout de même des pratiques discriminatoires, notamment en ce qui concerne l accès à la propriété foncière 8 ; l infiltration régulière d armes et de miliciens angolais par la frontière du Nord (enclave de Cabinda), où agit le FLEC (Front de libération de l enclave de Cabinda) reste préoccupante ; la question foncière constitue une perpétuelle source de conflit entre les communautés locales (clans, lignages), les communautés immigrées et les exploitants ; la question des violences sexuelles est devenue un enjeu important dans la province : 379 cas ont été reportés entre janvier 2007 et mars et bon nombre de cas ne sont pas dénoncés suite à la méfiance envers le système judiciaire ou pour préserver les relations sociales ; depuis le milieu des années 1990, l intensification du mouvement politico-religieux BDK (Bundu Dia Kongo), qui revendique l indépendance du Royaume Kongo a provoqué des heurts avec les autorités congolaises qui ont tourné en violentes confrontations en janvier 2007 et février/mars Le BDK s est à présent transformé en parti politique. D. Sur le plan judiciaire La province du Bas-Congo est la province la mieux dotée en juridictions (avec Kinshasa) puisque tous les territoires comptent un tribunal de paix, à l exception du territoire de Kimvula 10. Il existe actuellement dans la province : 7 Ces accords prévoient notamment la construction d un port à Banana, la réhabilitation du réseau ferroviaire, la construction d une nouvelle centrale hydro-électrique, et construction d une route reliant l enclave de Cabinda à l Angola. 8 Malgré leur longue présence en RDC, ils restent soumis aux dispositions limitant l accès à la propriété pour les étrangers. La durée des concessions accordées aux non-congolais ne peut en effet pas dépasser vingt-cinq ans. 9 T. MUNTAZINI, «La problématique de la lutte contre les violences sexuelles en droit congolais», publication réalisée avec l appui de RCN Justice & Démocratie, Kinshasa, janvier 2009, p Tous les magistrats ont déserté ce territoire particulièrement enclavé, et qui connaît de plus en plus de problèmes sécuritaires. Les incursions angolaises y sont de plus en plus fréquentes, avec des violences perpétrées contre la population locale, notamment les femmes, générant des départs massifs de la province : véritable foyer de tensions. 30

31 - onze tribunaux de paix ; - cinq tribunaux de grande instance (Tshela, Mbanza-Ngungu, Inkisi, Boma, Matadi) ; - cinq parquets près les TGI ; - quatre parquets secondaires ; - une cour d appel (Matadi) ; - un parquet général (Matadi). S agissant des juridictions militaires, la province compte : - une cour militaire et un auditorat supérieur rattaché à la Cour à Matadi ; - trois tribunaux militaires de garnison et trois auditorats militaires près ces tribunaux. La localisation géographique des instances judiciaires est un problème et la distance à parcourir est souvent dissuasive pour les populations vivant dans les secteurs les plus isolés. 31

32 2. Identification des acteurs internationaux présents au Bas-Congo Les acteurs internationaux intervenant dans le secteur de la justice, et plus largement dans le secteur du développement, sont peu nombreux au Bas-Congo. En 2006, l Union européenne, à travers son Programme d appui à la justice (PAJ), a opéré la réhabilitation de nombreuses infrastructures de justice (tribunaux et parquets). Mais les réhabilitations n ont concerné que les bâtiments appartenant officiellement à l Etat et qui avaient été accordés aux services de justice. Actuellement, la JICA appuie des formations dans la province pour la police nationale congolaise (PNC). Ces formations de courte durée portent sur le renseignement, la circulation routière, le service de maintien et rétablissement de l ordre public (MROP) et la formation judiciaire (en introduisant notamment des notions relatives aux droits de l homme, à la protection de l enfant, à la lutte contre les violences sexuelles). Par ailleurs, la JICA soutient un programme de développement communautaire dans le district des Cataractes (cité de Kimpese) consistant dans la réhabilitation d un axe routier ainsi que l appui à des projets agricoles et sociaux et l appui au plan de développement communautaire. Le CICR opère des visites ponctuelles depuis Kinshasa dans les prisons de la province (tous les deux mois), mais il ne dispose pas de bureau permanent. Seule la Monuc est présente de manière permanente dans la province. Le bureau régional, installé à Matadi depuis 2005, compte une section Droits de l homme (trois personnes), une section Etat de droit (deux personnes), une section Affaires civiles, une section Police, une section Affaires politiques, des observateurs militaires et un contingent. La section Droits de l homme mène principalement des activités de monitoring : elle contrôle les cachots et le respect des délais de détention préventive, rédige des rapports, et attire l attention du parquet sur les situations irrégulières. Elle a par exemple beaucoup travaillé à documenter les violences commises au moment des opérations policières contre le BDK en La section Etat de droit divise ses activités en deux volets : la bonne administration de la justice et le volet pénitentiaire. Concernant l administration de la justice, les activités commencent à peine à se mettre en place. Deux formations étaient planifiées fin mars début avril Elles concernaient la justice militaire (inspecteurs militaires, greffiers militaires) avec des participants de toute la province 11. Mais l avenir du bureau provincial est incertain : la dernière résolution du Conseil de Sécurité insiste pour que la Monuc concentre ses activités à l est de la RDC. Ce bureau pourrait donc fermer à moyen terme. Finalement, le principal acteur ayant agi dans le secteur de la justice au Bas-Congo jusqu à aujourd hui reste l ONG RCN Justice & Démocratie. De février 2003 à décembre 2006, l ONG a mis en œuvre un programme d appui à la justice, financé par l UE et le ministère des Affaires étrangères de Belgique. L antenne du programme, située à Matadi, était composée d une équipe de sept personnes. Le programme visait à la fois le renforcement institutionnel des professionnels de la Justice par la formation et le recyclage des acteurs judiciaires, et de l appui en matériel et documentation ainsi qu un renforcement des capacités de la société civile (formation de personnes ressources des ONG, de chefs coutumiers, de journalistes, etc.). D autres initiatives étaient orientées directement vers le justiciable (campagnes de sensibilisation et d information), ou visaient le rapprochement et le dialogue entre les acteurs clé de la justice de proximité (ateliers de rencontre, organisation de journées portes ouvertes dans les tribunaux, etc.). Fin 2006, RCN Justice & Démocratie a été contraint de fermer son antenne à Matadi suite à l insuffisance de financement, mais l ONG a continué à développer ses activités au Bas-Congo depuis son bureau de Kinshasa. 11 Il s agit en réalité de formations préparées à Kinshasa et dispensées dans l ensemble du pays par les différents bureaux provinciaux. 32

33 DEUXIEME PARTIE RESULTATS DE L ETUDE 33

34 I L APPRECIATION DE LA JUSTICE DE PROXIMITE PAR LES JUSTICIABLES Dix organisations de la société civile, partenaires de l étude, ont été chargées de mener une enquête auprès des justiciables de la ville de Matadi et du district des Cataractes. Au total, 299 personnes ont été interrogées et ont eu l opportunité de s exprimer sur leur expérience ou leur perception de la justice de proximité. Le concours des OSC à l enquête «justiciables» présentait plusieurs avantages : elle a non seulement permis une collecte d informations diversifiées en un temps record, mais elle a également permis de rassurer les justiciables qui se sont confiés plus facilement à des organisations issues de leur milieu. La définition de critères de sélection des justiciables a permis de toucher un échantillon très varié : les personnes ont été interrogées en milieu urbain (44,6%), en milieu rural (55,6%), dans les quartiers populaires, dans des milieux intellectuels, âge, niveau d étude, tout en intégrant une bonne proportion de femmes (36% des personnes interrogées)... L analyse des réponses collectées, permet de dresser quelques constats importants sur la perception de la justice par les justiciables : Appréciation générale de la justice 74% des personnes interrogées ont déclaré avoir déjà eu un litige nécessitant l intervention d un acteur de justice. Les réponses des justiciables confirment l importance des conflits fonciers dans la province qui constituent la première source de litige. Les autres principaux litiges mentionnés sont : des cas de violences, des cas d abus de confiance, des cas de divorce, des conflits de succession et des conflits de ménage. Source des litiges conflits fonciers 31% violences 24% abus de confiance 11% divorce 9% conflits de succession 5% conflits de ménage 5% autres 15% Total 100% Pour trancher le litige, les justiciables interrogés ont déclaré s être tournés vers : l OPJ (31%), le tribunal de paix (17%), le parquet (17%) et le chef coutumier (11%). L OPJ apparaît comme le personnage central en cas de litige. Il faut d ailleurs noter que 70% des justiciables estiment que l OPJ est compétent pour trancher un litige, ce qui est contraire à ses attributions. D une manière plus générale, qu elles aient déjà connu un litige en justice ou non, les personnes interrogées déclarent vouloir s adresser prioritairement à l OPJ en cas de litige, ce qui démontre à nouveau sa place centrale auprès des justiciables. Les autorités traditionnelles (chefs de quartier, chefs coutumiers) jouent également un rôle important en premier ressort. Les instances judiciaires (TP, TGI) interviennent plutôt en second recours lorsque aucune solution n a été trouvée. 34

35 Premier acteur de justice en cas de litige Si pas satisfait à qui vous adressez-vous? police 21% tribunal de paix 25% chef de quartier 20% police 24,5% chef coutumier 18% parquet civil 24% tribunal de paix 8% TGI 11,5% parquet civil 7% avocat 6% chef de famille 7% autres 9% avocat 6% pasteur 6% autres 7% Total 100% Total 100% A la question de savoir comment elles évaluent le fonctionnement de la justice formelle au Bas- Congo, les personnes interrogées l estiment moyen dans 48% des cas, bon dans 33,% des cas, excellent dans 10% des cas, mauvais dans 7% des cas et très mauvais dans 2% des cas. D après les justiciables, le premier mal qui gangrène la justice est la corruption. Cette réponse vient loin devant les autres problèmes que sont : le trafic d influence, le coût élevé des frais de justice, la complexité des procédures, le tribalisme et la distance. Regard sur la justice coutumière Problèmes de la justice Corruption 39% Trafic d influence 16% Coût élevé 15% Complexité 9% Tribalisme 7% Distance 7% Autres 7% Total 100% Il est intéressant de noter que l appréciation de la justice coutumière par les justiciables ne diffère pas vraiment de l appréciation de la justice formelle. Les justiciables considèrent son fonctionnement moyen (48%), bon (33%), très bon (10%), mauvais (7%) et très mauvais (2%) 12. Les personnes interrogées estiment toutefois que les principaux avantages de la justice coutumière sont : qu elle est proche de la population (36%), peu coûteuse (31%), rapide (16%), et elle permet des arrangements à l amiable (15%). Le problème de la langue Seules 30% des personnes interrogées parlaient français. Pour la grande majorité des personnes interrogées, le fait que la justice soit rendue en français constitue d ailleurs un problème (73%). Seules 11,5% des personnes interrogées souhaiteraient que la justice soit rendue en français, les autres préféreraient le kikongo (74%) ou le lingala (13%). L assistance judiciaire Il est marquant de constater que les justiciables n ont aucune connaissance des possibilités de l assistance judiciaire. 89% des personnes interrogées ont ainsi déclaré ne jamais avoir entendu parler des bureaux de consultation gratuite (BCG). 12 Cette similarité de résultats peut aussi donner à penser que les justiciables ne font pas vraiment la différence entre la justice formelle et la justice coutumière 35

36 Les réponses des personnes interrogées font apparaître que le recours aux organisations de la société civile reste marginal. Leur rôle est toutefois très apprécié et les avantages de recourir à ces organisations résident notamment dans la gratuité des services (47%), dans le fait qu elles orientent mieux la population (33%), qu elles apportent des solutions rapides et à l amiable, en toute équité (10%), et qu elles sont proches de la population (10%). Principales constatations de l enquête auprès des justiciables : Les justiciables ne maîtrisent pas les bases de l organisation de la justice en RDC et confondent les compétences des différentes institutions ; les OPJ jouent un rôle central auprès de la population en cas de litige ; les justiciables ont généralement recours à la police, aux autorités administratives et aux chefs coutumiers en premier ressort ; ils ont recours à la justice formelle (parquets, tribunaux) lorsqu ils n ont pas trouvé de solution à leur litige auprès de ces autorités ; la corruption et le trafic d influence sont pointés comme les principaux maux de la justice loin devant les problèmes de difficulté d accès aux tribunaux ou de complexité des procédures. Le justiciable, exaspéré d être taxé à tous les stades de la procédure, estime que le sens des décisions de justice dépend du statut social de son adversaire ou de sa capacité à «mettre la main à la poche» ; le recours à la société civile est finalement assez marginal ; l assistance légale gratuite est très mal connue ; la question de la langue constitue un obstacle majeur pour recourir aux tribunaux ; l appréciation globale qui est faite du fonctionnement de la justice coutumière n est pas meilleure que pour la justice formelle. 36

37 II ANALYSE DE LA JUSTICE FORMELLE Tribunal de paix Juridictions civiles et militaires dans les localités étudiées Tribunal de grande instance Parquet Cour d appel Auditorat Tribunal militaire de garnison Cour militaire Matadi X X X X X X X Mbanza- Ngungu X X X X X Luozi X X (parquet secondaire) Songololo X* X* (parquet secondaire) Kimpese X (auditorat secondaire) * Le TP et Parquet de Songololo sont effectivement installés officiellement à Songololo, mais l essentiel des affaires est traité à Kimpese où il existe matériellement d autres locaux pour accueillir le tribunal et le parquet. 1. Analyse du fonctionnement des instances judiciaires : TP, TGI, parquet L analyse des juridictions s est concentrée sur la visite des tribunaux de paix (TP), tribunaux de grande instance (TGI) et des parquets (de grande instance et secondaires) de la zone couverte 13. En collectant de manière systématique auprès des chefs de juridiction et des parquets des données à la fois quantitatives et qualitatives sur le fonctionnement de la juridiction, l équipe est parvenue à dresser un état des lieux précis des dysfonctionnements et besoins prioritaires pour l amélioration des services de justice. 13 TP de Matadi, Mbanza-Ngungu, Luozi et Songololo ; parquets de Matadi, Mbanza-Ngungu, Luozi et Songololo, TGI de Matadi et Mbanza-Ngungu. 37

38 Les défis sont nombreux : absence de budget, de moyens de transport, de fournitures de bureaux ; locaux inadaptés et vétustes ; répartition inégale des effectifs ; recours à un personnel non qualifié ; décisions non exécutées... Si les magistrats et le personnel judiciaire se sentent dans l ensemble abandonnés à leur sort, il apparaît que c est le justiciable, ultime maillon de la chaîne, taxé à toutes les étapes de la procédure, qui paie le plus lourd tribut de l absence de moyens. A. Les conditions matérielles Si l état des locaux varie selon que la juridiction ou le parquet a bénéficié d une réhabilitation, ces services souffrent dans leur ensemble de l absence d un budget de fonctionnement et d une pénurie en mobilier, fournitures de bureau et moyens de transport. Les effets négatifs sont nombreux : taxation systématique du justiciable, désœuvrement et découragement des magistrats et du personnel judiciaire, et discrédit en profondeur du système judiciaire dans son ensemble. a.1. Les locaux En 2006, l Union européenne a financé un important programme de réhabilitation des bâtiments abritant les services judiciaires. Ainsi, dans la zone ciblée par l étude, plusieurs juridictions et parquets ont bénéficié de ces réhabilitations : - la CA, le TGI, le parquet et le TP de Matadi ; - le TP de Mbanza-Ngungu 14. Ces réhabilitations ont permis d améliorer considérablement les conditions de travail du personnel et d accueil du justiciable, et contribuent à la réhabilitation de l image même de la justice. Quelques constats peuvent être mentionnés à propos des réhabilitations effectuées des détériorations sont d ores et déjà constatées dans certaines juridictions. Elles sont essentiellement dues au choix des matériaux utilisés (bois triplex, installations électriques, matériel sanitaire, poignées de portes, serrures ) En l absence de budget de fonctionnement les chefs de juridiction n opèrent pas les réparations nécessaires ; d une manière générale, les locaux sont mal entretenus. Il suffirait d un peu de bonne volonté pour que les locaux soient nettoyés et préservés d une détérioration précoce. Il est nécessaire de sensibiliser les chefs de juridiction sur ce point ; la question des locaux doit être pensée conjointement avec la question des effectifs : la réhabilitation doit prendre en compte les besoins réels de la juridiction et prévoir les affectations à venir ; les réhabilitations n ont pas prévu l aménagement d un espace pour l accueil, l attente et l information du public. Cet aspect devrait être mieux pris en compte ; les réhabilitations n ont pas été accompagnées de dotations en mobilier. L UE avait demandé à l Etat congolais de se charger de cette partie, mais rien n a été fait ; les problèmes de coupure de courant ont été régulièrement signalés. Il serait intéressant d évaluer la possibilité d installer des panneaux solaires pour l autonomisation des juridictions en énergie (notamment dans la perspective d informatiser ces services) ; il ne semble pas exister d uniformité dans les réhabilitations opérées. Elles s adaptent plutôt aux contraintes posées par le bâtiment initial. Il est important d impliquer les services techniques centraux (le Secrétariat général du ministère de la Justice ainsi que le ministère provincial de la Justice) pour qu ils fixent des critères communs aux réhabilitations pour tout le territoire et pour tous les bailleurs. Ils devraient également assurer la coordination des initiatives et le suivi des projets. 14 Les autres juridictions réhabilitées dans la province du Bas-Congo sont : les TP de Tshela, Lukula, Madimba et Kasangulu ; les TGI de Boma et Tshela ; les parquets de grande instance de. Boma et Tshela. 38

39 Dans la zone de l étude, plusieurs juridictions n ont pas fait l objet de réhabilitation 15 : - les TP de Luozi et de Songololo ; - le TGI de Mbanza-Ngungu ; - le parquet de grande instance de Mbanza-Ngungu et les parquets secondaires de Luozi et de Songololo. L UE avait posé comme condition aux réhabilitations que le bâtiment et le terrain appartiennent à l Etat et qu ils soient définitivement attribués à la juridiction 16. La plupart des juridictions non réhabilitées ne disposaient pas de bâtiment propre. D autres contraintes, d ordre technique et financier, ont également empêché les travaux. Tribunal de paix de Luozi Tableau récapitulatif Juridiction Réhabilitation Espace d accueil pour le public Propriété du bâtiment Mobilier (voir fiches signalétiques) CA Matadi Par UE en 2006 Non CA Pas de dotation lors de la réhabilitation TGI Matadi Par UE en 2006 Non TGI Idem TP Matadi Par UE en 2006 Non TP Idem Parquet Matadi Par UE en 2006 Non Parquet Idem TGI Mbanza- Ngungu Parquet de grande instance Mbanza-Ngungu TP Mbanza- Ngungu Non : projet de réhabilitation abandonné à cause de la complexité du bâtiment Non : Idem TGI ONATRA. OK pour cession définitive à l Etat mais pas contractualisé + pb bâtiment pas adéquat Idem TGI Par UE en 2006 Non Pas de dotation lors de la réhabilitation TP Luozi Non UNTC. Ne souhaite pas céder bâtiment à l Etat Parquet secondaire Luozi Non Etat mais pas d attribution officielle au Parquet TP Songololo Non Administration territoriale TP Kimpese Projet réhabilitation JICA (à venir) Parquet Non. secondaire Particulièrement Songololo dégradé Non Etat Etat, attribution au parquet en règle 15 Au niveau de la province, les autres juridictions non réhabilitées sont : les TP de Kinzao-Mvuete, Muanda, Boma, le TGI de Lukaya et les parquets de grande instance de Lukaya et les parquets secondaires de Kinzaomvuete et de Muanda. 16 En pratique il a été difficile d obtenir les titres de propriété. 39

40 a.2. Le mobilier, les fournitures de bureau et les moyens de communication La question des fournitures de bureau constitue l un des facteurs clé de la taxation systématique des justiciables. Dans toutes les juridictions visitées, les mêmes constats ont pu être dressés les juridictions ne reçoivent aucune dotation en mobilier. Seul RCN a distribué dans le cadre de ses anciens programmes des armoires, des registres et des toges. Par conséquent, le mobilier présent est généralement récupéré dans les objets saisis. Le reste du mobilier est apporté par le personnel qui aménage son espace de travail ; il n y a aucune dotation en fournitures de bureau. Il n y a pas de stock, et les fournitures sont achetées au fur et à mesure des besoins. Le justiciable est quasi systématiquement mis à contribution pour l achat des fournitures (papier, fardes, dactylographie des documents ) Lorsqu ils sont disponibles, les frais de consignation peuvent être utilisés pour l achat des fournitures, mais les montants sont en général dérisoires au regard des besoins. Elles sont également souvent achetées par le chef de juridiction ou les magistrats pour leur usage personnel ; les moyens de communication sont entièrement à la charge des magistrats et du personnel : aucune ligne téléphonique fonctionnelle n a pu être identifiée au cours des visites. Il n y a pas de budget pour créditer les téléphones mobiles. Plus épisodiquement, le justiciable peut être mis à contribution pour couvrir ces frais. Le cercle vicieux des coûts qui entravent l accès à la justice est ainsi enclenché. Si le justiciable est dépourvu de ressources ou n obtempère pas, son dossier risque d être mis en sommeil ou bloqué. Par ailleurs, le manque de fournitures pèse sur l exécution des jugements. En effet, les décisions non dactylographiées ne sont généralement pas exécutées. Besoins prioritaires identifiés : - mobilier et matériel : machines à écrire, étagères, armoires à clé, bureaux, chaises, bancs, coffres-forts, toges ; - fournitures : rames de papier, registres, fardes, rubans à machine, feuilles carbones, enveloppes, encre, tampons. 40

41 Les archives du tribunal de paix de Songololo 41

42 a.3. Les moyens de transport Les juridictions visitées ne disposent pas de moyens de transport 17. Pourtant la question du transport est cruciale à tous les stades de la procédure. Les descentes de terrain sont effectuées : dans le cadre de l instruction des dossiers pour les constats et observations in situ ; pour la notification des actes et exploits par les huissiers (convocations, citations ) ; pour le recouvrement des recettes judiciaires ; pour l exécution des jugements ; pour le contrôle hiérarchique effectué par les juridictions supérieures ; pour les contrôles des cachots et prisons effectués par le parquet dans les commissariats et souscommissariats ; pour l organisation et la tenue des audiences foraines. Toutes les activités mentionnées dans l encadré sont sérieusement entravées, voire compromises en l absence de moyens de transport. En pratique, les déplacements s effectuent à la diligence des parties. Si les parties ne peuvent pas payer, la procédure judiciaire sera bloquée. La situation est particulièrement préoccupante dans les zones enclavées comme Luozi, ou le territoire de Songololo. Les besoins en transport sont objectifs et prioritaires. Il n est cependant pas réaliste de doter chaque juridiction d un véhicule, qui risque par ailleurs de poser des problèmes récurrents d entretien et de carburant. Il faut donc envisager des solutions alternatives et innovantes. Une solution pourrait être de financer des missions de supervision des juridictions, sur base de termes de référence précis et d un chronogramme anticipé. Le chronogramme serait décidé et validé en concertation avec le président du TGI de Mbanza-Ngungu et le procureur. Une autre option (plus risquée et plus coûteuse) consisterait à mettre trois véhicules à disposition des trois territoires du district (un véhicule par territoire). A nouveau, le président du TGI des Cataractes (Mbanza-Ngungu), en concertation avec le procureur et les différentes juridictions du territoire, serait chargé de valider un planning mensuel ou trimestriel d utilisation du véhicule, et de le transmettre au Premier président de la cour d appel et au ministre provincial de la Justice. Un budget trimestriel serait alloué pour les frais de carburant et l entretien du véhicule. On peut également envisager d autres options moins coûteuses et moins risquées en termes de gestion (location de véhicules, achats de motos plutôt que de voitures, mise à disposition d un budget global pour les déplacements. Une prise en charge du transport devrait notamment permettre de faciliter la notification des exploits, l exécution des jugements, et le contrôle des juridictions et des commissariats. 17 Sauf la CA Matadi qui dispose d un véhicule donné par le gouverneur. Le parquet général dispose également d un véhicule, mais il n est plus utilisé car en panne. 42

43 a.4. L absence de budget de fonctionnement L absence d un budget de fonctionnement au niveau des juridictions est un problème fondamental. Les montants prévus au budget de l'etat pour chaque juridiction sont non seulement insuffisants pour couvrir les besoins, mais surtout ne sont pas versés 18. La nouvelle loi sur le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) prévoit que ce soit le CSM qui prépare à l avenir le budget 19 et le transmette au gouvernement pour son intégration dans la loi de finances. Mais cette prérogative se heurte à de nombreux blocages politiques. En décembre 2008, le bureau du CSM avait préparé et transmis au Parlement un budget pour l exercice Mais le budget voté par le Parlement n a pas considéré cette proposition et le CSM n a pas été convoqué pour présenter son budget. Afin d exercer ces prérogatives, il est important que le CSM soit renforcé. Il devra par exemple pouvoir élaborer un plan stratégique pour accompagner son budget, ce qui n est toujours pas le cas à l heure actuelle. De plus, la loi prévoit que le Premier président de la Cour de cassation soit l ordonnateur du budget du CSM. Or cette Cour n est pas encore créée. Enfin, les modalités d exercice des fonctions budgétaires doivent encore être définies, en élaborant notamment un système de contrôle interne et externe des dépenses. Une autre modalité de financement des juridictions consiste dans la rétrocession d une partie des recettes judiciaires perçues par la DGRAD. En effet, la loi financière prévoit que les services de justice générateurs de recettes bénéficient d une rétrocession de 5% des recettes réalisées. En principe, cette rétrocession devrait être mensuelle. Mais, en pratique, elle n est pas effective. Elle est partielle, sporadique et insuffisante. En effet, le pourcentage de 5% sur l ensemble des recettes est bien dérisoire au regard des défis auxquels la justice doit faire face 20. De plus, le manque à gagner pour le Trésor public (et par conséquent pour les juridictions) dû à la non exécution des jugements est considérable. Il faut donc doter les juridictions des moyens nécessaires à la perception des recettes judiciaires. Ainsi, on constate partout l absence d un budget minimal de fonctionnement. Chaque juridiction se «débrouille», on paie de sa poche, on taxe le justiciable, parfois on s adresse au barreau local 21 Les juridictions ne fonctionnent qu avec les dons, ce qui rend les acteurs judicaires redevables de leurs bienfaiteurs et entame leur indépendance et impartialité (instauration d un système de services rendus). Pour faire face en partie à la situation, les juridictions perçoivent directement les frais de consignation des dossiers, mais les montants perçus de la sorte restent dérisoires 22. a.5. La documentation juridique Il n existe généralement pas de bibliothèque au sein des juridictions. Le président du tribunal conserve les ouvrages dans une armoire dans son bureau, et les magistrats peuvent venir les consulter ou emprunter au besoin. Tous les magistrats disposent de la compilation des codes Larcier 23. Il s agit toutefois d ouvrages personnels (jusqu à récemment ces ouvrages leur étaient remis à la fin de leurs études) et il n y a pas d exemplaire propre aux juridictions ou aux parquets. De plus, les magistrats ont parfois 18 La cour d appel de Matadi n a pas reçu de budget depuis Articles 37 et 40 de la loi organique N 08/013 du 5 août 2008 portant organisation et fonctionnement du CSM. 20 A titre indicatif, le TP de Mbanza-Ngungu a reçu FC (soit env. 25 USD) lors de la dernière rétrocession. 21 Par exemple à la cour d appel, les bancs ont été fournis par le barreau de Matadi. 22 Ces frais s élèvent à 5USD pour les affaires inscrites en première instance (TP et TGI) et à 10 USD au niveau de la cour d appel. Ces frais devraient en principe être reversés à la DGRAD. 23 Les six tomes des codes Larcier (édités en partenariat avec Afrique Editions) compilent l essentiel des lois congolaises en matières civile, pénale, judiciaire, commerciale, sociale, fiscale et administrative. 43

44 conservé les ouvrages acquis au cours de leurs études, mais ceux-ci ne sont pas à jour et sont conservés à leur domicile. Les ouvrages présents dans les tribunaux et parquets sont incomplets : on trouve de manière non uniforme des ouvrages généraux du droit, des modules de cours (cf. RCN) ou encore des bulletins de jurisprudence (recueil des arrêts de la Cour suprême). Ces bulletins avaient été élaborés en 2002 et 2003 par RCN en collaboration avec le service de documentation et d études (service rattaché au ministère de la Justice). Les deux volumes publiés couvrent les périodes et Les besoins identifiés sont : des ouvrages généraux de droit pénal, procédure pénale, droit civil et procédure civile ; des ouvrages de droit commercial et de droit du travail (surtout pour les parquets et TGI) ; des ouvrages de droit foncier ; des recueils de jurisprudence actualisés. Les magistrats ont également exprimé leurs difficultés pour se procurer les nouvelles lois. Très peu de magistrats disposent de la loi sur la protection de l enfant 24, et la loi sur les violences sexuelles 25 a été distribuée de manière inégale. Quant aux nouvelles lois sur la magistrature (Statut des magistrats et Conseil supérieur de la magistrature), les magistrats n en disposent pas tous : chacun doit se les procurer par ses propres moyens. Il existe un bureau du Journal officiel à Matadi où les magistrats de la province peuvent se procurer les codes et lois. L approvisionnement de ce bureau n est cependant pas toujours régulier et les magistrats doivent achetés les exemplaires au même titre que tout citoyen. Un appui ou un partenariat avec ce bureau pourrait être envisagé pour faciliter la diffusion de la législation aux acteurs judiciaires. Un autre besoin identifié concerne le personnel judiciaire : les greffiers et secrétaires n utilisent pas uniformément les mêmes modèles pour les actes de procédure (citations, notifications, correspondances ) Ces actes ne sont pas compilés dans un recueil spécifique, et les modèles consistent en des feuilles volantes qui sont reproduites au gré des besoins et des fonds disponibles. La publication d un recueil des actes de procédure en matières civile et pénale permettrait d uniformiser les pratiques. Cet ouvrage devra être élaboré et publié en partenariat avec le Service de documentation et d études du ministère de la Justice et l Ecole de formation et de recyclage du personnel judiciaire (EFRPJ) afin qu il devienne un outil de référence officiellement reconnu et puisse être reproduit sur l ensemble du territoire national. L équipe a enfin pu constater le manque criant de documentation juridique au niveau des commissariats de police, des services pénitentiaires (le directeur de la prison de Mbanza-Ngungu ne dispose même pas du code pénal, ni du code de procédure pénale), et des juridictions militaires qui mériterait une action particulière d approvisionnement en texte de base. 24 Loi 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l enfant. 25 Loi 06/018 et loi 06/019 du 20 juillet

45 B. Le personnel de justice L analyse du personnel étudie successivement les effectifs, les rémunérations, et le contrôle. b.1. Les effectifs Le manque d effectif a des conséquences multiples parmi lesquelles le ralentissement du rendement des tribunaux et parquets, la mauvaise couverture géographique des services de justice, l impossibilité d organiser des audiences foraines, et surtout le recrutement au niveau local d un personnel non qualifié et dont les modalités de rétribution se font au détriment du justiciable. Ces recrutements «locaux» concernent les juges assesseurs, les greffiers et les secrétaires de parquet. Bureau des magistrats au parquet de Mbanza-Ngungu b.1.1. La nécessité de rééquilibrer les affectations des magistrats sur le territoire et de combattre l absentéisme L inégale répartition des magistrats sur l ensemble du territoire constitue un important problème en RDC. La majorité des magistrats se trouve à Kinshasa 26. Ce déséquilibre entre les provinces et la capitale se répercute à l identique au niveau de la province du Bas-Congo entre les zones urbaines et rurales. Le tableau ci-dessous nous renseigne sur les disparités d effectifs existant dans les juridictions visitées au cours de l étude : Effectifs des magistrats du siège et du parquet (président et procureur inclus) TGI Parquet TP Mbanza-Ngungu Matadi Luozi Pas de TGI 2 1 Songololo Pas de TGI 5 2* * ils devraient être trois mais un magistrat est à Kinshasa depuis un an D un côté, les présidents des TGI de Mbanza-Ngungu et Matadi déclarent avoir trop de magistrats et ont réclamé à plusieurs reprises la réduction des effectifs. De l autre, il semble invraisemblable que le territoire de Luozi, qui constitue avec ses 7772 km 2 le territoire le plus vaste de la province, ne dispose que d un magistrat au niveau du TP. Un renfort de 2 à 3 magistrats nous semble être un minimum. De la même manière, les effectifs sur le vaste territoire de Songololo mériteraient d être renforcés d au moins 2 unités au niveau du TP. Ces territoires enclavés offrent des conditions de vie difficiles (eau, électricité ) Beaucoup de magistrats refusent de s installer dans ces 26 Un audit de la justice réalisé en 2004 dénombrait environ magistrats pour le pays dont 375 magistrats du siège et 1575 magistrats du parquet. La seule ville de Kinshasa concentre plus d un tiers des effectifs avec 183 magistrats du siège et 475 magistrats du parquet. Voir Mission conjointe multi-bailleurs, «Audit organisationnel du secteur de la justice en République démocratique du Congo», rapport d état des lieux, synthèse, mai 2004, p

46 zones reculées ou finissent par déserter leur poste 27. Mais ces désertions ne font pas l objet de sanction. Les magistrats continuent à percevoir leur salaire et leur non-remplacement sur le terrain laisse les juridictions totalement démunies. Des sanctions devraient être appliquées tandis que des mesures d encouragement devraient être envisagées pour les magistrats qui officient dans les zones difficiles (primes, promotions) 28. Le recrutement de nouveaux magistrats est actuellement à l ordre du jour à Kinshasa, mais il se heurte à de nombreux débats et difficultés techniques. Avant la réforme sur le Statut des magistrats, ceux-ci étaient recrutés et affectés par le ministre de la Justice. Désormais il est prévu que les magistrats soient recrutés sur concours puis nommés par le président de la République sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature 29. Les affectations sont ensuite opérées par le CSM. Ces nouvelles modalités de recrutement, plus conformes à l indépendance de la magistrature, posent toutefois des difficultés dans la mesure où le CSM n est pas encore opérationnel et que l exécutif souhaite jouer un rôle moteur en ce qui concerne le renouvellement et l assainissement du pouvoir judiciaire 30. b.1.2. La nécessité de recruter du personnel judiciaire et de mettre un terme aux pratiques informelles de désignation d un personnel non qualifié On entend par personnel judiciaire l ensemble des greffiers, huissiers, secrétaires de parquet et agents de l ordre judiciaire œuvrant dans les juridictions et parquets. Les OPJ sont quant à eux des auxiliaires de justice qui dépendent du procureur de la République dans la gestion des affaires judiciaires 31. un faible niveau de rémunération ; le vieillissement des fonctionnaires ; le manque de formation ; Le personnel judiciaire se caractérise par : le manque de promotion au cours de la carrière ; le manque de contrôle sur ses activités. Le personnel judiciaire est également réparti inégalement dans les juridictions et le manque d effectif conduit au recours à du personnel assumé. Le personnel assumé (que l on présente parfois aussi comme des stagiaires) est recruté localement. N étant pas immatriculé par l administration, il ne reçoit pas de salaire. Il agit le plus souvent comme secrétaire ou huissier, et parfois comme greffier. Pour exercer des fonctions d huissier, le chef de juridiction peut leur faire prêter serment, ou prendre une ordonnance. 27 En effet, en 2000 il y avait dix magistrats au parquet de Luozi et trois magistrats au TP. Au niveau du parquet, chaque magistrat couvrait un secteur donné et y passait suffisamment de temps pour instruire les dossiers et éventuellement fixer les amendes. Mais les magistrats ont fini par partir sans être remplacés, et désormais ils ne se déplacent que très rarement pour visiter les commissariats. Au TP, les audiences foraines ont également disparu. Lors de sa visite récente, le secrétaire du PPRD a qualifié les magistrats de héros. 28 En Ituri, plusieurs initiatives successives de la communauté internationale ont permis l allocation de primes complémentaires au salaire des magistrats pour les inciter à venir travailler dans ce district en proie à l insécurité et l instabilité. Les primes s élevaient environ à 500 USD par magistrat. 29 Article 2 de la loi organique N 06/020 du 10 octobre 2006 portant Statut des magistrats. 30 L implication de l exécutif dans le renouvellement du pouvoir judiciaire s est encore révélée par les ordonnances du 15 juillet 2009 par lesquelles le Président de la République a révoqué près d une centaine de magistrats et porté de nouvelles nominations. 31 Il existe une grande variété d OPJ selon qu ils sont à compétence générale ou restreinte. Indépendamment de leur fonction initiale, les OPJ relèvent administrativement de leurs ministères respectifs (par exemple les administrateurs du territoire dépendent du ministère de l Intérieur). 46

47 Comme le démontrent les tableaux suivants, le recours au personnel assumé est très significatif dans les juridictions et parquets visités, surtout au niveau des TP : Pour les tribunaux de paix % du personnel assumé sur le personnel total Matadi Mbanza-Ngungu Luozi* Songololo 46,2% 76,5% 14,3% 68,8% Personnel judiciaire total Dont personnel assumé Total greffiers Dont greffiers assumés Total huissiers Dont huissiers assumés * Le Président du TP de Luozi nous a dit avoir arrêté le recours au personnel assumé depuis le contrôle biométrique opéré par la fonction publique en Pour les TGI Matadi Mbanza-Ngungu % du personnel assumé sur le personnel total 13,3 % 31,8 % Personnel judiciaire total Dont personnel assumé 2 7 Total Greffiers 15* 14 Dont greffiers assumés 0 5 Total Huissiers 0 6** Dont huissiers assumés 0 0 Total Secrétaires 0 2 Dont secrétaires assumés 0 2 * Sur les quinze greffiers, six sont affectés à l huissariat. ** Les six huissiers de Mbanza-Ngungu ne sont pas assumés mais plutôt détachés. Ils appartiennent déjà à une autre administration. Ils perçoivent donc déjà à ce titre un salaire de fonctionnaire mais ne sont pas formés pour cette fonction. Pour les parquets Matadi Mbanza-Ngungu Luozi Songololo % total assumé 18,8% 14,8 % 66,6 % 62,5% Total personnel et auxiliaire Total assumé Total secrétaires Secrétaires assumés Total OPJ 1 OPJ, 2 IPJ 14 OPJ, 2 IPJ* 1 OPJ, 1 IPJ** 0*** OPJ assumés *Il ya également 28 APJ au niveau du Parquet de Mbanza-Ngungu. Seulement 5 sont immatriculés (mécanisés). ** L IPJ a déserté son poste, et a été remplacé par un agent non formé. *** Le Parquet de Songololo ne dispose que de 2 APJ. 47

48 Les problèmes liés aux personnels assumés sont multiples ils exercent des fonctions délicates et importantes pour la bonne administration de la justice sans être officiellement habilités à le faire 32 ; en l absence de salaire, ils réclament indûment des frais aux justiciables ; ils n ont pas reçu de formation adéquate. Ils apprennent sur le tas, au contact du personnel de carrière, dans l attente d être incorporés dans l administration publique ; ils échappent au contrôle hiérarchique du chef de la juridiction. Parallèlement au phénomène du personnel assumé, il est important de mentionner que de nombreux huissiers sont bien des agents de l Etat mais ne constituent pas du personnel judiciaire car rattachés à une autre administration locale (il s agit par exemple du personnel travaillant au niveau du territoire et qui assume ponctuellement des fonctions de huissier : sorte de détachement informel). D une manière générale ce personnel assumé, détaché ou informel (selon les cas ou l appellation qu on leur donne) incarne la justice aux yeux de justiciables souvent incapables de distinguer l étendue de leurs réelles attributions. Les justiciables se soumettent aux exigences et menaces de ces agents pour s assurer que leur dossier ne sera pas négligé ou bloqué. Ces pratiques sur le terrain sont difficiles à quantifier, mais ont été fortement dénoncées par les organisations de la société civile qui ont participé à l étude. Le ministère de la Fonction publique a opéré en 2008 un vaste contrôle biométrique des agents de l Etat dans l ensemble du pays, et a ainsi eu l occasion de répertorier le personnel judiciaire. L objectif initial de cette initiative était de réduire les effectifs des agents publics. Mais l opération a au contraire fait apparaître que de nombreux services d Etat étaient déficients faute d effectifs, et que le recours au personnel assumé était monnaie courante. Tout ce personnel a pu être identifié, mais aucune mesure d immatriculation n a été prise depuis lors. Concernant les juges assesseurs 33, la situation est similaire. Beaucoup d entre eux ont été désignés au niveau local par le président du tribunal de paix mais n ont pas fait l objet d une nomination ultérieure par le ministre de la Justice. En attente d être régularisés, ces assesseurs ne reçoivent pas de salaire et vivent aux dépens des frais extorqués aux justiciables. Nombre de juges assesseurs par tribunaux Tribunal de paix Matadi Mbanza-Ngungu Luozi Songololo Nb total d assesseurs 4* Nb d assesseurs assumés 1 (25%) 16 (100%) 0 (0%) 10 (100%) * En principe il y a six assesseurs à Matadi mais deux sont inactifs compte tenu de leur âge. Il ressort du tableau que 79,4% des juges assesseurs opérant dans les territoires de l enquête sont assumés. La probabilité qu ils soient un jour titularisés semble très mince dans le contexte actuel qui vise plutôt à restreindre le rôle des juges assesseurs en leur reconnaissant davantage un statut de consultant. 32 La fonction d huissier exige une discipline et une rigueur toute particulière, et nécessite d être encadrée et contrôlée pour éviter les abus. Or souvent les huissiers assumés échappent à tout contrôle car sont seuls au moment de la signification des actes ou de la perception des recettes. 33 Les juges assesseurs sont des juges au niveau des TP qui conseillent le juge principal dans des affaires relatives à la coutume (pour plus d explications, voir p.64). 48

49 b.2. La rémunération et le traitement du personnel de justice La question des salaires est fréquemment citée par les acteurs judiciaires comme cause des dysfonctionnements de la justice et ce, malgré la revalorisation importante qui est intervenue pour les magistrats en Le personnel judiciaire, quant à lui, est soumis aux conditions salariales de la fonction publique. A titre indicatif : un magistrat de tribunal de paix perçoit en début de carrière un salaire mensuel de 600 USD (primes incluses) ; un huissier : francs congolais (soit environ 45 USD) ; un greffier : FC en début de carrière et (environ 77 USD) pour les hauts postes en fin de carrière ; un juge assesseur : FC (soit environ 225 USD). Ces salaires, payés en francs congolais, sont soumis aux variations du taux de change en dollars, sans être ajustés malgré la forte dévaluation de la monnaie nationale. Les très bas salaires du personnel judiciaire ne leur permettent pas raisonnablement de vivre. Ils doivent chercher d autres sources de revenus, soit en développant une autre activité, soit en détournant les frais de justice, soit en extorquant directement le justiciable. Pour les magistrats, les salaires ont été améliorés en Mais, d une manière générale, les avantages liés à leur fonction se sont détériorés au cours des dernières années (cf. logement de fonction, prime de représentation, prime de transport, sécurité sociale ) La mise en place d un système de mutuelle de santé, à l instar de celui existant pour les enseignants, a été réclamée à plusieurs reprises par les magistrats au cours des entretiens. b.3. La question du contrôle L ampleur des phénomènes de corruption, d indiscipline et d absentéisme constatés sur le terrain pose immanquablement la question du contrôle exercé sur les magistrats et l ensemble du personnel judiciaire. Sans le contrôle et la sanction des abus, il est illusoire de prétendre remédier et protéger les justiciables des pratiques déviantes. La question du contrôle est actuellement au cœur des débats sur le rôle respectif du judiciaire et de l exécutif dans l administration de la justice. Le ministère de la Justice et son service technique de l inspectorat judiciaire assuraient jusqu à présent ce contrôle sur le corps judiciaire. L adoption de la loi sur le CSM a permis de réaffirmer l appartenance de cette prérogative au corps judiciaire, mais sa mise en œuvre se heurte à des blocages à la fois techniques et politiques. La question des moyens accordés à l exercice d un contrôle réel constitue également un enjeu de taille. La question du contrôle demande également de différencier l inspection du fonctionnement des juridictions et le contrôle disciplinaire. b.3.1. L inspection du fonctionnement des juridictions : une compétence à deux têtes Les chefs de juridictions supérieures ont la mission d opérer la surveillance administrative des juridictions inférieures de leur ressort 34. Au cours de leurs visites ils doivent contrôler la bonne 34 Article 53 de l arrêté N 299/79 du 20 août 1979 portant règlement intérieur des cours, tribunaux et parquets. 49

50 expédition des affaires par les magistrats, ainsi que le travail réalisé par le personnel judiciaire (tenue des registres, comptabilité ) Lorsqu une anomalie ou un retard injustifié est constaté, le Premier président de la cour d appel peut rappeler à l ordre ou formuler des recommandations au chef de juridiction ou au personnel concerné. Il peut également intégrer les points importants de sa visite dans le rapport mensuel ou trimestriel qui est transmis à son supérieur hiérarchique. L information compilée parvient ainsi, par étapes intermédiaires, jusqu à la Cour suprême 35. Parallèlement à ce contrôle hiérarchique des juridictions, la loi a créé en l inspectorat judiciaire. Initialement rattaché au Conseil judiciaire 37, l Inspectorat a été rattaché au ministère de la Justice avec la disparition du Conseil. Ce rattachement à l exécutif a été réaffirmé en décembre 2008 dans l ordonnance fixant les attributions du ministère de la Justice 38. La principale mission de l inspectorat consiste à contrôler le fonctionnement des juridictions, des parquets et de tous les services du ministère de la Justice : «Au cours de leurs missions, les membres de l Inspectorat s assurent, notamment par l examen des dossiers, des registres et des copies des jugements, de la bonne administration de la justice et de l expédition normale des affaires ; ils contrôlent et vérifient les écritures comptables et l exécution des budgets des recettes et des dépenses des services du Conseil judiciaire.» 39 Il existe donc une grande similitude des fonctions reconnues aux juridictions supérieures et à l Inspectorat dans le contrôle du fonctionnement de la justice. On peut s interroger sur l opportunité de cette double prérogative relevant tantôt des services de l exécutif, tantôt des services judiciaires. En pratique, ces inspections sont très sporadiques. Les chefs des juridictions supérieures rencontrés à Matadi et dans les Cataractes ont admis n exercer ces visites qu occasionnellement, faute de disposer des moyens nécessaires à l organisation de visites régulières. L Inspectorat judiciaire déclare de son côté se heurter à des contraintes similaires en termes de transport et d effectif. À sa création, l Inspectorat comptait des bureaux dans chaque province, avec des magistrats, du personnel judiciaire et une dotation spéciale pour la bonne exécution des affaires. À l heure actuelle, il n existe qu un seul bureau provincial à Lubumbashi, avec un magistrat. Au total six magistrats inspecteurs 40 doivent courir l ensemble du territoire, et ce sans budget de fonctionnement (le budget alloué en 2008 n a pas été versé), ni moyen de transport (aucun véhicule). De plus, l Inspectorat reconnaît concentrer son action sur le suivi des dossiers disciplinaires (cf. infra). Il sera nécessaire à terme de clarifier et rationaliser les attributions des juridictions et de l Inspectorat afin que ces contrôles puissent être effectifs et menés régulièrement sur le terrain. b.3.2. Le contrôle disciplinaire L Inspectorat judiciaire Tel que stipulé dans l ordonnance de 1987, la mission de l inspectorat consiste à contrôler le fonctionnement des juridictions : rien dans le texte n établit sa compétence pour instruire les dossiers disciplinaires des magistrats. En effet, en vertu du principe d indépendance du pouvoir judiciaire, cette prérogative relève de la compétence du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). 35 Il faudra déterminer avec la disparition de la Cour suprême si ces rapports devront remonter au Conseil supérieur de la magistrature ou à la Cour de cassation. 36 Ordonnance du 23 juin 1987 portant création de l Inspectorat général des services du Conseil judiciaire. 37 Sous Mobutu, le Conseil judiciaire sevrait à la fois de ministère de la Justice et de Conseil de la magistrature. Cet organe représentait l ensemble des instances de justice. 38 Journal officiel de la 49 e année : ordonnance 08/074 fixant les attributions du ministère de la Justice. 39 Article 2 de l ordonnance Les effectifs ont diminué car les magistrats inspecteurs qui ont été promus ou qui sont décédés n ont pas été remplacés. 50

51 Mais, en pratique, l Inspectorat s est progressivement arrogé le rôle d instruire des dossiers disciplinaires. La saisine de l Inspectorat s effectue soit directement par un justiciable qui se sent lésé par le comportement d un magistrat, soit d office par l Inspectorat qui est informé d un cas problématique. Une fois saisi, l Inspectorat mène une investigation à charge et à décharge. L Inspectorat se définit lui-même comme «le parquet disciplinaire du CSM» (réception des plaintes et instruction des dossiers). Cette prérogative exercée de fait provoque une forte hostilité et résistance de la part du corps judiciaire qui refuse de se soumettre au contrôle d un service du ministère de la Justice 41. La nouvelle loi sur le CSM n a pas permis de résoudre ce conflit. Selon nous, il aurait été pertinent que l Inspectorat soit rattaché au pouvoir judiciaire et devienne un service technique du CSM 42. Mais l Inspectorat n est pas mentionné dans le nouveau texte et l ambiguïté de son statut demeure : l ordonnance de décembre 2008 qui confirme le rattachement de l Inspectorat au ministère contredit le principe de la séparation des pouvoirs inscrit dans la Constitution (art. 149 et 150) et l esprit de la loi sur le CSM. On peut regretter que l adoption de la loi sur le CSM n ait pas été l occasion de clarifier cette question. Quelques parlementaires semblent avoir pris la mesure de ce conflit et travailleraient sur l élaboration d un nouveau projet de loi permettant de requalifier le statut et les prérogatives de l Inspectorat et de le situer clairement par rapport au CSM. Cette clarification législative est nécessaire pour combler le vide juridique actuel sur l articulation des deux institutions et organiser un service de contrôle efficace. Le Conseil supérieur de la magistrature Le Conseil supérieur de la magistrature, institué par la loi organique du 5 août joue un double rôle : il assure la gestion de la carrière des magistrats (propose les recrutements, promotions et mises en retraite qui sont confirmées par le président de la République) et il exerce le pouvoir disciplinaire. Tous les chefs des juridictions et des offices des parquets sont soumis à son contrôle 44. Pour exercer ce contrôle disciplinaire, la loi prévoit l installation de chambres provinciales de discipline près les cours d appel et d une chambre disciplinaire nationale pour les hauts magistrats. Ces chambres provinciales connaissent «au premier degré, des fautes disciplinaires mises à charge des magistrats des ressorts des cours d appel, des cours administratives d appel, des cours militaires et de ceux des parquets près ces juridictions» 45. Il ne s agit pas de chambres permanentes, mais de chambres ad hoc qui se constituent pour l examen des dossiers disciplinaires. Les chambres provinciales de discipline sont composées de façon mixte et croisée (en tenant compte des spécificités des magistrats du siège, du parquet et de la justice militaire) et sont présidées par un magistrat de rang supérieur ou égal à celui du magistrat poursuivi 46. À l heure actuelle elles ne sont toujours pas fonctionnelles. Au Bas-Congo, le Premier président de la cour d appel a demandé aux chefs des juridictions et des parquets de lui faire parvenir tous les dossiers disciplinaires documentés en vue de les examiner et, le cas échéant, d organiser une première série d audiences. Mais il se heurte à des difficultés logistiques et financières pour la mise en place de la chambre. Il faut notamment organiser le déplacement des magistrats. 41 En septembre 2008 la visite d une délégation de l inspectorat visant à relever les doléances des justiciables contre le fonctionnement de la justice à Lubumbashi a provoqué le mécontentement des magistrats et de leur syndicat. Ils ont organisé un sit in au palais de justice de Lubumbashi pour protester contre cette mission de l Inspectorat qui violait selon eux les prescrits de la Constitution sur l indépendance de la magistrature. 42 Ce rattachement serait d autant plus cohérent que les inspecteurs sont des magistrats de carrière détachés au ministère de la Justice. En vertu de la séparation des pouvoirs, ils devraient donc rendre leurs rapports de service au CSM plutôt qu au ministre. 43 Loi organique N 08/013 du 5 août 2008 portant organisation et fonctionnement du CSM. 44 Voir article 50 de la loi organique N 06/020 du 10 octobre 2006 portant Statut des magistrats. 45 Article 22 de la loi organique N 08/013 du 5 août 2008 portant organisation et fonctionnement du CSM. 46 Article

52 L appui à la mise en place de la chambre provinciale de discipline du Bas-Congo pourrait avoir un impact significatif sur la bonne administration de la justice dans la province. L absentéisme et les abus sont fortement décriés par la population et le pouvoir judiciaire doit restaurer les contrôles et la discipline pour regagner la confiance des justiciables. b.3.3. Le contrôle du personnel judiciaire Le statut du personnel judiciaire est très particulier : fonctionnaires de l Etat, ils dépendent administrativement du ministère de la Fonction publique, disciplinairement du ministère de la Justice (c est le ministre de la Justice qui les gère et le secrétaire général du ministère de la Justice qui examine les dossiers disciplinaires en dernier ressort) et techniquement du chef de juridiction (ce sont des agents de l ordre judiciaire qui dépendent à ce titre des cours et tribunaux). Finalement, le personnel semble ne dépendre de personne. Le manque d autorité du chef de juridiction pose notamment de nombreuses difficultés sur le terrain. Il ne peut prendre aucune mesure disciplinaire à l encontre des greffiers et secrétaires lorsqu il constate des manquements, fautes ou abus (sauf si ces fautes constituent des infractions pénales). Il ne peut que faire des rapports et en référer à leur supérieur hiérarchique direct (le greffier titulaire pour les TP, et au-dessus de lui le greffier divisionnaire au niveau du TGI et le greffier principal au niveau de la cour d appel) qui décidera s il y a lieu de considérer ou instruire le cas 47. Il en va de même pour l Inspectorat judiciaire qui remet le dossier au supérieur hiérarchique. En pratique, les dénonciations opérées par les chefs de juridiction n aboutissent pas et les sanctions sont très rares : la situation se gère en interne avec des supérieurs complaisants et compréhensifs qui trouvent un arrangement. Pourtant les abus et la taxation du justiciable sont des phénomènes connus, voire généralisés : la notification des actes et l exécution des jugements donnent lieu au paiement de sommes indues, certains litiges sont directement réglés au greffe par les greffiers eux-mêmes moyennant le paiement d une commission, parfois les greffiers ou huissiers se font passer pour des magistrats ou disent avoir été envoyés par le président pour saisir des biens. Tout est prétexte pour réclamer de l argent, ce qu ils appellent communément «l argent pour les pieds». Ces pratiques se sont d autant plus installées que le salaire et le statut du personnel judiciaire sont misérables (pas de promotion ni d évolution dans la carrière) et que bon nombre d entre eux sont assumés et vivent de ces taxations. Pourtant, la mission et le rôle qu ils jouent sont primordiaux. Ils sont souvent les premiers interlocuteurs du justiciable, et contribuent par leur attitude au lourd discrédit de la justice. Considérant que le système actuel de contrôle sur ce personnel est défaillant, il est fondamental qu il soit placé sous l autorité effective du pouvoir judiciaire, et plus particulièrement du Conseil de la magistrature. La bonne administration de la justice réclame en effet une unité de commandement. Cette question a déjà été largement débattue, sans résultat 48, et elle pourrait bientôt être remise sur le devant de la scène. En effet, la réforme introduite au Parlement pour la création des trois Hautes Cours (Cour constitutionnelle, Cour de cassation et Conseil d Etat) est accompagnée d un avant-projet de loi portant organisation et compétence judiciaire qui proposerait le rattachement du personnel judiciaire au CSM. Cet avant-projet de loi risque de susciter la polémique et de nombreuses résistances, tant de la part du personnel judiciaire lui-même (qui souhaite rester indépendant et se constituer en corps professionnel), que du pouvoir exécutif. Il est donc nécessaire d organiser le lobbying auprès du Parlement pour que ces propositions soient étudiées en toute objectivité et dans l intérêt de la bonne administration de la justice et puissent être validées dans les meilleurs délais. 47 Les tensions entre les chefs de juridictions et parquets et les responsables de greffe et secrétariat sont récurrentes. Le personnel judiciaire cherche à marquer son indépendance vis-à-vis des magistrats et ne manque pas une occasion de leur rappeler qu ils n ont aucune autorité sur eux et à aviver la confrontation et le rapport de force. 48 Le rattachement des agents judiciaires au ministère de la Justice a déjà été débattu lors de la Conférence nationale souveraine de 1992, mais les concernés se sont fortement opposés et la proposition a été rejetée. 52

53 C. La qualité de la justice rendue Les constats qui suivent sont issus de l analyse des jugements, de l analyse des registres et de la tenue des greffes ainsi que des discussions avec les responsables des juridictions 49. c.1. Une justice lente, désorganisée et des décisions non exécutées La visite des greffes et secrétariats de parquet, et la revue systématique des registres ont permis de collecter des données quantitatives sur le fonctionnement des juridictions et de mettre en relief certains des griefs régulièrement prononcés à l encontre de la justice : sa lenteur, la lourdeur de ses procédures, le faible niveau du personnel judiciaire, la mauvaise exécution des jugements La mauvaise gestion des registres et des archives rend toutefois difficiles une analyse précise de la situation. Les données doivent donc être analysées avec prudence. c.1.1. Le volume d affaires En termes de volume, nous avons pu relever 1856 dossiers en cours au niveau des 4 TP et 6480 dossiers en cours au niveau des 2 TGI. Le nombre de dossiers prononcés par an est par contre faible (379 jugements prononcés au niveau des TP pour l année 2007 et seulement 237 au niveau des TGI). On constate donc un sérieux arriéré judiciaire dû notamment à un nombre important de vieux contentieux qui dorment depuis des années. Il est essentiel d interpeller les juges sur le rendement des tribunaux, notamment au niveau des TGI (pour rappel le TGI de Matadi et de Mbanza-Ngungu comptabilisent 30 juges). Dans l analyse du domaine des affaires, il est frappant de constater que le contentieux pénal est largement plus élevé que le contentieux civil dans l ensemble des juridictions visitées. Nous avons relevé une moyenne de 75% d affaires pénales dans les juridictions. c.1.2. La tenue des registres et l archivage Le manque d homogénéité dans la tenue des registres est notoire : le classement varie selon les greffes et les secrétariats visités. De plus, on constate de nombreuses irrégularités ou incohérences qui pèsent sur le suivi des dossiers : registres d exécution incomplets, non ou mauvaise inscription des informations relatives aux frais, absence d information sur la dactylographie des jugements Les archives du greffe au TGI de Matadi 49 Les experts ont utilisé plusieurs outils (cfr. méthodologie) : - la fiche statistique : elle permet à travers l analyse des registres et les discussions avec les responsables des greffes de collecter les données judiciaires relatives aux délais de traitement des dossiers. Ces données permettent d analyser le rendement de la juridiction et d identifier les éventuels points ou facteurs de blocage. Compte tenu de l impossibilité d examiner ces données de manière exhaustive, l équipe a sélectionné un échantillon dans chaque juridiction, à savoir les vingt-cinq premières décisions inscrites en 2007, considérant que cette analyse aléatoire pourrait être représentative du fonctionnement de la juridiction. - l analyse des jugements : lors des visites dans les tribunaux (TP et TGI), l équipe d experts a passé en revue au hasard plusieurs affaires au civil et au pénal afin d examiner la rédaction des jugements et les connaissances en droit des magistrats. Chaque décision examinée a fait l objet d une évaluation sur cinq critères définis préalablement : l exposé des faits, la motivation en fait, la motivation en droit, la référence aux textes, et l énoncé du dispositif 53

54 Les systèmes d archivage sont également défectueux : pas de séparation des affaires pénales et civiles, pas de classement chronologique, pas de rangement par dossiers classés, jugés, exécutés Les archives sont souvent conservées de manière désastreuse : elles sont posées à même le sol dans les bureaux des greffes, il n existe pas de local pour les archiver, absence d étagères et de meubles de rangement, elles ne sont pas protégées de la poussière et sont souvent en état de détérioration avancée. Il est impératif de former le personnel judiciaire (mécanisé ET assumé) pour rationaliser la tenue des greffes et définir des critères de classement uniformes et pratiques. Le remplacement du personnel en âge de partir à la retraite est également un enjeu majeur. Cette remise à niveau devra être accompagnée d un appui en matériel et mobilier (étagères, armoires, machines à écrire, fournitures de bureau). c.1.3. Le défaut de dactylographie et d exécution des jugements : Modalités d exécution d un jugement A l issue d un procès, le juge peut prendre des mesures de réparation ou de sanction à l encontre d une ou de plusieurs parties (par exemple : réparation en nature, versement des dommages-intérêts, paiement des amendes en matière pénale, etc.). Pour que justice soit réellement rendue, il y a lieu de rendre effective ces mesures. Le personnel judiciaire compétent (huissier) sera chargé de notifier la décision aux parties et de faire le suivi de la bonne exécution de la décision. Si les parties ne s exécutent pas avec diligence, le personnel judiciaire devra utiliser des moyens coercitifs pour que les parties se conforment à la volonté de la justice (par exemple : la saisie des biens en vue de la revente, expulsion forcée, retenue sur salaire, etc.). Pour permettre la bonne exécution des jugements il est donc nécessaire que les informations soient transmises au personnel chargé de faire le suivi. Il est également essentiel que l état d avancement de l exécution soit détaillé dans un registre propre. Les données sur la dactylographie et l exécution des jugements sont rarement disponibles dans les registres. Il a donc été difficile d établir des statistiques fiables sur ces deux aspects. Ils sont pourtant liés dans la mesure où une décision non dactylographiée à moins de chance d être exécutée 50. Et si elle est dactylographiée, elle n est pas nécessairement transmise au greffe d exécution. Ainsi, si l on souhaite agir sur la question de l exécution des jugements, il faut en amont agir : - sur la dactylographie des décisions ; - sur leur transmission au greffe d exécution ; - et sur leur classement adéquat pour le suivi. Pour ce qui est de l exécution même, elle reste un problème majeur. L analyse des registres nous a permis d établir dans les juridictions visitées un taux moyen d exécution de 16,8% des jugements prononcés (ce qui est au-dessus des estimations au niveau national, mais reste malgré tout très préoccupant). Or l exécution des décisions est fondamentale pour la crédibilité de la justice : elle garantit la sécurité juridique des citoyens et assoit l autorité de la loi. 50 Dans la pratique, seules les décisions dactylographiées sont signifiées. Or, généralement, la dactylographie du jugement n intervient que lorsque le justiciable réclame sa copie et «rémunère» les services du personnel judiciaire. 54

55 L amélioration du taux d exécution des jugements doit constituer un objectif prioritaire un appui en fournitures ; un appui pour les déplacements ; Elle implique : un renforcement des capacités du personnel judiciaire, et en particulier des huissiers et greffiers-huissiers ; la sensibilisation des responsables des greffes et secrétariats pour qu ils supervisent le suivi des décisions à exécuter et établissent dans leurs rapports des statistiques d exécution fiables. Il est important de souligner que les magistrats et présidents des juridictions n ont pas de prise sur l exécution des jugements : elle est confiée au personnel judiciaire qui échappe à leur contrôle et sur lequel ils n ont pas autorité. Ils devront quand même être associés aux discussions afin que l amélioration des taux d exécution soit un objectif de la juridiction dans son ensemble et que les chefs de juridiction puissent obtenir des engagements du personnel judiciaire sur ce point et en suivent la mise en œuvre. c.1.4. La lenteur du traitement des dossiers et les remises d audience Sur base de l analyse des registres, les experts ont relevé que les délais moyens de traitement depuis l enrôlement de l affaire jusqu au prononcé du jugement varient selon les juridictions de 120 jours à 312 jours. Les délais sont généralement plus courts pour les affaires pénales. Délais de traitement des dossiers TGI Matadi TGI Mba- Ngungu TP Matadi TP Mbanza- Ngungu TP Luozi TP Songololo Délai moyen enrôlement / jugement Civil Pénal Civil Pénal Civil Pénal Civil Pénal Civil Pénal Civil Pénal 230 j 165 j 165 j 126 j 120 j 127 j 211 j 180 j 208 j 197 j 312 j 157 j *Statistiques des TP et TGI tirées des 25 premières affaires inscrites en 2007 En ce qui concerne les remises d audience, la loi prévoit trois audiences maximum par procès 51. Les résultats observés au cours des visites dépassent ce critère, mais ne sont pas excessifs. En effet, nous avons pu établir une moyenne de 4,75 audiences par affaire au niveau des TP et de 4,25 audiences par affaire au niveau des TGI. Ces résultats ne permettent pas vraiment de corroborer les plaintes des justiciables sur les remises excessives d audiences. Ces plaintes s expliquent peut-être par le fait que les audiences étaient moins nombreuses avec les anciens tribunaux coutumiers. D une manière globale, il ressort des données un manque de célérité au niveau des parquets : les délais d instruction sont longs, beaucoup de dossiers sont classés sans suite, beaucoup d autres dossiers ne sont pas fixés ou traités. Il semblerait que le problème de lenteur de la justice décrié par les justiciables soit confirmé à ce niveau-ci. Il convient donc de sensibiliser les chefs des parquets et procureurs sur la nécessité d améliorer l efficacité de l instruction des dossiers, avec ou sans prévenu. 51 Arrêté d organisation judiciaire N 299/79 du 20 août 1979 portant règlement intérieur des cours, tribunaux et parquets. 55

56 D une manière générale, nous avons constaté que : les délais de traitement des dossiers sont plus courts en matière pénale qu en matière civile (les délais de la procédure pénale sont aussi plus stricts) ; les phases d instruction sont particulièrement longues au parquet (moyenne record de 370 jours au Parquet de Mbanza-Ngungu) ; les délais de détention préventive sont mal respectés (moins de la moitié des cas examinés ont respecté le délai de 48h pour la garde à vue et du respect de 5 jours par le ministère Public) 52 ; le nombre d'affaires classées sans suite est préoccupant dans certains parquets 53 ; très peu d affaires sont fixées devant le tribunal, et le nombre d affaires non traitées est très élevé. L inefficacité de la justice est à mettre en balance avec les moyens humains et matériels mis à son service. Les données collectées sur le terrain doivent être analysées à la lumière de la situation réelle de chaque juridiction (nombre de magistrats, de greffiers, niveau de formation, taille du ressort géographique, moyens de transport ) si l on veut être objectif sur les facteurs de blocage. Il est vrai que la mauvaise volonté ou corruption du personnel peut contribuer à ralentir le cours de la justice. Le blocage du dossier d un justiciable qui refuse de payer des sommes indues n est pas un mythe. Mais ce phénomène est souvent une conséquence du dénuement généralisé auquel le personnel fait face. c.2. Le niveau du personnel et les besoins en formation Les lacunes constatées dans les aptitudes des magistrats et du personnel judiciaire sont considérables et directement liées au non fonctionnement de l Ecole de la magistrature et l Ecole de formation et de recyclage du personnel judiciaire (EFRPJ). c.2.1. Pour les magistrats Pour être nommé magistrat, il faut être licencié en droit et être recruté par concours (le dernier concours de recrutement a été organisé par le ministère de la Justice en ). L enseignement prodigué à l université est souvent décrié, et fait apparaître de nombreuses insuffisances, notamment dans les enseignements en droit coutumier 55. De plus, il n existe pas de programmes de formation continue ou de mise à niveau pour les magistrats au cours de leur carrière. Les ateliers et formations organisés par des ONG et d'autres acteurs du développement sont des initiatives utiles et favorablement accueillies sur le terrain. Mais elles ne constituent que des mesures d urgence. D autres initiatives intéressantes sont également prises par les chefs de juridictions pour mettre les magistrats à niveau et harmoniser la jurisprudence du tribunal En partie en raison des grandes distances à parcourir pour amener le prévenu devant un juge. 53 A Matadi dix-neuf cas ont été classés sans suite sur les vingt-cinq cas examinés. Le classement sans suite peut intervenir si les parties trouvent un arrangement à l amiable, si le parquet classe pour inopportunité de poursuite, ou s il est dans l impossibilité de trouver le prévenu. 54 Un nouveau processus de recrutement est actuellement en cours et devrait permettre le recrutement de 200 magistrats civils et 50 magistrats militaires. 55 La matière coutumière est régulièrement reléguée au second plan et méprisée des étudiants qui ne perçoivent pas l usage qu ils auront à en faire. C est par la suite, lors de leurs premières affectations sur le terrain, qu ils prennent la mesure de la nécessité de savoir décrypter et prendre en considération les coutumes locales et pratiques sociales. 56 Au TP Matadi, depuis deux mois le président a mis en place des assemblées plénières le premier et le dernier samedi du mois : il réunit tous les magistrats qui débattent de questions de droit controversées et d affaires complexes, et ce en vue d harmoniser la jurisprudence du tribunal. Il prévoit de mettre en place des assemblées plénières pour les greffiers, mais les sessions n ont pas encore commencé. 56

57 Il est fondamental que les pouvoirs publics se saisissent de cette question de la formation (initiale et continue) du corps des magistrats et garantissent sa mise à niveau homogène sur l ensemble du territoire. La mise en place d un corps de la magistrature indépendant est un préalable encourageant et devrait être suivi de la réouverture de l Ecole de la magistrature. Au regard des jugements examinés et des entretiens menés avec les chefs de juridiction, les besoins en formation des magistrats portent sur : la procédure civile et pénale ; la loi foncière (elle est vaste et compliquée). le droit du travail et le droit des sociétés ; la protection de l enfant ; le droit de la famille ; les violences sexuelles ; Deux besoins prioritaires retiennent particulièrement l'attention : les demandes répétées de formation en droit coutumier ; la rédaction des jugements. Il semble essentiel pour l avenir de développer un plan de formation concerté et préétabli (entre les bailleurs, le CSM et le Service de documentation et d étude du ministère de la Justice) plutôt que de dispenser localement des formations incomplètes et sporadiques. Il est également nécessaire d appuyer la restauration d une Ecole de la magistrature qui devra à terme reprendre l ensemble des programmes de formation pour les magistrats. En revanche, la spécificité de la coutume au Bas-Congo et la demande pressante des magistrats d être mieux outillés en cette matière peuvent faire l objet d une action spécifique. L implication des experts coutumiers (chefs coutumiers, juges assesseurs, notables ) dans cette initiation à la coutume locale est une solution intéressante qui permettra de rétablir le dialogue entre deux systèmes de droit souvent conflictuels, et de valoriser les chefs coutumiers frustrés d une perte de considération. À terme, l intégration de programmes de formation à la culture locale (langue, croyances, us et coutumes, anthropologie ), en complément des cours de déontologie et éthique judiciaire, devra être opérée au niveau de l Ecole de la magistrature. Elle aidera considérablement les magistrats déployés sur le terrain dans des provinces qu ils connaissent mal, et contribuera à leur meilleure intégration dans le milieu. c.2.2. Pour le personnel judiciaire L EFRPJ à Kinshasa, ainsi que les écoles en province, n est plus en mesure de développer des formations de manière autonome depuis 1986 faute de moyen, et la plupart du personnel judiciaire de carrière n a pas reçu de formation initiale. Le recours au personnel assumé, dépourvu de toute formation formelle, aggrave la situation, d autant plus que ce personnel s arroge souvent des compétences qui vont au-delà de ses attributions À Songololo les huissiers assumés s érigent en avocats. Le justiciable finit par payer pour s assurer que son dossier ne va pas être bloqué. 57

58 Les lacunes sont immenses et les besoins en formation peuvent être énumérés comme suit : attributions du personnel judiciaire et limites ; questions de déontologie ; la procédure civile et pénale ; la rédaction et notification des exploits ; le rôle du greffier à l audience et la tenue des PV d audience ; les modalités d exécution des jugements et l huissariat ; l organisation du greffe (tenue des registres, archivage) ; l élaboration des rapports trimestriels ; la rédaction et dactylographie des préambules de jugements ; la remise des dossiers au juge car elle intervient généralement tardivement. Depuis 2002, RCN a développé un partenariat avec l EFRPJ et s inscrit par cette action dans la durée puisque cette école devra à terme organiser la formation et la remise à niveau de tout le personnel judiciaire du pays. Cette initiative doit être poursuivie et soutenue afin de réhabiliter les écoles d Etat dans cette prérogative et d éviter, comme cela a déjà été mentionné pour les magistrats, la démultiplication et le saupoudrage des actions de formation. Le personnel judiciaire rencontré au cours des visites s est montré satisfait des formations dispensées dans le passé par des ONG comme RCN car elles constituent souvent les seuls enseignements qu ils n aient jamais reçus. Dans ses activités de formation RCN recherche principalement à mettre en place des systèmes durables et peu coûteux particulièrement adaptés au contexte de la RDC. C est notamment le cas des formations permanentes qui sont organisées pour le personnel judiciaire à Kinshasa et au Bas-Congo. Les formations permanentes : un système de formation souple et peu coûteux Depuis 2004 RCN J&D a mis en place en collaboration avec l EFRPJ un système de formation permanente dans les greffes et secrétariats de parquet de Kinshasa et du Bas-Congo. Après une formation de formateurs destinée à des supérieurs hiérarchiques, ceux-ci organisent eux-mêmes au sein de leur juridiction ou office des séances régulières de formation interne avec leur personnel. Ces séances se déroulent plusieurs fois par mois et reçoivent un soutien de RCN J&D pour la documentation et la prise en charge du formateur. Cette méthode permet de mettre en place des formations régulières, pratiques, intégrées dans le plan de travail des membres du service, peu coûteuses, et appropriées par l institution. Ces formations permanentes ont été rendues obligatoires par la circulaire n 001/CAB/MI/ J/2004 du 24 août 2004 du ministre de la Justice. 58

59 D. L information du public et la question de la langue d.1. L accueil au tribunal Les visites opérées dans les différentes juridictions et parquets ont fait ressortir de manière constante les défaillances de l accueil du public. En dépit des réhabilitations opérées nous avons constaté les points suivants : absence d espace d accueil du public ; absence de personnel attitré pour l orientation et l information du justiciable 58 ; absence ou forte détérioration des tableaux d affichage ; si les actes juridiques (extraits de rôle, notifications d audience ) sont généralement affichés sur le panneau d affichage, sur les murs ou sur les portes du tribunal, le montant des frais de justice n est en revanche jamais signalé 59. Cette absence d espace d accueil et d information du public est tout aussi notoire dans les commissariats et souscommissariats. Dans le passé, il existait au niveau des TGI et des cours d appel des bureaux d accueil et d information du public, qui avaient notamment vocation à assister les justiciables nécessiteux. Mais avec la création des BCG, ces bureaux ont disparu. Des actions simples peuvent être entreprises pour améliorer la qualité de l accueil : fléchage ou orientation peinte à même les murs du bâtiment, aménagement de petits espaces d accueil ou d attente, construction de préaux en extérieur, installations de tableaux d affichage fixe, installation régulière d outils de vulgarisation (avec l appui de la société civile), présentation et coordonnées des services de consultation gratuite. Le public attend devant le tribunal de paix de Songololo 58 C est généralement le personnel de sécurité ou les greffiers qui sont les premiers interlocuteurs du justiciable, mais il n existe pas de constante. Tout dépend de la configuration du bâtiment. 59 RCN avait fait la distribution de tableaux où figuraient les frais de justice, mais ces tableaux ont disparu ou ne sont pas disposés dans un lieu approprié (par exemple dans le bureau du chef de juridiction). 59

60 d.2. La question de la langue Au cours des entretiens menés avec les responsables des juridictions, la question de la langue ne semblait jamais constituer un problème. C est en rencontrant les chefs coutumiers et en lisant les questionnaires des justiciables qu elle est ressortie avec force (cf infra l appréciation de la justice de proximité par les justiciables). S il est vrai que les magistrats proposent aux justiciables au cours des audiences de s exprimer dans la langue de leur choix (kikongo, français, lingala ), l essentiel de l audience et de la procédure se déroule en français. De la même manière, les actes de procédure et les décisions sont rédigés en français et ils sont souvent mal compris par les justiciables. Il arrive fréquemment qu'une des parties quitte le tribunal sans comprendre le sens la décision et avec le sentiment d avoir remporté la cause alors qu elle l a perdue. Cette mésinterprétation prive la personne de son droit à faire appel, mais pose aussi par la suite des complications dans l exécution de la décision. Les contestations et la frustration qui en découlent renforcent le sentiment d injustice et d arbitraire et la tendance à recourir à l autorité administrative ou coutumière pour réexaminer le litige. La question de la traduction des actes juridiques est complexe dans un pays à forte variété linguistique : quelle langue faudrait-il choisir? qui serait chargé de la traduction? comment garantir la qualité de la traduction alors que certains termes juridiques ne connaissent pas d équivalent en langue locale? Les solutions au problème du fossé linguistique existant entre la justice formelle et le justiciable ne peuvent être préconisées dans ce rapport. Elles sont techniquement et politiquement complexes. Mais il convient d attirer l attention des responsables politiques, des législateurs, du pouvoir judiciaire sur ce point, et d ouvrir un débat sur le monopole de la langue française dans le secteur de la justice, et la nécessité de vulgariser et simplifier les procédures dans un langage qui soit intelligible à la majorité. E. La justice foraine Qu est-ce que la justice foraine? Une audience foraine est une audience judiciaire qui se déroule dans le ressort juridictionnel du tribunal ou de la Cour mais en dehors de son siège ordinaire. Ces audiences foraines sont prévues par la loi qui stipule : «S ils l estiment nécessaire pour la bonne administration de la justice, les Cours et Tribunaux peuvent siéger dans toutes les localités de leur ressort.» 60 Les audiences foraines doivent se distinguer de l itinérance (qui consiste pour l autorité judiciaire à se déplacer sur le terrain pour effectuer l inspection des tribunaux de son ressort juridictionnel) et des descentes de terrain qui sont opérées dans le cadre de l instruction des dossiers. La création des tribunaux de paix, l installation de bureaux secondaires dans les zones isolées et la tenue d audiences foraines devaient assurer la proximité avec le justiciable et compenser la disparition des niveaux inférieurs de juridiction que constituaient les anciens tribunaux coutumiers (notamment les tribunaux de secteur). Ces chambres foraines étaient censées s organiser dans les différents secteurs du territoire pour éviter aux justiciables de parcourir de longues distances ou de recourir à des modes de résolution des conflits contraires à la loi. En pratique, les audiences foraines ne fonctionnent pas bien : elles n existent pas au niveau des TGI (qui déclarent ne pas disposer des moyens logistiques et financiers suffisants pour les 60 Article 67 du code d organisation et de compétence judiciaire du 31 mars

61 organiser, sauf dans les prisons, alors qu ils reconnaissent qu elles seraient très utiles), et sont généralement dysfonctionnelles au niveau des TP. Si certaines chambres foraines ont pu fonctionner au début de l installation des tribunaux de paix, celles-ci ont progressivement disparu faute de ressources humaines et matérielles appropriées 61. Les quelques TP qui disposent encore de bureaux secondaires (cf. TP Songololo et Mbanza Ngungu 62 ) s organisent généralement comme suit : installation d un ou deux greffiers et d un ou deux juges assesseurs au niveau du secteur qui sont chargés de recevoir les plaintes, puis de les transmettre au tribunal ou parquet 63. Il y a lieu de s interroger tant sur la qualification de ce personnel, que sur les risques de taxation des justiciables dans ces bureaux dénués de contrôle. Le personnel affecté dans les chambres est généralement assumé, choisi localement par le président de la juridiction, et dépourvu de formation et de salaire. La mise à contribution du justiciable est l unique source de revenus, et elle échappe à tout contrôle. De plus, lorsque la procédure suit son cours et que les magistrats se déplacent pour les audiences foraines, la taxation des parties se poursuit car elles doivent systématiquement supporter le coût du transport, de l hébergement, de la nourriture des magistrats (du siège et du parquet s il s agit d une affaire pénale), du personnel judiciaire et le cas échéant des avocats. Il ressort des entretiens menés avec les justiciables et les chefs coutumiers qu il est finalement moins onéreux pour eux de se rendre au tribunal que de prendre en charge les frais du personnel qui se déplace en foraine. Il est intéressant de mentionner que nombre de magistrats ont déclaré ne pas être à l aise avec l idée de siéger en foraine. Ils font des descentes de terrain au cours desquelles ils constatent de visu, puis les décisions sont prises ultérieurement au sein du tribunal. Ce fonctionnement leur semble plus adapté pour leur sécurité car ils craignent les réactions des justiciables s ils étaient obligés de se prononcer en dehors du tribunal, d autant qu ils ne sont jamais accompagnés de policiers. En fait il semble que les audiences foraines soient surtout efficaces lorsqu elles sont encadrées par la Communauté internationale ou des ONG, comme le démontre l expérience d ASF (voir encadré). 61 À Luozi, le tribunal de Paix (installé en 1986) comptait un bureau secondaire à Nkundi (à une centaine de kilomètres de Luozi) jusqu en À Songololo, il existe deux bureaux secondaires : un à Kimpese, et l autre à Kasi (85 km de Kimpese sur la route de Luozi). La chambre de Kasi est composée d un greffier, deux huissiers et deux juges assesseurs. A Mbanza-Ngungu le Président du TP déclare avoir installé une chambre foraine dans les 7 secteurs du territoire. Ces chambres, installées dans les anciens locaux des tribunaux coutumiers, comptent chacune un ou deux greffiers assumé et un juge assesseur (assumé). Ils reçoivent les plaintes et quand un nombre suffisant est atteint, ils se rendent au siège pour régulariser la procédure. 63 À Songololo, une audience foraine se tient tous les mois à Kasi (ces audiences sont interrompues depuis huit mois pour des questions de sécurité (BDK) et de transport, mais elles devraient reprendre en mai 2009). 61

62 L expérience d'asf dans l appui aux audiences foraines 64 Entre août 2004 et février 2006, l organisation Avocats sans frontières a développé avec l appui de DFID un projet de soutien aux audiences foraines dans les territoires du Kasaï occidental, du Maniema et de l Equateur. ASF prenait intégralement à sa charge le transport, le logement, la nourriture, les indemnités de mission et les fournitures de secrétariat du personnel déployé sur le terrain (magistrats, personnel judiciaire, avocats) pour les audiences. Cette initiative a connu un succès certain : au total, seize audiences foraines se sont tenues, permettant le traitement des affaires et le prononcé de 707 jugements, essentiellement en matière pénale (plus de 72% des dossiers). ASF estime qu environ 60 % des jugements exécutables ont été exécutés, ce qui est encourageant au regard de la moyenne nationale d exécution des jugements estimée entre 4 et 6%. Ces chiffres excèdent largement (souvent plus du double) le rendement habituel de la juridiction lorsqu elle siège au sein du tribunal. Les magistrats, mis en condition de travailler, ont démontré leur capacité à rendre une justice de qualité, rapide (efficience des audiences, prononcé des jugements avant la fin de la session), sans corruption, concussion ou taxation du justiciable. Elle a donc permis d agir de manière transversale sur la majorité des maux dont souffre la justice de proximité. Mais elle est aussi très onéreuse puisque ASF estime le coût moyen par affaire traitée à environ USD. La tenue des audiences foraines est par ailleurs très lourde à organiser logistiquement (cf. transport non seulement pour les audiences mais aussi dans leurs phases préparatoires lorsque les greffiers et huissiers doivent signifier les actes et les convocations). Se pose en outre la question de la viabilité de ce type de programme. 64 Pour plus de détails, voir le rapport final d activités, «Soutien aux audiences foraines», réalisé par ASF. 62

63 2. Analyse des autres institutions de justice (police, justice militaire, prisons) A. La police La police est au cœur de la justice de proximité : premier maillon de la chaîne pénale, c est chez l OPJ que l action publique est généralement mise en mouvement. En pratique, ces attributions dépassent souvent le cadre pénal. Dans les zones rurales, l agent ou l officier de police est seul à incarner l autorité de l Etat. Unique interlocuteur des justiciables, il reçoit aussi bien les plaintes civiles que pénales, et s estime compétent pour régler tout type de différends. Chargée d assurer la sécurité des citoyens, la police constitue également un acteur clé de la paix sociale, mais elle est dépourvue de moyens. À l instar des constats opérés au sein des juridictions, les besoins sont immenses et généralisés : personnel en sous effectif ; faible niveau de formation ; délabrement avancé des locaux ; absence de moyens de transport et de communication. Les cas de détention préventive et de mauvais traitements sont régulièrement dénoncés et le parquet ne parvient pas à exercer son contrôle sur des commissariats souvent inaccessibles. a.1. Des conditions matérielles désastreuses Tous les commissariats de police visités au cours de l enquête se trouvaient dans un état de délabrement avancé. Nombre de souscommissariats ne disposent même pas de locaux 65, et les commandants déployés construisent eux-mêmes un local ou abri. Une grande partie des sous-commissariats ne disposent pas de cachots, ou bien ils ne sont plus fonctionnels. Les problèmes des locaux s accompagnent partout d une grave pénurie de mobilier et de fournitures, de documentation juridique 66 mais aussi de matériel de sécurité de base : absence de menottes, de matraques, armes vétustes ou hors d usage. En l absence de machines, de registres, de papier le justiciable est mis à contribution. Le personnel de police déplore la quasi inexistence d appuis logistiques et matériels sur le terrain. Commissariat de police du territoire de Luozi 65 A Mbanza-Ngungu, la majorité des trente-sept sous-commissariats de secteur n ont pas de locaux propres. 66 Beaucoup des commissariats ne disposent même pas des codes pénal et de procédure pénale. 63

64 L absence de moyens de transport et de communication et les faiblesses des contrôles exercés sur les cachots et commissariats isolés : L absence de moyens de transport est généralisée dans les commissariats et souscommissariats de Matadi et du district des Cataractes 67. Les déplacements de la police s opèrent en fonction des moyens disponibles (motos personnelles, à pied), à charge des policiers ou des justiciables. Les difficultés rencontrées pour organiser ces transports ont des conséquences à plusieurs niveaux : lenteur et inefficacité des interventions, taxation du justiciable, détentions illégales prolongées, absence de contrôle des sous-commissariats. Les personnes arrêtées par la police doivent en principe être présentées à un magistrat du parquet dans les 48 h de leur arrestation. La question du transport des prisonniers du commissariat ou sous-commissariat au parquet est cruciale. En l absence de véhicules le transfert s opère à pied, soit au cœur de la ville (cf. Matadi), soit en pleine campagne. Les distances peuvent être très longues à parcourir, et elles suffisent généralement à décourager le policier 68. Il faut mentionner que nombre d évasions interviennent au cours de ces transferts, les policiers étant impuissants à sécuriser le transport des détenus. Deux conséquences découlent de ce défaut de moyens de transport : - le policier isolé préfère régler le litige lui-même sur place en demandant le paiement d une amende transactionnelle ou d une somme forfaitaire pour clore le dossier. Il arrive que le parquet lui-même recommande aux policiers de régler les conflits de la sorte, et de ne se déplacer que pour les cas sur lesquels ils ne peuvent transiger ; - les détentions sont prolongées illégalement, pouvant atteindre des délais de un mois, deux mois Elles sont un bon moyen de pression pour obtenir le paiement d amendes empochées directement par le policier. Les amendes Les amendes imposées par la police sont le lieu de l arbitraire et de tous les abus. En principe, le montant des amendes doit être remis à la DGRAD ou au parquet, mais celui-ci n a aucun moyen de vérifier si les amendes perçues ont été consignées dans le dossier ou si le montant inscrit au PV correspond à ce qui a été réellement demandé au justiciable. Les OPJ profitent de l ignorance de la population pour fixer des amendes arbitraires 69. Elles sont très mal perçues par une population paysanne, qui dispose rarement de liquidités en dehors des périodes de récoltes. Pour cette raison, le justiciable finit par recourir au chef coutumier qui prononce des sanctions plus raisonnables, en nature. L absence de moyens de transport au niveau des commissariats et des parquets empêche non seulement le transfert des détenus, mais aussi les visites de terrain et le contrôle des cachots par les parquets. Le contrôle du parquet sur les commissariats de police est prévu dans l article 1 du code de 67 Au total nous n avons comptabilisé qu une jeep remise par le PNUD au commissariat provincial des Cataractes et une jeep au commandement de Matadi (les deux véhicules connaissent des problèmes de carburant et d entretien) 68 Il faut par exemple plusieurs jours pour joindre le secteur de Balari au parquet secondaire de Luozi (110 km). Le policier, seul avec le détenu, et dépourvu de transport, doit en outre se loger et se nourrir. Il peut essayer de trouver un privé (camion commercial) qui accepte de transporter le détenu, mais les occasions sont rares sur des routes par ailleurs souvent impraticables. 69 Les montants des amendes transactionnelles sont définis dans différents textes (pas de document unique). Elles varient de 10 USD à 1000 USD maximum (même en cas de cumul). 64

65 procédure pénale 70 et dans l article 6 du code d organisation et de compétence judiciaires qui stipule que le ministère public «a la surveillance de tous les officiers de police judiciaire, des officiers publics et des officiers ministériels». C est sur cette base qu il est censé exercer le contrôle des cachots et les visites dans les commissariats 71. Les substituts rencontrés au cours de l enquête ont tous déclaré exercer ces contrôles au niveau des commissariats de district et de territoire 72, mais être dans l impossibilité de les exercer dans les sous-commissariats de secteur qui sont totalement laissés à leur sort (faute de moyens de transport mais aussi d effectifs). De la même manière, les commissaires de police de territoire sont incapables d opérer des déplacements dans les secteurs. À défaut des visites, les communications téléphoniques peuvent servir de relais d information ou d alerte. Mais, là encore, elles sont souvent difficiles : faute de réseau ou de crédit, les commissariats isolés n ont pas de contact régulier avec le parquet ou les commissariats supérieurs. a.2. Les effectifs et le niveau du personnel de police Pour le district des Cataractes, on dénombre 960 policiers rémunérés, auxquels s ajoutent 168 policiers non rémunérés (soit 13,7% de personnel assumé). En ce qui concerne les OPJ, il y a 96 OPJ confirmés, plus une trentaine d OPJ en attente de titularisation. La police du district est composée de : - quatre commissariats (Mbanza-Ngungu, Kwilu-Ngongo, Songololo et Luozi) ; - trente-sept sous commissariats ; - une compagnie mobile ; - la police criminelle 73. Le niveau des OPJ est très variable selon la formation initiale qu ils ont reçue. De plus en plus de policiers suivent des cours du soir dans des instituts privés 74 où le niveau des enseignements est discutable (les cours sont dispensés par les magistrats et OPJ du territoire ou du district, et non par des professeurs agréés). À l issue de la formation, le policier prête serment devant le procureur et devient un OPJ assumé jusqu à ce que la promotion soit validée par la hiérarchie. Il n est pas rare que les OPJ corrompent le parquet pour être désignés OPJ 75 alors qu ils n ont manifestement pas le niveau requis. La remise à niveau est donc fondamentale pour ce personnel recruté sur le tas. Les lacunes sont particulièrement marquées dans : la qualification des infractions (litiges érigés en infractions pour pouvoir percevoir des amendes), et le droit pénal en général ; La procédure pénale ; L instruction et la recherche des preuves (formation à mener parallèlement avec le parquet, responsable de la conservation des preuves) ; La rédaction des actes juridiques. Les policiers expriment également le besoin d être formés aux nouvelles lois (violences sexuelles, protection de l enfance). 70 Décret du 6 août 1959 portant code de procédure pénale. 71 Article 6 al. 2 de l ordonnance-loi N 82/020 du 31 mars 1982 portant du code d organisation et de compétence judiciaires. 72 Au niveau du parquet de Matadi, un magistrat se rend deux ou trois fois par semaine au cachot du commissariat de district. La Monuc opère aussi des visites quasi quotidiennes des cachots. 73 Informations collectées auprès du chef du personnel du commissariat de district de Mbanza-Ngungu. 74 Cf. l ISTC à Mbanza-Ngungu et Luozi, le Cidep à Mbanza-Ngungu et Kimpese. Ces instituts ne sont pas toujours agréés pour ce genre de formation. 75 Ils prêtent serment devant le procureur de la République qui leur remet une carte d accréditation. 65

66 Le renforcement de la PNC et la remise à niveau de ses agents et cadres s inscrit dans la réforme du secteur de la sécurité actuellement en cours à Kinshasa, et qui est soutenue par plusieurs bailleurs de fonds. Tout comme pour les magistrats ou le personnel judiciaire, la remise en marche d écoles nationales est privilégiée pour assurer des formations initiales de qualité et organiser des recyclages réguliers du personnel. B. le système carcéral Il existe deux prisons dans la province du Bas-Congo : Matadi et Mbanza-Ngungu, ainsi que deux centres de détention à Luozi et Songololo pour le district des Cataractes. Effectifs des prisons au moment de nos visites Détenus Prévenus Condamnés Femmes Mineurs Mbanza-Ngungu Matadi Luozi Songololo Cachot de Kimpese La prison de Matadi a été construite dans les années 60 pour accueillir 150 détenus. Elle héberge actuellement plus de 300 détenus dans des conditions de vie difficiles. La prison de Mbanza-Ngungu accueille actuellement 114 détenus. Construite en 1939 par l Onatra, elle n a jamais été réhabilitée et se trouve dans un état de délabrement avancé : trois des dix cellules sont hors d usage, l installation électrique est défectueuse, le système de sécurité précaire Le directeur de la prison ne reçoit que des appuis ponctuels et insignifiants : - le gouvernement a récemment distribué du riz et des haricots, mais absence d huile, de sel ; - la Monuc n appuie pas la prison. Il existe seulement quelques ateliers ou formations ponctuelles : formation de trois jours en juin 2007 à Matadi sur les fonctions du personnel pénitentiaire (Monuc) et formation en 2008 sur la justice des mineurs à Mbanza-Ngungu (Unicef). - le CICR qui ne fait que des visites ponctuelles. L alimentation des détenus est un défi quotidien, surtout lorsque ceux-ci proviennent de zones éloignées et ne reçoivent pas la visite de leurs familles (ils peuvent rester une semaine sans manger). Le directeur a aménagé quelques potagers autour de la prison où travaillent les condamnés ayant fait preuve de bonne conduite. Les besoins sont immenses pour sécuriser la prison, renforcer le personnel pénitentiaire, et fournir du matériel de base (machines à écrire, fournitures de bureau, registres ) et de la documentation juridique (les textes fondamentaux que sont le code pénal, le code de procédure pénale, la loi sur les mineurs ou celle sur les violences sexuelles ne sont pas disponibles à la prison). Les magistrats du TP et du TGI tiennent régulièrement des audiences foraines dans l enceinte de la prison. Le centre de détention de Luozi comptait quinze détenus au moment de notre visite (cinq étaient en audience au tribunal). Il est dans un état de délabrement exceptionnel. Les détenus peuvent s échapper à tout moment, ce qui leur vaut le nom de «résidents volontaires». Les évasions sont courantes, surtout au cours des corvées ou travaux d intérêt général. Les forces de sécurité présentes sont incapables d enrayer le phénomène. 66

67 Le bâtiment qui abrite la prison de Songololo date de Il y avait deux détenus au moment de la visite, six autres personnes étaient emprisonnées au cachot de la police à Kimpese. Tout comme à Luozi, les «détenus volontaires» profitent des corvées pour s échapper de la prison de Songololo. Les policiers ou agents de sécurité sont incapables de faire face aux agitations ou émeutes potentielles. Lorsque le Bundu Dia Kongo était très actif, les partisans du mouvement ont encerclé la prison pour obtenir des libérations. Prison de Mbanza-Ngungu Les responsables de parquet, la police et le personnel pénitentiaire soulignent les difficultés logistiques et le manque de sécurité pour assurer le transfert des prisonniers (transfert du commissariat au parquet, puis du parquet à la prison). Les transferts se font souvent à pieds, et sont l occasion de nombreuses évasions. Pour les longues distances (cf. de Luozi à Mbanza-Ngungu) les policiers qui accompagnent le détenu sollicitent des transporteurs privés (souvent des camions qui acceptent de transporter les prisonniers). C. La justice militaire En RDC, la justice militaire est un acteur incontournable de la justice de proximité pour les raisons suivantes : - elle fait partie intégrante de l ordre judiciaire et dispose d une présence effective sur le terrain. Dans peu d autres pays, la justice militaire occupe d ailleurs une place si importante dans l ordre judiciaire ; - elle est compétente pour juger les violations commises par des acteurs clés de la justice de proximité, à savoir la police ; - des dispositions étendent sa compétence pour juger des civils (lorsqu ils ont commis des infractions avec une arme de guerre ou lorsqu ils ont commis des crimes connexes à des infractions militaires) ; - en outre, il arrive qu elle tranche des affaires au civil, en dépit de son incompétence pour le faire. La question de la justice militaire est délicate compte tenu de son caractère corporatiste. Les magistrats militaires sont des officiers de l armée (soumis au commandement) et il leur est dès lors difficile de juger sereinement les affaires concernant des hauts cadres influents de l armée A ce propos, il faut rappeler que les magistrats militaires ne peuvent juger que des officiers de grade inférieur ou de même grade qu eux. Cela pose des problèmes dans certaines juridictions où certains officiers supérieurs bénéficient d une immunité de facto faute de magistrats de grade suffisant pour les juger. 67

68 c.1. Fonctionnement de la justice militaire et sa représentation au Bas-Congo La justice militaire est composée de : - tribunaux de police ; - tribunaux militaires de garnison et auditorats (ou parquets) militaires de garnison ; - cours militaires et auditorats militaires supérieurs 77 ; - une Haute Cour militaire à Kinshasa. Il est prévu qu il y ait un ou deux tribunaux de garnison par district ou ville (ou garnison). Dans la province du Bas-Congo il existe : une Cour militaire, et un auditorat militaire supérieur à Matadi ; trois tribunaux militaires de garnison (TMG) et trois auditorats de garnison à Matadi, Boma et Mbanza-Ngungu. Il existe également des auditorats secondaires militaires dans certains territoires (avec un inspecteur de l auditorat militaire), notamment à Kimpese. Le tribunal et l auditorat de Mbanza-Ngungu (qui couvrent les deux districts des Cataractes et de Lukaya) connaissent environ deux cents dossiers par an. Il y a en effet beaucoup de militaires dans la zone : la garde républicaine (environ deux mille militaires), le régiment blindé (environ cinq cents militaires), le commandement du camp, un hôpital militaire, une école de formation des bataillons avec actuellement un bataillon de cent militaires. S y ajoutent les forces FARDC (un bataillon), un détachement de district et les forces de police. c.1.1. Une justice malade des mêmes maux que la justice civile Les constats concernant le fonctionnement de la justice militaire sont sensiblement les mêmes que pour la justice civile : manque de magistrats et de personnel judiciaire 78, recours au personnel assumé et aux stagiaires, détérioration des infrastructures, absence de budget de fonctionnement, manque de mobilier et de fournitures de bureau, manque de documentation juridique Des juges assesseurs sont parfois recrutés comme experts pour une période déterminée, tandis que les agents de police sont régulièrement embauchés comme huissiers. Les appuis à la justice militaire sont rares, et les magistrats rencontrés ont exprimé leur frustration d être souvent écartés des programmes d aide. Seules quelques formations ou séminaires sont organisés de manière sporadique Plus des cours militaires opérationnelles en cas de guerre, insurrection ou rébellion. 78 À titre indicatif : TMG Mbanza Ngungu : six magistrats ; TMG Matadi : cinq magistrats ; TMG Boma : cinq magistrats ; Kiboma : quatre magistrats (un est emprisonné) et un auditeur ; parquet secondaire Kimpese : un magistrat et un stagiaire. 79 En termes de formation initiale, les magistrats militaires suivent le même cursus universitaire que les magistrats civils, auquel s ajoute une formation militaire de neuf mois. 68

69 c.1.2. Les immixtions du militaire au civil Il est ressorti des différents entretiens menés auprès des justiciables, des organisations de la société civile et des juridictions civiles que les magistrats militaires s ingèrent très fréquemment dans les affaires civiles. Les juridictions militaires sont en principe compétentes pour sanctionner les manquements commis par les militaires et les policiers dans l exercice de leurs fonctions et s assurer de la bonne discipline dans les rangs de l armée et de la police 80. Les juridictions civiles ont vocation à connaître de toutes les autres infractions, à moins qu elles n aient été attribuées par la loi à une autre juridiction. Ainsi, lorsqu une infraction est imputable à un membre des forces de l armée ou de la police, la juridiction militaire est compétente. Elle peut aussi être compétente si un civil a commis un crime avec une arme de guerre (dont l interprétation est extensive) ou s il est associé à la commission du litige ou de l infraction par un membre des forces armées ou de la police. En pratique on constate que les juridictions militaires tranchent de nombreuses affaires qui relèvent en principe des juridictions de droit commun. Plusieurs raisons expliquent cette pratique : - les justiciables préfèrent s en remettre délibérément à la justice militaire, réputée plus expéditive, plus efficace et plus sévère. La saisine de la juridiction militaire est un moyen efficace de régler ses comptes ou de se venger : l emprisonnement et les mauvais traitements sont plus fréquents, et la sanction se conforme d avantage au souhait du justiciable qui a souvent une idée précise de la sanction qu il veut voir infligée. C est donc moins par ignorance que par quête d efficacité ou de sévérité que certains justiciables saisissent sciemment la justice militaire ; - le volume des affaires au niveau des auditorats militaires est généralement moindre qu au civil. Mais, surtout, les magistrats voient dans les affaires civiles un moyen de gagner plus facilement de l'argent : les justiciables civils sont plus prompts à accepter de payer des amendes arbitraires pour éviter les sanctions et mauvais traitements que des militaires pourraient leur infliger ; - les magistrats reçoivent aussi des instructions de leurs supérieurs pour traiter certains dossiers pour lesquels ils ne sont pas compétents. Il est très rare alors que l auditorat déclare son incompétence. Le justiciable peut le faire, s il est assisté d un avocat qui connaît la procédure. Le parquet civil peut également faire une réquisition pour récupérer le dossier, mais il faut qu il soit informé du cas et/ou qu un justiciable en fasse la demande expresse. RCN a récemment organisé des séminaires mixtes avec des magistrats de droit commun et des magistrats militaires afin de réduire les abus de pouvoir et de compétence. Des circulaires ont également été prises pour demander aux magistrats militaires de ne pas s immiscer au civil et de respecter les limites de leurs compétences. 80 Article 156 al.1 de la Constitution : «Les juridictions militaires connaissent des infractions commises par les membres des Forces armées et de la police nationale.» 69

70 III ANALYSE DE LA JUSTICE COUTUMIERE 81 La coexistence des systèmes de tradition coutumière et de droit écrit constitue un véritable choc des cultures. La justice coutumière, qui se fonde sur les us et coutumes locales en tenant compte de la mentalité, des mœurs et des traditions des populations autochtones est plus conforme aux attentes de la population. De son côté, le juge du tribunal de paix qui applique la loi, le code civil, est souvent en porte-à-faux vis-à-vis d une coutume contraire au droit écrit, mais à laquelle la population est attachée. Insatisfaits de la justice rendue, les justiciables se montrent résistants face aux normes de droit écrit auxquelles ils ne s identifient pas. La question des liens entre la justice formelle et la justice coutumière est aussi essentielle que complexe. Elle mériterait une réflexion profonde des autorités politiques et un véritable débat de société. Certains préconisent que la reconnaissance, voire la codification, des pratiques coutumières puissent s opérer au niveau de la Commission permanente de réforme du droit congolais 82. Des propositions examinent également les possibilités d instaurer des systèmes de conciliation et de médiation. L idée consiste à faire reconnaître cette pratique par l Etat à travers plusieurs procédés : soit à travers l adoption d une loi qui organiserait la médiation et la conciliation, soit par l installation d un bureau de conciliation auprès de chaque tribunal de paix. Ces propositions mériteraient d être approfondies. Elles ne résoudront toutefois pas automatiquement la question fondamentale de la proximité et de l accessibilité de la justice. L installation d un bureau de conciliation près du tribunal de paix par exemple ne nous semble pas nécessairement réaliste ou adaptées au terrain. En effet l avantage de la justice coutumière réside principalement dans le fait qu elle est rendue directement in situ. Par ailleurs, il existe déjà une procédure d arbitrage prévue par le code civil 83. Il serait peut-être prioritaire de renforcer ce qui a été prévu et s assurer de son fonctionnement effectif. 1. Quelques éléments de décryptage de la coutume au Bas-Congo Aujourd hui, on dénombre 366 chefs coutumiers dans la province : Effectifs des chefs coutumiers dans la zone d étude Territoire de Luozi 37 Territoire de Mbanza-Ngungu 49 Territoire de Songololo 13 Total pour le District des Cataractes Ville de Matadi 4 Total pour la province du Bas -Congo informations collectées auprès des administrateurs de territoire et chefs de secteur 81 Toute les informations retranscrites dans cette partie sont tirées des rencontres menées au cours de l étude avec les chefs coutumiers, les juges assesseurs, les anciens juges coutumiers, des discussions avec les présidents de juridictions ainsi que de l enquête menée auprès des justiciables. 82 Il faut cependant nuancer ce point : dès que la coutume est codifiée, elle perd sa valeur de coutume, à savoir sa souplesse et son adaptabilité aux évolutions sociales, culturelles, etc. Le propre de la coutume est justement de ne pas être écrite, donc de n être pas figée. 83 Article 184 du code de procédure civile qui prévoit qu une sentence arbitrale peut connaître une exécution forcée à la demande du président du tribunal compétent. 84 Vingt-deux sont reconnus officiellement, vingt-cinq en attente de reconnaissance et soixante cas litigieux. 70

71 Ces chefs coutumiers, qui sont également les chefs de groupement 86, sont investis par arrêté du ministre de l Intérieur, sur proposition du gouverneur qui recommande la personne désignée à la base. La coutume au Bas-Congo n est pas uniforme : elle compte beaucoup de particularités locales et il serait vain d en faire ici une présentation exhaustive. L énoncé rapide des grandes lignes permet cependant d en percevoir la complexité et la spécificité et de comprendre en quoi elle peut être génératrice de conflits au sein de la communauté 87. A. La persistance du système matrilinéaire Contrairement aux règles de la succession prévues dans le code de la famille, la coutume au Bas-Congo reconnaît à l oncle maternel l autorité sur les enfants de sa sœur. Ce sont les neveux et non les enfants qui sont considérés comme les ayants droit directs sur les terres et les biens. Les conflits opposant les oncles et les enfants et les litiges successoraux sont toujours très nombreux. B. La matière foncière La question de la terre se cache derrière presque tous les conflits. Difficiles à résoudre de manière définitive, ces conflits ressurgissent de manière cyclique car la terre représente la seule richesse et constitue un perpétuel motif de contestation. Selon la coutume au Bas-Congo, les terres appartiennent à la famille, au clan, et non à un individu 88. Elles sont gérées par le chef de famille désigné en vertu de la tradition matrilinéaire. Chaque clan doit posséder sa terre ou au moins travailler sa propre terre. Cette coutume est par exemple très différente au Bandundu où la terre n est pas soumise à l autorisation des ayants droit ou au paiement d une redevance pour être travaillée. En droit écrit, depuis la loi Bakajika de 1967 et la loi foncière de 73 qui lui a succédée, le principe posé est que le sol et le sous-sol appartiennent à l Etat. La loi institue des modes d acquisition d un terrain diffèrent selon qu on se situe en milieu rural ou urbain. En milieu rural, l Etat concède des portions de terre aux communautés locales, et les chefs coutumiers, qui en sont les co-gardiens, perçoivent des redevances sur les terres exploitées. Pour pouvoir exploiter une terre il faut généralement conclure deux accords : un avec le chef coutumier qui est le propriétaire ancestral, et un avec l Etat qui est seul habilité à délivrer le titre de propriété (en l occurrence via le conservateur des titres immobiliers). Les deux droits s appliquent sur les terres coutumières, mais lorsqu un conflit surgit, c est le droit écrit qui s applique (le juge préfèrera souvent se prononcer sur le droit de jouissance et non sur le droit de propriété qu il sait être problématique en coutume). C. La question de l esclavage Même si la pratique de l esclavage semble avoir disparu, elle pose encore des problèmes en matière foncière et de succession lors de la comptabilisation des ayants droit. En effet, les anciens esclaves sont considérés comme des ayants droit de seconde catégorie et ne peuvent prétendre aux terres. Il n est pas rare que les descendants d esclaves saisissent le tribunal pour obtenir un droit sur la terre et s émanciper d une tradition ancestrale qui les poursuit de génération en génération sont reconnus officiellement, 107 cas litigieux en attente d une décision d arbitrage, 126 en attente d un acte officiel de reconnaissance. 86 Le groupement est une entité territoriale du secteur, et elle comprend plusieurs villages. Il y a autant de chefs coutumiers que de groupements. 87 Le président du TP Songololo estime que la moitié des affaires pénales a pour origine un conflit coutumier (destruction méchante, occupation illégale, ayant-droits ) 88 Plusieurs clans et lignées habitent le Bas-Congo. Arrivés par vagues successives, souvent d Angola, ce sont les premiers arrivants sur les terres qui sont devenus propriétaires et ont occupé le régime foncier du territoire. Les clans ou familles qui sont arrivés plus tard ne peuvent prétendre à ces terres (concession du droit de jouissance mais pas de propriété). Le travail des juges assesseurs placés près les TP est très utile pour expliquer comment s est passé l exode, quelles familles sont arrivées les premières 71

72 D. La sorcellerie S intéresser à la pratique coutumière implique de comprendre qu elle est souvent directement liée à la sorcellerie. En effet, le pouvoir du chef coutumier est généralement connecté à son pouvoir de divination et sa capacité à déceler la vérité et par conséquent trancher le litige. Il arrive aussi que le chef ait recours à un «révélateur» pour déterminer la vérité. La pratique de la sorcellerie sert à asseoir l autorité du chef. En revanche, elle est sanctionnée si elle est utilisée par des membres de communauté avec la volonté de nuire à autrui. Les cas de sorcellerie sont fréquents. Sortant du champ de la justice formelle (car il est impossible d établir le lien de causalité entre la pratique de la sorcellerie et la nuisance causée à autrui), les chefs coutumiers continuent de régler les conflits qui y sont liés à condition toutefois de ne pas enfreindre l ordre public et les bonnes mœurs La nouvelle loi sur la protection de l enfant dispose par exemple qu en cas d accusation de sorcellerie à l égard d un enfant, l auteur est puni de un à trois ans de prison (art. 160 de la loi portant protection de l enfant). Sur tous les aspects mentionnés précédemment, la présence de juges assesseurs auprès du président du TP lorsqu il siège en matière coutumière est fondamentale. Le magistrat, qui ne connaît pas toujours la langue, ni la composition des clans et familles, doit comprendre le contexte social, historique avant de chercher à appliquer la loi. 2. Le remplacement des tribunaux coutumiers par les tribunaux de paix L ordonnance-loi n 78/05 du 29 mars 1978 (faisant suite à l ordonnance-loi n du 10 juillet 1968), qui prévoit le remplacement progressif des tribunaux coutumiers par les tribunaux de paix, a été mise en œuvre de manière significative au Bas-Congo. En effet, onze des douze tribunaux de paix prévus sont aujourd hui installés et il est remarquable que les tribunaux coutumiers ont totalement disparu 89. La province du Bas-Congo est un cas d espèce sur ce point, et beaucoup ont vu dans cette mutation une forme de modernisation. Cette perception doit cependant être nuancée, car si les tribunaux coutumiers ont effectivement été remplacés, cela ne signifie par pour autant que la justice coutumière a disparu. On constate plutôt que celle-ci continue de se pratiquer mais d une manière plus informelle et opaque. A. L ancien système des tribunaux coutumiers Les anciennes juridictions coutumières étaient organisées en tribunaux de groupement (au niveau des groupements), en tribunaux de chefferie (au niveau du secteur), en tribunaux de territoire (au niveau du territoire), et en tribunaux de district (au niveau du chef-lieu de district). Ces juridictions connaissaient essentiellement des conflits claniques, conflits fonciers et affaires de divorce, et elles étaient réputées trancher immédiatement les conflits, et imposer des amendes à prix raisonnable 90. Elles étaient composées de juges coutumiers 91 nommés en principe par le ministre de la Justice. En pratique ils étaient souvent désignés par le chef de secteur et le commissaire de district 92. Les tribunaux étaient installés physiquement dans des bâtiments au niveau des territoires et des districts. Au niveau des chefferies et des groupements, il s agissait essentiellement d audiences foraines, tenues «sous l arbre» ou sous le toit appelé «Mwanzu». Tous les juges coutumiers au 89 Dans le reste du pays il n existe pas d autre province où l installation des TP ait été aussi effective et ait permis la disparition de ces tribunaux. Actuellement, seul un tiers des TP ont été installés et dans les territoires où il n y a pas de TP, les tribunaux coutumiers continuent d exercer. 90 Le montant des sanctions était estimé conformément à la coutume (pas de sanction en nature) et, en matière pénale, elles ne pouvaient excéder une peine supérieure à deux mois d emprisonnement. 91 Les chefs de groupement et de secteur étaient d office des juges des tribunaux coutumiers (ils étaient même les présidents des tribunaux de groupement et de secteur ). Les autres juges étaient désignés. 92 Les juges héritaient généralement la charge de l ancien chef coutumier et l autorité administrative ne faisait que constater l héritage de la fonction. 72

73 niveau du territoire, du secteur et du groupement étaient payés par un système de jetons 93. Ce système prévoyait l attribution d un montant donné en fonction du nombre de jugements rendus. Avec l installation des TP dans chaque territoire, les tribunaux ont disparu et les juges coutumiers ont perdu leur emploi et leur source de revenu. Si certains des juges coutumiers sont devenus par la suite assesseurs auprès des TP, la reconversion n a pas été automatique. Ils ont donc dans l ensemble mal accueilli l arrivée de ces nouveaux TP et n ont pas favorisé son appropriation par la population. B. La mise en œuvre de la réforme : une justice moins accessible et une perte de visibilité des pratiques coutumières. L idée qui sous-tendait la création des tribunaux de paix visait l installation d une justice de proximité, où le juge de paix agirait comme «un magistrat paternel et conciliateur 94». Au Bas-Congo, la compétence juridictionnelle attribuée aux TP leur a bel et bien permis d absorber les tribunaux de chefferie, de groupement, de secteur et de territoire. La perte des niveaux inférieurs de juridiction devait en principe être compensée par la tenue d audiences foraines dans les différents secteurs, mais, en pratique, cela s avère souvent impossible (voir supra). Plutôt que de rapprocher la justice des justiciables, l installation des TP a au contraire contribué à les en éloigner et à marginaliser la pratique coutumière sur laquelle plus aucun contrôle n est exercé. En effet, avant l installation des TP, les TGI exerçaient un contrôle sur les décisions rendues par les tribunaux coutumiers. Ceux-ci ayant officiellement disparu, il n existe plus de contrôle ni de visibilité sur la justice rendue de manière coutumière au Bas-Congo. Certaines mesures visaient cependant à intégrer la matière coutumière au sein du TP. En effet, la loi prévoit que le TP peut connaître des affaires coutumières et appliquer la coutume locale lorsqu'il n'existe pas (encore) de règles de droit écrit dans le domaine ou lorsque la loi autorise une application de la coutume 95. Il dispose pour cela d une chambre coutumière qui siège dans les matières relatives aux coutumes locales. Le président est assisté de deux juges assesseurs qui doivent l éclairer sur l interprétation de la coutume locale la question des juges assesseurs A. Le rôle des assesseurs Au moment de créer les TP, le législateur a souhaité éviter une césure trop brutale avec les tribunaux coutumiers, et il a décidé d installer des interprètes de la coutume locale dans ces juridictions : les juges assesseurs. Le rôle de ces juges (qui n existent qu auprès des TP) consiste à aider les juges de carrière à interpréter et appliquer la coutume locale pour les matières qui relèvent de la coutume (droit foncier coutumier, droit clanique, droit de la famille en matière coutumière ) 97 La collaboration entre les juges assesseurs et les magistrats de carrière est souvent difficile. Elle dépend en grande partie de la personnalité et de l ouverture d esprit de ces derniers. Certains se montrent totalement hermétiques à la collaboration, d autres sont au contraire satisfaits de pouvoir être 93 Hormis les présidents des tribunaux qui étaient des autorités administratives et percevaient un salaire de fonctionnaires. 94 D'après l'expression du professeur Henri Solus. 95 Le code de la famille autorise par exemple l indemnisation en nature les cas de restitution de la dot suite au divorce, ou l indemnisation pour la rupture de fiançailles. 96 L article 24 de l ordonnance-loi N 82/020 du 31 mai 1979 portant code de l organisation et compétence judiciaire prévoit que le tribunal est composé d un président et de deux juges assesseurs lorsqu il siège en application de la coutume. 97 Des dérives sont parfois constatées : ainsi, à Mbanza-Ngungu, les juges assesseurs avaient installé une chambre des sorciers et siégeaient dans l enceinte du tribunal pour trancher des cas de sorcellerie alors que le TP n est pas compétent. Le président du TGI a dû intervenir pour mettre fin à cette pratique. 73

74 éclairés sur les coutumes locales. Leur niveau d implication et de travail est donc variable d un TP à l autre. Au moment de l installation des TP, les juges assesseurs ont agi en véritable promoteurs de la réforme, informant les justiciables du remplacement des tribunaux coutumiers par les tribunaux de paix. Selon les assesseurs interrogés, les justiciables se sont montrés très réceptifs et ouverts à cette réforme, qu ils considéraient comme une forme de progrès. À l heure actuelle, les avis divergent sur l utilité réelle des juges assesseurs. S ils constituent une aide précieuse pour les magistrats en zone rurale pour la matière foncière, leur utilité est plus discutable en ville où il n existe quasiment plus de conflits coutumiers. On constate pourtant que ces juges sont encore très nombreux dans les villes, tandis que dans les zones reculées, ils sont généralement assumés. Une réaffectation équilibrée en fonction des besoins réels de chaque juridiction doit être envisagée de toute urgence. B. Le statut des assesseurs Les assesseurs sont nommés et affectés par le ministre de la Justice sur proposition du président du tribunal de paix 98. Les nominations des assesseurs ont souvent été décriées. En effet, beaucoup d entre eux étaient d anciens fonctionnaires de l Etat qui ont bénéficié de faveurs, sans que leurs aptitudes ou leur connaissance réelle de la coutume locale aient été prises en compte. On trouve ainsi au Bas-Congo des assesseurs originaires d Equateur, du Kivu (Matadi) et du Kasaï (Mbanza- Ngungu), ce qui a fortement entaché la crédibilité de l institution. Par ailleurs, peu des anciens juges coutumiers ont accédé à la fonction de juge assesseur alors que la loi prévoyait qu ils soient versés dans la nouvelle magistrature congolaise pour être nommés juges assesseurs 99. Ils étaient les mieux indiqués pour assurer la transition et son appropriation par la population. Si de nouvelles nominations devaient intervenir, il faudrait fixer des critères objectifs de désignation (prévoir par ex. une commission de sélection ou un système de désignation par les pairs). Mais elles sont peu probables. En effet, le ministre de la Justice n a pas nommé de juges assesseurs depuis plusieurs années, et ce manque de régularisation traduit la tendance actuelle qui vise à réduire le rôle des assesseurs. Dans le nouveau Statut de la magistrature, les assesseurs ne sont plus reconnus comme magistrats mais comme des consultants coutumiers : «Les juges assesseurs sont exclusivement affectés auprès des tribunaux de paix. Ils y siègent en qualité de consultants lorsque ceux-ci font application de la coutume. 100» Face à ce changement de statut, les assesseurs s organisent pour exprimer leur frustration. Ils se sentent menacés et ont entrepris diverses démarches auprès du ministre de la Justice pour que leur statut soit clarifié. À ce jour, la loi fixant le statut des assesseurs n existe toujours pas. Elle pourrait à l avenir constituer une opportunité importante de clarifier leur fonction mais aussi de réhabiliter ce corps dont la vocation initiale était d assurer le rapprochement de deux systèmes de droit en opposition sur bien des points. Car s ils sont peu à peu écartés, la population risque à terme de ne pas s y retrouver. 98 En pratique les assesseurs sont souvent désignés par le président du TP sans validation ultérieure par le ministère de la Justice. Ils deviennent des assesseurs assumés, réputés taxer régulièrement le justiciable pour s assurer un revenu. 99 Ordonnance-loi N 88/056 du 29 septembre Cf. articles 86, 87, 46 du nouveau Statut : loi organique n 06/ 020 du 10 octobre 2006 portant Statut des magistrats. 74

75 4. La persistance des pratiques coutumières ou la mise en marge d une justice bien vivante Les discussions menées au cours de l enquête avec les chefs coutumiers et notables, la population, et les chefs de juridiction confirment toutes la survivance de la justice coutumière au Bas- Congo. Si celle-ci a perdu son caractère formel avec la disparition des tribunaux coutumiers, son existence n en est pas moins réelle. Elle est devenue plus intangible, plus difficile à cerner, à quantifier, à qualifier. Elle a effectué une sorte de retour à la ruralité, au terrain, voire à la clandestinité. Les juges coutumiers sont dans l ensemble conscients des limites de leurs compétences et se montrent donc prudents dans l énoncé des pratiques quotidiennes. En résumé, la pratique de la justice coutumière peut être présentée comme suit les chefs de groupement continuent à trancher des litiges simples ; les litiges les plus fréquents concernent les litiges fonciers, les dettes, et les conflits de famille ; pour trancher le litige, ils réunissent les parties en conflit et se concertent avec les notables ; les sanctions appliquées sont généralement des amendes en nature. Elles sont décidées en fonction de la capacité de l individu ; d une manière générale, les chefs coutumiers savent que leurs compétences sont limitées et ils distinguent assez bien les matières civile et pénale. Peu ont admis trancher des litiges au pénal, mais, au fur et à mesure des entretiens, certains finissaient par admettre que dans l hypothèse où les parties, notamment les plaignants, refusaient de se saisir de la justice formelle (police ou parquet), ils étaient amenés à traiter le cas pour assurer la paix sociale ; d autres autorités, tels les chefs de secteur, cherchent à s accaparer et à trancher les litiges ; des documents sont généralement délivrés aux parties si elles le souhaitent. 5. La coexistence difficile des deux systèmes Les magistrats et le personnel judiciaire travaillant dans les zones les plus reculées déclarent qu il leur est difficile d asseoir leur autorité et l autorité de la loi dans les zones où la coutume est encore très active et où ils ressentent l hostilité de la population. Il leur est quasi impossible de rendre une justice qui soit acceptable ou satisfaisante aux yeux des justiciables, et ils se sentent en perpétuel porte-à-faux. De leur côté, les anciens juges coutumiers se sentent frustrés. Ils perçoivent mal leur perte de pouvoir alors qu ils ont l impression d être les seuls à tenter de résoudre les tensions et conflits de la population. A cela vient s ajouter des relations difficiles que les magistrats entretiennent avec les autorités politico-administratives au niveau local qui entretiennent souvent des liens étroits avec les chefs coutumiers. Il faut d ailleurs noter que les chefs de secteur sont les supérieurs hiérarchiques des chefs coutumiers. Il existe donc une solidarité parfois tendancieuse entre les chefs coutumiers et les autorités politico-administratives qui peut déboucher sur des conflits avec le pouvoir judiciaire. 75

76 Un exemple de conflit entre les autorités politico-administratives et le pouvoir judiciaire En 2007 le gouverneur de la province du Bas-Congo a créé une Commission d arbitrage des conflits coutumiers. Le motif invoqué pour créer cette commission résidait dans la lenteur et la corruption des tribunaux dans le règlement des litiges fonciers coutumiers. Cette décision a provoqué une vive réaction du Premier président de la cour d appel de Matadi qui s est directement adressé au gouverneur pour lui dire que cette commission était inconstitutionnelle et que seuls les tribunaux de paix avaient compétence pour trancher les litiges coutumiers. Il a adressé une lettre à tous les chefs de juridiction pour leur expliquer que cette commission était illégale et qu ils devaient en ignorer l existence. Il y a donc conflit entre les autorités politicoadministratives et les autorités judiciaires. Une telle commission pourrait toutefois être une solution intéressante pour gérer des conflits par des moyens de conciliation et de médiation. RCN soutient d ailleurs une commission similaire en Ituri (la Commission foncière de l Ituri) qui a déjà fait ses preuves dans la résolution de conflits fonciers entre communautés. La réussite de ce projet réside précisément dans la bonne collaboration qui a pu être instaurée entre les autorités politico-administratives, la société civile et le pouvoir judiciaire (le premier président de la Commission était d ailleurs un magistrat). 76

77 IV ANALYSE DE LA SOCIETE CIVILE 1. L assistance judiciaire Le droit d obtenir une aide juridique est contenu dans la loi de 1979 organisant le barreau et le corps des défenseurs judiciaires 101. Mais le coût de ces services est souvent prohibitif, et les services de consultation gratuite, censés prodiguer de l assistance légale aux personnes indigentes, ne sont pas vraiment opérationnels. Pour combler ce vide, les organisations de la société civile tentent d informer et accompagner les justiciables dans le processus légal, mais leurs attributions doivent être clairement délimitées pour ne pas induire le justiciable en erreur sur l étendue réelle de leurs prérogatives. A. Les avocats au Bas-Congo et les Bureaux de consultation gratuite (BCG) Le barreau de Matadi, qui a été créé en 1982, compte actuellement 177 avocats et 144 avocats stagiaires dans la province du Bas-Congo. Mais les avocats, concentrés dans les centres urbains, sont absents des zones rurales. Répartition géographique Avocats au tableau Avocats stagiaires Total au Bas-Congo (321) Matadi (181)* Boma (89) Mbanza-Ngungu (49) Cité de Nsioni (2) 1 1 Tshela (0) 0 0 * Huit avocats inscrits au barreau de Matadi prestent à Kinshasa (six au tableau et deux stagiaires) On ne dénombre aucun avocat sur tout le territoire de Luozi. Pour combler la pénurie d avocats, les parties se font généralement accompagner des membres de la famille les plus à même de défendre leurs intérêts. Ou bien, elles attendent la tenue d une audience pour identifier un avocat plaidant dans une autre affaire, ce qui provoque immanquablement la remise de l audience. a.1. Les Bureaux de consultation gratuite (BCG) : Le principe Toute personne désirant bénéficier des services de consultation gratuite doit se rendre au service social de la commune munie des pièces attestant de son état d indigence. Après avoir mené une enquête sur la personne, la commune lui délivre un certificat d indigence qu elle peut présenter au juge pour qu un avocat d office (ou pro deo) soit désigné. Dans la pratique toutefois les services communaux monnaient l obtention du certificat et le justiciable se voit contraint de débourser pour être reconnu indigent. 101 Ordonnance-loi 79/028 du 28 septembre 1979 portant organisation du barreau, du corps des défenseurs judiciaires et du corps des mandataires de l Etat. 77

78 Les avocats peuvent être désignés d office de trois manières 102 : la commission d office par le chef de juridiction ; la désignation par le bâtonnier à la demande d un chef de juridiction ; la désignation par le président du BCG pour les cas d indigence. C est le bâtonnier qui est responsable de mettre en place au sein du Conseil de l ordre une Commission de consultation gratuite qui organise l assistance judiciaire et le fonctionnement du Bureau de consultation gratuite 103. Cette Commission est composée de trois membres désignés par le bâtonnier ainsi que de tous les avocats stagiaires qui sont d office membres permanents de la Commission. Barreau et Bureau de consultation gratuite à Matadi Dans la pratique, l existence de ce Bureau est inconnue des justiciables (cf. résultats de l enquête auprès des justiciables où 89% des personnes interrogées ont déclaré ne jamais avoir entendu parler de ce service). En l absence d espaces et de campagnes d information, le justiciable doit compter sur la bonne foi du personnel des greffes ou des magistrats pour l informer de l existence de ce service et lui indiquer les démarches à suivre. Or ceux-ci profitent souvent de l ignorance du justiciable pour s ériger en avocats pro deo moyennant le paiement d une petite somme. Entre octobre 2008 et janvier 2009, le barreau a assisté gratuitement quatorze à quinze dossiers pour toute la province alors pourtant que la majorité des justiciables sont indigents et que 147 avocats peuvent exercer la consultation gratuite (les trois membres de la Commission BCG, plus les 144 avocats stagiaires). Une assistance gratuite qui coûte trop cher L assistance légale gratuite est un service public de l Etat pour les justiciables indigents, et à ce titre les avocats pro deo devraient être payés par le Trésor public. Or aucune disposition légale n organise l indemnisation de ce service. En pratique, les avocats pro deo ne sont pas payés, et d une manière générale le barreau de Matadi ne reçoit aucune aide, ni de l Etat, ni de la communauté internationale 104. Les avocats du Bas-Congo se sont adressés au gouverneur de la province pour dénoncer ce manque d indemnisation pour la consultation gratuite et pour obtenir de l aide, mais cela n a rien donné. L absence d indemnisation est problématique à un double niveau : - les avocats sont récalcitrants à fournir ces services gratuits et freinent la publicité de ce service. Ils craignent pour la survie de leurs activités si l assistance gratuite se démocratisait excessivement ; 102 Articles 90 et suivants du règlement intérieur cadre du barreau CNO/08/87 du 19 août 1987 tel que modifié par la décision du CNO N 04 du 24 février L article 43 de l ordonnance de 1979 stipule que le conseil de l ordre «organise un bureau de consultations gratuites en faveur des indigents et détermine les conditions de son fonctionnement». 104 Seule l organisation RCN a accordé une aide ponctuelle (mobilier et documentation juridique) au barreau. 78

79 - les justiciables sont mis à contribution pour couvrir les frais courants liés au suivi et à la défense de leur dossier (transport, copies, hébergement, communication ) Bien qu il ne s agisse pas d honoraires, il est difficile pour le justiciable de comprendre les nuances des sommes qui lui sont demandées. C est ainsi que s est installé le sentiment général que l assistance d un avocat, même gratuite, coûte cher. De plus, le justiciable sait que s il ne contribue pas, son dossier risque d être abandonné par l avocat. Le lien de confiance est fragile. Toutes les personnes interrogées (justiciables, organisations de la société civile, magistrats ) sont unanimes pour déplorer le manque d information sur l existence et le mode de saisine des BCG 105. C est par ignorance que ce service n est pas d avantage sollicité par les justiciables, service qui, par ailleurs, contribue à améliorer la qualité de la justice rendue. En effet, les présidents de juridiction reconnaissent préférer qu un justiciable soit assisté d un avocat car les arguments juridiques sont mieux construits et la qualité de la décision s en ressent. a.2. La perception des avocats sur le fonctionnement des tribunaux et sur la société civile Les avocats rencontrés au cours de l étude ont stigmatisé la lenteur de la justice rendue ainsi que le faible niveau de formation des magistrats et du personnel judiciaire. Ils regrettent notamment que les magistrats ne soient pas suffisamment encadrés au début de leur carrière comme c était le cas avant avec le stage probatoire des magistrats. En ce qui concerne l information du public sur l existence des services de consultation gratuite, ils reconnaissent qu elle est primordiale mais ne voient pas pourquoi le barreau devrait en supporter tous les frais. La Commission de consultation gratuite avait élaboré deux idées qui méritent d être mentionnées : - l installation au tribunal et parquet de boîtes à lettres dans lesquelles les justiciables pourraient déposer des doléances à l attention des avocats ; - l installation d une ligne téléphonique pour informer les citoyens sur leurs droits et sur le moyen d accéder à une assistance judiciaire gratuite. Faute de financements, ces projets sont restés lettre morte. Quant à la collaboration avec les organisations de la société civile (OSC), elle est quasi inexistante. Les avocats ont exprimé un réel agacement, voire de l hostilité envers ces organisations pour deux raisons : - soit elles outrepassent leurs fonctions et induisent en erreur le justiciable en prétendant pouvoir les défendre alors qu elles ne sont pas habilitées à le faire. Les avocats ont clairement posé le problème du niveau des OSC ; - soit elles leur volent la clientèle en défendant les justiciables à leur place (cela concerne les organisations qui disposent d avocats en leur sein). Il existe donc aussi un rapport de concurrence. Compte tenu des besoins immenses pour mieux informer le justiciable, il apparaît pourtant que la collaboration entre les avocats et la société civile est cruciale en vue de coordonner l aide et de développer un réseau d assistance gratuite plus accessible et plus efficace. 105 Le président du tribunal de paix de Kimpese déclare n avoir jamais vu au cours de sa carrière de cas de consultation gratuite, sauf pour un cas de mineur où l assistance d un avocat est une obligation légale. 79

80 B. Les défenseurs judiciaires La fonction des défenseurs judiciaires a été créée par l ordonnance de 1979, en vue de faire face à la pénurie d avocats. Cette mesure semble devenue obsolète avec le temps au Bas-Congo : comme cela a été mentionné précédemment, c est moins le nombre d avocats qui est problématique que leur représentation sur le territoire. Les défenseurs judiciaires prêtent serment devant le président du TGI 106 qui est leur chef hiérarchique et préside le syndic (l équivalent du barreau). Le corps des défenseurs judiciaires ne s est pas doté comme les avocats de textes réglementaires pour régir la profession (cf. le règlement intérieur cadre des avocats). Les défenseurs judiciaires sont beaucoup moins nombreux dans la province que les avocats. Dans la zone d étude on a dénombré 27 défenseurs judiciaires. Nombre de défenseurs judiciaires Matadi Mbanza-Ngungu Luozi Kimpese * 1 * On nous a rapporté la présence d un défenseur judiciaire à Luozi, mais l information n a pas pu être confirmée par le président du TGI à Mbanza-Ngungu. À Matadi, les défenseurs judiciaires n organisent pas d assistance gratuite, mais ils semblent vouloir développer ce service. Au moment des affaires BDK notamment, le syndic a demandé au président du TGI de pouvoir défendre les dossiers des personnes mises en cause (ce qu il a autorisé). Selon lui, c est parce que les justiciables ignorent l existence de ce service qu ils ne le réclament pas d avantage. De manière globale, les défenseurs judiciaires sont mal perçus par les avocats qui les considèrent comme le résidu des étudiants en droit, inaptes à devenir des avocats. Bon nombre des défenseurs judiciaires sont soit des anciens qui n ont plus la possibilité de faire des études, soit des étudiants disposant d un graduat et qui deviennent avocats dès qu ils ont la licence. L expérience en tant que défenseur leur sert de stage pratique (ceci est différent des avocats stagiaires qui sont déjà des avocats), et, pour cette raison, les défenseurs occupent rarement longtemps cette fonction 107. C. Les para-juristes Face aux difficultés que rencontrent les justiciables pour bénéficier des services d un avocat (difficultés financières ou d accessibilité géographique), certaines organisations jouent un rôle central d information et d orientation du public. La terminologie pour qualifier les appuis et renforcements de capacité de ces organisations est très riche et reflète la diversité des initiatives sur le terrain : formation de médiateurs du droit, ou de para-juristes, installation de Maisons de la justice, ou de cliniques juridiques, assistance para-légale Tous ces services, généralement gratuits sont largement appréciés par le justiciable même s ils demeurent encore peu utilisés (voir infra appréciation de la justice de proximité par les justiciables). Ils démontrent une nouvelle fois l auto prise en charge de la population face au désengagement de l Etat. La question se pose de savoir jusqu à quel point ces organisations peuvent réellement combler la déficience des services d assistance légale? En effet peu d ONG sont compétentes pour exercer une défense des cas en justice (cela implique qu elles disposent d avocats en leur sein) et certaines dépassent leur mandat et s arrogent des compétences pour trancher les litiges. Il est donc nécessaire de définir leur rôle et circonscrire leurs compétences pour éviter les confusions. 106 Pour plaider en dehors du ressort du TGI, ils doivent obtenir une autorisation du 1 er Président de la Cour d Appel. 107 Il y a actuellement sept défenseurs judiciaires au TGI de Mbanza-Ngungu : trois sont permanents, les quatre autres sont des étudiants stagiaires appelés à devenir avocats. 80

81 Un exemple à Luozi L EFIDH (Ecole de formation internationale des droits de l homme) est une organisation congolaise basée à Kinshasa et spécialisée dans la formation aux droits humains. Elle entreprend actuellement de s implanter à Luozi. Son objectif est de former et mettre en place un réseau d activistes des droits humains à travers tout le territoire. À l issue de la formation en cours à Luozi, et qui se décline en douze modules, chaque participant recevra un brevet d aptitude à la défense des droits de l homme, une carte de service, un macaron international, et les syllabus de cours (pour un montant forfaitaire d environ 50 USD). De plus, ils seront à leur tour habilités à reproduire les formations et élargir le réseau d activistes sur le territoire. Si cette initiative doit être encouragée pour sa capacité à atteindre des zones enclavées, elle doit aussi être surveillée et nuancée. En effet, la terminologie utilisée par l EFIDH pour qualifier ses activités est ambiguë : en présentant les activistes comme des défenseurs ou des «avocats du citoyen», ou en appelant les cadres de l association les «inspecteurs des droits de l homme», il y a matière à semer la confusion dans l esprit de justiciables peu éduqués et peu enclins à distinguer clairement qui peut ou non les défendre en justice. 2. Les organisations de la société civile La société civile congolaise a émergé essentiellement dans les années 90 avec le déclin de la dictature. Les organisations de défense des droits de l homme ont été les premières à dénoncer les abus du pouvoir et à incarner une forme d opposition, agissant parfois comme de véritables organisations politiques. Progressivement, les organisations de la société civile semblent être plus en phase avec leurs attributions, même si les besoins restent encore énormes pour les aider à consolider leur rôle au sein de la société. A. Le partenariat mis en œuvre avec les organisations de la société civile dans le cadre de l enquête Dix organisations ont été sélectionnées à Matadi et dans le district des Cataractes pour participer à l enquête sur la justice de proximité au Bas-Congo. Elles ont été mises à contribution de deux manières : - pour mener l enquête auprès des justiciables ; - pour participer à deux «focus group» en vue d échanger sur leur perception des dysfonctionnements de la justice de proximité et d identifier en quoi elles peuvent jouer un rôle positif dans le rapprochement de la justice et des justiciables. Il convient de préciser que cet exercice a fait apparaître de fortes disparités dans le niveau des OSC partenaires. La société civile ne peut être vue comme un ensemble homogène, il est important de distinguer le mandat de chaque organisation, sa composition, ses ressources, le niveau de qualification de ses représentants pour définir les besoins spécifiques de chacune d entre elles. Dans l ensemble les organisations se sont déclarées très satisfaites d avoir pu participer à un tel exercice. Elles ont déclaré avoir bénéficié d un véritable renforcement de leurs capacités à mener une enquête en découvrant quel type d outils devait être conçu préalablement, ainsi que les grilles de dépouillage qui permettent une analyse systématisée des résultats. Elles ont en outre affirmé avoir beaucoup appris au contact des justiciables et avoir réalisé l importance d accorder un temps de parole aux personnes que l on prétend défendre ou représenter. 81

82 La perception de la justice de proximité par les OSC et du rôle qu elles peuvent jouer Dans l ensemble, l appréciation de la justice de proximité par les OSC se rapproche des conclusions des enquêtes menées auprès des justiciables. Les principaux problèmes de la justice sont : Son manque d accessibilité en termes de distance (certaines organisations sont favorables au rétablissement des tribunaux coutumiers) ; Son coût excessif / la corruption ; Le fait qu elle soit rendue en français ; Le fait qu elle ne soit pas comprise du justiciable (méconnaissance des lois et des procédures). Les OSC reprochent principalement au personnel des tribunaux d être corrompu et soumis au trafic d influence. Pour eux, le problème ne se situe pas tant dans leur niveau de formation, mais plutôt dans le manque de moyens mis à leur disposition. Ils expriment une forme d indulgence à leur égard, et préconisent des rotations du personnel pour éviter que les mauvaises pratiques s installent durablement. Pour les organisations consultées, les trois axes prioritaires pour lutter contre ces dysfonctionnements consistent à : - renforcer les contrôles et sanctions ; - réduire les frais de justice et en rationaliser le mode de perception ; - informer le justiciable sur la procédure et les frais de justice. Par ailleurs les OSC confirment unanimement que la justice militaire s immisce régulièrement au civil, qu elle est corrompue et violente (mauvais traitements). Quant aux OPJ, ils sont accusés principalement : - de corruption et d imposer des amendes arbitraires ; - d abus d autorité et de provoquer des tracasseries aux justiciables. Seule l amélioration des conditions de vie et de travail de la police permettra de combattre ces fléaux. Il faut également les sortir de l isolement et exercer des contrôles plus réguliers sur leur travail et appliquer des sanctions. La société civile ne considère pas, comme pour les magistrats, que le problème réside dans le niveau de la police. Ils connaissent leurs fonctions mais abusent sciemment de leur autorité. Quant à définir leur rôle, les OSC considèrent : - servir principalement à l information et l éducation des justiciables ; - seules les organisations comptant des avocats ont déclaré pratiquer du conseil et de la défense légale ; - 60% des organisations admettent régler des litiges : principalement des conflits internes ou entre deux organisations (rôle de médiation). À la question de savoir laquelle de la justice formelle ou de la justice coutumière est prédominante dans leur ressort, les OSC considèrent que le rapport s équilibre : le justiciable s adresse en premier lieu au chef coutumier et s en remet à la justice formelle si la solution ne lui convient pas. L appréciation de la justice coutumière est mitigée : elle est effectivement plus rapide, plus équitable, plus proche physiquement, et plus soucieuse de la paix sociale, mais sa compétence matérielle est limitée, elle est non écrite et ne garantit pas la sécurité juridique, et, enfin, elle est en perte de vitesse. 82

83 B. Les recommandations d action formulées par la société civile Au cours du focus group 2, et après avoir analysé les réponses données par les justiciables, les organisations ont travaillé en ateliers pour déterminer les actions à mettre en œuvre pour les justiciables et pour les OSC : Actions à mettre en œuvre pour les justiciables : - organiser un dialogue social mensuel : création d un espace de discussions entre les autorités, la société civile et la population ; - répercuter les discussions du dialogue mensuel par l animation de débats dans les zones isolées ; - organiser des activités artistiques de sensibilisation : festival de théâtre populaire, promotion de groupes musicaux ; - créer des outils d information et de vulgarisation du droit sur la loi, les procédures, et la répartition des compétences entre les autorités (affiches, dépliants, bandes-dessinées ) Favoriser la disponibilité d outils en plusieurs langues ; - créer des partenariats avec les médias locaux pour la diffusion d émissions de vulgarisation et de débats en direct ; Actions à mettre en œuvre pour les OSC : - inciter les OSC à se faire identifier et enregistrer auprès des autorités compétentes ; - sensibiliser les OSC sur le rôle du BCG et créer des partenariats ; - appuyer la mise en place de réseaux thématiques de la société civile (avec des experts de différentes matières : avocats, médecins ) Les aider à mieux se connaître et mieux collaborer entre elles ; - renforcer leurs capacités en matière de leadership, de gestion et de management ; - encourager la création de services juridiques en interne ; - les doter en matériel de sensibilisation ; - renforcer leurs capacités en droit (droit pénal, procédure civile et pénale, code de la famille, Constitution, organisation et compétence judiciaires ) ; - renforcer les capacités des OSC en matière de médiation et de conciliation ; - faciliter leur transport pour effectuer le suivi sur le terrain ; - les doter de documentation juridique ; - renforcer leurs capacités de plaidoyer ; - renforcer leurs capacités de traduction en vue de l élaboration d outils en plusieurs langues. 83

84 84

85 VII LISTE DES ANNEXES ANNEXE 1 LISTE DES PERSONNES RENCONTREES PAR L EQUIPE DE CONSULTANTS ANNEXE 2 LISTE DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE PARTENAIRES 85

86 Annexe 1 Liste des personnes rencontrées par l équipe de consultants À Kinshasa : Pierre Kanika, gestionnaire du secrétariat du Comité mixte de justice. Pierre Akele Adau, président de la Haute-Cour militaire, conseiller du ministre de la Justice. Keto Diakanda, ancien Premier président de la cour d appel de Matadi. Marie-Thérèse Kenge Ngomba, conseillère du ministre de la Justice. Lwamba Katansi Ntaka Bayoko, ancien premier avocat général de la République, avocat à la cour d appel de Kinshasa. A participé à la mission conjointe UE/JICA/DFID au Bas-Congo. À Matadi : Jean-Marc Nzeyidio Lukombo, maire de la ville de Matadi. Anselme Shimatu, président de la cour d appel de Matadi. Emmanuel Minga Nyamakwey, procureur général du parquet général près la cour d appel de Matadi. Fidèle Ndemosi Bisangamani, président du tribunal de paix de Matadi. Mavungu Roger, premier substitut du procureur du parquet de Matadi. Major Baku-Konde, Inspecteur Adjoint, Commissariat 1524 de Matadi. Perry Mbibong, officier des droits de l homme, bureau provincial de la Monuc à Matadi. Blanchard Kepiasila, assistant de programme, section Etat de droit, bureau provincial de la Monuc à Matadi ( ) kepiasila@un.org Katendi Nkayilu, chef coutumier du village de Kinzao, Matadi. Jean-Pierre Longo Sita Nsiku, chef coutumier du village de Luadi, Matadi. Maitre Gabriel Phambu Mbodo, avocat du barreau de Matadi, président de la commission BCG pour la province. Réside à Boma. Maître Matuta Kiese, avocat du barreau de Matadi, représentant de la Commission BCG pour la ville de Matadi. Maître Mbungu Tsende, avocat du barreau de Matadi, représentant de la Commission BCG à Mbanza-Ngungu. Dans les Cataractes : Luozi Jean Germain Kapula, administrateur du territoire de Luozi. François Mwambu, président du tribunal de paix de Luozi. Isidore Yunga, juge assesseur au tribunal de paix de Luozi. Kikata Bikindi Prospère, premier substitut, chef du parquet secondaire de Luozi. Valentin Lusaku Nsimba, chef du groupement Tembisa, Luozi. 86

87 Cornélie Buta Kiangebeni, chef du groupement Kingila, Luozi et Sébastien Kitantu Kiakanda, secrétaire. Commandant Daniel Bondeke, commissaire principal du commissariat du territoire de Luozi. Polycarpe Bienvenue Bazoia Mansiantima, inspecteur provincial de l Ecole de formation internationale des droits de l homme (EFIDH, organisation de la société civile basée à Kinshasa et qui s implante actuellement au Bas-Congo). Songololo / Kimpese Daniel Freddy Kambu Ki Phezo, administrateur du territoire a.i. de Songololo. Julien Kikunzukani Kapunga, président du tribunal de paix de Songololo. Sesep Lutua, premier substitut et chef de parquet intérimaire du parquet secondaire de Songololo. Secrétaire titulaire du parquet secondaire de Songololo. Ducs et duchesses du groupement de Palabala, Songololo. Ancien juge du tribunal coutumier du secteur de Kenge, Songololo. Mbanza- Ngungu Dieudonné Kule Bubazo, commissaire de district des Cataractes. Jean Oscar Botoko Yankangu, administrateur de territoire de Mbanza-Ngungu. Aimé Mayengo Luzimbu, président du TGI de Mbanza-Ngungu. Gode Bile Mbuesenge, premier substitut du parquet de grande instance de Mbanza-Ngungu, président du tribunal de paix de Mbanza-Ngungu. Mbala Mbumba, directeur de la prison de Mbanza-Ngungu. Elsen Etono Lebayame, auditeur militaire de garnison de Mbanza-Ngungu. Capitaine Tsengele, commissaire principal du commissariat de territoire de Mbanza-Ngungu 87

88 Matadi Annexe 2 Liste des organisations de la société civile partenaires AMEBAC (Association des enseignants du Bas-Congo) Entraide mutuelle et résolution des problèmes sociaux, encadrement et vulgarisation du droit. Personne de contact : Théophile Miafuna Bafuka. BUPSOC / ONGDH (Bureau de promotion socio-culturelle) Monitoring et reporting des violations des droits humains, lobbying et plaidoyer, éducation et sensibilisation, assistance judiciaire. Personne de contact : Pamphile Mbuang. ONG Hexagone Protection des droits de l enfant. Sensibilisation, éducation. Personne de contact : Jean-Paul Digata. Mbanza-Ngungu OCDH (Observatoire congolais des droits humains) Dénonciation des violations des droits fondamentaux et défense de cas (avocats), sensibilisation. Spécialisation torture et dignité humaine. Personne de contact : John-Peter Mujandy. information et AVDH (Assistance aux victimes de violations des droits de l homme) Accompagnement juridique et judiciaire des victimes de violences sexuelles, conférences et débats (écoles, églises ) Assistance judiciaire gratuite. Personne de contact : Jean-René Muaka. Luozi Fraternité Internationale des Prisons Assistance des personnes détenues et monitoring des droits de l homme dans les prisons. Personne de contact : Bonaventure. Commission Justice et Paix, Paroisse Notre Dame de Fatima Conciliation des familles, orientation et sensibilisation des justiciables. Personne de contact : Isidore Yunga. Kimpese / Songololo Coordination de la société civile de Songololo Dénonciation des violations, lobbying, animation de conférences et sensibilisation sur les droits humains. Personne de contact : Raymond Tona Tona. COFEKIM (Collectif des femmes de Kimpese) Information et éducation des femmes sur leurs droits. Personne de contact : Alice Makayi. COOPADIS / CEFORDI Appui, conseil et réinsertion des nécessiteux et des personnes violentées. Personne de contact : Istar Diyabanza Zola. 88

89 0

90 1

91 2

92 La Justice de proximité au Bas Congo (Ville de Matadi et districts des Cataractes) L Agence Japonaise de Coopération Internationale (JICA) a réalisé, par l intermédiaire de l ONG RCN Justice & Démocratie, une étude sur le fonctionnement de la justice de proximité au Bas-Congo. L étude s est déroulée du 26 février au 30 avril 2009 au Bas-Congo (dans la ville de Matadi et le district des Cataractes) et à Kinshasa. Elle a été coordonnée par Anne-Aël POHU, experte internationale en administration de la justice. 3 Japan International Cooperation Agency

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