FLASH ÉCONOMIE. Ce qui a structuré les marchés financiers depuis 35 ans va disparaître RECHERCHE ÉCONOMIQUE
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- Claudine Mathieu
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1 ÉCONOMIE RECHERCHE ÉCONOMIQUE 3 juin 1 N 7 Ce qui a structuré les marchés financiers depuis 35 ans va disparaître Les marchés financiers ont été structurés depuis plus de 35 ans par deux évolutions (nous regardons les situations des Etats-Unis et de la zone euro) : - la baisse de l inflation, due essentiellement à la flexibilité accrue des marchés du travail, et qui a conduit à la baisse des taux d intérêt à long terme ; - la hausse des marges bénéficiaires (de la profitabilité) des entreprises, due à la déformation du partage des revenus au détriment des salariés, c est-à-dire aussi à la flexibilité accrue du marché du travail. Ces deux évolutions ont conduit : - à un rendement élevé des obligations et aussi de l immobilier, avec la baisse des taux d intérêt à long terme ; - à un rendement élevé des actions, avec la hausse des marges bénéficiaires. Mais il est difficile d imaginer que ces évolutions se prolongent : on ne peut pas perpétuellement comprimer la part des salaires dans le PIB. Si, dans le futur, il y a remontée de l inflation, des taux d intérêt à long terme et recul des marges bénéficiaires, il faut comprendre que les rendements à la fois des obligations, des actions et de l immobilier seront plus faibles, d autant plus que la croissance potentielle en volume est aussi plus faible que dans le passé. Que vont faire alors les investisseurs? Rédacteur : Patrick ARTUS
2 Au départ, la flexibilité accrue des marchés du travail Depuis le début des années 19, les marchés du travail (nous regardons les Etats-Unis et la zone euro) ont été rendus plus flexibles, ce qui a conduit au freinage des salaires (graphique 1a) et des coûts salariaux unitaires (graphique 1b). Graphique 1a Salaire nominal par tête (hors benefits, GA en %) Graphique 1b Coût salarial unitaire (GA en %) Sources : Datastream, BLS, BCE, NATIXIS Etats-Unis Zone euro Sources : Datastream, BLS, BCE, NATIXIS Il en résulte les deux évolutions qui ont structuré les marchés financiers depuis le début des années 19 : (1) la baisse de l inflation, et en conséquence la baisse des taux d intérêt à long terme (graphiques a/b) ; Graphique a Inflation (CPI, GA en %) Graphique b Taux d'intérêt à 1 ans sur les emprunts d'etat (en %) 15, 1,5 Etats-Unis Zone Euro 15, 1,5 17,5 15, Etats-Unis Allemagne 17,5 15, 1, 7,5 5,,5 1, 7,5 5,,5 1,5 1, 7,5 5,,5 1,5 1, 7,5 5,,5,,,, Sources : Datastream, BLS, Eurostat, NATIXIS -, ,5 -, ,5 () la déformation du partage des revenus au détriment des salariés (graphiques 3 a/b), d où la hausse tendancielle de la profitabilité des entreprises (graphique ). Flash 1 7 -
3 Graphique 3a Etats-Unis : salaire réel et productivité par tête (1 en 19:1) Graphique 3b Zone euro : salaire réel et productivité par tête (1 en 19:1) 1 Salaire réel par tête (hors benefits, déflaté par le prix du PIB) Productivité par tête 1 1 Salaire réel par tête (déflaté par le prix du PIB) Productivité par tête Sources : Datastream, Eurostat, NATIXIS Sources : Datastream, BEA, NATIXIS Graphique Profits après taxes, intérêts et dividendes (en % du PIB valeur) Sources : Datastream, BEA, BLS, NATIXIS Conséquence de ces évolutions structurantes, des rendements plus élevés pour toutes les classes d actifs La baisse tendancielle des taux d intérêt à long terme et la hausse tendancielle des marges bénéficiaires des entreprises depuis le début des années 19 ont conduit à : (1) des rendements obligataires en moyenne élevés (graphique 5, tableau 1) ; Graphique 5 Rendements obligataires 3 Etats-Unis Allemagne Flash 1 7-3
4 Tableau 1 Moyenne sur 19-1 des rendements obligataires* Etats-Unis Allemagne Moyenne 7,7,9 (*) Taux 1 ans Gov. - *(Variation sur un an du Taux 1 ans Gov.) () des rendements des actions en moyenne élevés (graphiques a/b, tableau ) ; Graphique a Indices boursiers (1 en 19:1) Graphique b Rendement des actions* (en %) S&P Eurostoxx S&P Eurostoxx (*) Indice boursier (GA en %) + Taux de dividendes Tableau Rendements des actions : moyenne sur 19- Moyenne S&P 1,53 Eurostoxx 1,3 Source : Calcul Natixis (3) avec la baisse des taux d intérêt à long terme, des rendements élevés de l immobilier (graphiques 7 a/b, tableaux 3 a/b), avec la hausse forte des prix de l immobilier (graphiques a/b). Flash 1 7 -
5 Graphique 7a Rendement de l'immobilier résidentiel (IPD, en % par an) Graphique 7b Rendement de l'immobilier commercial (IPD, GA en %) Sources : Datastream, IPD, NATIXIS Sources : Datastream, IPD, NATIXIS Tableau 3a Rendement de l'immobilier résidentiel (Moyenne ) En % Etats-Unis, Zone euro,9 Sources : Datastream, IPD, NATIXIS Tableau 3b Rendement de l'immobilier commercial (Moyenne ) En % Etats-Unis 1,5 Zone euro, Sources : Datastream, IPD, NATIXIS Graphique a Prix des maisons (1 en 199:1) Graphique b Prix de l'immobilier commercial (1 en :1) Sources : Datastream, Moody's, RCA, NATIXIS Flash 1 7-5
6 On a donc eu, grâce à la baisse tendancielle des taux d intérêt à long terme et à la hausse tendancielle des marges bénéficiaires des rendements moyens de 19 à 1 simultanément élevés sur les obligations, les actions et l immobilier. Mais ces évolutions ne peuvent pas se prolonger Il y a une limite à la baisse du poids des salaires dans le PIB, à la déformation du partage des revenus au détriment des salariés (graphiques 3 a/b et plus haut). Il finit par y avoir une réaction politique, avec soutien des plus bas salaires, effort pour réduire les inégalités. Ceci commence à se voir aujourd hui aux Etats-Unis, en Allemagne, avec les hausses du salaire minimum. Si le partage des revenus ne se déforme plus au détriment des salariés, si le pouvoir de négociation des salariés remonte, il faut attendre une inversion des tendances qui ont structuré les marchés financiers depuis 35 ans, c est-à-dire : - une remontée de l inflation et des taux d intérêt à long terme ; - une diminution des marges bénéficiaires. Ceci se produira de plus dans une situation de croissance potentielle faible (graphique 9). Graphique 9 Croissance potentielle* (volume, GA en %) (*) Productivité par tête lissée sur les 5 dernières années + population active 1 Sources : Datastream, BEA, Eurostat, NATIXIS Si la croissance en volume est faible, si les taux d intérêt à long terme remontent, si les marges bénéficiaires reculent (ou au moins n augmentent plus), les rendements à la fois des obligations, des actions et de l immobilier vont être dans le futur nettement faibles que dans le passé. Flash 1 7 -
7 Synthèse : que vont faire les investisseurs? Avec l inversion de ce qui a structuré les marchés financiers depuis le début des années 19 (passage d une baisse à une hausse des taux d intérêt à long terme, passage d une hausse à une baisse des marges bénéficiaires), les investisseurs des pays de l OCDE vont être confrontés à une baisse des rendements à la fois des obligations, des actions, de l immobilier. Ceci implique : - que la «rotation» des portefeuilles des obligations vers les actions, normale quand les taux d intérêt à long terme remontent, ne sera pas très tentante ; - que les actifs financiers des pays émergents, où la croissance reste plus forte, où la productivité progresse avec le rattrapage (graphique 1), vont être attrayants. Graphique 1 Ensemble des émergents y compris Chine : PIB en volume et productivité (GA en %) 1 PIB en volume Productivité par tête Flash 1 7-7
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