ARCHÉOLOGIE, HISTOIRE ET ANTHROPOLOGIE DE LA PRESQU'ÎLE DE LA HAGUE (MANCHE) Analyse sur la longue durée d un espace naturel et social cohérent

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1 ARCHÉOLOGIE, HISTOIRE ET ANTHROPOLOGIE DE LA PRESQU'ÎLE DE LA HAGUE (MANCHE) Analyse sur la longue durée d un espace naturel et social cohérent Première année de recherche 2005

2 Ce volume est une publication du Projet collectif de recherche " Archéologie, histoire et anthropologie de la presqu'île de la Hague (Manche). Analyse sur la longue durée d'un espace naturel et social cohérent ". Directeur de la publication Cyril Marcigny avec la collaboration d Emmanuel Ghesquière Comité de pilotage 2005du PCR Vincent Carpentier et Cyril Marcigny Ce numéro a été réalisé avec l'aide de Cyril Damourette, Erik Gallouin et Jean-Marc Richard Notices catalographiques Marcigny, Cyril dir. et Ghesquière, Emmanuel coll. Archéologie, histoire et anthropologie de la presqu'île de la Hague (Manche). Analyse sur la longue durée d'un espace naturel et social cohérent. Première année de recherche, Beaumont-la-Hague : p. :ill., tabl., cartes. Mots clefs Basse-Normandie, Manche, la Hague, archéologie, histoire, anthropologie ISSN : Les avis exprimés dans les articles n'engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Page de couverture Laurent Juhel Mise en Page Cyril Damourette et Jean-Marc Richard Diffusion Le Tourp, Communauté de Communes de la Hague ZA de la Maison Georges BP Beaumont-Hague Cedex letourp@lahague.com

3 Avant Propos Cette table ronde et ce volume sont les premières manifestations du projet collectif de recherche (PCR) " Archéologie, histoire et anthropologie de la presqu'île de la Hague (Manche). Analyse sur la longue durée d'un espace naturel et social cohérent " (co-dirigé par V. Carpentier, D. Cliquet, E. Ghesquière, L. Lespez et C. Marcigny). Ce programme d'études, tout entier consacré à une étude diachronique (dans la longue durée, du Paléolithique à nos jours) de la presqu'île de la Hague, en est à sa première année de recherche mais il a semblé d'ores et déjà opportun de mettre rapidement à la disposition du grand public et des chercheurs le résultat de nos travaux : documents inédits, inventaires, notices de sites, recensions bibliographiques ou articles. Organisé en collaboration avec la Communauté de Communes de la Hague et le Manoir du Tourp, cette journée d'études et ce document ont pour premier objectif de faire un point sur les travaux archéologiques, historiques et anthropologiques organisés sur le territoire de la Hague et de diffuser ces résultats auprès du plus grand nombre. Le retour rapide vers le public des travaux du PCR est en effet une des missions que se sont assignés les responsables de ce groupe de travail réunissant des chercheurs de tout les horizons, institutionnels ou bénévoles. C'est donc avec le plus grand plaisir que nous vous invitons à découvrir les résultats de cette première année de recherche dans la Hague consacrée à un bilan documentaire : recensement période par période, thème par thème des acquis de ces dernières années. Nous espérons vivement que d'autres volumes viendront compléter ces premières données et contribueront ainsi efficacement à une meilleure connaissance de la Hague, territoire complexe occupé depuis la nuit des temps. Cyril MARCIGNY Institut National de Recherches Archéologiques Préventives UMR 6566-C2A du CNRS Coordinateur du projet collectif de recherche " Archéologie, histoire et anthropologie de la presqu'île de la Hague (Manche). Analyse sur la longue durée d'un espace naturel et social cohérent " Florent BELLEC Communauté de Communes de la Hague Directeur du Tourp Maison de la Hague

4 LES AUTEURS Vincent CARPENTIER, Inrap Basse-Normandie et UMR 6577-CRAHM, CNRS/Université de Caen Martine CLET-PELLERIN, Centre de géomorphologie, UMR 6143-M2C, CNRS/Université de Caen Dominique CLIQUET, DRAC/SRA de Basse-Normandie et UMR 6566, CNRS/MCC/Universités Rennes Robert DAVIDSON, UMR 6554-GÉOPHEN-LETG, CNRS/Université de Caen Lionel DUPRET, Laboratoire de géologie GEGER Emmanuel GHESQUIÈRE, Inrap Basse-Normandie et UMR 6566-C2A, CNRS/MCC/Universités Rennes Gérard FOSSE, Conservateur en Chef du Patrimoine (Archéologie), archéologue du GRAC Blandine HARDEL, étudiante, Université de Caen Laurent JUHEL, archéologue du GRAC, Inrap Grand-Ouest et étudiant à l'ehess Jean-Pierre LAUTRIDOU, Centre de géomorphologie, UMR 6143-M2C, CNRS/Université de Caen Hubert LEPAUMIER, Inrap Basse-Normandie Robert LEROUVILLOIS, archéologue du GRAC Laurent LESPEZ, UMR 6554-GÉOPHEN-LETG, CNRS/Université de Caen Cyril MARCIGNY, Inrap Basse-Normandie et UMR 6566-C2A, CNRS/MCC/Universités Rennes et Nantes Jeannine VILGRAIN, archéologue du GRAC Gérard VILGRAIN, archéologue et président du GRAC AVEC LES CONTRIBUTIONS DE François CHARRAUD, archéologue du GRAC et étudiant à l'université Rennes II Stéphanie CLÉMENT-SAULEAU, Inrap Basse-Normandie Cyril DAMOURETTE, Communauté de Communes de la Hague, Le Tourp Laure DEDOUIT, DRAC/SRA de Basse-Normandie Fabien DELRIEU, DRAC/SRA de Basse-Normandie Julien DESHAYES, Animateur du Patrimoine, Valognes et UMR 6577-CRAHM, CNRS/Université de Caen Marie-France DIETSCH-SELLAMI, Inrap Grand-Ouest et UMR 6566, CNRS/MCC/Universités Rennes David FLOTTÉ, Inrap Basse-Normandie David GACHE, étudiant à l'université Rennes II Erik GALLOUIN, Inrap Grand-Ouest David GIAZZON, Inrap Basse-Normandie Cyril HUGOT, Inrap Basse-Normandie Dominique MARGUERIE, Centre d'archéobotanique, UMR 6566, CNRS/MCC/Universités Rennes Jean-Yves NOËL, Inrap Grand-Ouest et étudiant à l'ehess Jean-Marc RICHARD, Inrap Pays-de-la-Loire Valérie RENAULT, Inrap Basse-Normandie REMERCIEMENTS Nous tenons à remercier tous ceux qui ont de près ou de loin participé au bon déroulement des recherches du PCR. Ce programme d'étude de la Hague a été, dès le début des travaux, soutenu par François Fichet de Clairfontaine, Conservateur régional au Service Régional de l'archéologie. Dans ce cadre, il nous a fourni un appui logistique important et nous a facilité l'accès à la matière première de ce travail dans les dépôts de fouille régionaux et au sein de la Carte Archéologique. Notre gratitude va également à l'encontre des différents intervenants financiers qui ont subventionné cette étude : le Ministère de la Culture et le Conseil Général de la Manche et la Communauté de Communes de la Hague. Enfin nous ne pouvons conclure ces remerciements sans adresser nos plus vifs remerciements à nos collègues des associations locales, des musées et des archives qui nous ont laissé l'accès à leur documentation : Eliane Paysan du Musée Emmanuel Liais à Cherbourg, Antoine Verney du Musée Baron Gérard à Bayeux, le Groupe de Recherches Archéologiques du Cotentin, les agents de la Bibliothèque des Sciences à Cherbourg et les agents du fond normand de la Bibliothèque Municipale de Cherbourg.

5 SOMMAIRE Le projet collectif de recherche : ARCHÉOLOGIE, HISTOIRE ET ANTHROPOLOGIE pages DE LA PRESQU'ÎLE DE LA HAGUE (Manche) - Cyril MARCIGNY, Vincent CARPENTIER,... 7 à 12 LES PIERRES DE LA HAGUE, TÉMOINS DE DEUX MILLIARDS D ANNÉES D HISTOIRE SUR LA TERRE! Lionel DUPRET 13 à 18 LA POINTE DE LA HAGUE : GÉOMORPHOLOGIE, GÉOLOGIE DU QUATERNAIRE Jean-Pierre LAUTRIDOU et Dominique CLIQUET 19 à 28 EVOLUTION DES PAYSAGES DU NEOLITHIQUE A NOS JOURS DANS LA PENINSULE DE LA HAGUE (NORMANDIE, FRANCE), L'EXEMPLE DE L'ANSE SAINT-MARTIN Laurent LESPEZ, Blandine HARDEL, à 42 HISTORIQUE SOMMAIRE DES RECHERCHES ANCIENNES Robert LEROUVILLOIS 43 à 50 LE PALEOLITHIQUE DANS LA HAGUE Dominique CLIQUET 51 à 62 LE MÉSOLITHIQUE DANS LA HAGUE ET SES MARGES Emmanuel GHESQUIÈRE 63 à 76 L'HABITAT NEOLITHIQUE DANS LA HAGUE Laurent JUHEL 77 à 84 LES MÉGALITHES DE LA HAGUE Emmanuel GHESQUIÈRE, Hubert LEPAUMIER et Cyril MARCIGNY 85 à 90 L'AGE DU BRONZE DANS LA HAGUE Cyril MARCIGNY 91 à 108 L'AGE DU FER DANS LA HAGUE : le site d'urville-nacqueville (Manche) Cyril MARCIGNY et Emmanuel GHESQUIÈRE 109 à 114 DEUX ACTIVITES LIÉES A LA MER DANS LA HAGUE DU XIXe SIECLE Gérard FOSSE, Gérard VILGRAIN et Jeannine VILGRAIN 115 à 120 SCIENCE DU PAYSAGE ET IDENTITE CULTURELLE: L EXEMPLE DU TOURP (OMONVILLE-LA-ROGUE, MANCHE) Florent BELLEC, Cyril DAMOURETTE 121 à 126

6 Chronologie simplifiée

7 Le projet collectif de recherche : ARCHÉOLOGIE, HISTOIRE ET ANTHROPOLOGIE DE LA PRESQU'ÎLE DE LA HAGUE (Manche) Analyse sur la longue durée d'un espace naturel et social cohérent Cyril MARCIGNY, Vincent CARPENTIER, avec Dominique CLIQUET, Emmanuel GHESQUIERE et Laurent LESPEZ Ce projet d'analyse dans la longue durée de la presqu'île de La Hague est l'aboutissement d'une réflexion menée depuis plus d'une vingtaine d'années à des échelles différentes par des archéologues, des spécialistes des paléœnvironnements, des géomorphologues, des historiens des textes, du paysage et des techniques sur le Nord Cotentin. La confrontation de ces données anciennes et récentes et la redécouverte du Hague-Dike, véritable frontière physique coupant la presqu'île du reste du territoire et dont l'origine peut désormais être datée du IIe millénaire avant notre ère, ont été autant d'éléments qui ont motivé la création d'un projet collectif de recherche visant à une étude globale de cet espace naturel et social cohérent. Ce type de travail, déjà esquissé il y a quelques années sur un secteur de la plaine de Caen (plateau de Mondeville) pour les périodes pré et protohistoriques, avait mobilisé de nombreux chercheurs issus d'horizons institutionnels divers et avait abouti à un document permettant de restituer la (pré- et proto-) histoire d'un lieu avec des conclusions novatrices sur les dynamiques spatiales, sociales et naturelles qui ont organisé les occupations humaines (qu'elles relèvent du milieu funéraire ou domestique ; Chancerel, Marcigny et Ghesquière, 2005). Aujourd'hui il semble opportun de rééditer au niveau régional ce type d'approche, dans un secteur géographique totalement différent (presqu'île de La Hague) et sur une échelle de temps beaucoup plus longue (de la Préhistoire à l'époque moderne). POURQUOI LA HAGUE? Le développement sans précédent des fouilles archéologiques ces vingt dernières années a fait découvrir en Basse-Normandie un nombre considérable de sites aux fonctions et aux statuts différents. De cette masse d'information l'archéologue tire, avec des fortunes diverses, des renseignements sur le mode de fonctionnement des établissements qu'ils appartiennent à la sphère domestique ou funéraire. Toutefois dans bien des cas, l'environnement du site échappe à l'analyse et aucune approche du territoire et des liens entre sites ne peut être tentée. En effet, seule une échelle de travail régionale ou micro régionale permet d'aborder les phénomènes dynamiques concernant l'organisation territoriale et la densité des occupations. Enfin, il paraît évident que cette dynamique sociale des populations ne peut être comprise que si les données archéologiques et historiques acquièrent une certaine profondeur de champ : dans la longue durée C'est pour remédier à ce constat que des archéologues intervenant sur toutes les périodes (préhistorien, protohistoriens et historiens) et des spécialistes du paléoenvironnement (géomorphologues, palynologues, ), donnant suite aux conclusions du CNRA (bilan ; Collectif, 2002, p ), ont décidé de se réunir autour d'un même projet interdisciplinaire ayant pour vocation " l'étude dans la très longue durée d'un territoire régional ". Après de nombreux débats durant l'année 2004 sur la définition de territoire et les notions que ce terme recouvre, l'équipe réunie autour de ce projet s'est entendue sur une zone géographique qui semble être un espace naturel et social cohérent et qui, de plus, est délimitée par une limite physique dressée par l'homme il y a plus de trois mille ans : le Hague Dike. Pourquoi une analyse de la presqu'île de La Hague? Le choix d'une zone échantillon pour une étude dans la très longue durée d'un territoire régional n'a pas été une affaire simple, les priorités de chacun des intervenants de ce projet concernant des espaces géographiques différents : la plaine de Caen et ces nombreuses fouilles préventives, le Val de Saire avec son programme de prospections et les nombreuses analyses environnementales, le bassin versant de la Dives à travers l'étude historique engagé par l'un d'entre nous dans le cadre d'une thèse de 3e cycle (travaux de V. Carpentier) ; autant d'espaces géographiques aux avantages nombreux dans la perspective d'une analyse diachronique. L'attention de tous s'est toutefois focalisée sur la presqu'île de La Hague (fig. 1) après le réexa- 7

8 Archéologie, histoire et anthropologie de la presqu île de La Hague men, en 2004, du Hague-Dike (et la définition dans ce cadre d'un véritable territoire social ; Marcigny et Ghesquière, 2004) et au vu des résultats obtenus par l'équipe en charge des recherches paléoenvironnementales sur l'évolution de l'environnement dans la péninsule de La Hague depuis le Néolithique (Lespez et al., 2005). Cette microrégion semble en effet rassembler des prédispositions qui font défaut aux autres espaces régionaux : - le cadre géographique est parfaitement cohérent sur le plan géologique et géomorphologique, - le territoire est délimité par la mer (au Nord, à l'ouest et au Sud) et une frontière physique (qui remonte à l'âge du Bronze) le sépare du reste de la région à l'est, - les occupations humaines sont connues dans des proportions semblables du Paléolithique à l'époque moderne, - l'absence de labour a facilité la conservation des sites et cet espace se présente comme un véritable conservatoire archéologique si ce n'est les destructions occasionnées par la construction de la COGEMA (des observations archéologiques ont toutefois été réalisées à cette occasion), - enfin, l'inventaire systématique des archives naturelles a permis d'identifier plusieurs espaces d'investigation (plaine littorale, vallées) à proximité de sites déjà reconnus (les occupations diachroniques de l'anse Saint-Martin en sont un bon exemple) et pour certains actuellement en cours de fouille (comme à La Jupinerie à Omonville-la- Petite). 8

9 Pourquoi une analyse sur la longue durée? LES ECHELLES SPATIALES La presqu'île de La Hague se décompose en plusieurs espaces qui sont autant d'échelles spatiales (photo 1) : Les unités paysagères La péninsule de La Hague comporte quatre unités paysagères principales : 1 - Des enclos bocagers, limités par des murets de pierres sèches ou des haies végétales (hêtres aubépines, ronces), qui possèdent une vocation principalement herbagère même si la culture du maïs s'est développée au cours des 20 dernières années. Ils occupent principalement les sols bruns acides des plateaux schisto-gréseux (100 à 180 m d'altitude) et les sols bruns plus ou moins lessivés et bien ressuyés des terrasses marines pléistocènes, des marges des plaines littorales et des fonds de vallées. 2 - Des landes qui caractérisent de nombreux versants en particulier en position littorale. 3 - Des bois résiduels (hêtres, chênes, châtaigniers, ormes, saules, aulnes, noisetiers, frênes) qui se développent principalement sur les versants accidentés qui dominent de 60 à 100 m les fonds des vallées étroites qui découpent le plateau. 4 - Des zones humides et les marais arborés (saules, aulnes) ou couverts de roseaux qui caractérisent certains fonds de vallées et les petites plaines littorales. Les paysages de lande Comme souligné en introduction, l'analyse archéologique, historique et anthropologique d'un territoire n'a de sens que si elle renvoie à une certaine profondeur de champ historique. En effet, les pratiques culturelles n'évoluent pas au même rythme que les changements politiques, même si elles accusent aussi des épisodes critiques et des ruptures. Cette histoire à multiples facettes interdépendantes est faite d'inerties, de discrètes évolutions et de résistances, phénomènes dont l'impact dans l'histoire des mentalités comme des paysages n'est pas lisible sur la courte ni même la moyenne durée. Une étude globale des occupations qui se sont succédées sur la presqu'île, comme des dynamiques socio-environnementales sous-jacentes, permettra de mettre en relief les interrelations entre les différentes composantes, physiques ou culturelles, de l'objet étudié, de même que certains au moins des héritages transmis d'une période à l'autre par les populations de La Hague, qu'ils se manifestent à travers les faits archéologiques, les témoins de l'évolution de l'environnement ou les traces subjectives (dessins, graffiti, sources écrites et figurées depuis le Moyen-Âge notamment) laissées par les populations passées. Les paysages de landes sont la marque la plus évidente de l'aspect océanique de La Hague. Ils sont d'une grande diversité et se développent sur des sols minces le plus souvent de type ranker ou podzol humo-ferrugineux. Les landes littorales sont le plus souvent des landes sèches hautes à ajoncs d'europe et fougères aigles avec quelques plaques de landes à bruyères cendrées (photo 2). Les landes basses occupent également une place importante comme le long de l'anse de Vauville. Elles sont dominées par les ajoncs nain, les bruyères cendrées et les callunes. Dans les fonds de vallées, caractérisés par l'hydromorphie, prennent place des landes tourbeuses à bruyères, comportant des ajoncs, des callunes, des joncs et des touradons de molinie mais également des saules. Deux bassins versants complémentaires Dans ce contexte morpho-climatique, les lieux d'enregistrement des dynamiques sédimentaires et végétales holocènes sont constitués par les 9

10 Archéologie, histoire et anthropologie de la presqu île de La Hague fonds de vallées, les plaines littorales et les tourbières de plateaux. Ces dernières constituent des lieux d'enregistrement privilégiés des dynamiques végétales et ont été abondamment exploitées dans le Massif Armoricain et le Sud-Ouest de l'angleterre. Malheureusement les tourbières ombrogènes et soligènes de tête de versant n'existent plus à La Hague depuis la construction du centre de retraitement des déchets nucléaires (COGEMA), il faut donc appuyer l'étude sur des tourbières topogènes et fluviogènes situées en fond de vallée ou dans les petites plaines littorales. Ces tourbières minérotrophes possèdent deux avantages : 1 - une sédimentation organique et détritique favorable à l'analyse palynologique et à l'étude des transferts des sédiments dans l'ensemble des bassins versants ; 2 - une plus grande proximité des espaces peuplés et mis en valeur, en particulier pour les époques historiques, comme le soulignent d'ores et déjà certaines recherches menées outre-manche. LES ECHELLES CHRONOLOGIQUES Appréhender les mutations sociales et les modifications environnementales qui ont marqué l'histoire de la presqu'île nécessite un désenclavement maîtrisé des échelles temporelles, tout en maintenant un lien permanent avec les questions relevant de la chronologie globale. Dans un premier temps notre travail portera donc sur un recensement des données selon des thèmes chronologiques. Ainsi, l'étude de la période reculée du Paléolithique (sous la responsabilité de D. Cliquet), bien qu'elle ne semble pas avoir eu d'incidence structurelle évidente sur la lecture des anthroposystèmes plus récents, doit être poursuivie pour servir notamment de référent au niveau des relations entre changements climatiques et évolution anthropique (Cliquet, 1992). Ce bruit de fond de la première anthropisation compose par ailleurs la toile de fond de l'étude des relations Homme/Milieu, étape préliminaire de notre projet qui nous permet notamment, de mieux peser le facteur d'attraction exercé par les disponibilités naturelles du milieu (relief, matières premières, ressources alimentaires, etc.) sur les plus anciens occupants de La Hague. Plus marquante pour l'environnement est la fin de la préhistoire (le Mésolithique et le Néolithique, sous la responsabilité de E. Ghesquière), qui doit faire l'objet d'une attention toute particulière puisqu'elle signe la mise en place des premiers systèmes anthropiques (Ghesquière et al., 2000 et 2003). On s'intéressera notamment au nécessaire dialogue entre les sciences de la Nature, paléobotanique en particulier, et l'archéologie afin de reconnaître les grands traits de cette fondation du paysage et des modes de faire-valoir qui caractérisent les populations désormais sédentarisées de La Hague. Les âges des métaux (sous la responsabilité de C. Marcigny) correspondent à une grande période de mutation qui voit, entre autres manifestations, la réalisation du Hague-Dike (Marcigny et Ghesquière, 2004). Les traces laissées par cette période laissent percevoir la complexité du système socio-culturel sous-jacent (fig. 2) et nous amènent à nous interroger sur les modalités de l'appropriation des ressources naturelles, en particulier agraires, dans le cadre de l'émergence de véritables terroirs dont la teneur peut être perçue à travers ses différentes composantes : l'habitat, les systèmes parcellaires, les installations de production (salines notamment), les espaces rituels et funéraires Les premiers éléments d'information relatifs à la dynamique économique apparaissent dans ce chapitre, qui voit la mise en place des réseaux de communication, terrestre et maritime, dont la teneur autorise une certaine intensification des échanges et des rapports humains avec l'extérieur. C'est encore à cette époque que se met en place la première grande structure de barrage recensée dans l'espace étudié, le Hague Dike, élément fort de l'identité culturelle et patrimoniale de La Hague, dont la fonction de frontière, opérant pour la première fois de façon concrète la partition entre un monde " intérieur " et au-delà, un monde " extérieur ", introduit un marqueur privilégié dans l'étude de l'espace aménagé, dont la trace peut être suivie jusqu'à l'époque contemporaine. Le Hague Dike nous offre un fil directeur commode vers les temps historiques (sous la responsablilité de V. Carpentier), segment chronologique coiffant deux millénaires depuis l'antiquité jusqu'aux débuts de l'époque contemporaine, qui voit le parachèvement de la construction paysagère de La Hague, dans un contexte de densification de l'habitat et d'augmentation progressive de l'emprise agraire comme du nombre des hommes. Cette évolution historique, marquée par la complexité des données relatives au tissu socio-économique, trouve son aboutissement dans le portrait actuel du territoire, marqué par une forte identité culturelle qui offre bien souvent aujourd'hui un visage de particularisme ethnologique. Il s'agit donc, en même temps que d'effectuer un travail de mémoire, de disséquer la teneur du discours identitaire " haguard " en se basant sur un lexique raisonné ou ensemble de définitions nourries des recherches collatérales entreprises dans le PCR. Cette démarche ouvre le champ sur la dimension ethnographique qui constitue, par bien des aspects, l'un des aspects privilégiés de La Hague historique. Pour ce faire, une attention toute particulière sera portée au croisement des sources écrites, iconographiques et matérielles, exercice favorisé par la richesse du fonds documentaire disponible, essentiellement il est vrai à partir de l'an mil, qui autorise certains effets de " zoom " sous forme d'incursions ponctuelles dans la courte et moyenne durée, en parallèle d'une 10

11 réflexion globale sur la teneur des évolutions enregistrées par les systèmes sociaux et paysager sur l'ensemble de la période. A l'issue de cette première phase de travail qui peut être étalée sur plusieurs années d'exercice du projet, l'équipe tentera une lecture transversale des données, en mettant en avant une lecture des dynamiques socio-environnementales sous forme de synthèse récapitulant les processus physiques et culturels de l'élaboration du territoire et de son identité dans un cadre chronologique précisément jalonné et donc mieux défini. LES METHODES ET LES BUTS RECHERCHES Dans la perspective d'une étude environnementale cherchant à percevoir les relations entre l'homme et le milieu sur une période allant de la préhistoire à l'époque moderne, les outils à notre disposition sont nombreux et relèvent dans presque tous les cas du recensement puis de la gestion d'information sur fond cartographique (SIG). Le traitement de ces informations puis l'exposé des processus dégagés lors de l'analyse devraient permettre de dégager un ou des modèles d'évolution dynamiques autour des thèmes de l'exploitation et de la gestion de l'espace par les sociétés. Le recensement Les systèmes documentaires forment les fondations de ce travail. On dispose aujourd'hui d'une base de données informatisée (la Carte Archéologique et Patriarche) qui a le mérite d'exposer les premières données factuelles. Cet outil indispensable doit toutefois faire l'objet d'un réexamen complet dans le cadre de notre projet de manière à valider les différents points enregistrés. Ces premières données seront complétées des éléments provenant des chercheurs locaux (couverture aérienne de 1947 à aujourd'hui) et des observations de terrains réalisées depuis quelques années par des membres de l'équipe (prospections des vallées, par exemple). Enfin les archives inédites des fouilles et prospections de messieurs de Boüard, Arbmann (dans les années cinquante), Lemière (dans les années soixante), Huet (dans les années quatre-vingts) apporteront un éclairage nouveau sur le maillage des sites tel qu'il est perçu actuellement comme sur les sondages réalisés sur le Hague-Dick et certains monuments détruits par l'implantation de la COGEMA. Les recherches archivistiques Celles-ci seront facilitées par le matériel documentaire mis à la disposition des chercheurs par le Manoir du Tourp, couplé aux fonds cartographiques et d'imagerie satellitaire traités par le laboratoire Géophen, de l'université de Caen. Les sources écrites feront l'objet d'un dépouillement raisonné, mené sous forme de sondage à partir des premières manifestations locales jusqu'à l'époque contemporaine. Les archives ethnographiques ne seront pas oubliées, qu'il s'agisse de témoignages oraux, de clichés photographiques, de graffiti recueillis sur les sites où ils sont actuellement conservés. Ce type de document sera particulièrement mis à contribution dans l'approche de la dimension maritime de La Hague, thème pour lequel le fonds ethnographique apparaît bien souvent comme déterminant en même temps que prolixe. Un soin tout particulier sera porté à la documentation médiévale, jusqu'alors relativement sousexploitée en terme de synthèse territoriale, celle-ci constituant un fonds particulièrement riche en dépit des destructions subies par les Archives départementales de la Manche durant la seconde Guerre mondiale. En marge de l'étude globale des archives relatives à La Hague, un travail plus poussé pourra être entrepris à partir de l'exploitation du cartulaire de Vauville, en relation avec l'étude environnementale de la Mare de Vauville, dans le but de produire un référentiel pour le Moyen Âge. Un catalogue raisonné des sources sera réuni et donnera lieu à un commentaire général nourri par la confrontation de ces informations avec les données archéologiques et environnementales disponibles. À terme, c'est surtout vers un portrait commenté de La Hague que s'orientera tout entier ce pan de la recherche collective. Les prospections, sondages et fouille Comme souligné par le CNRA lors des propositions de nouvelles programmations (Collectif, 2002), l'équipe réunie autour de ce projet pense que les problématiques ne doivent plus se fonder uniquement sur un site mais sur la " mise en évidence des réseaux à l'aide d'opérations de prospection, de sondages et de fouilles réalisées de manière systématique sur des zones géographiques " définies. La mise en œuvre de l'ensemble de ces méthodes permettra de saisir le mode de fonctionnement du territoire et de ces réseaux dans une perspective diachronique (évolution environnementale et sociale). Parallèlement, l'approche anthropologique consistera en une analyse de l'ethnosystème de La Hague par le biais notamment des comportements institués par la communauté (coutumes, croyances spécifiques, ), l'ensemble visant à une définition synthétique de l'identité de ce territoire et de ses occupants au cours des grandes étapes de leur histoire plurimillénaire. 11

12 BIBLIOGRAPHIE CHANCEREL A., MARCIGNY C. et GHES- QUIERE E., Mondeville (Calvados), Les occupations du Néolithique à l'âge du Bronze, Documents d'archéologie Française (DAF) à paraître le deuxième semestre CLIQUET D., Le gisement paléolithique moyen de Saint-Germain-des-Vaux / Port- Racine dans son cadre régional. ERAUL 63, 2 vol, 1992, 648 p. COLLECTIF, La recherche archéologique en France: bilan du Conseil National de la Recherche Archéologique, Les nouvelles de l'archéologie, n 88, 2e trimestre 2002, Ed. ERRANCE, 80 p. GHESQUIERE E., LEFEVRE P. et MARCI- GNY C., Le Mésolithique moyen du Nord Cotentin (Manche), Bulletin de la Société Préhistorique Française, t. 100, n 4, p GHESQUIERE E., LEFEVRE P., MARCI- GNY C. et SOUFFI B., Le Mésolithique moyen du Nord-Cotentin, Basse-Normandie, France, International Series, British Archaeological Reports (BAR), Oxford, n 856, 292 p. LESPEZ L., CLET-PELLERIN M., DAVID- SON R. et MARCIGNY C., Evolution des paysages et anthropisation depuis le Néolithique dans la péninsule de La Hague (Normandie, France), Actes du Colloque du Groupe de Recherche Pluridisciplinaires Contribuant à l'archéologie (GMPCA), Bordeaux, 2003, Revue d'archéométrie, 28, 2004, p MARCIGNY C. et GHESQUIERE E., Presqu'île de La Hague (Manche) : le "Hague Dike", Association pour la promotion des recherches sur l'âge du Bronze, APRAB, Bulletin, n 1, avril 2004, p

13 LES PIERRES DE LA HAGUE, TÉMOINS DE DEUX MILLIARDS D ANNÉES D HISTOIRE SUR LA TERRE! Lionel DUPRET Au plan géologique, la presqu'île de la Hague fait partie du Massif armoricain, pays de bocage au relief accidenté, principalement constitué de terrains dits " anciens " appartenant aux ères précambrienne et paléozoïque. C'est la seule région de France où sont conservés les vestiges de trois chaînes de montagnes successivement érigées et érodées : la chaîne icartienne (datée à 2 milliards d'années), la chaîne cadomienne (entre 650 et 540 millions d'années) et la chaîne varisque (ou hercynienne) édifiée vers 300 millions d'années. Les derniers dépôts sédimentaires liés aux fluctuations climatiques du Pléistocène sont également bien exposés tout au long de la ligne de rivage actuel (Port Racine, Baie d'ecalgrain, Herquemoulin). Certains de ces dépôts remanient en galets des roches mésozoïques et cénozoïques très utilisées dans l'industrie lithique préhistorique, tels les silex issus de la craie provenant d'affleurements de Crétacé aujourd'hui submergés. Enfin, les plages holocènes ( ans à l'actuel) offrent leurs cortèges de sables et de cordons de galets riches en granite, grès et silex. Le sous-sol de la presqu'île de la Hague (fig. 1) garde donc en mémoire une histoire géolo- figure 1 - carte géologique simplifié de la Hague 13

14 Les pierres de la Hague, témoins de deux milliards d années d Histoire sur la Terre. gique longue de 2 milliards d'années (Doré et al., 19 ). Celui-ci se compose d'une très grande diversité de roches sédimentaires, métamorphiques ou magmatiques (sous les formes plutonique et volcanique) possédant des duretés et des degrés d'altération différents. Le comportement mécanique de ces roches plus ou moins résistantes à l'érosion, et les différentes déformations tectoniques, comme les plis et les failles apparues au cours des phases orogéniques successives, contrôlent l'évolution morphodynamique du relief. Au Sud, des plateaux de roches dures, entrecoupés de vallées profondes, tombent de façon spectaculaire en falaises abruptes dans la mer (Nez de Voidries, Nez de Jobourg, Herquemoulin) découpant la côte en de multiples anses et promontoires. Au Nord, de basses plates-formes d'abrasion marine quaternaires, fossilisées par les coulées de solifluxion à blocaux, s'étalent en pente douce jusqu'au rivage (Cap de la Hague, Pointe de Jardeheu). fusion partielle (migmatites). De minces bandes fortement dilacérées d'amphibolite noire sont également injectées dans ces gneiss. Toutes ces roches tirent leur origine de la transformation métamorphique d'une ancienne série sédimentaire schistogréseuse injectée de filons de dolérite. Vers le centre du platier se développent des orthogneiss oeillés résultant du métamorphisme d'anciens granites calco-alcalins à mégacristaux de feldspath potassique. C'est la mise en place de ces granites qui a été datée par la méthode U/Pb sur zircon à 2083 ± 7 millions d'années (Piton, 1985), conférant ainsi un âge Protérozoïque inférieur à ces roches d'origine crustale. La présence d'enclaves de paragneiss dans les orthogneiss indique clairement l'antériorité de la série schisto-gréseuse pour laquelle un âge archéen (>2500 Ma) n'est pas exclu. La phase majeure de métamorphisme, responsable des néogenèses minérales et de la foliation sub-méridienne (N10 à N30), a été datée à 618 Ma et appartient de ce fait à l'histoire cadomienne. Le socle icartien de la Hague : la plus ancienne croûte continentale de France! Au Paléoprotérozoïque, il y a environ deux milliards d'années, la première chaîne de montagnes de la plaque armoricaine émergea de l'océan primitif. Il s'agit de la chaîne icartienne (de " Icart Point " à Guernesey) dont les restes s'observent aujourd'hui dans les îles anglo-normandes (Guernesey, Sercq et Aurigny), dans la presqu'île de la Hague et, plus à l'ouest, dans le Trégor et la Baie de Lannion. Dans la Hague, ce vieux socle constitue l'essentiel des affleurements rocheux des hautes falaises encadrant le Nez de Jobourg entre les anses du Cul-Rond et de Pivette (fig. 1). Ils apparaissent également dans plusieurs panneaux du platier rocheux de la côte nord, depuis la Pointe de Jardeheu jusqu'à Omonville-la-Rogue, puis de Gréville jusqu'à Landemer. Le socle icartien de la Hague se compose de gneiss localement migmatitiques et d'amphibolites, toutes roches métamorphiques qui proviennent de la transformation de roches préexistantes, magmatiques et sédimentaires, par augmentation de pression et de température consécutive à un enfouissement à grande profondeur (Dupret, 1988). C'est au sud de la Baie d'ecalgrain, dans l'anse du Cul-Rond, que les observations de cette croûte continentale primitive sont les plus aisées. Au sud de cette anse affleurent des roches rubanées où se différencient des lits clairs quartzo-feldspathiques (leucosome) et des lits noirs à biotite et sillimanite (mélanosome). Il s'agit de paragneiss foliés, fortement plissotés, montrant par endroits des indices de Les témoins de la chaîne cadomienne ( Ma). Après l'histoire icartienne, aucun événement géologique n'est enregistré dans le Massif armoricain pendant plus d'un milliard d'années. Au Néoprotérozoïque, l'activité géologique reprend pendant une centaine de millions d'années durant le Briovérien (de Briovera, nom d'un village celte situé sur l'emplacement d'agneaux près de St-Lô). C'est entre 650 et 540 Ma que la fermeture d'un nouvel océan par subduction sera à l'origine de l'érection de la chaîne cadomienne (de Cadomus, nom latin de la ville de Caen). Celle-ci prit naissance dans la zone tropicale de l'hémisphère sud, en bordure nord du continent gondwanien. Dès le Briovérien inférieur, une forte activité magmatique se déclenche avec l'édification d'arcs insulaires volcaniques (identifiés à Coutances et dans le Val de Saire) suivie par la mise en place de plutons dioritiques et granodioritiques foliés. Des sédiments issus du remaniement des roches volcaniques s'accumulent dans plusieurs bassins de part et d'autre des arcs insulaires. Après une première phase orogénique qui semble débuter très tôt dans la Hague (vers 600 Ma), l'érosion des reliefs alimente le remplissage des bassins de sédimentation du Briovérien supérieur qui se fermeront lors d'une ultime phase de plissement. Cette dernière s'accompagne d'une nouvelle activité magmatique responsable de la montée des plutons granitiques de la Hague, de Jersey et de la Mancellia dont les âges s'échelonnent du Nord au Sud de 570 à 540 Ma.(Dissler et al., 1988 ; Dupret et al., 1990). 14

15 Dans la Hague, postérieurement au gneiss migmatitiques icartiens, plusieurs massifs plutoniques, dioritiques et granitiques, se mettent en place pendant le cycle orogénique cadomien. Toutes ces intrusions calco-alcalines sont en relation avec la subduction d'une lithosphère océanique sous une lithosphère continentale qui connaîtra deux phases majeures de fusion, l'une datée autour de 600 Ma et l'autre vers 570 Ma (Dissler, 1987). Les intrusions dioritiques et granodioritiques foliées (600 Ma) : Les premières intrusions magmatiques cadomiennes s'observent principalement sur la côte sud de la presqu'île (fig. 1) où elles constituent l'essentiel du substrat grenu depuis la Côte Soufflée (au sud de la Baie d'ecalgrain) jusqu'à Herqueville. Les meilleurs affleurements se localisent au niveau des anses et baies qui entaillent ces roches (baie de Montcanval, anse des Moulinets, baie des Fontenelles). Elles sont également visibles sur la côte nord à la pointe de Jardeheu. Il s'agit de roches plutoniques grenues à composition de diorite quartzique à andésine, hornblende et biotite (diorites des Moulinets, de Jardeheu) ou de granodiorites vertes (granodiorite du Thiébot). Par analogie avec la diorite quartzique de Tourgis (île d'aurigny), datée à 610 ± 2 Ma par la méthode U/Pb sur zircon (D'Lemos et al., 2001), une mise en place de ces plutons autour de 600 Ma est retenue aujourd'hui. Toutes ces roches présentent une foliation tectonique sub-méridienne soulignée par l'orientation préférentielle des cristaux de hornblende et de plagioclase. Cette foliation témoigne d'une première phase de déformation compressive cadomienne contemporaine de la solidification du magma. Au sud de la Baie d'ecalgrain, la granodiorite cadomienne de la Côte Soufflée est gneissifiée au contact avec le socle icartien. Les intrusions granitiques fini-cadomiennes (570 Ma) : Elles se localisent au Nord du synclinal de Jobourg (fig. 1) et constituent le tréfonds rocheux de la Hague depuis Goury jusqu'à Cherbourg. Plusieurs types de roches plutoniques sont identifiés depuis des syénites porphyroïdes (monzonite de l'anse St-Martin) à orthose et plagioclase, des granites clairs à grain fin ou moyen (granite du Cap de la Hague) composé de quartz, orthose, plagioclase albitique et biotite chloritisée, jusqu'à des granites alcalins de couleur rouge (granite d'ecuty). Un important lacis filonien de roches acides accompagne la mise en place de ces intrusions grenues. Ces différents faciès pétrographiques sont spectaculairement exposés à l'est de l'anse Saint-Martin sur l'estran rocheux depuis la baie d'ecuty jusqu'au sémaphore de la Pointe de Jardeheu. Les roches métamorphiques et plutoniques du platier sont ici recoupées par de nombreux filons (dykes) de microdiorite foliée (à hudsonite et biotite), de microgranite à grain fin, de microgranite rouge sphérolitique, d'aplite rose, de rhyolite à cassure silexoïde, et de pegmatite à gros cristaux de quartz automorphes et microcline renfermant des amas de magnétite noire. La mise en place de ces différentes roches plutoniques, dont les minéraux ne présentent aucune orientation préférentielle, marque la fin de l'histoire cadomienne du Nord-Cotentin, vers 570 Ma. Dans la région de Cherbourg, ces granitoïdes sont intensément écrasés par des plans de cisaillement apparus au cours de l'histoire varisque. Il y a 540 millions d'années, à la fin du Briovérien, les plaques lithosphériques à croûte continentale sont presque toutes rassemblées dans l'hémisphère sud de la planète formant un super-continent qui va se fragmenter durant l'ère paléozoïque. Les roches du Paléozoïque et la formation de la chaîne varisque. Durant le Paléozoïque inférieur, la plaque Armorica subit une dérive qui l'amène, du Cambrien à l'ordovicien, de la zone tropicale au cercle polaire antarctique. Elle entamera ensuite une rapide remontée vers le Nord pour atteindre l'équateur au Carbonifère. Pendant ce périple, la plaque armoricaine se sépare de la plaque africaine (Gondwana), puis de la plaque Baltica, par ouverture de deux aires océaniques, l'océan Central au sud et l'océan Rhéique au Nord. Ces deux océans se refermeront au Paléozoïque supérieur (du Dévonien supérieur au Carbonifère inférieur) engendrant une collision continentale à l'origine de la chaîne varisque. La phase d'ouverture océanique se traduit par le remplissage de bassins de sédimentation, la phase de collision se marque principalement par des déformations tectoniques et la mise en place du magmatisme. Ces deux périodes sont bien enregistrées dans les terrains primaires de la presqu'île de la Hague. 15

16 Les pierres de la Hague, témoins de deux milliards d années d Histoire sur la Terre. Les formations sédimentaires du Paléozoïque : Du Cambrien inférieur au Dévonien inférieur, plusieurs milliers de mètres de sédiments sablo-vaseux ou carbonatés se déposent dans une mer épicontinentale peu profonde qui ennoie progressivement les marges des reliefs cadomiens émergés. De nombreux organismes à squelette interne ou externe (coraux, brachiopodes, trilobites) vivent et se déplacent sur le fond de la mer paléozoïque. La fossilisation de ces organismes ou de leurs traces (ichnites) fournit aux géologues un matériel précieux pour la reconstitution et la datation des milieux de dépôt. Dans la Hague, les formations paléozoïques appartiennent pour l'essentiel au Cambrien et à l'ordovicien. Elles sont conservées à la fois, dans le synclinal de Jobourg (fig. 2 et 3) qui s'étend depuis la Baie d'ecalgrain jusqu'à Beaumont- Hague, et dans le flanc nord du grand synclinal de Siouville. Le Cambrien débute par des conglomérats fluviatiles (poudingue de Hainneville) et des arkoses riches en feldspath rose localement exploitées sous figure 2 Coupe lithostratigraphique des terrains paléozoïques de la Baie d Ecalgrain (d après Le Gall, 1998). le nom de Pierre d'omonville. Ces roches, issues de l'abrasion de la chaîne cadomienne, sont très bien exposées sur le platier rocheux de la pointe du Houpret, au nord de la Baie d'ecalgrain. A cet endroit, les arkoses présentent de fines intercalations de grès feldspathiques fins de couleur verte ou rouge. Celles-ci ont été ultérieurement remaniées en galets et utilisées comme outils, tels ceux recueillis sur le site mésolithique d'auderville (Ghesquière et al., 2003). Le contact par faille du Cambrien avec le socle cadomien peut s'observer à l'est d'omonville-la-rogue (pointe d'etimbert) et au Sud du hameau de la Roche en face de l'îlot du Greniquet. Les arkoses, vont être recouvertes par une épaisse série de siltites vertes, d'origine marine, bien développées dans la région de Cherbourg (Schistes de la Glacerie) où la schistosité leur confère un caractère ardoisier. Ces schistes sont surmontés par des grès feldspathiques d'origine deltaïque qui couronnent le Cambrien régional (Grès de Sainte-Croix-Hague). A l'ordovicien, une nouvelle transgression marine va recouvrir les derniers reliefs émergés. Des sables quartzeux vont se déposer à l'occasion de fortes houles et de vagues de tempêtes créant ainsi le Grès armoricain riche en terriers d'annélides (Scolithos) et en pistes d'arthropodes (Cruziana). Ces barres massives de grès quartzites blancs, exclusivement constitués de silice, sont très résistants à l'érosion et jouent un rôle majeur dans la morphologie du paysage. Ils constituent le sous-sol rocheux des hautes collines de la Hague (Lande de Jobourg) et ont souvent été utilisés comme matériau de choix pour les constructions mégalithiques régionales. A l'ordovicien moyen, un approfondissement du milieu va permettre le dépôt de vases noires à l'origine des Schistes de Beaumont renfermant une riche faune de trilobites (Neseuretus, Ilaenus). Les Grès de May marquent ensuite une tendance régressive avec une alternance de bancs gréseux plus ou moins micacés et de siltites sombres. La présence de nombreuses figures sédimentaires (litage oblique, rides de plages, figures d'érosion en " brioches ") attestent d'un environnement marin très littoral. La série ordovicienne se termine avec le dépôt des Schistes d'ecalgrain constitués de siltites noires micacées contenant une faune abondante de trilobites (Onnia grenieri, Kloucekia dujardini), de coraux primitifs (Paleofavosites), de brachiopodes (Drabovia), et de nombreux fossiles d'ostracodes, de gastéropodes, de bivalves et de cystidés. Les Grès de May et les Schistes d'ecalgrain sont particulièrement bien exposés sur le platier rocheux de la Baie d'ecalgrain. A niveau de la cale d'accès à cette baie, les schistes noirs sont surmontés par des grès pouvant déjà appartenir au Silurien. 16

17 Le magmatisme et la déformation varisque Dans cette partie du Massif armoricain, les premiers événements tectoniques du cycle varisque se marquent par un soulèvement épirogénique entraînant une lacune de sédimentation du Dévonien moyen à supérieur (phase bretonne). Ces mouvements s'accompagnent d'une première activité magmatique représentée par l'injection de nombreux filons de dolérites, à plagioclase et clinopyroxène, qui se mettent en place à la limite dévonocarbonifère. Ces dykes de roches noires très résistantes, d'épaisseur souvent plurimétrique, s'observent sur tout le littoral de la Hague (pointe de Jardeheu, cap de la Hague, Goury, baie de Sary, Côte Soufflée, anse du Culeron, anse de Pivette, anse du Tas de Pois ). Leur orientation suit deux directions principales, N20 E et N120 E (Le Gall, 1999). (Dissler & Gresselin, 1987). Cette déformation varisque développe dans les roches sédimentaires briovériennes et cambriennes un débit ardoisier (schistosité de flux), tandis que d'importants couloirs mylonitiques apparaissent dans les granitoïdes cadomiens. Plus au Sud, la surrection de cette chaîne varisque s'accompagne d'une activité magmatique représentée par l'injection du granite syntectonique de Flamanville dans les terrains paléozoïques du flanc sud du synclinal de Siouville (Gresselin, 1990). La montée de ce granite rose porphyroïde, qui s'accompagne de tout un cortège filonien de roches acides (rhyolites, microgranites), va développer un métamorphisme de contact des roches encaissantes les transformant en cornéennes et schistes tachetés. Enfin, à la limite Carbonifère-Permien, une période de distension succède au serrage varisque et s'accompagne d'un magmatisme alcalin distensif sous Au Carbonifère inférieur, les terrains paléozoïques de la Hague sont déformés par la phase de compression majeure de l'orogène varisque (phase sudète). Celle-ci sera responsable de la création de deux structures synclinales : le synclinal de Jobourg (fig. 3), orienté N110 E, et le synclinal plus vaste de Siouville, orienté N50 E, dont le flanc méridional s'étend vers le Sud jusqu'au Cap du Rozel. Le synclinal de Jobourg est une structure dissymétrique déversée vers le Sud. Dans la Baie d'ecalgrain, les couches du flanc nord sont verticales, voire localement déversées, celles du flanc sud ont un pendage faible (20 ) et présentent de faibles ondulations. De nombreuses failles varisques, à jeu principalement décro-chevauchant, affectent l'ensemble des séries et marquent toujours le contact entre le socle cadomien et les terrains paléozoïques. Vers l'est, en direction de Cherbourg, une importante zone de cisaillement chevauchante vers le sud, orientée N110 E et faiblement pentée vers le Nord, entraîne le chevauchement du socle cadomien de la côte nord de la Hague sur les formations paléozoïques renversées du flanc nord du synclinal de Siouville forme de filons lamprophyriques potassique riches en micas (minettes). Comme les dolérites, les filons de lamprophyre, très reconnaissable à leur patine d'altération brune, s'observent sur tout le littoral de la Hague (baie de Sary, anse du Culeron, baies des Fontenelles). L'évolution post-paléozoïque de la Hague. A la fin du Paléozoïque, tous les continents sont rassemblés en un super-continent appelé la Pangée. L'évolution géodynamique des ères mésozoïque et cénozoïque sera conditionnée par la fragmentation de ce continent qui conduira à la naissance de nouveaux océans, tels l'océan atlantique et l'océan alpin (la Théthys). Durant le mésozoïque, la plaque Armorica se situe dans la zone tropicale nord. Elle remontera ensuite pendant le cénozoïque vers les latitudes moyennes jusqu'à sa position actuelle. Pendant tout ce temps, plus de 200 Ma, la Hague reste un territoire émergé résistant aux assauts des mers chaudes du Jurassique, puis du 17

18 Crétacé supérieur. L'érosion nivelle les derniers reliefs de la chaîne varisque en façonnant des surfaces d'abrasion sur lesquelles ne s'enregistre pratiquement aucun dépôt jusqu'au premier grand refroidissement du Pléistocène. CONCLUSION Ainsi, le sous-sol de la La Hague renferme une très grande diversité de roches sédimentaires, magmatiques et métamorphiques qui témoignent de l'évolution géodynamique de la plaque armoricaine depuis le Protérozoïque jusqu'au Pléistocène. Sa longue histoire géologique, plus de 2 milliards d'années, est le résultat d'une succession de multiples phases de dépôts, de plissements, de fractures, d'intrusions mais aussi d'émersions et d'érosions. Le paysage actuel, avec ses collines, ses landes, ses hautes falaises et ses vallées profondes, est largement hérité de ce riche patrimoine géologique. Nul doute que les premiers hommes qui ont parcouru la presqu'île de la Hague ont su tirer parti des richesses environnementales de cette région en y en trouvant des sites d'habitat faciles à sécuriser et en y puisant, selon les périodes, la matière première pour façonner leurs outils, leurs objets ornementaux ou leurs dalles de sépulture. BIBLIOGRAPHIE Dissler E. (1987) - Evolution géodynamique cadomienne du Nord-Cotentin (Massif armoricain). Thèse doct. Univ. Caen, 225 p. Dissler E. & Gresselin F. (1987) - The North Cotentin shear-zone (Normandy-France) : varisquan mobilisation of the Cadomian basement and its Palaezoic cover. Geol. J., 23, p Dissler E., Doré F., Dupret L., Gresselin F., Le Gall J. (1988) - L'évolution géodynamique cadomienne du Nord-Est du Massif armoricain. Bull. Soc. géol. France, sér. 4, t. 5, p D'Lemos R., Miller B. V., Samson S. D. (2001) - Precise U-Pb zircon ages from Alderney, Channel Islands : growing evidence for discrete Neoproterozoic magmatic episodes in northern Cadomia. Geol. Mag. 138 (6), p Doré F., Juignet P., Larsonneur C., Pareyn C., Rioult M. (1987) - Guide régional " Normandie -Maine ". Masson éd., Paris, 2e édit., 207 p. Dupret L. (1988) - Le Protérozoïque du Massif armoricain nord-oriental (Normandie et Maine). Bull. Soc. linn. Normandie, vol , p Dupret L., Dissler E., Doré F., Gresselin F., Le Gall J. (1990) - Cadomian geodynamic evolution of the northeastern Armorican Massif (Normandy and Maine). In R. D'Lemos, R Strachan, C. Topley edit : "The Cadomian orogeny". Geol.Soc., sp. Publ., 51, p Gresselin F. (1990) - Evolution varisque du Massif armoricain oriental. Insertion dans une transversale Ouest-européenne. Thèse univ. Caen, 335 p. Gueshquière E., Lefèvre P., Marcigny C., avec la collaboration de Lionel Dupret et Hellen Rault (2003) - Le Mésolithique moyen du Nord-Cotentin (Manche). Bulletin de la Société préhistorique française, tome 100, n 4, p Le Gall J., (1999) - Les dolérites et basaltes tholéiitiques varisques du domaine nord-est armoricain. Géologie de la France, n 4, p Piton P., (1985) - Etude géochimique et géochronologique de la croûte continentale protérozoïque (1,8-2,2 Ga) au Nord du Massif armoricain. DEA Univ. Rennes, non publié. 18

19 LA POINTE DE LA HAGUE : GÉOMORPHOLOGIE, GÉOLOGIE DU QUATERNAIRE - ARCHÉOLOGIE Jean-Pierre LAUTRIDOU et Dominique CLIQUET Le relief de la Pointe de la Hague, promontoire de la presqu'île du Cotentin est constitué par une lanière de plateau (avec un dôme à 180 m : Beaumont- Hague, dégradé par des glacis de 100 à 170 m NGF), qui se continue à l'est (Val de Saire) et qui domine la côte par des versants en pente forte (15 à 20 ) tronqués à la base p ar une falaise vive marine excepté au niveau du vaste champ de dunes récentes de la Baie de Vauville et à Urville. La zone intertidale entre les niveaux moyens des basses mers et des hautes mers, soit entre -2 et +2 m NGF est caractérisée par un platier rocheux recouvert par du sable dans les baies. Cette plate-forme d'abrasion marine actuelle a commencé à se former après 3000 ans B.P. Au début de l'actuel interglaciaire, l'holocène (vers ans BP) le niveau de la mer était déprimé (- 60 m environ) et est remonté très rapidement jusqu'à 5000 BP puis lentement jusqu'à 3000 BP période de niveau marin déjà proche de l'actuel. 19

20 La pointe de la Hague : géomorphologie, géologie du quaternaire - archéologie Sous la Manche, un vaste glacis d'érosion marine correspond à la plate forme continentale en pente de -1 à 2 m NGF jusqu'à - 80 m au Nord, côté du rebord des Fosses du Cotentin (voir fig. 1). Des petites vallées et vallons suspendus dissèquent le plateau et débouchent sur la côte nord, ouest et sud-ouest. I - LA FORMATION DU RELIEF AU SECONDAIRE ET AU TERTIAIRE La surface légèrement vallonnée du plateau à m NGF, qui prolonge à l'ouest la surface du môle du Cotentin est héritée de la surface post-hercynienne, pénéplaine constituée par des processus d'altération chimique et d'érosion, à la fin du Primaire (Klein 1973). Elle fait partie de la " Pénéplaine de l'ouest " définie dans le Bocage Normand dont elle est constitue la charpente, et séparée du Cotentin par le bassin déprimé de Carentan dont la subsidence tectonique a commencé au Primaire (Dugué et coll. 2005). Cette Pénéplaine de l'ouest sur le Massif Armoricain se prolonge vers le centre du Bassin par la " Surface de l'argile à silex ", à partir d'argentan, Cabourg et du Perche, développée sur les craies du Secondaire (Crétacé : Cénomanien, Turonien, Sénonien) entre 65 et 95 millions d'années. Cette vaste surface englobant la Pénéplaine de l'ouest et la surface de l'argile à silex est qualifiée d'acyclique par C. KLEIN (1973). Après son élaboration sous climat chaud et humide à la fin du Primaire, la surface post-hercynienne a été simplement retouchée en particulier au début du Crétacé (95 à 120 millions d'années) et dans la première partie du Tertiaire, l'eocène (entre 35 et 60 millions d'années) par altération chimique (par exemple : sols latéritiques) et par érosion toujours continentale. Les mers transgressives du Jurassique (entre 135 et 200 millions d'années) ne semblent pas avoir touché l'ouest du Cotentin (Dugué et coll. 2005). Par contre, les craies du Crétacé semblent avoir recouvert ce môle du Cotentin, des silex d'âge sénonien ayant été repérée à Flamanville (Bigot, 1942). Au début de l'eocène - Paléocène, la surface a été gonflée en dôme allongé (de Jurques/Mont- Pinçon à Ecouves) par une déformation de grande longueur d'onde liée probablement au contre coup de la surrection pyrénéenne (Wyns, 1991). Les altitudes sont de 300 m sur le points hauts du dôme à 100 m NGF. Après l'eocène qui possède une style tectonique assez calme, ce qui explique l'acyclisme (Klein, 1973). On passe durant l'oligocène (25 à 35 millions d'années) à un style tectonique cassant en horsts surelevés et petits grabens déprimés qui ont rejoué au Pliocène et au Pléislocène inférieur, ce qui donne les buttes comme par exemple vers Vire, Tinchebray, qui accidentent le profil en dôme. Au Quaternaire, les vallées dégradent fortement cette surface bombée. La plate-forme continentale sous-marine est un glacis depuis 1 à 2 m NGF sur la côte à 80 m (au nord) en bordure des Fosses du Cotentin et jusqu'à -100m à l'ouest (rebord de la Fosse centrale) (fig. 1). Dérivant de la surface post-hercynienne affaissée (Lautridou, 1985) elle constitue une plateforme d'abrasion marine érodant les roches du Massif Armoricain, les calcaires variés du Crétacé, de l'eocène, du Mio-Pliocène. La surface post-hercynienne a été fracturée à l'oligocène (Lericolais, 1997) et retouchée par la mer au Tertiaire supérieur. Elle est entaillé par des fosses et des paléovallées qui continuent les cours des vallées continentales. II L'EVOLUTION DU RELIEF AU QUATERNAIRE Initiées dès la fin de l'eocène (Lautridou, 1995) et probablement au Tortonien (Miocène supérieur : 6 à 7 millions d'années) comme en Bretagne (Brault et al., 2004) les vallées se sont surtout encaissées au Quaternaire (depuis 2.5 millions d'années). Cet affaissement s'est effectué sous deux contrôles : 1 - Le soulèvement du Cotentin Il est estimé à une quinzaine de mètres pendant le dernier million d'années) selon M. Font (2002) soit un peu plus que celui des plateaux de Haute-Normandie (Lautridou et al. 1999) : 6 à 7 mètres par ans. On considère qu'il est le contre coup de la surrection des Alpes vers cinq millions d'années. 2 - Le contrôle glacio-eustatique Depuis le début du Quaternaire (2.5 Ma)se succèdent des cycles climatiques (tempéré-glaciaires)à pas de temps de ans d'abord puis de ans (depuis ans). Ce cycle climatique comprend une période périglaciaire froide à très froide et un interglaciaire tempéré plus court, à l'image de celui que nous connaissons (Holocène) depuis ans. En période froide, le niveau de la mer descend parfois jusqu'à m NGF ; en période tempérée, il remonte jusqu'à un niveau identique à l'actuel. Les plateaux se soulevant, les rivières périglaciaires à fort débit et à charge en galets élevée, se sont donc encaissées par à coups dont il reste des traces (terrasses alluviales dans les grandes vallées). Elles ont tenté de se raccorder au niveau de base marin situé le plus souvent en bordure des Fosses, ce qui donne un 20

21 réseau de paléovallées qui entaillent la plate-forme continentale et vont se jeter dans les Fosses du Cotentin et dans la Fosse centrale (fig. 1). Les grandes rivières Solent (au Nord), Seine, Somme se rejoignent pour former le gigantesque Fleuve Manche ( Lericolais, 1997 ; Lautridou et al., 1999) qui remblaie les fosses. Dans le Cotentin, à part la rivière de Cherbourg (Divette), les petites vallées n'ont pas pu se raccorder au niveau de base. Néanmoins, elles érodent la plate-forme continentale dans la partie proximale sur la côte actuelle. On peut observer cette entaille sur le platier rocheux intertidal par exemple à Ecalgrain. La dernière retouche à cette entaille date de la dernière période froide, le Weichselien (-10 à -115 mille ans) ; elle est accompagnée des " graviers de fonds " alluviaux. A l'holocène, la mer en remontant dans cette entaille a déposé des sables, du limons et des tourbes (voir la note sur les paléoenvironnements) Les abris sous roche Ils se forment en climat périglaciaire avec un plafond en roche dure non gélive et un creux en roche gélive. Ils sont en général masqués par des dépôts de pente périglaciaire. Le site de la Jupinerie, près de Port Racine, en est un exemple. 21

22 La pointe de la Hague : géomorphologie, géologie du quaternaire - archéologie III LES DEPOTS QUATERNAIRES Les " plages perchées " étagées à plusieurs mètres ou plusieurs dizaines de mètres au dessus de la plage actuelle sont le dépôt caractéristique de la Pointe. Azoïques et souvent altérées, leur âge a toujours suscité des discussions faute d'arguments. Les climats interglaciaires ayant tous été pratiquement identiques, et par conséquent le niveau de la mer, l'étagement de ces plages est dû au soulèvement du Cotentin précédemment mentionné, comme celui des terrasses alluviales des grandes vallées (Lautridou et al., 1999). L'impasse subsistant sur leur âge, le choix a été fait de dater leur couverture périglaciaire (heads-loess) en s'intégrant dans la chronostratigraphie des séquences loessiques de Normandie (Lautridou et coll, 1982). 1 - Les heads et les loess Le Loess est une formation fine d'origine éolienne mis en place sur steppe froide pendant les phases les plus rudes et les plus sèches d'une période périglaciaire (essentiellement entre -40 et ans pour le Weichselien). Il recouvre le plateau (0.5 à 2 mètres d'épaisseur), les versants de la côte Nord et plus fragmentairement ceux des côtes Ouest et Sud-Ouest. Sa courbe granulométrique est caractéristique (très bon classement, médiane vers 25 micromètres, peu de sables, essentiellement fins, sauf sur la côte Nord) et sa minéralogie, dominée par l 'épidote, l'amphibole et le grenat (pour le Weichselien). Le Loess est en général non carbonaté et finement lité (limon à doublets). Le head est un dépôt de pente hétérométrique constitué par des blocs et des pierrailles cryoclastiques. Provenant du haut de versant et glissant lentement avec une matrice fine liée à la gélifraction, l'érosion d'altérites interglaciaires de rebord de plateau, de loess. Même si on observe localement des processus d'écoulement de sable et de cailloux en milieu liquide (" débris flows ") ou de remaniement fluviatile, le processus essentiel est une migration lente, à l'état boueux en climat périglaciaire humide : la cryoreptation ( Van Vliet - Lanoe, 1998). Le grand axe des blocs est en majorité dans le sens du versant (Watson, 1970) et en aval la tête se relève comme en montagne les blocs laboureurs qui pour glisser par gravité tentent de passer sur un bourrelet de terre créé par la progression vers aval. Ce mouvement mesuré en haute montagne est lent (centimètre/an) (Manté et al., 1985). La séquence périglaciaire head-loess Précisée en 1982 (Lautridou etcoll., 1987) et révisée en 2004 (Cliquet et Lautridou, 2005), la séquence weichsélienne (fig. 2) comporte au-dessus d'une plage interglaciaire ou d'une sol brun lessivé sur loess : Elbeuf I, des colluvions fines, peu épaisses à sols noirs humifères, en général érodés (70 à ans) puis la principale phase d'érosion et de cryoclastie des versants donnant des heads passant à des alluvions fluviales grossières de 70 à ans, mais surtout entre 70 et ans, et enfin des loess séparés en deux par un glacis d'érosion ( cryopédiment : Horizon de Nagelbeek) vers ans, et déposés entre 40 et ans. En général, le head est peu épais : moins de deux mètres en bas de versant ; parfois, il ne subsiste qu'un cailloutis ou une simple discordance, cas fréquent en Haute-Normandie. L'épaisseur importante du head du littoral (jusqu'à 30 mètres à 22

23 Ecalgrain, Herquemoulin) s'explique par le piège que constitue l'angle mort formé par une falaise marine interglaciaire et le platier d'abrasion marine associé (Lautridou, 1985) (fig. 3). L'intégration de la séquence head-loess du Cotentin dans celle de Basse et Haute-Normandie (Lautridou et coll., 1983 ; Cliquet et Lautridou, 2005), conforté par des datations absolues (Cliquet et al., 2003) permet de placer les industries dans leur cadre chronostratique et de proposer des datations des plages sous-jacentes. 2 - la côte Nord : une séquence simple de couverture head-loess sur des plages éémiennes (Riss-Wurm) ; le site de référence : Port-Racine et à blocs exotiques d'origine glacielle (transport sur radeaux de glace). Cette deuxième plage montre qu'après l'optimum climatique interglaciaire la mer avant de descendre s'est refroidie (fin d'interglaciaire). Plus au Nord, près du fort aux Herbeuses, le loess est subdivisé en deux : un loess inférieur carbonaté, lité et microfaillé et un loess supérieur (limon à doublets). Ces deux sont séparés par un horizon ) langues périglaciaires caractéristique de l'horizon de Nagelbeek. L'horizon basal humifère sus jacent à la place contient une flore de marécage d'eau douce entouré d'arbres, typique du Weichsélien ancien (Clet-Pellerin, 1980). Il passe à un horizon anthro- A Port-Racine, le complexe de plages associé à une plate-forme d'abrasion marine entre 5 et 6 m. NGF soit 4-5 m au-dessus du platier actuel est recouvert par du head d'âge wurmien parce que non altéré et contenant des silex taillés moustériens (Elhaï, 1963) et par du loess. Le niveau dénommé Bas-Normannien (Dangeard, 1936 ; Graindor, 1964) est plus bas qu'un autre platier de la Pointe de la Hague vers NGF recouvert par une plage dite du Haut-Normannien en raison de son altitude, plage qu'on retrouve en Val-de-Saire à l'est de Cherbourg (Coutard, 2002). Les basses plages très répandues dans le Cotentin (Bas-Normanien) étaient attribuées à l'interglaciaire Riss-Wurm (appelé maintenant Eémien) c'est-à-dire au dernier interglaciaire (Elhaï, 1963) ou au Wurm (Graindor, 1964) et les plages plus élevées du Haut- Normannien au Riss-Wurm optimum (Graindor, ibid) ou au Riss-Wurm ancien (Elhaï, 1963). Ce critère d'altitude étant insuffisant, il a été abandonné (Lautridou, 1980 ; Lautridou et coll., 1982) ; comme précédemment mentionné, on s'est attaché à la stratigraphie des dépôts de couverture et au degré d'altération des galets marins (comme en Val-de- Saire : S. Coutard, 2002). La coupe principale (fig. 4) comporte à la base une plage de sables et de galets marins non altérés (1), simplement décalcifiés, puis un mince niveau limono-argileux noirâtre, légèrement humifère (2), un head de sables, granules, petits cailloux alimentés par le granite fissuré et altéré (arène) (3 à 6), un head à matrice loessique (7) et un loess à lits marron enrichis en argile centimètres à millimètriques (limon à doublets) (8). Le tout est couronné par le sol brun lessivé développé sur loess à l'holocène (9). C'est la séquence weichselienne précédemment décrite (Cliquet, 1994 ; Coutard et al ; Lautridou, 1985 ; Van Vliet-Lanoë, 1988). En fait, on observe alentour deux plages, la plage à matrice sableuse grise propre étant surmontée par une plage comportant des foyers à matrice terreuse 23

24 La pointe de la Hague : géomorphologie, géologie du quaternaire - archéologie pique contenant l'industrie (paléolithique moyen à débitage laminaire). Les datations absolues ont donné : 106 ± 10 Ka par thermoluminescence (TL) sur silex brûlé pour le foyer interstratifié dans le cordon de galets et de 67 à 80 Ka pour les niveaux d'occupation susjacents (TL, OSL), soit le passage Weichsélien ancien-pléniglaciaire juste avant la mise en place des heads (Cliquet et al., 2003). On rejoint donc l'opinion de L. Dangeard et JM Graindor ainsi que celle de H. Elhaï (1963) sur l'âge éémien (Riss-Wurm) de ces plages. On retrouve ces plages sur la côte Nord de Goury à Urville ainsi qu'à l'est de Cherbourg où la plage de l'anse du Brick à été datée 115,24 ± 11,88 et 120,89 ± 12,84 Ka par OSL (Optically stimulated luminescence) ( Coutard, 2003). Aux Ilets (Sud-Est d'omonville) une tourbe située au-dessus de la plage fossile contient des pollens et des coloéoptères indiquant un climat tempéré frais de la fin de l'eémien (Clet-Pellerin, 1980 ; Coope et al., 1982). A Port-racine, on obtient 20 ± 2, 25 ± 2 Ka pour le loess calcaire inférieur et 13 ± 1 à 20 ± 2 Ka pour le loess supérieur ( Folz, 2000). D'autres séquences identiques ont été décrites comme à la Cormorandière (Van Vliet-Lanoë, 1989) 3 - les plages perchées à m de la côte nord Ces plages sur une plate forme complexe qui monte jusqu'à 25 m NGF sont surtout visibles à la Pointe (Goury). On les retrouve nombreuses sur toute le côte nord en Val-de-Saire en particulier (Coutard, 2003) par exemple à Port-Pignot. Eloignées de la paléofalaise marine et du versant, les coupes ne permettent d'observer qu'une couverture peu épaisse, condensée et lacunaire. A la Roche Gélétan, un head peu épais au-dessus de la plage comporte une industrie attribuée à une phase ancienne du Paléolithique moyen. Le head est daté par OSL de 149 Ka ± 11 et les galets remaniés de la plage de 207 à 214 Ka (Cliquet et al., 2003). Ces plages à galets plus altérés que ceux des plages éémiennes, à industrie ancienne (Acheuléen) sont attribués à l'interglaciaire antérieur à l'eémien entre 200 et ans : stade isotopique 7, l'eémien correspondant au stage isotopique 5 e des carottes océaniques. Dénommées Haut-Normannien, elles étaient attribuées auparavant au Riss-Wurm (Graindor, 1964 ; Elhaï, 1963). 4 - les plages de la côte ouest et sud-ouest à double séquence de couverture head-loess : le site d'ecalgrain La plage fossile se trouve un peu au-dessus du niveau des plus hautes mers, soit vers +5 m NGF. Elle est composée de sables et de petits galets à la différence de la plage actuelle et des plages anciennes de Goury à gros galets. Elle est recouverte (fig.5) par une tourbe et un head inférieur à intercalations argileuses grises ou brunes à la base, puis par un loess qui remblaie de petits vallons périglaciaires. Ensuite, se dépose un head supérieur à matrice sableuse puis loessique et un loess : le loess weichselien fossilisé 24

25 sous une fine couverture dunaire holocène (Lautridou et coll., 1982 ; Lautridou, 1985). Le head supérieur et le loess susjacent correspondent à la séquence weichselienne. Reste la question du complexe inférieur head-loess. Ce head à matrice argilo-sableuse dérivant d'altérites du plateau comporte dans sa partie inférieure plusieurs lentilles argileuses ou silto-sableuses au-dessous de la plage fossile alternant avec des coulées (head) de petits blocs (ceux de la partie supérieure étant plus grossiers). Le banc inférieur, à 1 mètre au-dessus de la plage, témoigne d'influences marines (schorre derrière un cordon littoral) fraîches. Les lentilles postérieurs enregistrent des conditions marécageuses proches d'un littoral, de plus en plus froides selon la flore et la faune de coléoptères (Clet, Coop in Lautridou et coll., 1982 ; Lautridou, 1985). Il y a donc une séquence marine régressive de fin d'interglaciaire - début glaciaire avec une plage à matériel assez fin, puis avec l'arrivée des premiers dépôts cryoclastiques de taille limitée, une sédimentation de lagune ; enfin, la mer continuant à descendre, les formations deviennent exclusivement continentales et de plus en plus grosssières. Cette double séquence a été attribuée à l'avant-dernier glaciaire (Saalien, stade isotopique 6) par JP Lautridou (1983, 1985) en raison : 1 du fait que cette double séquence head-loess ne se retrouve pas dans le Weichselien, 2 que la minéralogie (minéraux lourds) du loess inférieur caractérise les loess anciens et non récents, 3 que le sommet du loess inférieur comporte un complexe de paléosols au sommet : un sol brun lessivé de type interglaciaire, deux sols humifères sur sable dunaire (Van Vliet - Lanoë, 1988). Ce complexe de sols est typique de l'eémien - début Weichselien (très souvent érodé). La plage fossile se place à la fin de l'interglaciaire du stade isotopique 7 avant l'arrivée des heads saaliens (stade 6) et le recul de la ligne de rivage vers l'ouest. Toutefois, ce complexe plage - double séquence head-loess que l'on retrouve en continu jusqu'à La Crecque au Nord de la Baie de Vauville (début des dunes holocènes), a fait l'objet de nombreuses hypothèses. Etant donnée l'altitude des galets et des sables marins, son attribution au Riss- Wurm (Bas-Normannien) s'imposait (Hommeril et Larsonneur, 1963 ; Elhaï, 1963). Une datation C14 de l'horizon organique tourbeux sus jacent à flore et faune témoignant d'influences marines (cf supra) a donné ± 400 BP (Delibrias et Larsonneur, 1965) ce qui confirmait cette hypothèse et donnait un âge tardiglaciaire aux heads. Le même niveau a ensuite été daté > BP (Shotton et Williams, 1971). Son âge ancien (stade isotopique 7) selon JP Lautridou a été confirmé par Van Vliet-Lanoë (1988) à partir de l'étude paléopédologique du complexe intercalaire de paléosols au sommet du loess inférieur. Puis, ce même chercheur a proposé en 2000 une date encore antérieure (stade isotopique 9, soit vers ans), le head étant corrélé avec un head inférieur en Bretagne comportant en son sein un paléosol interglaciaire. Enfin, dans la coupe identique proche de celle d'ecalgrain, à Herquemoulin (où la plage plaquée contre la falaise atteint 8m NGF) Font etal. (2002) sont revenus à l'hypothèse initiale, le complexe de head qui fossilise une falaise d'origine tectonique (Faille de Jobourg) étant attribué au seul Weichselien. CONCLUSION La compréhension des plages perchées et des heads de la Pointe de la Hague a fortement progressé grâce aux études stratigraphiques, archéologiques et radiochronologiques. Il reste à régler le problème de l'âge de la basse plage d'ecalgrain - Herquemoulin. Des études micromorphologiques et radiochronologiques sont en cours. De même, la datation des hautes plages altérées, mais qui concerne plutôt le Val-de-Saire, demeure imprécise. Ces réserves étant faites, il apparaît que les industries se placent bien maintenant dans un cadre géomorphologique et stratigraphique grâce à une synergie pluridisciplinaire associant dans le cadre du PCR Paléolithique de Normandie, des chercheurs français et étrangers : géologues, géomorphologues, physiciens, archéologues professionnels (Université, CNRS, DRAC, INRAP) et bénévoles. On peut envisager raisonnablement de nouveaux acquis au cours des prochaines années. 25

26 La pointe de la Hague : géomorphologie, géologie du quaternaire - archéologie BIBLIOGRAPHIE BRAULT N., BOURQUIN S., GUILLO- CHEAU F., DABARD M.-F., BONNET S., COUR- VILLE P., ESTEOUL-CHOUX J., STEPANOFF F., Mio-Pliocene to Pleistocene paleotopographic evolution of Brittanny (France) from a sequence stratigraphic analysis : relative influence of tectonics and climate. Sedimentary Geology, 163, CLET-PELLERIN M., La séquence wurmienne dans les heads du Nord-Cotentin. Mémoire du Museum d'histoire naturelle, Paris, B, 27, CLIQUET D., Le gisement paléolithique moyen de Saint-Germain-des-Vaux / Port- Racine (Manche) dans son cadre régional. Essai palethnographique. Thèse de doctorat. Ed. ERAUL, 63, 648 p. CLIQUET D., LAUTRIDOU J.-P., Chronostratigraphie des formations du Pléistocène moyen et supérieur et sites associés en Normandie. British Archaeological Report, International Series, 1364, CLIQUET D., MERCIER N., VALLADAS H., FROGET L., MICHEL D., VAN VLIET-LANOE B. et VILGRAIN G., Apport de la thermoluminescence sur silex chauffés à la chronologie de sites paléolithiques de Normandie : nouvelles données et interprétations. Quaternaire, 14, 1, COOPE G.-R., JONES R.-L. and KEEN D.- H., The fauna and flora of late interglacial deposits in the Cotentin Peninsula. Philarmonic Transactions Royal Society London, B, COUTARD J.-P., HELLUIN M., LAUTRI- DOU J.-P., OZOUF J.-C., PELLERIN J. et CLET M., Dynamique et stratigraphie des heads de La Hague (Basse-Normandie). Bulletin du Centre de Géomorphologie, Caen, 24, COUTARD S., Formations quaternaires en bordure d'une mer épicontinentale, la Manche. Tectonique, eustatisme, climat et occupations humaines. Exemple du Val de Saire (Normandie, France). Université de Caen, U.F.R. Sciences. Thèse de Doctorat. 446 p. COUTARD S., LAUTRIDOU J.-P., RHO- DES E. et CLET M., soumis - Tectonic, eustatic and climatic significance of raised beaches of Cotentin (Val de Saire, Normandy, France). DANGEARD L., Sur la définition d'un étage normannien. Comptes-rendus sommaires de la Société géologique de France, DELIBRIAS G. et LARSONNEUR C., Datation absolue des dépôts organiques wurmiens en Normandie. Comptes-rendus de l'académie des Sciences, Paris, 263, DUGUE O. et coll., Le Cotentin - du Mésozoïque au Cénozoïque. Bulletin d'information des Géologues du Bassin de Paris, 2, ELHAI H., La Normandie occidentale entre la Seine et le Golfe normand-breton, étude géomorphologique. Thèse d'état, Bordeaux, 624 p. FOLZ E., La luminescence optiquement stimulée du quartz : développements méthodologiques et applications à la datation de séquences du Pléistocène supérieur du Nord-Ouest de la France. Thèse, Paris VII, 267 p. FONT M., Signatures géomorphologiques des déformations en domaine intraplaque : applications à la Normandie. Thèse géologie, Caen, 444 p. FONT M., LAGARDE J.-L., AMUREZE D., COUTARD J.-P., OZOUF J.-C., Une méthode de quantification de la dégradation d'un escarpement de faille au cours des cycles climatiques du Quaternaire : la faille de Jobourg (Nord-Cotentin, France). Compte-rendu, Géoscience, 334, GRAINDOR J.-M., Le Quaternaire marin de Normandie. Bulletin de la Société géologique de Normandie, 54, GUETTE C., Révision critique du concept de débitage Levallois à travers l'étude du gisement moustérien de Saint-Vaast-la-Hougue/Le Fort (chantiers I-III et II, niveaux inférieurs) (Manche, France). Bulletin de la Société Préhistorique française, 99, 2, HOMMERIL P., Etude de géologie marine concernant le littoral bas-normand et la zone pré-littorale de l'archipel anglo-normand. Université de Caen, Faculté des Sciences. Thèse de doctorat. 304 p. HOMMERIL P. et LARSONNEUR C., Observations sur les dépôts quaternaires de la Baie d'ecalgrain (Manche). Compte-rendu sommaire de la Société géologique de France,

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29 EVOLUTION DES PAYSAGES DU NEOLITHIQUE A NOS JOURS DANS LA PENINSULE DE LA HAGUE (NORMANDIE, FRANCE), L'EXEMPLE DE L'ANSE SAINT-MARTIN Laurent Lespez, Blandine Hardel, Martine Clet-Pellerin, Robert Davidson et Cyril Marcigny INTRODUCTION Depuis quelques années, les recherches sur l'évolution des paysages normands se développent (Lespez et al., 2003, 2004, 2005a,b). Elles s'inscrivent dans le cadre de programmes pluridisciplinaires à la croisée des sciences des paléoenvironnements, de l'archéologie et de l'histoire. Audelà de l'intérêt scientifique, elles procèdent de la volonté de contribuer à une meilleure prise en compte du patrimoine existant et de participer à une meilleure gestion dans le cadre du développement durable. La péninsule de La Hague, pointe occidentale du Cotentin est une région particulièrement propice à ces nouvelles investigations. Marquée par un climat océanique et des paysages armoricains caractérisés par l'importance des landes littorales, cet espace original possède des affinités avec l'ensemble des "Finistères" de la façade occidentale de l'europe et représente un jalon entre les parties occidentales et méridionales du massif armoricain (Elhaï, 1963; Marguerie, 1992; Billard et al., 1995 ; Barbier, 1999) et le sud-ouest de l'angleterre (Simmons, 2003). Le but de cet article est de présenter l'évolution des paysages depuis le Néolithique et de montrer qu'elle est le fruit de relations complexes entre la Nature et les Sociétés qui n'ont cessé d'évoluer. Accompagnant les fouilles en cours du site archéologique de "la Jupinerie" à Omonville-la-Petite, les recherches paléoenvironnnementales et géographiques s'attachent plus particulièrement aux paysages de l'anse Saint-Martin et des versants qui la dominent. 1. Les paysages actuels des bassins versants de l'anse Saint-Martin L'Anse Saint-Martin constitue le principal rentrant sur la côte nord de La Hague entre la pointe de Jardeheu à l'est et le cap de La Hague à l'ouest. Au pied des anciennes landes de Beaumont et de Jobourg aujourd'hui occupées par le centre de retraitement des déchets nucléaires (COGEMA), se développe un paysage bocager. Les parcelles en prairie ou en culture de maïs sont limitées par des haies végétales (hêtres, aubépines, ronces) (fig. 1). Elles occupent principalement les sols bruns acides des plateaux schisto-gréseux et granitiques (100 à 180 m d'altitude) et les sols bruns plus ou moins les- 29

30 Evolution des paysages du néolithique à nos jours dans la péninsule de la Hague sivés et bien ressuyés des marges de la plaine littorale et des fonds de vallées. Dans cette trame générale s'insinuent deux unités paysagères particulières. Les landes à ajoncs et fougères aigles qui occupent de nombreux versants en position littorale et les bois (hêtres, chênes, châtaigniers, saules, aulnes, noisetiers, frênes) qui caractérisent les versants les plus accidentés dominant de 60 à 100 m les fonds des vallées étroites. L'anse est bordée par un cordon de galets qui protège une plaine littorale occupée par des prairies humides et un petit marais comportant une étendue d'eau libre en hiver, une ceinture de roseaux, puis de saules et d'aulnes. 2. Méthodologie pour la reconstitution des paysages passés 2.1. Les sources de l'histoire des paysages Les sources d'information sur l'évolution du paysage sont multiples (fig. 2). Les investigations historiques exploitent les témoignages directs ou indirects des hommes sur l'espace et les paysages qui les entourent (récits, cartes anciennes, photographies, peintures mais aussi archives fiscales, judiciaires ). Les recherches archéologiques étudient les artéfacts matériels produits par les hommes au cours de leur action dans les paysages. En revanche, les naturalistes interrogent la nature afin d'y rechercher la trace du passage des hommes. C'est l'analyse des archives naturelles qui est alors l'objet de la recherche. Ces archives correspondent aux sédiments accumulés au cours des derniers siècles ou millénaires. Les minces couches de sédiments déposés par le ruissellement au pied des versants, par les cours d'eau dans le fond des vallées ou dans les plaines littorales constituent alors les chroniques d'une histoire à décrypter. Les recherches géomorphologiques et sédimentologiques ont pour objectif de comprendre la part minérale des sédiments et son évolution alors que les analyses paléo-biologiques ont pour objectif de décrire les fragments d'éléments vivants accumulés au cours du temps dans les sédiments. Ainsi, l'étude des archives naturelles apporte des informations sur les grands traits de l'évolution du paysage comme par exemple la dynamique des cours d'eau et des fonds de vallée, l'extension des milieux marécageux mais aussi plus généralement l'évolution des paysages végétaux. Ce travail d'enquête fonctionne à deux échelles spatiales : d'abord au niveau du lieu d'enregistrement (marais, fond de vallée, plaine alluviale ) dont il devient possible de retracer l'évolution mais également à celui du bassin versant car les sédiments comme les pollens, amenés par les vents ou les cours d'eau, ne donnent pas seulement des indications sur le paysage local mais intègrent ce qui se passe à une échelle plus large. L'ensemble des données des archives naturelles n'est exploitable qu'à la suite de la mise en place d'une chronologie précise qui repose sur l'utilisation de datations absolues comme celles obtenues par la méthode du radiocarbone. 30

31 2.2. Les données historiques et archéologiques Pour la péninsule de La Hague, les données historiques sont globalement récentes et datent principalement des époques médiévales et modernes (fig. 2; Lespez et al., 2003). Les premières archives connues concernant La Hague datent du XIe-XIIe siècle alors que les premières cartes ou documents iconographiques sont encore bien plus récents. Il faut attendre la fin du XVIIIe siècle avec l'établissement de la carte de Cassini en 1783 puis de plans fragmentaires de communes mis en place pendant la Révolution afin d'assurer le partage des communaux pour disposer de documents plus précis. Mais c'est le XIXe siècle qui se révèle le plus riche. La reconstitution des paysages végétaux et des modes de mise en valeur agricoles peut s'appuyer sur le cadastre Napoléonien et sa matrice mais aussi sur des documents iconographiques comme les gravures et les peintures, en particulier celles de J.-F. Millet qui peint la péninsule de 1845 à Les données archéologiques permettent de remonter plus loin dans le temps (fig. 2). La multiplication des fouilles archéologiques permet aujourd'- hui de se faire une idée de plus en plus précise des communautés de chasseurs-cueilleurs du Mésolithique (Ghesquière et al., 2000). Pour cette période, on considère généralement que les pratiques de prélèvement des populations pré-agricoles furent peu destructrices pour les milieux naturels forestiers du début de l'holocène. Cela change avec l'arrivée puis le développement des communautés d'agriculteurs au cours du Néolithique et de l'âge du Bronze. Les découvertes archéologiques sur cette période sont en plein développement en particulier dans le cadre du PCR piloté par C. Marcigny et V. Carpentier. Les premiers résultats prometteurs de la fouille programmée du site d'abri sous roche de "La Jupinerie" (Omonville-La-Petite) et la reprise des fouilles du Hague-Dike permettent d'espérer de nouveaux résultats sur les modes de vie des populations pré- et proto-historiques qui pourront être confrontés aux résultats des recherches paléoenvironnementales effectuées à l'extérieur des sites archéologiques. En revanche, il faut encore regretter la faiblesse des données archéologiques pour l'époque gallo-romaine et le Moyen Age Les archives naturelles La recherche des archives naturelles constitue la première étape du travail pour les spécialistes des paléoenvironnements. A La Hague, la construction du centre de retraitement des déchets nucléaires a entraîné la disparition ou la transformation des tourbières de plateau. Les lieux de sédimentation qui demeurent peu perturbés aujourd'hui sont le plus souvent situés à l'aval des cours d'eau, dans les fonds de vallées et les plaines littorales où la décroissance des pentes favorise la sédimentation. Les prospections approfondies menées dans ces espaces se sont appuyées sur la réalisation de sondages et de carottages (tarière à main, carottier "russe", carottier à percussion). Suite à ce travail de prospection, deux sites principaux ont été retenus en fonction de l'ampleur de la sédimentation et du contexte local susceptible d'être représentatif de situations différentes mais caractéristiques de l'ensemble des bassins versants de l'anse Saint-Martin : le fond de vallée de la Sainte-Hélène au niveau du lieu-dit " l'etang Paysan " et le marais littoral. Dans ce second cas, le potentiel est double puisqu'il correspond aux milieux palustres actuels mais aussi aux affleurements tourbeux qui peuvent être observés lors des grandes marées, en période de démaigrissement du cordon littoral et qui témoignent d'une tourbière fossile mal connue. Les sondages effectués révèlent une sédimentation holocène épaisse de 1,5 à 3,5 m au moins. Sept ont fait l'objet d'un prélèvement systématique pour des analyses sédimentologiques, micromorphologiques et palynologiques afin de caractériser les dynamiques fluviatiles et végétales. Le contrôle chronologique est assuré par dix datations radiocarbone conventionnelles établies au Centre d'etudes Nordiques de Québec (Canada) et deux datations AMS à l'institut de Physique d'erlangen (Allemagne) et par des éléments archéologiques retrouvés dans les sondages ou des informations historiques sur les espaces de sédimentation. 3. L'évolution des paysages sur le temps court (XIX-XXIe s.) Les sources cartographiques et photographiques permettent de comprendre les dynamiques des paysages au cours des deux derniers siècles (Hardel, 2005). Trois types de sources complémentaires sont à notre disposition : le cadastre napoléonien, les photos aériennes depuis 1947 et les cartes postales anciennes. Elles permettent de réaliser une cartographie diachronique de l'occupation du sol. Celle-ci est réalisée sous un Système d'information Géographique qui permet de croiser des données spatialement localisées. L'unité de base de cette cartographie est la parcelle. Chaque parcelle est identifiée par ses limites et sa nature Les paysages du début du XIXe siècle Le cadastre napoléonien donne l'occupation au début du XIXe siècle. Ce document a été créé sous l'impulsion de Napoléon 1er par la loi du 31

32 Evolution des paysages du néolithique à nos jours dans la péninsule de la Hague 32

33 15 septembre Réalisé dans La Hague autour de 1823, il est d'une grande précision du point de vue de l'échelle (1/2500) et sa couverture est exhaustive. Il se compose de 2 pièces distinctes : le plan (fig. 3) et les états de section des surfaces bâties et non bâties qui répertorient toutes les parcelles avec entre autres renseignements leur nom, leur nature, leur superficie exprimée en arpents et la classe qui leur est attribuée en fonction de leur qualité agronomique. A l'époque de la mise en place du cadastre, La Hague s'approche de son maximum démographique, atteint vers 1830, période à laquelle le canton totalise habitants soit environ 1200 de plus qu'à l'heure actuelle. La main d'œuvre aux champs est abondante et le plan du cadastre témoigne de la grande pression exercée par les hommes sur leur milieu. Pas un terrain n'est délaissé. Accolés aux maisons, les petits clos quadrangulaires des jardins sont minutieusement travaillés et abondamment amendés. On y trouve des légumes de toutes sortes, des arbres fruitiers mais aussi du chanvre, destiné aux travaux textiles. Au-delà, s'étend le domaine des champs cultivés (60% de la surface des finages) principalement pour la culture de céréales (85 %) et secondairement pour les prairies, les herbages et les saulées cultivées (15%). La forte présence des labours est à mettre en relation avec le poids des céréales dans l'alimentation de la population au début du XIXe siècle. Au seigle, céréale rustique et peu exigeante qui constituait la base de l'alimentation, s'ajoutaient le froment, l'orge et l'avoine. La plaine littorale et les fonds de vallée humides sont couverts d'herbages qui avec les prairies représentent 15% des surfaces agricoles. La haie et le muret sont des éléments structurant le paysage et on atteint presque l'embocagement maximum. Au-delà des terres cultivées, les bois et les landes couvrent 37% de la surface des bassins versants de l'anse Saint-Martin. Cette forte proportion révèle l'importance économique de ces terrains pour la communauté rurale. Ils s'intégraient pleinement au système agraire. Terrain de parcours pour le bétail (moutons, chèvres, bœufs, chevaux), ils fournissent également nourriture et litière pour les animaux, engrais pour les cultures ou combustibles. L'ajonc cultivé dans les jannières ou prélevé dans les landes est l'exemple même de cet usage polymorphe : bois de chauffe, fourrage des animaux après avoir été pillé et haché, paillage pour les étables Les mutations des XIXe et XXe siècles La carte de l'utilisation des sols de 1950 témoigne de profondes transformations des paysages agraires (fig. 3). L'ancienne agriculture vivrière essentiellement céréalière a fait place à une agriculture herbagère dont les produits sont destinés au marché. Entre 1823 et 1950, la superficie des terres labourables a été divisée par 11 alors que celle des herbages était multipliée par 6 atteignant 66,4% de la superficie des finages. Cette profonde mutation se développe vers le milieu du XIXe siècle. Elle est le résultat de nouvelles demandes et de la raréfaction de la main d'œuvre de journaliers utilisée par la production céréalière Dans la seconde moitié du XXe siècle, les évolutions sont moins importantes. L'augmentation des parcelles en cultures entre 1950 et 1998 résulte principalement du développement d'un système fourrager associant l'herbe et l'ensilage de maïs fourrager. Le recul des espaces en landes, en particulier du fait de l'installation de la COGEMA sur les landes de Beaumont et de Jobourg, témoigne plus profondément de la fin de leur usage comme terrain de parcours indispensable à l'équilibre des communautés rurales. Face à ces importantes mutations du mode d'occupation du sol, celles des limites du parcellaire demeurent modestes malgré le développement du remembrement. Les transformations des paysages agraires au cours des deux derniers siècles montrent leur mobilité face aux mutations des techniques de production et surtout aux changements socio-économiques et incitent à des études sur des durées plus longues pour comprendre leur origine. 4. L'évolution des paysages sur le temps long L'analyse des dynamiques paysagères sur le temps long s'appuie sur de nombreux sondages et carottages. Les carottages SM 60, SM 2/03 et EP ont fait plus particulièrement l'objet d'investigations sédimentologiques, micromorphologiques et palynologiques (fig. 3) Dynamique du trait de côte et de la plaine littorale au cours des 5 derniers millénaires A partir du milieu de l'holocène, la remontée du niveau gagne l'anse Saint Martin et dès lors la position du trait de côte dépend de l'équilibre entre le niveau moyen de la mer et les apports sédimentaires continentaux. Comme dans le reste du Nord-Cotentin (Coutard, 2003), la sédimentation holocène débute par une sédimentation limoneuse bleu gris sans doute d'origine marine (marais maritime) (fig. 4, 5 et 6a). Puis, au cours de la deuxième partie de l'holocène, la progradation du cordon de galets vers le large entraîne le développement d'une sédimentation continentale alternant passées organiques et détritiques caractéristiques d'une plaine d'inondation en partie marécageuse (fig. 6b). 33

34 Evolution des paysages du néolithique à nos jours dans la péninsule de la Hague 34

35 Cette séquence est surmontée d'une sédimentation tourbeuse plus ou moins limoneuse (fig. 6c). Les trois datations radiocarbone obtenues à sa base montrent qu'elle a débuté entre 4500 et 4100 BP. Ensuite le rythme de la sédimentation organique a été très stable, de 0,7-0,8 mm/an, malgré des variations sédimentaires non négligeables. Il permet d'estimer l'âge des principales ruptures sédimentaires. Pour la tourbière d'estran, si on prolonge le rythme de la séquence tourbeuse finale, la fin de la sédimentation étudiée peut être estimée à 1420 BP environ. Après cette date, le recul du trait de côte entraîne la fossilisation de la tourbière littorale ancienne sous le cordon de galets et, en arrière, le développement d'un marais tourbeux qui a persisté jusqu'à nos jours. Comme dans de nombreuses régions armoricaines, cette mutation géographique qui entraîne l'apparition récurrente de la tourbe avec de nombreux bois fossiles sur l'estran a alimenté les légendes. Celle dîte de la "Vieille Eglise" rapporte l'histoire de la submersion de la forêt qui occupait la plaine littorale suite à l'ouverture, lors d'une tempête, d'une brèche dans le cordon littoral (Digard de Lousta, 1847). En fin de parcours la mer serait même venue détruire un édifice religieux mal protégé dont on suppose la localisation par la persistance d'un toponyme à l'ouest de l'anse. D'après son rapporteur, cette légende relaterait un événement datant du VIIe siècle ap. J.-C. La coïncidence chronologique avec la fin de la sédimentation enregistrée sur l'estran est troublante. Cependant, un examen attentif de la question interdit de conclure trop rapidement car la sédimentation tourbeuse a pu être tronquée de manière importante et le recul du cordon littoral a pu être plus tardif. De ce point de vue, la tourbière fossile conserve sa part de mystère! Dans les tourbières successives, l'influence de la mer fut quasiment nulle. En revanche, la sédimentation organique s'est toujours accompagnée d'apports détritiques réguliers issus de l'ensemble du bassin versant comme l'indiquent les analyses granulométriques et micromorphologiques (Lespez et al., 2004). La teneur en sables et limons des sédiments montre des apports fluviatiles réguliers de type limons de débordement mais indique également l'existence de passées de sables fluviatiles parfois relativement bien triés caractéristiques de dépôts de chenaux de la Sainte-Hélène, principal cours d'eau parcourant la plaine littorale (fig. 6d). A partir de l'âge du Fer, ces apports détritiques sont responsables de la construction d'un petit cône alluvial entraînant l'atterrissement progressif des milieux palustres à l'est. En revanche, vers l'ouest, les apports sédimentaires sont moins importants et expliquent le maintien d'une tourbière à la sédimentation organique fibreuse dominante (fig. 6e) L'évolution des paysages végétaux du Néolithique à l'époque contemporaine Des analyses palynologiques à la reconstitution de la couverture végétale Les sédiments organiques du fond de la dépression ont piégé les grains de pollen qui peuvent être récupérés dans le sédiment suite à un travail de laboratoire. Les grains sont ensuite identifiés grâce à une analyse au microscope. Le comptage permet d'avoir une idée de la végétation locale et plus large ayant contribué à la pluie pollinique. Le dénombrement se fait au niveau de l'espèce mais aussi des familles comme pour les fougères et permet d'établir un diagramme pollinique général (Lespez et al., 2004) dont l'interprétation repose sur la bonne connaissance des relations entre l'enregistrement pollinique dans les archives naturelles et la végétation alentours. Dans le cas des bassins versants de l'anse Saint-Martin cette relation peut être testée pour les XIXe et XXe siècles en comparant l'occupation du sol issue du cadastre napoléonien et des photographies aériennes à différentes échelles, d'un côté, et les données polliniques provenant du sondage SM2-2003, de l'autre (fig. 7). La comparaison met en évidence la surreprésentation des grains de pollen d'arbre par rapport aux espaces boisés cartographiés et la surreprésentation des pollens de zones humides. Ces différences peuvent être expliquées, d'une part, par la non prise en compte des haies dans le calcul des superficies arborées et d'autre part par la localisation du lieu des sondages au sein de zones humides. Ces réserves intégrées, le diagramme pollinique apparaît comme assez représentatif de la végétation à l'échelle locale et à l'échelle des espaces de la plaine littorale et des versants la dominant immédiatement mais est moins performant pour traduire l'évolution de la végétation au-delà. A partir du diagramme pollinique général, la connaissance des plantes et de leur écologie permet de définir un diagramme d'anthropisation qui permet de montrer les changements du couvert végétal sous l'action des sociétés (Leroyer, 1997 ; Barbier, 1999). Il se présente sous forme de diagrammes miroirs autour d'un axe central (fig. 8). La partie droite du diagramme est basée sur les pourcentages cumulés des différents groupes de taxons, calculés à partir de la somme totale des grains de pollen et spores comptés. La partie gauche du diagramme représente les pourcentages cumulés des différents groupes de taxons, calculés à partir de la somme totale amputée des pourcentages de grains de pollen d'aulne et de saule et des autres taxons représentant la végétation locale (zones humides, milieux plus aquatiques, schorre). Ces diagrammes ont été adaptés à la végétation du nord Cotentin et 35

36 Evolution des paysages du néolithique à nos jours dans la péninsule de la Hague 36

37 quatre groupes de taxons servent à l'interprétation. D'abord, dans la partie centrale, les plantes cultivées (avec les céréales en particulier) et comme généralement, dans les sondages étudiés, leurs valeurs sont peu élevées, leur ont été ajoutées les plantes messicoles et adventices des champs cultivés. Un deuxième groupe représente les plantes rudérales c'est-à-dire les groupements végétaux associés à la proximité des occupations humaines, bords de chemins, décombres. Puis vient la courbe des graminées. L'ensemble des taxons de la lande à bruyère et des fougères de zones humides ou des landes sont regroupés sous l'appellation fougères et landes. Enfin, la dernière courbe décrit le couvert forestier (avec en particulier le chêne, le noisetier, le bouleau) auxquels s'ajoutent, quand le calcul est basé sur la somme totale (partie droite du diagramme) l'aulne et le saule Les paysages pré- et proto-historiques Les analyses palynologiques réalisées à l'anse Saint-Martin mettent en évidence des paysages encore fermés au cours du Néolithique final dans la plaine littorale et sur ses bordures malgré une occupation humaine attestée dès le Mésolithique et au cours du Néolithique (Fosse et Vilgrain, 2000; Marcigny et al., 2002, 2003; Vilgrain et coll., 2003). Malgré la présence de grains de pollen de céréales et de plantes rudérales au cours du Néolithique final (base du sondage SM 60), les traces de défrichements et de mise en valeur agricole restent ténues et indiquent plutôt des milieux en mosaïque où la végétation arborée (chênes) côtoie des formations buissonnantes plus ou moins fermées dans les zones humides (aulnes), sur leur marge ou sur les versants encadrant la plaine litto- 37

38 Evolution des paysages du néolithique à nos jours dans la péninsule de la Hague rale (noisetiers) et sans doute de rares clairières en prairies ou cultivées. Cependant le lieu d'enregistrement utilisé ne permet pas de conclure pour le paysage des échines qui arment la péninsule où les vestiges archéologiques sont très nombreux même s'ils ont peu été étudiés. Il n'est pas impossible que dans cet environnement le recul du couvert forestier ait été localement plus précoce même si les données archéologiques suggèrent généralement pour l'ensemble de la péninsule une néolithisation assez tardive, vers le début du Néolithique moyen. (1) À partir de la fin du Néolithique final et tout au long de l'âge du Bronze, le sondage SM 60 suggère une ouverture modérée du paysage marquée par le développement des landes et des fougères. Celles-ci se développent aussi bien dans les milieux humides au détriment de l'aulnaie que sur les sols mieux ressuyés du pourtour de l'anse aux dépens des noisetiers principalement. Cette situation est en accord avec les données archéologiques locales qui montrent que la péninsule a été le siège d'une grande activité durant cette période (levée de terre du Hague Dike, limites parcellaires probablement liées à des sites domestiques, très nombreux tumulus) y compris dans l'espace étudié (fig. 4). Elle correspond également à des occupations successives à La Jupinerie au cours du Bronze Ancien et du Bronze final. Au cours de cette dernière période les premières analyses sur les charbons de bois confirment d'ailleurs l'utilisation des chênes et des noisetiers pour le bois de feu (Marcigny et al., 2002, 2003). L'évolution des paysages dans la plaine littorale et sur ses bordures demeure modérée du milieu du 3e au milieu du 1er millénaire av. J.-C. et la situation ne change véritablement que pendant la Tène où l'ouverture du paysage s'affirme L'évolution des paysages au cours des deux derniers millénaires (2) L'ouverture des paysages semble d'abord dûe à une hausse du niveau de base favorisant le développement des zones humides et d'une nappe d'eau libre mais les traces d'activités agricoles sont ensuite plus franches. L'ouverture maximale intervient au début de la période gallo-romaine. Dans les zones humides, l'aulne n'occupe plus qu'une place très secondaire concurrencée en partie par les espèces de milieux humides mais également par l'essor des pratiques agro-pastorales. La culture des céréales connaît un développement même si la pratique de l'élevage, responsable de l'accroissement des prairies, semble jouer le rôle moteur. Sur les versants escarpés et les sols mieux ressuyés, les espaces boisés caractérisés par les noisetiers et les chênes connaissent leur recul maximal. Ces évolutions du couvert végétal se reflètent également dans la poursuite des flux solides qui entraîne l'atterrissement définitif de la partie orientale de la plaine littorale de l'anse Saint-Martin. Cette observation est convergente avec les données historiques disponibles qui témoignent de la prospérité 38

39 des campagnes bas-normandes du Ier au milieu du IIIe siècle ap. J.-C. (Deniaux, 2002) et les trouvailles archéologiques assez nombreuses pour La Hague à cette époque (Pilet-Lemière et Levalet, 1989) y compris dans les bassins versants étudiés. (3) La fin de l'antiquité et le début du Haut Moyen-Âge (fin du IIIe et IVe-Ve ap. J.-C.) sont marqués par un recul des marqueurs de l'anthropisation et en particulier le recul des prairies et une nouvelle phase de fermeture du paysage qui concerne aussi bien les milieux humides avec le développement de l'aulnaie que le reste du bassin versant avec le développement du noisetier et du chêne. Cette évolution cesse aux alentours des XIe-XIIe siècles. Elle affecte également le bassin versant de la Grande Vallée à Vauvile (Lespez et al., 2004) et peut probablement être interprétée comme le résultat d'une déprise rurale. Celle-ci est peut-être localement le reflet des difficultés économiques qui s'amorcent avec les invasions de la deuxième moitié du IIIe siècle et du IVe siècle et se poursuivent souvent jusqu'à la fin du VIIe siècle ap. J.-C. (Badouin et al., 2002). La reprise postérieure attestée d'une manière générale en Normandie ne semble pas se traduire par un changement dans les paysages et peutêtre faut-il y voir l'empreinte des troubles des IXe et Xe associés aux poussées bretonnes et aux invasions normandes en particulier dans cette partie de la Basse-Normandie; même si aujourd'hui l'idée d'une rupture brutale dans l'occupation des sols et les structures de peuplement est abandonnée (Baudouin et al., 2002). (4) A partir des XIe-XIIe siècles, la mise en valeur du milieu s'affirme à nouveau et semble perdurer jusqu'à la fin du XXe siècle. Les paysages de prairies pâturées ou fauchées et les parcelles cultivées se développent dans des espaces où la gestion de l'eau est de plus en plus maîtrisée. Dans la Grande-Vallée de Vauville et à un degré moindre sur les pourtours de l'anse Saint-Martin, les landes basses régressives à Ericaceae prennent de l'ampleur alors qu'apparaissent les ajoncs (Fabaceae). CONCLUSION Malgré leur aspect partiel, les premières recherches menées dans la péninsule de La Hague montrent une cohérence d'ensemble avec les observations réalisées dans les Finistères océaniques de l'ouest européen même si des particularités peuvent être notées. Dans la péninsule de La Hague, l'évolution des paysages est sous l'emprise des sociétés au moins depuis la charnière Néolithique final - âge du Bronze. Le développement des zones tourbeuses dans la plaine littorale est d'abord le résultat de la remontée du niveau marin au cours de l'holocène mais il est probable que les premiers défrichements favorisant l'érosion des sols et l'accentuation du ruissellement aient joué le rôle de facteur " aggravant " dans le développement des zones humides littorales puis de fond de vallée (Lespez et al., 2004). L'ouverture des paysages reste néanmoins modérée tout au long de l'âge du Bronze. Ces premiers résultats sont en retrait par rapport aux évolutions constatées dans certains espaces littoraux du monde armoricain et du sud-ouest de l'angleterre où le recul forestier peut être notable et s'accompagner de la mise en culture dès l'âge du Bronze (Marguerie, 1992 ; Simmons, 2003). L'ouverture des paysages qui témoigne d'une déforestation intense et de la mise en place de prairies et des cultures intervient principalement au cours de la Tène et de la période gallo-romaine. A partir de cette époque les grands équilibres paysagers contemporains semblent atteints même si la déprise rurale supposée pour le Haut Moyen Age semble responsable d'une période de fermeture des paysages. A partir du Moyen Age central, les grands équilibres paysagers sont retrouvés et la seule variation notable est celle enregistrée au cours du XIXe qui voit la généralisation de la prairie permanente aux dépends des terres labourées. Aujourd'hui ces équilibres semblent menacés. Les difficultés agricoles, en particulier celles rencontrées par les élevages bovins et ovins, expliquent la fin de l'utilisation des landes comme terrain de parcours et même l'abandon progressif de nombreuses prairies entraînant la multiplication des friches et des landes de déprise. Ces transformations paysagères indiquent une tendance à la fermeture des paysages. De ce point de vue, on peut se demander si à terme la spécificité des paysages de La Hague qui s'appuie sur l'importance des landes basses océaniques et un bocage herbager n'est pas menacée. D'un autre côté, les recherches menées sur le temps long permettent de relativiser cette fragilité actuelle car elles montrent que la mobilité est l'essence même des paysages et parce que d'autres phases de fermeture se sont produites, en particulier au cours du Moyen Age, et qu'elles n'ont pas persisté durablement. Plus fondamentalement, les paysages sont l'expression d'un équilibre dynamique entre une Société et l'espace dans lequel elle se déploie. Le déséquilibre actuel est d'abord le signe que les paysages contemporains sont en grande partie hérités de systèmes socio-économiques et techniques révolus et qu'en ce sens il est " normal " qu'ils évoluent. De ce point de vue, on peut se demander quel intérêt aurait la préservation de paysages ayant perdu leur fonction ou leur sens? Ainsi l'évolution des paysages de La Hague pose clairement les termes d'un débat que le scientifique par ses recherches peut alimenter mais qu'il revient à la société dans son ensemble de régler. 39

40 Evolution des paysages du néolithique à nos jours dans la péninsule de la Hague Remerciements Cette recherche a pu bénéficier du soutien financier et logistique de la Communauté de Communes de La Hague et d'une ACI " Jeunes chercheurs " du Fonds National pour la Science intitulée " Gestion de l'eau et dynamiques des paysages du Néolithique à nos jours : étude des basses vallées côtières dans le nord-ouest de la France ". Nous tenons plus particulièrement à remercier Florent Bellec pour son aide précieuse et constante. Nous remercions également le Groupe de Recherches Archéologiques du Cotentin et le Service Régional de l'archéologique de Basse- Normandie. BIBLIOGRAPHIE BARBIER, D, Histoire de la Végétation du nord-mayennais de la fin du Weichsélien à l'aube du XXIe siècle. Mise en évidence d'un Tardiglaciaire armoricain. Interactions Homme-Milieu. Groupe d'etude des Milieux Naturels, Nantes, 2 vol., 284 p. BAUDUIN, P. JARRY, T., LORREN, C., La Future Normandie du IIIe au Xe siècle. In DENIAUX, E., LORREN, C., BAUDUIN, P., JARRY, T., La Normandie avant les Normands, Ouest- France, Rennes, p BILLARD, C., CLET-PELLERIN, M., LAU- TRIDOU, J.P., Un site protohistorique littoral dans le Hâvre de la Vanlée, à Lingreville et Bricqueville-sur-mer (Manche). Rev. Archéo. Ouest, 12, p CLET-PELLERIN, M., Synthèse palynologique de quelques sites archéologiques de Normandie depuis le Néolithique. In Palynologie Archéologique, Actes des Journées du 25, 26, 27 janvier 1984, Notes et Monographies techniques, 17, CNRS, Paris, p CLET-PELLERIN, M., DUPEUBLE, P. A., HELLUIN, M., LEFEBVRE, M., PELLERIN, J., et Coll., Les formations marines et continentales du Pléistocène Récent dans la région d'asnelles- Saint-Côme de Fresné (Calvados). Bulletin du Centre de Géomorphologie, 32, Caen, p COUTARD, S., Formations quaternaires en bordure d'une mer épicontinentale, la Manche. Tectonique, eustatisme, climat et occupations humaines. Exemple du Val de Saire (Normandie, France). Université de Caen, Thèse Doctorat. 446 p. COUTARD, S., CLET-PELLERIN, M., à paraître. Évolution de la sédimentation et de la végétation pendant l'holocène dans les marais arrière-littoraux du Val de Saire (Cotentin, Normandie). Actes de la Table Ronde en l'honneur de René Neboit-Guilhot. Collection "Nature et Société, Presses Universitaires Blaise Pascal, Clermont Ferrand, 6 p. DENIAUX, E., L'Antiquité. In DENIAUX, E., LORREN, C., BAUDUIN, P., JARRY, T., La Normandie avant les Normands, Ouest- France, Rennes, p DIGARD de LOUSTA, Légende de l'inondation de la Forêt de Saint-Martin. Mémoire de la Société Académique de Cherbourg, p ELHAÏ, H., La Normandie occidentale entre la Seine et le golfe normano-breton. Etude morphologique. Thèse de doctorat, Bordeaux, Bière, 581 p. FOSSE, G., VILGRAIN, G., Le site de Jardeheu-La Gravette à Digulville (Hague). Inventaire archéologique sommaire et structures de combustion préhistoriques. L'archéologie dans la Manche : fouilles et recherches récentes ( ). Etudes et Documents, Collection de la Société d'archéologie et d'histoire de la Manche, Saint Lô, p GHESQUIERE, E., LEFEVRE, P., MARCI- GNY, C., et SOUFFI, B., Le Mésolithique moyen du Nord-Cotentin, Basse-Normandie, France, International Series, British Archaeological Reports (BAR), Oxford, n 856, 292 p. HARDEL, B., Essai de reconstitution des paysages de La Hague du Néolithique à nos jours, comparaison des sites de l'anse Saint-Martin et de Vauville, Mémoire de recherches de Master I de Géographie (dir. L. lespez), Université de Caen- Basse Normandie, GEOPHEN-UMR LETG 6554 CNRS, 155 p. 40

41 LEROYER, C., Homme, climat, végétation au Tardi- et Postglaciaire dans le Bassin Parisien, apports des études palynologiques des fonds de vallées. Thèse de doctorat, Paris 1, 2 vols, 550 p. LESPEZ, L., CLET-PELLERIN, M., LEVA- LET, F., BELLEC, F., DAVIDSON, R., L'apport des archives naturelles dans la compréhension de l'évolution des paysages protohistoriques et historiques normands. L'exemple de la péninsule de La Hague, Manche. Annales de Normandie, Congrès des Sociétés Historiques et Archéologiques de Normandie, 8, p LESPEZ, L., CLET-PELLERIN, M., DAVID- SON, R., MARCIGNY, C., avec la collaboration de LEVALET, F. et HARDEL, B., Evolution des paysages et anthropisation depuis le Néolithique dans la péninsule de La Hague. Revue d'archéométrie 28, LESPEZ, L., GARNIER, E., CADOR, J.-M., et ROCARD, D., 2005a. Les aménagements hydrauliques et la dynamique des paysages des petits cours d'eau depuis le XVIIIe siècle dans le nord-ouest de la France : l'exemple du bassin versant de la Seulles (Calvados). In "La rivière aménagée, entre héritages et modernité", Aestuaria 7, pl. en couleur. LESPEZ, L., CLET-PELLERIN, M., LIMON- DIN-LOZOUET, N., PASTRE J.-F., FONTUGNE, M., 2005, " Discontinuités longitudinales des dynamiques sédimentaires holocènes dans les petites vallées de l'ouest du Bassin Parisien, l'exemple de la Mue ", Quaternaire, 25 p. LETTERLE, F., VERRON, G., Un site d'habitat campaniforme à Digulville (Manche), Revue Archéologique de l'ouest, suppl. 1, p MARCIGNY, C., JUHEL, L., et GHESQUIE- RE, E., et coll., Omonville-La-Petite, "La Jupinerie", Manche), Fouille d'un abri sous-roche occupé du Néolithique ancien à la fin de l'âge du Bronze. Rapport de Fouille 2003, DRAC-Basse Normandie, INRAP, Conseil Générale de la Manche, 44 p. MARGUERIE, D, Evolution de la végétation sous l'impact humain en Armorique du Néolithique aux périodes historiques. Travaux du laboratoire d'anthropologie de Rennes, 40, Université de Rennes 1, 313 p. MORZADEC-KERFOUN, La sédimentation holocène dans la partie occidentale de la baie du Mont-Saint-Michel : l'évolution du marais de Dol-de-Bretagne. In BONNOT-COURTOIS, C., CALINE, B., L'HOMER, A., Le VOT, M. (eds), La baie du Mont-Saint-Michel et l'estuaire de la Rance, environnements sédimentaires, aménagements et évolutions récentes, CNRS, EPHE, Total-Elf-Fina, Mémoire 26, Pau, p PILLET-LEMIERE, J., LEVALET, D., La Manche, Carte archéologique de la Gaule, Académie des Belles Lettres, Paris, 136 p. PROVOST, M., LECOINTE, A., Inventaire des landes et des pelouses calcicoles du Calvados et de la Manche. DRAE Basse- Normandie, CREPAN, 20 p. SIMMONS I.G., The Moorlands of England and Wales, an environmental history 8000 BC to AD 2000, Edinburgh University Press, 414 p. VILGRAIN, G., et Coll., Digulville, La Gravette-Falguières. Bilan scientifique DRAC -SRA Basse Normandie, p MARCIGNY, C., JUHEL, L., LESPEZ, L., et GHESQUIERE, E., et coll., Omonville-La- Petite, L'abri de la "La Jupinerie", Manche), Fouille d'un abri sous-roche occupé du Néolithique ancien à la fin de l'âge du Bronze. Rapport de Fouille 2002, DRAC-Basse Normandie, INRAP, Conseil Générale de la Manche, 28 p. 41

42 42

43 HISTORIQUE SOMMAIRE DES RECHERCHES ANCIENNES Robert LEROUVILLOIS On ne trouve que des mentions insignifiantes de la Hague dans la plupart des textes antérieurs au XVIIIe siècle, qui en proposent une vision parfois curieuse. Par exemple, François Desrues, un littérateur normand né vers 1570 près de Villedieu-les- Poêles, dans sa Description contenant les antiquitez [ ] de quelques provinces, présentait ainsi la presqu'île de la Hague : " Le long de la coste de la mer, le païs de Costentin est orné d'infinis chasteaux, et quelques villes, et premièrement on void une presque isle, dicte la Hogue, par les latins Ogigies, qui est infertille, ne servant qu'à transporter de la marchandise de là en autres lieux, sçavoir en terre ferme " (1). Quelques remarques sur les toponymes employés ici : la confusion La Hogue / La Hague est fréquente à l'époque ; on la retrouve par exemple dans le libellé des guides de pilotage (celui de Pierre Garcie, publié dès le début du XVIe siècle, mais dont la rédaction initiale remonte à 1483, mentionnait indifféremment la presqu'île sous les graphies La Hocque, La Hocgue, La Houcque, et bien sûr La Hague). Quant à la dénomination latine " Ogigies ", elle a tout pour intriguer. Desrues n'en est pas l'inventeur, puisqu'on la trouvait déjà, sous la forme " peninsula Ogigiarum ", dans l'histoire de France composée en latin par l'évêque d'avranches Robert Ceneau ( ), et publiée à Paris en Ce terme fantaisiste est évidemment chargé de réminiscences mythologiques : " Ôgygia ", dans L'Odyssée, est le nom d'une île mythique, celle où la nymphe Calypso retint le héros Ulysse durant de longues années. Cette île, selon le poète, était située " loin dans l'occident ", sans autre précision géographique. Plutarque, au Ier siècle de notre ère, avait repris ce nom d'ogygie, " une île située très loin dans la mer ", pour en faire le séjour sacré réservé à de bienheureux élus. Plus précis qu' Homère, il la localisait " au large de la Bretagne (c'est-à-dire des côtes britanniques), à cinq jours de route vers le couchant ". L'extrême imprécision des connaissances géographiques de l'ancien temps, à laquelle s'était jointe une fantaisie délibérée, avaient probablement fait le reste. Par ailleurs, comment interpréter cette vision bizarre de la Hague, considérée comme une zone de transit commercial, où les marchandises n'auraient fait que passer, avant de parvenir " en terre ferme "? De quoi laisser le lecteur perplexe Dans le dernier quart du XVIIe siècle, Vauban, chargé par l'autorité royale d'évaluer les défenses du pays sur ses frontières maritimes du nord-ouest, signait en 1686 une Description de Cherbourg et de sa Presqu'Isle, dont la bibliothèque Jacques Prévert à Cherbourg a conservé un exemplaire original paraphé de sa main. Une seule phrase y est consacrée à la Hague, qui clôt de la manière suivante une évocation générale de la presqu'île : " Le surplus du païs [de Cotentin] est naturellement coupé de hayes, quelques pièces de bois taillis et de landes qui sont toutes pleines d'eau pendant l'hiver. Les environs du Cap de la Hague et fosse d'aumonville en peuvent estre exceptez, bien qu'ils soient meslez de hauts et de bas et de beaucoup de landes ; ce coing de païs est sec et de peu de rapport, non tant coupé que l'autre, mais il est de petite estenduë " (2). À remarquer ici l'expression " fosse d'aumonville ", employée couramment à l'époque pour désigner la petite rade d'omonville-la- Rogue. L'ingénieur militaire - comme c'était sans doute le cas pour ses pairs - marque le peu d'attention qu'il convient, selon lui, de porter à la Hague, un " bout du monde " dépourvu d'intérêt à ses yeux. Rien d'étonnant par conséquent si aucun chercheur ne s'y fût intéressé sous un angle quelconque avant le milieu du XVIIIe siècle. Tout va changer brusquement avec l'époque des Lumières, en raison de l'initiative prise par un groupe d'érudits locaux, ceux qui viennent de fonder la Société Académique de Cherbourg en janvier La première sortie collective, " sur le terrain ", aura lieu dès le printemps suivant ; son objectif est une fouille (superficielle, probablement) de la " galerie druidique " des Pierres Pouquelées à Vauville (3). Par malchance, aucun compte-rendu écrit ou document quelconque n'a subsisté de cette investigation initiale, accomplie officiellement par les membres de la compagnie - une " première " en Normandie! -, sur la proposition et sous la conduite de Pierre Avoyne de Chantereyne ( ), le premier archéologue de notre région, âgé alors de 27 ans. En 1760, le géographe Jean-Baptiste Bourguignon d'anville ( ) essaie d'appliquer à la France les données recueillies dans la Table de Peutinger, copie médiévale sommaire et déformée d'un document itinéraire remontant probablement à l'antiquité, et que les travaux de Nicolas Bergier avaient popularisée depuis un certain temps (4). Les développements consacrés au Cotentin s'efforcent d'y localiser les toponymes Alauna, Cosedia, Ingena, Legedia, Crociatonum, et bien sûr Coriallum. Se fiant aveuglément aux distances consignées en lieues gauloises sur le docu- 43

44 Historique sommaire des recherches anciennes ment antique, considéré à tort comme une véritable carte, d'anville, règle et compas en main, accumule les erreurs successives à mesure que la route s'allonge au nord à travers le Cotentin. Pour éviter de voir aboutir fâcheusement l'itinéraire en haute mer, quelque part au nord de Cherbourg, il préfère le faire obliquer arbitrairement jusqu'au cap de la Hague. Repérant alors, sur une carte de son époque, le nom de Gouril (notre Goury), le géographe décide de voir dans Gouril une variante du toponyme Coriallum (5). La conséquence absurde de son calcul, localisant péremptoirement Coriallum à la pointe de la Hague sans le moindre indice archéologique ni la moindre vérification sur le terrain, sera reprise comme vérité, durant tout le XIXe siècle, par des émules farfelus! Les archives de la Société Académique de Cherbourg (notamment les registres des séances et délibérations, où sont consignées les diverses activités de la compagnie et de ses membres) font état d'une autre investigation de Pierre de Chantereyne, en 1770, concernant les tombelles de la Hague ; mais pas plus qu'auparavant, aucun renseignement complémentaire ne subsiste, ni la localisation précise de la fouille. C'est deux ans plus tard seulement, en 1772, qu'eut lieu une autre prospection systématique dans la région de Beaumont, sur le plateau de la Hague et dans le secteur d'omonville-la-rogue. Il en résulta un rapport écrit, de la main de Chantereyne, dont l'original n'a pas subsisté, mais qui par chance avait été recopié, à l'époque napoléonienne - nous n'avons pas la date exacte de la copie -, par les soins de l'abbé Constant-Germain Demons ( ), ancien curé de Cherbourg, féru de recherches archéologiques et membre de la Société Académique. Cette copie, en 10 feuillets manuscrits, est conservée par la bibliothèque Jacques Prévert à Cherbourg (6). D'un grand intérêt, elle contient la première description connue du rempart néolithique du Hague-dike, portant la date de La suite du mémoire porte notamment sur le fort d'omonville et sa grande ancienneté supposée, malgré l'absence d'éléments probants. Un complément intéressant à cette rédaction, provenant lui aussi de Pierre de Chantereyne, à une date légèrement postérieure, est conservé également à la bibliothèque Jacques Prévert de Cherbourg ; il concerne aussi le Hague-dike (7). L'avantage de ce manuscrit de l'histoire de Cherbourg, par rapport à la version imprimée publiée en 1873 par les soins d'édouard de Chantereyne, petit-fils de Pierre (8), est qu'on y distingue facilement, grâce aux couleurs, la rédaction d'origine, antérieure à 1789 (transcrite en noir), et les additifs ultérieurs (portés en rouge, et en bas de page). En appendice de ses Études historiques sur Cherbourg dont nous venons de donner la référence, Édouard de Chantereyne avait également inséré quelques fragments recueillis parmi les notes laissées par son grand-père. On y trouve un développement sur les tombelles de la Hague, dont probablement celles prospectées par Pierre de Chantereyne en 1770, et que nous mentionnions cidessus. Il y est question de " treize tombeaux antiques élevés sur une lande dans une plaine unie ", situés selon lui " à une demi-lieue du centre du camp [de Hague-dick] vers le nord-ouest ", c'est-àdire dans la région comprise entre Digulleville, Beaumont et Herqueville, ce qui manque de précision, ainsi que de deux autres situés respectivement " près le pont des Deéries " et " à un quart de lieue de l'église de Herqueville vers l'ouest " (9). L'un de ces tombeaux (le texte ne précise pas lequel) avait été ouvert par le comte de Beaumont en " Beaucoup de médailles de bronze furent trouvées, en 1786, au lieu-dit Le Castel Vendon " [sur les falaises de Gréville] (10). 44

45 En 1788, trouvailles de haches de bronze à Vauville, aux lieux-dits " La Terrasse " et " La Butte de César ", on ignore par qui et en quelles circonstances (11). En 1792, à l'occasion d'une trouvaille fortuite de monnaies romaines (60 sesterces du Haut- Empire) sur la falaise du Castel-Vendon à Gréville, les " antiquaires " cherbourgeois sont alertés. Le maire d'éculleville, Bon Marin Duval, fait réserver un bon nombre de ces médailles pour l'archéologue Augustin Asselin ( ), alors absent de Cherbourg. Son collègue Henri Duchevreuil ( ), prévenu par Asselin, se rend sur place et complète la fouille (12). À la Société Académique de Cherbourg (séance du 12 octobre 1809), compte-rendu par Duchevreuil, l'abbé Demons et Henry Delaroque de leur récente fouille du tumulus de Vauville dit " Butte de César ", où ils ont trouvé des restes de dépouilles incinérées (13). En 1810, fouille archéologique, dans un landage au lieu-dit " La Cour " à Auderville, d'un tumulus par Henri Duchevreuil et Charles de Gerville (14). Charles de Gerville ( ), admis le 25 juillet 1809 à la Société Académique de Cherbourg en qualité d'associé-adjoint, y présente l'année suivante des " Remarques sur l'ancienneté du Hague-dick, qu'il croit être antérieur au tems où les Anglais furent expulsés de la Normandie " (15). En effet, son collègue l'abbé Demons, lui aussi ancien émigré outre-manche, estimait le Haguedike d'origine anglaise, pour de prétendues raisons étymologiques. Gerville, lui, y voyait l'œuvre des " pirates du nord ", autrement dit des Vikings du IXe siècle, ou peut-être des Saxons, leurs prédécesseurs. Vers 1810, trouvaille fortuite à Urville- Hague, " dans le lit d'un cours d'eau, près des moulins du Gardier " [sur la rivière la Biale], de " quelques monnaies " romaines du Haut-Empire, recueillies par Henri Duchevreuil et Charles de Gerville (16). En 1814, première publication de Charles de Gerville sur les " camps romains " de la Manche. La plupart de ces prétendus camps étaient des retranchements de terre d'époque protohistorique, parfois réutilisés par les Gaulois, mais nullement romains. Gerville en répertoriait quelques-uns dans la Hague (17). Mais c'est en 1819 que Gerville commencera à s'occuper sérieusement de la Hague ; en témoigne sa lettre adressée au préfet de la Manche le 29 septembre 1819 sur " les antiquités gauloises et normandes de l'arrondissement de Cherbourg " (18) : il y passe en revue le Hague-dike, les tumulus de la Hague (Jobourg, Omonville-la-Petite, Digulleville, Beaumont), les retranchements d'omonville-la-rogue, l'allée couverte des Pierres Pouquelées à Vauville. 45

46 Historique sommaire des recherches anciennes En 1820, importante découverte numismatique à Urville-Hague (lieu et inventeur non précisés) : 400 à 500 monnaies d'argent gauloises anépigraphiques (tête de cheval ou de sanglier sur une face, effigie [divine?] sur l'autre) (19). En 1820, découverte à Auderville, sur la lande du Calenfrier, d'un anneau-disque de schiste poli (Ø = 13 cm.). Inventeur : Me Lecarpentier, notaire à Ste-Croix-Hague et archéologue amateur. Provenant peut-être d'un tumulus disparu, l'objet, datant sans doute du Néolithique ancien (fragments de vase en céramique trouvés à proximité), est actuellement conservé au Muséum du Parc Liais à Cherbourg (20). En 1822, à Digulleville (lieu exact non précisé), un paysan exhume fortuitement en plein champ les éléments d'un dépôt votif d'époque galloromaine (figurines humaines et animales de bronze, moulages de " Vénus anadyomènes " en terre blanche de l'allier, hache de fer et cuivre). Prévenu à temps, Henri Duchevreuil achève la fouille et recueille les objets (21), dont la majeure partie se trouve toujours au Muséum de Cherbourg. Pour compléter ses propres recherches (plutôt superficielles) dans la Hague, Gerville sollicite fréquemment le concours du clergé local : en témoignent les nombreuses lettres que recèle sa correspondance, comme celles de l'abbé Déquilbec, curé de Vauville, datées de 1823 (22) et portant sur la Butte de César, les Pierres Pouquelées, les tumulus de Jobourg, Omonville-la- Petite et Digulleville, les tertres de Branville, le retranchement de Nacqueville. D'autres correspondants sont requis : le plus actif est Pierre Le Fillastre, chargé bénévolement par Gerville de prospections systématiques dans la Hague dès 1826 : allée couverte et retranchements de Vauville, examen minutieux du Hague-dike (23). La contribution la plus importante de Le Fillastre sera celle de juillet 1831 : " Camp central de Beaumont et de Branville, fossé ou banque du Hague-dike, tombeaux du cap de la Hague, tumuli de Beaumont ", etc. (24) En 1826, trouvaille d'une centaine de haches de bronze à douille sur le plateau de la Hague, au lieu-dit " L'Épinette " (confins Ste-Croix- Hague/Vauville), près d'une allée couverte, enfouies dans un vase de terre cuite (tumulus détruit?). Inventeur : Me Lecarpentier. L'un des exemplaires est conservé au Muséum de Cherbourg (25). Dans deux communications successives présentées en mai et novembre 1828 à la Société des Antiquaires de Normandie à Caen, Charles de Gerville présente une thèse qui lui tient à cœur, bien que dépourvue d'arguments convaincants (26). À son avis, la voie antique (prétendument romaine) reliant la Hague à Portbail via Vauville aurait eu Omonville-la-Rogue comme origine. Selon lui, le toponyme médiéval Milleharts (château de Milleharts à Vauville, indiqué par un correspondant) représenterait le mot latin milliarium, indication routière qui en serait une preuve. Curieusement, ces affirmations injustifiées, selon lesquelles Omonville aurait été un port antique, ont été admises sans examen par de nombreux chercheurs jusqu'en plein XXe siècle. La publication majeure de Charles de Gerville sur la Hague fut présentée en novembre 1831 à la Société des Antiquaires de Normandie. Elle fit par la suite l'objet d'un copieux mémoire, intitulé Recherches sur le Hague-dike et les premiers établissements militaires des Normands sur nos côtes (27). À ce mémoire étaient annexés deux autres développements, portant sur les retranchements de terre d'omonville-la-rogue (28) et sur les tumulus de la Hague (29). S'appuyant sur la description de vestiges apparemment comparables décrits par les " antiquaires " anglais, Gerville tentait d'accréditer l'idée que ces diverses constructions humaines étaient l'œuvre des mêmes " pirates du nord " qui avaient jadis envahi la Normandie. En 1833, Pierre Le Fillastre publie dans l'annuaire de la Manche un long article portant d'abord sur les mégalithes, puis sur les objets de bronze inventoriés dans le département. Il y consacre deux pages aux Pierres Pouquelées (30) avant d'évoquer, dans une longue note insérée dans le complément, les tumulus du canton de Beaumont (Beaumont, Jobourg, Vauville, Biville, Branville, Auderville, Éculleville), ainsi que le Hague-dike et les enceintes circulaires d'omonville-la-rogue (31). La même année, Louis Ragonde, conservateur du musée de Cherbourg qui vient de s'ouvrir au public, consacre un article aux " monuments celtiques " de la région ; l'allée couverte de Vauville y est décrite, ainsi que les tombelles voisines de Beaumont et de Ste-Croix-Hague (32). C'est aussi en juin 1833 que l'abbé Jean- Pierre Digard, curé de St-Martin-Hague, communiquait par lettre à Charles de Gerville les renseignements sollicités par ce dernier au sujet du Haguedike et des tombelles et autres tumulus de la pointe de la Hague (Jobourg, Omonville-la-Petite, Digulleville, Beaumont et Vauville) (33) Vers 1850, un cultivateur de la Hague, Félix Lecostey, fit la découverte d'une hache de bronze à talon au tranchant courbe " sur la lande de Beaumont, dans un champ près de la fontaine du bienheureux Thomas " (sans doute aux confins de Biville et de Ste-Croix-Hague). Cette hache dite à talon naissant (début du Bronze moyen) provenait sans doute d'un tumulus détruit. Elle est conservée à Cherbourg, au Muséum du Parc Liais (34). 46

47 En 1851, un notaire de Ste-Croix-Hague amateur d'archéologie, Me Lecarpentier, conduisit une fouille à Beaumont, au lieu-dit " La Fosse Yvon ", dans un tumulus qu'on venait d'éventrer afin de le convertir en four à chaux. La fouille livra une épée de bronze de 40 cm., brisée au premier contact, et dix pointes de flèches en silex très finement ciselées. Le Muséum de Cherbourg conserve l'unique exemplaire subsistant de ces pointes de silex, ainsi que la pointe de l'épée en bronze (35). Durant tout le XIXe siècle, l'identification et l'origine du Hague-dike compteront parmi les grands sujets de spéculation des chercheurs, depuis Augustin Asselin dès 1810 (36) et Auguste Le Prévost, à qui Gerville adresse une lettre en septembre 1825 (37), en passant par Arcisse de Caumont, en désaccord très tôt avec Gerville (38). À son tour, George-Bernard Depping donne sa préférence en 1844 (39). Sept ans après la mort de Gerville, qui de sa vie n'avait changé d'opinion ni sur le Hague-dike, ni sur Omonville, ni sur les prétendus " camps romains " de la partie sud de la Hague (40), Caumont reviendra à la charge pour soutenir sa propre thèse (41). Au même congrès de Cherbourg en 1860, le capitaine de vaisseau Rostaing relancera le sujet en plaçant Coriallo dans l'anse Saint- Martin (42). Tout y passe : le Hague-dike, le " camp " de Jobourg, les tumulus de la Hague, les découvertes archéologiques d'auderville et d'éculleville, l'allée couverte de Vauville. Dès lors, chacun voudra montrer sa compétence sur des sujets aussi controversés : les géographes Ernest Desjardins (43) et Elisée Reclus (44), le linguiste Charles Joret (45), tous trois sur l'origine supposée du Hague-dike ; puis ce sera le tour du vicomte de Potiche, dont l'amateurisme n'a d'égal que sa prolixité : son sujet, la baie du Mont Saint-Michel et son hypothétique évolution, ne l'empêche pas de consacrer un développement à l'origine du Hague-dike, ainsi qu'un autre à Coriallo, selon lui " ville perdue dans l'anse Saint- Martin-de-Hague-Dick "! (46) Reprenant en 1894 le sempiternel thème des voies romaines, le chanoine Émile-Auber Pigeon, qui exerçait principalement sa compétence dans la région d'avranches, essaya, quant à lui, pour localiser le mythique et introuvable " port romain " de la Hague, de concilier l'ancienne thèse de Bourguignon d'anville avec les conceptions de Gerville, de Rostaing et de Potiche à la fois, ce qui faisait beaucoup! Sur sa carte étaient figurées deux voies romaines secondaires, aussi imaginaires l'une que l'autre, partant respectivement de Goury et de l'anse Saint-Martin pour rejoindre Coutances (47). L'ampleur des découvertes sur le site gaulois de Nacqueville-bas, qui s'échelonnent depuis 1868 jusqu'à nos jours, ainsi que les recherches dans la région de la Hague durant le XXe siècle, feront l'objet d'un développement ultérieur. NOTES (1) François DESRUES : Description contenant les antiquitez, fondations et singularitez de plusieurs villes, chasteaux et places remarquables de quelques provinces du royaume de France (Coutances, [s. n.], 1608), p (2) Sébastien LE PRESTRE, marquis de VAUBAN : Description de Cherbourg et de sa Presqu'Isle (Bibl. J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 580), folios 2 verso & 3 recto. (3) Archives de la Société Académique de Cherbourg : Procès-verbaux des séances (cahier manuscrit). (4) La seconde édition de l'histoire des grands chemins de l'empire romain, l'œuvre capitale de Bergier, avait paru en 1728 chez Jean Léonard à Bruxelles. (5) J.-B. BOURGUIGNON D'ANVILLE : Notice de l'ancienne Gaule (Paris, Dessaint & Saillant, 1760), p. 246 : Coriallum. (6) Description de l'ancien fort d'omonville et du camp de Haguedick, 1772 (Bibl. J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 294 [10 feuillets]). (7) Histoire de Cherbourg, par M. Gilles- Pierre de Chantereyne, revue et complétée par M. Édouard de Chantereyne (Bibl. J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 105) [le développement concernant le Hague-dike se situe p. 39]. (8) LA TOURELLE [pseudonyme d'édouard Avoyne de Chantereyne] : Études historiques sur Cherbourg (Lisieux, typogr. Vve Émile Piel, 1873). - Le Hague-dike y est évoqué p (9) Études historiques sur Cherbourg : Notes additionnelles, p (10) Auguste VOISIN : Inventaire des découvertes archéologiques du département de la Manche, in Bulletin de la Société Artistique et Industrielle de Cherbourg, n 24, année 1900, p. 42. (11) Émile LE CHANTEUR DE PONTAU- MONT : Notes historiques et archéologiques sur les communes de l'arrondissement de Cherbourg, in Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, tome XXII (1856), p. 227 : Vauville. (12) Cf. Augustin ASSELIN : Autres découvertes d'antiquités faites de nos jours dans les arrondissements de Cherbourg et Valognes, in Mémoires de la Société Nationale Académique de Cherbourg, année 1838, p (communication lue à la Société des Antiquaires de Normandie en 1829). (13) Archives de la Société Académique de Cherbourg : Procès-verbaux des séances, 1779 à 1817 (cahier manuscrit). (14) Cf. C. de GERVILLE : Tumuli du promontoire de la Hague, in Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, tome VI (1831/33), p (15) Notice des principaux ouvrages pré- 47

48 Historique sommaire des recherches anciennes sentés à la Société Académique de Cherbourg, in Mélanges Augustin Asselin (Bibliothèque Jacques Prévert, Cherbourg, Fonds Amiot, cat : Ouvrages lus aux séances tant publiques que particulières, folio 43 [année 1810]. (16) Auguste VOISIN : Inventaire des découvertes archéologiques du département de la Manche, in Bulletin de la Société Artistique et Industrielle de Cherbourg, n 24, année 1900, p. 65. (17) La première mouture cette Notice sur les camps romains de la Manche parut le 8 mars 1814 dans Le Moniteur Universel. Une version enrichie du même article serait reprise en 1824 : cf. C. de GERVILLE : Notice sur les camps romains existans dans le département de la Manche, in Louis DU BOIS : Archives annuelles de la Normandie (Caen, Mancel, 1824), p. 97 à 108. (18) Bibliothèque J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 245 (Correspondance de Gerville), folio 8 recto & verso. (19) A. VOISIN, ibidem. (20) Cf. Dr Charles RENAULT : Inventaire des découvertes préhistoriques et gallo-romaines faites dans les environs de Cherbourg (Cherbourg, Imp. Mouchel, 1880), p. 14. (21) Cf. Note de M. Duchevreuil sur quelques objets antiques découverts à Digulleville, in Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, tome Ier (1824), 1ère partie, p. 50 à 57. (22) Correspondance de Gerville : Bibliothèque J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 252, folios 92 à 95. (23) Correspondance de Gerville : Bibliothèque J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 255, folios 125 et suivants. (24) Correspondance de Gerville : Bibliothèque J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 255, folios 102 à 107. (25) Dr C. RENAULT, ibidem, p. 7. (26) Cf. C. de GERVILLE : Recherches sur les villes et les voies romaines dans le Cotentin (Valognes, Carette-Bondessein, 1838) : Introduction, p. XIX. (27) Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, tome VI (1831/33), p. 193 à 212, et tiré à part (Caen, Mancel, 1833). (28) Des redoutes circulaires d'omonville, ibidem, p. 212 à 223. (29) Tumuli du promontoire de la Hague, ibidem, p. 223 à 253. (30) P. LE FILLASTRE : Description des monumens druidiques de la Manche, in Annuaire de la Manche, 1833, p. 220 et suiv. : Galerie couverte de Vauville, p. 252 à 254. (31) P. LE FILLASTRE : Monnaies, armes et instrumens en bronze attribués aux Gaulois et trouvés, depuis un demi-siècle, dans le département (complément à l'article précédent), ibidem, p.257 à 263. La note en question occupe les pages (32) L. RAGONDE : Autres monumens celtiques (complément succédant à l'article Description d'un témène ou enceinte druidique qui se trouve dans la lande des Pieux), in Mémoires de la Société Académique de Cherbourg, 1833, p. 213 à 236. (33) Correspondance de Gerville : Bibliothèque J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 252, folios (34) Cf. Dr Charles RENAULT : Inventaire des découvertes préhistoriques et gallo-romaines faites dans les environs de Cherbourg (Cherbourg, Imp. Mouchel, 1880), p. 5 ; et Auguste VOISIN : Inventaire des découvertes archéologiques du département de la Manche, in Bulletin de la Société Artistique et Industrielle de Cherbourg, n 24, année 1900, p. 20. (35) Cf. Émile LE CHANTEUR DE PON- TAUMONT : Notes historiques et archéologiques sur les communes de l'arrondissement de Cherbourg, in Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, tome XXII (1856), p. 215 : Beaumont. (36) Correspondance de Gerville : Bibliothèque J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 245, folio 73 : minute d'une lettre de Gerville à Duchevreuil au sujet de l'opinion d'asselin sur le Hague-dike. (37) Correspondance de Gerville : Bibliothèque J. Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 250, folios 177 à 179 : copie d'une lettre de Gerville à Le Prévost (19/09/1825). (38) Cf. A. de CAUMONT : Cours d'antiquités monumentales, tome Ier : Ère celtique (Paris, Lance, 1830), p.199 [sur le Hague-dike et les retranchements de terre]. (39) G.-B. DEPPING : Histoire des expéditions maritimes des Normands (Paris, Didier, 1844, 2e éd.), p. 366 [sur l'origine supposée du Haguedike]. (40) Cf. C. de GERVILLE : Études géographiques et historiques sur le département de la Manche (Cherbourg, Feuardent, recueil posthume d'articles), p. 52 et suiv. (41) Cf. Congrès scientifique de France, 27e session, Cherbourg, sept (Paris, Derache, 1861), p [discussion sur le Hague-dike, avec intervention d'a. de CAUMONT]. 48

49 (42) E. de ROSTAING : Coriallo et le Pagus Coriovallensis du Cotentin, ou étude géographique et hydrographique sur les ports celtiques de Coriallo, Corbilo et Iktin, in Congrès scientifique de France, 27e session, Cherbourg, sept. 1860, tome II (Cherbourg, Auguste Mouchel, 1861), p. 6 à 61. (43) E. DESJARDINS : Géographie historique et administrative de la Gaule romaine, tome 1er (Paris, Hachette, 1876), p (44) É. RECLUS : Nouvelle géographie universelle, tome II : La France (Paris, Hachette, 1877), p (45) C. JORET : Des caractères et de l'extension du patois normand (Paris, Vieweg, 1883), p. 15. (46) Vicomte T.-M. de POTICHE : La baie du Mont Saint-Michel et ses approches (Avranches, Imp. Jules Durand, 1891), p. 34 à 36. (47) E.-A. PIGEON : La grande voie romaine traversant le département de la Manche et celui d'ille-et-vilaine, in Notices, mémoires et documents publiés par la Société d'agriculture, d'archéologie et d'histoire naturelle du département de la Manche, volume XII (1894), p. 95 à 106 (avec carte p. 96). 49

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51 LE PALEOLITHIQUE DANS LA HAGUE : LES PREMIERS PEUPLEMENTS DE LA PRESQU'ILE Dominique CLIQUET PETITE HISTOIRE DE LA PRÉHISTOIRE La recherche paléolithique en Basse- Normandie et notamment dans le département de la Manche s'avère relativement récente, à la différence de la Haute-Normandie où la préhistoire ancienne fait très tôt l'objet d'inventaires et d'études (Coutil, 1893). Ce développement de la recherche paléolithique est intimement lié à l'exploitation de terre à brique qui livre en abondance restes de faunes et industries humaines. Ces vestiges feront l'objet de nombreuses études et synthèses (Bordes, ). Il en va différemment en Basse-Normandie où les témoignages sont restés plus rares jusqu'à une période récente. Seuls quelques sites sont mentionnés ou font l'objet d'études (Menut, 1886 ; Bogard, 1954). Il faut attendre les années 60/70, pour que la recherche paléolithique prennent son essor sous l'impulsion de quelques érudits locaux. Ces derniers collectent les industries mises au jour par l'érosion littorale et à l'occasion de terrassements (Robert Lemière, Paul Maubray, Maurice Audouard, Frédéric Scuvée...). Mais l'impulsion décisive est donnée par les observations effectuées, principalement par Denise Michel et Gérard Vilgrain, ces vingt-cinq dernières années sur les falaises de la presqu'île du Cotentin. Elles concourent à la mise en évidence d'un semis continu de témoins d'occupation sur le littoral actuel depuis Flamanville jusqu'à Saint-Vaast-la-Hougue, et surtout de gisements structurés paléolithiques (Fosse, 1982 ; Fosse et al., 1986). Dans la Hague, les travaux se succèdent depuis les années 1970 avec les fouilles et les sondages menés sur les sites suivants : - le Nez Quillas à Saint-Germain-des-Vaux (investigations menées par Gérard Fosse en 1968); - le Rozel (fouilles Frédéric Scuvée de 1967 et 1969 ; Scuvée et Vérague, 1984, 1988 ; Cliquet, 1994, Cliquet et al., 2003); 51

52 Le paléolithique dans la Hague : les premiers peuplement de la presqu île - «Gélétan» à Saint-Germain-des-Vaux, (fouilles Denise Michel, ; Michel, 1994); - «Port-Racine» à Saint-Germain-des-Vaux (fouilles D. Cliquet, ; Cliquet, 1994) ; - Siouville / Tréauville (fouilles Gérard Vilgrain ; Vilgrain et al., 1988 ; Vilgrain et al., 1991); - Digulleville (sondage Gérard Vilgrain de 2001 ; Coutard et al, 2002) Tous ces travaux ont permis de mieux appréhender les milieux dans lesquels évoluaient les premiers habitants de la Hague, de procéder à des analyses technologiques du matériel lithique Ces dernières révèlent les processus techniques de mise en œuvre et illustrent les stratégies d'acquisition des matières premières. L'examen minutieux des espaces de vie et de travail permet une approche des modes de vie de ces lointains ancêtres. DES ENVIRONNEMENTS ET DES HOMMES Conventionnellement, le Paléolithique (anciennement appelé Age de la pierre taillée) correspond aux premiers peuplements humains. Si les vestiges témoignant de l'origine de l'humanité s'avèrent sans cesse plus nombreux et de plus en plus anciens, notamment sur le continent africain, les premières occupations anthropiques aux portes de l'europe ne remontent qu'à 1,8 millions d'années (Dmanisi en Géorgie). Ces implantations s'effectuent dans des espaces géographiques tropicaux, puis tempérés à tempérés chauds toujours plus étendus. Nos lointains ancêtres ont certainement quitté le " berceau africain " en suivant les migrations de grands mammifères. En effet, au Paléolithique, l'homme vit aux dépens de son environnement, c'est un chasseur-pêcheur-cueilleurcollecteur essentiellement nomade qui doit s'adapter aux variations climatiques rythmées par une succession de phases glaciaires et interglaciaires. Ces variations climatiques se traduisent par une profonde modification des environnements : paysage arctique durant les maximum glaciaires, milieux boréaux en début et en fin d'épisode glaciaire, environnement tempéré durant les interglaciaires. Ces changements climatiques s'accompagnent d'une variation des lignes de rivages. LE QUATERNAIRE : UNE ÈRE RYTHMÉE PAR LES FLUCTUATIONS CLIMATIQUES Durant les épisodes interglaciaires et les interstades bien marqués, le climat est tempéré à boréal. La mer d'abord transgressive érode les falaises constituées de sédiments meubles. Le littoral cotentinois apparaît formé d'échines granitiques, de falaises et de massifs dunaires. Des vallées entaillent le plateau et s'ouvrent sur le littoral. Le niveau de la mer peut être aussi élevé que l'actuel, durant les épisodes tempérés voire légèrement supérieur à l'actuel durant le dernier interglaciaire (vers ans), un peu inférieur pendant les répits climatiques du dernier glaciaire (entre et ans). En position de cap, la côte est alors rocheuse et pourvue de cordons de galets. La fin de l'interglaciaire est marquée par une dégradation du climat, un niveau marin régressif qui libère de vastes espaces colonisés par les formations continentales (tourbes de Saint- Germain-des-Vaux et des Ilets, rankers... de la fin du dernier interglaciaire). En position de golfe, les larges espaces libérés par la mer se continentalisent (Cotte de Saint-Brelade à Jersey, Saint-Vaast-la-Hougue dans le Val de Saire, Le Rozel dans la Hague) et favorisent le développement de marais. L'archipel de Chausey et l'île de Jersey perdent alors leur insularité. Lorsque l'homme investit les cordons littoraux en voie de continentalisation, le milieu est ouvert, dominé par les graminées, clairsemé de bouquets d'arbres. Les espèces arboréennes comportent principalement des feuillus (chêne, orme, noisetier, frêne, aulne...) et quelques résineux (pin sylvestre). Puis, la végétation, toujours caractéristique d'un milieu froid, apparaît dominée par le pin sylvestre. Notre connaissance du couvert végétal est fondée sur l'étude des pollens et des charbons de bois du gisement de la Cotte de Saint-Brelade à Jersey (Callow et Cornford, 1986), pour les répits climatiques de l'avant dernière glaciation (stade 7 des carottes océaniques) et des sites de Saint- Germain-des-Vaux, "Port-Racine" et d'omonville, " les Ilets " (pollens et charbons de bois) (Clet, 1988 ; Thiébault et al., 1988, Cliquet, 1994). Notre appréhension de la faune repose sur les sites, de la Cotte Saint-Brelade à Jersey, où alternent faunes de climat froid et de contexte tempéré, du Rozel pour la fin du dernier interglaciaire (Scuvée et al., 1984) et pour le Val de Saire, de Fermanville : La Mondrée (Scuvée et al., 1988 ; Coutard, 2003 ; Coutard et al., 2005). Peu à peu, les formations hétérogènes de versant, caractéristiques des débuts de glaciations, se mettent en place. Elles sont constituées de coulées de boues et de blocailles (head), révélatrices d'un climat froid et humide. Le mammouth (Elephas primigenius) fait 52

53 son apparition à Jersey, durant l'avant dernier glaciaire. Les anciens estrans se couvrent d'une steppe de graminées où paissent les grands herbivores. L'homme investit ces espaces vers ans. Le phénomène se reproduit dans le sud Manche, en baie du Mont-Saint-Michel pendant la dernière glaciation, comme en témoignent les éléments de faune collectés au Mont-Dol, en Bretagne : mammouth, rhinocéros laineux, cheval, bovidés... (Monnier et al., 1995). A mesure que la glaciation s'intensifie, le niveau de la mer s'abaisse, en raison de l'accumulation d'importantes masses d'eau sur les pôles. Peu à peu, le paysage devient steppique puis laisse place à la toundra. A Jersey, la dernière phase glaciaire du Saalien (vers ans) est marquée par la constance du mammouth (Elephas primigenius), la présence partielle du renne (Rangifer tarandus) et celle sporadique du lemming (Dicrostonyx torquatus). Ces deux dernières espèces témoignent d'un climat très rigoureux. A la Cotte de Saint-Brelade, à Jersey, l'homme s'installe dans les fissures de la falaise granitique. Lentement, les apports éoliens apparaissent et prennent de plus en plus d'importance, signe d'un assèchement progressif du climat qui est froid, sans que disparaisse totalement un certain ruissellement saisonnier. Au plus intense du dernier glaciaire, le niveau marin est environ 100 m plus bas qu'actuellement. L'Angleterre est alors rattachée au continent. Les côtes ouest du Cotentin sont éloignées de plus de 100 kilomètres des lignes de rivages actuelles. La rigueur du climat contraint hommes et animaux à migrer vers des paysages plus cléments. L'homme ne réapparaîtra qu'à la fin du dernier glaciaire, quand la végétation reprendra ses droits (Cliquet et Vilgrain, 2000). DEPUIS QUAND L'HOMME EST-IL HAGARD? Dans l'état actuel des recherches et à la différence de ce qu'on observe en Europe méridionale (Bassin méditerranéen), l'espace septentrional ne semble pas avoir été " colonisé " par l'homme avant 600 à ans avant notre ère. Néanmoins, les travaux conduits ces dernières années en Baie d'audierne (Finistère) laisseraient supposer la présence de l'homme en France du 53

54 Le paléolithique dans la Hague : les premiers peuplement de la presqu île nord-ouest antérieurement à ans ; en Normandie et plus particulièrement dans le département de la Manche, les indices d'occupations anthropiques ne sont pas aussi anciens. En Normandie, les témoignages d'occupations humaines les plus anciens attestés se rencontrent dans la vallée de la Seine et remontent à ans (Saint-Pierre-les-Elbeuf ; Seine-Maritime). A ce jour, dans le département de la Manche, les vestiges trouvés en contexte chronostratigraphique s'avèrent plus récents : un éclat de façonnage de biface datable de ans a été collecté dans le Val de Saire (Coutard, 2003), des artefacts taillés associés à d'anciens niveaux de plage, recueillis en position secondaire à Fermanville / Port-Pignot et à Saint-Germain-des-Vaux / Gélétan estimés à environ ans. Les niveaux sus-jacents rencontrés sur ces deux sites témoignent d'implantations structurées dès les alentours de 180 / ans. 54

55 La plupart des occupations se rencontrent en pied de falaise littorale où elles ont été préservées de l'intense érosion qui a " décapé " les plateaux. Les habitats de vallées se trouvent quant à eux fossilisés sous d'importants colluvionnements qui tapissent les versants et les fonds de vallées. En somme, l'essentiel des sites répertoriés se trouvent sur la frange littorale actuelle. Outre la présence de nombreux abris naturels, la côte permettait la collecte de matières premières dans les cordons littoraux. Dans le Cotentin, le silex apparaît majoritairement utilisé. Cette implantation en pied des reliefs sculptés par la dynamique littorale a du permettre à l'homme d'exercer une prédation variée, fondée sur plusieurs écosystèmes. Ce sont principalement les grands herbivores qui constituent " l'ordinaire " des préhistoriques, comme en témoignent de nombreux gisements, actuellement implantés sur la côte mais qui se trouvaient parfois très éloignés de la mer durant les épisodes frais à glaciaire (principalement en position de golfe). Les témoignages du passage de l'homme ne se limitent pas à son seul outillage de pierre, principalement le silex, de nombreuses structures d'habitat ont aussi été reconnues (arrangements de blocs, foyers, amas de débitage de produits lithiques...) et font du nord Cotentin un espace géographique de référence pour l'analyse de l'organisation de l'espace au Paléolithique ancien et moyen (cf. infra). Durant le Paléolithique, période la plus longue de notre histoire, plusieurs types humains se sont succédé ou ont évolué parallèlement. Les plus vieilles industries sont attribuables à la fin du Paléolithique inférieur, à l'acheuléen et à la Phase ancienne du Paléolithique moyen, soit entre (?) et ans et seraient le fait des derniers Homo Erectus et / ou des premiers Néandertaliens. Ces hommes sont à l'origine de nombreux acquis technologiques comme la découverte du feu, une organisation de l'espace domestique (cabanes et huttes) de plus en plus élaborée, l'invention de la technique Levallois... Cette dernière consiste en la mise en œuvre de matières lithiques visant à la production d'éclats prédéterminés (formes, modules et, selon le schéma, standardisation d'une production en série). 55

56 Le paléolithique dans la Hague : les premiers peuplement de la presqu île Cette technique suppose un enchaînement de gestes préalablement pensés et témoigne d'une structuration déjà très élaborée de l'encéphale d'homo Erectus et des pré-néandertaliens. Les industries caractéristiques de ces hommes se composent soit de bifaces (souvent façonnés sur des galets de silex) associés à une abondante industrie sur éclat (racloirs, pièces à encoches...), correspondant à l'acheuléen, soit d'une industrie uniquement sur éclats attribuée à la phase ancienne du Paléolithique moyen. Les quelques sites acheuléens actuellement recensés sont associés à des niveaux susjacents aux plages anciennes (Equeurdreville "La Saline et la Chasse-Mitais (?) ; Michel, 1969/1970, 1982, 1994, Verron, 1977). Les séries antérieures à ans du site de la Cotte de Saint-Brelade, attribuables à la phase ancienne du Paléolithique moyen, ne comportent pas de biface. Les assemblages les plus anciens comportent dans un premier temps essentiellement des encoches et des denticulés ; dans un second temps, des racloirs (Callow, 1986). Le site de Gélétan à Saint-Germain-des-Vaux se rapporterait aussi à la phase ancienne du Paléolithique moyen, malgré la présence de rares bifaces (Michel, 1994). Avec l'homme de Neandertal, les aires d'activités techniques se diversifient, le débitage de lames selon un schéma volumétrique apparaît, témoignant de facultés mentales très élaborées...(saint-germain-des-vaux / Port-Racine, Le Rozel). Parallèlement aux progrès techniques, les préoccupations non matérielles se développent. Cet homme collecte dans la nature des éléments " esthétiques " tels que minéraux et fossiles et ensevelit ses morts (depuis au Proche Orient)... La composition de l'outillage atteste une prédominance du Moustérien à encoches et / ou à denticulés. Ces industries semblent datables de la fin du dernier interglaciaire (Eémien) et / ou du début de la dernière glaciation (weichsélien), Le Rozel (Scuvée et al., 1988), Tréauville / Siouville (?) (Vilgrain et al., 1988 ; Vilgrain et al., 1991), Saint- 56

57 ment thermique des matériaux lithiques, débitage de lames standardisées en série...) et des matières osseuses (découpe, perçage, sculpture...). La pensée symbolique occupe une place croissante tout au long du Paléolithique supérieur (sépultures, art mobilier et pariétal qui semblent liés à un sentiment de religiosité (? ). Actuellement, seul un burin de silex trouvé à Auderville, témoignerait du passage de l'homme moderne au Paléolithique supérieur, dans la Hague (? ) (Scuvée, 1976). Cependant l'aurignacien et le Gravettien ont été reconnus dans le Massif armoricain breton et les cultures tardiglaciaires de tradition nordique sont attestées dans le Calvados et l'orne (Ghesquière et al., à paraître). Les conditions climatiques très rigoureuses sont à l'origine de la " désertification " des espaces septentrionaux de l'europe pendant l'essentiel de la durée du Paléolithique supérieur. Le radoucissement du tardiglaciaire (vers ans) annonce le développement de la végétation, le retour des fau- Germain-des-Vaux / Port-Racine (Cliquet, 1994) De rares assemblages lithiques se rattachent au Moustérien typique : Saint-Germain-des- Vaux / Port-Racine, niveau supérieur (?) (Cliquet, 1994) Seul le mobilier lithique weichsélien de la Cotte de Saint-Brelade comporte un matériel abondamment retouché évoquant le Moustérien du Mont-Dol (Monnier, 1995) qui présenterait des affinités charentiennes. Parallèlement à la branche néandertalienne, le groupe Homo Erectus donne naissance à la lignée Homo Sapiens, l'homme moderne. Ce dernier, originaire du Proche-Orient est l'artisan des cultures du Paléolithique supérieur ( ans). Il développe des technologies très élaborées pour la mise en oeuvre des matières lithiques (taille par pression, traite- 57

58 Le paléolithique dans la Hague : les premiers peuplement de la presqu île Comme nous l'avons évoqué précédemment, les fluctuations des niveaux marins durant le Pléistocène moyen et supérieur ont "sculpté" le littoral créant de nombreux gîtes d'accueil pour l'homme. Ces reliefs ont favorisé l'implantation d'espaces domestiques protégés des vents dominants : microfalaises de Gélétan à Saint- Germain-des-Vaux, habitats de pied de falaises de Saint-Germain-des-Vaux / Port-Racine, abri sous roche en contexte schisteux du Rozel, faille en milieu granitique de la Cotte de Saint- Brelade... " (Cliquet, 1998). Les travaux effectués sur l'organisation des sols d'occupation ont mis en évidence deux types principaux d'ensembles structurés : - des espaces domestiques, généralement implantés en pied de falaise ou de rocher, à l'abri des vents dominants. Ce sont, les sites de Saint-Germain-des-Vaux / Gélétan (Michel, 1994), de Saint-Germain-des-Vaux / Port-Racine (Cliquet, 1994), du Rozel (Scuvée et al, 1984). Ces espaces sont structurés par des foyers domestiques, des fosses, des alignements de blocs qui participent à la structuration de l'espace, des fosses, des amas de produits de débitage ; - des aires spécialisées implantées plus en aval sur l'estran, où des activités liées au feu sont pressenties comme à Saint-Germain-des-Vaux / Port-Racine (Cliquet, 1994). Le même phénomène a été mis en évidence dans le Val de Saire, par Gérard Fosse sur le site du Fort à Saint-Vaast-la- Hougue. nes et des hommes. L'HOMME ET SON MILIEU Outres les espaces d'accueil procurés par les reliefs créés par les fluctuations des niveaux marins, les paléo-estrans comportent d'autres richesses. Notamment parmi les nombreux produits accessibles sur le littoral, la matière première lithique apparaît la plus aisée à appréhender. En effet, nombres d'implantations se sont effectuées sur les plages anciennes, soit directement sur les cordons littoraux composés de galets de silex, de grès et de roches locales. La matière première mise en œuvre dans tous les sites littoraux du Cotentin est presqu'exclusivement le silex, bien que la presqu'île appartienne, par son passé géologique au Massif Armoricain, et comporte de ce fait peu de formations sédimentaires susceptibles de fournir ce matériau. Ce sont principalement des galets, issus soit des plages anciennes (estran), soit des cordons littoraux, produits du démantèlement de formations secondaires actuellement immergées, transportés "par le jeu des courants lors des transgressions" (Monnier, 1980, 1988 ; Cliquet, 1994, Coutard, 2003). Cependant quelques artefacts témoignent de l'utilisation de roches locales (quelques pièces en grès, en quartz et même en granit). L'accessibilité aisée aux matières premiè- 58

59 res minérales n'est vraisemblablement pas seule à avoir conditionné l'implantation humaine sur la frange côtière, souvent continentalisée. De rares indices témoigneraient d'une prédation littorale ; la plupart des sites ayant livré des restes osseux attestent d'une prédation principalement exercée aux dépens des grands mammifères terrestres (Le Rozel, La Cotte de Saint-Brelade et Le Mont-Dol, en Bretagne). CONCLUSION ET PERSPECTIVES Bien que les recherches portant sur les premiers peuplements de Basse-Normandie et plus particulièrement la Hague soient récentes (depuis les années 1970), les apports du patrimoine recelé par la presqu'île de La Hague sont nombreux et pour certains, font référence pour la préhistoire européenne. Fait rare, la rapide " fossilisation " des niveaux d'occupation implantés en pied de relief donc rapidement recouverts a permis la conservation de nombreuses structures : alignements de blocs et amas de produits de débitage à Port- Racine et à Gélétan, foyers sur ces mêmes sites et au Nez-Quilas et au Rozel Ces structures témoignent de l'organisation de l'espace domestique et d'aires de travail spécialisées entre et ans. Par ailleurs le site de Port-Racine a largement apporté sa contribution à la définition du débitage laminaire de style Paléolithique supérieur dès 59

60 Le paléolithique dans la Hague : les premiers peuplement de la presqu île le Paléolithique moyen pour l'europe occidentale. Ces apports majeurs méritent d'être confortés par la constitution d'un référentiel chronologique fondé sur les mesures physiques (travail en cours) permettant la datation de silex chauffés et de sédiments (sables et lœss) Dans l'état actuel des investigations, les témoignages d'occupations attribuables au Paléolithique se cantonnent essentiellement à l'actuelle frange côtière. Les implantations continentales semblent plus rares dans l'état actuel de la recherche. Si la gestion agricole des terres s'avère peu favorable aux découvertes de surface (importants espaces herbagés, bocage), l'archéologie préventive n'a révélé à ce jour aucun témoin d'occupation paléolithique alors qu'elle a complètement renouvelé notre connaissance du néolithique et des périodes protohistoriques. Les orientations futures ont pour objectif : - une meilleure définition de l'acheuléen en Cotentin, - une recherche de traces d'occupation à l'intérieur des terres, où les niveaux ont été fréquemment démantelés sur plateau, voire masqués par de puissants dépôts de pentes dans les vallées, - une quête de vestiges rapportables aux premiers hommes modernes du Paléolithique supérieur initial et final. BIBLIOGRAPHIE AUFFRET J.-P., ALDUC D., SMITH A., Cartographie en isopaques des formations sédimentaires de la Manche orientale et bathymétrie au toit du bed-rock. Annales de l'institut Océanographique, 56, 5, 1980, p BOGARD D.A., Cent ans de préhistoire. Mémoire de la Société Nationale des Sciences Naturelles et Mathématiques de Cherbourg, XLVI, , p BORDES F., Les limons quaternaires du bassin de la Seine. Paris, Archives de l'institut de Paléontologie Humaine, 26, 1954, 472 p., 175 fig. BOURDIER F., Etude comparée des dépôts quaternaires des bassins de la Seine et de la Somme. Bulletin de l'association des Géologues du Bassin Parisien, 21, 1969, p CALLOW P., CORNFORD J.-M., La Cotte de Saint-Brelade (Jersey) Excavations by C.B.M. Mc Burney. Norwich, Geobooks, p. CALLOW P., The Channel Islands in the Old Stone Age. In The archaeology of the channel islands, Johnston (P.) Ed, 1986, p CLET M., Etude de séquences interglaciaires en Normandie corrélables aux stades isothopiques 7 et 5. Actes du Xe Symposium de l'association des Palynologues de langue française, Bordeaux, Institut Français de Pondichéry, Travaux de la section scientifique et technique, XXV, 1988, p CLIQUET D Le gisement de Saint- Germain-des-Vaux/Port-Racine (Manche) dans son cadre régional : Essai palethnographique. Editions ERAUL, 63, 1994, 2 vol., 644 p., 210 fig., 36 photo., Annexes Martine Clet et Brigitte Van-Vliet-Lanoë. CLIQUET D L'occupation littorale du Cotentin au Paléolithique moyen récent (Massif armoricain normand). In Actes du 120ème Congrès National des Sociétés Historiques et Scientifiques, Aix-en-Provence, Octobre 1995, 1998, p

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62 MONNIER (J.-L.), CLIQUET (D.), HALLEGOUET (B.), VAN VLIET-LANOE (B.) et MOLINES (N.), Stratigraphie et paléoenvironnement des occupations humaines durant le dernier interglaciaire dans l'ouest de la France (Massif armoricain). Comparaison avec l'interglaciaire précédent. In : TUFFREAU (A.) et ROEBROEKS (W.) dir. - Le dernier interglaciaire et les occupations humaines du Paléolithique moyen. Publication 8 du Centre d'etudes et de Recherches Préhistoriques, Université des Sciences et Techniques de Lille-Flandres- Artois, 2002, p VILGRAIN G., CLIQUET D., Le gisement paléolithique moyen de Tréauville dans le Cotentin (Manche). In Revue Archéologique de l'ouest, 8, 1991, p VILGRAIN G., COUTARD J.-P., FOSSE G., OZOUF J.-C., Les gisements moustériens de Siouville et Tréauville. Bulletin du Centre de Géomorphologie du C.N.R.S. Caen, 35, 1988, p SCUVEE F., Introduction à l'archéologie - le Paléolithique supérieur. Cherbourg, LIT- TUS-C.E.H.P., 15, 1976, p SCUVEE F., ALDUC D., Deux niveaux marins pléistocènes et leurs industries paléolithiques respectives sur le littoral du Cotentin (Manche). Bulletin de la Société Préhistorique Française, 1981, T.78, fasc. 7, p SCUVEE F., VERAGUE J., Paléolithique supérieur en Normandie occidentale : l'abri sous-roche de la pointe du Rozel (Manche). Cherbourg, LITTUS-C.E.H.P., 1984, 150p., 18 fig., 3 tab, 22 pl. SCUVEE F., VERAGUE J., Le gisement sous marin du paléolithique moyen de l'anse de la Mondrée à Fermanville (Manche). Cherbourg, LITTUS-C.E.H.P., 1988, 121p., 13 pl., 25 ph.h.t. SCUVEE F., VERAGUE J., Note complémentaire relative à l'abri sous roche de la pointe du Rozel (Manche). Cherbourg, LITTUS- C.E.H.P., 1988, 36-37, p THIEBAULT S., FOSSE G., CLIQUET D., Déterminations anthracologiques sur deux gisements moustériens du nord Cotentin en Normandie. Bulletin du Centre de Géomorphologie du C.N.R.S. Caen, 35, 1988, p VAN VLIET-LANOE B., Le rôle de la glace de ségrégation dans les formations superficielles de l'europe de l'ouest. Processus et héritages. Caen, 1988, 854p. VERRON G., Informations archéologiques. 20, 2, p

63 LE MESOLITHIQUE DANS LA HAGUE ET SES MARGES Emmanuel GHESQUIERE Le Mésolithique correspond à la période charnière entre le Paléolithique supérieur, période froide des chasseurs de rennes (vers ans) et les premiers agriculteurs du Néolithique (vers ans). A la fin de la dernière glaciation, le climat retrouve des caractères voisins de l'actuel, la mer remonte et les steppes laissent la place à un environnement arboré, à dominante de noisetier (40 %), de chêne (15 %), le pin, le bouleau et le saule. Dans ce contexte, les hommes du Mésolithique reprennent possession de tout le territoire. De nouvelles techniques de chasse se développent avec en particulier la généralisation de l'arc. Certains secteurs sont privilégiés. Le Massif armoricain connaît une occupation de ses côtes intense, offrant des biotopes diversifiés permettant pêche et chasse. On sait qu'à cette période, l'utilisation des bateaux tels que les pirogues est une réalité comme le montrent plusieurs découvertes effectuées au Danemark dans les tourbières, offrant ainsi la possibilité de déplacements ou d'activités de pêche diversifiés. Les seuls éléments retrouvés pour cette période dans le Nord-Cotentin sont les témoins d'utilisation du silex et du grès, et plus rarement les aménagements de blocs de pierre sur les sites d'habitat. D'un point de vue culturel, les outils en silex taillé sont les éléments les plus significatifs. Les multiples variétés de pointes et barbelures fixées sur des hampes de flèche, définissant la période à laquelle appartiennent les sites au sein du Mésolithique et permettent d'individualiser le Nord- Cotentin par rapport aux régions limitrophes comme un ensemble particulier. 63

64 Le mésolithique dans la Hague et ses marges Historique des recherches Les recherches concernant le Mésolithique en Basse-Normandie sont récentes. Les données acquises avant le début des années quatre-vingtdix sont disparates malgré le nombre croissant de gisements étudiés entre la première synthèse sur le Mésolithique normand (Verron 1976) et les dernières en date (Fosse et al ; Chancerel et Paulet- Locard 1991, Ghesquière et al et 2003). Les trois grandes phases culturelles du Mésolithique (ancien, moyen et final) ont été mises en évidence en Basse-Normandie. Cependant, seules les périodes moyennes et finales ont pu étudiées dans le Nord-Cotentin. Les gisements attribués au Mésolithique final sont pour l'instant limités à quatre séries issues de ramassages de surface dans le Val de Saire sur les communes de Réthoville, Cosqueville et Fermanville (deux séries) et ne font pas ici l'objet d'un développement car ne concernent pas directement la Hague. Objet principal de cet article, les sites du Mésolithique moyen sont connus sur les promontoires côtiers ou les zones péri-côtières de la Hague, ou de sa marge méridionale qui marquent la limite orientale du monde armoricain. Cette période a particulièrement retenu l'attention ces vingt dernières années à travers l'étude et/ou la fouille de gisements appartenant au stade moyen du Mésolithique : - fouille et étude du site d'auderville (fouille Chancerel en 1987 et 1988 ; étude Ghesquière et Rault 1995 ; Ghesquière 1995 et 1997 ; Ghesquière et al et 2003), - examen de séries issues de fouilles de sauvetage (Flamanville "EDF", Lefèvre 1993 ; Digulleville "Raumarais", Ghesquière et Rault 1995), - sondage à Flamanville (Leroy 1993), - réexamen de séries anciennes (Ghesquière et Rault 1995 ; Souffi, 1996) - et prospections de surface dans le Nord- 64

65 Cotentin (Ghesquière et Rault 1995). Au total une trentaine de sites ont pu faire l'objet d'un examen typologique et technologique de leur industrie lithique et enfin d'un travail de synthèse (Ghesquière et al et 2003). Définition du champ d'étude L'ensemble des gisements attribués au Mésolithique moyen occupe une bande côtière de dix kilomètres de large et quatre-vingt kilomètres de longueur (fig. 1). Il est situé sur les côtes ouest et 65

66 Le mésolithique dans la Hague et ses marges nord de l'extrémité de la presqu'île du Cotentin, entre Auderville au nord, Hatainville au sud et Cosqueville à l'est, les plus importants étant situés d'une part à l'extrémité de la Hague et d'autre part sur la commune de Flamanville. La presqu'île est formée au sud d'une basse plaine marécageuse (le col ou isthme du Cotentin), au nord-est du plateau du haut Val de Saire d'une centaine de mètres d'altitude coupée par la vallée de la Saire et au nord-ouest du Cap de la Hague qui culmine à 180 mètres. Les sites de référence Un peu moins d'une trentaine d'assemblages lithiques forment le corpus des sites mésolithique moyen du Nord-Cotentin. Deux assemblages dominent toutefois nettement. Celui d'auderville "Roc de Gîte" (fig. 2), avec près de silex taillés, esquilles non comprises (2552 outils dont 1276 armatures) et plus de 600 galets de grès utilisés est de loin le plus important. Il a fait l'objet d'une fouille programmée par A. Chancerel en 1986 et 1987 qui a concerné 130 mètres carrés d'une vaste occupation de promontoire. Le mobilier provient d'un niveau d'occupation de 10 à 30 cm d'épaisseur apparemment non perturbé, qui correspond vraisemblablement à des occupations multiples superposées appartenant au même contexte culturel. Une datation sur charbon donne 8450 ± 170 BP (soit XXXXXX). La deuxième série importante est celle de Flamanville "EDF". Elle comporte artefacts, esquilles comprises (831 outils dont 493 armatures) et a fait l'objet d'une fouille de sauvetage en 1977 par Y. Roupin, concernant environ 200 mètres carrés. Elle a été datée de 8990 ± 180 (soit XXXXXX)BP. Le reste des gisements disponibles est nettement moins bien documenté, principalement en raison de l'absence de fouille. Les sites sont actuellement situés sur les promontoires côtiers dominant la Manche. L'intérieur des terres n'a livré que quelques occupations de faible importance (Digulleville "Le Raumarais", Le Rozel "station 56", ). Cette partition géographique n'est cependant que le reflet des zones prospectées. L'embocagement de la presqu'île du Cotentin interdit en effet toute observation à l'exception des falaises et des zones côtières particulièrement exposées aux agents atmosphériques et donc dégagées de leurs couvertures végétales. Les prospections systématiques dans les années 66

67 la transgression flandrienne (Larsonneur 1971) indiquent que la ligne de côte dans ce secteur a avancé de un à dix kilomètres. Les occupations mésolithiques dominaient donc des plaines côtières plus ou moins larges. Les sites les plus importants correspondent probablement à des habitats occupés de façon plus ou moins permanente (Auderville "Roc de Gîte", Flamanville "EDF" et "Déhus") tandis que d'autres (Digulleville "Ramarais-A2, Locus I et Locus III", ) sont des habitats saisonniers occupés dans le cadre de campagnes de chasse ou de pêche. L'INDUSTRIE EN SILEX Caractérisation du débitage soixante et soixante-dix d'y. Roupin et la découverte du site de Flamanville en sont les exemples les plus frappants. L'emplacement des différents gisements ne doit cependant pas induire en erreur la lecture "sitologique" des gisements. La place particulière de ces promontoires dominant la mer dans le paysage actuel n'a que peu de rapport avec le panorama du début du Boréal. Les données issues de l'étude de Le débitage du Mésolithique moyen du Nord-Cotentin se rapporte globalement au style de Coincy défini par J.-G. Rozoy (1978b). Le débitage est effectué sur galet parallélépipédique ou sur fragment de galet allongé (souvent anguleux). Il est orienté principalement vers la production de lames et lamelles courtes et peu régulières utilisées comme supports d'outils et dans une faible proportion d'éclats de taille réduite. Les silex semblent provenir de cordons marins. Cependant la plupart d'entre eux, peu ou pas roulés, indiquent un ramassage probable dans les falaises maritimes plutôt que sur les plages. Peu de nucléus sont intensément exploités ; la proximité des bancs de silex rend en effet aisé l'approvisionnement. Les stigmates relevés sur les déchets de taille suggèrent l'emploi exclusif de percuteurs en pierre. Les galets oblongs, en roche tenace (granit, 67

68 Le mésolithique dans la Hague et ses marges grès ordovicien, ), ont été utilisés pour les phases d'initialisation des nucléus (entre 10 et 15 % du débitage). Les traces de percussion présentes sur les galets allongés en grès feldspathique tendre suggèrent qu'ils ont été utilisés pour l'ensemble des autres phases du débitage : mise en forme du nucléus (5 % de l'assemblage) et pour la phase de plein débitage lamino-lamellaire (entre 60 et 70 % de la série), en percussion tangentielle. Caractérisation de l'outillage lithique La première division interne de l'outillage concerne les outils communs et les armatures. Les outils communs représentent entre 41 et 50 % de l'outillage (pour les séries tamisées). Leurs différentes dominantes sont : - Le faible pourcentage de grattoirs, 6 % de l'outillage commun (3 % du total des outils), grattoir denticulé inclus (fig. 7, n 4), excepté sur les sites de Flamanville "Déhus" (15 % de l'oc) et le Rozel "station 56" (18 %). - Le pourcentage dominant des divers éclats retouchés et denticulés, qui forment environ un tiers de l'outillage commun (17 % du total de l'outillage) et parmi eux le pourcentage majoritaire des "éclats minces retouchés" (19 % de l'oc). - La présence d'un macro-outillage (à Auderville "RdG" et à Digulleville "A2") constitué par des éléments prismatiques, en faible nombre mais très typiques : outils de type morphologique proche des pics asturiens, hachettiformes, pics étroits (proches des exemplaires de Haute-Normandie et du Sauveterrien à denticulés du Bassin parisien, Hinout 1990) et enfin, petits prismatiques utilisés comme "ciseaux" (fig. 3 et fig. 7, n 1 à 3). Le très faible pourcentage de burins, 3 % de l'outillage commun (1,4 % du total) qui marque, comme pour les grattoirs, une rupture profonde entre les cultures du Paléolithique supérieur- Mésolithique ancien et celle du Mésolithique moyen en Basse-Normandie. Un outillage sur lame bien développé qui forme entre 10 et 15 % de l'outillage commun (7,5 % du total) avec une prédominance de la retouche partielle : lames fortement utilisées plutôt que retouchées. Les supports laminaires bruts de débitage comptent pour moins de 2 % des assemblages. La seconde dominante de l'outillage commun, après les éclats retouchés, est assurée par l'outillage sur lamelle, qui représente entre 30 et 50 % de l'outillage commun, dominé par les lamelles à retouche régulière (fig. 7, n 6 et 8), les lamelles à troncature oblique et les lamelles à bord abattu partiel. Les lamelles à coche et cassées dans (ou au-dessus) d'une coche (9 % de l'outillage commun) sont à présent considérées comme des déchets de fabrication d'armatures (Ducrocq 1987, Leroy 1991, Ghesquière 1995). 68

69 ries C et E de la typologie de Clark (Clark 1933 ; Jacobi 1978). La typologie de J.-G. Rozoy offre des types morphologiquement proches mais exclusivement à retouche couvrante (pointes à retouche couvrante à base arrondie ou biaise, Rozoy 1978b). - Les lamelles étroites à bord abattu (fig. 6) constituent la catégorie dominante du groupe des armatures (environ 45 %). Parmi elles, outre les lamelles étroites à bord abattu typiques (27 % des armatures, dont dix pour cent seulement sont entières), on distingue trois catégories de lamelles à bord abattu pointues (type a, b, c, 18 % des armatures), qui contribuent à individualiser le Mésolithique moyen du Nord-Cotentin. - Les éléments scalènes (lamelles ou triangles) constituent une des bases de la différenciation entre les différents sites du Nord-Cotentin. Ils forment à Auderville près de 8 % des armatures et 14 % à Il faut retenir de l'orientation générale de l'outillage commun que les deux tiers de celui-ci sont assurés par les éclats retouchés et denticulés et les lamelles retouchées ou tronquées. Les éclats minces retouchés (cat. 16, Rozoy 1978b) et les lamelles à retouche partielle régulière (cat. 37, Rozoy 1978b) forment, à eux deux, 30 % de l'outillage commun. Les armatures forment entre 50 et 59 % de l'outillage. Parmi elles se trouvent les outils qui vont caractériser au mieux la série et permettre une véritable attribution culturelle. - Les pointes à troncature très oblique ou à retouche unilatérale, à base non retouchée, forment la catégorie dominante parmi les pointes ; elles représentent environ 16 % des armatures (8 % du total de l'outillage). - Les pointes à troncature très oblique (ou à retouche unilatérale) à base retouchée asymétriques, composent 12 % des armatures (5,6 % du total). Elles sont divisées en trois catégories : les pointes à base oblique (incluant les pointes rhomboïdales), celles à base arrondie et celles à base transversale (fig. 5, n 1 à 3 et fig. 7, n 10 à 14). Ces armatures de grande t aille possèdent une retouche abrupte du dos, une extrémité pointue généralement réalisée par la technique du microburin et une base à retouche directe ou inverse, abrupte à plate suivant les exemplaires. Ces armatures se rapprochent des pointes du sud-est de l'angleterre des catégo- 69

70 Le mésolithique dans la Hague et ses marges découverts sur les sites du Nord-Cotentin (particulièrement Auderville) suggère une exploitation à flanc de falaise de ces coulées. La découverte parmi les galets utilisés d'auderville de pièces biseautées et fortement émoussées par l'usage a fait émettre l'hypothèse que ces outils avaient pu être utilisés dans le cadre de l'exploitation, comme pics miniers (galets hachettiformes, galets-pics). Certains outils en grès (percuteurs, plaquettes lissées,...) ont fait l'objet d'une exportation vers les autres sites du Nord-Cotentin. Il est probable que l'approvisionnement direct assurait l'acquisition de ces matériaux. L'existence d'un réseau d'échange à l'intérieur du Nord-Cotentin n'est toutefois pas à exclure. L'outillage en grès d'auderville-roc de Gîte Flamanville "EDF" (fig. 4, n 15 à 30 et fig. 7, n 20). Ils comprennent d'une part les lamelles étroites à bord abattu tronquées et les lamelles scalènes et d'autre part, les triangles scalènes à petit côté court. Ces trois catégories sont morphologiquement très proches. La technique du microburin est largement utilisée pour le façonnage des lamelles tronquées ainsi que pour diverses pointes. Elle est aussi utilisée, mais de façon moins systématique, pour certaines lamelles à bord abattu pointues. On retrouve 1 microburin pour 2 armatures à Flamanville "EDF", et 1 pour 3,4 armatures à Auderville-RdG. Leur latéralisation, senestre à 90 % en moyenne, correspond à celle des armatures. L'INDUSTRIE EN GRÈS La majorité des galets récoltés sur les sites mésolithiques du Nord-Cotentin sont des galets plats, quadrangulaires, à arêtes émoussées, appartenant à 90 % à un seul type pétrographique. Il s'agit de grès fin feldspathique vert ou plus souvent coloré en rouge violacé par des sels de fer. Ces galets proviennent du remaniement des niveaux de grès feldspathique fins interstratifiés dans les arkoses cambriennes. De tels niveaux sont particulièrement bien développés sur le platier rocheux au pied de la falaise des Buttes, à l'aplomb du site d'auderville "Roc de Gîte". Les galets et plaquettes sont issues de coulées de solifluxion qui occupent un versant de falaise sur une quinzaine de mètres de largeur. Le nombre d'artefacts très important Les fonctions des outils en grès d'auderville ont pu être réparties en cinq grands registres : Le premier concerne les outils liés avant tout au débitage du silex (galets oblongs bouchardés, galets allongés bouchardés, fig. 9). C'est probablement en raison du besoin de tels outils qu'a été réalisée l'exploitation du grès. Ces outils représentent 26 % de la série d'auderville. Ils forment la base de l'outillage en grès de la population mésolithique du Nord-Cotentin et ils se retrouvent sur tous les gisements suffisamment étoffés. Le deuxième est constitué des outils à biseau poli, possiblement liés à l'exploitation du grès dans les coulées de solifluxion (galets hachettiformes, fig. 11 ; galets pics, fig. 12) ou en tout cas à diverses exploitations du milieu. Ils ne composent que 13 % de la série. Seul le site d'auderville a livré de telles pièces. Le troisième se compose des artefacts utilisés selon toute vraisemblance pour le broyage (grandes plaquettes lissées, molette, meule). Ils sont avant tout les témoins des activités domestiques en relation avec la préparation alimentaire. Ils ne représentent que 7 % des vestiges en grès. On sait qu'ils ont fait l'objet d'une exportation vers les autres sites du Nord-Cotentin. Cependant, leur faible représentation à Auderville fait en sorte que seuls les plus gros gisements sont susceptibles d'en livrer (Flamanville "EDF", Digulleville "A2"). Le quatrième ensemble est constitué des objets d'usage divers ou indéterminé. Il en est ainsi des petites plaquettes, des galets allongés bruts et des petits galets, qui représente 32,1 % de la série. Les pièces en grès non utilisées sont caractéristiques du site d'auderville et n'ont jamais été retrouvés sur d'autres sites du Nord-Cotentin. Enfin, le cinquième regroupe les outils brisés dont la fonction demeure indéterminable. Ils représentent 22,5 % de la série. 70

71 Les galets gravés sont exceptionnels et n'ont été retrouvés qu'à un exemplaire à Auderville et Flamanville-EDF. Celui d'auderville possède des traits gravés d'interprétation difficile tandis que celui de Flamanville semble représenter une tête d'animal (cervidé?). Essai sur l'évolution du Mésolithique moyen du Nord-Cotentin Quatre éléments semblent discriminants dans le cadre de l'évolution du Mésolithique moyen du Nord-Cotentin. Ce sont les catégories d'armatures qui font office de marqueurs culturels importants au sein de différentes cultures (fig. 5). Le premier marqueur est constitué par les grandes pointes à troncature très oblique à base retouchée asymétriques. Le second est constitué des pointes à base retouchée symétriques, pointes ogivales ou pointes triangulaires, qui sont un des marqueurs important du Mésolithique moyen dans l'ensemble de la France du nord. Le troisième est composé des lamelles étroites à bord abattu, dont la représentation, très importante au Mésolithique ancien et au début du Mésolithique moyen, diminue progressivement. Enfin, les éléments géométriques, triangles et lamelles scalènes, sont bien représentés dans les séries du Mésolithique moyen aussi bien de Basse-Normandie que des régions avoisinantes. Elles semblent constituer dans le Nord-Cotentin un élément peu représenté mais caractéristique, même si elles n'apparaissent pas en remplacement de formes isocèles comme dans le Sauveterrien. Sur la base de la représentation de ces quatre types, qui constituent 80 % des armatures (en plus des pointes à troncature très oblique et à retouche unilatérale, dont la proportion ne varie guère), on peut envisager un schéma évolutif concernant les sites mésolithiques du Nord-Cotentin (fig. 13). Bien entendu, ce schéma n'est présenté que comme une trame assez lâche propre à être remise en cause dans l'avenir par la découverte de nouvelles séries. La première phase d'occupation concerne les séries de Digulleville "Raumarais", Auderville "RdG" et Flamanville "EDF". D'après les deux datations 14C, elle correspond au début du Boréal, donc au début du Mésolithique moyen. Elle se caractérise par la grande taille de ses pointes (particulièrement celles à base retouchée asymétriques), le pourcentage très important de lamelles étroites à bord abattu et le nombre réduit d'éléments scalènes. Le nombre plus important de ces pièces scalènes à Flamanville " EDF " indique d'ailleurs peut-être une postériorité par rapport à Auderville " RdG ", contrairement à la date médiane obtenue par le 14C. La deuxième phase concerne la série de Flamanville "Déhus". Elle comporte encore quelques pointes à base retouchée asymétriques, mais de petit module, qui s'orientent morphologiquement vers des pointes triangulaires. On note d'ailleurs la présence de pointes ogivales et triangulaires à côté. Le pourcentage de lamelles étroites à bord abattu diminue sensiblement au profit des éléments scalènes qui constituent une part importante des armatures. La troisième phase comprend les sites de Flamanville "Coquet" et Le Rozel "station 56". Les pointes à base retouchée sont toutes des exemplaires symétriques (triangulaires ou ogivaux) 71

72 Le mésolithique dans la Hague et ses marges l'essentiel de la période boréale et donc du Mésolithique moyen. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES Le présent article constitue un premier bilan sur le Mésolithique moyen du Nord- Cotentin. Plusieurs axes de recherches restent à explorer, notamment les problèmes diachroniques. En effet, le Mésolithique ancien semble pour le moment absent dans le Nord-Cotentin (soupçonné à partir de deux armatures à Omonville-la-Petite "la Jupinerie"), alors que les sites mésolithiques moyen y sont fréquents. Le Mésolithique récent lui-même commence à y être correctement représenté, mais seulement dans le Val de Saire. La question de l'apparition des Mésolithiques sur cette côte constitue donc un des axe privilégié de recherche, d'autant que les seules relations actuellement entrevues sont en direction du littoral de la Manche et du sud-est de l'angleterre. A l'autre extrémité du segment chronologique couvrant cette période, le développement des premières sociétés sédentaires, ce que l'on appelle la néolithisation, doit aussi constituer un des volet important de l'étude de la Hague. Sites du Nord-Cotentin. et surtout, le nombre de lamelles étroites à bord abattu s'amenuise jusqu'à ne représenter que 9 % au Rozel. En revanche, le pourcentage de lamelles ou triangles scalènes atteint près de 40 % des armatures et devient le groupe prédominant. Ce schéma sur l'évolution du corpus contribuerait à expliquer les variations importantes de représentation de certains types d'armatures durant le Mésolithique moyen dans le Nord- Cotentin. Les éléments principaux, en dehors d'une miniaturisation très sensible, sont le remplacement des pointes à base retouchée asymétriques par les pointes ogivales et triangulaires et le remplacement des lamelles étroites à bord abattu par les scalènes. On ne peut que regretter l'absence de repères chronologiques fiables dans ce schéma où les deux seules dates disponibles correspondent semble-t-il à la période la plus ancienne. Il est toutefois pressenti que les séries disponibles couvrent Auderville, Goury-Croix du Vendémiaire, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord-Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Auderville-Roc de Gîte, découvert et prospecté par G. Vilgrain, fouillé en 1987 et 1988 par A. Chancerel, étudié dans le cadre d'un diplôme de l'ehess par E. Ghesquière (Ghesquière 1995a) et d'un DEA (Ghesquière 1997). Carteret-Cap de Carteret, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord- Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Cosqueville-la Garenne, B 39 : station découverte par A. Bogard en 1958 (étude E. Ghesquière et Rault 1995). Digulleville-Le Raumarais : reconnu par Y. Roupin, prospecté par M. Audouard au début des années soixante-dix, étudié par E. Ghesquière (Ghesquière et Rault 1995). Trois locus mésolithiques sont présents (locus 1, 3 et A2). Le locus 3 72

73 73

74 Le mésolithique dans la Hague et ses marges a fait l'objet d'une fouille par P. Amourette (Informations Gallia, 1981). Les stations ont été détruites par l'installation du centre de retraitement des déchets radioactifs de Beaumont. Flamanville-Centrale EDF, découvert en 1977, fouillé par Y. Roupin en Sauvetage Urgent lors de l'installation de la centrale. Le site a été étudié par P. Lefevre dans le cadre d'une maîtrise universitaire (Lefevre 1993). Flamanville-Hameau Leroy, découvert en 1987 par J.P. Brot. Flamanville-Le Bec, découvert en 1987 par J.P. Brot. Flamanville-Le Coquet, découvert en 1987 par J.P. Brot, sondé par D. Leroy en 1989 (Leroy 1992). Flamanville-Le Déhus, découvert en 1987 par J.P. Brot. Ce site a fait l'objet d'une maîtrise universitaire (Souffi 1997). Flamanville-Poubelle, découvert par R. Lemière, prospecté par M. Le Goffic, site détruit par la construction de la centrale EDF (Verron 1975). Hatainville, découvert par Michel Audouard dans les années soixante-dix. Malgré l'absence de localisation précise du gisement, un croquis indique que les artefacts ont été ramassés au sein de trois concentrations faiblement distantes les unes des autres. Jobourg-Perréval II, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord-Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Le site est prospecté depuis 1996 par Laurent Juhel. 74

75 Le Rozel-Hameau du Roy, 4 stations situées à deux kilomètres à l'intérieur des terres. L'une d'entre elles (station 56) a fait l'objet d'un ramassage intensif et d'une publication (Audouard 1986). Omonville-la-Rogue-Le Fort, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord- Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Le Rozel-Promontoire, 7 stations reconnues par Y. Roupin. Surtainville, découvert par M. Audouard dans les années soixante-dix (Ghesquière et Rault 1995). Absence de localisation précise. Indices de sites mésolithiques de la côte ouest du Nord-Cotentin. Auderville-Belevar, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord-Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Auderville-Rocher du Calenfrier, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord-Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Carteret-Table d'orientation, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord- Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Herqueville-Treize Vents II, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord- Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Jobourg-Les Hautes Falaises, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord- Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Jobourg-Nez de Jobourg, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord- Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Jobourg-Perréval I, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord-Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). Omonville-la-Rogue-La Pointe d'etimbert, découvert au cours de la prospection des promontoires du Nord-Cotentin en juillet 1995 par E. Ghesquière et H. Rault (Ghesquière et Rault 1995). 75

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77 L'HABITAT NEOLITHIQUE DANS LA HAGUE Laurent JUHEL Avec la collaboration de François CHARRAUD et David GACHE 77

78 L habitat néolithique dans la Hague Le courant néolithique émerge vers 9000 av. J.C. au Proche-Orient et se diffuse ensuite dans toute l'europe. Le néolithique se caractérise par la sédentarisation des populations auparavant nomades, l'apparition de l'agriculture et de l'élevage, ainsi que l'invention de la céramique, succédant progressivement à un mode de subsistance de chasseurs-cueilleurs. Cette période est une étape primordiale à l'origine de la construction de nos sociétés actuelles. Néanmoins ce processus ne s'accomplit pas de manière identique dans toutes les régions. Le phénomène de néolithisation se diffuse en France à partir du VIème millénaire av. J.-C. mais n'apparaît pas de manière uniforme dans toutes les régions. Dans la presqu'île de la Hague, la question d'une néolithisation spécifique ou partielle reste posée. ETAT DES RECHERCHES Contrairement au Paléolithique et au Mésolithique qui ont été l'objet de travaux récents depuis les années quatre-vingt, le Néolithique de la Hague a été délaissé par le renouveau de la recherche. Depuis la fin du 19ème siècle, de petites séries lithiques ont été fréquemment collectées en ramassage de surface. Elles attestent de la présence des hommes après la période Mésolithique, et avant l'essor de l'utilisation du métal ; mais le calage chrono-culturel de ces indices de site est la plupart du temps imprécis. En effet, en l'absence d'outillage lithique représentatif ou de céramique, le mobilier de surface est le plus souvent simplement rapportable à la Protohistoire au sens large. Cette difficulté d'attribution chronologique du mobilier issu des prospections pédestre explique en partie le retard de la recherche sur le néolithique de la Hague. Seulement deux occupations domestiques néolithiques indéniables sont désormais connues dans la presqu'île (Fig. 1). Le site de plein air des "Treize Vents" à Herqueville, fouillé à la fin des années soixante (Chancerel et al., 1996). Et, l'abrisous-roche de la Jupinerie à Omonville-la-Petite, sur lequel les investigations sont toujours en cours (Marcigny, 2004 ; Marcigny et Juhel, 2004). A une échelle plus large, on peut noter que les gisements néolithiques connus dans la partie armoricaine de la Basse-Normandie sont rares ; en opposition, le secteur sédimentaire, représenté par la plaine de Caen, est désormais bien documenté. PAYSAGES ET IMPLANTATIONS HUMAINES La question de l'implantation néolithique dans la Hague appelle une réflexion sur les relations entre paysage et habitat. La Hague est un territoire à la topographie complexe ; la nature des sols et les conditions atmosphériques littorales ont conditionné un couvert végétal particulier, accentuant les spécificités de ce territoire. De fait, les paysages rencontrés par les populations néolithiques étaient radicalement différents de ceux des secteurs sédimentaires à couverture loessique présents plus à l'est. Les modes de subsistance et les formes de l'habitat ont nécessairement été influencés et adaptés à ces conditions particulières. Au regard des sites et indices de site disponibles, quatre catégories d'implantation distinctes sont pressenties : Les sites de plaine côtière Les "plaines côtières" sont surtout représentées sur la côte nord de la Hague. Il s'agit en fait des platiers d'érosions marines anciennes, recouverts par des dépôts de la dernière glaciation (coulées de solifluxion et lœss). Le démantèlement de ces formations depuis la transgression flandrienne nous prive de la documentation strictement littorale. Cependant, l'ampleur du recul du trait de côte depuis le néolithique est délicat à évaluer : l'utilisation des courbes isobathes actuelles doit être effectuée avec précaution, car elles ne reflètent pas le tracé d'une ligne de côte ancienne. Sur la côte nord de la Hague, les vestiges lithiques sont rencontrés en de nombreux secteurs dans les coupes littorales actuelles, ainsi que dans certaines parcelles cultivées sur le platier ancien, en avant des falaises mortes. Ces indices de sites plaident en faveur d'occupations situées en léger retrait des plages, peut être quelques centaines de mètres seulement dans certains cas. Les platiers anciens bénéficient généralement d'une couverture limoneuse favorable à l'agriculture, mais cet avantage est contrarié par la forte exposition aux vents dominants. L'exploitation de l'écosystème marin a peut être joué un rôle important dans l'économie de subsistance qui a régit ces occupations. Des pointements rocheux ont peut être structuré certaines occupations. Cela semble être le cas pour le site de Jardeheu : une série lithique y a été collectée, en bordure de la partie élevée de la pointe (Vilgrain et Fosse, inédit). D'autre part, l'érosion littorale a permis la découverte et l'étude de neuf structures de combustions (Vilgrain, inédit), qui 78

79 ont été l'objet de datations radiocarbone. Les dates obtenues s'étalent depuis le début la première moitié du VIème millénaire, jusqu'au début du IVème millénaire. Actuellement, Jardeheu est donc le seul site connu comme étant contemporain de la transition entre le Mésolithique et le Néolithique (Vilgrain, 2003). Le site d'herqueville, qui domine d'une quarantaine de mètres la plage actuelle, se rapproche de cette catégorie. La différence réside dans le fait qu'il est installé sur une "terrasse" plutôt qu'un véritable promontoire. Même si le caractère domestique du mobilier ne fait aucun doute, il est regrettable qu'aucune structuration véritable du site n'ait pu être décelée. Le caractère domestique du mobilier ne fait toutefois guère de doute. La petite surface fouillée a livré une quantité relativement limitée de mobilier lithique et céramique. Cependant, cette dernière a autorisé une attribution chronologique au début du Néolithique moyen II (Chancerel et al.,1996). Une coupe à socle est décorée dans le style armoricain (Fig. 2). Les autres décors sont des boutons au repoussé, évoquant le Néolithique moyen I, et une cannelure large horizontale, dont on retrouve un exemple hors Les sites de promontoires côtiers Cette catégorie reste sujette à caution du fait de la faiblesse de la documentation actuellement disponible. Quelques indices incertains (petites séries lithiques) ont été révélés par la prospection des landes ou des sentiers de douanier. Cependant, l'occupation de reliefs particulièrement exposés aux intempéries laisse perplexe, d'autant plus que les sols sont peu favorables à des activités néolithiques classiques. L'intense fréquentation de ces reliefs dominants les plaines côtières au Mésolithique (Ghesquière et Rault, 1995) s'explique mieux dans le cadre d'une subsistance de chasseurs cueilleurs. contexte dans le tumulus de Gronez-Hougue à Jersey. Le débitage du silex exploite des galets marins. Les produits sont majoritairement des éclats, mais un débitage lamino-lamellaire est présent. Ces deux types de produits, éclats et lamelles, sont vraisemblablement obtenus à partir d'une chaîne opératoire unique, utilisant les convexités naturelles des galets. Les plus petits galets de silex ont été fracturés sur enclume, selon la technique du débitage côtier. Les demi galets obtenus servent de supports à des grattoirs. Avec vingt-quatre pièces, l'outillage est trop mal représenté pour être significatif ; on peut toutefois noter l'apparente prédominance des grattoirs, ainsi que la présence d'un couteau à dos et de trois armatures tranchantes. Le site du Calenfrier est remarquable : il est connu par la découverte au 19ème siècle, dans un contexte très incertain, de mobilier lithique et céramique, et surtout d'un anneau disque en schiste entier. Cette pièce exceptionnelle est conservée au Musée Liais à Cherbourg. Ce site est implanté dans un paysage "monumental" dans les falaises tout à la pointe de la presqu'île de la Hague. Le secteur rocailleux est particulièrement exposé aux vents dominants. La présence d'une sépulture est envisa- 79

80 L habitat néolithique dans la Hague geable, du fait de cette position topographique exceptionnelle, et de la présence d'un anneau disque entier ; mais on ne peut exclure une pièce provenant d'un habitat comme semble en témoigner les nombreux silex trouvés dans le secteur. Les sites du " plateau " et de ses marges Il s'agit des sites localisés plus en retrait du trait de côte. L'intérieur de la Hague s'apparente à un plateau culminant entre 150 et 170 mètres, dont une grande partie est aujourd'hui occupée par l'usine de retraitement. La présence d'habitats dans ce secteur est attestée par la fouille de sauvetage du site campaniforme de Digulleville "Le Raumarais" (Letterlé et Verron, 1986). Sur les marges de cette zone haute malheureusement "disparue", le plateau de la Hague est entaillé par le réseau hydrographique. Ses rebords dominent les vallées et les plaines côtières. Comme en témoignent plusieurs séries lithiques collectées dans des labours, des occupations sont présentes dans cette zone d'interface entre le littoral et l'intérieur des terres. Ce positionnement topographique possède de multiples avantages : Le littoral reste proche et souvent visible, sans que l'on subisse en hiver l'exposition directe aux éléments marins. En fonction du relief, des secteurs peuvent d'ailleurs être bien abrités des vents dominants, et des placages lœssiques rendent les sols plus favorables à l'agriculture. A proximité immédiate, les vallées fournissent l'eau douce et leurs ressources diverses. Ainsi, ces secteurs sont les plus adaptés à un mode de vie néolithique "classique", induisant des activités agricoles et pastorales, sans pour autant exclure l'exploitation du littoral. Les sites de vallée Dans les vallées, des implantations en abrisous-roche ont été mises en évidence par la découverte des occupations d'omonville-la-petite "la Jupinerie" (Fig. 3) et de Saint-Germain-des-Vaux "Vallée des Moulins" (prospection L. Juhel) ;. Dans leurs vallées respectives, les positions de ces abris sont sensiblement différentes. L'abri principal de la Vallée des Moulins est implanté en haut du versant nord-ouest. Son orientation au Sud-Est l'abrite particulièrement bien des vents dominants. Surplombant le débouché de la vallée, il bénéficie d'une large vue sur le paysage littoral de l'anse Saint-Martin, et réciproquement. L'abri de la Jupinerie est au contraire localisé en fond de vallée, au pied du versant sud-est. Son surplomb rocheux 80

81 constitue un étranglement de la vallée, avant l'ouverture sur le littoral. Du fait de cette position topographique, le ruisseau de fond de vallée est certes à proximité immédiate, mais l'abri ne possède aucune ouverture visuelle sur le paysage : la vue est totalement bloquée par les pentes du versant nord. A la Jupinerie, bien que les recherches de terrain ne soient pas terminées, les éléments céramiques déjà mis au jour permettent une première approche chrono-culturelle (Marcigny, 2004 ; Marcigny et Juhel, 2004). Les formes simples dominent, avec des profils globulaires à cols rentrants. Les décors sont pour le moment peu nombreux. Il s'agit principalement de pastilles au repoussé, et d'une bouteille ornée de boutons à dépression centrale, qui renvoient au registre du Néolithique moyen I. Cependant la découverte d'un gobelet à anse interne évoque le Néolithique moyen II. De plus, il est intéressant de noter la présence d'une cannelure large sous un bord, qui n'est pas sans rappeler le décor mentionné à Herqueville. La série lithique n'a pas encore été étudiée dans sa globalité, et il est prématuré d'en dresser les caractéristiques. Toutefois, on peut mentionner que le débitage d'éclat sur galets marins de silex est accompagné d'une production lamino-lamellaire, mais aussi d'un fractionnement sur enclume, dans des proportions qui restent à définir. L'outillage comporte, entre autre, des grattoirs, des lamelles tronquées, quelques racloirs et burins sur éclat. Il est important de mentionner la présence de plusieurs éléments laminaires d'importation en silex bathonien (Fig. 4). Ceci confirme bien la perduration de la diffusion de ce matériau de la plaine de Caen jusqu'au Néolithique moyen. L'étude exhaustive du site de la Jupinerie, accompagnée de datations radiocarbones, permettra de préciser la chronologie de l'occupation néolithique de l'abri-sous-roche. Les corpus céramique et lithique, constitueront, à n'en pas douter, de nouvelles références pour l'étude de cette période dans le Cotentin. Ainsi, les prospections menées dans les vallées de la Hague ont révélé de nombreux surplombs rocheux potentiellement "habitables". Plus ou moins facilement perceptibles dans le paysage, ces abris naturels ont dû être fréquentés. L'eau douce est abondante grâce aux ruisseaux qui génèrent des formations arborées de type ripisylve ; contrastant avec le littoral à végétation de lande rase : des écosystèmes riches et variés sont ici exploitables par les hommes. Ces vallées côtières sont par ailleurs des axes de circulation privilégiés entre l'intérieur des terres et le littoral. Leurs occupations relèvent peut être de motivations ou nécessités particulières, distinctes mais complémentaires d'autres formes d'implantation. La question de la vocation de ces sites est alors posée. PERSPECTIVES Cartographie des occupations Les prospections doivent être poursuivies et étendues dans les quatre ensembles paysagers ici définis. Une cartographie des sites et indices de site la plus exhaustive possible devra confirmer ou infirmer les grandes tendances d'implantation envisagées. Toutefois, les limites de la prospection de surface sont connues : la cartographie des indices de sites n'autorisera pas une approche densimétrique fiable de chaque type d'installation. D'autant plus que les conditions actuelles d'occupation du sol, telles la végétation, les travaux agricoles ou l'érosion ne permettent pas une mise au jour systématique de vestiges. A titre d'exemple, les occupations en abri sous roche sont quasi indétectables en surface. Il sera indispensable d'effectuer des campagnes de sondages sur les sites jugés les plus pertinents. Ces sondages devront évaluer l'état sanitaire des gisements, et détecter la présence éventuelle de structures ou d'horizons d'occupation conservés. De plus, il tenteront de mettre au jour des échantillons de mobilier lithique et céramique associé, dans le but de confirmer et affiner les attributions chrono-culturelles. Caractérisation de l'industrie lithique L'industrie lithique néolithique des sites de la Hague et du Cotentin présente des faciès très différents de ceux connus par ailleurs en Normandie sédimentaire. La matière première locale, sous la forme de petits galets de silex côtier, a conditionné des assemblages lithiques bien spécifiques, tant dans la morphologie des outils, que dans les proportions des différents types. Les assemblages lithiques du Néolithique cotentinois sont aujourd'hui toujours mal caractérisés, mais il est à espérer que le site d'omonville-la-petite ainsi que les sondages programmés sur de nouveaux sites livreront des séries statistiquement représentatives. Ainsi, les séries de surface existantes et à venir pourront être comparées à des corpus de référence. La question de la "néolithisation" Pour le moment, aucun site du Mésolithique récent ou du Néolithique ancien n'a pu être clairement identifié dans la Hague. La transition entre ces deux mondes nous est donc inconnue. Néanmoins, 81

82 L habitat néolithique dans la Hague 82

83 l'approche la plus fine possible de l'occupation néolithique moyen apportera peut être des premières pistes de réflexion, dans l'attente de la découverte de sites de cette période charnière. L'étude de la variabilité des sites, de leur complémentarité et éventuelle spécialisation implique la question des modes de subsistance. Ce champ d'étude amène à la question de la "néolithisation", dans un territoire ou l'agriculture ne bénéficie pas initialement d'un substrat clairement favorable, alors que les ressources littorales diverses et abondantes sont propices à une alimentation reposant sur la collecte. A priori, les sites du Nord Cotentin souffrent de l'absence de conservation des restes fauniques, eu égard aux conditions d'acidité des sols. Aussi la recherche doit s'orienter vers d'autres modes d'investigation. L'approche paléo-environnementale, entamée dans les zones humides (tourbières) par les chercheurs de GEOPHEN est à ce titre particulièrement importante (Lespez et al., 2005). Elle livrera de précieux indices relatifs à l'anthropisation des paysages, tel le degré d'ouverture des milieux végétaux et la présence éventuelle des espèces cultivées. A l'échelle des sites, l'étude des macrorestes végétaux peut être révélatrice ; à ce titre, des tests carpologiques vérifieront la présence ou non d'espèces du spectre anthropique. Autre faisceau d'indices potentiels, l'étude tracéologique du mobilier en silex est susceptible de mettre en valeur des activités spécifiques trahissant la vocation du site et d'éventuelles spécialisations. En conclusion, outre le travail typo-chrono-culturel sur le mobilier lithique et céramique, l'étude de l'occupation néolithique de la Hague nécessite l'établissement d'une "typologie" des occupations, avec une approche fine de leurs fonctionnements et de leurs possibles interactions. La pertinence et l'aboutissement de cette réflexion résident avant tout dans l'exploitation des disciplines connexes de l'archéologie, telles la paléobotanique (palynologie, anthracologie et carpologie) ou encore la tracéologie du mobilier lithique. Cette pluridisciplinarité sera favorisée au sein du projet collectif de recherche. BIBLIOGRAPHIE CHANCEREL A., GHESQUIERE E., MAR- CIGNY C et VERRON G, Le site Néolithique moyen II des " Treize vents " à Herqueville (Manche), Bulletin de la Société Préhistorique Française, 1996, t. 93, n 2, p GHESQUIERE E. et RAULT H., Prospection des sites Mésolithiques du Nord- Cotentin. Rapport de fin d'année Ministère de la Culture et de la Francophonie. Service Régional de l'archéologie de Basse-Normandie. LESPEZ L., CLET-PELLERIN M., DAVID- SON R. et MARCIGNY C., Evolution des paysages et anthropisation depuis le Néolithique dans la péninsule de La Hague (Normandie, France), Actes du Colloque du Groupe de Recherche Pluridisciplinaires Contribuant à l'archéologie (GMPCA), Bordeaux, 2003, Revue d'archéométrie, 28, 2004, p LETTERLÉ F. et VERRON G., Un site d'habitat campaniforme à Digulleville (Manche), Revue Archéologique de l'ouest, supplément n 1, MARCIGNY C., Habitats et occupation du territoire à l'âge du Bronze et au début du premier âge du Fer en Basse-Normandie, Revue de la Manche, t. 46, 2004, fasc. 184, p MARCIGNY C. et JUHEL L., Un site stratifié occupé du Néolithique moyen à la fin de l'âge du Bronze : l'abri sous roche d'omonville-la- Petite dans la Hague, Bulletin du Groupe de Recherches Archéologiques du Cotentin, n 1 1, p VILGRAIN-BAZIN G., Les occupations littorales du nord Cotentin, Prospection inventaire, Direction Régionale des Affaires Culturelles de Basse-Normandie, Service Régional de l'archéologie, Bilan Scientifique de la région Basse- Normandie 2003, Ministère de la Culture et de la Communication, Direction du Patrimoine, Sousdirection à l'archéologie ed., 2004, p

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85 LES MÉGALITHES DE LA HAGUE Emmanuel GHESQUIÈRE, Hubert LEPAUMIER et Cyril MARCIGNY Le mégalithisme a affecté l'ensemble de la planète, depuis le cinquième millénaire avant notre ère jusqu'à nos jours. Dans l'ouest européen (région du mégalithisme le plus ancien), les premières formes mégalithiques apparaissent dès le début du Néolithique pour s'arrêter à la fin de l'âge du Bronze. Dans d'autres régions du monde (Madagascar, Polynésie, ), il a perduré jusqu'au XXème siècle, ce qui a laissé l'occasion à des ethnologues d'en étudier la construction ainsi que le fonctionnement (voire la symbolique) ; études qui permettent une nouvelle approche des sites anciens. Les monuments mégalithiques de la Manche ont déjà fait l'objet de plusieurs publications. Celles-ci sont la plupart du temps des écrits anciens ne comportant ni localisation précise, ni description complète. Dans l'état actuel, il n'est donc pas possible de mener une politique cohérente de sauvegarde de ce patrimoine vulnérable. C'est pourquoi un inventaire a été réalisé, entre 1992 et 1996 pour l'ensemble de la Basse-Normandie. Le but de ce travail a été double : il s'agit tout d'abord de repérer de façon précise les monuments de manière à pouvoir en assurer la protection, puis d'en étudier l'architecture apparente ainsi que le mobilier éventuel afin d'essayer de mieux appréhender le phénomène mégalithique. De plus, les études tant géographiques (sitologie) que paléoenvironnementales (carpologie, palynologie, anthracologie, malacologie, ) permettent dans certains cas de déterminer les facteurs d'implantation d'un site. En ce qui concerne la sitologie, un certain nombre de renseignements sont d'ores et déjà disponibles. Il apparaît que si les monuments ont été installés préférentiellement sur les hauteurs (ce qui augmente leur caractère monumental), certains monuments se retrouvent en flanc ou en fond de vallée. Il n'est pas inutile de rappeler que les sites de hauteur bénéficient de deux atouts majeurs qui ont facilité leur préservation : les soussols y sont généralement pauvres, et la roche quasiaffleurante ; le matériau n'a donc pas lieu d'y être importé. De plus, du fait de la pauvreté de leur sol, ces sites ont été souvent épargnés par l'agriculture. 85

86 Les mégalithes de la Hague 86

87 LE MÉGALITHISME FUNÉRAIRE Les allées couvertes Mis à part les menhirs, c'est le type de monument le mieux représenté dans le département (Vauville, Lithaire I, II et III, La Haye d'ectot). Il s'agit d'un des derniers stades de l'architecture mégalithique funéraire. L'ensemble des allées couvertes connues dans la région est dit de type armoricain, les allées couvertes du bassin parisien et de la plaine normande ayant la particularité d'être enterrées. Dans ce schéma architectural, la chambre occupe la quasi-totalité du monument. L'entrée est placée à l'une des extrémités, un vestibule pouvant toutefois subsister devant la chambre. Comme pour les sépultures à entrée latérale (Bretteville-en- Saire, ), une cella peut se trouver adjointe à la chambre, et le cairn est délimité soit par un parement, soit par un péristalithe. Ces monuments ont été érigés, comme les sépultures à entrée latérale, au cours du Néolithique final, durant la seconde moitié du troisième millénaire avant notre ère. Des réutilisations au Chalcolithique (vers 2400 avant notre ère) y sont cependant fréquentes. Elles sont le fait de la culture campaniforme, caractérisée par une céramique richement décorée au poinçon ou au peigne et par l'utilisation du silex blond du Grand-Pressigny, notamment pour la fabrication de poignards. Outre l'architecture, l'un des principaux problèmes concernant ce mode funéraire concerne la population inhumée. La corrélation entre la durée d'utilisation des monuments et le nombre d'individus ne permet pas de penser qu'on y ait déposé l'ensemble des membres d'une communauté villageoise, ni même d'une famille. Dans certains cas connus, il ne fait guère de doutes qu'il y a eu une sélection des individus. Les menhirs Il s'agit des monuments les plus courants parmi les mégalithes. Il s'agit de simples dalles dressées dans la Hague, mais on connaît dans reste du département des dalles taillées avant d'être levées (Saint-Pierre-Eglise, La Ronde Haye). Leur dimension peuvent être très variables, allant de quelques dizaines de centimètres (dans certains alignements par exemple, comme à Cerisy-la-Salle) à 24 mètres pour le grand menhir de Locmariaquer (Morbihan), dont la masse est évalué à près de 300 tonnes. Le menhir de Flamanville, détruit au XIXème siècle, mesurait quand a lui près de sept mètres. La datation de l'érection de ces monuments reste très difficile à définir. A Locmariaquer, par exemple, des fosses de calage de menhirs ont été découvertes sous le cairn de la Table des Marchands, dans un niveau daté d'environ 6000 ans. A l'inverse, certaines dalles désignées par erreur sous le terme de menhirs se révèlent n'être que de simples devises ou gratteux antiques ou modernes. On peut toutefois affirmer que les menhirs ont été érigés au moins du Néolithique moyen I (4500 avant n.è.) jusqu'à la fin de l'âge du Bronze (700 av.n.è.). De plus, en ce qui concerne la datation de ceuxci, il ne faut pas perdre de vue que la présence éventuelle d'un dépôt de l'âge du Bronze à leur pied (Cerisy-la-Salle, ) ne date pas leur érection. En effet, tant qu'il reste visible dans le paysage, un menhir constitue un point de repère remarquable. Si l'on s'est longtemps interrogé sur la signification de ces pierres dressées, des études ethnographiques ont apporté un certain nombre d'éclaircissements. Lieu cérémo- 87

88 Les mégalithes de la Hague Cette allée couverte de type classique a fait l'objet d'une fouille partielle exécutée vers 1755 par des délégués de la société académique de Cherbourg. Malheureusement, il semble qu'aucun procès verbal de ces recherches n'ait été dressé à l'époque. Quelques décennies plus tard, au début du XIXème siècle, l'allée subit de nouvelles dégradations : des habitants de Vauville entreprennent de récupérer certaines dalles afin de construire un pont. Prévenu de l'enlèvement de quelques dalles de couverture, Mr le Maignen, sous-préfet de Valognes, ordonne leur remise en place. En fait, si les blocs sont bien rapportés, elles gisent désormais à quelques mètres de l'allée. Pour éviter de telles mésaventures, le monument est définitivement classé Monument Historique en Depuis lors, il n'a fait l'objet d'aucune fouille, les recherches récentes se cantonnant à une étude épistémiologique (Rouxel 1930) et à une étude pétrographique (Bigot 1943). Description niel, lieu de réunion, limite de territoire, monument commémorant un évènement, un ancêtre ou un héros,..., les hypothèses actuelles tendent à estomper les seuls aspects astronomiques, voire astrologiques ou même ésotériques, au profit d'un rôle social, culturel ou commémoratif. Historique VAUVILLE L'allée couverte de Vauville mesure pour ce qu'il en reste 14,5 mètres de longueur. La largeur interne, quasiment constante sur toute la longueur, est d'environ 1 mètre. La hauteur sous plafond (mesurée à partir des orthostates qui ne sont pas effondrés) peut être estimée à 1,1 mètre. L'orientation générale de la chambre présente un angle de 22 5 p ar rapport à l'est. L'entrée se situe à l'ouest, face à la mer. Le côté sud de l'allée est constitué de dix orthostates alors que le côté nord en compte encore onze. Deux supports du côté sud sont complètement couchés alors que trois supports le sont sur le côté nord et, mis à part un orthostate de la rangée sud qui présente un pendage vers l'extérieur de la chambre, il semble que l'effondrement se soit effectué vers l'intérieur de l'allée, ce qui pourrait suggérer un léger pendage des orthostates lors de leur édification. La dalle de chevet, située à l'est, se distingue par sa massivité. C'est de loin la plus grosse dalle du monument. Seules deux tables de couverture ne se sont pas effondrées ; une troisième repose encore à l'intérieur de l'allée. Trois autres blocs (dont l'un repose à quelques mètres au sud de l'allée, les deux autres se situant à une dizaine de mètres au sud de celle-ci), qui proviennent de la même roche, pourraient avoir servi à la couverture du monument. Il pourrait s'agir des tables enlevées au début du XIXème siècle par les habitants du village. L'ensemble des blocs utilisés comme support est en quartzite silurien de provenance locale qui affleure en de nombreux endroits sur la hauteur sur laquelle a été érigé le monument. Les tables de couverture sont elles en granodiorite et ont donc dues être importées sur le site. D'après A. Bigot qui a effectué l'analyse pétrographique, leur provenance serait littorale, des blocs identiques étant présents le long des falaises à 2,7 kilomètres. L'altitude du lieu de construction (134 mètres) suppose néanmoins un déplacement plus important pour y amener ces dalles. 88

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90 SAINT-GERMAIN-DES-VAUX Trois mégalithes sont encore visibles sur cette commune. Tout d'abord, " la Grosse Pierre ", menhir qui a déjà fait l'objet de plusieurs publications depuis la fin du siècle dernier. Il s'agit d'un bloc parallèlépipédique en granit local, d'une largeur de 1,1 mètre pour une épaisseur de 0,5 mètre. Sa hauteur hors sol est de 1,8 mètre. Les dimensions de ce mégalithe tendent à montrer qu'il ne s'agit pas d'une " pierre à vache ", " frottoir " ou encore " gratteux ", bien que ceux-ci soient fort nombreux dans la Hague. Un autre monolithe de dimension très proche est visible à quelques centaines de mètres, à proximité du " joggard ", le monument le plus douteux de Saint-Germain. Situé au niveau d'un muret surmontant un abreuvoir, celui-ci se compose essentiellement d'une dalle en granit local mesurant 2,5 mètres de longueur, 1,5 mètre de large et 0,5 d'épaisseur. Outre ce bloc, plusieurs autres plus petits sont également visibles dans le mur. La présence de ces pierres dans une maçonnerie en pierres sèches composée de moellons est en fait des plus problématique. S'il semble peu probable qu'il s'agisse d'un dolmen en place, il pourrait être question d'une récupération d'éléments mégalithiques sur un monument qui aurait existé à proximité immédiate de la clôture. Pour tenter de résoudre ce problème, un sondage pourrait être effectué à l'arrière de la dalle principale, dans l'espoir de retrouver une éventuelle chambre. Lucas J., La Hague jusqu au temps de Guillaume le Conquérant, Leroux éd., Paris. Rouxel G., Les Pouquelées - galerie couverte de Vauville. BSNEP, t. XXVII, (1930), p Saintyves P., Les Pierres Levées du hameau de Bosvy, commune de Nacqueville, canton de Beaumont-Hague. Pierres à légendes de Normandie, éd. E. Nourry (Paris), p.140 et p Voisin A., Inventaire des découvertes archéologiques du département de la Manche - supplément. Bulletin de la Société Artistique et Industrielle de Cherbourg, t. XXX-XXXI, (1908), p. 74 et p. 77 à 79. URVILLE-NAQUEVILLE " HAMEAU BOSVY " Léon Coutil, en 1896, signale dans ce hameau la présence d'un certain nombre de menhirs, détruits après A cette époque là, selon les agriculteurs locaux, plusieurs pierres étaient encore dressées et plusieurs couchées. Ces menhirs auraient été en granit et détruits lorsque les terres ont été défrichées et mises en culture. Le toponyme de pierres levées a été donné à plusieurs pièces de terre du hameau de Bosvy. BIBLIOGRAPHIE bibliographie non exhaustive Coutil L., 1896a - Inventaire des monuments mégalithiques du département de la Manche. Annuaire des cinq départements de la Normandie, t. 63, p , p. 135, p. 200 et p Coutil L., 1896b - Inventaire des découvertes d archéologie préhistorique en Normandie, département de la Manche. BSNEP, t. III, 1895 (1896), p.122 Coutil L., La destruction des monuments mégalithiques de la Manche. l Anthropologie, t. XVI, p

91 L'AGE DU BRONZE DANS LA HAGUE : de la fin du IIIe millénaire au début de l'âge du Fer (VIIIe siècle av. J.C.) Un état de la documentation disponible Cyril MARCIGNY Avec la collaboration de Stéphanie CLÉMENT-SAULEAU, Fabien DELRIEU, Emmanuel GHESQUIERE, Erik GALLOUIN et Gérard VILGRAIN 91

92 L Age du Bronze dans la Hague : de la fin du III ème millénaire au début de l Age du Fer L'âge du Bronze marque le début de la protohistoire, d'une manière conventionnelle il est convenu que cette période débute vers 2200 avant notre ère et s'achève dans les années -800 ou Comme pour les époques précédentes, des marqueurs technologiques rythment cette tranche chronologique. Le principal est bien entendu l'apparition du métal : en cuivre puis en alliage cuivreux. Même si les tous premiers objets en cuivre datent du Néolithique final autour de 3100 avant notre ère, la généralisation des pratiques métallurgiques à la fin du IIIe millénaire et les profonds changements sociaux et économiques qui l'accompagne constituent bien un tournant dans l'histoire qui amorce quelquesuns des fondements de nos sociétés contemporaines. Depuis le début du XVIIIe siècle et la mise au jour en 1707 d'un ensemble de hachettes au Mésnil- Hue, les découvertes se sont multipliées dans le département de la Manche au point d'en faire l'une des régions les plus riches de France en ce domaine. La presqu'île de la Hague n'échappe pas à la règle et ce territoire durant l'âge du Bronze connaît de grands bouleversements qui voient, entre autres manifestations, l'apparition des grandes nécropoles à tumulus et la réalisation du Hague-Dike : deux types de structures qui marquent encore aujourd'hui le paysage de la presqu'île (fig. 1). LA FIN DU IIIe MILLENAIRE : le campaniforme A la fin du IIIème millénaire apparaît, en Normandie, une entité culturelle définie par un type de céramique en forme de cloche renversée et richement décorée : les gobelets campaniformes. Ce groupe, à la culture matérielle qui au premier abord peut paraître extrêmement standardisée (gobelets, poignard à languette en cuivre, brassard d'archer, boutons en os à perforations en V et plus rarement des petites parures en or), couvre sur un peu plus d'un demi millénaire (entre 2600 et 2000 av. notre ère) toute l'europe occidentale. En Basse-Normandie, les études sur cette période restent rares mais nous avons la chance de compter sur le territoire de la Hague la fouille d'un habitat campaniforme lors d'une opération de sauvetage en 1980 (suite à une première fouille entre 1975 et 1977) lors de la construction du centre de retraitement de la Hague (Letterlé et Verron 1986). Ce gisement situé à Digulleville "Le Raumarais 2B", sur le plateau en bordure des marais, a livré les restes d'un habitat sous la forme d'une fosse et d'une zone empierrée (fig. 2). Le mobilier assez abondant se rattache sans conteste au courant campaniforme (ce site fera l'objet d'un réexamen l'année prochaine sous la direction de J.Y. Noël dans le cadre d'un diplôme de l'ehess). 92

93 Le corpus céramique associe des récipients décorés dans le style campaniforme (fig. 3) et des vases de facture plus grossière. 256 artefacts lithiques ont aussi été découverts lors des ramassages de surface et un peu moins de 300 (>2 cm) lors de la fouille, parmi lesquels on compte 27 % d'outils. La caractéristique du débitage, en dehors d'une phase de plein débitage d'éclats classique (25 % de la série), est le fractionnement de petits galets sur enclume en deux moitiés, directement utilisables pour façonner des grattoirs (40 % de la série). Cette technique de fractionnement apparaît également, à moindre échelle, dès le Néolithique moyen II dans le Nord- Cotentin (site d'herqueville "Les Treize Vents", Chancerel, Ghesquière, Marcigny 1996). Un débitage lamino-lamellaire est également présent à concurrence de 10 %. L'outillage est largement dominé par les grattoirs/racloirs (les 4/5ème sur demi-galets). Les éclats retouchés et denticulés composent un peu plus de 15 % du corpus et l'on retient également la présence de 5 armatures de flèche (dont une tranchante), d'un fragment de poignard en silex pressignien et d'un fragment de scie à encoches. A la même époque, la frange littorale semble densément occupée comme en témoignent les nombreux petits ensembles découverts lors de prospections sur les micro-falaises. Un travail de synthèse reste toutefois à réaliser sur ces séries et sur leur attribution fonctionnelle. Plus récemment, des fouilles réalisées sur l'abri sous roche de La Jupinerie à Omonville-la-Petite ont aussi livré une occupation datée de la fin du IIIe millénaire, ce site qui fera l'objet d'une présentation plus complète à l'occasion des travaux 2006 du PCR, a d'ores et déjà fournit de nombreux vestiges céramiques et lithiques et les traces d'un bâtiment sur poteaux plantés (Marcigny 2004 et Marcigny et al. 2005). L'AGE DU BRONZE ANCIEN (2000 à 1600 avant notre ère) Durant cette période d'un peu plus d'un demi millénaire, la métallurgie du cuivre puis du bronze s'affirme dans la plupart des régions d'europe. Très rapidement, deux centres dynamiques semblent se mettre en place à partir du substrat campaniforme. Le premier est centré sur l'europe centrale (le complexe "continental") et le second sur la façade atlantique et les rivages de la Manche et de la Mer du Nord (le complexe "atlantique"). De ces deux pôles naît une forme de hiérarchie sociale qui prend ses racines dans les groupes de la fin du IIIe millénaire. Cette dernière est induite de la fouille de nombreuses tombes monumentales en Armorique ou dans le Wessex (sud de l'angleterre). Les "aristocrates" (élite sociale ou religieuse) inhumés dans ces tombeaux sont généralement accompagnés, dans leurs dernières demeures, de parures en or ou en ambre, d'armes (hallebardes, poignards), de pointe de flèches en silex d'une facture remarquable et de vaisselles d'or, d'argent ou en terre cuite. Dans les régions de l'ouest, à cette époque, de nombreux circuits d'échanges se mettent en place ; les matières premières et les objets circulent (cuivre, étain, or, argent, ambre) mais aussi les idées. En marge de cette société "princière" tout un réseau d'établissements agricoles, regroupant une à plusieurs unités familiales, continue de faire vivre les campagnes. L'habitat du Bronze ancien Aucun site d'habitat daté de l'âge du Bronze ancien n'a pour l'instant été mis au jour dans la Hague. Toutefois, de nombreuses séries lithiques découvertes sur le littoral présente des caractéristiques typologiques les rapprochant de la protohis- 93

94 L Age du Bronze dans la Hague : de la fin du III ème millénaire au début de l Age du Fer toire ancienne ; un travail d'analyse reste donc a effectuer dans le cadre du recensement des sites de l'âge du Bronze. Le domaine funéraire : le tumulus de la Fosse Yvon Le tumulus de la Fosse Yvon a fait l'objet d'une destruction de sa chambre funéraire en 1850 pour y installer un four à chaux (fig. 4). On a découvert à cette occasion une dizaine de pointes de flèche armoricaines et un poignard en Bronze de 40 cm de long et large de 5 cm (Le Chanteur de Pontaumont, 1856, p. 215). En 1851, M. Le Carpentier, notaire à Sainte-Croix-Hague a fait don au Musée de Cherbourg d'une de ces pointes et du poignard (fig. 5). Ce dernier, longtemps égaré dans les réserves du Musée, a été redécouvert à la fin des années quatre vingt dix, il n'en reste plus que la pointe conservée sur 8 cm de long (Musée E. Liais à Cherbourg, n 7506). Le poignard app artient au type à languette large non débordante, sa lame est de section lenticulaire et ses deux faces sont décorées d'incisions longitudinales de chaque côté du 94

95 couche constituée du sol en place remanié. A l'âge du Bronze le monument pouvait faire 3 à 4 m de hauteur. Le niveau de terre formant le remplissage du tertre a livré un mobilier céramique et lithique peu abondant qui se rattache à la même phase culturelle que le monument. Il est donc probable que ces terres proviennent d'une couche d'habitat. Parmi le mobilier céramique, on peut signaler la présence d'un gobelet caréné à anse plate particulièrement caractéristique et daté du Bronze ancien (Briard, 1984 ; Blanchet, 1984). L'industrie lithique est riche de 90 artefacts. Le débitage d'éclats est quasi-exclusif et les nucléus sont absents (2 galets testés). Neuf grattoirs ont été retrouvés; ils constituent les seuls outils. Un percuteur sur galet en roche verte est également issu de la série. bourrelet médian. Ce type d'objet se rattache à la phase ancienne de la "culture des Tumulus Armoricains" au début du IIe millénaire (Briard et Verney, 1996, p. 573). La pointe de flèche est de type triangulaire allongé, en silex blond (Musée E. Liais à Cherbourg, n 7507/1639) ; elle se ratt ache à la même culture et n'est pas sans rappeler les pointes du monument du Cruguel à Guidel dans le Morbihan (Briard, 1984, p. 99). Le tumulus de la Fosse Yvon a fait l'objet à nouveau de sondages puis d'une fouille de sauvetage en 1986 et 1987 suite à la construction d'une zone industrielle (Vilgrain et al. 1989). A l'issue de cette opération des mesures conservatoires ont été prises et le monument est aujourd'hui inclus dans un aménagement paysager. La partie centrale de la tombe était malheureusement en partie détruite par un four à chaux, mais des observations très intéressantes ont été faites, lors de ces fouilles, sur la constitution de la masse du tertre, conservé sur 1,50 mètre de hauteur et 25 m de diamètre. Après un arasement et un épierrement du sol en place, la base du monument a été délimitée par une couronne de petits blocs de grès puis " soupoudrée " d'une pellicule de sables et de limons de quelques centimètres d'épaisseur de manière à préparer le terrain et l'aplanir. La masse du tumulus a ensuite été construite à l'aide d'un apport de terres puis d'une L'INVENTAIRE DES TUMULUS DE LA HAGUE La Hague est une des régions de Basse- Normandie les plus riches en tumulus, puisque l'on en compte plusieurs dizaines. Cette reconnaissance particulière est liée à la mise en culture tardive de l'arrière pays. Un grand nombre d'entre eux sont en effet encore visibles dans le paysage, bien qu'ils aient pour la plupart (sinon la totalité) fait l'objet de fouilles expéditives au XIXe siècle, de destruction lors de la dernière guerre ou lors de la construction du centre de retraitement de la Hague. La datation de ces monuments reste bien entendu conjecturale mais il est très probable qu'ils appartiennent à la Protohistoire ancienne (âge du Bronze ou début âge du Fer). Tout un travail est à mener sur ce type de structure. Cette partie de l'étude formera un des dossiers les plus importants du PCR dans les prochaines années. Dans le cadre de cette première analyse liminaire, nous présentons ici un inventaire le plus complet possible de cette documentation. Ces données doivent maintenant faire l'objet d'une étude critique couplée à une prospection systématique qui à terme pourra déboucher sur de nouvelles fouilles pour valider la fiabilité archéologique de ces monuments. 95

96 L Age du Bronze dans la Hague : de la fin du III ème millénaire au début de l Age du Fer Les tumulus d'auderville A Auderville, trois tumulus sont recensés au XIXe (fig. 1, site 1 et 2), mais un seul situé au lieu dit " La Cour " (sur la route de Jobourg à Auderville, terrain appartenant à l'époque à de Chantereyne; fig. 1, site n 1) a été fouillé au XIXe siècle (vers 1810, par de Gerville et Duchevreuil ; Le Chanteur de Pontaumont, 1856, p. 214). Un compte rendu établi à cette époque nous permet d'avoir un aperçu de ce que pouvait être ce monument : "trois journée de quatre ouvriers furent employées à déblayer un large passage de la circonférence au centre où nous trouvâmes, au niveau de la terre vierge, une petite chambre carrée, ayant un pied (32,5 cm) en tout sens, formée part quatre grosses pierres brutes, mais ayant leurs faces unies intérieurement. Une cinquième les cou- 96

97 vrait. L'aire de cette concamération (construction de forme voûtée) était semée de sable de mer et de cailloux roulés ; des cendres et des ossements brûlés en petite quantité étaient étendus sur cette aire : il n'y avait rien autre chose, pas même des débris de poterie ou de fer." (de Gerville, 1831). Les tumulus de l'église de Jobourg En face de l'église de Jobourg (fig. 1, site 3), plusieurs petits tumulus sont cités par Le Chanteur de Pontaumont (1856, p. 221) et auraient été détruits lors de la dernière guerre (installation d'un blockhaus radar ; archives A. Huet). Les tumulus de la Lande de Jobourg Deux ensembles de tumulus sont connus sur les landes de Jobourg. Le premier ensemble (fig. 1, site 4) était situé à l'extrémité est des landes, ils ont été détruits lors de la construction de l'usine de retraitement. Le second ensemble est la nécropole tumulaire la plus connue (fig. 6), constitué de treize monuments (fig. 1, site 5). Une lettre de de Gerville au baron de Vanssay, préfet de la Manche, conservé parmi les feuillets de la "Correspondance de Gerville" (bibliothèque Jacques Prévert, Cherbourg, Ms 245, folio 7 ; transcription R. Lerouvillois, 1999), donne une description de ces monuments : " Ce sont d'énormes taupinières aplaties, dont la forme est à peu près circulaire, le diamètre de trente à cinquante pieds (9,75 à 16,25 m) ( ) Les autres sont sur le territoire de Jobourg : neuf sont sur la route de l'église de Herqueville à celle de Jobourg, environ à un quart de lieue de cette dernière. Je les ai vues dans deux pièces de terre en landages, contiguës, nommées Les Heugues, appartenant à Jean Fleury; deux autres sont près du hameau Thiébault (même paroisse) dans une lande fermée depuis sept à huit ans ". Certains ont visiblement été fouillés au XVIIIe et XIXe siècle. D'après de Gerville (1831), L'abbé Lucé accompagné de M. de Beaumont en ont ouvert quelques-uns à Jobourg (vers 1770 d'après P. de Chantereyne) ; à cette époque ils ne trouvèrent que des cendres et du charbon. Dans les années cinquante, de nouvelles fouilles ont été entreprises par l'équipe dirigée par H. Arbman à la même époque que l'étude du Hague Dike (Arbman, 1953). Deux tumulus ont ainsi fait l'objet d'une fouille exhaustive et d'un relevé précis (on peut juste regretter l'absence de localisation de ces monuments). Les deux tumulus étaient formés de sable (peut être du lœss) et délimité sur leurs pourtours par un alignement de blocs de grès (fig. 7). Lors de ces fouilles, aucun vestige pertinent n'a été trouvé permettant d'éclairer la datation de ces monuments ; toutefois quelques silex ont été dégagés à la base des tertres témoignant selon toute vraisemblance d'une occupation plus ancienne. Dix années après cette exploration ponctuelle des tumulus de la lande de Jobourg, l'aménagement du centre de retraitement a nécessité une fouille de sauvetage pour sauver in extremis des informations sur cet ensemble funéraire parmi les plus important de Basse-Normandie. Cet ainsi que R. Lemière en 1962 a effectué un relevé en plan des monuments et une fouille sur un tertre sous la forme de sondage expéditif avant la destruction du site (Lemière, 1989). Les données recueillies à l'occasion de cette opération ne nous éclairent pas beaucoup plus sur la datation de ces tombes. Tout au plus peut-on souligner la présence de nombreuses structures, possible inhumations, recoupant systématiquement la masse des tumulus. Les archives de ces deux dernières fouilles feront l'objet d'une analyse exhaustive lors des travaux 2006 du PCR. Le tumulus du Mont-Clin A Omonville-la-Petite, un tumulus est parfois cité sur le Mont Clin (fig. 1, site 6). Les tumulus de Digulleville Au hameau des Asselins, une nécropole de 9 tumulus est connue depuis le XIXe siècle (fig. 1, site 7). Un de ces tumulus au lieu-dit Les Monts a été récemment fouillé par H. Lepaumier dans le cadre d'un programme de recherche sur le Néolithique (Lepaumier, 1994). Ce tertre s'est révélé être un pointement rocheux naturel, cette fouille a toutefois livré une très belle ébauche de hache bipenne naviforme qui peut être daté de la fin du Néolithique ou du début de l'âge du Bronze. Le tumulus de Digulleville " les sablons " Sur la plaine littorale, un tumulus, présentant de nombreux blocs de pierres apparents (fig. 1, site 8), a été identifiés à la fin du XIXe siècle (de Gerville, 1854 ; Le Chanteur de Pontaumont, 1856), puis par R. Lemière (archives R. Lemière, SRA de Basse-Normandie) et A. Huet lors de survols aériens (archives A. Huet). Les tumulus de Beaumont-Hague Nous avons déjà évoqué plus haut, le seul tumulus véritablement daté de la région (Bronze ancien), situé à la Fosse Yvon (fig. 1, site 10) et sondé par A. Chancerel puis G. Vilgrain dans les 97

98 L Age du Bronze dans la Hague : de la fin du III ème millénaire au début de l Age du Fer années quatre-vingts (Vilgrain et al., 1989), mais deux autres monuments existent encore à Beaumont (fig. 1, site 9 et 11). Un deuxième est situé derrière l'école communale et a été en grande partie détruit durant la seconde Guerre Mondiale (fig. 1, site 9). Enfin un dernier monument a été fouillé par M. de Vauquelin (de Gerville, 1831) sur "La Hougue de Branville" (fig. 1, site 11). Le tumulus mesurait près de 20 m de diamètre et un peu plus de un mètre de hauteur. La chambre était formée de deux grosses dalles. A l'intérieur du sépulcre, des traces de combustion, des fragments de poterie grossière et une épée (en fer ou en bronze selon les auteurs) ont été observés. Un article de presse daté du 27 avril 1851 relate la fouille du tumulus de la Fosse Yvon et le legs Le Carpentier au Musée de Cherbourg (cité dans le rapport de R. Lerouvillois sur l'origine des collections du Musée E. Liais de Cherbourg). La fin de cet article indique l'emplacement de ce dernier tumulus, situé sur la même lande des Hougues (au lieu-dit Les Delles), qui lui aussi fut en partie détruit par l'aménagement d'un four à chaux. Lors de l'aménagement de ce fourneau des "pièces d'armures plus nombreuses, mais aussi presqu'entièrement 98

99 détruites par l'oxydation" ont été découverts. Ce monument a fait l'objet plus récemment d'une fouille rapide sous la conduite de M. de Boüard et F. Scuvée (Scuvée, 1978, p. 4). Ces derniers ont toutefois arrêté leur exploration lorsqu'ils ont découvert que le monument n'appartenait pas à la période Viking mais à la protohistoire. Lors des fouilles une chambre funéraire ("ciste") de 2,30 x1,50 m aurait été découverte à l'intérieur du monument (archives R. Lemière, SRA de Basse-Normandie), mais elle avait déjà été vidée de son contenu (Scuvée, 1978, p. 4). Le tumulus de Sainte-Croix-Hague Au lieu dit "Kielland" (fig. 1, site 12), R. Lemière a repéré un tumulus très difficile à distinguer actuellement (archives R. Lemière, SRA de Basse-Normandie). Ce monument pourrait être le même que celui cité par Ragonde (Ragonde, 18363, p. 229) et L. Coutil (Coutil, 18795, p. 123). Ce dernier relate dans son article une fouille qui aurait été effectué en 1830 et qui "(..) fournit un vase d'argile protégé par des pierres et posé sur une aire d'argile cuite ; elle révéla également à 1,20 m de profondeur une chambre en pierre sèches de 1,94 m de longueur remplie de cendres et de charbons". Le tumulus d'acqueville Pontaumont en 1856 décrit très brièvement un tumulus entièrement détruit en 1833 qui était situé sur un coteau appelé le Clos de la Butte (Le Chanteur de Pontaumont, 1856, p. 213). L'AGE DU BRONZE MOYEN (1600 à 1350 avant notre ère) L'âge du Bronze moyen est caractérisé par l'intensification des productions métalliques qui aboutit peu à peu à la fabrication d'objets en série. La zone atlantique produit en grand nombre les haches à rebords puis à talon, des épées, des poignards à languette, des pointes de lance et, pour les bijoux, des bracelets massifs fréquemment gravés. Dans l'ouest et le Nord, les tombes princières laissent la place à des tumulus plus discrets. Les modes funéraires changent aussi : si l'inhuma- Les tumulus de Vauville A Vauville, trois tumulus ont été partiellement détruit sur les landes de Catillon (fig. 1, site 13) ; un de ces monuments était encore visible dans les année soixante dix (Scuvée, 1978, p. 4). Le tumulus des Cottes à Vauville Sur la Lande des Cottes (fig. 1, site 14), un tumulus est encore visible ; d'autres ont été détruits au XIXe siècle. Ils auraient livré des épées en bronze. Ces derniers mesuraient en moyenne 8 m de circonférence (Le Chanteur de Pontaumont, 1856, p. 227). Le tumulus du Bois des Hougues à Vauville Au Bois des Hougues, un petit monticule appelé la Butte de César (fig. 1, site 15) est cité par de Gerville (Gerville, 1854, p. 217). Ce monument a fait l'objet de plusieurs explorations et est encore aujourd'hui traversé par une ancienne tranchée. La Société des Antiquaires de Normandie y auraient trouvé des objets en bronze (cette référence reprise des archives de R. Lemière n'a pas encore été retrouvée). 99

100 L Age du Bronze dans la Hague : de la fin du III ème millénaire au début de l Age du Fer 100

101 tion persiste jusqu'au Bronze final, des incinérations font leur apparition (en pleine terre ou déposées dans des urnes). Ces dernières sont dans bien des cas placées au centre de tumulus ou d'enclos circulaires. L'habitat évolue aussi et les premiers parcellaires font leur apparition sur les rivages de la Manche où une culture similaire unit le nord-ouest du continent et la Grand Bretagne (culture de Deverel Rimbury). Les vestiges de l'âge du Bronze moyen Les vestiges datés de l'âge du Bronze moyen sont particulièrement rares dans la Hague, alors que cette période est très bien représentée dans le Cotentin (habitat de Montfarville, Réville, Tatihou, ). Quelques objets métalliques découverts isolés sont à signaler. A Beaumont-Hague, sur la Lande de Beaumont, une hache à rebords à butée incomplète décorée de deux dépressions triangulaires a été découvert en 1850 à l'occasion de travaux agricoles (Coutil, 1895, p. 119 ; Musée E. Liais à Cherbourg, n 7505), cette hache date de la première moitié du Bronze moyen (fig. 8). Une deuxième hache a été mise au jour à Vauville en 1925 sur la "pente sud du Prieuré de Vauville", il s'agit là d'une hache à talon munie d'un anneau sur le côté (Divry, 1934), cette pièce est caractéristique de la deuxième moitié du Bronze moyen. Un petit ensemble céramique découvert dans les dunes de Biville (retrouvée lors du recensement des objets du Musée E. Liais) complète l'inventaire des découvertes du Bronze moyen. Ce petit lot de tessons et de silex mélangés à des céramiques médiévales forme le premier ensemble du Bronze moyen de La Hague (fig. 9). Le mobilier céramique associe des formes grossières hautes à profil droit fréquemment décoré de cordon lisse et des vases à pâte plus fine. L'ensemble provient très probablement d'un site d'habitat et est typologiquement relativement proche de la première phase de l'île Tatihou à l'extrême fin du Bronze ancien ou au début du Bronze moyen (Marcigny et Ghesquière, 2003). L'AGE DU BRONZE FINAL (1350 à 800 avant notre ère) A la fin de l'âge du Bronze, les innovations des techniques, des productions métalliques (nouveaux modèles d'épées et de bijoux ; apparition des haches à ailerons, des faucilles et du rasoir) des formes sociales et des pratiques funéraires, permettent d'identifier près de 5 stades à valeur chronologique durant les trois siècles que dure cette période. Dans l'ouest de la France, cette évolution se fait moins sentir. Les deux premières étapes du Bronze final, entre le XIVe et le XIIe siècle, sont encore profondément ancrées dans les traditions de l'âge du Bronze moyen (groupe de Deverel Rimbury). Aucune évolution dans le style céramique ou dans les modes d'occupation du territoire ne laisse transparaître de véritable rupture avant le XIe siècle. A cette époque et jusqu'au début du premier âge du Fer, se développent, parallèlement aux fermes isolées, les habitats groupés et l'occupation des sites de hauteur parfois fortifiés, témoignant peut-être d'une période d'insécurité. L'épée de l'anse Saint-Martin Un seul objet de l'âge du Bronze final a pour l'instant été découvert sur le territoire de la Hague. Il s'agit d'une magnifique épée en bronze découverte dans l'anse Saint-Martin dans les années cinquante dans les filets d'un chalutier (anonyme, 1973). Cet objet a été vendu, à l'époque, au Musée de Bretagne à Rennes (n ; Briard et al., 1977, p. 48, n 93)) et depuis a sombré dans l'oubli au niveau local. L'épée est dans un état de conservation parfait et a une patine particulière qui témoigne de son enfouissement en milieu tourbeux (le sous sol de l'anse Saint-Martin est formé de tourbe ; fig. 10). Elle mesure 73,5 cm de long pour une largeur de 5,6 cm au niveau de la garde. Elle appartient au type en langue de carpe caractéristique du Bronze final III (au IXe siècle avant notre ère ; Briard et Mohen, 1972), sa poignée est en forme de " T " et présente trois gros trous de rivets. Il y a deux autres trous de rivet de chaque côté de la garde, cette dernière est soulignée par deux logements plus ou moins rectangulaires (des ricassos). Le contexte de cette dernière découverte, dans la tourbe de l'ancien marais littoral aujourd'hui submergé, de l'anse Saint-Martin à proximité de niveaux connus associant des restes de bois, ne sont pas sans évoquer les installations cultuelles de l'âge du Bronze reconnues à Flag Fen (Cambridgeshire) en Angleterre (Pryor, 1992) et en Brandebourg à Spandau près de Berlin en Allemagne (Schwenzer, 1997). Ces installations sont constituées d'offrandes d'armes et d'objets divers déposés depuis un ponton de bois dans les eaux stagnantes du marais. Ce secteur de la Hague mérite donc toute notre attention dans les années à venir, des prospections pédestres et/ou mécaniques devraient compléter les premiers sondages réalisés dans le cadre de l'étude paléoenvironnementale de l'anse (Lespez et al., 2005). 101

102 L Age du Bronze dans la Hague : de la fin du III ème millénaire au début de l Age du Fer Le Hague Dike Le Hague Dike est une fortification de terre qui barre toute la Hague à sa partie la plus rétrécie transformant ainsi la presqu'île en un très vaste camp retranché. Le rempart consiste aujourd'hui en un talus, parfois important, boisé et incorporé au paysage bocager. A ses deux extrémités, il est relayé par les vallées de la Sabine, à l'est, et d'herquemoulin, à l'ouest, qui, par leur encaissement, constituent des défenses naturelles suffisantes. Cette structure emblématique, élément fort de l'identité culturelle et patrimoniale de la Hague, suscite depuis presque deux siècles l'intérêt des antiquaires et archéologues normands. La plus ancienne citation du Hague Dike proviendrait du cartulaire de Vauville daté du XIIIe siècle (référence citée dans de Boüard, 1953 ou Lerouvillois, 1992). Dans ce document, égaré lors des bombardement de Saint-Lô en 1944, qu'une partie de l'équipe réunie autour du projet de PCR sur la Hague tente difficilement de retrouver (sous la direction de V. Carpentier), Guillaume, fils de Pierre de Beaumont, déclare avoir reçu en fief, de l'abbé et du couvent de Cerisy, la terre qu'ils possédaient "à Beaumont, entre l'église et le fossé de Haguedick" (ici le terme utilisé pour désigner le rempart est le substantif latin fossatum -fossé- qui signifie aussi talus, levée de terre et qui peut se substituer à fossé). Le Hague Dike n'est ensuite mentionné que sur les cartes des XVIIe et XVIIIe siècles : carte du diocèse de Coutances (1689), cartes de Sanson (1720), d'anville (1760) et Belley (1773) (Potiche, 1891). A partir de la première mention "archéologique" du Hague Dike dans l'ouvrage de L. de Masseville sur l' "Etat géographique de la province de Normandie" en 1722, les opinions concernant la vocation, la datation et même l'origine du rempart n'ont cessé de s'opposer. Il est inutile de revenir ici en détail sur les nombreux articles qui ont rythmé cette polémique durant tout le XIXe et le début du XXe siècle (fortification attribuée aux Anglais, aux pirates saxons, aux Romains, aux Vikings, aux Gaulois, ) Lorsqu'en 1905, le Congrès de l'association Française pour l'avancement des Sciences se déroula à Cherbourg, la question n'était toujours pas résolue et le volume des actes publié à cette occasion ne fait que présenter les deux hypothèses sans trancher la question. Lors de ce congrès, des sondages semblent toutefois avoir été réalisés dans la masse du rempart (Voisin, 1908). Ces fouilles sans véritable compte rendu ne livrèrent que "comme lors des fouilles antérieures ( ) que des charbons de branchages, d'espèce indéterminable, sans trace de silex ni de métal". Une année après le congrès de l'afas, le Hague Dike connaissait un nouveau rebondissement avec le développement de "l'archéologie préhistorique". Le rempart présentait en effet de grandes similitudes avec certaines enceintes préhistoriques (dont l'inventaire était en cours sous la houlette de la Société préhistorique Française) et les 102

103 auteurs de "L'homme préhistorique" ont alors tout naturellement rattaché le site à leur domaine d'étude (de Mortillet, 1906, p. 204) La même année, F. Emmanuelli, suite à cette nouvelle hypothèse, propose de revenir sur l'étude du Hague Dike. Dans un article, en deux parties, particulièrement intéressant et complet (Emmanuelli, 1906), ce jeune chercheur revient sur les différentes théories qui ont rythmé le XIXe siècle et, en attendant de nouvelles fouilles, propose une solution alternative aux problèmes de datation : le rempart pourrait dater de la pré ou la protohistoire mais il a très probablement été réutilisé par les Vikings (" le Hague-Dicke est devenu scandinave, s'il ne l'était pas primitivement "). Afin de statuer sur l'origine viking du Hague Dike, des fouilles sont enfin réalisées de 1951 à 1953 sous la direction de H. Arbman, M. de Boüard et T. Ramskou (Ramskou, 1952 ; Arbman, 1953 ; de Boüard, 1956). Ces travaux ont concerné le retranchement mais aussi une série de tombelles. A cette époque de nombreuses coupes ont été réalisées dans le rempart montrant la constitution d'un talus contenu par des parements de granite ou des palissades en bois (fig. 11). De ces trois campagnes, les seuls éléments de datation mis au jour sont des charbons de bois qui ont fourni une série de dates comprises entre 900 et 800 av. notre ère. En 1983 et 1984, l'élargissement d'une route desservant le centre de retraitement de la Cogema (CD 901) a nécessité la réalisation d'une fouille de sauvetage sur une portion du rempart (fouille inédite). Lors de cette opération, menée par A. Huet, de nouvelles informations ont pu être collectées sur le site : mise en évidence d'une occupation domestique datée des XIIIe-XIVe siècles aux abords du talus, nouveaux relevés stratigraphiques et découvertes de nombreux silex et tessons protohistoriques datés de l'âge du Bronze moyen et final. Après cette dernière fouille, le site est inscrit à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques à la fin de l'année Depuis cette date, le Hague Dike fait l'objet de mentions régulières dans les guides touristiques et les ouvrages de vulgarisation sur la présence viking en Normandie, sans pour autant faire état des précieuses données scientifiques obtenues lors des fouilles de A. Huet. Il faudra attendre l'année 2003, pour que dans le cadre du recensement des sites âge du Bronze de Basse-Normandie, on "redécouvre" le Hague Dike et son calage chronologique possible à la transition Bronze final / 1er âge du Fer. Cette même année, une rapide prospection du rempart a mis en évidence une destruction de la partie en élévation du rempart au niveau de la coupe II de H. Arbman. Cet élargissement d'un des sondages de 1951, suite à des travaux agricoles, a été l'occasion, au printemps 2004, de procéder à un nouvel examen en coupe du Hague Dike (sur sa partie haute uniquement, la base du talus n'ayant pas été touchée par les destructions), et a permis le prélèvement de nouveaux charbons de bois (dans l'humus brûlé des différentes phases du talus) dans l'objectif d'obtenir des datations isotopiques précisément calées par rapport à la stratigraphie du rempart. A l'heure actuelle, seul un échantillon a été daté. Il place le brûlis du premier talus entre 1206 et 925 avant notre ère soit au début du Bronze final I (Marcigny, 2005). A l'issue de cette première phase d'étude du Hague Dike, il semble que des informations particulièrement novatrices ont pu être exhumées de la masse documentaire disponible. Parmi ce lot d'informations, les réponses à la question de la datation du rempart et de son attribution culturelle formaient l'axe fondateur de cette étude, susceptible de déboucher sur les données les plus attendues. On peut affirmer aujourd'hui, sans trop d'erreur, que le Hague Dike, cet élément fort de l'identité culturelle et patrimoniale de La Hague, est daté de la protohistoire ancienne et plus particulièrement de l'âge du Bronze, période qui a bien marqué le paysage de la presqu'île : habitats de fonds de vallée, nombreux tumulus, enclos et limites agraires encore visibles dans le paysage. 103

104 L Age du Bronze dans la Hague : de la fin du III ème millénaire au début de l Age du Fer A un autre niveau d'observation, il est apparu lors des prospections que le rempart était menacé dans plusieurs secteurs et que ce patrimoine unique subissait les vicissitudes d'une dégradation lente et irréversible (au contact des routes actuelles ou de certaines parcelles agricoles). Il est donc plus que nécessaire de préserver ce qui reste de cette structure unique en France et de proposer une mise en valeur d'une des coupes du rempart (avec restitution/explication du monument pour le grand public (au niveau de la route d'omonville-la-rogue, par exemple). Le réseau de talus de la lande de Jobourg Reconnu dès le début du XIXe siècle et très bien décrit par P. Lefillastre (Bibliothèque Jacques Prévert, Cherbourg, manuscrit Ms 225, ibidem, folio 103 verso, publié par R. Lerouvillois en 1999), un système de talus et fossés de 5 à 7 m de large divergent par rapport au parcellaire de cette époque occupait l'arrière du Hague Dike et semblait lui être plus ou moins contemporain (la date de cet ensemble reste toutefois à confirmer). Ce réseau "( ) occupait la majeure partie du superbe plateau qui s'étend au nord-est du chemin de Jobourg à Beaumont, entre la hauteur de l'église de Jobourg et celle du parc de Beaumont.". Ce réseau a, à l'occasion du sauvetage archéologique réalisé sur les tumulus de la lande de Jobourg, lors des travaux du centre de retraitement (travaux R. Lemière), fait l'objet d'un relevé en plan et d'observation stratigraphique. L'auteur de la fouille a en particulier bien mis en évidence le recoupement entre les tumulus et les talus, confirmant la date ancienne du réseau de fossé/talus (Lemière, 1989). Aujourd'hui la plus grande partie du réseau a été détruit, le dépouillement des couvertures IGN avant la construction du centre de retraitement de la Hague permet toutefois de restituer une partie de ce dispositif. Ce travail actuellement en cours nous permettra sûrement de revenir sur cet ensemble particulièrement intéressant lors des prochaines années de recherche du PCR. LA QUESTION DES RETRANCHEMENTS DE LA HAGUE Plusieurs autres fortifications de terre ont aussi été découvert dans la Hague dès les XVIIIe et XIXe, ces structures à l'instar des tumulus ne sont pas datées avec précision mais le rapprochement typologique entre le rempart du Hague Dike et certaines de ces enceintes permet à titre d'hypothèse de les placer dans une fourchette chronologique couvrant le Bronze final et le premier âge du Fer. Toutefois, il convient de rester très prudent et seules des fouilles permettront de préciser leurs datations. Dès la fin du XVIIIe siècle P. de Chantereyne puis l'abbé Demons ont commencé à s'interroger sur ce type de retranchements aux caractéristiques si proches du Hague Dike. Le premier de ces ouvrages était situé au sud-ouest de l'ancien fort d'omonville ("sur une montagne voisine"), il était encore bien visible à cette époque et autorisait une description assez précise. La structure appelée le Castelet de Hutch-heux ou Hutchu a une forme circulaire, son diamètre avoisine les 41 m environ, une entrée était situé à l'est et au nord-ouest se trouvait un petit ouvrage avancé de forme semi-circulaire. Il est dommage que ce site n'ai pas fait l'objet d'une description plus complète à l'époque, les dimensions de l'enceinte et l'entrée situé à l'est ne sont pas sans rappeler les Ring Fort de l'âge du Bronze final connus Outre Manche (une campagne de prospection puis de sondage est à envisager sur ce site). De Gerville complète ces observations dans son article sur les "premiers établissements militaires normands" (1833) : "les redoutes circulaires furent élevées autour du port d'omonville. J'en ai reconnu cinq, disposées à peu près en forme de croissant ( ) La première, vers le nord, est sur l'emplacement du corps de garde actuel de Digulville ; elle se nomme Jerd- Heue, c'est la moins élevée des cinq, cependant elle domine sur la mer ; ses restes sont très mal conservés. On voit pourtant assez pour reconnaître sa forme circulaire et sa petite dimension.( ) à deux cents mètres de Jerd-Heue, j'ai cru remarquer en un lieu nommé Les Castiaux, l'emplacement d'un autre retranchement ( ) Deux autres redoutes circulaires forment le centre de ce système ( ), la redoute intérieure s'appelle Huch- Heue ( ) et l'autre qui est un peu plus haut Trent- Heue. ( ) Le Huch-Hut est à deux cent cinquante pas au dessus de l'église d'omonville ( ) ; cette redoute comme les autres Heues à cinquante pas de diamètre ( ) Trent-Heue ( ) il est au moins à cinq cents pas au sud du Huch-Hut ( ) Enfin, la partie orientale du croissant est composée de deux autres petites redoutes ( ) l'une d'elles est connue sous le nom de Led Heue". Il faudra attendre les années cinquante pour que des archéologues s'intéresse à nouveau aux retranchements de la Hague avec le travail mené sur les traces Vikings dans la Hague par l'équipe de M. de Boüard (de Boüard, 1953). A cette occasion, il a effectué une prospection pédestre sur la plupart des sites et a réalisé des sondages sur la seule enceinte conservée en élévation au lieu dit Huch-u. En 1953, l'enceinte, perturbé par les travaux militaires de la seconde guerre mondiale, est vaguement circulaire d'une quarantaine de mètres de diamètre. Une coupe réalisée dans le talus n'a pas livré de mobilier datant : l'armature de ce petit rempart était dans ce secteur uniquement constituée "de petits cailloux schisteux avec un peu de terre". Une recherche a aussi été menée vers l'extérieur de l'enceinte à la recherche d'un éventuel fossé mais rien de probant n'a été découvert (de Boüard, 1956). 104

105 Ces nombreuses enceintes présentent un intérêt indéniable pour la restitution des paysages protohistoriques de la Hague. Il importe aujourd'hui de faire la part des destructions depuis le XIXe siècle à l'occasion de prospections et d'effectuer un relevé précis des structures encore visibles avant une campagne de sondages archéologiques permettant enfin de reconnaître précisément la vocation et la datation de ces fameux retranchements. LE DEBUT DE L'AGE DU FER (après 800 avant notre ère) Les traditions de l'âge du Bronze perdurent encore au premier âge du Fer. Tant et si bien qu'il est presque impossible dans l'ouest de la France de distinguer le Hallstatt ancien (au VIIe siècle avant notre ère) du Bronze final. Cette période est toutefois marquée par l'amplification du phénomène des dépôts d'objet, en particulier du dépôt des haches à douille dites armoricaines. Le territoire de la Hague a livré plusieurs dépôts de ce type : - à Beaumont-Hague et Eculleville d'après les cartes de répartition proposée par J. Briard et reprises par R. Lerouvillois (Lerouvillois, 1999) ; - à Gréville-Hague "Landemer" (sur la propriété de M. Leconte), une hache a été découverte en 1903(Voisin, 1908, p. 70 ; Harmois, 1911, p. 180) - à Gréville-Hague, un dépôt a été mis au jour avant 1828 (Gerville, 1828, p. 282 ; Coutil, 1895, p. 120 ; Lerouvillois, 1999, p. 118) - à Vauville "La terrasse", un dépôt a été découvert en 1788 (Pontaumont, 1856, p. 227 ; Voisin, 1900, p. 66) - à Vauville "Château de Milleharts", un second dépôt (peut être confondu avec la mention plus haute) aurait été trouvé dans les même année (Gerville, 1854, p. 217; Voisin, 1900, p. 66) - à Tonneville "Lande de Bigard", un dépôt d'une trentaine de haches à douille a été découvert en 1863 en extrayant des blocs pour la digue de l'anse Saint-Anne, (dont des type Couville conservés au Musée des Antiquités à Rouen; Pontaumont, 1856, p. 225 ; Verron, 1971, p. 77; fig. 12) - et enfin à Sainte-Croix-Hague, un dépôt d'une centaine de haches à douille ont été mis au jour dans une céramique "en forme de cruche" (de Gerville, 1828, p. 282) "près du menhir de l'epinette à la limite de Vauville", (dont au moins une de type Trehou conservé au Musée E. Liais à Cherbourg, n 7750/1350 ; fig. 12). Il est intéressant de noter que l'ensemble de ces découvertes est localisé à l'extérieur de la zone délimitée par le Hague Dike. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES Ce tour d'horizon des principales découvertes de l'âge du Bronze et du début du premier âge du Fer de la Hague a bien mis en exergue la qualité des informations encore disponibles sur cette région qui jusqu'à aujourd'hui n'avait jamais fait l'objet d'un véritable travail de synthèse. Tout au long de la période on voit un territoire se construire autour d'une frontière physique et anthropique : le Hague Dike. Il importe maintenant de compléter ces données par de nouvelles reconnaissances de terrain sous la forme de prospections et de relevés puis de sondages archéologiques, permettant de caler dans le temps la plupart des monuments et occupations de la presqu'île. Ce travail, de longue haleine, permettra, à terme de proposer une restitution phase par phase des modalités de fonctionnement du territoire et de ces réseaux. 105

106 L Age du Bronze dans la Hague : de la fin du III ème millénaire au début de l Age du Fer BIBLIOGRAPHIE ARBMAN H., Le Hague-Dike, les fouilles en 1951 et in. Meddelanden frân lunds Universitets Historiska Museum, Bulletin de la Société Royale des Lettres de Lund, année , Lund, 1953, p CHANCEREL A., GHESQUIERE E., MARCI- GNY C et VERRON G, Le site Néolithique moyen II des "Treize vents" à Herqueville (Manche), Bulletin de la Société Préhistorique Française, 1996, t. 93, n 2, p BOÜARD (de) M., La Hague, camp retranché des Vikings?, Annales de Normandie, n 3, Caen, 1953, p BOÜARD (de) M., Le Hague Dike, Cahiers Archéologiques, t. VIII, Paris, 1956, p BLANCHET J.C., Les Premiers métallurgistes en Picardie et dans le Nord de la France. Mémoires de la Société Préhistorique Française, 17, BRIARD J., A propos des relations de la Bretagne et de la Normandie au Bronze ancien. Bulletin de la Société préhistorique française, LV, 1958, BRIARD J., Les tumulus d'armorique, L'Âge du Bronze en France-3, Paris, Picard ed., BRIARD J. et MOHEN J.P., Typologie des objets de l'âge du Bronze en France, Fasc. I : Épées. Paris, Société Préhistorique française ed., BRIARD J., ONNEE Y. et VEILLARD J.Y., L'Âge du Bronze au Musée de Bretagne, Rennes, Musée de Bretagne ed., BRIARD J. et VERNEY A., L'Âge du Bronze ancien de Bretagne et de Normandie: actualité. in: Cultures et Sociétés du Bronze ancien en Europe, Actes du 117e Congrès National des Sociétés Savantes (Clermont-Ferrand, 1992), Paris, C.T.H.S. ed., 1996, p COUTIL L., Inventaire des découvertes d'archéologie préhistorique en Normandie. Département de l'orne - Département de la Manche. Bulletin de la Société Normande d'études Préhistoriques, III, 1895, p DIVRY A., Hache de Bronze trouvée à Vauville, canton de Beaumont-Hague (Manche). Bulletin de la Société Normande d'études Préhistoriques, T XXIX, , p. 93. EMMANUELLI F., Le Hague-Dicke, Revue de Cherbourg et de Basse-Normandie, t. 1, 1906, Cherbourg, p et GERVILLE (de) C., Notice sur quelques objets d'antiquité douteuse, d'une origine incertaine, découverts dans le département de la Manche. Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, T IV, , p GERVILLE (de) C., Tumuli du promontoire de la Hague (communication du 12 novembre 1831), Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, t. VI ( ), p GERVILLE (de) C., Recherches sur le Hague-Dike et les premiers établissements militaires des Normands, Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, t. 6, années 1831, 1832 et 1833, Caen, 1834, p GERVILLE (de) C., Études géographiques et historiques sur le département de la Manche. Cherbourg, Feuardent ed., GHESQUIERE E. et MARCIGNY C., Le silex à l'âge du Bronze. L'industrie lithique Age du Bronze du site de l'île Tatihou a Saint-Vaast-la-Hougue (Manche), Revue Archéologique de l'ouest, n 14, p HARMOIS A.L., Inventaire des cachettes de l'âge du Bronze dans le département de la Manche. L'Homme préhistorique, IX, 1911, p LE CHANTEUR de PONTAUMONT E., Notes historiques et archéologiques sur les communes de l'arrondissement de Cherbourg, Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, t. XXII (année 1856), p LEMIERE R., Compte-rendu des travaux exécutés sur les Landes de Jobourg par MM. Lemière et Bogard, Bulletin du Groupe de Recherches Archéologiques du Cotentin, Décembre 1989, n 5, p LEPAUMIER H., Digulleville " Les Monts ", Direction Régionale des Affaires Culturelles de Basse- Normandie, Service Régional de l'archéologie, Bilan 106

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109 L'AGE DU FER DANS LA HAGUE : le site d'urville-nacqueville (Manche) Cyril MARCIGNY et Emmanuel GHESQUIÈRE Avec la collaboration de Jean-Marc YVON d après les trvaux de Corinne PEUCHET-GEILENBRUGGE La période du second âge du Fer (450 à 20 avant notre ère) n'a pas fait l'objet cette année d'un inventaire complet. L'équipe en charge de la protohistoire a préféré focaliser son attention (et son énergie) sur un des sites les plus emblématiques de la région : Urville-Nacqueville "Batterie Basse", dont une grande partie du mobilier est conservée au Musée E. Liais de Cherbourg (une autre partie est conservée au Musée de l'homme, Paris ; collection Vayson de Pradenne issus des fouilles de Rouxel). Cet habitat fréquenté du IIe siècle avant notre ère à l'époque romaine est actuellement en position d'estran et offre l'intérêt, grâce à sa situation en milieu humide, de présenter une conservation totale et exceptionnelle de tous les types de matériaux (mobiliers, bois, graines, pollens, ). LOCALISATION Actuellement le gisement de la Batterie Basse est situé sur la plage sableuse de la Baie de Nacqueville. Le site est recouvert par les hautes mers et découvre à marée basse sous une épaisse couche de sable. Al'âge du Fer, le site était implanté dans une plaine littorale, au pied de la falaise que constitue, plus à l'ouest, le plateau de la Hague. Des observations géomorphologiques et palynologiques réalisées il y a une trentaine d'année par le Centre de Géomorphologie de Caen ont livré un spectre pollinique caractéristiques des marais maritime du Subatlantique ; cette datation a été confirmé par une mesure d'âge par le méthode du 14C qui a donné 2130+/-150 ans BP, soit 550 avant JC à 250 de notre ère (Doré, 1987, p ). 109

110 L Age du Fer dans la Hague : le site d Urville-Nacqueville HISTORIQUE DES RECHERCHES Signalé depuis le XIXe siècle, le site de Nacqueville livrait à chaque grande tempête de nombreux objets archéologiques témoignant d'une fréquentation des lieux à l'époque gauloise et romaine. On dénombrait dès 1870, de nombreux fragments de poteries, des outils en fer, et des ossements d'animaux en grand nombre (Bonissent, 1870 ; Geufroy, 1868). Les découverte les plus nombreuses seront faites, à la même époque, à l'occasion de la construction d'un bastion d'angle à l'est du fort militaire. Delambre, lors de ces travaux, identifie une vaste occupation protohistorique dans un milieu tourbeux et récolte les premières traces du travail du lignite (Delambre, 1878 ; Voisin, 1890). Au début du XIXe siècle, R. Feuardent puis G. Rouxel effectuent une surveillance assidue du site qui débouchera sur une fouille à partir de 1911 (Rouxel, 1910a et b, 1911 a et b, 1912, 1913 et 1924). Lors de cette première véritable exploration du site Rouxel porte une attention particulière aux pieux en bois parfaitement conservés permettant de lire les plans des bâtiments. La fouille "d'une maison à trois pièces" est ainsi effectuée. Cette dernière a livré de nombreux éléments de la chaîne opératoire du travail du lignite : du bloc juste dégrossi au bracelet (fig. 1). Les chercheurs de l'époque sont alors frappés par la conservation exceptionnelle des matériaux sur le site, en particulier les matières organiques qui font dans la plupart des cas défaut aux sites en position "terrestre". Le site retombe un petit peu dans l'oubli jusqu'aux années soixante. A cette époque, R. Lemière, correspondant de la Circonscription des Antiquités (ex. Service Régional de l'archéologie), assure une surveillance régulière de la zone et rédige de nombreux compte rendu conservés dans les archives Lemière déposées à la Direction Régionale des Affaires Culturelles. Les informations Gallia Préhistoire et Gallia se font l'écho de ces travaux : l'époque romaine est représenté par de nombreuses concentrations de mobiliers interprétées comme des dépotoirs, et, le second âge du Fer par un "mur en fascines", une palissade et une cabane circulaire de 8 m de diamètre. Un certain nombre de découvertes concernent également le domaine funéraire, puisque des ossements humains sont fréquemment découverts (dont des inhumations en cuve monoxyle ; de Boüard, 1969) ainsi qu'une urne cinéraire. Au début des années quatre-vingt-dix, le réexamen des sites de l'âge du Fer par l'équipe dirigé par C. Peuchet-Geilenbrügge permet de "redécouvrir" le site de Nacqueville. En 1992 les collections du Musée E. Liais sont triées et font l'objet d'une analyse détaillée sous la forme d'un inventaire. Deux sondages sont ensuite réalisés en septembre 1994, à l'emplacement des découvertes anciennes, pour évaluer le potentiel archéologique du site 110

111 (Peuchet-Geilenbrügge et al., 1994). Cette première approche confirme les observations faites depuis le XIXe siècle et met en évidence le potentiel extraordinaire du site, en particulier la conservation exceptionnel de la totalité des vestiges (organiques ou non) issus des niveaux protohistoriques datés des IIe et Ier siècles avant notre ère. En 1995, une équipe scientifique franco-anglaise est mise sur pied associant archéologues et spécialistes des paléoenvironnements (Geilenbrügge-Peuchet et al., 1995). La fouille porte alors sur un espace un peu plus vaste de 140 m² qui a permis l'observation d'une partie de l'habitat. Celui-ci parait très bien structuré avec, dans ce secteur, un fossé séparant deux unités d'habitation. En 1996, une nouvelle demande est formulée auprès de l'etat pour poursuivre les fouilles, cette opération ne se réalisa pas. L'OCCUPATION DES IIe et Ier siècle avant notre ère : les fouilles de 1994 et 1995 La fouille menée par l'équipe de C. Peuchet-Geilenbrügge a permis l'analyse de deux secteurs bâtis de chaque côté d'un fossé (Peuchet- Geilenbrügge et al., 1994 et Geilenbrügge-Peuchet et al., 1995 ; fig. 2). Une des constructions est un bâtiment circulaire qui renvois à des comparaisons de l'autre côté de la Manche, au sud de l'angleterre. De l'autre côté du fossé, le sol d'un (ou de plusieurs) bâtiments est conservé, les fondations sur poteaux en bois étaient encore bien visible. Le fossé, profond de plus d'un mètre (autour de 1,40 m), a livré de nombreux restes végétaux témoignant des pratiques agraires réalisées à proximité du site : litière, végétaux brûlés, Lors de la fouille de C. Peuchet-Geilenbrügge, près de 22 niveaux de comblement différents ont été déterminées. Une étude exhaustive a été menée par cette équipe sur les différentes couches dégagées dans le fossé. Ces données ne sont pas publiées exhaustivement mais quelques indications ont pu être glané ici ou là dans les notes des bilans scientifiques ou dans les résumés d'opération réalisés dans le journal de l'association pour les Fouilles Archéologiques Nationales (Afan infos, n 30, p ar exemple). Le fossé a été selon toute vraisemblance utilisée pour le drainage de l'eau douce. Il a été plusieurs fois curé et s'est régulièrement comblé au rythme de la fréquentation du site. Il a livré lors des fouilles un mobilier conséquent dont une partie est encore stocké au Musée E. Liais. LE MOBILIER ORGANIQUE Le mobilier organique est particulièrement abondant. Les conditions de conservation exceptionnelle ont permis l'observation, depuis les premières fouilles, des bois travaillés ou non, des branches et brindilles, mais aussi des pétioles de fougères ou les tiges de mousses (fig. 3). Les restes carpologiques (les graines et noyaux) sont aussi très bien représentés. Des fragments de noisettes ont, par exemple, été prélevés lors des sondages des années quatre vingt dix. Cette opération a aussi permis l'enregistrement de restes entomologiques avec des pupes d'insectes (Peuchet-Geilenbrügge et al., 1994 et Geilenbrügge-Peuchet et al., 1995). En fin les restes alimentaires, mobilier osseux ou conchylicoles (fig. 3), sont très nombreux. On dénombre pour les espèces animales (consommées ou non) : des écailles et arrêtes de poisson, des mâchoires de campagnol, des suidés, des os d'amphibien, des restes de canidé, de caprinés, de bœufs, de chevaux ou d'oiseaux. LE MOBILIER CERAMIQUE Le mobilier céramique découvert pendant plus d'un siècle de surveillance du site, est abondant et diversifié. Plus d'une centaine de formes sont restituables d'après les éléments encore conservés au Musée E. Liais et au Musée de l'homme. Nous ne détaillerons pas ici ce corpus constitué de formes issues du registre armoricain (dont 90% sont réalisées au tour rapide) et nous renvoyons le lecteur vers l'article de synthèse rédigé par C. Peuchet- Geilenbrügge et H. Morzadec sur les céramiques de Basse-Normandie (2001). Tout au plus peut on signaler que parmi les nombreux vases du site, plusieurs fragments d'amphore ont pu être individualisé. Les plus caractéristiques appartiennent à des amphores italiques Dressel IA daté du IIe siècle avant notre ère (à La Tène C2/D1). 111

112 L Age du Fer dans la Hague : le site d Urville-Nacqueville L'abondance des ébauches de bracelets et perles en lignite a fait connaître le site dès le début du XXe siècle (fig. 5). Ce type d'atelier est particulièrement rare dans l'europe Celtique. Le gisement le plus proche est situé Outre Manche à Hengistbury Head où le lignite provenant des falaises littorales de Kimmeridge dans le Dorset a été exploité et travaillé à la même époque que sur le site de Nacqueville. Il par ailleurs fort probable que le lignite travaillé à Urville- Nacqueville proviennent de la même région du sud de l'angleterre (Peuchet-Geilenbrügge et Morzadec, 2001). Dans l'attente d'analyse plus poussée (analyse pollinique), les relations économiques entre ces deux sites peuvent être proposées à titre d'hypothèse. Un réexamen des différentes pièces techniques encore conservées au Musée E. Liais permet d'observer deux chaînes opératoires différentes dans le travail du lignite et plus particulièrement de l'élaboration des bracelets. La première, et peut être la plus ancienne d'après certains auteurs, est assez primaires ; les palets de lignites sont travaillés à l'aide d'un burin (en os ou en métal) ou d'un couteau (ou ciseau), la partie centrale des palets étant obtenue par grattage. La seconde, plus élaborée, utilise le tour pour usiner les pièces. LES MONNAIES Plusieurs monnaies ont été découvertes sur le site. Au XIXe siècle, un quart de statère en or des Venètes (sud Bretagne) a été trouvé sur la plage. Plus récemment lors des fouilles de C. Peuchet- Geilenbrügge une seconde monnaie en or a été mise au jour, il s'agit d'un globule à la croix attribué aux Sénonais (un autre globule aurait été découvert au XIXe siècle ; fig. 4). LES ACTIVITES ARTISANALES : l'atelier de parures en lignite CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES Le site d'urville-nacqueville semble prendre son essor au cours de La Tène C2/D1, sa position littorale a certainement permis à cet habitat de participer aux relations maritimes, essentiellement axé sur un axe nord-sud, qui se développait à cette époque. La problématique autour des liens commerciaux avec l'angleterre forme donc un des volets les plus importants des études à venir sur le site. Le plan de bâtiment circulaire, le travail du lignite et certaines des formes céramiques renvoies par ailleurs incontestablement aux sites connus de l'autre côté du channel. L'année 2006 sera marqué par un réexamen du mobilier issu des fouilles menées depuis le XIXe siècle. 112

113 BIBLIOGRAPHIE BOÜARD (de) M., Nacqueville, fouilles de Caillaud et Lagnel, juin 1969, in Gallia, tome XXX (1972), fascicule 2, Informations archéologiques, p DELAMBRE A., Note relative aux objets découverts dans les fouilles de la batterie neuve de Nacqueville, en septembre 1878, in Mémoires de la Société Nationale des Sciences Naturelles de Cherbourg, tome XXI (1878), p. 336 à 349. DORE F., Normandie-Maine, Guides Géologiques régionaux, 2e édition, éd. Masson, Paris, 216 p. GEUFROY Rapport sur les fouilles exécutées à Nacqueville [fouilles des 21 et 27 novembre 1868], in Mémoires de la Société Impériale des Sciences Naturelles de Cherbourg, tome XIV (1868), p. 343 à 347. PEUCHET-GEILENBRUGGE C., NAIZET F. et MORZADEC H., Nacqueville, la Batterie Basse. Direction Régionale des Affaires Culturelles de Basse-Normandie, Service Régional de l'archéologie, Bilan Scientifique de la région Basse- Normandie, 1994, Ministère de la Culture, Direction du Patrimoine, Sous direction à l'archéologie ed., 1995, p GEILENBRUGGE-PEUCHET C., NAIZET F. et MORZADEC H., Nacqueville, la Batterie Basse. Direction Régionale des Affaires Culturelles de Basse-Normandie, Service Régional de l'archéologie, Bilan Scientifique de la région Basse- Normandie, 1995, Ministère de la Culture, Direction du Patrimoine, Sous direction à l'archéologie ed., 1995, p GEILENBRUGGE-PEUCHET C. et MOR- ZADEC H., The Iron Age in Lower Normandy : a definition through ceramics, in. Society Settlement in Iron Age Europe, actes du XVIIIe Colloque de l'afeaf, Winchester (April 1994), Ed. J. Collis, Sheffield, p ROUXEL G., 1910a - Découverte d'un statère d'or gaulois dans la baie de Nacqueville, in Mémoires de la Société Nationale Académique de Cherbourg, tome XVIII (1910), p. 162 à 164. ROUXEL G., 1910b - Correspondance : À propos de la lentille en or trouvée à Nacqueville, in Revue préhistorique, tome V (1910), p ROUXEL G., 1911a - Communication sur la station préhistorique de Nacqueville-bas, in Bulletin archéologique du Comité des Travaux Historiques et Scientifiques - Comptes rendus des séances (20 avril 1911) - LXXXVI-LXXXVII. ROUXEL G., 1911b - Un atelier de fabrication d'anneaux en lignite à Nacqueville-bas, in Bulletin de la Société Préhistorique Française, VIII (1911), p ROUXEL G., Station préhistorique de Nacqueville-bas - Un atelier de fabrication d'anneaux en lignite, in Bulletin archéologique du Comité des Travaux Historiques et Scientifiques, Rapports et Communications, année 1912, p. 25 à 33. ROUXEL G., - Vestiges d'habitations protohistoriques dans la baie de Nacqueville - Un atelier de fabrication d'anneaux de schiste (Fouilles de 1912), in Comptes rendus de l'association Française pour l'avancement des Sciences, 41e session, Nîmes - Notes et mémoires, p. 576 à 584. ROUXEL G., Vestiges de cabanes gauloises à Nacqueville-bas - fouilles 1912/14 et 1922, in Mémoires de la Société Académique de Cherbourg, tome XXI, 1923/24, p. 131 à 146. VOISIN A., Les disques en pierre de Nacqueville, in Bulletin de la Société Artistique et Industrielle de Cherbourg, tomes XIII-XIV (1889/90), p. 123 à 126. LEMIERE R., Découvertes archéologiques sur les plages de Nacqueville-Landemer, in Mémoires de la Société Nationale des Sciences Naturelles de Cherbourg, tome LVIII (1979/80), p. 11 à

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115 DEUX ACTIVITES LIÉES A LA MER DANS LA HAGUE DU XIXE SIECLE : l exploitation du varech et la fraude avec l île anglo-normande d Aurigny Gérard FOSSE, Gérard VILGRAIN et Jeannine VILGRAIN La Hague est une région traditionnellement pauvre en raison de son climat et de sa végétation naturelle (lande océanique). La mer et l'estran ont donc été beaucoup sollicités et ont fourni : - des ressources alimentaires : poissons, coquillages, crustacés, collectés à pied lors des grandes marées basses, la pêche en mer n'étant guère attestée avant le XIXe siècle ; - grâce aux naufrages, peut-être parfois provoqués, les épaves ("gravage") utilisées comme bois d'œuvre ou comme combustible ; - les algues marines (varech ou "vré" en langage vernaculaire) ; - de plus, la mer a constitué le support d'une activité illégale, la fraude avec l'île anglo-normande toute proche d'alderney-aurigny. Les prospections et la surveillance systématique de l'érosion littorale, ces dernières décennies, ont permis d'enregistrer des aménagements divers de l'estran (pêcherie, alignements de blocs, viviers, gabion de chasse), dont la fonction échappe parfois ; certains sont plus ou moins anciens, mais non datés précisément dans certains cas, d'autres sont subcontemporains. Mais la majorité des éléments acquis concerne les activités liées à la fraude et à l'exploitation du varech, objets de cette note. L'EXPLOITATION DU VARECH Deux sortes de varech étaient exploités à des fins particulières : - le "p'tit vré" ou "vré à fllies" (Patella vulgata, patelles) ou "vré scié" : il s'agit du Fucus serratus communément appelé feuille de chêne qui recouvre les patelles, qui était scié avec une petite faucille (fâocilloun)à des périodes réglementairement déterminées, et qui était utilisé comme amendement. - le "grand vré" ou "vré de fllot" (flot) ou "vré v'nun" (venu), varech épave parce qu' échoué, 115

116 Deux activités liées à la mer dans la Hague du XIX ème siècle constitué de laminaires (Laminaria) arrachées par la mer aux fonds à peu près toujours immergés, et déposées sur la côte à marée haute, en tempête ; ce varech était utilisé pour l'obtention de la "soude", utilisée dans le cycle de fabrication de l'iode, après combustion dans des "fours" rudimentaires spécifiques. Les activités liées à l'exploitation du varech, et notamment du grand varech, dans la Hague ont pu être étudiées en croisant plusieurs types de sources : iconographie (peintures, cartes postales anciennes, photographies), archives, cadastres anciens, objets, enquêtes ethnographiques et fours à varech. Les enquêtes ethnographiques menées dans les années 1970 auprès des personnes âgées ayant connu ces activités, ont permis de documenter le ramassage du grand varech qui n'était pas réglementé, mais qui était soumis à des usages locaux contraignants, le séchage, le transport près des fours, la combustion, l'écoulement du produit, le volume de la production et sa valeur marchande. La combustion se faisait dans des fours ("founiâos à vré") qui sont régulièrement mis au jour à la faveur de l'érosion littorale ; quelques dizaines d'entre eux, dégagés depuis les années 1970 sur le territoire des communes d'omonville-la-rogue, Digulleville, Omonville? la? Petite, Saint-Germaindes-Vaux et Auderville, ont fait l'objet d'observations et de relevés sommaires, de fouilles dans certains cas. Les fours ont été trouvés, ou bien dans les galets du haut de plage actuelle, ou bien dans la micro-falaise littorale, le plus souvent entre le "chemin des douaniers" (actuel chemin de grande randonnée) et la mer, sur le domaine public maritime, ou bien encore, mais plus rarement, à la base de parcelles littorales privées. Contrairement aux fours de Bretagne (rectangulaires, de plusieurs mètres de longueur sur quelques décimètres de largeur) et à ceux de l'amirauté de Cherbourg au XVIIIe siècle (rectangulaires, de 2m50 sur 1m20 en moyenne), les fours utilisés dans la Hague à la fin du XIXe siècle et au début du Xxe siècle, sont circulaires. Ils sont installés dans des petites fosses peu profondes, dont les parois sont tapissées de blocs anguleux (granites) et le fond de blocs anguleux (granites) ou de galets aplatis (roches diverses). Le diamètre intérieur du four, 116

117 à sa partie supérieure (ouverture de la structure), est compris entre 0m70 et 1m20 ; la profondeur est variable : de 0m30-0m40 à 0m70-0m80 ; le diamètre intérieur à la base est compris entre 0m50 et 1m. Cette petite taille ne justifiait pas, comme en Bretagne, un compartimentage du four avec des blocs de granite. Chaque famille avait son four (parfois ses fours), et, à Saint-Germain-des-Vaux, de nombreuses structures ont pu être attribuées à des familles particulières. On brûlait aux beaux jours, pendant plusieurs semaines, le varech recueilli pendant les tempêtes hivernales. C'était souvent la tâche du grand'père, car, si le four devait être alimenté régulièrement durant toute la journée, il ne s'agissait pas d'un travail physiquement difficile. La combustion devait être lente, sans flamme, et produisait une fumée épaisse et âcre, d'où le nom local de "founé". Le soir, après l'extinction du feu, la pâte issue de la combustion est travaillée, "piffounaée" avec un piffoun" (palette métallique d'un seul tenant avec un 117

118 Deux activités liées à la mer dans la Hague du XIX ème siècle élargissement distal formant une sorte de petite pelle très étroite, longue de 2m et pesant près de 10kg), qui permettait de transformer le produit de la combustion en une sorte de pâte qui durcissait en se refroidissant durant toute la nuit. Le "pain de soude" obtenu était cassé à la masse le lendemain matin, puis stocké dans des "magasins" avant d'être transporté par mer en Bretagne où il était utilisé pour la fabrication d'iode. Les fours à varech se sont éteints définitivement avec la première Guerre Mondiale. LA FRAUDE AVEC L'ILE ANGLO-NORMANDE D'AURIGNY En 1204, la Normandie des ducs devient française et oublie les îles de la Mer de la Manche qui restent à la couronne anglaise. Cet état de fait reste inchangé lors de la signature du traité de Brétigny en 1360 et jusqu'à l'époque actuelle. Mais les îles de la manche, devenues anglo-normandes, sont, malgré ces curiosités de l'histoire, très proches de la Normandie continentale, devenue française, et cette proximité a favorisé, à toutes les époques, les échanges d'hommes, d'écrits clandestins, de denrées Deux époques ont plus particulièrement connu d'intenses trafics clandestins de denrées, bien décrits par Paul Ingouf : - le XVIIe siècle, sous Louis XIV, où les trafics portent, en raison de la politique économique protectionniste de Colbert, principalement sur les textiles, et est le fait de quelques grandes bandes très structurées, telle celle, dans la Hague, du célèbre chevalier de Rantot. - le XIXe siècle, où les trafics portent maintenant principalement sur le tabac et sont le fait de nombreuses petites bandes, peut-être plus organisées cependant que ce que l'on pouvait prévoir. Les sources directes, hormis les archives de la douane et les archives judiciaires qui n'ont pas été exploitées, pour étudier la fraude du tabac au XIXe siècle dans la Hague, sont quasi-inexistantes, ce qui est normal s'agissant d'une activité destinée à rester secrète, car la douane est omniprésente. C'est donc contre toute attente qu'un cahier a été découvert chez un particulier du Cap de la Hague. Ce cahier, tenu de 1869 à 1872 par 2 frères successivement à la tête d'une "société de fraude", indique les dates précises des passages entre le Cap de la Hague et Aurigny, les quantités de tabac rapportées, l'écoulement du tabac à terre, les noms des très nombreux intervenants dans la société, les frais engagés, les sommes gagnées Si l'on présente volontiers maintenant la fraude comme un passe-temps atavique, il semble bien que cette activité, qui ne devait pas être toujours une partie de plaisir (traversée à la voile ou à la rame dans une mer dure, transport à terre dans les falaises, 118

119 plusieurs dizaines de "caches à fraude" dans toutes les communes de la Pointe de la Hague. Les caches sont de deux grands types : - celles qui permettent de stocker du tabac destiné à la consommation familiale sont de petites dimensions ; elles sont aménagées dans le mur de l'habitation ou d'une dépendance et comportaient souvent un pot en terre qui contenait le tabac. risques ), rapportait gros. C'est ce que semblent confirmer les sources orales, qui sont cependant à utiliser avec une extrême prudence quand il s'agit d'histoires proches de la légende, qui opposent toujours un fraudeur rusé à un douanier naïf ("sot douane"). La fraude a laissé de nombreuses traces dans le paysage de la Hague : - du côté de la douane, le "chemin des douaniers" (partiellement l'actuel chemin de grande randonnée), jalonné de petites constructions en pierres sèches (les "gabions", de quelques mètres carrés), maintenant en ruines, parfois restaurées ; les bureaux et les casernes des douanes. - les autres, beaucoup plus grandes, pouvaient contenir des quantités de tabac beaucoup plus importantes (plusieurs ballots de 30 kg) destinées à être écoulées. Elles ont des localisations très variées (dans la cour de la ferme ou dans une dépendance ou complètement isolées dans un champ ou dans la lande). Elles sont isolées, parfois groupées par deux, une seule fois par trois. Le plus souvent, elles s'ouvrent à la base d'un mur, et se développent derrière ce mur séparant deux terrains dénivelés de quelques mètres. Dans le détail, plans au sol, élévations, dimensions sont d'une grande variabilité. Cependant, l'accroissement récent du corpus permet d'entrevoir plusieurs types. Le type le plus fréquent est de plan subcirculaire, les parois en pierres s'élèvent d'abord verticales ou légèrement inclinées, puis forment un dôme monté en encorbellement, avec de une à trois dalles de couverture. D'autres structures, de plans au sol très divers, parfois parfaitement rectangulaires, ont des parois droites. Certaines caches sont creusées dans le socle granitique ou, cas très rare, utilisent un abri sous roche sommairement aménagé en vue de cette utilisation. On peut pénétrer dans toutes ces caches, totalement ou partiellement. Récemment, on a mis en évidence des caches plus petites, accessibles manuellement, souvent à partir de la base d'une niche aménagée lors de la construction d'un mur de maison ou de dépendance. La fraude du tabac entre la Hague et Aurigny n'existe plus. La douane est finalement parvenue à y mettre fin et toutes les sources indiquent une disparition de cette activité à la fin du XIXe siècle. - du côté des fraudeurs, dont les descendants maintenant assez lointains étaient, à une époque encore récente, peu enclins à parler, des contacts patients ont permis de localiser et d'étudier 119

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