Modélisation du rendement électrique des datacenters Par Neil Rasmussen Livre blanc n 113 Révision n 1
Résumé de l'étude Les systèmes de mesure traditionnels du rendement énergétique des datacenters sont souvent inexacts pour les installations réelles. En effet, les estimations des pertes électriques sont typiquement établies en additionnant les inefficacités de divers appareils électriques, tels que les équipements d alimentation électrique et de refroidissement. Ce document montre que les valeurs couramment utilisées pour estimer l inefficacité des équipements sont assez imprécises. Il décrit un modèle simple, plus précis offrant une base rationnelle pour identifier et quantifier les pertes des équipements d alimentation et de refroidissement. 2
Introduction Le coût total de possession (TCO) sur 10 ans d une infrastructure physique dans un datacenter type peut être de 80 000 à 150 000 par baie. La consommation d électricité représente une part importante de ce coût, de l ordre de 20 % 1. Ce n est pas sans intérêt quand on sait qu une grande partie de la consommation électrique est gaspillée (sous la forme d énergie thermique) et qu une proportion significative de ce gaspillage peut être évitée. On estime que, dans le monde, les datacenters consomment 40 000 000 000 kw/h d électricité par an. La réduction des pertes associées à cette consommation est une question de politique publique significative en même temps qu un souci financier majeur pour les opérateurs de datacenters. 2 ~ Les modèles simplistes de rendement des datacenters sous-estiment le gaspillage électrique dans les datacenters. Les possibilités d amélioration du rendement sont donc bien plus importantes qu on ne le croit généralement. Ce document présente un modèle amélioré qui permet une estimation plus exacte des pertes dans les datacenters et suggère des possibilités d amélioration de l efficacité énergétique. Qu entend-on par «rendement des datacenters»? Le rendement de tout appareil ou système est le rapport entre la quantité absorbée (électricité, mazout, tout ce qui peut le faire «fonctionner») et le résultat utile désiré. Toute autre chose que le résultat utile est considérée comme du «gaspillage». Ce rapport s exprime généralement en pour cent. Est considéré «utile» tout ce qui constitue le résultat voulu du système, lequel peut dépendre non seulement de la nature de ce dernier, mais aussi de son contexte d utilisation. Par exemple, une ampoule dont la production consiste en 5 % de lumière et 95 % de chaleur peut être considérée comme une ampoule efficace à 5 % ou un calorifère efficace à 95 %, selon qu elle est utilisée pour éclairer une pièce ou pour la chauffer. Le «résultat utile» est tout ce qui a du sens pour le système considéré. 1 Des détails sur les contributeurs du TCO sont donnés dans le Livre blanc APC n 6, Détermination du coût total de possession d'une infrastructure de centre de données et de salle réseau 2 http://www.eei.org/magazine/editorial_content/nonav_stories/2004-01-01-nt.htm (accès le 14 juin 2006). 3
Pour une infrastructure physique de datacenter, l entrée est l'électricité et le résultat utile est l'alimentation de l équipement informatique. Ce document décrit un datacenter comme un système électrique dont «l apport total» est la puissance qu il consomme de l énergie apportée et le «résultat utile» est la puissance de calcul qu il offre, laquelle peut être représentée par la quantité de puissance électrique fournie à l équipement informatique. 3 Rendement des datacenters = Alimentation des charges informatiques Courant d'entrée total du datacenter La Figure 2 illustre ce modèle général de rendement du datacenter. Figure 2 Le rendement des datacenters se définit comme la fraction du courant d entrée fourni à la charge informatique Le courant fourni à la charge informatique est une mesure de la sortie utile du datacenter Datacenter Apport total Total Courant d entrée total du datacenter Datacenter Alimentation IT Charge informatique Calcul Datacenter Résultat utile Datacenter Rendement = Alimentation IT Courant ENTRÉE Datacenter % RÉSULTAT UTILE TOTAL ENTRÉE 3 La relation exacte entre la puissance électrique et les «bits déplacés» sort du cadre de ce document, mais, pour les besoins de notre analyse, la puissance électrique consommée par l équipement informatique est une bonne mesure de la puissance de calcul fournie. Une amélioration de l efficacité par la réduction de la consommation électrique des équipements informatiques eux-mêmes est importante mais n est pas l objet de notre discussion. 4
Si le datacenter était efficace à 100 %, toute la puissance fournie au datacenter serait transmise aux charges informatiques. Dans la réalité, l énergie électrique est consommée de diverses manières par des appareils autres que les charges informatiques, en raison des besoins pratiques de maintenir les équipements informatiques correctement hébergés, alimentés, refroidis et protégés afin qu ils puissent fournir leur puissance de calcul utile. Les appareils non informatiques qui consomment de la puissance du datacenter sont par exemple des transformateurs, onduleurs, câbles, ventilateurs, climatiseurs, pompes, humidificateurs ou systèmes d éclairage. Certains de ces appareils, comme les onduleurs et les transformateurs, sont en série avec les charges informatiques (parce qu ils participent à la trajectoire de l alimentation de ces charges) tandis que d autres, comme les systèmes d éclairage et les ventilateurs, sont en parallèle avec les charges informatiques car ils remplissent d autres fonctions de support dans le datacenter. La Figure 3 illustre ces composants internes de consommation dans le modèle de rendement du datacenter. Figure 3 Détail de la consommation électrique dans le modèle de rendement des datacenters = 5
Les concepts de «résultat utile» et de «pertes» dans le modèle de rendement du datacenter Dans un modèle efficace, les «pertes» sont tout ce qui n a pas été défini comme le résultat utile du système. Clairement, l infrastructure physique du datacenter remplit d autres fonctions utiles que la fourniture d électricité à la charge informatique ce sont les tâches de «support secondaire» à la Figure 3. On pourrait argumenter que le résultat utile de ces sous-systèmes physiques (refroidissement ou éclairage, par exemple) devrait aussi être considéré comme faisant partie du «résultat utile» du datacenter. C est une question de cadre de référence. L objet de l'analyse est le rendement global du datacenter dans la production de son résultat utile, qui est le calcul. Les datacenters ne sont pas construits pour produire du refroidissement, assurer une protection incendie ou effectuer toutes ces autres tâches utiles que l infrastructure physique remplit. Bien que ces produits de l infrastructure physique soient extrêmement utiles pour le fonctionnement interne du datacenter en l aidant à produire et protéger son résultat utile (calcul), ils ne constituent pas en eux-mêmes un «résultat utile» du datacenter, et il n y a pas de raison de croire qu ils doivent consommer de l électricité. Les activités physiques externes à la trajectoire de l alimentation doivent être considérées comme un mal nécessaire pour soutenir les activités de calcul du datacenter par conséquent, dans le modèle de rendement du datacenter, elles sont considérées comme des «pertes» à réduire le plus possible. Toutes doivent être considérées comme un terrain propice aux conceptions alternatives et à l application de technologies nouvelles pour réduire la consommation électrique globale dans le datacenter. Par exemple, il existe des datacenters qui utilisent des méthodes de «refroidissement gratuit», profitant de l air frais extérieur grâce à des techniques telles que les roues thermiques et le refroidissement à l aide d échangeurs de chaleur à plaques. Cela permet de réduire la quantité de puissance électrique dépensée en refroidissement et d augmenter ainsi l efficacité du datacenter. Le «résultat utile» des composants physiques eux-mêmes sera un élément critique abordé plus loin dans ce document, lors de l analyse du rendement individuel composant par composant un cadre de référence à plus petite échelle concernant le rendement au sein du datacenter afin de réduire les inefficacités internes (pertes) dans le modèle plus large du datacenter. Où va la puissance du datacenter? Pratiquement toute la puissance électrique injectée dans le datacenter finit en chaleur. Le diagramme de la Figure 4 illustre les flux électriques et thermiques dans un datacenter type. Il s agit d une analyse de la puissance électrique d un datacenter type haute disponibilité avec un équipement d'alimentation 2N et un équipement de refroidissement N+1 fonctionnant à environ 30 % de la capacité maximale. (Dans ce datacenter, par coïncidence, la charge et le rendement sont tous deux de 30 %, mais ce sont deux notions différentes même si une faible charge et un faible rendement vont de pair, comme on le verra plus loin.) 6
Notez que moins de la moitié de la puissance électrique alimentant un datacenter est effectivement fournie aux charges informatiques. Le datacenter présenté dans cet exemple est efficace à 30 %. Figure 4 Flux de l électricité dans un datacenter type Ce datacenter est efficace à 30 % Opportunités d augmenter le rendement du datacenter Le rendement du datacenter peut être renforcé de 3 manières : 1. En améliorant la conception interne des appareils physiques, afin qu ils consomment moins d électricité en remplissant leur tâche 2. En adaptant la taille des composants de l'infrastructure physique à la charge informatique réelle («rightsizing») afin que les composants fonctionnent avec une plus grande efficacité 3. En développant des nouvelles technologies qui réduisent le besoin d électricité pour alimenter les fonctions de support de l infrastructure physique (telles que les techniques de «refroidissement gratuit» mentionnées plus haut) (Comme nous le verrons, la deuxième solution offre les plus grandes possibilités immédiates d augmentation du rendement du datacenter.) 7
La Figure 5 illustre comment la réduction de la consommation interne augmente le rendement du datacenter. Figure 5 Augmentation du rendement du datacenter Augmentation du rendement des composants Adaptation de la taille des composants à la charge informatique Utilisation de nouvelles technologies = Correction des idées reçues concernant le rendement des datacenters Alors que le rendement des datacenters pourrait se déterminer de manière empirique en additionnant la consommation électrique de tous les équipements informatiques et en divisant le résultat par l apport total du datacenter, la technique habituelle consiste à se baser sur les déclarations de rendement des fabricants pour les grands composants tels que les onduleurs et les climatiseurs. C est peut-être plus facile, mais le résultat donne généralement un rendement nettement surestimé qui masque des informations qui pourraient être utiles pour identifier des opportunités d économiser sur les coûts d électricité. 8
Le rendement d un datacenter, c est plus que le rendement annoncé des composants Les fabricants fournissent des chiffres sur le rendement des équipements d alimentation et de refroidissement. Pour les équipements d alimentation, le rendement est généralement exprimé sous la forme du pourcentage de puissance en sortie par rapport à la puissance en entrée ; pour les équipements de refroidissement, le rendement est Rendement généralement exprimé sous la forme d un paramètre lié appelé «coefficient de performance» le rapport de la chaleur kw Entrée à pleine dissipée à la puissance électrique en entrée. = kw charge Sortie Les valeurs de rendement publiées pour des appareils similaires par différents fabricants ne varient pas beaucoup, ce qui donne l impression simpliste que les pertes de rendement kw d un datacenter peuvent être déterminées en additionnant = chaleur éliminée simplement les inefficacités de divers composants. Hélas, kw Sortie cette approche ne donne pas de résultats précis dans Figure 6 Les fabricants fournissent un seul le cas de datacenters réels. L utilisation des chiffres de chiffre de rendement pour chaque composant. rendement des fabricants pousse les utilisateurs ou concepteurs à surestimer considérablement le rendement - et donc à sous-estimer les pertes des datacenters réels. Coefficient de performance Fausses hypothèses Le Tableau 1 répertorie trois idées reçues courantes qui entraînent des erreurs significatives dans les modèles de rendement des datacenters. Tableau 1 Correction des idées reçues concernant le rendement des datacenters Fausse hypothèse Réalité 1 2 3 Le rendement des composants d alimentation et de refroidissement est constant et indépendant de la charge informatique Les composants d alimentation et de refroidissement fonctionnent à pleine charge ou presque La chaleur produite par les composants d alimentation et de refroidissement est insignifiante Le rendement des composants en particulier les climatiseurs et les onduleurs diminue sensiblement à des charges informatiques moindres. La charge informatique type est sensiblement inférieure à la capacité calculée des composants physiques utilisés La chaleur produite par les composants d alimentation et de refroidissement est une charge de refroidissement importante et doit être incluse dans l analyse de l inefficacité du système de refroidissement Ces graves erreurs se renforcent les unes les autres, en particulier aux faibles charges informatiques types de la plupart des datacenters. Résultat : les pertes électriques des datacenters sont régulièrement sous-estimées d un facteur deux, voire plus. Heureusement, il est possible de construire un simple modèle qui intègre les considérations ci-dessus et fournit des estimations plus fiables du rendement. 9
Modèles améliorés pour le rendement des composants Un modèle amélioré pour le rendement global des datacenters dépend de la précision avec laquelle les composants individuels (ex : onduleurs) sont modélisés. La méthode courante consiste à caractériser les composants d alimentation et de refroidissement avec une simple Fausse hypothèse n 1 valeur de rendement, mais elle ne convient pas dans les installations réelles de datacenters. Le rendement réel d un composant tel qu un Le rendement des composants d alimentation et de onduleur n est pas constant, mais est plutôt fonction de la charge refroidissement est constant et indépendant de la charge informatique. La Figure 7 illustre une courbe de rendement type informatique d un onduleur. 100% Figure 7 Rendement type d un onduleur en fonction de la charge Rendement de l'onduleur 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% % de charge par rapport de la pleine puissance nominale Notez que lorsqu on tend vers des charges très légères, l efficacité de cet appareil tombe à zéro. En effet, certaines pertes, comme les pertes à la logique de contrôle, sont indépendantes de la charge. Cette perte constante indépendante de la charge est connue sous différents noms : perte sans charge, fixe, perditance, à vide ou parallèle. Dans ce document, nous utiliserons le terme de perte sans charge. 10
La Figure 8 présente, sous une autre forme, les mêmes données que la Figure 7. Notez que, à mesure que la charge diminue, la consommation électrique interne de l onduleur (la «perte», représentée par la partie rouge de chaque barre) devient une fraction croissante de la puissance totale, ce qui réduit le pourcentage d efficacité. Cet effet est dû à la partie sans charge de la perte, qui reste identique quelle que soit la charge. Figure 8 Effet de la perte d onduleur interne sur le rendement La plupart des datacenters fonctionnent dans cette plage 80% 75% 60% 0% La perte sans charge est présente même sans charge Consommation électrique interne de l onduleur (perte) 91% Courant fourni à la charge 90% 90% 89% 84% 86% 88% RENDEMENT La partie sans charge de la perte reste constante depuis la pleine charge jusqu à la charge zéro 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% Charge de l'onduleur % de la pleine puissance nominale L onduleur illustré par les données des Figures 7 et 8 pourrait être décrit avec un rendement de 91 %. Cependant, ce chiffre correspond au rendement à pleine charge, autrement dit dans le meilleur scénario. À faibles charges, ce qui est le régime de la plupart des datacenters, la description de cet appareil comme ayant un rendement de 91 % est une grossière erreur par exemple, à 10 % de charge, le même onduleur montre un rendement de 60 % seulement. Un modèle de rendement à un seul paramètre est visiblement inadéquat dans ce cas. Les trois types de pertes d équipement internes Un examen attentif de la Figure 8 révèle que la perte d équipement (partie rouge des barres) augmente avec la charge. Ceci est dû à une perte supplémentaire, s ajoutant à la perte sans charge, qui est proportionnelle à la charge. Il peut même encore s ajouter un composant de perte (qui n est pas évident dans ce graphique) proportionnel au carré de la charge ; ce composant est habituellement négligeable, mais peut réduire le rendement global lorsque la charge devient élevée. 11
Le Tableau 2 présente des valeurs types de ces trois sortes de pertes pour différents types d équipements utilisés dans un datacenter. Les pertes sont additionnées dans la dernière colonne pour déterminer la perte totale du composant. Tableau 2 Pertes électriques types de composants de l'architecture physique, exprimées comme une fraction de capacité nominale du composant à plein charge Composant architecture physique Perte sans charge Perte Perte + + = proportionnelle quadratique Perte totale (paramètre unique) Onduleur 4 % 5 % - 9 % Distribution électrique 1,5 % - 1,5 % 3 % Éclairage 1 % - - 1 % Câblage - - 1 % 1 % Sélection de vitesse - - 0,5 % 0,5 % Groupe électrogène 0,3 % - - 0,3 % Climatiseur 9 % 0 % - 9 % Humidificateur 1 % 1 % - 2 % Refroidisseur 6 % 26 % - 32 % Dans le Tableau 2, on peut voir qu en caractérisant chaque type d appareil avec simplement deux paramètres, il est possible de créer des modèles plus complets pour les composants utilisés dans les datacenters. Notez que les pertes indiquées dans ce tableau sont exprimées sous la forme d un pourcentage de la capacité calculée à pleine charge de l équipement et que, pour les charges réelles inférieures à la pleine charge, le pourcentage de perte changera comme suit : Perte sans charge : Perte proportionnelle : Perte quadratique : Le pourcentage de perte augmente lorsque la charge diminue Le pourcentage de perte est constant (indépendant de la charge) Le pourcentage de perte diminue lorsque la charge diminue Le rendement d un onduleur type présenté aux Figures 7 et 8 ne serait pas modélisé avec précision avec un seul paramètre de rendement, il a été correctement modélisé avec les paramètres de perte sans charge (4 %) et de perte proportionnelle (5 %) du Tableau 2. 12
Effet de la sous-charge sur le rendement des composants La section qui précède explique que le rendement des équipements d alimentation et de refroidissement diminue sensiblement lorsqu ils ne sont pas utilisés à pleine capacité. Cela signifie que toute analyse de rendement d un datacenter doit représenter correctement la charge sous la forme d une fraction de la capacité calculée. Fausse hypothèse n 2 Les composants d alimentation et de refroidissement fonctionnent à pleine charge ou presque Les modèles de rendement simples qui n utilisent qu une seule valeur de rendement pour modéliser les équipements sont insensibles à la charge (le rendement ne change pas avec la charge dans ces modèles). Pourtant, il est un fait que, dans les datacenters moyens, les équipements d alimentation et de refroidissement sont régulièrement utilisés bien en dessous de leur capacité calculée. Il en résulte que ces modèles surestiment nettement le rendement des datacenters réels. Pour chaque type de composant d alimentation ou de refroidissement, il existe quatre raisons pour lesquelles un composant peut ne pas être utilisé à pleine capacité : La charge informatique du datacenter est simplement inférieure à la capacité maximale du système Le composant a été expressément surdimensionné pour offrir une marge de sécurité Le composant fonctionne avec d autres composants similaires dans une configuration N+1 ou 2N Le composant est surdimensionné pour faire face à la diversité de la charge La charge informatique est inférieure à la capacité maximale du datacenter. La recherche est claire : Le datacenter moyen fonctionne à 65 % de moins que sa capacité maximale. Cette situation est décrite plus en détail dans le livre blanc APC n 37 intitulé «Comment éviter les coûts liés au surdimensionnement d infrastructure de centres de données et de salles réseau». Les sections qui suivent montreront que la sous-utilisation explique en grande partie l inefficacité des datacenters. Le composant a été surdimensionné pour offrir une marge de sécurité. Le surdimensionnement des composants est une pratique courante. L idée est d éviter de faire fonctionner les composants à un niveau proche de leur capacité maximale. Il est possible de faire fonctionner des installations à pleine capacité, mais une sous-charge de 10 à 20 % est régulièrement recommandée dans la spécification d installations à haute disponibilité. 13
Le composant fonctionne dans une configuration redondante N+1 ou 2N Il est courant d utiliser des appareils dans une configuration N+1 voire 2N afin d améliorer la fiabilité et/ou pour permettre la maintenance concurrente de composants sans éteindre le système. Dans une telle configuration, la charge informatique est répartie entre plusieurs composants de l'architecture physique, ce qui réduit efficacement la charge des composants. Pour un système 2N, la charge d un composant individuel est inférieure à la moitié de sa valeur maximale. Le rendement d un datacenter est donc fortement affectée par l utilisation des appareils dans une configuration N+1 ou 2N. Le composant est surdimensionné pour faire face à la «diversité de la charge». Cet effet étant subtil, mieux vaut prendre un exemple. Imaginez un datacenter avec une charge de 1 MW soutenue par un onduleur 1,1 MW. Entre l onduleur et les charges informatiques se trouvent 10 tableaux de distribution électrique, alimentant chacun une partie des charges. La question est : quelles sont les valeurs nominales de chacun de ces tableaux de distribution électrique et à quel niveau fonctionnent-ils dès lors pour une charge moyenne? À première vue, il semblerait que si chacun était spécifié à 100 kw, la conception du système serait respectée. En outre, si chaque tableau de distribution électrique fonctionnait à pleine charge, le datacenter pourrait supporter toute la charge. Dans la réalité, cependant, il est quasiment impossible d assurer un équilibre des charges sur les tableau de distribution électrique. La charge d un tableau de distribution électrique particulier est dictée par la nature de l équipement informatique dans le datacenter où se trouve le tableau. En fait, les charges servies par les divers tableaux de distribution électrique dans la réalité varient souvent du simple au double. Si un tableau alimente une section d un datacenter qui est physiquement utilisée à pleine capacité mais qui n emploie pas encore toute la capacité tableau, la capacité restante de ce dernier n est pas utilisable si les 9 autres tableaux sont déjà à pleine charge. Dans cette configuration, la seule façon d assurer la pleine capacité du datacenter est de surdimensionner largement la capacité totale tableau. Le surdimensionnement type de la capacité tableau de distribution électrique est de l ordre de 30 % à 100 %. Comme dans les exemples précédents, ce surdimensionnement affecte le rendement du système. La Figure 9 illustre le besoin d un surdimensionnement des tableaux de distribution électrique pour prendre en charge la diversité de la charge. 14
Notons que le problème qui entraîne le surdimensionnement des tableaux de distribution électrique est aussi à l origine d un surdimensionnement des systèmes de traitement d air. Figure 9 Effet de la diversité de la charge sur le dimensionnement des tableaux de distribution électrique Effet de la chaleur des équipements d alimentation et de refroidissement Une autre grosse erreur dans la définition du rendement des datacenters est l hypothèse selon laquelle la chaleur émise par les équipements d alimentation et de refroidissement (inefficacité) est une fraction insignifiante de la charge informatique et peut donc être ignorée. En fait, la chaleur générée par les équipements d alimentation Fausse hypothèse n 3 et de refroidissement dans un datacenter n est pas différente de La chaleur provenant des celle produite par les équipements informatiques eux-mêmes et composants d alimentation et de refroidissement est insignifiante doit donc éliminée par le système de refroidissement. Cela crée une charge supplémentaire sur le système de refroidissement, d où la nécessité de surdimensionner ce dernier, qui subit dès lors des pertes de rendement supplémentaires. Pour tenir compte correctement de ces pertes, la charge de refroidissement doit inclure à la fois les équipements informatiques et les pertes de tous les équipements d alimentation et de refroidissement situés dans l espace conditionné. 15
Résumé : un modèle amélioré de rendement des datacenters Sur la base de la discussion qui précède, il est possible d élaborer un modèle amélioré de rendement des datacenters. Ce modèle amélioré présente les caractéristiques suivantes : Les composants sont modélisés avec une perte sans charge, plus une perte proportionnelle à la charge et une perte proportionnelle au carré de la charge Il intègre le surdimensionnement pour sous-charger les composants Il intègre la sous-utilisation pour les configurations N+1 ou 2N La charge de refroidissement inclut à la fois la charge informatique et la charge thermique due à l inefficacité des composants internes d alimentation et de refroidissement Pour une installation de datacenter donnée, le modèle fournit une représentation graphique du rendement en fonction de la charge, sachant que les datacenters fonctionnent généralement bien en dessous de leur capacité maximale L implémentation du modèle est simple et suit la procédure générale suivante : Déterminer le degré moyen de surdimensionnement de chaque équipement d alimentation et de refroidissement, compte tenu des facteurs de sous-charge, de diversité et de redondance Déterminer les pertes d exploitation de chaque type de composant d après la charge d entrée, une fraction de la charge nominale pour le type de composant selon le surdimensionnement, la perte sans charge et la perte proportionnelle Déterminer la perte proportionnelle supplémentaire due au besoin en refroidissement des équipements d alimentation et de refroidissement dans le datacenter Additionner toutes les pertes Calculer et dresser un tableau des pertes en fonction de la charge informatique dans le datacenter Un modèle informatique basé sur ces principes a été mis en œuvre pour calculer la consommation d énergie dans la méthodologie APC d analyse du TCO des datacenters, décrite dans le livre blanc APC n 6, «Détermination du coût total de possession d'une infrastructure de centre de données et de salle réseau». 16
Appareils ayant plusieurs modes de fonctionnement Certains sous-systèmes de l'architecture physique (les climatiseurs, par exemple) peuvent avoir plusieurs modes de fonctionnement avec des rendements différents pour chacun. Par exemple, certains climatiseurs offrent un mode économique pour les périodes de faible température extérieure, où le rendement du système est fortement accru. Ces appareils ne peuvent pas être modélisés avec juste une courbe de rendement basée sur le simple modèle à 3 paramètres (perte sans charge, perte proportionnelle et perte quadratique) décrit plus haut. Le modèle de rendement d un appareil multimode recourt à une technique différente. Cette technique est heureusement bien établie et largement utilisée. Les appareils qui basculent entre différents modes d exploitation peuvent être modélisés sur une période étendue à l aide de la technique dite «méthode espace-état». Pour ce faire, on détermine les temps relatifs passés dans les différents modes, puis on calcule une moyenne pondérée de la production du système. Cette technique s applique facilement aux calculs de rendement et de pertes. Pour utiliser le modèle de rendement décrit dans ce livre blanc avec des appareils physiques multimodes, il y a lieu de déterminer d abord les pertes sans charge, proportionnelle et quadratique pour chacun des modes de fonctionnement. Ensuite, on calcule la contribution à la perte globale sur une période étendue en multipliant la perte dans chaque mode par la fraction prévue de temps passé dans ce mode. Par exemple, une description complète d un système à deux modes exigerait trois courbes de rendement : Courbe de rendement en mode 1 Courbe de rendement en mode 2 Courbe de rendement global attendu, d après une hypothèse donnée du temps passé dans chaque mode 17
Le rendement des datacenters réels Munis d un meilleur modèle de consommation électrique des datacenters, nous pouvons produire de meilleures estimations du rendement des datacenters. Sur la base de valeurs types pour les pertes des équipements, la sous-charge, la diversité de la charge, le surdimensionnement et la redondance, on peut développer la courbe de rendement de la Figure 10. Figure 10 Rendement d un datacenter selon le modèle amélioré Rendement électrique 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% Fraction de la capacité d'alimentation utilisée Notez que cette courbe rendement/charge est très différente des estimations basées sur les calculs conventionnels qui utilisent le rendement publié par les fabricants. Une estimation traditionnelle du rendement du datacenter décrit à la Figure 10 donnerait une valeur de 60 à 70 %, indépendamment de la charge. Notez la nette diminution du rendement du datacenter prédite par le modèle amélioré, en particulier à faibles charges, donc dans l état où fonctionnent effectivement de nombreux datacenters. Le modèle montre que, pour des datacenters à très faible charge, les effets de l inefficacité peuvent être spectaculaires. Par exemple, pour un datacenter chargé à seulement 10 % de sa capacité nominale, sur dix watts fournis au datacenter un seul atteint effectivement l équipement informatique. Les neuf watts restants se perdent dans les inefficacités de l infrastructure physique. 18